Language of document : ECLI:EU:T:2019:248

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

11 avril 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative WS wellpharma shop – Marque nationale verbale antérieure WELL AND WELL – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑403/18,

Pharmadom, établie à Boulogne-Billancourt (France), représentée par Me M.-P. Dauquaire, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Pétrequin et M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Objectif Pharma, établie à Vandœuvre-lès-Nancy (France), représentée par Me A. Nappey, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 23 mars 2018 (affaire R 1448/2017-5), relative à une procédure d’opposition entre Pharmadom et Objectif Pharma,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, I. S. Forrester et E. Perillo (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 2 juillet 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 3 octobre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 27 septembre 2018,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 21 août 2015, l’intervenante, Objectif Pharma, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif représenté ci-après et dont les couleurs revendiquées sont le blanc et le bleu turquoise :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 5, 10, 35 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, en substance, aux produits pharmaceutiques et de parapharmacie, aux appareils chirurgicaux ainsi qu’aux services de recherche dans le domaine pharmaceutique.La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 217/2015, du 16 novembre 2015.

4        La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 217/2015, du 16 novembre 2015.

5        Le 16 février 2016, Pharmadom, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque verbale française antérieure WELL AND WELL no 123929829 déposée le 26 juin 2012 et enregistrée le 19 octobre 2012 pour les produits et services relevant des classes 3, 5, 10, 35 et 44.

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

8        Le 8 mai 2017, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité en estimant qu’il n’existait pas de risque de confusion.

9        Le 4 juillet 2017, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 23 mars 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours a rejeté le recours. Premièrement, elle a considéré que le territoire pertinent pour l’analyse du risque de confusion était la France. Deuxièmement, s’agissant du public pertinent, la chambre de recours a confirmé que les produits en cause s’adressaient aussi bien au grand public qu’aux professionnels de la santé, lesquels feraient preuve, en l’espèce, d’un degré d’attention élevé. Dans un souci d’économie de procédure, la chambre de recours, comme la division d’opposition l’avait fait également, a procédé à l’analyse du risque de confusion en partant de l’hypothèse selon laquelle tous les produits et les services en cause étaient identiques à ceux couverts par la marque antérieure.

11      Troisièmement, s’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a considéré que son élément figuratif dominait l’impression d’ensemble. En ce qui concerne l’élément « well », elle a considéré que, en principe, il n’aurait pas de signification pour le public francophone, mais qu’une partie du public pertinent serait capable de le traduire comme « bon » ou « bien » en ayant ainsi un caractère distinctif faible, au vu des produits en cause. Ensuite, elle a fait valoir que le mot « pharma » serait descriptif de la plupart des produits en cause et aurait également un caractère distinctif faible en ce qui concerne les services concernés. S’agissant du mot « shop », elle a considéré que ce mot basique de la langue anglaise serait compris par le public pertinent comme « magasin » et aurait un caractère distinctif faible. Enfin, en ce qui concerne la lettre « s » située dans la partie supérieure droite, la chambre de recours a considéré que c’était un élément négligeable et que, par conséquent, il serait susceptible d’être ignoré par le public pertinent.

12      La chambre de recours a ensuite soutenu que les signes en conflit ne présentaient qu’une similitude visuelle et phonétique faible. Sur le plan conceptuel, l’élément « wellpharma » n’aurait aucune signification pour le public pertinent. Les signes en cause présenteraient un certain degré de similitude conceptuelle seulement pour la partie du public comprenant « well ».

13      Enfin, en ce qui concerne l’appréciation globale du risque de confusion, la chambre de recours a exclu le risque de confusion en raison des différences phonétiques, conceptuelles et surtout visuelles entre les signes en conflit.

 Conclusions des parties

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter la demande de marque pour l’intégralité des produits et services désignés ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

15      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Considérations liminaires

16      À l’appui du recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. La requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours aurait analysé erronément les signes en conflit et commis, par conséquent, des erreurs d’appréciation sur le risque de confusion.

17      En premier lieu, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

18      En deuxième lieu, selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, le fait que le public pertinent puisse considérer que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement, notamment lorsqu’il existe, à la fois, une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Ces conditions sont par ailleurs cumulatives [voir arrêts du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 32 et jurisprudence citée, et du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

19      En troisième lieu, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques que le consommateur moyen peut avoir des produits ou des services en cause joue, en particulier, un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. En effet, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

20      En quatrième lieu, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

 Sur le public pertinent

21      La chambre de recours a considéré que le territoire pertinent pour l’analyse du risque de confusion était celui de la France et, s’agissant du public pertinent, elle a estimé, en substance, comme indiqué au point 10 ci-dessus, que les produits en cause s’adressaient aussi bien au grand public qu’aux professionnels de la santé, avec un niveau d’attention soit élevé soit allant de moyen à élevé. Il convient, d’ailleurs, de confirmer cette analyse laquelle, au demeurant, n’est pas contestée par la requérante.

 Sur la comparaison des produits

22      La requérante affirme que la chambre de recours aurait « admis » que les produits et services en question étaient identiques. Or, il convient de relever, comme l’EUIPO le fait à juste titre, que dans un souci d’économie de la procédure, la chambre de recours est partie de l’hypothèse selon laquelle tous les produits et les services étaient identiques sans cependant effectuer aucune analyse précise à cet égard.

 Sur la comparaison des signes

 Sur les éléments distinctifs et dominants des signes en conflit

23      S’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a estimé qu’il s’agissait d’une marque figurative constituée par l’élément verbal « wellpharma shop » représenté sur deux lignes au-dessus duquel se trouve un élément figuratif de plus grande taille qui peut être compris « [soit] comme [une] lettre ‘‘w’’ représentée de façon très stylisée, formant une boucle au centre, compte tenu du mot qui le suit, à savoir, ‘‘wellpharma’’ [soit] comme un élément de fantaisie ». Elle a ensuite considéré que cet élément figuratif dominait l’impression d’ensemble produite par la marque demandée et que, même en tant qu’élément purement décoratif, il ne pouvait pas, dans l’analyse du risque de confusion, être négligé, précisément « en raison de son caractère dominant ».

24      En ce qui concerne le petit cercle, entourant la lettre « s », se trouvant à droite de cet élément figuratif, la chambre de recours a considéré, sans avoir été par la suite contestée sur ce point que, du fait de sa petite taille par rapport aux autres éléments dudit signe et de sa position centralisée dans celui-ci, il s’agit d’un élément négligeable étant susceptible d’être ignoré par le public pertinent.

25      S’agissant, ensuite, de l’élément « well », la chambre de recours a considéré que ce mot n’avait, en principe, pas de signification pour le public pertinent, mais qu’une partie de ce dernier, ayant une certaine connaissance de la langue anglaise, serait néanmoins en mesure de le comprendre comme correspondant, en français, à l’adjectif « bon » ou à l’adverbe « bien » en ayant ainsi un caractère distinctif faible. En revanche, pour l’autre partie du public pertinent qui ne comprendrait pas ledit terme, la marque demandée aurait un caractère distinctif normal.

26      Ensuite, s’agissant du mot « pharma », la chambre de recours a considéré que ce terme était descriptif de la plupart des produits en cause et qu’il avait un caractère distinctif faible par rapport aux services concernés. Enfin, s’agissant du mot « shop », la chambre de recours a affirmé que ce terme anglais serait facilement compris par le public pertinent et donc faiblement distinctif par rapport aux produits et services en cause.

27      La requérante estime que, pour l’ensemble du public, ou du moins pour une très grande majorité de ce dernier, l’élément figuratif « hautement stylisé » de la marque demandée ne constituerait qu’un élément purement décoratif. Or, la chambre de recours ayant affirmé que ledit élément figuratif pouvait être compris comme la lettre « w » uniquement par référence à l’élément verbal « wellpharma », elle aurait « nécessairement admis que cet élément verbal détenait une position dominante dans le signe indépendamment de la taille respective des différents éléments ». Selon la requérante, il est par conséquent opportun de « relativiser » l’impact de l’élément figuratif en question, sa taille ne constituant qu’un de critères qui peut être pris en considération pour apprécier le caractère dominant d’un élément se trouvant au sein d’une marque complexe.

28      La requérante affirme, en outre, que l’élément « well » dispose d’un caractère distinctif normal pour le public pertinent, peu importe qu’il soit ou non familiarisé avec l’anglais. À cet égard, elle fait en particulier valoir qu’une décision de la division d’opposition ainsi que plusieurs décisions de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI, France) auraient confirmé que pour le public français pertinent l’élément verbal « well », intégré dans une marque, n’aurait pas de signification précise. En tout état de cause, de l’avis de la requérante, même à supposer qu’une partie significative du public puisse comprendre le mot en question comme « bon » ou « bien », ce mot ne serait pas pour autant descriptif et son caractère distinctif ne passerait pas de normal à faible. En définitive, ce terme resterait parfaitement et normalement distinctif.

29      Ensuite, s’agissant du mot « pharma », la requérante fait valoir qu’il serait descriptif des produits désignés comme indiqué par la chambre de recours, mais, s’agissant des services, il ne serait pas seulement « faiblement distinctif », mais plutôt descriptif. Enfin, s’agissant du mot « shop », la requérante estime que cet élément verbal serait dépourvu de tout caractère distinctif, étant donné que le public français est largement familiarisé avec ce terme qui est immédiatement compris et utilisé par le consommateur lorsqu’il veut désigner le lieu d’achat et de vente au détail des produits qui l’intéressent.

30      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

31      Il convient tout d’abord de relever que l’élément figuratif, placé au centre de la marque demandée, occupe à lui seul la moitié supérieure de l’ensemble du signe. En outre, au vu de l’épaisseur du trait, de sa taille et de son emplacement dans le cadre du signe en cause, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que cet élément figuratif stylisé dominait l’impression d’ensemble de ce signe. Cet élément est en définitive suffisamment caractérisé et original pour que les consommateurs puissent facilement le garder en mémoire.

32      À cet égard, l’éventuelle interprétation dudit élément stylisé comme représentatif de la lettre « w » ou, en revanche, en tant qu’élément de nature purement décorative, ne saurait avoir aucun impact sur le fait qu’il doit être considéré, dans le cas d’espèce, comme étant l’élément dominant de la marque demandée.

33      Ainsi, la chambre de recours n’a pas « nécessairement admis que ce dernier élément [à savoir « wellpharma »] détenait une position dominante dans le signe [en cause] ». Au contraire, en prenant en considération les éléments du signe en cause dans leur ensemble, elle a estimé que, dès lors que l’élément verbal « wellpharma » est positionné en dessous de l’élément dominant, ce dernier pouvait plus facilement être interprété par le public pertinent comme un « w », car le public pertinent serait amené visuellement à faire le lien avec le mot qui suit.

34      Quant aux éléments verbaux « wellpharma » et « shop », s’ils sont, du fait de leur position et de leur taille, visuellement moins accrocheurs pour le public pertinent, ils ne sont pas pour autant négligeables, car ils sont clairement lisibles.

35      Partant, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu que, en l’espèce, l’élément figuratif, qu’il soit perçu comme un élément purement décoratif ou, en revanche, comme un élément symbolisant la lettre « w » stylisée, constituait l’élément dominant de la marque demandée, analysée dans son ensemble.

36      Ensuite, s’agissant des éléments verbaux, il convient de relever que, comme indiqué au point 21 ci-dessus, le public pertinent est composé par le grand public et par les professionnels de la santé. Ces derniers ont, en général, une bonne connaissance de l’anglais et peuvent en tout état de cause facilement comprendre le sens de certains mots, très courants dans le langage de tous les jours, comme c’est le cas des éléments verbaux « well » ou « shop ».

37      Cela est également vrai pour des consommateurs qui, tout en faisant partie du grand public, se tournent, même avec une connaissance linguistique de base, vers des produits concernant le bien-être corporel de la personne. À cet égard, le Tribunal a déjà jugé que le mot « well » pouvait renvoyer au concept de « bien-être » et, s’agissant en particulier de produits et services visant, au sens large du terme, le « bien-être » de la personne, ce type de compréhension semble d’autant plus pertinent [arrêt du 15 décembre 2016, Redpur/EUIPO – Redwell Manufaktur (Redpur), T‑227/15, non publié, EU:T:2016:745, point 49].

38      Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que, pour cette partie du public pertinent, l’élément verbal « well » présentait un caractère distinctif faible alors que, pour le public qui ne comprend pas l’anglais, il avait un caractère distinctif normal.

39      En outre, en ce qui concerne l’élément verbal « pharma », il convient de relever que, s’agissant des produits concernés, ce terme ne peut qu’être descriptif, ce que d’ailleurs la requérante ne conteste pas.

40      S’agissant en revanche des services concernés par les signes en cause, même à supposer que l’élément verbal « pharma » puisse être considéré, dans ce sens, comme étant descriptif, ce que d’ailleurs la requérante soutient, cela ne saurait changer la conclusion à laquelle la chambre de recours est parvenue, à savoir que, en l’espèce, il n’y a pas lieu de faire la distinction entre les produits et les services en cause, car l’élément verbal « pharma » ne sera en tout cas pas perçu comme l’élément dominant ou distinctif des marques en conflit (point 35 de la décision attaquée).

41      S’agissant enfin de l’élément verbal « shop », il convient de relever que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, ce terme anglais, couramment compris par le public pertinent comme indiquant un « magasin », a un caractère distinctif faible par rapport aux produits et services en cause et se rattache précisément au lieu où il est traditionnellement possible de les acheter.

42      De plus, s’agissant des décisions de l’INPI invoquées par la requérante, il convient de relever que l’EUIPO n’est pas tenu par les décisions prises par les offices nationaux en matière de marques et que le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque de l’Union européenne ne devait être apprécié que sur le fondement du règlement 2017/1001. Il ressort en effet d’une jurisprudence constante que les enregistrements d’ores et déjà effectués dans des États membres ne constituent que des éléments qui, sans être déterminants, peuvent seulement être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne [arrêts du 16 février 2000, Procter & Gamble/OHMI (Forme d’un savon), T‑122/99, EU:T:2000:39, point 61, et du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T‑337/99, EU:T:2001:221, point 58].

43      Enfin, s’agissant de la décision de la division d’opposition invoquée par la requérante, il convient de relever que les décisions que les chambres de recours de l’EUIPO sont amenées à prendre en vertu du règlement 2017/2001 relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure [arrêts du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 65, et du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 71].

 Sur la comparaison visuelle

44      La chambre de recours a estimé, en substance, que, nonobstant la coïncidence entre les deux signes en conflit de l’élément verbal « well », ces signes présenteraient, en définitive, une similitude visuelle faible, ces derniers présentant des différences spécifiques caractérisant l’impression visuelle de l’un et de l’autre signe.

45      La requérante soutient, pour sa part, que si l’élément figuratif de la marque demandée, qui occupe une « place centrale et prépondérante » au sein de celle-ci, doit être interprété comme symbolisant la lettre « w », alors il est, dans la marque antérieure visuellement identifiable à deux endroits successifs, précisément au début des deux mots « well ». Elle fait également valoir que, parmi les autres éléments verbaux de la marque demandée, seul l’élément « well » aurait un caractère distinctif.

46      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

47      Il convient de rappeler que rien ne s’oppose à ce que soit vérifiée l’existence d’une similitude visuelle entre une marque verbale et une marque figurative, étant donné que ces deux types de marques peuvent avoir une configuration graphique qui est capable de donner lieu à une impression, de ces deux éléments différents, qui est néanmoins visuellement similaire [voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, EU:T:2005:156, point 43 et jurisprudence citée].

48      À cet égard, il convient en outre de rappeler que, s’il a été déjà jugé que la partie initiale d’une marque peut normalement avoir, sur le plan visuel, un impact plus fort que la partie finale de celle-ci, une telle considération ne saurait valoir, systématiquement, dans tous les cas où il s’agit de procéder à une comparaison visuelle [voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 2007, Trek Bicycle/OHMI – Audi (ALLTREK), T‑158/05, non publié, EU:T:2007:143, point 70 et jurisprudence citée].

49      Or, il y a lieu, en l’espèce, de constater que les signes en conflit présentent, certes, entre eux, une similitude, à savoir la même séquence de lettres « well », mais qu’ils différent, néanmoins, par plusieurs éléments spécifiques.

50      Ils différent, tout d’abord, par l’élément figuratif de la marque demandée qui est, en l’espèce, dominant (voir points 31 et 35 ci-dessus) et qui, de par sa taille et sa stylisation, attire particulièrement l’attention du public. Par ailleurs, même à supposer que cet élément figuratif puisse être interprété comme symbolisant la lettre « w », il ne saurait être considéré, de par ses spécificités graphiques, comme un élément renvoyant, en tant que tel, à l’élément « well and well » de la marque antérieure. En outre, il convient également de prendre en considération le fait que la marque demandée est de forme ronde et de couleur turquoise, ce qui la rend très reconnaissable sur le plan visuel.

51      Ensuite, tandis que l’élément « well » n’est mentionné qu’une seule fois dans la marque demandée, ce même terme est répété deux fois dans la marque antérieure, successivement, avec la conjonction « and » au milieu. Enfin, alors que l’élément verbal de la marque antérieure a une structure lexicale symétrique, à savoir « well and well », la configuration de la marque demandée est caractérisée par une séparation visuelle entre l’élément figuratif et les éléments verbaux placés en-dessous de ce dernier, tels que « pharma » et « shop », et qui, par ailleurs, ne sont pas repris dans la marque antérieure.

52      Dès lors, il convient de relever que la similitude visuelle des deux signes en conflit est limitée à la présence de l’élément commun « well » et à celle de la lettre « w », cette dernière similitude étant valable seulement pour ceux qui interpréteront l’élément figuratif comme symbolisant la lettre « w ».

53      En définitive, les nettes différences entre les signes en conflit, telles que la présence des éléments verbaux supplémentaires « pharma » et « shop » et en particulier celle de l’élément figuratif dominant, sont de nature à atténuer la portée de la seule similitude due à l’élément verbal commun « well ».

54      Par conséquent, c’est à bon droit que la chambre de recours a affirmé que les signes en conflit, pris dans leur ensemble, présentaient, sur le plan visuel, un faible degré de similitude.

 Sur la comparaison phonétique

55      À cet égard, la chambre de recours a estimé que, en ce qui concerne le mot « well », si sa prononciation dans les deux signes en cause est évidemment, la même, cet élément verbal serait toutefois prononcé « well and well » dans la marque antérieure alors que, dans la marque demandée, il serait prononcé comme « doublevé-well-pharma-shop » ou « well-pharma-shop ». Partant, les signes présenteraient une similitude phonétique faible.

56      En premier lieu, la requérante rétorque que l’élément figuratif inséré dans la marque demandée ne saurait être prononcé par le public pertinent, qui l’associerait en effet à un « signe purement figuratif ». En deuxième lieu, elle allègue que le rythme et la structure des signes en conflit seraient similaires, tous deux étant formés de trois parties, dont le mot « well », élément verbal dominant et distinctif, placé « en position d’attaque ».

57      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

58      À cet égard, il convient d’abord de relever que la chambre de recours a pris dûment en compte le fait que les deux signes en conflit commencent, par le même élément verbal, à savoir le mot « well », à supposer que l’élément figuratif dont il s’agit ne devait pas être prononcé ou ne serait pas prononçable.

59      Cela étant, il y a néanmoins lieu de constater, d’une part, que la marque demandée est composée d’autres éléments verbaux, qui ne sont pas présents dans la marque antérieure, tels que « pharma » et « shop » et, d’autre part, que la marque antérieure n’est pas composée uniquement de l’élément « well », mais qu’elle est structurée par la répétition successive dudit mot, à savoir « well and well » qui lui confère un rythme et un son qui lui sont propres.

60      Par conséquent, au vu des différences phonétiques susmentionnées, il convient de constater que les signes en cause sont similaires uniquement à un très faible degré.

 Sur la comparaison conceptuelle

61      La chambre de recours a estimé que l’élément verbal « wellpharma », présent dans la marque demandée, n’avait pas de signification pour le public pertinent, mais qu’il n’était pas exclu qu’au moins une partie de ce public pourrait être en mesure de reconnaître dans cet élément les termes « well » et « pharma » ou, tout au moins, l’un des deux. Ainsi, pour ceux qui ne comprendraient pas l’élément verbal « well », les signes en conflit ne seraient pas similaires alors que, pour l’autre partie du public pertinent pouvant comprendre la signification de l’élément verbal « well », ces signes présenteraient un certain degré de similitude conceptuelle.

62      La requérante soutient, pour sa part, que les signes en conflit partagent le mot « well » qui serait, en substance, le seul élément distinctif pertinent.

63      En l’espèce, il y a lieu de confirmer l’analyse de la chambre de recours, selon laquelle, pour la partie du public pertinent comprenant l’anglais, les signes en cause présentent un certain degré de similitude conceptuelle alors que pour l’autre partie de ce public n’ayant pas une connaissance de cet idiome, ces signes ne sont pas similaires conceptuellement. La requérante, par ailleurs, n’a pas remis directement en cause une telle analyse, se limitant plutôt à faire valoir le caractère distinctif et prépondérant du mot « well ».

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

64      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, les aspects visuel, phonétique ou conceptuel des signes en conflit n’ont pas toujours le même poids et l’importance des éléments de similitude ou de différence entre lesdits signes peut dépendre de leurs caractéristiques intrinsèques [voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, EU:T:2004:293, point 49].

65      En effet, l’appréciation globale du risque de confusion doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants (voir point 19 ci-dessus).

66      Or, il convient de constater que, en l’espèce, les similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles, liées, d’une part, à la présence de l’élément commun « well » et, d’autre part, à l’idée selon laquelle ce mot, lorsqu’il est compris dans sa signification originaire peut renvoyer à la notion de « bien-être », ne compensent pas les différences caractérisant les signes en conflit.

67      Comme cela a été déjà précisé aux points 35 et 52 ci-dessus, ces différences sont dues, en premier lieu, à l’élément dominant de la marque demandée, qui est très stylisé et positionné au centre du signe ainsi que, en deuxième lieu, à la présence d’éléments verbaux supplémentaires tels que « pharma » et « shop » qui ne sont pas reproduits dans la marque antérieure.

68      Par ailleurs, la chambre de recours, tout en n’ayant pas exclu, contrairement à ce que soutient la requérante, qu’une partie du public puisse comprendre la signification du mot « well », qui est commune aux deux signes en cause, et l’associer par conséquent au concept du « bien-être » lié aux produits et services couverts par ces deux signes, a dûment pris en compte, conformément à la jurisprudence, l’impact visuel, la structure et la longueur desdits signes, précisément dans leur ensemble.

69      Au vu des considérations exposées aux points 52, 54 et 60 ci-dessus, il y a lieu de conclure, à l’instar de la chambre de recours, que les différences entre les signes en conflit sont suffisantes pour écarter tout risque de confusion entre les marques en conflit. Le moyen unique invoqué par la requérante n’étant pas fondé, il y a lieu de l’écarter et, partant, de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

70      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

71      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.


2)      Pharmadom est condamnée aux dépens.

Frimodt Nielsen

Forrester

Perillo

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 avril 2019.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      S. Frimodt Nielsen


*      Langue de procédure : le français.