Language of document : ECLI:EU:F:2007:218

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

12 décembre 2007 (*)

« Fonction publique – Irrecevabilité manifeste – Article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance »

Dans l’affaire F‑109/07,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Georgi Kerelov, demeurant à Pazardzhik (Bulgarie), représenté par Me A. Kerelov, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, Mme I. Boruta et M. H. Kanninen, juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 9 octobre 2007 par courrier électronique (le dépôt de l’original étant intervenu le 15 octobre suivant), M. Kerelov demande, notamment, l’annulation de la décision du directeur de l’Office de sélection du personnel des Communautés européennes (EPSO), du 2 février 2007 (ci-après la « décision attaquée »), de ne pas lui communiquer les informations et documents relatifs au concours général EPSO/AD/43/06 (publié le 11 avril 2006, JO C 87 A, p. 3, ci-après le « concours »).

 Faits à l’origine du litige

2        Le requérant s’est porté candidat au concours, organisé par l’EPSO en vue de la constitution d’une réserve de recrutement de juristes linguistes (AD 7) de langue bulgare, pour la filière « Cour de justice des Communautés européennes ».

3        Par lettre du 5 janvier 2007, le requérant a demandé au directeur de l’EPSO que lui soient communiqués une liste d’informations et des documents concernant le déroulement des épreuves du concours.

4        Par la décision attaquée, l’EPSO a informé le requérant que, en raison du secret qui entoure les travaux du jury, les seuls documents qu’il pouvait obtenir étaient les copies de ses épreuves écrites et des fiches d’évaluation correspondantes ainsi que « tout ce qui [était] lié à la motivation des décisions [le] concernant ». L’EPSO a encore précisé ne pas partager les appréciations du requérant à propos des procédures de sélection ni admettre les graves accusations portées dans sa lettre au sujet de « desseins insidieux » ou de « complicité passive », affirmations qui, selon lui, auraient dû être présentées de manière plus correcte et être suffisamment étayées.

5        Par lettre du 6 mars 2007, le requérant a adressé au directeur de l’EPSO une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut »), contre la décision attaquée.

6        N’ayant pas reçu de réponse à sa réclamation dans le délai de quatre mois fixé à l’article 90, paragraphe 2, second alinéa, du statut, le requérant a introduit le présent recours.

 Conclusions du requérant

7        Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission des Communautés européennes à lui payer une indemnité forfaitaire évaluée ex aequo et bono à 1 000 euros ainsi que les intérêts légaux à partir de l’introduction de l’instance pour les dommages matériels et moraux subis du fait de la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

 En droit

8        À l’appui de son recours, le requérant soulève un moyen unique, tiré de la violation du droit au procès équitable, sur la base de l’argumentation suivante :

« Le refus de l’EPSO de communiquer ces documents et informations au requérant est illégal car il nuit gravement à l’exercice du droit au procès équitable […] dans le cadre de la contestation judiciaire des résultats du concours au point de vider ce droit de sa substance en raison notamment de l’impossibilité pour le requérant de connaître autrement d’éventuelles irrégularités du concours auxquelles il doit appuyer son action en justice. Les conditions d’exercice de ce droit au procès équitable des candidats aux concours EPSO se durciront davantage avec l’entrée en vigueur au [1er novembre 2007] du règlement de procédure du [Tribunal] qui fait peser désormais sur eux le risque d’une condamnation aux dépens en fonction de l’issue de leurs actions en justice, alors qu’actuellement ils n’encourent pas ce risque même en cas d’échec de leurs actions devant les juridictions communautaires. Pourtant, le droit au procès équitable est garanti par l’art[icle] 6 de la convention européenne [de sauvegarde] des droits de l’homme et [des libertés fondamentales] et, les États membres de l’[Union européenne], comme parties à cette convention, doivent en assurer le respect par les juridictions communautaires en raison de l’assimilation des décisions de justice de celles‑ci à des décisions de justice nationales de ces États. »

9        En vertu de l’article 76 du règlement de procédure, adopté le 25 juillet 2007 (JO L 225, p. 1) et entré en vigueur le 1er novembre suivant, lorsqu’un recours est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

10      En l’espèce, à la lumière du dossier, le Tribunal décide de statuer sans poursuivre la procédure.

11      Selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur (voir arrêt de la Cour du 12 novembre 1981, Salumi e.a., 212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9 ; arrêts du Tribunal de première instance du 19 février 1998, Eyckeler & Malt/Commission, T‑42/96, Rec. p. II-401, point 55, et du 12 septembre 2007, González y Díez/Commission, T‑25/04, non encore publié au Recueil, point 58). Néanmoins, il est de jurisprudence établie que la recevabilité d’une requête s’apprécie au moment de son introduction (arrêt de la Cour du 27 novembre 1984, Bensider e.a./Commission, 50/84, Rec. p. 3991, point 8, et ordonnance du président du Tribunal de première instance du 8 octobre 2001, Stauner e.a./Parlement et Commission, T‑236/00 R II, Rec. p. II‑2943, point 49).

12      Il résulte de ces considérations que si la règle, énoncée à l’article 76 du règlement de procédure, selon laquelle le Tribunal peut rejeter par ordonnance un recours qui apparaît manifestement irrecevable, est une règle de procédure qui s’applique dès la date de l’entrée en vigueur dudit règlement aux litiges pendants devant le Tribunal, il n’en va pas de même des règles sur la base desquelles ce dernier peut, en application de cet article, regarder un recours comme manifestement irrecevable. Ainsi, les règles fixant les conditions de recevabilité d’une requête sont nécessairement celles qui étaient applicables à la date d’introduction de celle‑ci.

13      En l’espèce, la requête ayant été introduite le 9 octobre 2007, il y a lieu de se référer aux règles applicables à l’époque, à savoir l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance des Communautés européennes, applicable mutatis mutandis au Tribunal, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier.

14      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 7, paragraphe 1, de l’annexe I dudit statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance, la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit, sur lesquels celui-ci se fonde, ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnances du Tribunal de première instance du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, Rec. p. II‑523, point 20, et du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, Rec. p. II‑1703, point 49 ; arrêt du Tribunal de première instance du 15 juin 1999, Ismeri Europa/Cour des comptes, T‑277/97, Rec. p. II‑1825, point 29).

15      Ainsi qu’il découle de la jurisprudence, la partie requérante ne saurait se limiter à faire une énonciation abstraite de ses moyens, notamment en se bornant à affirmer que l’acte attaqué serait illégal, sans étayer plus avant cette affirmation en explicitant en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est basé (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 18 novembre 1992, Rendo e.a./Commission, T‑16/91, Rec. p. II‑2417, point 130 ; du 16 mars 1993, Blackman/Parlement, T‑33/89 et T‑74/89, Rec. p. II‑249, points 64 et 65, ainsi que du 17 mars 1994, Hoyer/Commission, T‑43/91, RecFP p. I‑A‑91 et II‑297, point 22).

16      Or, en l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 8 de la présente ordonnance, le moyen unique tiré de la violation du droit au procès équitable est énoncé d’une manière abstraite dans la requête, sans que soit apportée la moindre argumentation au soutien de cette énonciation permettant au Tribunal de comprendre en quoi il aurait été porté atteinte à un tel droit. De telles considérations abstraites, qui n’exposent pas de façon pertinente et cohérente les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels se fondent les conclusions de la requête, ne permettent pas à la partie défenderesse de préparer utilement sa défense ni au Tribunal de statuer sur le recours.

17      Compte tenu de ce qui précède, et sans qu’il y ait lieu de s’interroger sur la question de savoir si la décision attaquée constitue un acte faisant grief, le recours doit être rejeté comme manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

18      En vertu de l’article 122 du règlement de procédure, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième de ce règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur dudit règlement, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

19      En vertu de l’article 88 du règlement de procédure du Tribunal de première instance, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. La présente ordonnance intervient avant que la partie défenderesse ait déposé son mémoire en défense. Par conséquent, le requérant ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme manifestement irrecevable.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 12 décembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

      S. Van Raepenbusch      

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : le français.