Language of document : ECLI:EU:C:2016:365

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

26 mai 2016 (*)

« Renvoi préjudiciel – Tarif douanier commun – Classement de marchandises – Règlement (CEE) no 2658/87 – Nomenclature combinée – Position 8710 et sous-position 9305 91 00 – Note 3 de la section XVII et note 1, sous c), du chapitre 93 – Chars et automobiles blindées de combat – Armes de guerre – Classement d’un système de tourelle »

Dans l’affaire C‑262/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche), par décision du 19 mai 2015, parvenue à la Cour le 1er juin 2015, dans la procédure

GD European Land Systems – Steyr GmbH

contre

Zollamt Eisenstadt Flughafen Wien,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. C. Lycourgos (rapporteur), président de chambre, M. E. Juhász et Mme K. Jürimäe, juges,

avocat général : M. M. Campos Sánchez-Bordona,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour GD European Land Systems – Steyr GmbH, par Mes P. Csoklich et R. Schneider, Rechtsanwälte,

–        pour la Commission européenne, par MM. A. Caeiros et B.‑R. Killmann, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la note 3 de la section XVII et de la note 1, sous c), du chapitre 93 de la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), dans sa version résultant du règlement d’exécution (UE) no 1001/2013 de la Commission, du 4 octobre 2013 (JO 2013, L 290, p. 1) (ci-après la « NC »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant GD European Land Systems – Steyr (ci-après « GD ») au Zollamt Eisenstadt Flughafen Wien (bureau des douanes d’Eisenstadt Flughafen Wien, Autriche) (ci-après le « bureau des douanes »), au sujet du classement, au sein de la NC, d’un système de tourelle (station d’armes Multi Gun Turret System).

 Le cadre juridique

 La NC

3        Le classement douanier des marchandises importées dans l’Union européenne est régi par la NC.

4        L’article 12 du règlement no 2658/87, tel que modifié par le règlement (CE) no 254/2000 du Conseil, du 31 janvier 2000 (JO 2000, L 28, p. 16), prévoit que la Commission européenne adopte chaque année un règlement reprenant la version complète de la NC et des taux autonomes et conventionnels des droits du tarif douanier commun y afférents, telle qu’elle résulte des mesures arrêtées par le Conseil de l’Union européenne ou par la Commission. Ce règlement est publié au Journal officiel de l’Union européenne au plus tard le 31 octobre et est applicable à partir du 1er janvier de l’année suivante. Il ressort du dossier soumis à la Cour que la version de la NC applicable aux faits au principal est celle afférente à l’année 2014, issue du règlement no 1001/2013.

5        La première partie de la NC, relative aux « Dispositions préliminaires », comprend un titre I, consacré aux « Règles générales », dont la section A, intitulée « Règles générales pour l’interprétation de la nomenclature combinée », dispose notamment :

« Le classement des marchandises dans la [NC] est effectué conformément aux principes ci-après.

1.      Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les règles suivantes.

[...] »

6        La deuxième partie de la NC, intitulée « Tableau des droits », comprend la section XVII, intitulée « Matériel de transport », dont la note 2, sous ij), et la note 3 sont libellées de la manière suivante :

« 2.      Ne sont pas considérés comme “parties” ou “accessoires”, même lorsqu’ils sont reconnaissables comme destinés à du matériel de transport :

[...]

ij)      les armes (chapitre 93) ;

[...]

3.      Au sens des chapitres 86 à 88, les références aux “parties” ou aux “accessoires” ne couvrent pas les parties ou accessoires qui ne sont pas exclusivement ou principalement destinés aux véhicules ou articles de la présente section. Lorsqu’une partie ou un accessoire est susceptible de répondre à la fois aux spécifications de deux ou plusieurs positions de la section, il doit être classé dans la position qui correspond à son usage principal. »      

7        La section XVII de la NC comprend un chapitre 87, intitulé « Voitures automobiles, tracteurs, cycles et autres véhicules terrestres, leurs parties et accessoires », qui comprend la position 8710. Cette position est libellée comme suit :

« 8710 00 00

Chars et automobiles blindés de combat, armés ou non ; leurs parties…………………………………………. » 


8        La section XIX de la deuxième partie de la NC, intitulée « Armes, munitions et leurs parties et accessoires », comprend un chapitre 93, lui aussi intitulé « Armes, munitions et leurs parties et accessoires », dont la note 1, sous c), précise :

« 1.       Le présent chapitre ne comprend pas :

[...]

c)      les chars de combat et automobiles blindés (nº 8710) ;

[...] »

9        Ce chapitre 93 comprend les positions 9301 à 9305 de la NC :

« 9301

[...]

Armes de guerre, autres que les revolvers, pistolets et armes blanches :

9302 00 00

Revolvers et pistolets, autres que ceux des nos 9303 ou 9304……………………………………………………

9303

Autres armes à feu et engins similaires utilisant la déflagration de la poudre [...] :

[...]

9304 00 00

[...]

Autres armes (fusils, carabines et pistolets à ressort, à air comprimé ou à gaz, matraques, par exemple), à l’exclusion de celles du no 9307……………………..

9305

Parties et accessoires des articles des nos 9301 à 9304 : 

[...]

9305 20 00


9305 9100

9305 9900

[...]

– de fusils ou carabines du no 9303……………………

– autres :

– – des armes de guerre du no 9301…………………

– – autres…………………………………………... »


 Le règlement (CEE) nº 2913/92

10      L’article 12, paragraphes 1 et 2, du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 82/97 du Parlement européen et du Conseil, du 19 décembre 1996 (JO 1997, L 17, p. 1), dispose :

« 1.      Les autorités douanières délivrent, sur demande écrite et selon des modalités déterminées selon la procédure du comité, des renseignements tarifaires contraignants ou des renseignements contraignants en matière d’origine.

2.      Le renseignement tarifaire contraignant ou le renseignement contraignant en matière d’origine ne lie les autorités douanières vis‑à‑vis du titulaire que, respectivement, pour le classement tarifaire ou pour la détermination de l’origine d’une marchandise.

Le renseignement tarifaire contraignant ou le renseignement contraignant en matière d’origine ne lie les autorités douanières qu’à l’égard des marchandises pour lesquelles les formalités douanières sont accomplies postérieurement à la date de sa délivrance par lesdites autorités. »

 Les notes explicatives du système harmonisé de désignation et de codification des marchandises

11      Le Conseil de coopération douanière, devenu l’Organisation mondiale des douanes (OMD), a été institué par la convention portant création dudit conseil, conclue à Bruxelles le 15 décembre 1950. Le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après le « SH ») a été élaboré par l’OMD et institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, conclue à Bruxelles le 14 juin 1983 et approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique européenne, par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO 1987, L 198, p. 1). La NC reprend les positions et les sous-positions à six chiffres du SH. Seuls les septième et huitième chiffres formant des subdivisions lui sont propres.

12      Les notes explicatives du SH sont élaborées au sein de l’OMD conformément aux dispositions de ladite convention.

13      La note explicative relative à la position 8710 du SH précise :

« La présente position couvre, d’une part, les chars de combat [tanks] et les automobiles blindées, armés ou non, et d’autre part, leurs parties.

Les chars de combat ou tanks sont des véhicules blindés à chenilles, armés de diverses armes offensives (canons, mitrailleuses, lance‑flammes, etc.) logées généralement dans une tourelle pivotante [...]

Parties

La présente position couvre aussi les parties des véhicules blindés visés ci-dessus, pour autant que ces parties satisfassent aux deux conditions suivantes :

1.      Être reconnaissables comme étant destinées exclusivement ou principalement auxdits véhicules.

2.      Ne pas être exclues en vertu des notes de la section XVII (voir les considérations générales de cette section).

Parmi ces parties, on peut citer :

1)      Les châssis de véhicules blindés et leurs parties (tourelles, portes et capots blindés, etc.).

[...] »

14      La note explicative relative à la position 9305 du SH énonce :

« Parmi les parties et accessoires relevant de cette position, on peut citer :

1.      Les parties d’armes de guerre, telles que tubes (y compris leurs chemises de rechange), freins et culasses de canons de tous types, tourelles, affûts, trépieds et autres supports spéciaux pour canons, mitrailleuses, fusils-mitrailleurs, etc., même avec mécanisme pour le pointage et le chargement.

[...] »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

15      GD est une société à responsabilité limitée qui fait partie d’un groupe de l’industrie de l’armement présent au niveau mondial et dont l’objet social est, notamment, la fabrication de chars de combat. Le 25 février 2014, cette société a déclaré, au bureau des douanes, une marchandise désignée comme étant un système de tourelle de chars de combat, en vue de sa mise en libre pratique dans l’Union.

16      Le bureau des douanes a accepté la mise en libre pratique de cette marchandise, puis a communiqué à GD le taux des droits à l’importation dus sur celle-ci, soit 1,7 %, découlant du classement de ladite marchandise dans la position 8710 de la NC. Le bureau des douanes a, en effet, considéré que la marchandise concernée était une « tourelle de chars de combat, qui constitu[ait] une partie déjà identifiable installée exclusivement ou essentiellement dans des chars de combat ». Selon la juridiction de renvoi, cette communication vaut décision en matière de droits de douane.

17      Le 11 mars 2014, GD a introduit une réclamation contre la communication du bureau des douanes en demandant le classement de la marchandise en cause au principal dans la sous-position 9305 91 00 de la NC, correspondant aux « armes de guerre », qui implique un taux de droits de douane de 0 %. À la suite du rejet de sa réclamation par le bureau des douanes, GD a introduit un recours devant le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances, Autriche).

18      Devant cette juridiction, GD a produit un renseignement tarifaire contraignant, émis le 11 avril 2014 par le Hauptzollamt Hannover (bureau principal des douanes de Hanovre, Allemagne), qui classait, selon elle, une marchandise identique à celle en cause dans l’affaire au principal dans la sous-position 9305 91 00 de la NC.

19      La description de la marchandise en cause au principal figure dans ce renseignement tarifaire, que la juridiction de renvoi reprend dans la demande de décision préjudicielle. Cette description se lit comme suit :

« [...] il s’agit d’une combinaison de divers éléments techniques qui sont intégrés pour l’essentiel dans une construction semblable à une tourelle, faite de métal commun. Le système de tourelle constitue la base d’une station d’armes et est pour l’essentiel équipé des sous-systèmes et composants énumérés ci-après : propulsions électriques, stabilisation concentrique, appareils de vision fonctionnant optiquement et électroniquement, y compris les affichages et les appareils de commande pour le personnel en intervention (tireur, commandant), un système [de guidage du tir], plusieurs capteurs, réservoirs à munitions et dispositifs pour alimenter les armes en munitions. Le système est préparé pour accueillir un canon automatique et une mitrailleuse (ces deux armes de guerre ne faisant pas l’objet du présent renseignement tarifaire contraignant). L’interaction des sous-systèmes mentionnés donne au personnel en intervention la possibilité de se servir du canon de bord et de la mitrailleuse et permet donc d’effectuer des tirs ciblés. Le système de tourelle doit être monté sur le toit des systèmes de transport mobiles maritimes et terrestres, de manière pivotante, ou également être utilisé dans des installations fixes. »

20      Le 29 octobre 2014, le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances) a rejeté le recours de GD. Cette juridiction a classé le système de tourelle en cause au principal, en tant que partie d’un char de combat, dans la position 8710 de la NC, et a indiqué que le renseignement tarifaire délivré par le bureau principal des douanes de Hanovre ne pouvait avoir un effet rétroactif.

21      GD a introduit un recours contre la décision du Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances) rejetant son recours devant le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche). Cette dernière juridiction relève que, selon le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances), la marchandise visée par le renseignement tarifaire contraignant délivré par le bureau principal des douanes de Hanovre et présenté par GD est la même que celle en cause au principal. Elle estime néanmoins que ce renseignement tarifaire ne saurait s’appliquer en l’occurrence étant donné que la déclaration du 25 février 2014 est antérieure à l’adoption, le 11 avril 2014, dudit renseignement tarifaire.

22      La juridiction de renvoi précise que la marchandise en cause au principal a été installée sur un véhicule qu’il conviendrait de classer dans la position 8710 de la NC en tant que char de combat ou en tant qu’automobile blindée autopropulsée. Or, il existerait une contradiction entre les notes explicatives relatives à la position 8710 du SH, selon lesquelles relèvent de cette position « [l]es châssis de véhicules blindés et leurs parties (tourelles, portes et capots blindés, etc.) », et celles relatives à la position 9305 du SH, desquelles il ressort que relèvent de cette position les parties d’armes de guerre, telles que, notamment, les tourelles, les mitrailleuses et les fusils-mitrailleurs.

23      En outre, cette juridiction s’interroge sur l’interprétation qu’il convient de donner de la note 3 de la section XVII de la NC, qui prévoit que seules les parties qui sont destinées de manière exclusive ou principale à des produits relevant des chapitres 86 à 88 de la NC, notamment, de la position 8710 de la NC, constituent des « parties », au sens de ces chapitres.

24      Dans ces conditions, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      L’exception prévue par la note 1, sous c), du chapitre 93 de la NC, dans sa version applicable aux faits de la présente affaire, relative aux “chars de combat et automobiles blindées (no 8710)”, comprend-elle également leurs “parties” ?

2)      La note 3 de la section XVII de la NC doit-elle être interprétée en ce sens qu’une “station d’armes (tourelle de chars de combat)” qui peut être utilisée sur des chars de combat, sur des “systèmes de transport maritime mobiles” ou encore dans des installations fixes doit être classée dans la position 8710 de la NC, en tant que partie d’un char de combat, étant donné que cette station d’armes a été importée par le fabricant de chars de combat pour la production ou le montage de chars de combat et est effectivement utilisée à cette fin ? »

 Sur les questions préjudicielles

25      Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la NC doit être interprétée en ce sens qu’un système de tourelle, tel que celui en cause au principal, relève de la position 8710 ou de la sous-position 9305 91 00 de la NC, compte tenu du fait qu’il a été importé pour la production ou le montage de chars de combat et que, par la suite, il a été effectivement utilisé à cette fin.

26      Selon cette juridiction, si un tel système devait être considéré comme une partie d’un char de combat, il conviendrait de le classer dans la position 8710 de la NC, qui vise précisément les « [c]hars et automobiles blindés de combat, armés ou non ; [et] leurs parties ». Si, en revanche, ce système devait être considéré comme étant une partie ou un accessoire d’une arme de guerre, il relèverait de la sous-position 9305 91 00 de celle-ci, visant spécifiquement de telles parties ou de tels accessoires d’une arme de guerre.

27      Il importe de relever que, lorsque la Cour est saisie d’un renvoi préjudiciel en matière de classement tarifaire, sa fonction consiste davantage à éclairer la juridiction nationale sur les critères dont la mise en œuvre permettra à cette dernière de classer correctement les produits en cause dans la NC qu’à procéder elle-même à ce classement, et ce d’autant plus qu’elle ne dispose pas nécessairement de tous les éléments indispensables à cet égard (arrêts du 7 novembre 2002, Lohmann et Medi Bayreuth, C‑260/00 à C‑263/00, EU:C:2002:637, point 26, ainsi que du 22 novembre 2012, Digitalnet e.a., C‑320/11, C‑330/11, C‑382/11 et C‑383/11, EU:C:2012:745, point 61).

28      La Cour a jugé, par ailleurs, que les règles générales pour l’interprétation de la NC prévoient que le classement des marchandises est déterminé selon les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres, les libellés des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres étant considérés comme n’ayant qu’une valeur indicative (arrêts du 12 juin 2014, Lukoyl Neftohim Burgas, C‑330/13, EU:C:2014:1757, point 33, et du 11 juin 2015, Baby Dan, C‑272/14, EU:C:2015:388, point 25).

29      Il résulte également d’une jurisprudence constante de la Cour que, dans l’intérêt de la sécurité juridique et de la facilité des contrôles, le critère décisif pour le classement tarifaire des marchandises doit être recherché, d’une manière générale, dans leurs caractéristiques et propriétés objectives, telles que définies par le libellé de la position de la NC et des notes de section ou de chapitre (voir, notamment, arrêts du 16 février 2006, Proxxon, C‑500/04, EU:C:2006:111, point 21, ainsi que du 5 mars 2015, Vario Tek, C‑178/14, EU:C:2015:152, point 21 et jurisprudence citée).

30      En l’occurrence, il y a lieu de constater que, d’une part, selon la note 2, sous ij), de la section XVII de la NC, relative notamment à la position 8710 de la NC, les armes relevant du chapitre 93 de la NC ne sont pas considérées comme des « parties » ou des « accessoires » d’un matériel de transport visé à cette section, même lorsqu’elles sont reconnaissables comme destinées à ce matériel de transport. D’autre part, la note 1, sous c), du chapitre 93 de la NC exclut expressément de ce chapitre les chars de combat relevant de la position 8710 de la NC.

31      Étant donné que cette dernière position mentionne également les parties de chars de combat, cette exclusion vise nécessairement non seulement les chars de combat, mais aussi leurs parties. Il convient, dès lors, de déterminer si le système de tourelle en cause au principal peut être considéré comme une « partie » d’un char de combat, au sens de la position 8710 de la NC. En effet, si tel est le cas, ce système ne saurait être une arme, au sens de la position 9301 de la NC, et ne saurait, par conséquent, relever de l’exclusion prévue par la note 2, sous ij), de la section XVII de la NC.

32      Il résulte de la note 3 de la section XVII de la NC qu’un système de tourelle, tel que celui en cause au principal, ne peut être considéré comme étant une « partie » ou un « accessoire » d’un char de combat, au sens de la position 8710 de la NC, que s’il est destiné « exclusivement » ou « principalement » à un char de combat.

33      La juridiction de renvoi demande, à cet égard, si l’utilisation finale de ce système de tourelle est un élément déterminant aux fins de répondre à la question de savoir si ledit système doit être considéré comme étant une partie « exclusivement » ou « principalement » destinée à un char de combat.

34      Il convient de relever que la destination « exclusive » ou « principale » dudit système de tourelle doit pouvoir être vérifiée au moment du dédouanement et, par conséquent, lors de l’examen de la demande de mise en libre pratique de cette marchandise (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 2015, ALKA, C‑635/13, EU:C:2015:268, point 37).

35      Il s’ensuit que la circonstance qu’un système de tourelle ait été importé pour la production ou le montage de chars de combat et qu’il soit, par la suite, effectivement utilisé à cette fin, bien qu’elle puisse constituer un élément à prendre en considération, ne signifie pas nécessairement que ce système soit « exclusivement » ou « principalement » destiné auxdits chars, au sens de la note 3 de la section XVII de la NC ou de la note explicative relative à la position 8710 du SH.

36      Il ressort de la décision de renvoi que le système de tourelle en cause au principal peut être installé sur le toit de systèmes de transport mobiles maritimes et terrestres, de manière pivotante, ou également être utilisé dans des installations fixes. Il s’ensuit que ce système de tourelle ne saurait être considéré comme étant une partie « exclusivement » destinée à un char de combat.

37      Dans ces conditions, il revient à la juridiction de renvoi de vérifier si, eu égard à ses caractéristiques et à ses propriétés objectives, ledit système de tourelle est « principalement » destiné à un char de combat. Si tel est le cas, il devrait être classé dans la position 8710, sans que l’utilisation finale qui en est faite en l’occurrence soit déterminante à cet égard.

38      S’il ressortait de cette vérification que tel n’est pas le cas, il reviendrait à la juridiction de renvoi d’examiner le point de savoir si le système de tourelle en cause au principal, qui, selon les éléments fournis par ladite juridiction, n’est pas une « arme de guerre », peut néanmoins être considéré comme étant une « partie » ou un « accessoire » d’une telle arme, au sens de la sous-position 9305 91 00 de la NC.

39      La Cour a déjà jugé, à cet égard, au sujet de parties et d’accessoires de machines, d’appareils et d’instruments, que la notion de « parties » implique la présence d’un ensemble pour le fonctionnement duquel ces parties sont indispensables et que la notion d’« accessoires » comprend des organes d’équipement interchangeables permettant d’adapter un appareil à un travail particulier ou lui conférant des possibilités supplémentaires ou encore le mettant en mesure d’assurer un service particulier en corrélation avec sa fonction principale. Afin de garantir une application cohérente et uniforme du tarif douanier commun, ces définitions doivent pouvoir s’appliquer à la position 9305 de la NC, et en particulier à la sous-position 9305 9100 de celle-ci (voir, par analogie, arrêt du 4 mars 2015, Oliver Medical, C‑547/13, EU:C:2015:139, point 69 et jurisprudence citée).

40      Or, il y a lieu de relever que, selon la description du système de tourelle en cause au principal effectuée par la juridiction de renvoi, ce système peut être considéré comme étant une « partie » ou un « accessoire » d’une arme de guerre, telle qu’un canon ou une mitrailleuse, au sens de la sous-position 9305 91 00 de la NC. En effet, il ressort de la décision de renvoi que ledit système de tourelle permet d’accueillir un canon automatique et une mitrailleuse. Le même système de tourelle constitue la base d’une station d’armes et qu’il est, pour l’essentiel, équipé de plusieurs sous-systèmes et composants, tels que, notamment, des propulsions électriques, des appareils de vision fonctionnant optiquement et électroniquement, y compris des affichages et des appareils de commande pour le personnel se trouvant en intervention (tireur, commandant), d’un système d’arme téléguidée, de plusieurs réservoirs à munitions et dispositifs d’alimentation des armes en munitions, qui donnent audit personnel la possibilité de se servir du canon de bord ainsi que de la mitrailleuse et permettent, par conséquent, d’effectuer des tirs ciblés. .

41      Ainsi, eu égard à ses caractéristiques objectives propres, s’il s’avérait que le système de tourelle en cause au principal n’est pas principalement destiné à un char de combat, il devrait être considéré soit comme étant une « partie » d’une arme de guerre, dans la mesure où sa présence s’avérerait indispensable pour le fonctionnement du canon ou de la mitrailleuse qu’il accueille, soit, à tout le moins, comme étant un « accessoire » d’une telle arme de guerre, en ce qu’il permet d’adapter cette dernière à une utilisation particulière ou de lui conférer des potentialités supplémentaires.

42      Cette appréciation est confirmée par la note explicative relative à la position 9305 du SH, selon laquelle relèvent de cette position les parties d’armes de guerre, telles que, notamment, « les tourelles, affûts, trépieds et autres supports spéciaux pour canons, mitrailleuses, fusils‑mitrailleurs, etc., même avec mécanisme pour le pointage et le chargement ». Il ressort donc de cette note explicative, lue conjointement avec la note explicative relative à la position 8710 du SH, que les tourelles, lorsqu’elles ne constituent pas une partie du châssis de véhicules blindés, sont des parties d’« armes de guerre », en tant qu’elles servent de support pour le fonctionnement ou l’utilisation de ces armes.

43      Dans ces conditions, le système de tourelle en cause au principal devrait être classé dans la sous-position 9305 91 00 de la NC.

44      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre aux questions posées que la NC doit être interprétée en ce sens qu’un système de tourelle, tel que celui en cause au principal, qui a été importé pour la production de chars de combat et, par la suite, a été effectivement utilisé à cette fin, relève de la position 8710 de la NC s’il est « principalement » destiné à un char de combat, ce qu’il revient à la juridiction de renvoi de vérifier en tenant compte des caractéristiques et des propriétés objectives de ce système de tourelle, sans que l’utilisation finale de celui-ci dans le cas d’espèce soit déterminante aux fins de son classement. Si tel n’est pas le cas, il convient de classer ledit système de tourelle, en tant que partie ou accessoire d’« armes de guerre », dans la sous-position 9305 91 00 de la NC.

 Sur les dépens

45      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) dit pour droit :

La nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, dans sa version résultant du règlement d’exécution (UE) no 1001/2013 de la Commission, du 4 octobre 2013, doit être interprétée en ce sens qu’un système de tourelle, tel que celui en cause au principal, qui a été importé pour la production de chars de combat et, par la suite, a été effectivement utilisé à cette fin, relève de la position 8710 de cette nomenclature combinée s’il est « principalement » destiné à un char de combat, ce qu’il revient à la juridiction de renvoi de vérifier en tenant compte des caractéristiques et des propriétés objectives de ce système de tourelle, sans que l’utilisation finale de celui-ci dans le cas d’espèce soit déterminante aux fins de son classement. Si tel n’est pas le cas, il convient de classer ledit système de tourelle, en tant que partie ou accessoire d’« armes de guerre », dans la sous-position 9305 91 00 de ladite nomenclature combinée.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.