Division de la Presse et de l'Information

COMMUNIQUE DE PRESSE nº 61/00

19 septembre 2000

Arrêt de la Cour dans les affaires C-177/99 et C-181/99

Ampafrance S.A. et Directeur des services fiscaux de Maine-et-Loire (affaire C-177/99)
Sanofi Synthelabo et Directeur des services fiscaux du Val-de-Marne (affaire C-181/99)

CERTAINS FRAIS PROFESSIONNELS LIES AUX DEPENSES DE REPRESENTATION DES ENTREPRISES NE PEUVENT PAS ETRE EXCLUS DU DROIT A LA DEDUCTION DE LA TVA ACQUITTEE EN AMONT


La décision du Conseil du 28 juillet 1989 est invalidée; la Cour ne limite pas les conséquences de son arrêt dans le temps

Les sociétés Ampafrance SA et Sanofi (laboratoires Choay, Millot Solac et Clin Midy) doivent faire face, dans le cadre de leur activité commerciale, à diverses dépenses de logement, de restaurant, de réception et de spectacles. Elles ont déduit la TVA grevant ces différentes dépenses, tant pour leur personnel que pour des tiers (des fournisseurs ou des clients, par exemple).

L'administration fiscale a effectué, conformément au code général des impôts français, des redressements à l'égard de ces deux entreprises et a demandé la restitution de 252.086 FRF à Ampafrance et de 260.524 FRF, 661.796 FRF et 635.422 FRF au groupe Sanofi. Les réclamations introduites par ces entreprises ont été rejetées par les services fiscaux du Maine-et-Loire et du Val-de-Marne.

Les juridictions nationales (Tribunal administratif de Nantes et Tribunal administratif de Melun) saisies des recours contre ces décisions de rejet interrogent la Cour de justice des Communautés européennes sur la validité de la décision du Conseil du 28 juillet 1989 qui autorise la République française à appliquer une mesure dérogatoire à la directive de 1977 harmonisant les législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires en instituant des exclusions du droit à déduction de la TVA s'agissant de certaines dépenses.

La Cour rappelle que le droit à déduction de la taxe payée en amont constitue un des fondements du système commun de TVA mis en place par la directive de 1977. Ce droit à déduction ne peut pas, en principe, être limité et s'exerce immédiatement pour la totalité des taxes ayant grevées les opérations effectuées en amont de l'activité de l'entreprise. Les dérogations à ce droit à déduction ne sont permises que dans des cas expressément prévus par la directive : en effet, toute limitation à ce droit à déduction de la TVA a une incidence sur le niveau de la charge fiscale des entreprises et doit s'appliquer de manière similaire dans tous les Etats membres.

La Cour précise la portée de la décision du Conseil qui a eu pour effet de permettre à la France de taxer, sans droit à déduction, d'une part, les dépenses de réception, de restaurant et de spectacles engagées au profit des dirigeants ou du personnel de l'entreprise à des fins professionnelles et, d'autre part, d'une manière générale, les dépenses de logement, de réception, de restaurant et de spectacles engagées au profit de tiers à l'entreprise.

La Cour examine si cette décision du Conseil respecte le principe de proportionnalité, notamment si les dérogations permises par le Conseil et destinées selon le gouvernement français à lutter contre les risques de fraude ou d'évasion fiscales, sont nécessaires et appropriées à la réalisation de l'objectif qu'elles poursuivent.

La Cour relève, tout d'abord, qu'il est sans doute difficile de différencier la partie privée et la partie professionnelle des dépenses en cause, même lorsque ces dépenses sont engagées dans le cadre du fonctionnement normal de l'entreprise. Si un risque de fraude ou d'évasion fiscales peut justifier l'adoption de mesures particulières, la Cour estime cependant que ce risque n'existe pas lorsqu'il ressort de données objectives que les dépenses ont été engagées à des fins strictement professionnelles.

Or, la Cour considère que la décision du Conseil autorise la République française à refuser aux opérateurs économiques le droit de déduire la TVA grevant des dépenses dont ils seraient en mesure de démontrer le caractère strictement professionnel. Elle autorise ainsi la taxation de certaines formes de consommation intermédiaire, contrairement au principe du droit à déduction de la TVA devant garantir la neutralité de cette taxe.

La Cour estime que des moyens appropriés moins attentatoires à ce principe fondamental sont envisageables ou existent déjà dans l'ordre juridique national et que l'exclusion de la déduction de TVA n'est pas indispensable pour lutter contre la fraude et l'évasion fiscales.

Devant se prononcer, à la demande de la France, sur la limitation des effets dans le temps du présent arrêt, la Cour considère que le principe juridique de confiance légitime, évoqué pour la première fois par un gouvernement à l'appui d'une demande de limitation des effets d'un arrêt dans le temps, ne peut pas être invoqué par ce dernier pour échapper aux conséquences d'une décision de la Cour : la possibilité pour les particuliers d'être protégés contre un comportement des pouvoirs publics fondé sur des règles illégales ne doit, en effet, pas être remise en cause. La Cour ne limite donc pas les effets du présent arrêt dans le temps.

Document non officiel à l'usage des médias, qui n'engage pas la Cour de justice. Langue disponible : français

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Pour de plus amples informations veuillez contacter M. J. M. Rachet, tél. (352) 43 03 3205 fax (352) 43 03 2034.