Division de la Presse et de l'Information

COMMUNIQUE DE PRESSE nº 88/99

28 octobre 1999

Arrêt de la Cour dans l'affaire C-81/98

Alcatel Austria e.a. / Bundesministerium für Wissenschaft und Verkehr [Österreich]

L'AUTRICHE DOIT CHANGER SA RÉGLEMENTATION RELATIVE Á LA PROCÉDURE DE PASSATION DE MARCHÉS PUBLICS


La Cour constate qu'une procédure nationale de passation de marchés publics doit prévoir une procédure de recours en annulation de la décision d'attribution du marché

En vue de l'installation sur les autoroutes autrichiennes d'un système électronique permettant la transmission automatique de certaines données, le ministère fédéral de la Science et du Transport a publié, le 23 mai 1996, un appel d'offres au sens de la directive 93/36/CEE, "portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures". Le marché en cause a été attribué le 5 septembre 1996 à la société Kapsch AG avec laquelle le contrat a été conclu le même jour.

Les autres soumissionnaires, informés par voie de presse, ont introduit, entre le 10 et le 22 septembre 1996, des recours auprès du Bundesvergabeamt autrichien. Le 18 septembre 1996, ce dernier a rejeté les demandes en référé visant à obtenir la suspension de l'exécution du contrat: la loi fédérale (Bundesvergabegesetz, «BVergG») prévoit, en effet, qu'il n'est plus compétent, après la date de l'adjudication, pour rendre des ordonnances en référé. Le Bundesvergabeamt a, par la suite, constaté, le 4 avril 1997, diverses infractions au BVergG (notamment que le marché n'avait pas été attribué au soumissionnaire qui avait fait la meilleure offre).

Selon le droit autrichien, la déclaration d'attribution du marché et la conclusion du contrat sont concomitantes. La décision d'attribuer le marché en tant que telle, c'est-à-dire la décision du pouvoir adjudicateur relative à la personne avec laquelle il veut contracter, n'est pas attaquable. Or, le moment de l'adjudication du marché est déterminant pour le déroulement de la procédure de recours devant le Bundesvergabeamt. Conformément au BVergG, le Bundesvergabeamt est en effet compétent jusqu'à la date de l'adjudication pour rendre des ordonnances de référé et annuler des décisions illégales du pouvoir adjudicateur. Après l'adjudication, le Bundesvergabeamt est seulement compétent pour constater que le marché a été attribué en violation du BVergG, le pouvoir adjudicateur devant par ailleurs, et le cas échéant, indemniser le candidat ou soumissionnaire évincé dans l'hypothèse d'un comportement fautif.

Le Bundesvergabeamt, devant reprendre la procédure après le succès d'un recours contre sa décision devant le Verfassungsgerichtshof, a interrogé la Cour de justice en 1998 sur la compatibilité de la réglementation autrichienne avec la directive communautaire sur les procédures de passation des marchés publics.

Les autorités autrichiennes prétendent que, dans la mesure où le contrat à déjà été entièrement exécuté, il n'y a plus réellement litige. Dès lors, la réponse aux questions posées n'aurait plus aucun intérêt puisque les soumissionnaires ne pourraient obtenir, à ce stade, que des dommages-intérêts. La Cour précise que les questions préjudicielles demeurent pertinentes pour l'étendue d'éventuels dommages-intérêts dus aux soumissionnaires évincés.

Après avoir notamment entendu les gouvernements autrichien, allemand et britannique, la Cour de justice répond au tribunal autrichien que les États membres sont tenus, en ce qui concerne la décision du pouvoir adjudicateur précédant la conclusion du contrat, par laquelle celui-ci choisit le soumissionnaire ayant participé à la procédure de passation du marché avec lequel il conclura finalement le contrat, de prévoir dans tous les cas une procédure de recours permettant au requérant d'obtenir, le cas échéant, l'annulation de cette décision (indépendamment de la possibilité d'obtenir par ailleurs des dommages-intérêts lorsque le contrat a été conclu).

La Cour expose que la directive vise à renforcer les mécanismes existant, tant sur le plan national que sur le plan communautaire, pour assurer l'application effective des directives communautaires en matière de passation de marchés publics, en particulier à un stade où les violations peuvent encore être corrigées. À cet égard, la directive impose aux États membres de mettre en place des recours efficaces et aussi rapides que possible pour que soit assuré le respect des directives communautaires en matière de marchés publics.

L'inexistence de la décision d'attribution du marché public et donc de la possibilité d'un recours en annulation, résultant d'une transposition incomplète de la directive en droit national, ne permet cependant pas au juge national, selon la Cour, d'utiliser directement la directive communautaire pour connaître de tels recours.

La déclaration d'attribution du marché et la conclusion du contrat étant, dans la pratique, concomitantes, il manque, dans un tel système, un acte de droit administratif dont les intéressés peuvent prendre connaissance et qui pourrait faire l'objet d'un recours en annulation, tel que prévu par la directive. Si les dispositions nationales ne peuvent pas être interprétées de manière conforme à la directive, les intéressés peuvent cependant demander, en vertu des procédures appropriées du droit national, la réparation des dommages subis en raison de l'absence de transposition de la directive.

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