Division de la Presse et de l'Information

COMMUNIQUE DE PRESSE nº 53/00

13 juillet 2000

Affaire C-423/98

Alfredo Albore

DES IMPÉRATIFS DE DÉFENSE DU TERRITOIRE NATIONAL NE PEUVENT PAS, EN L'ABSENCE DE RISQUES RÉELLEMENT DÉMONTRÉS, JUSTIFIER UNE DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES RESSORTISSANTS DES AUTRES ÉTATS MEMBRES POUR L'ACCÈS À LA PROPRIÉTÉ


La liberté de circulation des capitaux s'oppose à la nécessité pour les seuls ressortissants communautaires non résidents d'obtenir une autorisation administrative pour l'acquisition d'un bien foncier situé dans une zone du territoire national déclarée d'importance militaire

Messieurs HELLER et KRAAS, ressortissants allemands, ont acquis des immeubles à Barano, sur l'île d'Ischia en Italie. Cette zone a été déclarée "d'importance militaire" .

Souhaitant inscrire cet achat au registre foncier italien, ils se sont adressés à son conservateur.

Ce dernier a refusé de satisfaire à leur demande d'enregistrement en se fondant sur une loi italienne qui impose aux acquéreurs étrangers de biens immobiliers, lorsque l'immeuble se situe, notamment, dans une zone déclarée "d'importance militaire", d'obtenir une approbation administrative préalable.

M. Albore, notaire de la vente, a demandé que cette loi, qu'il estime discriminatoire à l'égard des étrangers dans la mesure où elle institue un régime favorable aux Italiens, ne soit pas appliquée.

Le Tribunal de Naples a rejeté cette demande. M.Albore a alors saisi la Cour d'appel de Naples.

Cette dernière, estimant que la législation italienne pourrait, éventuellement, s'avérer contradictoire avec la réglementation communautaire, a décidé de surseoir à statuer et d'interroger la Cour de justice des Communautés européennes sur la compatibilité de la législation italienne avec le droit communautaire.

La Cour rappelle, tout d'abord, qu'il ne peut être dérogé au principe communautaire de liberté d'établissement qu'en invoquant des motifs liés à l'ordre public ou à la sécurité publique. La mesure dérogatoire adoptée doit alors être proportionnée aux risques encourus et ne doit pas constituer un moyen de discrimination arbitraire ou une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux.

L'Italie invoque des justifications liées à la défense du territoire national.

La Cour estime qu'un État membre ne peut pas simplement invoquer des impératifs de défense du territoire national pour justifier une discrimination à l'encontre des ressortissants des autres États-membres pour l'accès à la propriété des immeubles sur le territoire national.

Elle rappelle que les exigences de la sécurité publique ne peuvent justifier des dérogations à la liberté des mouvements de capitaux que dans la mesure où cette législation est appropriée et nécessaire pour atteindre le but recherché.

Ainsi, en cas de risques réels, concrets et graves à l'encontre de la sécurité publique (y compris les intérêts militaires), un État peut adopter de telles mesures, s'il démontre pour chacune des zones concernées, que la mesure en cause est limitée au strict nécessaire .

La Cour n'estime pas disposer d'assez d'éléments pour apprécier la situation de l'Ile d'Ischia. Elle considère, dans ces conditions, qu'il revient à la juridiction nationale de se prononcer sur l'existence ou l'absence de justifications suffisantes qui seraient susceptibles de permettre, au regard du droit communautaire, une discrimination à l'égard des ressortissants non italiens.

Document non officiel à l'usage de la presse - ne lie pas la Cour de justice. Langues disponibles: français, italien.

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