Language of document : ECLI:EU:T:2019:287

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

6 mai 2019 (*)

« Aides d’État – Marché de la réassurance des risques de catastrophes naturelles – Aide sous la forme d’une garantie illimitée de l’État octroyée à la CCR – Décision déclarant l’aide compatible avec le marché intérieur au terme de la phase préliminaire d’examen – Article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE – Recours en annulation – Qualité pour agir – Défaut d’affectation substantielle de la position concurrentielle – Irrecevabilité partielle – Droits procéduraux des parties intéressées – Qualité de partie intéressée – Absence de difficultés sérieuses »

Dans l’affaire T‑135/17,

Scor SE, établie à Paris (France), représentée par Mes N. Baverez, N. Autet, M. Béas et G. Marson, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. B. Stromsky, A. Bouchagiar et Mme K. Blanck, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

République française, représentée initialement par MM. D. Colas, B. Fodda, Mmes E. de Moustier et J. Bousin, puis par MM. Colas, Fodda, P. Dodeller, R. Coesme et Mme de Moustier, en qualité d’agents,

et par

Caisse centrale de réassurance (CCR), représentée initialement par Mes J.‑P. Gunther, A. Giraud et S. Petit, puis par Mes Gunther et Giraud, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision C(2016) 5995 final de la Commission, du 26 septembre 2016, concernant les mesures SA.37649 et SA.45860 mises à exécution par la France, en ce que la Commission y a déclaré compatible avec le marché intérieur la garantie illimitée octroyée à la CCR pour son activité de réassurance des risques de catastrophes naturelles,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović, président, MM. E. Bieliūnas et A. Kornezov (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 10 janvier 2019,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

 Procédure administrative

1        La requérante, Scor SE, a déposé plainte le 6 novembre 2013 auprès de la Commission européenne, au motif que la garantie illimitée accordée par la République française à la Caisse centrale de réassurance (CCR) pour la réassurance des risques de catastrophes naturelles n’était pas rémunérée à un prix de marché et constituait donc une aide d’État illégale et incompatible avec le marché intérieur. Le 9 décembre 2013, la Commission a accusé réception de cette plainte.

2        Afin d’instruire la plainte de la requérante, la Commission a invité cette dernière et la République française à lui fournir de plus amples informations, ce à quoi elles ont déféré.

3        Le 4 février 2015, une première réunion s’est tenue, entre la requérante et la Commission. Le 30 mars 2015, une deuxième réunion a eu lieu, entre la Commission et les autorités françaises.

4        Le 5 juin 2015, une téléconférence a été organisée entre la requérante et la Commission, à la suite de laquelle, dans un premier temps, la requérante a produit des documents complémentaires et, dans un second temps, une demande d’informations a été adressée à la République française.

5        Le 19 octobre 2015 s’est tenue une troisième réunion, entre la Commission et les autorités françaises. Faisant suite à ladite réunion, celles-ci ont produit une note, la requérante ayant elle-même envoyé des documents complémentaires peu auparavant.

6        Une quatrième réunion a eu lieu, le 12 janvier 2016, entre la Commission et les autorités françaises.

7        Le 18 février 2016, une téléconférence a été organisée entre la requérante et la Commission, conduisant à l’envoi de nouveaux renseignements de la part de la requérante.

8        Le 16 juin 2016, une cinquième réunion s’est tenue, entre la requérante et la Commission. À plusieurs reprises au cours du mois de juillet 2016, la requérante a fait parvenir à la Commission des éléments complémentaires.

9        Le 29 juillet 2016, la République française a notifié à la Commission :

–        le régime français d’indemnisation des catastrophes naturelles et la garantie illimitée dont bénéficie la CCR dans ce cadre ;

–        le projet de filialisation des activités de réassurance ne bénéficiant pas de garantie ;

–        le projet de recapitalisation de la future filiale, telle qu’envisagée au tiret précédent, sur la base d’un nouveau plan d’affaires.

10      Le 26 septembre 2016, la Commission a adopté la décision C(2016) 5995 final, concernant les mesures SA.37649 et SA.45860, relatives à la CCR, mises à exécution par la France (ci-après la « décision attaquée »).

 Décision attaquée

11      Dans la décision attaquée, la Commission dépeint comme suit le régime français de réassurance des risques de catastrophes naturelles :

« 4      La CCR est une entreprise publique de réassurance dont l’activité principale concerne la réassurance des risques de catastrophes naturelles en France, activité pour laquelle elle bénéficie d’une garantie illimitée de l’État. L’activité de réassurance des risques de catastrophes naturelles en France n’est toutefois pas la seule pour laquelle la CCR bénéficie d’une garantie illimitée de l’État, les risques exceptionnels de transport, les risques nucléaires et les risques terroristes en France bénéficiant également de garanties d’État.

5      […] La CCR occupe une place prépondérante sur le marché de la réassurance des risques de catastrophes naturelles en France, sa part de marché s’élevant à environ 90 %.

6      Les activités de la CCR de réassurance des risques de catastrophes naturelles s’inscrivent dans le régime français d’indemnisation des catastrophes naturelles, qui résulte de la loi no 82-600 du 13 juillet 1982. Ce système permet de couvrir “les dommages matériels directs […] ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel”. Le droit à l’indemnisation des victimes par les assureurs naît de la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle par arrêté interministériel […]

7      L’ensemble des catastrophes naturelles au sens habituel du terme ne sont en revanche pas couvertes par le régime, les tempêtes étant par exemple exclues. De même certains biens ne sont pas couverts : les biens non assurés mais également les biens agricoles faisant l’objet d’un régime distinct.

8      Le régime français d’indemnisation des catastrophes naturelles se partage en trois volets.

9      Un premier volet aval prévoit une extension de garantie obligatoire, dans le cadre de tout contrat d’assurance “dommage aux biens”, à la couverture des risques de catastrophes naturelles. Cette extension se traduit par un taux de surprime indifférencié, quelle que soit l’exposition aux périls naturels. Ce taux de surprime est fixé par l’État et s’exprime en pourcentage de la prime […]

10      Un second volet amont prévoit un mécanisme facultatif de réassurance. Les assureurs désireux de faire face à l’ampleur de l’aléa économique résultant de ces couvertures peuvent se réassurer auprès de la CCR. Cette réassurance auprès de la CCR ne revêt aucun caractère obligatoire. Ainsi, les assureurs sont libres de ne pas réassurer tout ou partie des risques liés aux catastrophes naturelles, ou encore de faire appel à d’autres réassureurs.

11      La couverture de réassurance offerte par la CCR comporte une quote-part de 50 % des risques (50 % des primes sont rétrocédées à la CCR qui supporte 50 % des risques) complétée par une réassurance en excédent de perte fixé de manière contractuelle […] Un assureur contractant un traité de réassurance avec la CCR peut également choisir de réassurer les risques résiduels auprès d’un autre réassureur […]

12      Enfin, le troisième volet prévoit que la CCR à son tour bénéficie d’une garantie d’État spécifique illimitée en montant et en durée […] Cette garantie intervient lorsque le montant annuel des sinistres indemnisé par la CCR atteint [70-90] % de la réserve spéciale et des provisions d’égalisation que la CCR a constituées pour ce risque. »

12      Dans la décision attaquée, la Commission, après avoir analysé le régime ainsi décrit, premièrement, a constaté que l’État membre concerné avait mis à exécution la mesure mentionnée au point 9, premier tiret, ci-dessus en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, deuxièmement, a estimé ne pas devoir soulever d’objections à l’encontre de ladite mesure dès lors que l’aide d’État qu’elle constituait était compatible avec le marché intérieur en application de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE et, troisièmement, a considéré qu’il n’y avait pas non plus lieu de soulever d’objections s’agissant des mesures décrites au point 9, deuxième et troisième tirets, ci-dessus, puisque celles-ci n’étaient pas constitutives d’une aide d’État.

 Procédure et conclusions des parties

13      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 février 2017, la requérante a demandé au Tribunal d’annuler la décision attaquée en ce que la Commission y a déclaré compatible avec le marché intérieur le régime d’aides résultant de la garantie illimitée octroyée à la CCR pour son activité de réassurance des risques de catastrophes naturelles.

14      Le même jour, la requérante a présenté une demande visant à l’omission envers le public des données figurant dans l’annexe A 17 de la requête, en application de l’article 66 du règlement de procédure du Tribunal.

15      La Commission a déposé le mémoire en défense au greffe du Tribunal le 15 juin 2017.

16      Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement le 19 et le 27 juin 2017, la CCR et la République française ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission. Par ordonnances des 14 et 19 septembre 2017, le président de la septième chambre du Tribunal a admis ces interventions. Les intervenantes ont déposé leurs mémoires et les parties principales ont déposé leurs observations et observations complémentaires sur ceux-ci dans les délais impartis.

17      Dans l’intervalle, par acte déposé au greffe du Tribunal le 17 juillet 2017, la requérante a demandé, conformément à l’article 144, paragraphe 7, du règlement de procédure, que l’annexe A 17 de la requête, contenant des données présentant un caractère confidentiel, ne fût pas communiquée aux intervenantes.

18      Le 21 août 2017, la requérante a déposé la réplique au greffe du Tribunal et, par acte déposé au greffe du Tribunal le 1er septembre 2017, elle a demandé, sur le même fondement, qu’un certain nombre de données figurant dans la réplique, énumérées au point I.2 dudit acte, ne fussent pas non plus communiquées aux intervenantes et, sur le fondement de l’article 66 du règlement de procédure, qu’elles fussent omises envers le public.

19      Elle a, en conséquence, joint une version non confidentielle de la requête et de la réplique aux demandes de traitement confidentiel.

20      Le président de la septième chambre du Tribunal, dans les ordonnances des 14 et 19 septembre 2017, a provisoirement limité la communication de la requête et de la réplique aux versions non confidentielles produites par la requérante, en attendant les éventuelles observations des intervenantes sur les demandes de traitement confidentiel.

21      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 9 octobre 2017, la CCR a contesté les demandes de traitement confidentiel.

22      Le 10 octobre 2017, la Commission a déposé la duplique au greffe du Tribunal.

23      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 16 octobre 2017, la République française a également contesté les demandes de traitement confidentiel.

24      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 30 octobre 2017, la requérante a demandé, sur le fondement de l’article 144, paragraphe 7, du règlement de procédure, que les données figurant au point 20 de la duplique et reprises de la réplique ne fussent pas non plus communiquées aux intervenantes et, sur le fondement de l’article 66 de ce même règlement, que lesdites données fussent omises envers le public.

25      Elle a, en conséquence, joint le même jour une version non confidentielle de la duplique.

26      Par actes déposés au greffe du Tribunal le 22 novembre 2017, les intervenantes ont aussi contesté cette nouvelle demande de traitement confidentiel.

27      Par ordonnance du 22 janvier 2018, Scor/Commission (T‑135/17, non publiée, EU:T:2018:37), le président de la septième chambre du Tribunal a partiellement fait droit à la demande de confidentialité et a réservé les dépens. Le 8 février et le 2 mars 2018 ont été produites par la requérante une version non confidentielle de la requête, de la réplique et de la duplique, conformément à cette ordonnance.

28      Le 20 mars 2018, la requérante a présenté, en application de l’article 66 du règlement de procédure, une demande d’omission envers le public des données figurant au point 16 de ses observations sur le mémoire en intervention de la République française.

29      En application de l’article 106, paragraphe 2, du règlement de procédure, la requérante a présenté, le 18 juin 2018, une demande motivée d’audience de plaidoiries.

30      Le 15 novembre 2018, le Tribunal a interrogé la Commission sur la date à laquelle la République française l’avait informée de son intention d’adopter les mesures mentionnées au point 9, deuxième et troisième tirets, ci-dessus. Le 30 novembre 2018, la Commission a transmis sa réponse au greffe du Tribunal.

31      Par ailleurs, dans la mesure où la requérante a indiqué, dans ses conclusions, demander au Tribunal « d’annuler le point “(i) garantie illimitée octroyée à la [CCR] pour son activité de réassurance des risques de catastrophes naturelles en France” » de la décision attaquée et où cette dernière ne comporte pas un tel point dans les conclusions qui y figurent, mais seulement dans son objet, la requérante a été interrogée, lors de l’audience, sur la question de savoir si ce chef de conclusions pouvait être interprété comme il est indiqué au point 13 ci-dessus, à savoir comme tendant à l’annulation de la décision attaquée en ce que la Commission y a déclaré compatible avec le marché intérieur la garantie illimitée octroyée à la CCR pour son activité de réassurance des risques de catastrophes naturelles.

32      La requérante a répondu par l’affirmative, ce dont il a été pris acte au procès-verbal de l’audience.

33      La requérante conclut donc à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce que la Commission y a déclaré compatible avec le marché intérieur la garantie illimitée octroyée à la CCR pour son activité de réassurance des risques de catastrophes naturelles ;

–        enjoindre à la Commission, en application de l’article 91, sous b), du règlement de procédure, de produire tous documents, courriers et courriels échangés avec la République française, afin de déterminer si elle a envisagé de déclarer ladite garantie incompatible avec le marché intérieur ou a fait part de ses doutes s’agissant de sa compatibilité avec ce dernier ;

–        faire droit à ses demandes d’omission de certaines données à l’égard du public, rappelées aux points 14, 18, 24 et 28 ci-dessus ;

–        condamner la Commission aux dépens.

34      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

35      La République française conclut au rejet du recours.

36      La CCR conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer irrecevables les trois premiers moyens du recours ;

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

 Principes applicables

37      Il convient d’emblée de rappeler que, dans le cadre de la procédure de contrôle prévue à l’article 108 TFUE, deux phases doivent être distinguées. Il y a tout d’abord la phase préliminaire d’examen des aides instituée au paragraphe 3 de cet article, qui permet à la Commission de se former une première opinion sur la compatibilité partielle ou totale de l’aide en cause. Il y a ensuite la phase formelle d’examen visée au paragraphe 2 dudit article, qui ouvre à la Commission la possibilité d’avoir une information complète sur l’ensemble des données de l’affaire (ordonnance du 10 octobre 2017, Alex/Commission, T‑841/16, non publiée, EU:T:2017:724, point 56).

38      Ce n’est que dans cette seconde phase, à savoir la phase formelle d’examen, que le traité FUE prévoit l’obligation, pour la Commission, de mettre en demeure les intéressés de présenter leurs observations (arrêt du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission, C‑521/06 P, EU:C:2008:422, point 33, et ordonnance du 10 octobre 2017, Alex/Commission, T‑841/16, non publiée, EU:T:2017:724, point 57).

39      En l’espèce, cette seconde phase n’a pas été ouverte par la Commission.

40      Lorsque la seconde phase n’est pas ouverte, les personnes intéressées, qui auraient pu déposer des observations durant cette phase, sont dépourvues de cette possibilité. Pour y remédier, il leur est reconnu le droit de contester, devant le juge de l’Union européenne, la décision prise par la Commission de ne pas ouvrir la seconde phase (voir, en ce sens, arrêts du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission, C‑521/06 P, EU:C:2008:422, point 53, et du 12 mai 2016, Hamr – Sport/Commission, T‑693/14, non publié, EU:T:2016:292, point 35). Pour ces motifs, un recours visant à l’annulation d’une décision fondée sur l’article 108, paragraphe 3, TFUE, introduit par un intéressé au sens du paragraphe 2 du même article, est déclaré recevable lorsque l’auteur de ce recours tend, par l’introduction de celui-ci, à faire sauvegarder les droits procéduraux qu’il tire de cette dernière disposition (arrêt du 13 décembre 2005, Commission/Aktionsgemeinschaft Recht und Eigentum, C‑78/03 P, EU:C:2005:761, point 35).

41      Si la qualité particulière de partie intéressée au sens de l’article 1er, sous h), du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 TFUE (JO 2015, L 248, p. 9), liée à l’objet spécifique du recours, est reconnue à une partie requérante, elle suffit à l’individualiser, selon l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, lorsque ledit recours tend à faire sauvegarder les droits procéduraux qu’elle tire de l’article 108, paragraphe 2, TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 48, et du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 44).

42      Sont, notamment, des parties intéressées toute personne, entreprise ou association d’entreprises dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi d’une aide, c’est-à-dire, en particulier, les entreprises concurrentes du bénéficiaire de cette aide. Selon la jurisprudence, il s’agit, en d’autres termes, d’un ensemble indéterminé de destinataires (arrêt du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 63).

43      En revanche, si une partie requérante met en cause le bien-fondé de la décision appréciant la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur, le simple fait qu’elle puisse être considérée comme intéressée au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE ne saurait suffire pour que soit admise la recevabilité du recours. Elle doit alors démontrer qu’elle bénéficie d’un statut particulier au sens de l’arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17, p. 197 et 223). Il en serait notamment ainsi dans le cas où la position de la partie requérante sur le marché serait substantiellement affectée par l’aide faisant l’objet de la décision en cause (arrêts du 11 septembre 2008, Allemagne e.a./Kronofrance, C‑75/05 P et C‑80/05 P, EU:C:2008:482, point 40, et du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 48).

44      S’agissant de la condition tenant à ce que la position de la requérante sur le marché concerné soit substantiellement affectée, la seule circonstance qu’un acte est susceptible d’exercer une certaine influence sur les rapports de concurrence existant sur le marché pertinent et que l’entreprise concernée se trouve dans une relation de concurrence avec le bénéficiaire de cet acte ne saurait suffire. Dès lors, une entreprise ne saurait se prévaloir uniquement de sa qualité de concurrente par rapport à l’entreprise bénéficiaire, mais doit établir, en outre, qu’elle est dans une situation de fait qui l’individualise d’une manière analogue à celle du destinataire de la décision (arrêts du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing, C‑525/04 P, EU:C:2007:698, points 32 et 33 ; du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 49, et ordonnance du 11 avril 2018, Abes/Commission, T‑813/16, non publiée, EU:T:2018:189, point 49).

45      En l’espèce, la requérante présente, à l’appui de la requête, des moyens visant tant le bien-fondé de la décision attaquée que la sauvegarde de ses droits procéduraux. Il convient donc d’examiner la qualité pour agir de la requérante, en premier lieu, pour contester le bien-fondé de la décision attaquée et, en second lieu, pour obtenir le respect de ses droits procéduraux.

 Sur la qualité pour agir de la requérante pour contester le bien-fondé de la décision attaquée

46      En vertu de la jurisprudence rappelée aux points 43 et 44 ci-dessus, pour avoir qualité pour contester le bien-fondé de la décision attaquée, la requérante doit démontrer que sa position « sur le marché » est substantiellement affectée par l’aide faisant l’objet de la décision en cause.

47      La Commission et la CCR soutiennent qu’il s’agit du marché mondial de la réassurance des risques de catastrophes naturelles, tandis que, selon la requérante, ce serait le marché français de la réassurance des risques de catastrophes naturelles.

48      Il y a lieu, dès lors, dans un premier temps, d’identifier ledit marché.

49      Il échet de constater à cet égard que la mesure d’aide déclarée compatible avec le marché intérieur dans la décision attaquée ne peut être engagée, conformément au cadre réglementaire applicable, qu’en ce qui concerne les catastrophes naturelles survenues sur le territoire français. En effet, la garantie octroyée à la CCR ne concerne que les dommages survenus en France, la CCR ne bénéficiant d’aucune garantie d’État pour les dommages survenus ailleurs et éventuellement réassurés auprès d’elle.

50      Si, certes, il ne peut être exclu que le fait de disposer de cette garantie sur le marché français puisse renforcer la position de la CCR sur le marché mondial, la Commission et la CCR ne présentent aucun élément concret susceptible de démontrer que tel est effectivement le cas en l’espèce. Il en découle que, comme le soutient la requérante, l’affectation de sa position doit être appréciée sur le marché français de la réassurance des risques de catastrophes naturelles.

51      Dès lors, il convient, dans un second temps, d’examiner si la requérante a démontré à suffisance de droit que sa position sur le marché ainsi défini était substantiellement affectée par l’aide faisant l’objet de la décision attaquée.

52      Tout d’abord, force est de relever, à l’instar de la CCR, que la requérante n’est pas directement active sur le marché français de la réassurance des risques de catastrophes naturelles, cette activité étant assurée par sa filiale, Scor Global P&C. En effet, d’une part, la requérante n’a pas contesté l’assertion de la CCR à cet égard et, d’autre part, il est vrai que tous les contrats de réassurance qu’elle a joints à l’annexe A 17 de la réplique ont effectivement été conclus par Scor Global P&C et portent son cachet.

53      Néanmoins, premièrement, la requérante fait valoir qu’elle dispose de l’agrément voulu pour exercer son activité de réassureur.

54      Toutefois, cet argument ne saurait suffire à démontrer que sa position sur le marché pertinent est substantiellement affectée par l’aide en cause, dans la mesure où la requérante n’allègue même pas qu’elle envisageait d’entrer elle-même sur ce marché, mais qu’elle en aurait été empêchée à cause de l’aide litigieuse.

55      Secondement, la requérante soutient qu’elle détient à 100 % la filiale Scor Global P&C et que sa position économique serait donc substantiellement affectée en tant que cette filiale est concernée. Or, il y a effectivement lieu de rappeler que la jurisprudence n’exclut pas la possibilité pour une société mère d’avoir qualité pour agir sur la base de l’affectation substantielle sur le marché pertinent d’une filiale détenue à 100 % (voir, en ce sens, arrêt du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C‑33/14 P, EU:C:2015:609, point 110 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 33 et jurisprudence citée).

56      Il convient donc d’examiner si la requérante a démontré à suffisance de droit que la position sur le marché de sa filiale était substantiellement affectée par l’aide litigieuse.

57      À cet égard, il ressort du dossier que la CCR détient environ 90 % du marché concerné, le reste du marché étant détenu par des réassureurs privés, dont la filiale de la requérante. Cette dernière affirme qu’elle détenait entre 0,08 et 0,11 % de ce marché au cours des années 2010 à 2013 (version non confidentielle de la réplique, point 19).

58      Il convient de relever à ce sujet, premièrement, que, selon la jurisprudence, l’affectation substantielle doit être appréciée, en tant qu’elle se rapporte à la qualité pour agir, au jour de l’introduction du recours (ordonnance du 29 mars 2012, Asociación Española de Banca/Commission, T‑236/10, EU:T:2012:176, point 38). Or, les données présentées par la requérante se rapportent aux années 2010 à 2013, alors que le présent recours a été introduit en 2017. Le Tribunal ne dispose donc d’aucune donnée contemporaine à l’introduction du recours.

59      Deuxièmement, même en se fondant sur les chiffres fournis par la requérante, force est de constater que la part de marché détenue par sa filiale est très faible, voire infime. De surcroît, la requérante n’a pas apporté d’élément susceptible d’infirmer les objections de la CCR relatives à la fiabilité même de ces chiffres, remise en cause par le fait qu’« une portion significative des contrats produits [par la requérante] couvre des risques beaucoup plus larges que les seules catastrophes naturelles en France » (observations complémentaires de la CCR, points 11 à 13).

60      Certes, cette valeur fort modeste s’explique, en partie, par le fait que la CCR détient autour de 90 % du marché pertinent. Toutefois, il n’en reste pas moins que les réassureurs privés détiennent autour de 10 % de ce marché. Il en résulte que, en réalité, la filiale de la requérante ne détient qu’un centième environ de la part de marché détenue par les réassureurs privés (0,1 % sur les 10 % restants). Or, cette faible position au sein même de la part de marché détenue par des réassureurs privés ne saurait s’expliquer par la garantie octroyée par l’État à la CCR. En effet, la requérante n’avance aucun argument susceptible d’expliquer pourquoi cette garantie l’aurait empêchée de gagner une part plus importante de la portion du marché déjà conquise par les réassureurs privés.

61      En effet, d’une part, la réassurance auprès de la CCR n’est pas obligatoire, de sorte qu’un assureur reste libre de se réassurer auprès d’un réassureur privé. D’autre part, même les assureurs qui ont conclu un contrat de réassurance avec la CCR restent libres de réassurer auprès de réassureurs privés les soi-disant « risques résiduels ». En effet, ainsi qu’il ressort du point 11 de la décision attaquée, non contesté dans le cadre du présent recours, un assureur ayant conclu un contrat de réassurance avec la CCR peut également choisir de réassurer les risques résiduels – c’est-à-dire les risques conservés dans sa quote-part et non couverts par la réassurance en excédent de perte – auprès d’un autre réassureur. Étant donné que ces risques résiduels ne sont pas pris en charge par la CCR et ne sont donc pas couverts par la garantie de l’État, ainsi que cela a été confirmé lors de l’audience, ladite garantie ne couvre pas la réassurance éventuelle de ces risques. Ainsi, la réassurance desdits risques est, elle aussi, mise en concurrence en dehors de toute intervention directe de la CCR et de la garantie de l’État.

62      Troisièmement, la requérante fait néanmoins valoir, à juste titre, que, selon la jurisprudence, la concession d’une aide d’État peut porter atteinte à la situation concurrentielle d’un opérateur de diverses manières, notamment en provoquant un manque à gagner ou une évolution moins favorable que celle qui aurait été enregistrée en l’absence d’une telle aide (arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 53).

63      Toutefois, l’affectation de la position concurrentielle réclamée doit revêtir un caractère substantiel (arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 52). Or, la requérante n’apporte pas d’éléments de nature à étayer l’allégation selon laquelle l’aide litigieuse aurait provoqué un manque à gagner substantiel ou une évolution substantiellement moins favorable que celle qui aurait été enregistrée en l’absence d’une telle aide. Le seul argument concret à cet égard est celui tiré de la part du marché français détenue par la requérante (ou sa filiale) en ce qui concerne la réassurance non-vie en général ou la réassurance des risques « tempête, grêle et neige » en particulier, part qui serait comprise, pour le premier, dans une fourchette comprise entre [8,5-9,5] % et 11,1 % pour les années 2010 à 2013 et, pour le second, dans une fourchette allant de 10 à 13 % pour les années 2012 et 2013 (version non confidentielle du mémoire en réplique, points 18 à 20).

64      Pourtant, et indépendamment du fait que les chiffres présentés ne sont pas contemporains de l’introduction du présent recours (voir jurisprudence citée au point 58 ci-dessus), la requérante semble présumer que, en l’absence de l’aide litigieuse, la part du marché pertinent détenue par sa filiale évoluerait jusqu’à un pourcentage comparable à ceux indiqués au point 63 ci-dessus, sans pour autant étayer cette présomption. S’il est, certes, concevable que, en l’absence de la garantie – ou si ses modalités d’application avaient été modifiées selon les propositions de la requérante –, la part de marché de cette dernière puisse augmenter, il n’est nullement démontré que cette augmentation permettrait d’atteindre le niveau de la part de marché détenue par la requérante sur le marché français de la réassurance non-vie en général ou sur celui de la réassurance des risques « tempête, grêle et neige » en particulier. En effet, il suffit d’observer à cet égard que, comme cela a été relevé au point 60 ci-dessus, la filiale de la requérante ne détient qu’autour de 1 % seulement (0,1 % sur les 10 % restants) de la portion du marché français de la réassurance des risques de catastrophes naturelles détenue par les réassureurs privés, ce qui tend à démontrer que l’écart entre les parts de marché détenues par la filiale de la requérante sur le marché affecté par l’aide litigieuse, à savoir celui de la réassurance des risques de catastrophes naturelles, et celles détenues par elle sur le marché de la réassurance des risques « tempête, grêle et neige », non affecté par l’aide litigieuse, est dû de façon prépondérante à des facteurs autres que la garantie de l’État.

65      Quatrièmement, la requérante fait valoir, en se référant au point 56 de l’arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, (C‑487/06 P, EU:C:2008:757), que le fait que les autres réassureurs sont affectés de la même manière par l’aide litigieuse est sans pertinence aux fins de l’examen de l’affectation individuelle de la partie requérante. Toutefois, il échet de constater que la requérante fait une lecture erronée et partielle de cet arrêt. En effet, d’une part, la Cour a pris soin d’y rappeler, aux points 48 et 55, une jurisprudence constante selon laquelle la partie requérante ne saurait se prévaloir uniquement de sa qualité de concurrente par rapport à l’entreprise bénéficiaire, mais doit établir, en outre, qu’elle est dans une situation de fait qui l’individualise d’une manière analogue à celle du destinataire ; la partie requérante doit ainsi démontrer qu’elle bénéficie d’un « statut particulier » au sens de l’arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, EU:C:1963:17, p. 197 et 223), ce qui est le cas, notamment, lorsque sa position sur le marché est substantiellement affectée par l’aide faisant l’objet de la décision litigieuse. D’autre part, ce n’est que « [s]i une telle affectation est établie » (arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 56) que, selon la Cour, la circonstance que d’autres concurrents puissent invoquer un préjudice analogue n’est pas un obstacle à la recevabilité du recours.

66      Or, il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la requérante n’a pas établi qu’elle se trouvait dans une situation de fait qui l’individualisait de manière analogue à celle du destinataire, ni qu’elle bénéficiait d’un « statut particulier », sa position sur le marché n’étant pas substantiellement affectée par l’aide faisant l’objet de la décision attaquée.

67      Enfin, la circonstance, avancée par la requérante, qu’elle est l’auteur de la plainte et a activement participé à l’instruction de celle-ci n’est que l’un des facteurs devant être pris en compte sous l’angle de la contestation du bien-fondé de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêts du 28 janvier 1986, Cofaz e.a./Commission, 169/84, EU:C:1986:42, points 24 et 25 ; du 27 avril 1995, ASPEC e.a./Commission, T‑435/93, EU:T:1995:79, point 63, et ordonnance du 7 mars 2013, UOP/Commission, T‑198/09, non publiée, EU:T:2013:105, point 27) et ne suffit donc pas à l’individualiser au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 17 septembre 2015, Mory e.a./Commission, C‑33/14 P, EU:C:2015:609, point 109).

68      Il résulte de ce qui précède que la requérante n’est pas recevable à contester le bien-fondé de la décision attaquée.

 Sur la qualité pour agir de la requérante afin d’obtenir le respect de ses droits procéduraux

69      La requérante estime qu’elle est une partie intéressée au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589 et, en tant que telle, recevable à contester une décision de la Commission refusant d’ouvrir la procédure formelle d’examen. La Commission, la République française et la CCR ne contestent pas la qualité de partie intéressée de la requérante.

70      Il échet de relever que, en effet, en tant, premièrement, qu’elle est l’auteur de la plainte ayant abouti à la notification, par les autorités françaises, des trois mesures mentionnées au point 9 ci-dessus, deuxièmement, qu’elle a activement participé à la procédure préliminaire d’examen et, troisièmement, que sa filiale est l’un des concurrents du bénéficiaire de l’aide dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi de celle-ci (voir jurisprudence citée au point 42 ci-dessus), la requérante a la qualité de partie intéressée au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE et de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589.

71      Il y a donc lieu d’admettre la recevabilité du recours en tant que la requérante invoque la violation de ses droits procéduraux. Il importe, par voie de conséquence, de déterminer quels sont les moyens du recours susceptibles d’être recevables en ce qu’ils visent à établir ladite violation.

 Sur la recevabilité des moyens invoqués

72      La requérante invoque quatre moyens, tirés, le premier, de ce que la Commission a commis une erreur de droit en retenant comme base légale de la décision attaquée l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, le deuxième, de défauts de motivation entachant la décision attaquée, le troisième, de ce que la Commission a méconnu l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, commettant plusieurs erreurs de droit et d’appréciation, et, le quatrième, de la violation de ses droits procéduraux.

73      Le quatrième moyen, qui vise explicitement à obtenir le respect des droits procéduraux de la requérante, est recevable, compte tenu de la qualité de partie intéressée de celle-ci. En effet, la requérante peut invoquer, aux fins de la préservation des droits procéduraux dont elle bénéficie dans le cadre de la procédure formelle d’examen, uniquement des moyens de nature à démontrer que l’appréciation des informations et des éléments dont la Commission disposait ou pouvait disposer, lors de la phase d’examen préliminaire de la mesure notifiée, aurait dû susciter des doutes quant à la compatibilité de cette dernière avec le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêts du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, point 81 ; du 9 juillet 2009, 3F/Commission, C‑319/07 P, EU:C:2009:435, point 35, et du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 59).

74      S’agissant du deuxième moyen, tiré de défauts de motivation entachant la décision attaquée, il convient de souligner que la méconnaissance de l’obligation de motivation relève de la violation des formes substantielles et constitue un moyen d’ordre public, qui doit être soulevé d’office par le juge de l’Union, et ne se rapporte pas à la légalité au fond de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, points 67 à 72). Partant, le deuxième moyen n’étant pas dirigé contre le bien-fondé de la décision attaquée, l’irrecevabilité du présent recours en ce qu’il vise le bien-fondé de celle-ci (voir point 68 ci-dessus) ne s’étend pas audit moyen. Par conséquent, il y a lieu de juger le deuxième moyen recevable, conformément à la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêt du 12 mai 2016, Hamr – Sport/Commission, T‑693/14, non publié, EU:T:2016:292, point 53).

75      En revanche, les premier et troisième moyens visent, selon la présentation même de la requête, à contester le bien-fondé de la décision attaquée et sont donc, en tant que tels, irrecevables, étant donné que la requérante n’a pas qualité pour agir contre le bien-fondé de la décision attaquée.

76      Ainsi, la requérante ne peut invoquer que des arguments de nature à démontrer que l’appréciation des informations et des éléments dont la Commission disposait ou pouvait disposer, lors de la phase d’examen préliminaire de la mesure notifiée, aurait dû susciter des doutes quant à sa compatibilité avec le marché intérieur. À cet égard, certes, l’utilisation de tels arguments ne saurait avoir pour conséquence de transformer l’objet du recours ni d’en modifier les conditions de recevabilité, ce qui implique, notamment, qu’il n’appartient pas au Tribunal, à ce stade de la procédure d’examen d’une aide par la Commission, de se prononcer dans le cadre du présent recours sur l’existence d’une aide ou sur sa compatibilité avec le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêts du 10 février 2009, Deutsche Post et DHL International/Commission, T‑388/03, EU:T:2009:30, point 66, et du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T‑123/09, EU:T:2012:164, point 74).

77      Cependant, sous cette réserve, la requérante demeure en droit, pour démontrer la violation de ses droits procéduraux en raison des doutes que la mesure litigieuse aurait dû susciter quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, d’invoquer des arguments tendant à démontrer que le constat de la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur auquel la Commission était parvenue était erroné, ce qui, a fortiori, est de nature à établir que la Commission aurait dû éprouver des doutes lors de son appréciation de la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur. Partant, le Tribunal est habilité à examiner les arguments de fond présentés par la requérante, afin de vérifier s’ils sont de nature à conforter le moyen expressément formé par elle concernant l’existence de doutes justifiant l’ouverture de la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 13 juin 2013, Ryanair/Commission, C‑287/12 P, non publié, EU:C:2013:395, points 57 à 60).

 Sur le fond

78      Il convient d’examiner d’abord le deuxième moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré de défauts de motivation entachant la décision attaquée

79      Il ressort d’une jurisprudence constante que la portée de l’obligation de motivation dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté. Ainsi, la décision de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE doit uniquement contenir les raisons pour lesquelles la Commission estime ne pas être en présence de difficultés sérieuses d’appréciation de la compatibilité de l’aide concernée avec le marché intérieur et même une motivation succincte de cette décision doit être considérée comme suffisante au regard de l’exigence de motivation que prévoit l’article 296 TFUE si elle fait apparaître de façon claire et non équivoque les raisons pour lesquelles la Commission a estimé ne pas être en présence de telles difficultés, la question du bien-fondé de cette motivation étant étrangère à cette exigence (arrêts du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, points 65, 70 et 71 ; du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 111, et du 12 mai 2016, Hamr – Sport/Commission, T‑693/14, non publié, EU:T:2016:292, point 54).

80      La motivation doit permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin, d’une part, de pouvoir défendre leurs droits et de vérifier si la décision est ou non bien fondée et, d’autre part, de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle de légalité. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (arrêts du 15 juin 2005, Corsica Ferries France/Commission, T‑349/03, EU:T:2005:221, points 62 à 64, et du 16 octobre 2014, Eurallumina/Commission, T‑308/11, non publié, EU:T:2014:894, point 44).

81      En premier lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la Commission ne se serait pas prononcée sur la question de l’absence de rémunération à un prix de marché de la garantie octroyée à la CCR, alors que, dans sa plainte et dans les notes qu’elle a fournies ultérieurement, la requérante aurait souligné cette absence, celui-ci ne saurait prospérer. En effet, premièrement, les points 13 et 14 de la décision attaquée attestent que la Commission s’est penchée sur cette question, en faisant référence aux conventions actuelle et future relatives à la rémunération de l’État par la CCR en contrepartie de la garantie qu’il lui a octroyée. La Commission indique ensuite, au point 41 de la décision attaquée, que « toute garantie qui n’est pas suffisamment rémunérée implique une perte des ressources d’État ». Aux points 47 à 49 de la décision attaquée, la Commission constate que, en l’absence de la garantie illimitée, la CCR ne serait pas en position d’offrir à tous les assureurs en faisant la demande une réassurance en excédent de pertes et que le marché de la réassurance des risques de catastrophes naturelles n’était pas en mesure de fournir une garantie illimitée, ce qui conférait un avantage à la CCR.

82      Il convient donc de constater que, aux points susmentionnés de la décision attaquée, la Commission reconnaît clairement que la garantie n’est pas suffisamment rémunérée et que le marché n’est pas en mesure d’offrir une telle garantie illimitée. C’est sur cette base que la Commission a conclu que la mesure litigieuse impliquait une perte de ressources d’État et conférait un avantage à la CCR. En effet, si la garantie avait été rémunérée à un prix de marché, il n’y aurait pas eu d’avantage et donc pas d’aide.

83      Par conséquent, la motivation de la décision attaquée à cet égard est conforme aux exigences de la jurisprudence rappelée aux points 79 et 80 ci-dessus.

84      Deuxièmement, la requérante semble toutefois insister sur le fait que l’absence de rémunération à un prix de marché « constitue, au-delà de la garantie elle-même, une aide d’État dont la compatibilité avec le marché intérieur doit être contrôlée et appréciée » (point 71 de la requête). Dans la réplique, la requérante est plus explicite, arguant que la Commission aurait dû qualifier d’aide d’État non seulement la garantie « en tant que telle », mais également l’absence de rémunération de celle-ci à un prix de marché, laquelle constituerait, elle aussi, une aide d’État, « indépendamment de la garantie ». La Commission avait donc, estime-t-elle, l’obligation de se prononcer sur ces « deux questions distinctes ».

85      Cet argument ne saurait non plus être accueilli. En effet, d’une part, la Commission n’avait pas à se prononcer sur deux mesures distinctes, à savoir la garantie et sa rémunération, mais sur une seule mesure, à savoir la garantie litigieuse, comportant plusieurs aspects indissociablement liés. La rémunération de chaque garantie est fonction, notamment, du montant de la garantie et de sa durée. Le fait que, en l’espèce, le marché n’est pas en mesure de fournir une telle garantie, quelle qu’en soit la rémunération, s’explique précisément par son caractère illimité tant en ce qui concerne son montant qu’en ce qui concerne sa durée. Il est donc artificiel, de la part de la requérante, de tenter de scinder les différents aspects, de jure et de facto indissociables, de la garantie afin de les présenter comme constituant des mesures d’aide distinctes.

86      D’autre part, contrairement à ce que prétend la requérante, interrogée sur ce point lors de l’audience, il ne ressort pas du dossier qu’elle aurait soutenu, au cours de la procédure préliminaire d’examen, que l’absence de rémunération à un prix de marché de la garantie constituait une aide d’État distincte de la « garantie elle-même ». Si la requérante a effectivement amplement souligné l’absence de rémunération à un prix de marché de la garantie, elle n’a pas soutenu que sa rémunération devait être examinée à part, comme s’il s’agissait d’une mesure séparée. À titre d’illustration, elle mentionne, dans sa plainte, « [l]a conjugaison de l’octroi à titre exclusif de la [g]arantie, de son manque d’encadrement […] et de la très faible rémunération dont elle fait l’objet » et se réfère, par la suite, aux différents aspects de la garantie, tels que son caractère illimité, son champ d’application et sa rémunération, sans pour autant faire valoir qu’il s’agirait de deux mesures d’aide distinctes (annexe A 10, p. 3). Dans ces circonstances, la Commission n’était nullement tenue d’apporter une motivation spécifique sur la prétendue existence de deux mesures d’aide distinctes, l’une constituée par la « garantie en tant que telle » et l’autre par « l’absence de rémunération à un prix de marché » de cette garantie.

87      Troisièmement, quant à l’argument de la requérante selon lequel la Commission aurait omis de tenir compte de l’étude actuarielle présentée par elle au cours de la procédure préliminaire d’examen et versée au dossier (annexe A 21 à la requête), selon laquelle la rémunération de la garantie serait insuffisante à proportion d’un facteur compris entre vingt et trente, il est vrai que la Commission ne la mentionne pas dans la décision attaquée. Toutefois, force est de constater que la Commission n’avait pas l’obligation de se prononcer explicitement sur l’étude actuarielle présentée par la requérante, d’autant plus que, selon la jurisprudence citée au point 80 ci-dessus, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision.

88      En tout état de cause, il convient de relever que cette étude n’était pas directement pertinente pour l’examen de la compatibilité de la garantie litigieuse avec le marché intérieur, de sorte que, pour cette raison également, la Commission n’avait pas l’obligation de fournir une motivation spécifique sur ce point. En effet, la requérante reconnaît elle-même que « la tranche de risques la plus importante, à savoir celle qui est illimitée, peut […] être considérée comme inestimable ; pour toutes les tranches de risques inférieures, il existe […] un prix de marché » (point 38 de la réplique). Il s’ensuit que son étude actuarielle visant à établir un prix de marché repose non pas sur l’hypothèse d’une garantie illimitée, laquelle est, de l’aveu de la requérante, « inestimable », mais sur l’hypothèse d’une garantie pour « les tranches de risques inférieures », ce qui ne correspond pas aux caractéristiques de la garantie litigieuse.

89      En deuxième lieu, s’agissant du reproche selon lequel la Commission n’aurait pas démontré une carence qualitative ou quantitative du marché susceptible de justifier l’intervention étatique sur la base de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, il échet de relever que la Commission n’avait pas à faire la démonstration d’une défaillance du marché, dans la mesure où, selon la jurisprudence, si la preuve d’une défaillance du marché peut constituer un élément pertinent pour déclarer la compatibilité d’une aide d’État avec le marché intérieur, une telle preuve n’est pas une condition indispensable, car, en tout état de cause, il est possible pour un État de justifier une aide par la poursuite d’un objectif légitime d’intérêt général (voir arrêt du 18 janvier 2017, Andersen/Commission, T‑92/11 RENV, non publié, EU:T:2017:14, point 69 et jurisprudence citée).

90      De même, le grief fait à la Commission de ne pas avoir indiqué avec une précision suffisante les régions qui seraient visées par l’aide en cause est voué à l’échec, puisque l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE permet de reconnaître comme compatibles avec le marché intérieur les aides destinées à favoriser le développement de certaines activités ou de certaines régions. Or, il s’agit ici, clairement, d’une aide destinée à favoriser le développement de l’activité de réassurance contre les risques de catastrophes naturelles, et non pas d’une aide à finalité régionale. Par conséquent, il aurait été hors de propos que la Commission précisât quelles régions pouvaient être visées par lesdites catastrophes.

91      Quant au grief tiré de l’absence de référence, dans la décision attaquée, à des rapports d’experts et à des données économétriques, il convient de relever qu’aucune obligation légale ne pèse sur la Commission à cet égard et, surtout, que le caractère suffisant de la motivation ne dépend pas de la présence de ces références. En l’espèce, le raisonnement de la Commission est parfaitement intelligible et il n’appelle aucun développement économétrique pour être compris. Il convient de rappeler, à cet égard, que sont distinctes les questions du caractère suffisant de la motivation et du bien-fondé de cette dernière (voir, en ce sens, arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, points 67 à 72). La motivation de la décision attaquée n’est donc pas rendue insuffisante par l’absence de données économétriques.

92      En troisième lieu, force est de constater que le grief de la requérante par lequel elle reproche à la Commission de n’avoir raisonné que sur la base de l’hypothèse de la suppression intégrale de la garantie, sans avoir réfléchi à l’éventualité de la limitation du seuil d’intervention de la garantie octroyée à la CCR, manque en fait. Au point 124 de la décision attaquée, la Commission s’est précisément penchée sur cette éventualité, en indiquant ce qui suit :

« Sans aller jusqu’à une suppression de la garantie et donc de la couverture en excédent de pertes offerte par la CCR, toute baisse de la couverture offerte par la CCR aux assureurs aurait également des conséquences néfastes pour les assurés les plus exposés aux risques de catastrophes naturelles. Les assureurs devraient soit conserver une part de risques plus importante, soit faire appel à des réassureurs privés qui adapteraient également les tarifs de leur réassurance au risque du portefeuille. Ainsi, si le coût total de l’assurance contre les risques de catastrophes naturelles n’augmenterait pas forcément au niveau national, le tarif proposé aux assurés à risque serait logiquement impacté. Cette hausse des tarifs pour les assurés les plus exposés serait ainsi contraire au principe de solidarité face aux catastrophes naturelles. »

93      Cela suffit donc à écarter le grief tiré de ce que la Commission n’aurait pas songé à, ni examiné, l’alternative que pourrait constituer la limitation du seuil d’intervention de la garantie octroyée à la CCR.

94      En quatrième lieu, il importe d’indiquer que, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission n’avait pas à examiner l’hypothèse d’un système de réassurance différent de celui faisant l’objet de la notification, tel que le système de gestion de l'assurance et de la réassurance des risques attentats et actes de terrorisme (Gareat), et, par suite, à motiver la décision attaquée sur ce point. En effet, selon la jurisprudence, la Commission n’a pas à se prononcer sur toutes les mesures alternatives moins restrictives de concurrence susceptibles d’être envisagées, puisque, si l’État membre concerné doit exposer de façon circonstanciée les raisons pour lesquelles, en cas de suppression de la mesure d’aide en cause, l’accomplissement de la mission d’intérêt général visée dans des conditions économiquement acceptables serait remis en cause, il n’est pas tenu de démontrer, de manière positive, qu’aucune autre mesure imaginable, par définition hypothétique, ne pourrait permettre d’assurer l’accomplissement de ladite mission dans les mêmes conditions (voir arrêt du 3 décembre 2014, Castelnou Energía/Commission, T‑57/11, EU:T:2014:1021, point 170 et jurisprudence citée). Si ledit État membre n’est pas soumis à une telle obligation, la requérante ne saurait être fondée à demander au Tribunal d’imposer à la Commission de se substituer au législateur national dans cette tâche de prospection législative afin d’examiner toute mesure alternative envisageable.

95      Il convient donc, à la lumière de l’ensemble de ces éléments, de considérer que la Commission a indiqué de façon claire, cohérente et suffisante les raisons de l’adoption de la décision attaquée, au regard du standard applicable aux décisions adoptées au terme de la phase préliminaire d’examen des mesures d’aide d’État, et, par suite, de rejeter le deuxième moyen.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation des droits procéduraux de la requérante

96      Il convient d’examiner le quatrième moyen, tiré de la violation des droits procéduraux de la requérante, en rappelant que, comme cela ressort de la jurisprudence citée au point 77 ci-dessus, le Tribunal est habilité, en outre, à examiner les arguments de fond présentés par la requérante, afin de vérifier s’ils sont de nature à conforter le moyen expressément formé par elle concernant l’existence de doutes justifiant l’ouverture de la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE.

–       Principes applicables

97      À titre liminaire, il convient de rappeler que la phase préliminaire prévue par l’article 108, paragraphe 3, TFUE a seulement pour objet de ménager à la Commission un délai de réflexion et d’investigation suffisant pour se former une première opinion sur les projets d’aides qui lui ont été notifiés afin de conclure, sans qu’un examen approfondi soit nécessaire, qu’ils sont compatibles avec le traité FUE ou, au contraire, de constater que leur contenu soulève des doutes quant à cette compatibilité (voir arrêt du 3 mai 2001, Portugal/Commission, C‑204/97, EU:C:2001:233, point 34 et jurisprudence citée).

98      L’article 4 du règlement 2015/1589, lequel correspond, en substance, à l’article 4 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), détaille les conditions dans lesquelles ce qu’il convient d’appeler la phase d’examen préliminaire des mesures d’aide doit être conduite (voir, en ce sens, arrêts du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 43 ; du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 40, et du 24 janvier 2013, 3F/Commission, C‑646/11 P, non publié, EU:C:2013:36, point 24).

99      À cet égard, lorsqu’une partie requérante demande l’annulation d’une décision de ne pas soulever d’objections sur le fondement de l’article 263 TFUE, elle met en cause essentiellement le fait que la décision prise par la Commission à l’égard de la mesure litigieuse a été adoptée sans que cette institution ouvre la procédure formelle d’examen, violant ce faisant ses droits procéduraux. Dans le cadre de ce type de recours, ladite partie peut invoquer, aux fins de la préservation des droits procéduraux dont elle bénéficie dans le cadre de la procédure formelle d’examen, uniquement des moyens de nature à démontrer que l’appréciation des informations et des éléments dont la Commission disposait ou pouvait disposer, lors de la phase d’examen préliminaire de la mesure notifiée, aurait dû susciter des doutes quant à la compatibilité de cette dernière avec le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêts du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, point 81 ; du 9 juillet 2009, 3F/Commission, C‑319/07 P, EU:C:2009:435, point 35, et du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 59), étant rappelé à cet égard que les éléments d’information dont la Commission « pouvait disposer » sont ceux qui apparaissaient pertinents pour l’appréciation à effectuer et dont elle aurait pu, sur sa demande, obtenir la production au cours de la phase préliminaire d’examen (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2017, Commission/Frucona Košice, C‑300/16 P, EU:C:2017:706, point 71).

100    L’existence de doutes de nature à justifier l’ouverture de la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE se traduit par l’existence objective de difficultés sérieuses que la Commission a rencontrées lors de l’examen du caractère d’aide de la mesure en cause ou de sa compatibilité avec le marché intérieur. Il ressort, en effet, à cet égard, de la jurisprudence que la notion de difficultés sérieuses revêt un caractère objectif (arrêt du 21 décembre 2016, Club Hotel Loutraki e.a./Commission, C‑131/15 P, EU:C:2016:989, point 31). L’existence de telles difficultés doit être recherchée tant dans les circonstances de l’adoption de l’acte attaqué que dans son contenu, d’une manière objective, en mettant en rapport les motifs de la décision avec les éléments dont la Commission disposait et pouvait disposer lorsqu’elle s’est prononcée sur la compatibilité des aides litigieuses avec le marché intérieur (voir arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T‑123/09, EU:T:2012:164, point 77 et jurisprudence citée). Il en découle que le contrôle de légalité effectué par le Tribunal sur l’existence de difficultés sérieuses, par nature, ne peut se limiter à la recherche de l’erreur manifeste d’appréciation (voir arrêts du 27 septembre 2011, 3F/Commission, T‑30/03 RENV, EU:T:2011:534, point 55 et jurisprudence citée, et du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 80 et jurisprudence citée). En effet, une décision adoptée par la Commission sans ouverture de la phase formelle d’examen peut être annulée pour ce seul motif, en raison de l’omission de l’examen contradictoire et approfondi prévu par le traité FUE, même s’il n’est pas établi que les appréciations portées sur le fond par la Commission étaient erronées en droit ou en fait (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2010, British Aggregates e.a./Commission, T‑359/04, EU:T:2010:366, point 58).

101    Il y a lieu de rappeler que, conformément à la finalité de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et au devoir de bonne administration qui lui incombe, la Commission peut, notamment, engager un dialogue avec l’État notifiant ou des tiers afin de surmonter, au cours de l’examen préliminaire, des difficultés éventuellement rencontrées. Cette faculté présuppose que la Commission puisse adapter sa position en fonction des résultats du dialogue engagé, sans que cette adaptation doive être a priori interprétée comme établissant l’existence de difficultés sérieuses (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2016, Club Hotel Loutraki e.a./Commission, C‑131/15 P, EU:C:2016:989, point 35). Ce n’est que si ces difficultés n’ont pu être surmontées qu’elles se révèlent être sérieuses et qu’elles doivent conduire la Commission à avoir des doutes, l’amenant ainsi à ouvrir la procédure formelle d’examen (voir, en ce sens, arrêts du 2 avril 2009, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission, C‑431/07 P, EU:C:2009:223, point 61, et du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 70).

102    Il appartient à la partie requérante de prouver l’existence de doutes, preuve qu’elle peut fournir à partir d’un faisceau d’indices concordants (voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2018, HH Ferries e.a./Commission, T‑68/15, EU:T:2018:563, point 63 et jurisprudence citée).

103    C’est à l’aune de cette jurisprudence qu’il convient d’examiner l’argumentation de la requérante visant à établir l’existence de doutes qui auraient dû amener la Commission à ouvrir la procédure formelle d’examen.

104    À cet égard, la requérante avance un faisceau d’indices démontrant, selon elle, l’existence de difficultés sérieuses résultant, d’une part, du déroulement de la procédure préliminaire d’examen et, d’autre part, du contenu de la décision attaquée.

–       Sur les indices relatifs au déroulement de la procédure préliminaire d’examen

105    S’agissant, en premier lieu, de l’argument de la requérante selon lequel l’instruction de la décision attaquée a duré près de trois ans, ce qui, au regard de la jurisprudence, aurait notablement excédé ce qu’implique un premier examen de la mesure en cause, il convient de considérer que, si, en effet, une telle durée peut constituer l’un des indices de l’existence de doutes, cette durée n’est pas, dans les circonstances propres à la présente affaire, un tel indice pour les raisons suivantes.

106    Premièrement, il convient de distinguer la procédure faisant suite à une notification de la part d’un État membre et celle au cours de laquelle la Commission examine, à la suite d’une plainte, les informations, quelle qu’en soit la source, concernant une aide présumée illégale. Tandis que l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589 prévoit que la durée de la première ne doit pas dépasser deux mois, le droit de l’Union ne prévoit aucun délai pour l’achèvement de la seconde, précisant simplement que la Commission « examine sans retard indu toute plainte » (article 12, paragraphe 1, dudit règlement).

107    Secondement, la durée de la phase préliminaire ne saurait à elle seule permettre de déduire que la Commission aurait dû ouvrir la procédure formelle d’examen (voir, en ce sens, arrêts du 20 mars 1984, Allemagne/Commission, 84/82, EU:C:1984:117, points 14 à 17, et du 22 septembre 2011, Belgique/Deutsche Post et DHL International, C‑148/09 P, EU:C:2011:603, point 81). Le caractère raisonnable de la durée d’une procédure d’examen préliminaire doit s’apprécier en fonction des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, du contexte de celle-ci, des différentes étapes procédurales que la Commission doit suivre, de la complexité de l’affaire ainsi que de son enjeu pour les différentes parties intéressées [voir arrêt du 20 septembre 2011, Regione autonoma della Sardegna e.a./Commission, T‑394/08, T‑408/08, T‑453/08 et T‑454/08, EU:T:2011:493, point 99 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêts du 27 septembre 2011, 3F/Commission, T‑30/03 RENV, EU:T:2011:534, point 58 et jurisprudence citée, et du 16 octobre 2014, Portovesme/Commission, T‑291/11, EU:T:2014:896, point 72 (non publié) et jurisprudence citée].

108    En l’espèce, même si la requérante souligne que sa plainte n’était pas volumineuse, il n’en demeure pas moins qu’elle a adressé à de nombreuses reprises, de sa propre initiative, des observations substantielles à la Commission et a demandé la tenue de réunions, ce qui lui a été accordé. La Commission lui a également donné la possibilité de prendre position sur les informations fournies par la République française, à chaque fois que des renseignements avaient été fournis par cet État membre, et a permis à ce dernier de faire valoir ses observations sur les éléments produits par la requérante. De telles circonstances objectives, comme la Commission l’a justement rappelé lors de l’audience, sont reconnues par le juge de l’Union comme ayant pu contribuer à allonger la durée de l’examen préliminaire des mesures identifiées dans la plainte comme des aides d’État (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, Naviera Armas/Commission, T‑108/16, sous pourvoi, EU:T:2018:145, point 72).

109    En outre, il y a lieu de constater que, en l’espèce, trois mesures différentes ont été examinées par la Commission. En effet, en cours d’instruction, celle-ci a été informée du projet de modification du régime français d’indemnisation des risques de catastrophes naturelles, passant par la filialisation de la CCR pour les risques non soumis à la garantie et par la recapitalisation de la filiale ainsi créée (voir point 9 ci-dessus). Il ressort de la réponse de la Commission à la mesure d’organisation de la procédure adoptée par le Tribunal (voir point 30 ci-dessus) que les autorités françaises ont mentionné pour la première fois ce développement lors d’une réunion tenue à Bruxelles (Belgique) le 19 octobre 2015 et en ont fait état par écrit le 16 novembre 2015. La notification formelle de ces mesures de filialisation et de recapitalisation n’est intervenue que le 29 juillet 2016, en même temps que celle de la mesure présentement contestée. Or, étant donné, d’une part, que ces deux mesures étaient toujours en cours de finalisation au niveau national au moment de l’instruction et, d’autre part, qu’il existait un lien évident entre celles-ci et la garantie de l’État, la Commission pouvait valablement décider de les examiner concomitamment, dans la même décision, dans un souci de bonne administration et d’économie de la procédure, ce qui impliquait que la Commission attendît la concrétisation, au niveau national, des mesures de filialisation et de capitalisation avant de prendre position sur l’ensemble des mesures notifiées. Par ailleurs, ces dernières revêtent une certaine complexité susceptible de justifier également la durée de l’examen préliminaire de celles-ci.

110    Il s’ensuit que l’ensemble des éléments mentionnés aux points 106 à 109 ci-dessus ont, de fait, contribué à allonger la durée de l’examen préliminaire et à expliquer, dans une large mesure, le délai de près de trois ans, sans pour autant témoigner, en tant que tels, de l’existence de doutes de nature à justifier l’ouverture de la procédure formelle d’examen. Au demeurant, il convient d’indiquer que le juge de l’Union a pu considérer une durée voisine de, ou supérieure à, trois ans comme ne constituant pas en soi un indice de difficultés sérieuses (voir, en ce sens, arrêt du 27 septembre 2011, 3F/Commission, T‑30/03 RENV, EU:T:2011:534, points 59 à 71, confirmé sur pourvoi par arrêt du 24 janvier 2013, 3F/Commission, C‑646/11 P, non publié, EU:C:2013:36, points 34 à 36).

111    S’agissant, en deuxième lieu, des hésitations qu’aurait éprouvées la Commission quant à la détermination de la base légale de la décision attaquée, celle-ci ayant d’abord envisagé de retenir l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE et non l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, ainsi que cela ressortirait d’une téléconférence du 18 février 2016 (point 196 de la requête), hésitations qui seraient reflétées aux points 126 à 128 de la décision attaquée, lesquels seraient, de surcroît, contradictoires, il importe de rappeler que, selon la jurisprudence, l’existence éventuelle de doutes doit être appréciée au moment de l’adoption de la décision attaquée (voir arrêt du 13 juin 2013, Ryanair/Commission, C‑287/12 P, non publié, EU:C:2013:395, point 68 et jurisprudence citée ; conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Club Hotel Loutraki e.a./Commission, C‑131/15 P, EU:C:2016:617, point 53). Puisque, selon la jurisprudence citée au point 101 ci-dessus, la Commission peut, notamment, engager un dialogue avec l’État notifiant ou des tiers afin de surmonter, au cours de l’examen préliminaire, des difficultés éventuellement rencontrées, le simple fait que la Commission ait pu s’interroger sur tel ou tel point au cours de la procédure préliminaire d’examen ne saurait, en soi, être considéré comme un indice de difficultés sérieuses. Dans le cas contraire, l’objectif de cette procédure serait remis en cause si chaque interrogation devait être interprétée comme un tel indice. Seul importe, par conséquent, de vérifier, sur la base d’indices objectifs, si, au moment de l’adoption de la décision attaquée, la Commission éprouvait des doutes quant à la base juridique à retenir.

112    Il y a lieu de constater que tel n’était pas le cas en l’espèce. En effet, au point 106 de la décision attaquée, la Commission indique clairement que deux bases juridiques distinctes étaient à considérer, à savoir l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE et l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE. Par la suite, aux points 107 à 110 de la décision attaquée, la Commission explique les raisons pour lesquelles elle a estimé que l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE était la base juridique appropriée. Elle indique notamment, au point 110 de ladite décision, que l’application de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE, qui prévoit que sont compatibles avec le marché intérieur « les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou par d’autres événements extraordinaires », a jusqu’ici été limitée à la compatibilité de l’aide directement perçue par les entreprises sinistrées, ce qui ne correspond pas à l’aide en cause, laquelle vise le développement de l’activité de réassurance des risques de catastrophes naturelles, étant précisé que l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE vise précisément les aides destinées à faciliter notamment le développement de certaines activités économiques.

113    Par conséquent, la lecture de ces passages de la décision attaquée ne laisse apparaître aucun doute quant à la base juridique appropriée.

114    Par ailleurs, il convient de rejeter l’argument de la requérante selon lequel la base juridique de la décision attaquée soulevait des difficultés sérieuses du fait que la garantie octroyée à la CCR n’aurait pas pour objet d’aider au développement économique de certaines régions économiquement défavorisées de l’État membre concerné au sens de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, puisque, comme cela a déjà été indiqué au point 90 ci-dessus, l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE ne vise pas uniquement les aides régionales, mais aussi les aides destinées au développement de certaines activités économiques, l’aide en cause ne constituant pas une aide à finalité régionale. Les lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale pour la période 2014-2020 (JO 2013, C 209, p. 1), citées par la requérante, ne trouvant pas à s’appliquer en l’espèce, aucun doute n’était possible de la part de la Commission sur ce point non plus.

115    Quant à l’argument, avancé pour la première fois dans la réplique, selon lequel la garantie octroyée à la CCR serait une aide au fonctionnement et que l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE ne serait pas applicable à une telle aide, force est de constater qu’il est irrecevable, car tardif. En effet, la requérante ne l’a soulevé que dans la réplique, sans même chercher à justifier le retard de sa présentation. En tout état de cause, il convient d’indiquer que le simple fait qu’il s’agisse d’une aide au fonctionnement n’est pas révélateur de difficultés sérieuses quant à la base juridique appropriée de la décision attaquée, puisque rien ne s’oppose à ce qu’une mesure d’aide qui poursuit un objectif d’intérêt public, qui est appropriée et nécessaire pour atteindre cet objectif, qui n’altère pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun et qui satisfait donc aux exigences de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE, soit déclarée compatible avec le marché intérieur en application de cette disposition, indépendamment de la question de savoir si elle doit être qualifiée d’aide à l’investissement ou d’aide au fonctionnement. Ainsi, même une aide au fonctionnement peut être déclarée compatible avec le marché intérieur lorsque ces conditions sont réunies (arrêt du 12 juillet 2018, Autriche/Commission, T‑356/15, sous pourvoi, EU:T:2018:439, point 583 ; voir également, en ce sens, arrêt du 9 juin 2016, Magic Mountain Kletterhallen e.a./Commission, T‑162/13, non publié, EU:T:2016:341, points 116 et 117).

116    Partant, même à supposer que, au début de l’instruction, la Commission ait hésité entre les deux bases juridiques mentionnées au point 111 ci-dessus, il échet de relever que, lors de l’adoption de la décision attaquée, ces hésitations quant à la base légale idoine s’étaient dissipées. La requérante n’a donc pas apporté, à cet égard, la preuve de l’existence de doutes de nature à justifier l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

117    En troisième lieu, la requérante tire argument du fait que les autorités françaises pensaient pouvoir faire évoluer le système soumis à l’examen de la Commission, ainsi que celle-ci l’aurait mentionné dans un courriel du 1er juin 2015. Dans ce courriel (annexe A 36 à la requête), la Commission indique notamment que « les autorités françaises semblent potentiellement ouvertes à discuter des modifications du schéma général du système à condition qu’il n’y ait pas d’impact négatif sur le rôle de mutualisateur joué par la CCR indispensable à la solidarité nationale », que, « d’après les autorités françaises, un tel schéma [fondé sur un ensemble de réassureurs privés qui réassureraient la CCR] engendrerait toutefois des contraintes opérationnelles fortes et poserait également la question du montant que la CCR pourrait assurer sur le marché » et que « ce schéma n’est bien sûr pas à considérer comme une proposition des autorités françaises ».

118    Or, les passages reproduits au point 117 ci-dessus démontrent clairement qu’il ne s’agissait pas d’une proposition des autorités françaises, lesquelles avaient d’ailleurs exprimé des objections quant à l’impact négatif d’un tel schéma alternatif. De toute façon, le seul fait que la Commission ait pu chercher à rapprocher les positions de la requérante et des autorités françaises et qu’elle ait invité la requérante à faire valoir sa position à ce sujet ne signifie pas que la Commission ait éprouvé des doutes quant à la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêt du 8 janvier 2015, Club Hotel Loutraki e.a./Commission, T‑58/13, non publié, EU:T:2015:1, point 43 ; conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Club Hotel Loutraki e.a./Commission, C‑131/15 P, EU:C:2016:617, point 49). En effet, rien dans le contenu du courriel de la Commission du 1er juin 2015 ne fait apparaître l’existence de tels doutes.

119    En conclusion, la requérante n’a pas établi que le déroulement de la procédure préliminaire d’examen démontrait l’existence de doutes de nature à justifier l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

–       Sur les indices relatifs au contenu de la décision attaquée

120    En premier lieu, la requérante fait valoir que les défauts de motivation supposés de la décision attaquée démontreraient également l’existence de difficultés sérieuses objectives. Toutefois, force est de constater que l’analyse menée dans le cadre de l’examen du deuxième moyen du recours conduit à écarter ce grief.

121    En deuxième lieu, la requérante fait valoir le caractère insuffisant et incomplet de l’instruction, lequel serait apparent à la lecture de ladite décision, en ce que, d’une part, les éléments essentiels du fonctionnement de l’aide litigieuse demeureraient inconnus et, d’autre part, la Commission n’aurait pas examiné si l’absence de rémunération à un prix de marché de la garantie octroyée à la CCR constituait, au-delà de la garantie elle-même, une aide d’État distincte dont la compatibilité avec le marché intérieur devait être appréciée. À cet égard, il convient de relever que, si la requérante allègue que « les éléments essentiels » du fonctionnement de l’aide litigieuse demeureraient « inconnus », elle ne précise pas quels éléments seraient encore inconnus. Quant à la prétendue absence d’examen de la question de savoir si la rémunération de la garantie, au-delà de la garantie elle-même, constitue une aide d’État dont la compatibilité avec le marché intérieur devait être appréciée, il y a lieu d’écarter cet argument pour les raisons déjà exposées aux points 85 et 86 ci-dessus.

122    En troisième lieu, la requérante fait valoir que l’absence de difficulté pour conclure à l’existence d’une aide montrerait que la Commission s’est concentrée pendant trois ans sur la seule question de la compatibilité de la mesure avec le marché intérieur, ce qui révélerait de très importantes difficultés à cet égard. Dans la mesure où ce grief recoupe largement celui afférent à la durée de la procédure préliminaire d’examen, il échet de renvoyer aux points 106 à 110 ci-dessus, en soulignant ici encore que la requérante semble ignorer le fait que la Commission a examiné concomitamment trois mesures différentes et que, par suite, le fait que le caractère d’aide d’État de la garantie n’ait pas posé de difficultés ne signifie aucunement que, pendant toute la durée de la procédure, la Commission se soit concentrée sur la seule question de la compatibilité avec le marché intérieur de cette garantie.

123    En quatrième lieu, quant à l’allégation relative à l’absence d’examen des systèmes alternatifs de réassurance présentés par la requérante, tels que le système Gareat, il convient de renvoyer à l’analyse figurant au point 94 ci-dessus et de souligner derechef que la Commission est fondée à soutenir qu’il ne lui incombe pas de se prononcer sur la question de savoir si un régime autre que celui faisant l’objet de la notification pourrait être envisagé. En effet, l’existence d’un système de réassurance différent, tel le système Gareat, n’est pas susceptible de démontrer l’existence de doutes quant à la proportionnalité de la mesure d’aide en cause de nature à justifier l’ouverture de la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, d’autant plus que la requérante ne conteste pas, même si elle s’est efforcée de les minimiser, les différences mises en évidence par les intervenantes entre la mesure notifiée et le système Gareat, à savoir que les dommages liés aux attentats et aux autres actes de terrorisme et ceux liés aux catastrophes naturelles ne sont ni de même ampleur ni de même nature, puisque, premièrement, les conséquences des premiers sont bien moindres que celles découlant des secondes, deuxièmement, les premiers sont d’origine humaine, alors que les secondes sont le fait d’agents naturels, et, troisièmement, les premiers frappent en des points ciblés, mais, par définition, inconnus, du territoire, alors que les secondes frappent l’ensemble de ce dernier avec régularité, en fonction de périls différents qui ont chacun leur zone d’exposition propre (la montagne pour les avalanches, les zones sismiques pour les tremblements de terre, etc.).

124    En cinquième lieu, la décision attaquée serait, selon la requérante, marquée par une incompréhension du fonctionnement de l’aide en cause, ainsi qu’en témoignerait son point 129, auquel la Commission a employé les mots « semble » et « potentiellement ». Toutefois, le seul emploi de ces termes ne peut être considéré comme révélateur d’une quelconque incompréhension du mode de fonctionnement de l’aide litigieuse et de l’existence de difficultés sérieuses justifiant l’ouverture de la procédure formelle d’examen.

125    En sixième lieu, quant à la question de savoir si l’examen du caractère nécessaire, approprié et proportionné de l’aide litigieuse a suscité des doutes qui auraient dû amener la Commission à ouvrir la procédure formelle d’examen, il importe de relever que, dans la décision attaquée, la Commission a fondé son examen de la mesure d’aide sur les éléments suivants.

126    Premièrement, elle a vérifié l’existence d’un objectif d’intérêt commun aux points 113 et 114 de la décision attaquée, indiquant que la garantie octroyée à la CCR « poursui[vai]t un objectif de solidarité nationale face aux risques liés aux catastrophes naturelles », « objectif légitime des pouvoirs publics ».

127    Deuxièmement, elle a contrôlé si la mesure d’aide était nécessaire et appropriée, répondant par l’affirmative aux points 115 à 118 de la décision attaquée, dès lors que, sans la garantie illimitée de l’État, ni la CCR à l’égard des assureurs ni, à leur tour, les assureurs à l’égard des particuliers et des entreprises ne seraient en mesure de proposer à chacun des résidents français une offre de couverture des risques de catastrophes naturelles. Elle souligne aussi que ladite mesure a prouvé son efficacité.

128    Troisièmement, elle a conclu au caractère proportionné de la garantie octroyée à la CCR sur la base des trois éléments suivants :

–        la garantie ne couvre pas l’ensemble des catastrophes naturelles au sens habituel de cette expression, se concentrant seulement sur les risques les plus importants causés par un agent naturel, qui risqueraient de ne pas être assurés sur le marché, et certains biens mineurs, tels que jardins et clôtures, ou spécifiques (biens agricoles, véhicules aériens et marins) sont exclus de ce régime d’indemnisation, laissant ainsi un ample champ d’intervention pour les réassureurs privés (points 119 à 122 de la décision attaquée) ;

–        en l’absence de la mesure en cause, les assureurs seraient contraints d’effectuer une sélection des risques et, par suite, de refuser d’assurer les clients les plus exposés aux risques de catastrophes naturelles ou d’augmenter les primes d’assurance, de sorte que le tarif proposé à certains assurés, dits « à risques », subirait logiquement un impact, ce qui serait contraire à l’objectif poursuivi ;

–        la mesure d’aide, d’une part, n’intervient pas sur le marché de l’assurance proprement dite et, d’autre part, laisse ouvert le marché de la réassurance aux réassureurs privés, contrairement à ce qui résulterait d’un système reposant sur l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE, de sorte que la mesure d’aide en cause « laisse beaucoup plus de place au marché » (point 128 de la décision attaquée) et, par conséquent, « fausse moins la concurrence que des régimes d’indemnisation des catastrophes naturelles basés sur l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE » (point 130 de la décision attaquée).

129    Il est également important de souligner que le système ainsi conçu prévoit des mesures destinées à éviter la surcompensation, par le biais de la garantie, des coûts exposés par la CCR lors de la couverture des risques de catastrophes naturelles. En effet, comme cela résulte de la description du système français de réassurance des risques de catastrophes naturelles figurant dans la décision attaquée et reprise au point 11 ci-dessus et comme cela a été rappelé par la République française au point 19 de son mémoire en intervention, cette garantie n’intervient que si la CCR a épuisé « [70-90] % » de la réserve spéciale et de la provision d’égalisation constituée par la CCR et « joue uniquement pour le montant de ce dépassement ».

130    Cette analyse ne fait apparaître aucun indice de difficulté sérieuse objective quant à la proportionnalité de l’aide litigieuse. En effet, les objections émises par la requérante ne paraissent pas pouvoir susciter de doutes à cet égard.

131    Premièrement, quant à l’objection selon laquelle l’objectif visant à garantir chaque résident français contre les risques de catastrophes naturelles au nom de la solidarité nationale ne serait pas atteint, il y a lieu d’observer que cette allégation manque en fait. Comme la CCR le fait justement remarquer, sans être contredite, si l’assurance contre les risques de catastrophes naturelles n’est, en effet, pas obligatoire, dans la mesure où elle n’est qu’une extension obligatoire de l’assurance facultative contre les dommages d’incendie ou tous autres dommages aux biens situés en France ou contre les dommages aux véhicules terrestres à moteur, elle couvre néanmoins, dans les faits, 98 % de la population française. Il est donc établi non seulement que la mesure en cause est apte à atteindre l’objectif de solidarité nationale, mais également qu’elle l’a atteint dans les faits.

132    S’agissant, dans cette même veine, de l’objection selon laquelle la mesure d’aide en cause n’atteint pas l’objectif d’offrir, en aval, une assurance contre les risques liés aux catastrophes naturelles à un prix abordable, dès lors que la surprime indifférenciée (voir point 11 ci-dessus) serait calculée sur l’assiette déterminée par l’assureur, cette assiette prenant ainsi en compte les risques réels liés auxdites catastrophes, il convient d’indiquer que cette objection n’est pas révélatrice de l’existence de difficultés sérieuses. En effet, il ressort des précisions apportées par la CCR aux points 37 à 41 de son mémoire en intervention, non contredites sur ce point par la requérante, que la marge de manœuvre des assureurs privés pour « augmenter » l’assiette à assurer en fonction de l’exposition aux risques est assez circonscrite. En effet, si l’assiette définie par l’assureur ne convient pas à l’assuré, ce dernier peut faire jouer la concurrence et, si le tarif présenté équivaut, dans les faits, à un refus d’assurance, faire intervenir le bureau central de tarification, par exemple pour faire partager un risque exceptionnellement élevé entre plusieurs assureurs. En tout état de cause, du fait, précisément, de la garantie illimitée et de la possibilité de se réassurer auprès de la CCR en excédent de perte de façon illimitée, les assureurs n’ont aucun intérêt à faire « gonfler » ladite assiette en fonction de l’exposition aux risques, car l’ampleur de leurs pertes éventuelles serait, en toute hypothèse, réduite grâce à leur réassurance illimitée auprès de la CCR. De surcroît, comme la Commission l’a justement fait valoir au point 9 de la décision attaquée, le taux de la surprime de l’assurance des risques de catastrophes naturelles reste indifférencié, indépendamment de l’exposition aux risques et pour tout assuré, ce qui est clairement en harmonie avec l’objectif de faire respecter la solidarité nationale.

133    Deuxièmement, s’il est vrai que la Commission a tiré argument de la possibilité dont disposaient les autorités françaises, en vertu de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE, de mettre en place un régime d’aide compatible de plein droit avec le marché intérieur, cette mention n’est pas révélatrice d’un quelconque doute quant à la proportionnalité de la mesure d’aide en cause. Comme la Commission l’indique à bon escient, elle pouvait valablement tenir compte de la faculté offerte aux États membres, en vertu de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE, d’opter pour un système plus restrictif de concurrence, à savoir un système fondé sur une couverture des dommages ex post, lequel serait pourtant compatible avec le marché intérieur ipso jure en vertu de l’article 107, paragraphe 2, sous b), TFUE.

134    Troisièmement, la requérante fait valoir que l’examen de la proportionnalité de la mesure d’aide aurait dû susciter des doutes de nature à justifier l’ouverture de la procédure formelle d’examen, puisque, dans la décision attaquée, la Commission n’aurait pas suffisamment examiné la possibilité de recourir à des mesures moins restrictives. Une telle mesure moins restrictive consisterait, selon la requérante, en l’augmentation du seuil d’intervention de la garantie illimitée, de sorte qu’elle ne couvre que les risques « exceptionnels », tels que la crue centennale de la Seine.

135    Toutefois, au point 124 de la décision attaquée, la Commission a examiné l’hypothèse d’une mesure moins restrictive. À cet égard, elle a relevé que toute baisse de la couverture offerte par la CCR risquait d’avoir des répercussions néfastes en aval sur les assurés les plus exposés aux risques. En effet, la partie des risques n’étant plus couverte par la garantie de l’État devrait soit être conservée par les assureurs eux-mêmes, soit être réassurée auprès de réassureurs privés, lesquels imposeraient, selon toute vraisemblance, des tarifs en fonction de l’exposition aux risques du portefeuille. Cette augmentation de la conservation des risques par les assureurs eux-mêmes ou l’augmentation des tarifs de réassurance pour les portefeuilles les plus risqués serait vraisemblablement répercutée sur les assurés les plus exposés aux risques de catastrophes naturelles. Si la requérante critique ces considérations en faisant valoir qu’elles ne sont fondées sur aucune donnée ou étude économétrique, il y a lieu de rappeler que, au stade de la procédure préliminaire d’examen, la Commission n’a pas besoin de recourir systématiquement à de telles analyses, les considérations présentées audit point 124 se fondant sur les règles connues de l’offre et de la demande.

136    En outre, il convient de souligner, à l’instar des intervenantes (point 115 du mémoire en intervention de la République française et point 61 du mémoire en intervention de la CCR), que l’augmentation du seuil d’intervention de la garantie afin qu’elle ne couvre que les « risques exceptionnels », préconisée par la requérante, risquerait d’avoir un impact sur la viabilité économique de la CCR, dès lors que, d’une part, la réserve qu’elle doit maintenir pour faire face à l’éventualité de catastrophes naturelles ne serait plus alimentée par une bonne partie (en fonction du nouveau seuil) des primes de réassurance, qui seraient dorénavant versées à des réassureurs privés, alors que, d’autre part, elle conserverait le risque de se voir exposée à des paiements exceptionnellement élevés pour les risques les plus amples, non pris en charge par les réassureurs privés (voir point 32 de la décision attaquée).

137    Quatrièmement, la requérante soutient, dans le cadre du contrôle de la proportionnalité de la garantie octroyée à la CCR, que la Commission a omis de vérifier la transparence de l’aide. Ce grief ne saurait prospérer, dès lors que, d’une part, selon la requérante, l’obligation de transparence de l’aide découle des lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale pour la période 2014-2020 (voir points 46, 48, 101 et 102 de la requête), alors que, comme cela a été souligné au point 114 ci-dessus, lesdites lignes directrices ne s’appliquent pas en l’espèce, et, d’autre part, elle n’établit pas en quoi cette omission supposée aurait révélé des doutes dans l’esprit de la Commission, qui auraient dû la conduire à ouvrir la procédure formelle d’examen, étant donné que cette institution disposait de la convention passée entre la CCR et les autorités françaises, ainsi que cela résulte du point 13 de la décision attaquée.

138    Cinquièmement, il convient de rejeter l’argument tiré de la large interprétation de la notion de « catastrophes naturelles », qui démontrerait, selon la requérante, que la Commission aurait dû éprouver des doutes quant à la proportionnalité de la garantie de l’État. En effet, la définition qui en est donnée est, au contraire, limitée, laissant en dehors du champ d’application de l’aide litigieuse tout un éventail d’événements naturels dommageables et de biens. C’est ce qu’a constaté la Commission aux points 119 à 122 de la décision attaquée. De ce fait, la partie correspondante du marché en cause reste ouverte à la libre concurrence, ce qui était un élément à prendre en compte lors de l’examen de la proportionnalité de la mesure d’aide. L’argument de la requérante ne démontre donc pas l’existence d’un doute quelconque à cet égard, d’autant plus que la définition du champ d’application de la garantie ressort du cadre juridique de la décision attaquée lui-même (voir, en particulier, point 7 de ladite décision).

139    Sixièmement, pour ce qui est des avantages conférés à la CCR par cette garantie, la décision attaquée les reconnaît expressis verbis et y voit l’un des critères de l’existence d’une aide d’État. Cependant, comme le souligne la Commission, la mise en balance de l’effet anticoncurrentiel de ces avantages avec les effets positifs du régime d’aide s’agissant de la poursuite des objectifs d’intérêt commun ainsi qu’avec les obligations qui pèsent sur la CCR, à savoir notamment l’obligation de réassurer tout assureur qui en fait la demande, conduit à conclure que la requérante n’a pas établi qu’il pouvait y avoir des doutes de la part de la Commission quant à la compatibilité dudit régime avec le marché intérieur.

140    Septièmement, il y a lieu de relever, à supposer que la requérante fasse valoir que, au-delà de la question de savoir si l’absence de rémunération à un prix de marché de la garantie constitue une aide d’État distincte, le niveau de la rémunération de ladite garantie aurait dû être examiné également sous l’angle de la proportionnalité de la mesure d’aide, et donc de la compatibilité de celle-ci avec le marché intérieur, et non uniquement sous l’angle de l’existence d’une aide, qu’un tel argument reviendrait, en substance, à soutenir que la Commission aurait dû vérifier si un niveau de rémunération plus élevé aurait constitué une mesure moins restrictive de concurrence tout en étant apte à atteindre l’objectif poursuivi. Or, un tel argument ne pourrait prospérer, ne serait-ce qu’au motif que le marché ne fournit pas d’élément de comparaison susceptible d’indiquer quel serait le niveau de rémunération adéquat (voir point 48 de la décision attaquée), comme la Commission le souligne à bon droit au point 34 de la duplique. En outre, toute augmentation de ce niveau serait susceptible de se répercuter en aval, compromettant ainsi l’objectif de pourvoir l’ensemble de la population française d’une assurance contre les risques de catastrophes naturelles à un prix abordable.

141    Il en résulte que la requérante n’est pas fondée à réclamer le bénéfice de l’arrêt du 15 mars 2018, Naviera Armas/Commission (T‑108/16, sous pourvoi, EU:T:2018:145, point 127), cité lors de l’audience, selon lequel le caractère insuffisant ou incomplet de l’examen mené par la Commission lors de la procédure préliminaire constitue un indice de l’existence de difficultés sérieuses, puisque les griefs à l’appui desquels elle avance cette critique d’incomplétude de l’examen de la Commission ont tous été écartés.

142    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de considérer que la requérante n’a pas démontré l’existence de doutes de nature à justifier l’ouverture de la procédure formelle d’examen. Partant, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen du recours.

143    Compte tenu du rejet comme irrecevables des moyens tendant à contester le bien-fondé de la décision attaquée, il convient de rejeter dans son ensemble le chef de conclusions tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée.

 Sur les autres chefs de conclusions

144    La requérante a demandé au Tribunal d’ordonner, en application de l’article 91, sous b), du règlement de procédure, de produire tous documents, courriers et courriels échangés avec la République française, afin de déterminer si elle avait envisagé de déclarer ladite garantie incompatible avec le marché intérieur ou avait fait part de ses doutes s’agissant de sa compatibilité avec ce dernier. Il n’y a cependant pas lieu de faire droit à cette demande qui est dépourvue d’intérêt pour la solution du litige (voir, en ce sens, arrêt du 10 décembre 2008, Kronoply et Kronotex/Commission, T‑388/02, non publié, EU:T:2008:556, point 153).

145    Quant au chef de conclusions par lequel la requérante requiert du Tribunal qu’il fasse droit à ses demandes d’omission de certaines données à l’égard du public, il échet d’indiquer que, dans la mesure où le Tribunal s’est déjà prononcé sur la demande de confidentialité dans l’ordonnance du 22 janvier 2018, Scor/Commission (T‑135/17, non publiée, EU:T:2018:37), il n’y a plus lieu de statuer à cet égard étant précisé que les données considérées comme confidentielles dans ladite ordonnance ont été omises dans le présent arrêt.

146    Il convient donc de rejeter le recours dans sa totalité.

 Sur les dépens

147    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il convient de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission et de la CCR, conformément aux conclusions de ces dernières, y compris les dépens exposés à l’occasion de la demande de traitement confidentiel.

148    La République française supportera ses propres dépens, en application de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, y compris les dépens exposés à l’occasion de la demande de traitement confidentiel.

Par ces motifs,


LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Scor SE est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne et la Caisse centrale de réassurance (CCR), y compris les dépens exposés à l’occasion de la demande de traitement confidentiel.

3)      La République française supportera ses propres dépens,y compris les dépens exposés à l’occasion de la demande de traitement confidentiel.

Tomljenović

Bieliūnas

Kornezov

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 mai 2019.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

V. Tomljenović


*      Langue de procédure : le français.