Language of document : ECLI:EU:T:2018:661

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

9 octobre 2018 (*)

 « Marque de l’Union européenne – Demande de marque de l’Union européenne verbale COOKING CHEF GOURMET – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑697/17,

De Longhi Benelux SA, établie à Luxembourg (Luxembourg), représentée par Mmes M. Arnott, A. Nicholls, solicitors, et M. G. Hollingworth, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Bonne, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 24 juillet 2017 (affaire R 231/2017-1), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal COOKING CHEF GOURMET comme marque de l’Union européenne,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de Mme I. Pelikánová, président, MM. V. Valančius et U. Öberg (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 4 octobre 2017,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 17 janvier 2018,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 15 juin 2016, la requérante, De Longhi Benelux SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal COOKING CHEF GOURMET.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 7 et 11 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–        classe 7 : « Mixeurs électriques intégrant un élément (chauffant) de cuisson à induction ; accessoires pour les mixeurs électriques précités, tous pour mélanger, mixer, réduire en purée, écraser, mixer, réduire en pulpe, pétrir, rouler, broyer, émincer, hacher, trancher, râper, déchiqueter, éplucher, couper, concasser, tamiser, battre et fouetter des aliments ; lames adaptées aux mixeurs électriques précités ; bols à mélanger et bols mixeurs adaptés aux mixeurs électriques précités ; pièces et accessoires des mixeurs électriques précités, à savoir moteurs électriques » ;

–        classe 11 : « Appareils de cuisson à induction équipés d’une fonction de mélange ou de transformation des aliments ».

4        Par décision du 30 novembre 2016, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement de la marque demandée, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, du règlement 2017/1001], pour l’ensemble des produits visés au point 3 ci-dessus.

5        Le 30 janvier 2017, la requérante a formé un recours contre cette décision auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001).

6        Par décision du 24 juillet 2017 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. Elle a, tout d’abord, décidé, s’agissant du territoire pertinent, de limiter son analyse à la partie anglophone du territoire de l’Union européenne et relevé, s’agissant du public pertinent, que celui-ci était composé tant du grand public, constitué de consommateurs moyens normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés, que du public spécialisé du secteur de la restauration. Ensuite, après avoir constaté le sens de chacun des éléments verbaux de la marque demandée, la chambre de recours a précisé que ces éléments décrivaient la finalité des produits concernés, étaient laudatifs et couramment utilisés pour décrire des aliments et des boissons, de sorte qu’ils ne seraient pas perçus comme une indication de l’origine commerciale des produits. La chambre de recours en a conclu que la marque demandée était intrinsèquement dépourvue de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, en faisant application de l’article 7, paragraphe 2, de ce règlement.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens, y compris ceux exposés au cours de la procédure qui s’est déroulée devant la chambre de recours.

8        L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009. Ce moyen se subdivise en trois branches fondées, en substance, la première, sur une erreur d’appréciation du caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée, la deuxième, sur une erreur d’appréciation du niveau d’attention du public pertinent et, la troisième, sur une erreur d’appréciation du caractère distinctif de la marque demandée lié à la renommée de la marque antérieure chef de la requérante.

10      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif. Selon le paragraphe 2 de ce même article, l’enregistrement d’une marque doit être refusé même si les motifs absolus de refus n’existent que dans une partie de l’Union.

11      Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, signifie que cette marque permet d’identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises (voir arrêts du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 33 et jurisprudence citée, et du 20 octobre 2011, Freixenet/OHMI, C‑344/10 P et C‑345/10 P, EU:C:2011:680, point 42 et jurisprudence citée).

12      À cet égard, il convient de rappeler que les signes dépourvus de caractère distinctif visés par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 sont réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix si l’expérience s’avère positive ou de faire un autre choix si elle s’avère négative [arrêt du 27 février 2002, REWE-Zentral/OHMI (LITE), T‑79/00, EU:T:2002:42, point 26 ; voir, également, arrêt du 3 septembre 2015, iNET 24 Holding/OHMI (IDIRECT 24), T‑225/14, non publié, EU:T:2015:585, point 43 et jurisprudence citée].

13      Le caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, au regard des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, au regard de la perception qu’en a le public pertinent (voir arrêt du 20 octobre 2011, Freixenet/OHMI, C‑344/10 P et C‑345/10 P, EU:C:2011:680, point 43 et jurisprudence citée). Le niveau d’attention du consommateur moyen, censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services visés [arrêt du 10 octobre 2007, Bang & Olufsen/OHMI (Forme d’un haut-parleur), T‑460/05, EU:T:2007:304, point 32].

14      À cet égard, un minimum de caractère distinctif suffit à faire obstacle à l’application du motif absolu de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [voir arrêt du 25 septembre 2015, BSH/OHMI (PerfectRoast), T‑591/14, non publié, EU:T:2015:700, point 40 et jurisprudence citée].

15      S’agissant de marques composées de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou les services visés par ces marques, leur enregistrement n’est pas exclu en raison d’une telle utilisation (arrêts du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk, C‑64/02 P, EU:C:2004:645, point 41, et du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 35). Quant à l’appréciation du caractère distinctif de telles marques, la Cour a déjà jugé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer à celles-ci des critères plus stricts que ceux applicables à d’autres signes (arrêts du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk, C‑64/02 P, EU:C:2004:645, points 32 et 44, et du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 36).

16      En effet, ces marques véhiculent par définition, dans une mesure plus ou moins grande, un message objectif, même simple, et peuvent être aptes à indiquer au consommateur l’origine commerciale des produits ou des services en cause. Tel peut notamment être le cas lorsque ces marques ne se réduisent pas à un message publicitaire ordinaire, mais possèdent une certaine originalité ou prégnance, nécessitent un minimum d’effort d’interprétation ou déclenchent un processus cognitif auprès du public concerné [arrêt 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, points 56 et 57 ; voir également, en ce sens, arrêt du 6 juin 2013, Interroll/OHMI (Inspired by efficiency), T‑126/12, non publié, EU:T:2013:303, point 23].

17      C’est à la lumière des règles rappelées aux points 10 à 16 ci-dessus qu’il convient d’examiner si la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 en concluant que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif.

 Sur la première branche, tirée d’une erreur d’appréciation du caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée

18      Tout d’abord, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir fait une application erronée des principes dégagés par la jurisprudence de la Cour et du Tribunal quant à l’appréciation d’une marque dans son ensemble et au degré minimal de caractère distinctif requis. La requérante soutient que la chambre de recours n’a pas analysé l’impression d’ensemble produite par la marque demandée, laquelle présenterait un caractère distinctif.

19      Ensuite, la requérante fait valoir que, bien que la chambre de recours ait fondé la décision attaquée sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, l’affirmation, aux points 15 et 16 de la décision attaquée, selon laquelle le public pertinent comprendrait les mots composant la marque demandée comme une description de la finalité des produits concernés, reposerait essentiellement sur les conditions matérielles énoncées à l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce règlement, fondées sur la nature descriptive de la marque au regard des produits en cause.

20      Enfin, bien que la requérante ne conteste pas la signification des mots composant la marque demandée retenue par la chambre de recours, elle allègue que la marque demandée, prise dans son ensemble, n’a aucune signification. Selon la requérante, la combinaison des mots composant la marque demandée ne respecte pas les règles grammaticales anglaises et requiert un minimum de réflexion de la part du public pertinent, de sorte que la marque demandée fait tout au plus allusion à la finalité des produits concernés.

21      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

22      En premier lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait utilisé une méthode d’analyse erronée en procédant à l’examen individuel des mots composant la marque demandée, il convient de rappeler que, dans le cas de signes verbaux composés, tels que celui en l’espèce, il est nécessaire de prendre en considération l’impression d’ensemble que la marque produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y aurait pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen de chacun des éléments constitutifs de la marque demandée. Ainsi, au cours d’une appréciation globale de la marque, il peut s’avérer utile d’examiner chacun des éléments qui la composent [voir arrêt du 8 février 2011, Paroc/OHMI (INSULATE FOR LIFE), T‑157/08, EU:T:2011:33, point 50 et jurisprudence citée ; arrêt du 23 octobre 2017, Barmenia Krankenversicherung/EUIPO (Mediline), T‑810/16, non publié, EU:T:2017:749, point 22].

23      En l’espèce, il convient de constater que la chambre de recours a, au point 14 de la décision attaquée, examiné le sens respectif des mots « cooking », « chef » et « gourmet ». Néanmoins, contrairement à ce qu’allègue la requérante, elle s’est ensuite attachée à la signification de leur combinaison pour en déduire, aux points 16 à 17 de la décision attaquée, que le public pertinent comprendrait cette expression comme une indication laudative selon laquelle les produits concernés permettent de cuisiner de façon raffinée, de la même façon qu’un chef cuisinier.

24      La chambre de recours a donc procédé à un examen de l’impression d’ensemble du signe verbal COOKING CHEF GOURMET de sorte que l’argument de la requérante à cet égard manque en fait.

25      En deuxième lieu, il y a lieu de rappeler qu’il existe un certain recoupement entre les champs d’application respectifs des motifs absolus de refus d’enregistrement d’une marque énoncés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009, la première de ces dispositions se distinguant toutefois de la seconde en ce qu’elle couvre l’ensemble des circonstances dans lesquelles un signe n’est pas de nature à distinguer les produits ou services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises [voir arrêt du 7 septembre 2017, VM/EUIPO – DAT Vermögensmanagement (Vermögensmanufaktur), T‑374/15, EU:T:2017:589, point 97 (non publié) et jurisprudence citée].

26      Lorsque, dans le domaine visé par la marque, le public pertinent perçoit un signe comme fournissant des informations sur la nature des produits ou des services qu’il désigne, et non comme indiquant l’origine des produits et des services en cause, la marque ne satisfait pas aux conditions de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [voir arrêt du 29 avril 2010, Kerma/OHMI (BIOPIETRA), T‑586/08, non publié, EU:T:2010:171, point 22 et jurisprudence citée].

27      Dans ces conditions, la chambre de recours n’a pas contourné l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009 lorsqu’elle a conclu à l’absence de caractère distinctif de la marque demandée en raison du fait qu’elle serait perçue par le public pertinent comme une formule promotionnelle décrivant la finalité des produits, et non comme une indication de l’origine commerciale des produits.

28      En troisième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la marque demandée est dépourvue de signification dans la mesure où sa structure diffère de l’usage syntaxique ordinaire en anglais, lui conférant ainsi un minimum de caractère distinctif, il convient de constater que la marque demandée est constituée de trois mots anglais du langage courant, dont la signification respective est « cuisinant » ou « cuisson », « chef » et « gourmet », ce que la requérante ne conteste pas.

29      Compte tenu des caractéristiques des produits désignés par la marque demandée, dont l’usage est associé à la cuisine, le signe verbal COOKING CHEF GOURMET, sera immédiatement perçu par le public pertinent comme une référence élogieuse ou promotionnelle aux qualités et à la finalité des produits concernés.

30      La marque demandée possède donc un caractère laudatif de nature publicitaire, dont la fonction est de mettre en relief les qualités et la finalité des produits pour la présentation desquels elle est utilisée [voir, en ce sens, arrêts du 21 mai 2015, Mo Industries/OHMI (Splendid), T‑203/14, non publié, EU:T:2015:301, point 21, et du 24 novembre 2016, CG/EUIPO – Perry Ellis International Group (P PRO PLAYER), T‑349/15, non publié, EU:T:2016:677, point 38].

31      À cet égard, il convient de rappeler que la connotation élogieuse d’une marque verbale n’exclut pas que celle-ci soit néanmoins de nature à garantir aux consommateurs la provenance des produits ou des services qu’elle désigne. Ainsi, une telle marque peut concomitamment être perçue par le public concerné comme une formule promotionnelle et une indication de l’origine commerciale des produits ou des services.

32      Il en découle que, pour autant que ce public perçoit la marque comme une indication de cette origine, le fait qu’elle est simultanément, voire en premier lieu, appréhendée comme une formule promotionnelle est sans incidence sur son caractère distinctif (arrêt du 12 juillet 2012, Smart Technologies/OHMI, C‑311/11 P, EU:C:2012:460, point 30).

33      Il s’ensuit qu’une marque constituée d’une formule promotionnelle ou d’une indication de qualité doit être considérée comme dépourvue de caractère distinctif si elle n’est susceptible d’être perçue par le public pertinent que comme une simple formule promotionnelle. En revanche, une telle marque doit se voir reconnaître un caractère distinctif si, au-delà de sa fonction promotionnelle, elle peut être perçue d’emblée par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits et des services visés [arrêts du 21 janvier 2010, Audi/OHMI, C‑398/08 P, EU:C:2010:29, points 44 et 45 ; du 11 décembre 2012, Fomanu/OHMI (Qualität hat Zukunft), T‑22/12, non publié, EU:T:2012:663, point 22, et du 6 juin 2013, Inspired by efficiency, T‑126/12, non publié, EU:T:2013:303, point 24].

34      Or, comme l’a soulevé la chambre de recours au point 17 de la décision attaquée, le fait que les trois éléments constitutifs du signe verbal COOKING CHEF GOURMET soient juxtaposés ne saurait suffire, par la seule omission d’article ou de préposition(s) dans sa structure (« [for] cooking [like] [a] gourmet chef ») à en faire une invention lexicale susceptible de conférer audit signe un caractère distinctif [voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 2003, Best Buy Concepts/OHMI (BEST BUY), T‑122/01, EU:T:2003:183, point 32].

35      Ainsi, l’ensemble formé par le groupe de mots « cooking chef gourmet » ne présente, au niveau de la grammaire ou de la syntaxe, aucun écart perceptible quant à la construction d’une phrase qui ne sera comprise que comme une référence élogieuse à la finalité des produits concernés, lesquels permettent au public pertinent de cuisiner comme un fin gourmet et un chef cuisinier. Dans ces conditions, aucun effort particulier d’interprétation de la part du public pertinent ne sera nécessaire pour comprendre le sens du signe demandé.

36      Dès lors, même s’il est vrai que la combinaison des éléments verbaux de la marque demandée diffère de l’usage grammatical ordinaire en anglais, il y a lieu de constater que, contrairement à ce que soutient la requérante, cette circonstance n’est pas de nature à conférer à la marque demandée un caractère ambigu.

37      Il s’ensuit que le public pertinent ne sera pas détourné du message promotionnel clair véhiculé par la marque demandée, qui renvoie exclusivement à la finalité des produits en cause [voir, en ce sens, arrêt du 30 novembre 2017, Mackevision Medien Design/EUIPO (TO CREATE REALITY), T‑50/17, non publié, EU:T:2017:855, point 40].

38      Au vu de ce qui précède, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu que la marque demandée ne serait pas perçue par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits visés.

39      Partant, il convient d’écarter la première branche du moyen unique.

 Sur la deuxième branche, tirée d’une erreur d’appréciation du niveau d’attention du public pertinent

40      À titre liminaire, il convient de relever que la requérante ne conteste pas les appréciations de la chambre de recours, aux points 8 et 9 de la décision attaquée, selon lesquelles, d’une part, l’analyse peut être limitée, en application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, à la partie anglophone du territoire de l’Union, les éléments verbaux de la marque demandée étant des mots anglais, et, d’autre part, le public pertinent est constitué du grand public ainsi que du public spécialisé du secteur de la restauration. Il convient d’approuver ces appréciations de la chambre de recours.

41      En revanche, la requérante conteste, en substance, le niveau d’attention du public pertinent. Selon la requérante, la chambre de recours aurait omis de prendre en considération le caractère sophistiqué et onéreux des produits concernés, de sorte que le public pertinent ferait preuve d’un niveau d’attention accru.

42      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante et fait valoir, en tout état de cause, qu’un niveau d’attention accru du public pertinent ne modifierait en rien l’appréciation de la signification de la marque demandée au regard des produits concernés.

43      En l’espèce, si certains des produits couverts par la marque demandée et relevant des classes 7 et 11 peuvent avoir un prix d’achat relativement élevé et faire l’objet d’un usage s’étendant sur plusieurs années, il convient néanmoins de constater que la plupart de ces produits sont des appareils de cuisine qui, de nos jours, ne nécessitent pas de connaissances techniques particulières.

44      Par ailleurs, le niveau d’attention du public pertinent peut être relativement faible à l’égard d’indications à caractère promotionnel, qu’il s’agisse du consommateur final moyen ou d’un public plus attentif de spécialistes ou de consommateurs avisés, et ce même si, comme en l’espèce, certains des produits concernés nécessitent un engagement financier relativement important [voir arrêt du 25 mars 2014, Deutsche Bank/OHMI (Passion to Perform), T‑291/12, non publié, EU:T:2014:155, points 32 et 33 et jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt du 15 septembre 2005, Citicorp/OHMI (LIVE RICHLY), T‑320/03, EU:T:2005:325, points 73 et 74].

45      Dès lors, la chambre de recours a pu considérer à juste titre que le public pertinent, composé du grand public et du public spécialisé, avait un niveau d’attention moyen à l’égard de la marque demandée, en raison de son caractère promotionnel.

46      Partant, l’argument tiré de l’erreur d’appréciation du degré d’attention du public pertinent est non fondé, de sorte qu’il y a lieu d’écarter la deuxième branche du moyen unique.

 Sur la troisième branche, tirée d’une erreur d’appréciation du caractère distinctif de la marque demandée lié à la renommée de la marque antérieure chef de la requérante

47      Par la troisième branche, la requérante soutient que la marque demandée possède d’ores et déjà un caractère distinctif du fait de l’enregistrement de la marque antérieure chef par la requérante, laquelle serait largement connue et ferait l’objet d’une utilisation intensive et de longue date depuis les années 1950. La marque demandée étant une variante de la marque antérieure chef, le public pertinent serait en mesure d’attribuer la marque demandée directement à la requérante et d’identifier l’origine commerciale des produits concernés.

48      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante et précise, à cet égard, que la marque antérieure chef fait l’objet d’une action en nullité.

49      En l’espèce, d’une part, pour autant que la requérante prétende que la marque demandée ait acquis un caractère distinctif du fait de l’enregistrement antérieur de la marque chef, il y a lieu de rejeter cet argument comme étant dénué de pertinence.

50      En effet, un tel argument, qui n’est en l’espèce, en tout état de cause, nullement démontré, aurait dû être invoqué au soutien d’une demande tendant à ce que l’EUIPO reconnaisse à la marque demandée un caractère distinctif acquis par l’usage, en application de l’article 7, paragraphe 3, du règlement no 207/2009. Or, la requérante ne s’est pas prévalue de cette circonstance devant l’EUIPO, de sorte que cette question demeure étrangère au présent litige [arrêt du 21 novembre 2013, Heede/OHMI (Matrix-Energetics), T‑313/11, non publié, EU:T:2013:603, point 62].

51      D’autre part, et en tout état de cause, l’enregistrement antérieur sur lequel la requérante fonde son argumentation concerne le signe verbal chef, à savoir un signe qui diffère du signe faisant l’objet du présent recours, lequel comporte également les éléments verbaux « cooking » et « gourmet ».

52      Compte tenu de ces différences entre les deux signes, l’enregistrement antérieur dont la requérante se prévaut ne saurait affecter la légalité de la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la marque demandée n’est pas capable de servir d’identifiant de l’origine commerciale des produits visés [voir, en ce sens, arrêt du 24 avril 2018, VSM/EUIPO (WE KNOW ABRASIVES), T‑297/17, non publié, EU:T:2018:217, point 60].

53      Il y a donc lieu d’écarter la troisième branche du moyen unique et, partant, de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

54      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

55      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      De Longhi Benelux est condamnée aux dépens.

Pelikánová

Valančius

Öberg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 octobre 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.