Language of document : ECLI:EU:F:2012:129

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

18 septembre 2012 (*)

« Fonction publique – Concours général – Non-admission à participer à l’épreuve orale à la suite des résultats obtenus aux épreuves écrites – Demandes de réexamen – Droit spécifique des candidats d’accéder à certaines informations les concernant – Objet et portée – Droit d’accéder aux épreuves écrites corrigées – Absence »

Dans l’affaire F‑96/09,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Eva Cuallado Martorell, demeurant à Augsbourg (Allemagne), représentée par Me M. Díez Lorenzo, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme B. Eggers et M. J. Baquero Cruz, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre),

composé de Mme M. I. Rofes i Pujol (rapporteur), président, Mme I. Boruta et M. K. Bradley, juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

vu la procédure écrite,

vu l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 26 mars 2010, Mme Cuallado Martorell a introduit le présent recours tendant en substance à l’annulation, d’une part, de la décision du jury du concours EPSO/AD/130/08, organisé par l’Office européen de sélection du personnel (EPSO), de ne pas l’admettre à participer à l’épreuve orale, d’autre part, des décisions lui refusant la communication de ses épreuves écrites corrigées et de la fiche d’évaluation individuelle concernant ces épreuves.

 Cadre juridique

2        L’article 91 bis du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») prévoit :

« Les recours dans les domaines pour lesquels il a été fait application de l’article 2, paragraphe 2, sont dirigés contre l’institution dont l’autorité investie du pouvoir de nomination délégataire dépend. »

3        En vertu de l’article 2 de la décision 2002/620/CE du Parlement européen, du Conseil, de la Commission, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Comité économique et social, du Comité des régions et du Médiateur, du 25 juillet 2002, portant création de l’EPSO (JO L 197, p. 53) :

« 1.      L’[EPSO] exerce les pouvoirs de sélection dévolus par l’article 30, premier alinéa, du statut et par l’annexe III du statut aux autorités investies du pouvoir de nomination des institutions signataires de la présente décision. [...] »

4        L’article 4 de la décision 2002/620 portant création de l’EPSO, relatif aux demandes, réclamations et recours, dispose :

« En application de l’article 91 bis du statut, les demandes et les réclamations relatives à l’exercice des pouvoirs dévolus en vertu de l’article 2, paragraphes 1 et 2, de la présente décision sont introduites auprès de l’[EPSO]. Tout recours dans ces domaines est dirigé contre la Commission [européenne]. »

5        L’article 4 de la décision 2002/621/CE des secrétaires généraux du Parlement européen, du Conseil, de la Commission, du greffier de la Cour de justice, des secrétaires généraux de la Cour des comptes, du Comité économique et social, du Comité des régions et du représentant du Médiateur, du 25 juillet 2002, concernant l’organisation et le fonctionnement de l’EPSO (JO L 197, p. 56), prévoit :

« 1.      Le directeur de l’[EPSO] exerce les pouvoirs qui sont dévolus à l’autorité investie du pouvoir de nomination en vertu de l’article 90 du statut, pour toutes demandes ou réclamations relatives aux tâches de l’[EPSO].

[...] »

6        Le 22 mai 2008, l’EPSO a publié au Journal Officiel de l’Union européenne (JO C 125 A, édition de langue espagnole, p. 1) l’avis du concours général EPSO/AD/130/08 (ci-après l’« avis de concours »), organisé pour la constitution d’une liste de réserve de juristes linguistes en langue espagnole, de grade AD 7, destinée à pourvoir des postes vacants au sein des institutions européennes, notamment à la Cour de justice de l’Union européenne, au Parlement européen et au Conseil de l’Union européenne.

7        Lors de leur inscription au concours général EPSO/AD/130/08 (ci-après le « concours »), les candidats devaient choisir entre la filière « Cour de justice », dont le nombre de lauréats était limité à 25, et la filière « Parlement/Conseil », dont le nombre de lauréats était limité à 14.

8        Le titre A, partie I, de l’avis de concours, intitulé « N[ature des fonctions] », disposait :

« Filière ‘Cour de justice’

[…]

Filière ‘Parlement/Conseil’

Suivi de la procédure législative et vérification de la concordance linguistique et juridique de textes législatifs en espagnol, déjà traduits et révisés, par rapport aux autres versions linguistiques desdits textes, contrôle de leur qualité rédactionnelle et du respect des règles en matière de présentation formelle.

Traduction occasionnelle de textes juridiques courts, notamment à partir de l’anglais ou du français. »


9        Le titre A, partie II, de l’avis de concours portait sur les conditions d’admission au concours. Le point 1 disposait, en ce qui concerne les titres ou diplômes requis :

« Les candidats doivent avoir un niveau d’enseignement correspondant à un cycle complet d’études universitaires sanctionné par un diplôme de quatre années ou plus en droit espagnol […] »

10      Le titre A, partie II, de l’avis de concours prévoyait à son point 2, en ce qui concerne les connaissances linguistiques, ce qui suit :

« Filière ‘Cour de justice’

[…]

Filière ‘Parlement/Conseil’

a) parfaite maîtrise de l’espagnol (langue 1) ;

b) connaissance approfondie de l’anglais ou du français (langue 2) ;

c) connaissance approfondie de l’allemand, de l’anglais ou du français (langue 3), obligatoirement différente de la langue 2.

d) pour l’épreuve facultative (langue 4), connaissance d’une des langues suivantes (obligatoirement différente des langues 2 et 3) : [bulgare, tchèque, danois, allemand, estonien, grec, anglais, français, irlandais, italien, letton, lituanien, hongrois, maltais, néerlandais, polonais, portugais, roumain, slovaque, slovène, finnois, ou suédois].

[…]

Les candidats doivent préciser dans le formulaire d’inscription électronique […] et dans l’acte de candidature […] les langues choisies pour les différentes épreuves. Ce choix ne pourra pas être modifié après la date d’inscription […] »

11      Le titre B de l’avis de concours, relatif au déroulement du concours, prévoyait notamment :

« 3.      Épreuves écrites obligatoires – Notation

Filière ‘Cour de justice’

[…]

Filière ‘Parlement/Conseil’

a) Correction d’un texte juridique en langue espagnole comportant des erreurs du point de vue de la grammaire, de la syntaxe, du style et de l’expression juridique. Cette épreuve est destinée à vérifier la parfaite connaissance de la langue 1 du candidat et de sa qualité d’expression dans le domaine juridique.

Cette épreuve sera notée de 0 à 40 points (minimum requis : 20 points)

Durée de l’épreuve : deux heures et demie

b) Traduction en espagnol (langue 1), sans dictionnaire, d’un texte juridique rédigé en anglais ou en français (langue 2), selon le choix du candidat.

Cette épreuve sera notée de 0 à 40 points (minimum requis : 20).

Durée de l’épreuve : deux heures et demie.

L’épreuve b) ne sera corrigée que si le candidat a obtenu le minimum requis à l’épreuve a).

c) Traduction en espagnol (langue 1), sans dictionnaire, d’un texte juridique rédigé en allemand, en anglais ou en français [langue 3, obligatoirement différente de celle choisie pour l’épreuve b].

Cette épreuve sera notée de 0 à 40 points (minimum requis : 20).

Durée de l’épreuve : deux heures et demie.

L’épreuve c) ne sera corrigée que si le candidat a obtenu le minimum requis aux épreuves a) et b).


4.      Épreuve orale obligatoire – Notation

Les candidats ayant obtenu le nombre minimal de points requis pour les épreuves écrites obligatoires seront admis à l’épreuve orale.

Entretien avec le jury, en allemand, en anglais ou en français (langue 5), devant permettre d’apprécier :

–        les connaissances générales et juridiques du candidat, étant entendu que le jury pourra à cette occasion tenir compte de la connaissance d’autres langues que celles utilisées dans les épreuves écrites ; les connaissances juridiques seront examinées en espagnol ;

–        la capacité de présider une réunion (filière ‘Parlement/Conseil’) ;

–        la motivation des candidats et leur capacité d’adaptation au travail au sein de la fonction publique européenne, dans un environnement multiculturel ; le cas échéant, des questions complémentaires pourront être posées en espagnol.

Cette épreuve sera notée de 0 à 100 (minimum requis : 50).

5.      Épreuve facultative

Filière ‘Cour de justice’

[…]

Filière ‘Parlement/Conseil’

L’épreuve facultative doit permettre aux candidats de faire valoir l’éventail de leurs connaissances linguistiques. Les résultats obtenus à ces épreuves n’influeront pas sur l’établissement de la liste de réserve, ni quant à sa composition, ni quant à son ordre, mais ils permettront aux institutions d’exploiter la liste de réserve en connaissance de cause lorsqu’il sera procédé aux recrutements.

Traduction en espagnol (langue 1), avec dictionnaire (non électronique), d’un texte juridique rédigé dans l’une des langues indiquées au titre A, partie II, point 2, d) (langue 4), selon le choix du candidat.

Cette épreuve sera notée de 0 à 20 points.

Durée de l’épreuve : une heure.

Cette épreuve pourrait se dérouler en même temps que les épreuves obligatoires. Toutefois, elle ne sera corrigée que pour les lauréats inscrits sur la liste de réserve. »


12      Le titre D, point 4, de l’avis de concours établissait, en ce qui concerne l’accès des candidats à des informations les concernant :

« Dans le contexte des procédures de sélection, un droit spécifique est reconnu aux candidats d’accéder, dans les conditions décrites ci-après, à des informations les concernant directement et individuellement. En vertu de ce droit, [l’]EPSO peut fournir à un candidat qui en fait la demande des informations supplémentaires qui concernent sa participation au concours. Les demandes d’information devront être adressées par écrit à [l’]EPSO dans un délai d’un mois après la notification des résultats obtenus au concours. [L’]EPSO répondra dans un délai d’un mois après réception de la demande. Les demandes seront traitées en tenant compte du caractère secret des travaux du jury prévu par [l’article 6 de l’annexe III du statut] et dans le respect des règles relatives à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel. Des exemples d’informations pouvant être fournies sont repris au titre III, point 3 du Guide à l’intention des candidats. »

13      Une annexe complétait l’avis de concours : elle traitait des demandes de réexamen, voies de recours et plaintes auprès du Médiateur européen. Cette annexe prévoyait que, à tous les stades du concours, les candidats estimant qu’une décision leur faisait grief pouvaient utiliser les moyens suivants :

« —      Demande de réexamen

Introduire, dans un délai de 20 jours de calendrier à compter de la date d’envoi en ligne de la lettre [de l’EPSO] notifiant la décision, une demande de réexamen sous forme d’une lettre motivée à l’adresse suivante :

[…]

[L’]EPSO la transmet au président du jury lorsque cela relève de la compétence de celui-ci et une réponse est envoyée au candidat dans les meilleurs délais.

–        Voies de recours

–        soit introduire un recours auprès du :

Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne

[…]

sur la base de l’article 236 du traité instituant la Communauté européenne et de l’article 91 du statut […].

–        soit introduire une réclamation basée sur l’article 90, paragraphe 2 du statut […], à adresser à :

[EPSO]

[…]

Les délais d’ordre public […] prévus [par le statut] pour ces deux types de procédures commencent à courir à compter de la notification de l’acte faisant grief.

L’attention des candidats est attirée sur le fait que l’autorité investie du pouvoir de nomination […] n’est pas habilitée à modifier les décisions d’un jury de concours. Conformément à une jurisprudence constante, le large pouvoir d’appréciation des jurys de concours n’est soumis au contrôle du juge […] qu’en cas de violation évidente des règles qui président aux travaux. »

14      Le titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats au concours, publié sur le site internet de l’EPSO (ci-après le « guide à l’intention des candidats ») disposait :

« […]

b)      Les candidats n’ayant pas réussi l’épreuve/les épreuves écrites/pratiques et/ou ne figurant pas parmi ceux qui ont été invités à l’épreuve orale peuvent demander leurs épreuves ainsi que la fiche individuelle d’évaluation des épreuves par le jury. La demande doit être introduite dans le délai d’un mois à partir de la date d’envoi de la lettre par laquelle le candidat est informé de la fin de sa participation au concours.

[…] »

15      S’agissant de la procédure devant le Tribunal, et spécialement de l’aide judiciaire qui peut être accordée, l’article 97, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal dispose :

« L’introduction d’une demande d’aide judiciaire suspend le délai prévu pour l’introduction du recours jusqu’à la date de la notification de l’ordonnance statuant sur cette demande ou, dans les cas visés au paragraphe 3, deuxième alinéa, de l’ordonnance désignant l’avocat chargé de représenter le demandeur. »

 Faits à l’origine du litige

16      La requérante s’est portée candidate au concours. Elle a choisi la filière « Parlement/Conseil » et a été convoquée aux épreuves écrites obligatoires, qui ont eu lieu le 28 novembre 2008, à Madrid (Espagne).

17      Par une lettre du 14 mai 2009, adressée au nom du président du jury du concours, l’EPSO a informé la requérante des résultats qu’elle avait obtenus aux épreuves écrites obligatoires a) et b), à savoir, respectivement, 28/40 et 19/40, et qu’au vu de ce dernier résultat, inférieur au minimum requis de 20/40, le jury du concours n’avait pas corrigé l’épreuve écrite obligatoire c).

18      Le 14 mai 2009, la requérante a envoyé un courriel à l’EPSO dans lequel elle demandait des renseignements sur la notation de son épreuve écrite b). Au vu du fait qu’il lui manquait un seul point pour atteindre le minimum requis de 20 points, elle voulait s’assurer qu’il n’y avait pas eu d’erreur de calcul. À cette fin, elle demandait que son épreuve écrite b) lui soit communiquée, avec la correction et la note qui lui avait été attribuée.

19      Le 27 mai 2009, la requérante a introduit une demande de réexamen de son épreuve écrite b), assortie d’une demande de correction de son épreuve écrite c) et d’admission, le cas échéant, à participer à l’épreuve orale.

20      Par lettre du 2 juillet 2009, adressée au nom du président du jury du concours, l’EPSO a informé la requérante que son courriel du 14 mai 2009 avait été considéré comme une demande de réexamen de son épreuve écrite b), de ce que, après réexamen de ladite épreuve, le jury avait décidé de corriger son épreuve écrite c), et que le résultat obtenu à cette dernière épreuve, à savoir 18/40, restait au dessous du seuil requis, à savoir 20/40, pour qu’elle soit admise à participer à l’épreuve orale. Il était mentionné dans cette lettre que l’épreuve écrite b) réalisée par la requérante lui avait été adressée.

21      Par un courrier électronique du 4 juillet 2009, la requérante a demandé des renseignements sur la notation de son épreuve écrite c), compte tenu de la faiblesse de l’écart entre sa note et le minimum requis. Elle a également demandé à ce que son épreuve écrite c) lui soit communiquée, avec la correction et la note qui lui avait été attribuée et, si possible, que ladite épreuve soit réexaminée.

22      Le 10 juillet 2009, la requérante a envoyé une lettre motivée par laquelle elle demandait le réexamen de son épreuve écrite c), la communication de ladite épreuve ainsi que de la fiche individuelle d’évaluation du jury relative à la même épreuve et son admission, le cas échéant, à participer à l’épreuve orale.

23      Après avoir réexaminé l’épreuve écrite c) de la requérante, le jury du concours a décidé de confirmer la note de 18/40. Cette décision, dont la date n’est pas spécifiée, a été communiquée à la requérante par une lettre de l’EPSO du 23 juillet 2009.

24      Par une note du 28 juillet 2009, intitulée « R[éclamation] », la requérante, après s’être référée à l’article 90, paragraphe 2, du statut, avoir accusé réception de la lettre du 23 juillet 2009, et avoir exposé qu’elle avait demandé, sans succès, à recevoir, en copie, ses épreuves écrites b) et c) ainsi que la fiche d’évaluation individuelle avec la notation de ces épreuves par le jury, a réitéré ces demandes, en ajoutant qu’elle souhaitait également recevoir toute information additionnelle la concernant, en rapport avec sa participation au concours. Pour le cas où elle obtiendrait les points nécessaires, elle demandait, en outre, à être admise à participer à l’épreuve orale du concours. La note susmentionnée a été traitée par l’EPSO comme une demande de documents et non comme une réclamation administrative préalable au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

25      La requérante a reçu un courriel le 14 septembre 2009 portant en objet « EPSO/AD/130/0[8] – Votre demande de recevoir l’épreuve écrite b), c), et la fiche d’évaluation pour l’épreuve écrite c) » (ci-après le « courriel du 14 septembre 2009 »). Ce courriel mentionne qu’en annexe se trouvent les documents cités sous objet, dont la communication avait été demandée dans la lettre de la requérante du 28 juillet 2009, mais ajoute que les candidats pouvaient recevoir une copie des épreuves écrites originales, mais n’avaient pas accès à leurs épreuves corrigées ni à la traduction modèle utilisée par les correcteurs. Il ressort du dossier que les documents cités sous objet n’étaient toutefois pas annexés au courriel.

26      Le 18 novembre 2009, la requérante a demandé son admission au bénéfice de l’aide judiciaire au titre de l’article 95 du règlement de procédure, en vue d’introduire un recours devant le Tribunal. Par ordonnance du président du Tribunal, du 2 mars 2010, il a été fait droit à cette demande.

27      Postérieurement à l’introduction de la requête, l’EPSO a communiqué à la requérante, par courrier du 16 juin 2010, les textes des épreuves écrites a), b) et c), les épreuves écrites sans les corrections apportées par le jury et les fiches d’évaluation individuelle correspondant aux épreuves b) et c).

 Conclusions des parties et procédure

28      La requérante demande à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        « annuler la décision rendue le 14 septembre 2009, par laquelle l’[EPSO] a refusé de fournir à la requérante la copie de ses épreuves écrites [corrigées] ainsi qu’une fiche d’évaluation individuelle indiquant les motifs qui ont conduit le jury à lui attribuer la note éliminatoire de 18/40 à la dernière épreuve écrite c), et a ignoré la demande d’admission à l’épreuve orale du concours […] ;

–        annuler la décision rendue le 23 juillet 2009, par laquelle l’[EPSO] a confirmé le maintien de la note éliminatoire de 18/40 à la dernière épreuve écrite c) et lui a refusé l’admission à [participer à] l’épreuve orale du concours […] ;

–        annuler la liste de réserve publiée à la suite du concours, avec effet rétroactif à compter de la date de publication de celle-ci ;

–        condamner la Commission [européenne] aux dépens. »

29      La Commission demande à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, rejeter le recours comme irrecevable ;

–        subsidiairement, rejeter le recours comme dénué de fondement ;

–        condamner la requérante aux dépens.

30      Suite au dépôt du mémoire en défense, un deuxième échange de mémoires a été autorisé par le Tribunal, limité toutefois à la question de la recevabilité du recours. Le Tribunal s’estimant alors en mesure de statuer sans procédure orale, les parties ont été invitées, par courrier du greffe du 16 juin 2011, à faire part au Tribunal de leur accord, ou désaccord, sur la proposition de statuer sans audience, sur le fondement de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure. Les parties ont exprimé leur accord sur la proposition du Tribunal de statuer sans audience.

 Sur la recevabilité du recours

 Arguments des parties

31      La Commission soulève l’irrecevabilité du recours aux motifs, d’une part, que la requérante n’aurait pas identifié correctement l’acte attaqué et, d’autre part, qu’il serait quasiment certain que tant la demande d’aide judiciaire, introduite le 18 novembre 2009, que la requête, introduite le 26 mars 2010, seraient tardives.

32      En premier lieu, la requérante aurait identifié à tort le courriel du 14 septembre 2009 comme l’acte faisant grief, alors que l’acte qui lui porterait préjudice serait la décision du jury communiquée par lettre de l’EPSO du 23 juillet 2009, décision confirmant, après réexamen, la note de 18/40 à l’épreuve écrite c) et la non-admission de la requérante à participer à l’épreuve orale. La requérante aurait dû contester cette dernière décision laquelle, ayant été adoptée par le jury de concours, aurait pu être attaquée directement devant le Tribunal. Dans ce cas, le délai prévu à l’article 91, paragraphe 3, du statut aurait expiré, en principe, au bout de trois mois et dix jours à compter du 23 juillet 2009, c’est-à-dire, le 2 novembre 2009.

33      En deuxième lieu, la Commission soutient que la note du 28 juillet 2009, que la requérante a intitulée « R[éclamation] » au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, n’était qu’une simple demande visant à se faire communiquer des documents, et ne présentait pas le contenu minimum requis par la définition de la notion de réclamation administrative préalable au sens des dispositions du statut, raison pour laquelle cette note n’a pas pu avoir pour effet de suspendre le délai de trois mois et dix jours pour la saisine du Tribunal.

34      En troisième lieu, la Commission fait valoir que, à supposer même que la note du 28 juillet 2009 remplisse les conditions indispensables pour constituer une réclamation, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, le courriel du 14 septembre 2009 ne saurait être considéré comme la réponse à la réclamation, car il ne proviendrait pas de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »). Dans ces conditions, par application de l’article 90, paragraphe 2, deuxième alinéa, du statut, un rejet implicite de la réclamation serait intervenu quatre mois après celle-ci, c’est-à-dire, le 28 novembre 2009 et la requérante aurait alors disposé de trois mois et dix jours pour introduire son recours, à savoir jusqu’au 10 mars 2010. Le recours ayant été introduit le 26 mars 2010, il serait donc hors délai.

35      En quatrième lieu, la Commission est d’avis que la demande d’aide judiciaire, introduite le 18 novembre 2009, aurait été prématurée, car présentée dix jours avant l’expiration du délai de quatre mois dont disposait l’AIPN pour répondre à la prétendue réclamation, et n’aurait pas eu pour effet de suspendre le délai du recours contentieux.

36      La Commission ajoute que même si la partie du recours relative à l’accès aux informations était jugée recevable, dans la mesure où un droit d’accès aux documents de la procédure d’un concours peut exister indépendamment d’une demande d’annulation d’une décision du jury du concours, la prétention relative à la non-admission à participer à l’épreuve orale, qui serait la partie principale du recours, resterait irrecevable.

37      Enfin, la Commission estime qu’il n’y a pas de contradiction entre l’irrecevabilité qu’elle soulève et le fait que la requérante se soit vu accorder l’aide judiciaire par le président du Tribunal. À cet égard, la Commission rappelle que l’aide judiciaire est refusée lorsque l’action pour laquelle elle est demandée apparaît manifestement irrecevable, alors que, dans ses écrits, elle se limite à soutenir que, après analyse des diverses étapes administratives, le recours lui semble irrecevable, sans prétendre toutefois que l’irrecevabilité soit manifeste.

38      La requérante rétorque, en premier lieu, que le recours vise le courriel du 14 septembre 2009 parce que ce courriel est chronologiquement la dernière décision adoptée par l’EPSO. Dans la mesure où cette décision a été prise à la suite de sa réclamation, elle se substituerait à la décision du jury du concours, qui lui avait été communiquée par lettre du 23 juillet 2009, et constituerait l’acte faisant grief.

39      En deuxième lieu, la requérante affirme que sa note, datée du 28 juillet 2009, constitue bel et bien une réclamation, au sens des dispositions de l’article 90, paragraphe 2, du statut. En effet, d’une part, elle l’aurait intitulée « R[éclamation] » et aurait précisé qu’elle était introduite sur le fondement de l’article 90, paragraphe 2, du statut, ce qui attesterait de sa volonté d’introduire une réclamation au sens des dispositions du statut. D’autre part, il ressortirait clairement du texte de sa note que celle-ci avait pour but de contester la décision du jury du concours qui lui avait été communiquée par lettre du 23 juillet 2009, lettre qui y était annexée. Il ressortirait également du texte de la note que la requérante demandait à ce que son épreuve écrite c) soit réexaminée et, en conséquence, à être admise à participer à l’épreuve orale. Enfin, selon la requérante, elle n’aurait pas pu détailler davantage, dans sa note, son désaccord avec la décision du jury notifiée le 23 juillet 2009, car elle n’avait pas réussi à se voir communiquer ses épreuves écrites corrigées et que ce n’est que le 16 juin 2010 que l’EPSO lui avait envoyé ses épreuves écrites b) et c), mais sans les corrections. En outre, s’il fallait considérer que sa note du 28 juillet 2009 n’était pas une réclamation, au sens des dispositions du statut, cela impliquerait que le président du Tribunal lui aurait octroyé l’aide judiciaire pour introduire un recours hors délai.

40      En troisième lieu, la requérante observe que le courriel du 14 septembre 2009 mentionne explicitement ses demandes du 28 juillet 2009 auxquelles il a pour objet d’apporter une réponse. À cet égard, la requérante ajoute qu’un courriel dont l’adresse électronique de l’expéditeur avait le même domaine que celui figurant dans les courriels de l’EPSO, qui répondait à ce qu’elle avait demandé dans sa réclamation et qui faisait un renvoi exprès à cette dernière, sans toutefois lui donner gain de cause, doit être considéré comme contenant un rejet de sa réclamation. Selon la requérante, la Commission ne peut pas prétendre qu’elle aurait dû ignorer le courriel du 14 septembre 2009 et attendre la fin du délai de quatre mois à compter de sa réclamation du 28 juillet 2009, dont l’expiration vaut décision implicite de rejet, au risque de se voir opposer la forclusion du délai de recours contentieux, faute d’avoir contesté à temps le rejet explicite de sa réclamation. En tout état de cause, elle aurait dû en être avertie.

41      En quatrième lieu, même dans l’hypothèse où le courriel du 14 septembre 2009 ne constituerait pas un rejet de sa réclamation, la requérante fait valoir que la demande d’aide judiciaire a suspendu le délai pour l’introduction du recours jusqu’à la date de notification de l’ordonnance du président du Tribunal accordant l’aide judiciaire, soit le 10 mars 2010, date à laquelle le délai a recommencé à courir. Partant, le recours, introduit le 26 mars 2010, ne serait pas hors délai.

42      La requérante ajoute que, à supposer même qu’il faille considérer que sa demande d’aide judiciaire, introduite le 18 novembre 2009, était prématurée, car présentée avant le 28 novembre 2009, date d’expiration du délai de réponse à sa réclamation du 28 juillet 2009, il est établi que le président du Tribunal a tenu compte de cette demande à tout le moins à l’expiration dudit délai, le 28 novembre 2009. Il s’ensuivrait que le délai pour l’introduction du recours avait été suspendu entre, soit le 18 novembre 2009, soit le 28 novembre 2009 si le Tribunal venait à considérer que le courriel du 14 septembre 2009 ne constitue pas un rejet de sa réclamation, et le 10 mars 2010, date de l’ordonnance du président du Tribunal accordant l’aide judiciaire. Il serait évident que la procédure contentieuse avait débuté, car non seulement la demande d’aide judiciaire avait été traitée mais le président du Tribunal y avait fait droit, ce qu’il n’aurait pas fait si le délai de recours contentieux avait expiré et que, par conséquent, le recours avait été manifestement irrecevable.

 Appréciation du Tribunal

 Sur les actes faisant grief à la requérante

43      Il convient de rappeler, à titre liminaire, que tant la réclamation administrative que le recours juridictionnel doivent, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut, être dirigés contre un acte faisant grief au requérant. Selon une jurisprudence constante, l’acte faisant grief est celui qui produit des effets juridiques obligatoires de nature à affecter directement et immédiatement les intérêts du requérant, en modifiant, de façon caractérisée, la situation juridique de celui-ci (arrêt du Tribunal du 15 septembre 2011, Munch/OHMI, F‑6/10, point 32, et la jurisprudence citée).

44      S’agissant, en premier lieu, des décisions de jury de concours, il ressort d’une jurisprudence constante, que la décision par laquelle un jury de concours refuse l’admission d’un candidat aux épreuves, après avoir procédé, à la demande de l’intéressé, au réexamen de sa candidature, se substitue à la décision précédemment arrêtée par le jury et ne peut être considérée comme purement confirmative de celle-ci (arrêt du Tribunal de première instance du 11 février 1992, Panagiotopoulou/Parlement, T‑16/90, point 20). Ainsi, lorsqu’un candidat à un concours sollicite le réexamen d’une décision prise par un jury, c’est la décision prise par ce dernier après réexamen de la situation du candidat qui constitue l’acte lui faisant grief (arrêt du Tribunal de première instance du 13 décembre 2006, Heus/Commission, T‑173/05, point 19).

45      Dès lors, la décision du jury du concours selon laquelle la requérante n’était pas admise à l’épreuve orale, adoptée à la suite de la demande de réexamen introduite par la requérante le 10 juillet 2009 et communiquée par lettre de l’EPSO du 23 juillet 2009, s’est substituée à la décision initiale du jury, communiquée par lettre de l’EPSO du 2 juillet 2009, et constitue en l’espèce l’acte faisant grief en ce qui concerne la non-admission de la requérante à participer à l’épreuve orale du concours (ci-après la « décision de non-admission à l’épreuve orale »). C’est également la décision de non-admission à l’épreuve orale, prise après réexamen, qui fait courir les délais de réclamation et de recours sans qu’il y ait lieu de vérifier si, dans une telle situation, ladite décision peut éventuellement être considérée comme un acte purement confirmatif (voir arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, Van Neyghem/Commission, F‑73/06, point 39).

46      S’agissant, en second lieu, des décisions portant refus de communication d’informations ou de documents à des candidats, il convient de préciser que l’avis de concours a institué, au titre D, point 4, une procédure spécifique, qui – lorsque le candidat décide de la suivre, se substitue à celle prévue à l’article 90, paragraphe 1, du statut – est caractérisée par des délais très courts et a pour objet de permettre aux candidats d’exercer le droit spécifique qui leur est reconnu d’accéder à certaines informations les concernant directement et individuellement. En vertu de ce droit, l’« EPSO peut fournir, à un candidat qui en fait la demande », des informations supplémentaires concernant sa participation au concours. Les demandes doivent être introduites dans un délai d’un mois après la notification des résultats du concours, et l’EPSO s’engage à y répondre dans le délai d’un mois après la réception de la demande. Le titre D, point 4, de l’avis de concours renvoie au titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats pour des exemples d’informations pouvant être fournies aux candidats. Il ressort du titre III, point 3, sous b), dudit guide que les candidats qui n’ont pas réussi les épreuves écrites peuvent demander copie de leurs épreuves écrites, ainsi que la fiche individuelle d’évaluation des épreuves avec la notation du jury.

47      Le droit spécifique reconnu aux candidats vise à ce que les candidats évincés des concours puissent recevoir, sans qu’il soit porté atteinte au secret des travaux du jury, des informations et des documents susceptibles de leur permettre de prendre une décision éclairée quant à l’utilité de contester ou non la décision de les exclure du concours. À cette fin, l’imposition de délais très brefs, tant pour la présentation de la demande d’informations ou de documents que pour la réponse à celle-ci, a pour but de permettre au candidat de disposer en tout état de cause de ces informations et documents au moins un mois avant l’expiration soit du délai de recours devant le Tribunal soit du délai pour présenter une réclamation auprès de l’EPSO, dont le directeur exerce, en vertu de l’article 4 de la décision 2002/621 les pouvoirs dévolus à l’AIPN.

48      Il résulte de l’analyse qui vient d’être faite que le strict respect par l’EPSO du droit spécifique reconnu aux candidats, tant pour ce qui est du contenu de ce droit que pour le délai de réponse, est l’expression des devoirs qui découlent du principe de bonne administration, du droit d’accès du public aux documents et du droit à un recours effectif, conformément aux articles 41, 42 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il s’ensuit que le non-respect par l’EPSO du droit spécifique reconnu aux candidats, outre que cela pourrait conduire des candidats évincés à introduire des recours ou des réclamations sans disposer de données suffisantes, est susceptible de constituer une faute de service pouvant donner lieu, le cas échéant, à un droit à indemnisation dans le chef du candidat.

49      En l’espèce, le courriel de la requérante, du 14 mai 2009, contenait une demande visant à se faire communiquer son épreuve écrite b) corrigée, avec la notation du jury et son courriel du 4 juillet 2009, une demande de communication de son épreuve écrite c), également corrigée, et la notation du jury. En plus de ces deux courriels, la requérante a introduit une première demande de réexamen, le 27 mai 2009, visant à ce que le jury reconsidère sa décision initiale relative à la notation de son épreuve écrite b), demande de réexamen pour laquelle la requérante a eu gain de cause, et une seconde demande de réexamen, le 10 juillet 2009, relative à l’épreuve écrite c), suite à laquelle le jury a maintenu sa notation de l’épreuve en cause, ainsi que cela a été notifié à la requérante par lettre du 23 juillet 2009, sans toutefois répondre à sa demande de disposer de son épreuve écrite c) corrigée et de la fiche individuelle d’évaluation du jury relative à ladite épreuve.

50      Il ressort ainsi de la chronologie des faits que le délai d’un mois dont disposait l’EPSO pour communiquer à la requérante, en réponse à son courriel du 14 mai 2009, copie de son épreuve b), ainsi que la fiche d’évaluation individuelle avec la notation du jury, a expiré le 14 juin 2009, sans qu’aucun document n’ait été transmis à la requérante. En ce qui concerne la communication de l’information relative à l’épreuve écrite c), l’absence de réponse au courriel de la requérante du 4 juillet 2009 et à sa pétition figurant dans sa demande de réexamen du 10 juillet 2009 ne peut être qualifiée que comme une décision implicite de refus. Il y a lieu d’ajouter, à cet égard, que, même si, dans la lettre du 2 juillet 2009 adressée à la requérante, l’EPSO affirme lui avoir déjà adressé copie de son épreuve écrite b), de même que dans le courriel du 14 septembre 2009 il est indiqué que l’épreuve écrite c) et la fiche d’évaluation de ladite épreuve sont jointes en annexe, il demeure que ces documents n’ont pas été transmis à la requérante aux dates indiquées.

51      Il s’ensuit que, en ce qui concerne les demandes de communication d’informations et de documents, tant la décision implicite de rejet de transmission des informations demandées relatives à l’épreuve b), intervenue le 14 juin 2009 [ci-après la « décision refusant la communication de l’épreuve écrite b) »], que la décision implicite de ne pas transmettre des informations demandées relatives à l’épreuve c), qui figure dans la lettre du 23 juillet 2009 [ci-après la « décision refusant la communication de l’épreuve écrite c) »], dans la mesure où ladite lettre n’aborde pas la question de la transmission des informations demandées, sont des actes faisant grief à la requérante.

52      Par conséquent, tant la décision de non-admission à l’épreuve orale, que la décision refusant la communication de l’épreuve écrite b), et la décision refusant la communication de l’épreuve écrite c) sont des actes faisant grief à la requérante.

 Sur le respect des délais par la requérante

53      À cet égard, il convient de rappeler, en premier lieu, que, comme la Cour l’a jugé à plusieurs reprises, la voie de droit ouverte à l’égard d’une décision d’un jury de concours consiste normalement en une saisine directe du juge (voir, notamment, arrêt de la Cour du 14 juillet 1983, Detti/Cour de justice, 144/82, point 16, et la jurisprudence citée). En effet, une réclamation dirigée contre une décision d’un jury de concours paraît dépourvue de sens, l’institution concernée n’ayant pas le pouvoir d’annuler ou de modifier les décisions d’un jury de concours. Par suite, une interprétation excessivement restrictive de l’article 91, paragraphe 2, du statut aboutirait uniquement à prolonger, sans aucune utilité, la procédure (voir, notamment, arrêt de la Cour du 16 mars 1978, Ritter von Wüllerstorff und Urbair/Commission, 7/77, point 8).

54      En l’espèce, la décision de non-admission à l’épreuve orale constituant une décision de jury de concours susceptible, en tant que telle, d’être attaquée devant le Tribunal sans réclamation administrative préalable, le délai de recours de trois mois établi à l’article 91, paragraphe 3, du statut, majoré du délai de distance forfaitaire de dix jours en vertu de l’article 100, paragraphe 3, du règlement de procédure, a commencé à courir à partir de la notification, à une date indéterminée, de cette décision par lettre du 23 juillet 2009 mais, au plus tard le 28 juillet 2009, date de la note intitulée «R[éclamation]» dans laquelle la requérante reconnaît en avoir pris connaissance, et a expiré le 7 novembre 2009. Le 7 novembre 2009 étant un samedi, le délai de recours a été prorogé automatiquement, en application de l’article 100, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, jusqu’au lundi 9 novembre 2009.

55      La décision refusant la communication de l’épreuve écrite b) et la décision refusant la communication de l’épreuve écrite c) constituent également des décisions du jury du concours susceptibles d’être attaquées devant le Tribunal sans réclamation administrative préalable. La première de ces décisions étant intervenue le 14 juin 2009 et la requérante ayant pris connaissance de la seconde décision au plus tard le 28 juillet 2009 le délai de trois mois et dix jours pour exercer un recours devant le Tribunal a expiré, respectivement, le 24 septembre 2009 et le 7 novembre 2009, ce dernier délai prorogé jusqu’au 9 novembre 2009 pour les raisons indiquées au point précédent.

56      Par suite, la requérante aurait pu saisir directement le Tribunal par l’introduction d’un recours, au plus tard le 24 septembre 2009, pour contester la décision refusant la communication de l’épreuve écrite b) et au plus tard le 9 novembre 2009, pour contester la décision de non-admission à l’épreuve orale et la décision refusant la communication de l’épreuve écrite c).

57      Cette constatation ne saurait être infirmée par le libellé de l’article 97, paragraphe 4, du règlement de procédure, d’après lequel l’introduction d’une demande d’aide judiciaire suspend le délai prévu pour l’introduction du recours jusqu’à la date de la notification de l’ordonnance statuant sur la demande, car, en l’espèce, la requérante a demandé son admission au bénéfice de l’aide judiciaire seulement le 18 novembre 2009, c’est-à-dire alors que les délais de recours étaient, pour les trois décisions susmentionnées du jury du concours, déjà expirés.

58      Il convient de rappeler, en second lieu, qu’il est également de jurisprudence constante que si l’intéressé, au lieu de saisir directement le juge, invoque les dispositions statutaires pour s’adresser, sous forme d’une réclamation administrative, à l’AIPN, la recevabilité du recours juridictionnel introduit ultérieurement dépendra du respect par l’intéressé de l’ensemble des contraintes procédurales qui s’attachent à la voie de la réclamation préalable (arrêt du Tribunal de première instance du 23 janvier 2002, Gonçalves/Parlement, T‑386/00, point 35, et la jurisprudence citée).

59      En l’espèce, la requérante fait valoir que la note du 28 juillet 2009, intitulée « R[éclamation] » et se référant expressément aux dispositions de l’article 90, paragraphe 2, du statut, constituerait une réclamation au sens desdites dispositions.

60      Il est vrai que, selon une jurisprudence constante, une réclamation ne doit pas revêtir de forme particulière. Il suffit qu’elle manifeste clairement et de façon précise la volonté du requérant d’attaquer une décision prise à son égard (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 31 mai 1988, Rousseau/Cour des comptes, 167/86, point 8, et du 14 juillet 1988, Aldinger et Virgili/Parlement, 23/87 et 24/87, point 13 ; arrêt du Tribunal de première instance du 16 février 2005, Reggimenti/Parlement, T‑354/03, point 43). Il ressort également de la jurisprudence que l’administration doit examiner les réclamations dans un esprit d’ouverture et il suffit, pour considérer qu’elle se trouve en présence d’une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, qu’un moyen ait été préalablement soulevé, dans le cadre de la procédure administrative, d’une manière suffisamment claire pour que l’AIPN ait été en mesure de connaître les critiques que l’intéressé formulait à l’encontre de la décision contestée (voir arrêt du Tribunal de première instance du 13 janvier 1998, Volger/Parlement, T‑176/96, point 65).

61      Il n’en demeure pas moins que le but de la procédure précontentieuse étant le règlement amiable d’un litige qui naît au moment de la réclamation, l’AIPN doit être en mesure de connaître de façon suffisamment précise les arguments que l’intéressé formule à l’encontre d’une décision administrative. Il en résulte que la réclamation doit, en tout cas, contenir un exposé des moyens et arguments invoqués à l’encontre de la décision administrative contre laquelle elle est dirigée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 7 mars 1996, Williams/Cour des comptes, T‑146/94, point 44).

62      En l’espèce, le Tribunal constate, d’abord, que, comme rappelé au point 24 du présent arrêt, la note du 28 juillet 2009 s’articulait en deux volets. Par le premier, la requérante demandait la production de certains documents ainsi que des informations complémentaires. Par le second, elle demandait son admission à participer à l’épreuve orale dans le cas où elle obtiendrait les points nécessaires.

63      Le Tribunal constate ensuite, que, à l’égard du second volet de la note du 28 juillet 2009, par lequel la requérante, en demandant son admission à participer à l’épreuve orale, pourrait être regardée comme contestant la décision de non-admission à l’épreuve orale, le texte de la note en cause ne comporte l’exposé d’aucun moyen ni argument de droit ou de fait à l’appui de la demande de modification de ladite décision. Par conséquent, ce volet de la note du 28 juillet 2009 ne remplit pas les conditions minimales exigées par la jurisprudence rappelée plus haut pour être considéré comme une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut et l’EPSO n’était pas en mesure d’y apporter une réponse motivée.

64      Dans ces conditions, la demande d’annulation de la décision de non-admission à l’épreuve orale est irrecevable. La demande d’annulation de la liste de réserve ne pouvant prospérer qu’en cas d’annulation par le Tribunal de la décision de non-admission à l’épreuve orale, ladite demande doit par suite être déclarée également irrecevable.

65      Le Tribunal constate, enfin, que, même si la requérante n’avance ni argument ni moyen à l’appui des demandes faisant l’objet du premier volet de la note du 28 juillet 2009, il demeure qu’il peut être déduit du libellé même de la note du 28 juillet 2009 que la requérante se plaignait de ne pas avoir reçu les documents réclamés à plusieurs reprises, notamment dans son courriel du 14 mai 2009, relatif à l’épreuve écrite b), ainsi que dans son courriel du 4 juillet 2009 et dans sa demande de réexamen, du 10 juillet 2009, pour ce qui est de l’épreuve écrite c). Il s’ensuit que, au vu des circonstances de l’espèce, le premier volet de la note du 28 juillet 2009 aurait dû être traité par l’EPSO comme une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

66      Dans la mesure où l’EPSO n’a pas donné suite aux demandes de production de documents dans les délais rappelés au point 50 du présent arrêt, afin d’introduire une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision refusant la communication de l’épreuve écrite b) et contre la décision refusant la communication de l’épreuve écrite c), la requérante a disposé d’un délai de trois mois expirant, respectivement, le 14 septembre 2009 et le 28 octobre 2009.

67      Partant, la réclamation introduite par la requérante le 28 juillet 2009 était recevable tant à l’égard de la décision refusant la communication de l’épreuve écrite b) qu’à l’égard de la décision refusant la communication de l’épreuve écrite c).

68      Il y a lieu de relever, à ce propos, que, suite à l’introduction de la réclamation du 28 juillet 2009, les demandes de communication des épreuves écrites b) et c) corrigées ont fait l’objet d’une décision explicite de refus, communiquée par le courriel de l’EPSO, du 14 septembre 2009.

69      Dans la mesure où, en outre, par le courriel du 14 septembre 2009, l’EPSO a refusé dans la pratique de communiquer à la requérante les épreuves écrites b) et c) ainsi que la fiche d’évaluation individuelle demandées, demandes qui avaient déjà fait l’objet des décisions refusant la communication des épreuves écrites b) et c), il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision communiquée par courriel du 14 septembre 2009. En effet, il ressort d’une jurisprudence constante que des conclusions formelles dirigées contre le rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée lorsque le rejet de la réclamation est, comme tel, dépourvu de contenu autonome, dans la mesure où la décision de rejet est purement confirmative de la décision contestée (arrêt Munch/OHMI, précité, point 24, et la jurisprudence citée).

70      Il résulte de tout ce qui précède que le recours est recevable en tant qu’il vise l’annulation de la décision refusant la communication de l’épreuve écrite b), et de la décision refusant la communication de l’épreuve écrite c).

 Sur le fond

71      Il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que les demandes successives de la requérante visant à se faire communiquer des documents par l’EPSO portaient tant sur les écrits qu’elle avait réalisés dans le cadre des épreuves écrites b) et c) et sur la fiche d’évaluation desdits écrits par le jury que sur les corrections apportées auxdits écrits.

72      S’il est vrai que, pour ce qui concerne les demandes de communication des épreuves écrites b) et c), en tant qu’elle visaient les écrits réalisés par la requérante dans le cadre de ces deux épreuves, et des fiches d’évaluation desdits écrits établies par le jury, l’EPSO n’y a pas donné suite dans les délais fixés par le titre D, point 4, de l’avis de concours et ne les a pas non plus joints au courriel du 14 septembre 2009, il demeure que copie des écrits susmentionnés réalisés par la requérante ainsi que les feuilles d’évaluation de chaque épreuve établies par le jury lui ont été transmises en cours d’instance, concrètement par une lettre de l’EPSO du 16 juin 2010, et que ces documents figurent au dossier de la procédure, en tant qu’annexes au mémoire en défense de la Commission.

73      Partant, en l’absence de conclusions indemnitaires, le recours est devenu sans objet en ce qui concerne les décisions de refus de communication des épreuves écrites b) et c), en tant que ces décisions refusaient communication des écrits réalisés par la requérante et des fiches d’évaluation desdits écrits par le jury. Il convient d’ajouter que, pour autant qu’il est recevable, le présent litige n’est pas un litige à caractère pécuniaire au sens de l’article 91, paragraphe 1, du statut, et que, par conséquent, le Tribunal ne dispose pas en l’espèce d’une compétence de pleine juridiction, ce qui l’empêche d’examiner s’il y aurait lieu de condamner d’office la partie défenderesse au paiement d’une indemnité pour le préjudice causé par sa faute (voir en ce sens arrêt de la Cour du 20 mai 2010, Gogos/Commission, C‑583/08 P, point 44).

74      Il ne reste donc à examiner que les demandes d’annulation des décisions refusant la communication des épreuves écrites b) et c), en tant que ces décisions refusaient communication de ces épreuves écrites corrigées.

75      À l’appui du recours dans son ensemble, la requérante soulève plusieurs moyens tirés, le premier, de la violation du droit des candidats à accéder à des informations les concernant, le deuxième, de la violation de l’obligation de motivation et du code de bonne conduite administrative de la Commission, le troisième, de la violation du principe de transparence et le quatrième, de la violation du principe d’égalité de traitement. Un cinquième moyen, déduit de la violation des règles déterminantes pour le travail du jury du concours et des critères d’examen en vigueur, est soulevé uniquement à l’appui des conclusions à fin d’annulation de la décision de non-admission à l’épreuve orale, lesquelles ont été déclarées irrecevables au point 64 du présent arrêt.

76      Partant, le Tribunal limitera son examen aux quatre premiers moyens soulevés à l’appui du recours dans son ensemble.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du droit des candidats à accéder à des informations les concernant

 Arguments des parties

77      La requérante fait valoir que le fait de ne pas lui avoir communiqué ses épreuves écrites b) et c) corrigées est contraire au droit des citoyens de l’Union européenne d’accéder aux documents des institutions de l’Union, consacré par le règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43). Un tel refus serait également contraire au titre D, point 4, de l’avis de concours et au titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats. L’accès à ses épreuves écrites corrigées aurait permis à la requérante de comprendre les erreurs commises et de s’améliorer à l’avenir.

78      La Commission conclut au rejet du moyen.

 Appréciation du Tribunal

79      En ce qui concerne la violation alléguée du règlement no 1049/2001, il y a lieu de souligner que la requérante n’a pas suivi la procédure administrative préalable obligatoire, prévue aux articles 6 et suivants de ce règlement, pour obtenir l’accès aux documents qui font l’objet du présent litige, avant d’introduire son action devant le Tribunal, ce qui rend le premier moyen irrecevable en tant qu’il est tiré de la violation du règlement susmentionné.

80      En tout état de cause, il convient de rappeler la jurisprudence bien établie selon laquelle le règlement no 1049/2001 constitue une norme de caractère général qui détermine les principes généraux régissant l’exercice du droit de tout citoyen de l’Union d’accéder aux documents des institutions concernées dans tous les domaines d’activité de l’Union, y compris dans celui de la fonction publique (arrêt du Tribunal de première instance du 17 mai 2006, Kallianos/Commission, T‑93/04, point 87). Toutefois, comme toute norme de caractère général, le droit d’accès aux documents ainsi prévu peut être précisé, étendu ou, à l’inverse, limité, voire exclu – selon le principe suivant lequel la règle spéciale déroge à la règle générale (lex specialis derogat legi generali) – lorsqu’il existe des normes spéciales qui régissent des matières spécifiques (arrêts du Tribunal de première instance du 5 avril 2005, Hendrickx/Conseil, T‑376/03, point 55, et du 14 juillet 2005, Le Voci/Conseil, T‑371/03, point 122 ; arrêt du Tribunal du 20 janvier 2011, Strack/Commission, F‑121/07, point 65, faisant l’objet de deux pourvois pendants devant le Tribunal de l’Union européenne, affaire T‑197/11 P et affaire T‑198/11 P).

81      L’article 6 de l’annexe III du statut, le titre D, point 4, de l’avis de concours et le titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats constituent, précisément, des dispositions spéciales qui dérogent à celles du règlement no 1049/2001, puisqu’elles régissent l’accès à des types de documents spécifiques, à savoir les épreuves écrites réalisées par les candidats ainsi que les fiches d’évaluation de ces épreuves par le jury.

82      Il s’ensuit que, même si la requérante avait suivi la procédure établie aux articles 6 et suivants du règlement no 1049/2001, les dispositions de ce règlement ne trouveraient pas à s’appliquer en l’espèce.

83      En ce qui concerne la violation du titre D, point 4, de l’avis de concours et du titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats, il résulte du libellé même de ces dispositions qu’elles ne prévoient pas la communication aux candidats de leurs épreuves écrites corrigées.

84      En effet, les épreuves écrites corrigées des candidats contiennent des appréciations de caractère personnel et comparatif à l’égard des candidats et sont donc couvertes par l’article 6 de l’annexe III du statut, laquelle vise de manière spécifique la procédure de concours, qui dispose que « [l]es travaux du jury sont secrets ». Ainsi que la Cour a déjà eu l’occasion de l’indiquer, ce secret a été institué en vue de garantir l’indépendance des jurys de concours et l’objectivité de leurs travaux, en les mettant à l’abri de toutes ingérences ou pressions extérieures, qu’elles proviennent de l’administration elle-même, des candidats intéressés ou de tiers. Le respect de ce secret s’oppose, dès lors, tant à la divulgation des attitudes prises par les membres individuels des jurys qu’à la révélation de tous les éléments ayant trait à des appréciations de caractère personnel ou comparatif concernant les candidats (arrêt de la Cour du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati, C‑254/95 P, point 24 ; voir aussi arrêts du Tribunal de première instance du 27 mars 2003, Martínez Páramo e.a./Commission, T‑33/00, point 44, et Hendrickx/Conseil, précité, point 56).

85      Il s’ensuit que, dans la mesure où le règlement no 1049/2001 n’est pas applicable en l’espèce et que l’article 6 de l’annexe III du statut, le titre D, point 4 de l’avis de concours et le titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats n’obligent pas l’EPSO à communiquer aux candidats leurs épreuves écrites corrigées, le premier moyen doit être rejeté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation ainsi que du code de bonne conduite administrative de la Commission

 Arguments des parties

86      La requérante fait valoir que, en ne lui communiquant pas copie de ses épreuves écrites b) et c) corrigées, l’EPSO n’aurait pas respecté l’article 296 TFUE ni l’article 25, deuxième alinéa du statut, en ce sens que les décisions de refus ne seraient pas motivées. L’EPSO aurait également agi en violation de l’annexe à la décision de la Commission, du 17 octobre 2000, modifiant son règlement intérieur (JO L 267, p. 63), intitulée «C[ode de bonne conduite administrative pour le personnel de la Commission dans ses relations avec le public]» (ci-après le «code de bonne conduite administrative»), en vertu duquel la Commission devrait répondre aux demandes qui lui sont adressées dans le délai de quinze jours, et toute décision de cette institution indiquer clairement les motifs sur lesquels elle est fondée et être portée à la connaissance des personnes et parties concernées.

87      La Commission conclut au rejet du moyen.

 Appréciation du Tribunal

88      Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation d’une décision faisant grief a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est ou non fondée et, d’autre part, d’en rendre possible le contrôle juridictionnel. En ce qui concerne les décisions prises par un jury de concours, cette obligation doit néanmoins être conciliée avec le respect du secret qui entoure les travaux du jury en vertu de l’article 6 de l’annexe III du statut. L’exigence de motivation des décisions d’un jury de concours doit, dans ces conditions, tenir compte de la nature des travaux en cause qui comportent, en général, au moins deux stades distincts, à savoir, en premier lieu, l’examen des candidatures pour faire le tri des candidats admis à participer au concours et, en second lieu, l’examen des aptitudes des candidats à l’emploi à pourvoir, afin de dresser une liste d’aptitude. Le second stade des travaux du jury de concours est avant tout de nature comparative et, de ce fait, couvert par le secret inhérent à ces travaux. Les critères de correction adoptés par le jury préalablement aux épreuves font partie intégrante des appréciations de nature comparative auxquelles se livre le jury sur les mérites respectifs des candidats. Ces critères sont donc couverts par le secret des délibérations, au même titre que les appréciations du jury. Les appréciations de nature comparative auxquelles se livre le jury sont reflétées par les notes que ce dernier attribue aux candidats. Compte tenu du secret qui doit entourer les travaux du jury, la communication des notes obtenues aux différentes épreuves constitue une motivation suffisante des décisions du jury, ce dernier n’étant pas tenu de préciser les réponses des candidats qui ont été jugées insuffisantes ou d’expliquer pourquoi ces réponses ont été jugées insuffisantes (arrêt Parlement/Innamorati, précité, points 23 à 31 ; arrêt Martínez Páramo e.a./Commission, précité, points 43 à 52 ; arrêt du Tribunal du 30 avril 2008, Dragoman/Commission, F‑16/07, point 63).

89      Or, en l’espèce, il y a lieu de constater, d’abord, que, pour motiver le refus de communiquer à la requérante ses épreuves écrites b) et c) corrigées, le courriel du 14 septembre 2009 renvoie à l’article 6 de l’annexe III du statut, lequel prévoit que les travaux du jury sont secrets ; ensuite, que, tel qu’il ressort de la jurisprudence citée au point précédent, la communication des notes obtenues aux épreuves constituant une motivation suffisante, le jury n’est pas tenu de préciser les réponses des candidats jugées insuffisantes ; enfin, que le titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats, texte dont la requérante disposait, ne prévoit pas la communication aux candidats des épreuves écrites corrigées. Dans ces circonstances, la requérante ne saurait soutenir qu’elle n’avait pas les indications nécessaires pour savoir si le refus de communication de ses épreuves écrites b) et c) dont elle a pris connaissance par le courriel du 14 septembre 2009, était ou non fondé.

90      L’argument de la requérante selon lequel l’EPSO aurait agi contrairement aux dispositions du code de bonne conduite administrative ne saurait non plus prospérer, ce code n’étant pas applicable en l’espèce. En effet, en premier lieu, il ressort de l’intitulé même dudit code qu’il s’adresse au personnel de la Commission, et qu’il est censé régler les relations de ce personnel avec le public. En second lieu, il convient de relever que ledit code rappelle dans la disposition consacrée à son champ d’application, que les relations entre la Commission et son personnel sont exclusivement régies par le statut.

91      Or, en l’espèce, la requérante ne peut pas prétendre être un simple membre du public en ce qui concerne ses rapports avec l’EPSO. En effet, d’une part, il ressort de l’article 4 de la décision 2002/620, que, en application de l’article 91 bis du statut, les demandes et les réclamations relatives à l’exercice des pouvoirs dévolus en vertu de l’article 2, paragraphes 1 et 2, de ladite décision sont introduites auprès de l’[EPSO]. D’autre part, ayant participé au concours comme candidate, toute demande d’information concernant sa participation audit concours auprès de l’EPSO est réglée par l’annexe III du statut, le titre D, point 4, de l’avis de concours et le titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats.

92      Le deuxième moyen doit donc être rejeté comme dénué de fondement.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation du principe de transparence

 Arguments des parties

93      La requérante soutient que, en vertu de l’article 15 TFUE, la transparence est un principe de base de l’Union, chaque institution et organe de l’Union devant garantir la transparence de ses travaux. En outre, le Médiateur aurait indiqué que la transparence devrait régir les procédures de recrutement et aurait formulé des recommandations à la Commission en ce sens. Enfin, l’EPSO lui-même dans son programme de développement, publié sur son site internet le 11 septembre 2008, destiné à moderniser son approche de la sélection des candidats, requerrait la transparence des procédures de recrutement. En refusant de lui communiquer ses épreuves écrites b) et c) corrigées, l’EPSO aurait agi en violation du principe de transparence.

94      La Commission estime que le moyen est dénué de fondement.

 Appréciation du Tribunal

95      Force est de rappeler que l’article 6 de l’annexe III du statut dispose que les travaux du jury sont secrets.

96      Partant, lorsqu’une institution de l’Union refuse de communiquer à un candidat son épreuve écrite corrigée, ce dernier ne peut valablement se fonder sur la notion de transparence pour mettre en cause l’applicabilité de l’article 6 de l’annexe III du statut (arrêt Le Voci/Conseil, précité, point 124).

97      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante relatifs à un hypothétique droit d’accès des candidats d’un concours aux tests écrits corrigés, fondé sur une recommandation du Médiateur à la Commission, du 18 octobre 1999, sur l’acceptation de cette recommandation par la Commission, et sur une enquête du Médiateur, lancée en 2005, laquelle se serait terminée avec une nouvelle recommandation à la Commission relative à l’obligation, pour cette dernière, d’informer les candidats qui en font la demande sur les critères d’évaluation.

98      En effet, en premier lieu, il est vrai que le rapport spécial au Parlement européen du Médiateur 1004/97/(PD)GG, du 18 octobre 1999, disponible sur le site internet du Médiateur, contient une recommandation à la Commission en ce sens que, à compter du 1er juillet 2000 au plus tard, elle devrait donner accès à leur propres tests corrigés aux candidats à des concours qui en feraient la demande et que, dans le communiqué de presse 15/2000, du 31 juillet 2000, cité par la requérante, disponible sur le site internet du Médiateur, il est indiqué que « [l]a Commission a accepté la recommandation du Médiateur qui a pris effet en juillet 2000 ». Il est également vrai que le Médiateur a lancé en 2005 l’enquête d’initiative OI/5/05/PB relative à l’accès aux critères d’évaluation fixés par les jurys pour les épreuves écrites, enquête soldée par la même recommandation.

99      Il n’en demeure toutefois pas moins que, tel qu’il ressort des points 84 et 95 du présent arrêt, l’article 6 de l’annexe III du statut poursuit une finalité propre, justifiée par des raisons d’intérêt public, et vise de manière spécifique l’accès aux travaux du jury. Or, en vertu du titre D, point 4, de l’avis de concours et du titre III, point 3, du guide à l’intention des candidats, le droit spécifique reconnu aux candidats d’accéder à des informations les concernant relatives à leur participation au concours n’est pas absolu ni illimité mais consiste, pour ceux d’entre eux ayant échoué aux épreuves écrites, dans le droit d’obtenir une copie de leur épreuve écrite et la fiche d’évaluation individuelle de leur épreuve écrite avec la notation effectuée par le jury.

100    En tout état de cause, force est de constater que l’affirmation de la requérante relative à un éventuel engagement de la part de la Commission ou de l’EPSO de fournir aux candidats d’un concours leurs épreuves écrites corrigées n’est étayé par aucun élément de preuve.

101    En ce qui concerne l’argument relatif à la transparence des procédures de recrutement que requerrait le programme de développement de l’EPSO de 2008, mentionné au point 93 du présent arrêt, notamment la mesure no 13, il y a lieu de relever, sans préjuger de sa valeur juridique que, dans ce programme de développement, il est question de la transparence uniquement en relation avec l’introduction, dans la procédure de concours, d’entretiens structurés au cours des épreuves orales et en relation avec l’exploitation des listes de réserve par les différentes institutions. En ce qui concerne, concrètement, la mesure no 13, elle se limite à indiquer que le conseil d’administration de l’EPSO a approuvé l’introduction, dans la procédure de concours, d’un mécanisme pour faciliter l’accès des candidats à des informations complètes, dans le but de réduire le nombre de réclamations et de recours, sans définir toutefois le contenu concret des informations auxquelles les candidats devraient avoir accès.

102    Enfin, la requérante ne saurait non plus se fonder sur l’arrêt du Tribunal du 14 octobre 2008, Meierhofer/Commission, (F‑74/07, annulé sur pourvoi – mais pas quant à l’insuffisance de motivation – par arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 12 mai 2010, Commission/Meierhofer, T‑560/08 P), dans lequel le Tribunal a annulé, pour insuffisance de motivation, la décision du jury de concours de ne pas inscrire le requérant sur la liste de réserve, dans la mesure où la Commission avait refusé de produire, pour compléter la communication de la note individuelle éliminatoire reçue par le requérant à l’épreuve orale, des précisions complémentaires telles que les notes intermédiaires ayant servi pour le calcul de ladite note et, le cas échéant, les fiches d’évaluation. En effet, il suffit de relever que dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt Meierhofer/Commission, précité, c’est le Tribunal lui-même qui a ordonné la production d’informations supplémentaires, au vu des circonstances particulières du litige, lequel ne portait pas, comme en l’espèce, sur un refus d’accès à des informations.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement

 Arguments des parties

103    La requérante fait valoir qu’elle s’est vu refuser l’accès à ses épreuves écrites corrigées, alors que dans d’autres affaires la Commission les aurait remises aux candidats, en règle générale, après une plainte portée devant le Médiateur, et cite des arrêts des juridictions de l’Union dans lesquels il serait fait état d’une telle communication.

104    La Commission indique que tous les candidats au concours ont été traités de la même manière et que la politique générale de l’EPSO est de ne pas communiquer les épreuves corrigées, car elles sont protégées par le secret entourant les travaux des jurys de concours.

 Appréciation du Tribunal

105    Selon une jurisprudence constante, il y a violation du principe d’égalité lorsque des situations différentes sont traitées de manière identique ou lorsque deux catégories de personnes, dont les situations factuelles et juridiques ne présentent pas de différences essentielles, se voient appliquer un traitement différent (voir, notamment, arrêt du Tribunal de première instance du 25 octobre 2005, De Bustamante Tello/Conseil, T‑368/03, point 69, et la jurisprudence citée).

106    En l’espèce, la requérante ne prétend pas avoir été traitée différemment des autres candidats du concours en ce qui concerne l’accès aux épreuves écrites corrigées, mais différemment des candidats à d’autres concours qui auraient eu accès à leurs épreuves écrites corrigées.

107    À l’appui de son argumentation, la requérante invoque deux catégories d’exemples. La première consiste dans des exemples de situations dans lesquelles une institution aurait fourni à un candidat ses épreuves écrites corrigées à la suite de l’intervention du Médiateur agissant sur une plainte qui lui avait été adressée par ledit candidat. La seconde est représentée par un arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes et deux arrêts du Tribunal.

108    En ce qui concerne les affaires de la première catégorie d’exemples, il y a lieu de relever que la requérante n’a pas adressé de plainte au Médiateur. Elle ne peut donc pas prétendre à être traitée par l’EPSO de la même manière que les candidats qui se sont plaints auprès du Médiateur. Pour ce qui est de la seconde catégorie d’exemples, le Tribunal constate qu’il ressort de l’arrêt Le Voci/Conseil, précité, que si, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, le Conseil a, pour suivre la recommandation du Médiateur auprès duquel le candidat s’était plaint, transmis à celui-ci copie de son épreuve écrite avec la notation, le Conseil ne s’est pas pour autant engagé par une telle transmission à une divulgation future systématique des épreuves écrites corrigées, la portée d’une telle décision de l’institution étant limitée au cas d’espèce, alors que, dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts Van Neyghem/Commisssion et Dragoman/Commission, précités, les requérants, à l’instar de la requérante, s’étaient vu communiquer leurs épreuves écrites ainsi que les fiches d’évaluation établies par le jury.

109    Il s’ensuit que le quatrième moyen soulevé à l’appui du recours est à rejeter, car non fondé.

110    Il découle de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son ensemble comme étant en partie irrecevable et en partie non fondé.

 Sur les dépens

111    Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 dudit règlement, « [u]ne partie, même gagnante, peut être condamnée partiellement voire totalement aux dépens, si cela apparaît justifié en raison de son attitude, y compris avant l’introduction de l’instance, en particulier si elle a fait exposer à l’autre partie des frais qui sont jugés frustratoires ou vexatoires. »

112    En l’espèce, s’il résulte des motifs et des conclusions ci-dessus énoncés que la requérante est la partie qui succombe et que la Commission a conclu à sa condamnation aux dépens, il en ressort également que, alors que la requérante avait demandé à plusieurs reprises la communication d’informations la concernant, relatives à ses épreuves écrites b) et c), en suivant la procédure établie au titre D, point 4, de l’avis de concours, et avait reçu plusieurs communications de l’EPSO d’après lesquelles la documentation demandée y était annexée, l’EPSO n’a fait droit à la demande de communication d’informations que le 16 juin 2010, à savoir alors que la requérante avait déjà introduit sa requête. Ce faisant, l’EPSO a manqué à l’obligation figurant dans l’avis de concours consistant à fournir à un candidat qui en fait la demande, des informations supplémentaires concernant sa participation au concours. Par ailleurs, et même si les informations demandées n’étaient pas indispensables aux fins de la rédaction de la réclamation, il ne peut pas être exclu que, si la requérante en avait disposé à temps, elle aurait pu mieux préparer sa réclamation et la requête, voire décider de ne pas introduire de recours. Compte tenu des circonstances particulières de l’espèce, et étant précisé que l’application de l’article 88 du règlement de procédure n’est pas restreint aux seules hypothèses dans lesquelles l’administration a fait exposer à un requérant des frais frustratoires ou vexatoires, la Commission doit supporter ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Commission européenne supporte ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par Mme Cuallado Martorell.

Rofes i Pujol

Boruta

Bradley

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 septembre 2012.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       M. I. Rofes I Pujol


* Langue de procédure : l’espagnol.