Division de la Presse et de l'Information

COMMUNIQUE DE PRESSE nº 62/99

14 septembre 1999

Arrêt de la Cour dans l'affaire C-249/97

Gabriele Gruber/Silhouette International Schmied GmbH & Co. KG

LA REGLEMENTATION AUTRICHIENNE QUI PREVOIT LE VERSEMENT A UN TRAVAILLEUR FEMININ DE LA MOITIE DE L'INDEMNITE DE CONGEDIEMENT EN CAS DE DEMISSION APRES LA NAISSANCE D'UN ENFANT, EST CONFORME AU DROIT COMMUNAUTAIRE


La Cour examine la compatibilité de l'article 23bis, paragraphe 3, de la loi autrichienne sur les salariés, avec l'article 119 du traité CE concernant l'égalité de traitement entre travailleurs féminins et travailleurs masculins.

Mme Gruber a travaillé pour l'entreprise Silhouette du 23 juin 1986 au 13 décembre 1995 en qualité d'ouvrière. Elle est mère de deux enfants, nés les 1er octobre 1993 et 19 mai 1995. Elle a pris, après la naissance de chaque enfant, un congé parental de deux ans. Ainsi, elle s'est trouvée successivement, depuis l'automne 1993, sous le régime du congé de maternité (protection avant et après l'accouchement), puis sous celui du congé parental. Confrontée à des difficultés pour la garde de ses enfants tenant à l'absence de structures d'accueil et bien qu'elle ait manifesté son réel désir de poursuivre son activité salariée, elle a mis fin, le 16 novembre 1995, à son contrat de travail afin de s'occuper de ses enfants. A la suite de cette démission ainsi motivée, Silhouette a versé à Mme Gruber l'indemnité de congédiement prévue par la réglementation autrichienne.

Celle-ci stipule, en effet, qu'en cas de cessation d'une relation de travail d'une durée ininterrompue de trois ans, le salarié a droit à une indemnité de congédiement. Cette indemnité n'est toutefois pas due au salarié lorsque ce dernier résilie lui-même le contrat, lorsqu'il démissionne avant la fin du contrat sans "motif grave" ou lorsqu'il est responsable du licenciement avant la fin du contrat. Les "motifs graves" pour lesquels un salarié peut mettre fin à son contrat et percevoir la totalité de l'indemnité de congédiement sont énumérés par la loi.

Une situation est, par exemple, susceptible de constituer un "motif grave", justifiant un départ prématuré du salarié: si le salarié ne peut poursuivre son travail sans atteinte démontrable à sa santé; si l'employeur se rend coupable de sévices ou d'atteintes grossières à l'honneur à l'encontre d'un ouvrier ou d'un membre de sa famille; si l'employeur ou un membre de sa famille incite l'ouvrier ou un membre de sa famille à des comportements illicites ou contraires aux bonnes moeurs; si l'employeur refuse à tort de lui payer le salaire convenu ou viole d'autres dispositions contractuelles importantes.

Le droit autrichien prévoit, en outre, que les travailleurs féminins ont droit, si la relation de travail a duré cinq ans sans interruption, à la moitié de l'indemnité de congédiement lorsqu'elles démissionnent avant terme de leurs contrats après la naissance d'un enfant. Le droit de percevoir cette indemnité de congédiement existe également pour les travailleurs masculins.

Mme Gruber conteste la réduction de l'indemnité de congédiement devant le Landesgericht Linz, en affirmant que sa démission était motivée par des "raisons graves" tenant au manque de structures d'accueil des enfants de moins de 3 ans dans sa région de résidence, le Land fédéral de Haute-Autriche. Mme Gruber prétend qu'elle a droit au paiement de l'intégralité de l'indemnité de congédiement, les dispositions nationales limitant ses droits constituant, selon elle, une discrimination indirecte des travailleurs féminins, prohibée par le droit communautaire.

Estimant que la solution du litige dépendait de l'interprétation de ce principe communautaire, le Landesgericht Linz a décidé de surseoir à statuer et d'interroger la Cour.

La Cour constate qu'une telle réglementation est compatible avec le droit communautaire.

Le droit communautaire établit le principe de l'égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail.

La Cour rappelle tout d'abord que l'indemnité de congédiement relève bien de la notion de "rémunération".

Elle ne constate pas, en revanche, de discrimination directe fondée sur le sexe, le paiement de l'indemnité de congédiement réduite s'effectuant dans les mêmes conditions pour les travailleurs féminins et les travailleurs masculins qui cessent leur relation de travail après la naissance d'un enfant.

La Cour examine ensuite l'existence d'une discrimination indirecte: la réglementation autrichienne sur le droit à l'indemnité de congédiement conduit-elle à désavantager un travailleur comme Mme Gruber par rapport à d'autres travailleurs qui se trouvent dans une situation identique ou analogue à la sienne? La Cour vérifie si l'objet et la cause de la situation dans laquelle se trouvent les travailleurs qui démissionnent pour s'occuper de leurs enfants sont semblables à ceux qui caractérisent la situation des travailleurs qui démissionnent pour des "motifs graves" au sens de la loi autrichienne.

Or la Cour remarque que les situations visées par la réglementation autrichienne ont toutes un rapport avec les conditions de travail dans l'entreprise ou avec le comportement de l'employeur; la poursuite du travail est rendue, dans tous les cas mentionnés, impossible, au point de ne pas pouvoir exiger du travailleur qu'il maintienne sa relation de travail, même pendant le délai de préavis normalement prévu en cas de démission.

Dans ces conditions, Mme Gruber se trouve dans une situation différente de celles visées par la réglementation autrichienne. Il s'ensuit que l'exclusion d'un travailleur tel que Mme Gruber du bénéfice de l'indemnisation plus élevée pour "motif grave", ne constitue pas une mesure indirectement discriminatoire.

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