Language of document : ECLI:EU:F:2009:117

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

17 septembre 2009 (*)

« Fonction publique – Incidents de procédure – Exception d’irrecevabilité et d’incompétence – Procédure par défaut »

Dans l’affaire F‑121/07,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Guido Strack, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Cologne (Allemagne), représenté par Me H. Tettenborn, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme B. Eggers, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. H. Kanninen (rapporteur), président, Mme I. Boruta et M. S. Van Raepenbusch, juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1        Dans le cadre du recours introduit le 22 octobre 2007 par M. Strack, la Commission des Communautés européennes a, par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 29 mai 2008, soulevé une exception d’irrecevabilité et d’incompétence à l’encontre dudit recours, au titre des « articles 76 et 78 du règlement de procédure ».

2        Le 12 juin 2008, le Tribunal a invité le requérant à déposer ses observations sur cette exception d’irrecevabilité et d’incompétence pour le 7 juillet 2008.

3        Par courrier du 19 juin 2008, parvenu au greffe du Tribunal le même jour par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 25 juin suivant), le requérant a demandé l’annulation de la décision du Tribunal fixant au 7 juillet 2008 le délai imparti pour présenter ses observations sur l’exception d’irrecevabilité et d’incompétence déposée par la Commission et a sollicité, à titre subsidiaire, la prorogation dudit délai. Le requérant a également demandé à ce que soit prononcé un arrêt par défaut dans la présente affaire.

4        Dans ce même courrier du 19 juin 2008, le requérant fait valoir que l’exception d’irrecevabilité et d’incompétence soulevée par la Commission est manifestement irrecevable, faute d’avoir été présentée dans le délai d’un mois à compter de la signification de la requête, fixé par l’article 78, paragraphe 1, du règlement de procédure.

5        Le 1er juillet 2008, le Tribunal a informé les parties qu’il y avait lieu d’enregistrer le courrier du requérant du 19 juin 2008 et de le considérer comme une demande de prorogation du délai de dépôt des observations sur l’exception d’irrecevabilité et d’incompétence. Un nouveau délai a alors été fixé par le Tribunal au 2 septembre 2008 pour le dépôt des observations du requérant. Celui-ci a fait parvenir ses observations au greffe du Tribunal le 2 septembre 2008 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 9 septembre suivant) par lesquelles il maintient ses conclusions présentées dans le courrier du 19 juin 2008. À titre subsidiaire, il soutient que l’exception d’irrecevabilité est dénuée de fondement et que le recours est recevable.

6        Par courrier du 2 avril 2009, au motif de l’existence d’éléments de fait nouveaux, le requérant a déposé des observations complémentaires sur l’exception d’irrecevabilité et d’incompétence soulevée par la Commission et a demandé au Tribunal de l’autoriser, avant le 10 juin 2009, à étendre ses chefs de conclusions.

7        Par courrier du greffe du 25 mai 2009, le Tribunal a informé le requérant de sa décision de ne pas enregistrer son courrier du 2 avril 2009 au motif qu’« un tel type de courrier, faisant notamment apparaître une date limite pour prendre une décision, ne constitue pas une pièce prévue par le règlement de procédure (article 8 des instructions au greffier) ».

8        Par courrier du 28 mai 2009, le requérant prétend que la décision du Tribunal mentionnée au point précédent est manifestement illicite et doit être annulée par le président ou le Tribunal. Le requérant ajoute qu’au cas où le Tribunal n’accueillerait pas favorablement, au plus tard le 10 juin 2009, la demande formulée dans sa lettre du 2 avril 2009, il formerait un nouveau recours.

9        Le 9 juin 2009, le greffe du Tribunal a informé le représentant du requérant de ce que le Tribunal ne pourrait pas répondre à sa lettre du 28 mai 2009 avant le 10 juin 2009.

10      Le recours dans la présente affaire a été introduit le 22 octobre 2007, soit avant l’entrée en vigueur, le 1er novembre 2007, du règlement de procédure, publié au Journal officiel de l’Union européenne du 29 août 2007 (JO L 225, p. 1). Lors de l’introduction du recours, le règlement de procédure du Tribunal de première instance des Communautés européennes était donc applicable mutatis mutandis à la présente instance, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne.

11      L’article 114 du règlement de procédure du Tribunal de première instance ne précise pas si le délai d’introduction d’une exception d’irrecevabilité ou d’incompétence par acte séparé diffère du délai de deux mois fixé au défendeur pour présenter un mémoire en défense par l’article 46 du même règlement de procédure, lequel délai est compté à partir de la signification de la requête. Toutefois, selon la jurisprudence, le délai de deux mois prévu par ledit article 46 s’applique par analogie à la présentation d’une exception d’irrecevabilité ou d’incompétence par acte séparé (voir, en ce sens, ordonnances du Tribunal du 14 décembre 2007, Duyster/Commission, F‑82/06, non encore publiée au Recueil, points 36 à 41, et du 22 mai 2008, Daskalakis/Commission, F‑107/07, non encore publiée au Recueil, point 25).

12      Pour sa part, l’article 78, paragraphe 1, du règlement de procédure prévoit qu’une demande tendant à ce que le Tribunal statue sans engager le débat au fond doit être introduite dans un délai d’un mois à compter de la signification de la requête, lequel est donc plus court que celui résultant du règlement de procédure du Tribunal de première instance applicable antérieurement au Tribunal.

13      Le délai qui est imparti à la partie défenderesse pour présenter son exception d’irrecevabilité ou d’incompétence court, que l’on se situe dans le champ d’application de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal de première instance ou dans celui de l’article 78 du règlement de procédure, à compter de la signification de la requête (ordonnance Daskalakis/Commission, précitée, point 25).

14      Il convient de déterminer lequel des règlements de procédure était applicable et partant la durée du délai, à savoir un ou deux mois, impartie en l’espèce pour l’introduction de l’exception d’irrecevabilité et d’incompétence présentée par la Commission par acte séparé.

15      Selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges pendants au moment où elles entrent en vigueur, à la différence des règles de fond qui sont habituellement interprétées comme ne visant pas des situations acquises avant leur entrée en vigueur (voir, notamment, arrêts de la Cour du 12 novembre 1981, Meridionale Industria Salumi e.a., 212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9, et du 9 mars 2006, Beemsterboer Coldstore Services, C‑293/04, Rec. p. I‑2263, point 21 et la jurisprudence citée).

16      En l’espèce, la signification de la requête à la Commission étant intervenue le 15 novembre 2007, soit postérieurement à l’entrée en vigueur du règlement de procédure, le délai que devait respecter la Commission était par conséquent celui qui était alors en vigueur, d’un mois, courant à compter de cette signification et résultant dudit règlement de procédure (ordonnance Daskalakis/Commission, précitée, point 25).

17      Toutefois, lors de la réunion informelle qui s’est tenue entre les parties, en présence du Tribunal, dans le cadre d’une tentative de règlement amiable, le 4 décembre 2007, le Tribunal a décidé de proroger le délai de dépôt du mémoire en défense au 29 février 2008. Le 18 janvier 2008, la Commission a demandé de proroger le délai de dépôt du mémoire en défense au 17 avril 2008, ce qui a été accepté par le Tribunal. Enfin, le 11 mars 2008, le Tribunal a décidé d’accorder une nouvelle prorogation du délai de dépôt du mémoire en défense, faisant courir celui-ci jusqu’au 30 mai 2008, ce qui a conduit la Commission à présenter son exception d’irrecevabilité et d’incompétence par acte daté du 29 mai 2008, déposé au greffe du Tribunal le même jour.

18      Contrairement à ce que soutient le requérant, le fait que la Commission a choisi, avant l’expiration du délai prorogé de dépôt du mémoire en défense, de soulever une exception d’irrecevabilité et d’incompétence en vertu de l’article 78 du règlement de procédure, au lieu de présenter un mémoire en défense contenant une analyse au fond de l’affaire, n’est pas de nature à remettre en question la conformité de sa demande de prorogation aux dispositions pertinentes du règlement de procédure ni à permettre de conclure au caractère abusif de cette demande (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal de première instance du 10 juillet 2002, Comitato organizzatore del convegno internazionale/Commission, T‑387/00, Rec. p. II‑3031, point 35).

19      En effet, d’une part, aux termes de l’article 39, paragraphe 1, du règlement de procédure, la partie défenderesse doit présenter un mémoire en défense dans les deux mois qui suivent la signification de la requête. En vertu du paragraphe 2 de ce même article, le délai prévu au paragraphe 1 peut, dans des circonstances exceptionnelles, être prorogé par le président à la demande motivée de la partie défenderesse. En l’espèce, comme indiqué au point 17 de la présente ordonnance, la Commission a obtenu une prorogation du délai pour la présentation du mémoire en défense.

20      S’il est vrai que l’article 78 du règlement de procédure prévoit que la demande de statuer sur l’irrecevabilité ou sur l’incompétence doit être présentée dans un délai d’un mois à compter de la signification de la requête et qu’aucune disposition explicite ne prévoit la possibilité de proroger ce délai, il ne saurait en être déduit, dès lors que la prorogation du délai de dépôt du mémoire en défense est intervenue (décision du Tribunal du 4 décembre 2007) avant l’expiration du délai d’un mois à compter de la signification de la requête pour la présentation de l’exception d’irrecevabilité (signification de la requête à la Commission le 15 novembre 2007), que la Commission ne puisse pas déposer avant l’expiration du délai prorogé une exception d’irrecevabilité ou d’incompétence par acte séparé. En effet, en accordant la prorogation du délai de dépôt du mémoire en défense avant l’expiration du délai d’un mois à compter de la signification de la requête, le Tribunal a accepté implicitement que, dans le délai prorogé imparti, la Commission puisse déposer une exception d’irrecevabilité ou d’incompétence par acte séparé ou un mémoire en défense.

21      Il convient encore de rappeler que, dans la présente affaire, la prorogation du délai de dépôt du mémoire en défense, décidée à trois reprises, est intervenue alors qu’une tentative de règlement amiable avait eu lieu.

22      Dans les circonstances particulières de l’espèce, il convient donc de considérer que l’exception d’irrecevabilité et d’incompétence soulevée par la Commission est recevable.

23      Aux termes de l’article 78, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque la partie défenderesse soulève, par acte séparé, une exception d’irrecevabilité ou d’incompétence, le Tribunal statue sur cette demande ou la joint au fond.

24      Dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal considère, conformément à l’article 78, paragraphe 3, second alinéa, du règlement de procédure, qu’il convient de joindre au fond ladite exception d’irrecevabilité et d’incompétence et de poursuivre la procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

1)      La demande de la Commission des Communautés européennes tendant à statuer sur l’irrecevabilité du recours et l’incompétence du Tribunal est recevable.

2)      La demande de M. Strack de statuer par défaut est rejetée.

3)      La demande de la Commission des Communautés européennes tendant à statuer sur l’irrecevabilité du recours et l’incompétence du Tribunal est jointe au fond.

4)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 17 septembre 2009.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       H. Kanninen

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : l'allemand.