Language of document : ECLI:EU:C:2020:117


ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

27 février 2020 (*)

« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Règlement (CEE) no 2658/87 – Union douanière et tarif douanier commun – Classement tarifaire – Nomenclature combinée – Sous-position 8302 41 90 – Tringles à rideaux en métal »

Dans l’affaire C‑670/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Finanzgericht Baden-Württemberg (tribunal des finances du Bade-Wurtemberg, Allemagne), par décision du 9 avril 2019, parvenue à la Cour le 10 septembre 2019, dans la procédure

Gardinia Home Decor GmbH

contre

Hauptzollamt Ulm,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. M. Safjan, président de chambre, Mme C. Toader et M. N. Jääskinen (rapporteur), juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la sous-position tarifaire 8302 41 90 de la nomenclature combinée (ci-après la « NC ») figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature douanière et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1), telle que modifiée par le règlement (UE) no 861/2010 de la Commission, du 5 octobre 2010 (JO 2010, L 284, p. 1).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Gardinia Home Decor GmbH au Hauptzollamt Ulm (bureau principal des douanes d’Ulm, Allemagne) (ci-après le « bureau principal des douanes »), au sujet du classement tarifaire de produits en métal importés en tant que tringles à rideaux.

 Le cadre juridique

 Le SH et les notes explicatives du SH

3        Le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises (ci-après le « SH »), élaboré par l’Organisation mondiale des douanes (OMD), a été institué par la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises, conclue à Bruxelles le 14 juin 1983 et approuvée, avec son protocole d’amendement du 24 juin 1986, au nom de la Communauté économique européenne, par la décision 87/369/CEE du Conseil, du 7 avril 1987 (JO 1987, L 198, p. 1).

4        Il ressort du dossier dont dispose la Cour que la version de la nomenclature du SH pertinente au regard des faits en cause dans l’affaire au principal, qui se sont déroulés entre le 13 et 26 avril 2011, est celle entrée en vigueur le 1er janvier 2007.

5        La nomenclature du SH contient une subdivision intitulée « Règles générales pour l’interprétation du [SH] », qui dispose :

« Le classement des marchandises dans la nomenclature [du SH] est effectué conformément aux principes ci-après.

1.      Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les règles suivantes :

2.      a)      Toute référence à un article dans une position déterminée couvre cet article même incomplet ou non fini à la condition qu’il présente, en l’état, les caractéristiques essentielles de l’article complet ou fini. Elle couvre également l’article complet ou fini, ou à considérer comme tel en vertu des dispositions qui précèdent, lorsqu’il est présenté à l’état démonté ou non monté.

[...] »

6        Le chapitre 83 de la nomenclature du SH est intitulé « Ouvrages divers en métaux communs ». Aux termes de la note 1 figurant sous cet intitulé, « [a]u sens du présent chapitre, les parties en métaux communs sont à classer dans la position afférente aux articles auxquels elles se rapportent. Toutefois ne sont pas considérés comme parties d’ouvrages du présent chapitre les articles en fonte, fer ou acier des nos 73.12, 73.15, 73.17, 73.18 ou 73.20 ni les mêmes articles en autres métaux communs (chapitres 74 à 76 et 78 à 81) ».

7        La position 8302 de la nomenclature du SH, qui figure dans ce chapitre, est structurée comme suit :

8302


Garnitures, ferrures et articles similaires en métaux communs pour meubles, portes, escaliers, fenêtres, persiennes, carrosseries, articles de sellerie, malles, coffres, coffrets ou autres ouvrages de l’espèce ; patères, porte-chapeaux, supports et articles similaires, en métaux communs ; roulettes avec monture en métaux communs ; ferme-portes automatiques en métaux communs


8302 10

– Charnières de tous genres (y compris les paumelles et pentures)


8302 20

– Roulettes


8302 30

– Autres garnitures, ferrures et articles similaires pour véhicules automobiles



– Autres garnitures, ferrures et articles similaires :


8302 41

– – Pour bâtiments


8302 42

– – Autres, pour meubles


8302 49

– – Autres


8302 50

– Patères, porte-chapeaux, supports et articles similaires


8302 60

– Ferme-portes automatiques


8        Les notes explicatives du SH sont élaborées au sein de l’OMD conformément aux dispositions de la convention internationale sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises.

9        Dans sa version adoptée au cours de l’année 2007, la note explicative du SH relative à la position 8302 énonce, notamment, ce qui suit :

« Cette position comprend certaines catégories de garnitures ou de ferrures accessoires en métaux communs, d’utilisation très générale, des types couramment utilisés pour les meubles, portes, fenêtres, carrosseries, par exemple. Ces articles restent classés ici même s’ils sont destinés à des usages particuliers, par exemple les poignées et charnières pour portières de voitures automobiles. Toutefois, les termes de la présente position ne s’étendent pas aux articles constituant les pièces essentielles d’un ouvrage, tels que châssis de fenêtres, dispositifs d’orientation et d’élévation de certains sièges.

Cette position comprend :

[...]

D)      Les garnitures, ferrures et articles similaires pour bâtiments[.]

Parmi ces articles on peut citer :

[...]

5)      Les montures de rideaux ou de portières et leurs accessoires, tels que tringles, tubes, rosaces, supports, embrasses, pinces, anneaux (lisses, à roulettes, par exemple), glands pour cordons, arrêts ; garnitures d’escaliers, telles que bordures de protection pour les marches, tringles et autres dispositifs pour maintenir les tapis et boules de rampes.

Les tringles, tubes et barres pour rideaux ou tapis, consistant en profilés, tubes et barres simplement coupés de longueur, même percés, suivent leur régime propre.

[...] »

 La NC et les notes explicatives de la NC

10      Le classement douanier des marchandises importées dans l’Union européenne est régi par la NC. Cette dernière reprend les positions et les sous-positions à six chiffres du SH, seuls les septième et huitième chiffres formant des subdivisions qui lui sont propres.

11      L’article 12 du règlement no 2658/87 prévoit que la Commission européenne adopte chaque année un règlement reprenant la version complète de la NC et des taux autonomes et conventionnels des droits du tarif douanier commun y afférents, telle qu’elle résulte des mesures arrêtées par le Conseil de l’Union européenne ou par la Commission. Ce règlement est publié au Journal officiel de l’Union européenne au plus tard le 31 octobre et est applicable à partir du 1er janvier de l’année suivante.

12      Il ressort du dossier dont dispose la Cour que la version de la NC applicable aux faits en cause dans l’affaire au principal est celle issue du règlement no 861/2010, entré en vigueur le 1er janvier 2011.

13      La première partie de la NC, relative aux dispositions préliminaires, comprend un titre I, consacré aux règles générales, dont la section A, intitulée « Règles générales pour l’interprétation de la [NC] », dispose :

« Le classement des marchandises dans la [NC] est effectué conformément aux principes ci-après.

1.      Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n’ayant qu’une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d’après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu’elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d’après les règles suivantes.

2.      a)      Toute référence à un article dans une position déterminée couvre cet article même incomplet ou non fini à la condition qu’il présente, en l’état, les caractéristiques essentielles de l’article complet ou fini. Elle couvre également l’article complet ou fini, ou à considérer comme tel en vertu des dispositions qui précèdent, lorsqu’il est présenté à l’état démonté ou non monté.

[...] »

14      La deuxième partie de la NC, intitulée « Tableau des droits », comprend une section XV, relative aux « Métaux communs et ouvrages en ces métaux ». La note 2 figurant sous l’intitulé de cette section est libellée comme suit :

« Dans la nomenclature, on entend par “parties et fournitures d’emploi général” :

[...]

c)      les articles des nos 8301, 8302 [...]

Dans les chapitres 73 à 76 [...] (à l’exception du no 7315), les mentions relatives aux parties ne couvrent pas les parties et fournitures d’emploi général au sens ci-dessus.

Sous réserve des dispositions du paragraphe précédent et de la note 1 du chapitre 83, les ouvrages des chapitres 82 ou 83 sont exclus des chapitres 72 à 76 [...] »

15      Ladite section contient un chapitre 73, intitulé « Ouvrages en fonte, fer ou acier ». La position 7306 de la NC, qui relève de ce chapitre, est structurée comme suit :

7306

Autres tubes, tuyaux et profilés creux (soudés, rivés, agrafés ou à bords simplement rapprochés, par exemple), en fer ou en acier :


– Tubes et tuyaux des types utilisés pour oléoducs ou gazoducs :

[...]



– Tubes et tuyaux de cuvelage ou de production des types utilisés pour l’extraction du pétrole ou du gaz :

[...]


7306 30

– autres, soudés, de section circulaire, en fer ou en aciers non alliés :


– – de précision, d’une épaisseur de paroi :

7306 30 11

– – – n’excédant pas 2 mm

7306 30 19

– – – excédant 2 mm


– – autres :


– – – Tubes filetés ou filetables dits « gaz » :

[...]



– – – autres, d’un diamètre extérieur :


– – – – n’excédant pas 168,3 mm :

7306 30 72

– – – – – zingués

7306 30 77

– – – – – autres

7306 30 80

– – – – excédant 168,3 mm mais n’excédant pas 406,4 mm


16      La même section XV contient un chapitre 83, intitulé « Ouvrages divers en métaux communs ». La position 8302 de la NC, qui relève de ce chapitre, est structurée comme suit :

8302

Garnitures, ferrures et articles similaires en métaux communs pour meubles, portes, escaliers, fenêtres, persiennes, carrosseries, articles de sellerie, malles, coffres, coffrets ou autres ouvrages de l’espèce ; patères, porte-chapeaux, supports et articles similaires, en métaux communs ; roulettes avec monture en métaux communs ; ferme-portes automatiques en métaux communs :

8302 10 00

– Charnières de tous genres (y compris les paumelles et pentures)

8302 20 00

– Roulettes

8302 30 00

– autres garnitures, ferrures et articles similaires pour véhicules automobiles


– autres garnitures, ferrures et articles similaires :

8302 41

– – pour bâtiments :

8302 41 10

– – – pour portes

8302 41 50

– – – pour fenêtres et portes-fenêtres

8302 41 90

– – – autres

8302 42 00

– – autres, pour meubles

8302 49 00

– – autres

8302 50 00

– Patères, porte-chapeaux, supports et articles similaires

8302 60 00

– Ferme-portes automatiques


17      Les marchandises classées dans toutes les sous-positions de cette position 8302 sont soumises à un taux conventionnel de droits de douane de 2,7 %.

18      Les notes explicatives de la NC issues de la communication de la Commission publiée le 6 mai 2011 (JO 2011, C 137, p. 1, ci-après les « notes explicatives de la NC ») sont relatives à la NC dans sa version résultant du règlement no 861/2010. Cette édition desdites notes contient des indications concernant la position 8302 de la NC, mais uniquement pour la notion de « Roulettes », au sens de la sous-position 8302 20 00.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

19      Les 13, 15 et 26 avril 2011, Gardinia Home Decor a importé, de Chine vers l’Union, des tringles à rideaux en métal de différentes longueurs, qui étaient creuses et soudées longitudinalement, qui présentaient une section transversale circulaire uniforme de 16 ou 20 mm et dont les surfaces étaient laquées ou galvanisées. Ces barres avaient été emballées individuellement sous film dans le pays de fabrication, portaient une étiquette indiquant leur destination en tant que tringles à rideaux et étaient fermées à leurs extrémités par un embout en plastique servant de protection durant le transport et la présentation pour la vente, mais pouvant aussi être utilisé à la place d’un embout décoratif susceptible d’être acheté séparément.

20      Lesdites barres faisaient partie d’un système modulaire permettant aux clients de fabriquer un ensemble de tringles à rideaux à partir de différentes pièces (barre, embout, raccord, support et anneaux). Elles avaient été conditionnées dans des cartons et importées sur le territoire de l’Union soit séparément, soit avec d’autres pièces de ce système, en quantités variables ne correspondant pas au nombre de celles-ci.

21      Lors de la déclaration de ces produits en vue de leur mise en libre pratique, Gardinia Home Decor a indiqué le numéro de code 8302 4200 900 du tarif douanier électronique national (ci-après le « TDE »), correspondant aux « autres garnitures, ferrures et articles similaires, pour meubles », ou bien le numéro de code 8302 4900 900 du TDE, correspondant aux « autres garnitures, ferrures et articles similaires », marchandises toutes soumises à des droits de douane de 2,7 %.

22      À l’issue d’un contrôle douanier, le contrôleur a estimé que les tringles à rideaux concernées devaient être classées en tant qu’« autres tubes, tuyaux en fer ou en acier non allié » sous le numéro de code 7306 3077 800 du TDE, et donc en principe faire l’objet d’une exemption de droits de douane. Cependant, un droit antidumping de 90,6 % était alors applicable, en particulier, aux importations de certains tubes et tuyaux soudés, en fer ou en acier non allié, qui relevaient du code 7306 30 77 de la NC et qui étaient originaires de Chine, en vertu de l’article 1er du règlement (CE) no 1256/2008 du Conseil, du 16 décembre 2008, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de certains tubes et tuyaux soudés, en fer ou en acier non allié, originaires du Belarus, de la République populaire de Chine et de Russie, suite à une procédure au titre de l’article 5 du règlement (CE) no 384/96, originaires de Thaïlande, suite à un réexamen au titre de l’expiration des mesures conformément à l’article 11, paragraphe 2, dudit règlement, originaires d’Ukraine, suite à un réexamen au titre de l’expiration des mesures conformément à l’article 11, paragraphe 2, et à un réexamen intermédiaire conformément à l’article 11, paragraphe 3, dudit règlement, et clôturant les procédures en ce qui concerne les importations de ces mêmes produits originaires de Bosnie-et-Herzégovine et de Turquie (JO 2008, L 343, p. 1).

23      Par une décision du 5 mars 2014, le bureau principal des douanes a, notamment, approuvé la classification indiquée par le contrôleur et fixé, moyennant un recouvrement a posteriori, un droit antidumping de 7 957,51 euros sur les tringles à rideaux importées au cours de la période couverte par le contrôle. En outre, par une décision du 28 novembre 2016, il a rejeté, comme non fondée, la réclamation formée par Gardinia Home Decor contre la fixation de ce droit.

24      Le Finanzgericht Baden-Württemberg (tribunal des finances du Bade-Wurtemberg, Allemagne) a été saisi d’un recours dirigé contre cette dernière décision.

25      Il ressort de la décision de renvoi que, à l’appui de sa requête, Gardinia Home Decor fait valoir que, lors de l’importation, les marchandises en cause au principal ont été présentées conjointement avec des accessoires complémentaires, à savoir des embouts, des supports et des anneaux, ce qui permettait d’identifier aisément leur utilisation prévue comme tringles à rideaux. Selon cette société, il est indifférent que les accessoires soient fournis en une quantité ne correspondant pas au nombre de tringles importées, car un tel écart serait lié à la vente de celles-ci dans le cadre d’un système modulaire. Elle ajoute que la destination de ces tringles ressort aussi clairement de l’étiquette apposée sur l’emballage de chacune d’elles. Elle allègue que les « notes explicatives de la NC concernant la position 8302 » citent expressément les tringles à rideaux sous forme de tubes en métal comme relevant de cette position et que l’exclusion des tubes simplement coupés de longueur prévue dans ces notes n’est pas pertinente en l’espèce, étant donné que les tubes concernés sont équipés d’embouts en plastique adaptés.

26      Le bureau principal des douanes objecte, principalement, que la classification dans la sous-position 8302 41 90 de la NC n’aurait été possible que si les barres concernées avaient été importées, comme un tout, avec les supports nécessaires à leur fixation au mur ou au plafond. Selon lui, ces barres ne sauraient être classées en tant que système de rideaux « démonté ou non monté », au sens de la règle 2, sous a), deuxième phrase, des règles générales pour l’interprétation du SH, puisque, au moment de leur présentation en douane, il était impossible de savoir avec quel article elles devaient être assemblées. En outre, certaines importations auraient été constituées exclusivement de tringles.

27      Ce bureau fait aussi valoir que le classement tarifaire est fondé sur la qualité objective des marchandises, et non sur leur désignation ou leur emballage. Or, les tubes importés ne présenteraient pas de spécificités – telles que des perçages, des fraisages ou des rainures longitudinales pour glissières – permettant d’identifier leur destination en tant que tringles à rideaux, et les bouchons de protection en plastique placés à leurs extrémités ne seraient pas utilisés exclusivement pour ces tringles. Les notes explicatives du SH concernant la position 8302 confirmeraient que les tringles à rideaux consistant en des tubes simplement coupés de longueur, même percés, suivent leur régime propre.

28      La juridiction de renvoi, quant à elle, considère que, dans le cas où les marchandises faisant l’objet du litige au principal ne pourraient être classées dans la sous-position 8302 41 90 de la NC, celles-ci devraient alors incontestablement être classées dans la sous-position 7306 30 77 de la NC, étant précisé que, selon elle, les sous-positions visées par Gardinia Home Decor lors de la déclaration en douane de ces marchandises ne sont pas pertinentes.

29      À cet égard, la juridiction de renvoi expose, en premier lieu, une série de considérations en faveur d’un classement dans la sous-position 8302 41 90 de la NC des produits en métal qui sont dotés des caractéristiques objectives de ceux en cause au principal. Elle se fonde, plus particulièrement, sur les notes placées sous l’intitulé de la section de la NC où figure cette sous-position et sur les notes explicatives du SH concernant la position 8302, dans lesquelles les tringles à rideaux sont expressément mentionnées.

30      En second lieu, cette juridiction se demande si, dans l’hypothèse où il serait jugé que les caractéristiques de tels produits ne permettent pas à elles seules d’identifier leur destination en tant que tringles à rideaux, ils pourraient néanmoins être classés dans la sous-position 8302 41 90 de la NC lorsqu’ils sont importés avec des pièces complémentaires faisant apparaître cette destination, alors même que, d’une part, ils ne sont pas emballés de manière à former un ensemble avec ces autres pièces et que, d’autre part, ils ne sont pas importés en une quantité correspondant au nombre de celles-ci, compte tenu de leur utilisation dans le cadre d’un système modulaire.

31      Dans ces conditions, le Finanzgericht Baden-Württemberg (tribunal des finances du Bade-Wurtemberg) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      La sous-position 8302 41 90 de la [NC] doit-elle être interprétée en ce sens qu’elle couvre également les produits en métal importés en différentes longueurs en tant que tringles à rideaux d’un système modulaire, présentant une section transversale circulaire uniforme de 16 ou 20 mm, qui sont creux et soudés longitudinalement, dont les surfaces ont été laquées ou galvanisées, qui sont emballés individuellement dans un film et portent une étiquette indiquant leur destination en tant que tringles à rideaux, et dont chacune des extrémités est fermée par un embout en plastique servant à protéger les barres pendant le transport et la présentation [en rayon], mais qui peut également être utilisé à la place d’un embout décoratif que l’on peut acheter séparément ?

2)      Si la réponse à la première question est négative :

La première question appelle-t-elle une réponse différente si les barres sont importées avec d’autres pièces et que leur destination en tant que tringles à rideaux est évidente, même si les pièces ne sont pas conditionnées comme un ensemble ni importées en nombre correspondant ? »

 Sur les questions préjudicielles

32      En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une question posée à titre préjudiciel est identique à une question sur laquelle la Cour a déjà statué, lorsque la réponse à une telle question peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à la question posée à titre préjudiciel ne laisse place à aucun doute raisonnable, la Cour peut à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

33      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre de la présente affaire.

 Sur la première question

34      Par sa première question, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur le point de savoir si la sous-position 8302 41 90 de la NC doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre les produits en métal importés en différentes longueurs en tant que tringles à rideaux, tels que ceux en cause au principal, qui font partie d’un système modulaire, qui présentent une section transversale circulaire uniforme de 16 ou 20 mm, qui sont creux et soudés longitudinalement, dont les surfaces ont été laquées ou galvanisées, qui sont emballés individuellement, qui portent une étiquette indiquant leur destination en tant que tringles à rideaux et dont chacune des extrémités est fermée par un embout en plastique, lequel sert à protéger ces tubes pendant le transport et la présentation à la vente, mais peut également être utilisé à la place d’un embout décoratif susceptible d’être acheté séparément.

35      Tout d’abord, il convient de souligner que, lorsque la Cour est saisie d’un renvoi préjudiciel en matière de classement tarifaire, sa fonction consiste davantage à éclairer les juges nationaux sur les critères dont la mise en œuvre permettra à ces derniers de classer correctement les produits en cause dans la NC qu’à procéder elle-même à ce classement, et ce d’autant plus qu’elle ne dispose pas nécessairement de tous les éléments indispensables à cet égard. Les juges nationaux apparaissant, en tout état de cause, mieux placés pour le faire, il appartient donc à ceux-ci de procéder au classement tarifaire des marchandises en cause au principal, au regard des éléments fournis par la Cour en réponse aux questions qu’ils lui ont soumises (voir, notamment, arrêts du 15 mai 2019, Korado, C‑306/18, EU:C:2019:414, points 33 et 34, ainsi que du 16 mai 2019, Estron, C‑138/18, EU:C:2019:419, points 67 à 69).

36      Ensuite, il y a lieu de rappeler que les règles générales pour l’interprétation de la NC prévoient, d’une part, que le classement des marchandises est déterminé selon les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, d’autre part, que les libellés des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres sont considérés comme n’ayant qu’une valeur indicative. En outre, il est de jurisprudence constante que, dans l’intérêt de la sécurité juridique et de la facilité des contrôles, le critère décisif pour la classification tarifaire des marchandises doit être recherché, d’une manière générale, dans leurs caractéristiques et propriétés objectives, telles que définies par le libellé de la position de la NC et des notes de section ou de chapitre (voir, notamment, arrêts du 3 mars 2016, Customs Support Holland, C‑144/15, EU:C:2016:133, points 26 et 27 ; du 16 mai 2019, Estron, C‑138/18, EU:C:2019:419, points 50 et 51, ainsi que du 5 septembre 2019, TDK-Lambda Germany, C‑559/18, EU:C:2019:667, point 26).

37      Il ressort aussi de la jurisprudence de la Cour que, si le classement ne peut se faire sur la seule base des caractéristiques et des propriétés objectives du produit concerné, la destination de ce produit peut constituer un critère objectif de classement pour autant qu’elle est inhérente à celui-ci, étant précisé qu’il suffit de prendre en compte la destination essentielle dudit produit et que l’inhérence doit pouvoir s’apprécier en fonction des caractéristiques et propriétés objectives de ce dernier (voir en ce sens, notamment, arrêts du 17 juillet 2014, Sysmex Europe, C‑480/13, EU:C:2014:2097, points 31 et 32 ; du 12 mai 2016, Toorank Productions, C‑532/14 et C‑533/14, EU:C:2016:337, point 35, ainsi que du 5 septembre 2019, TDK-Lambda Germany, C‑559/18, EU:C:2019:667, point 27).

38      Enfin, la Cour a itérativement jugé que, en dépit du fait qu’elles n’ont pas de force contraignante, les notes explicatives de la NC et du SH constituent des instruments importants aux fins d’assurer une application uniforme du tarif douanier commun et fournissent, en tant que telles, des éléments valables pour l’interprétation de celui-ci (voir, notamment, arrêts du 19 octobre 2017, Lutz, C‑556/16, EU:C:2017:777, point 40 ; du 15 novembre 2018, Baby Dan, C‑592/17, EU:C:2018:913 point 55, ainsi que du 15 mai 2019, Korado, C‑306/18, EU:C:2019:414, point 35).

39      En l’occurrence, il convient d’observer, à titre liminaire, que, après avoir examiné des échantillons des marchandises en cause dans l’affaire au principal, la juridiction de renvoi qualifie celles-ci de « produits en métal importés [...] en tant que tringles à rideaux », notamment aux termes de la première question posée à la Cour. Cette qualification résulte d’une constatation purement factuelle qu’il n’appartient pas à la Cour de remettre en cause dans le cadre d’un renvoi préjudiciel, d’autant plus lorsque celle-ci est interrogée non pas sur une telle qualification, mais uniquement sur le classement tarifaire de marchandises concernées (voir, par analogie, arrêt du 16 février 2006, Proxxon, C‑500/04, EU:C:2006:111, point 25).

40      Dans ce contexte, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si le produit en cause au principal doit être classé dans la sous-position 8302 41 90 de la NC, faute de quoi elle entend le classer dans la sous-position 7306 30 77 de celle-ci. S’agissant de l’ordre ainsi retenu, cette juridiction relève, à bon droit, qu’il ressort du troisième alinéa de la note 2 figurant en tête de la section XV de la NC que les ouvrages relevant du chapitre 83 de celle-ci sont, en règle générale, exclus de son chapitre 73, de sorte qu’il convient d’envisager, dans un premier temps, un classement dans une subdivision de ce premier chapitre, lequel est plus spécifique, avant d’examiner, dans un second temps, un éventuel classement dans une subdivision de ce second chapitre.

41      La juridiction de renvoi part aussi, à juste titre, du principe selon lequel le classement tarifaire en cause au principal ne dépend pas du point de savoir si le produit concerné pourrait être considéré, en soi, comme un ouvrage en métaux communs ou bien comme une simple partie d’un tel ouvrage, dès lors que, en particulier, la note 1 figurant en tête du chapitre 83 contenu à la section XV du SH prévoit que, au sens de ce chapitre, « les parties en métaux communs sont à classer dans la position afférente aux articles auxquels elles se rapportent » (voir, par analogie, arrêt du 16 février 2006, Proxxon, C‑500/04, EU:C:2006:111, point 32), cela sous réserve d’exceptions qui sont dépourvues de pertinence en l’occurrence, compte tenu de l’option de classement envisagée par cette juridiction.

42      À cet égard, suivant la grille d’analyse qui est établie à la règle 1 des « Règles générales pour l’interprétation de la [NC] », force est de constater qu’un produit tel que celui en cause au principal n’est visé explicitement ni par les termes de la position 8302 de la NC ni par ceux des notes afférentes à la section XV ou au chapitre 83 de la NC. Il ne figure pas non plus dans les intitulés de cette section et de ce chapitre.

43      Cependant, il ressort de la structure de la position 8302 et du libellé de la sous-position 8302 41 90 de la NC que cette dernière présente un caractère résiduel, puisqu’elle couvre les garnitures, ferrures et articles similaires en métaux communs pour bâtiments « autres » que ceux « pour portes » et « pour fenêtres et porte-fenêtres ». Partant, il n’est nullement exclu que le législateur de l’Union ait eu l’intention de faire relever de cette sous-position des produits tels que celui faisant l’objet du litige au principal (voir, par analogie, arrêts du 12 avril 2018, Medtronic, C‑227/17, EU:C:2018:247, point 43, ainsi que du 12 juillet 2018, Profit Europe, C‑397/17 et C‑398/17, EU:C:2018:564, point 38).

44      De surcroît, la note explicative du SH relative à la position 8302 fournit des indications significatives pour la classification du produit concerné. En effet, cette note énonce, à son deuxième alinéa, point D), 5), que les « montures de rideaux [...] et leurs accessoires, tels que [les] tringles, tubes, rosaces, supports, embrasses, pinces, anneaux [...] » figurent parmi les « garnitures, ferrures et articles similaires pour bâtiments » en métaux communs relevant de cette position, mais que les « tringles, tubes et barres pour rideaux [...] consistant en profilés, tubes et barres simplement coupés de longueur, même percés, suivent leur régime propre ».

45      Il en découle que les tringles à rideaux en métaux communs doivent en principe être classées dans la position 8302 de la NC et, plus précisément, dans la sous-position 8302 41 90 de celle-ci, à moins que ces tringles consistent en des profilés, tubes ou barres ayant simplement été coupés à la longueur voulue.

46      Cette interprétation est corroborée par le règlement d’exécution (UE) 2017/1472 de la Commission, du 11 août 2017, relatif au classement de certaines marchandises dans la nomenclature combinée (JO 2017, L 210, p. 1), lequel n’est certes pas applicable ratione temporis au litige au principal, mais contient néanmoins des indications qui sont pertinentes, par analogie, dans la présente affaire. De fait, l’annexe de ce règlement énonce qu’une « [b]arre d’aluminium (appelée “tringle pour rideaux de douche”) utilisée pour suspendre un rideau », qui consiste en deux tubes coulissants et dotés d’un mécanisme à ressort permettant le blocage entre des murs, doit être « class[ée] sous le code NC 8302 41 90 en tant qu’“autre garniture, ferrure ou article similaire en métaux communs pour bâtiments” », aux motifs, notamment, que, « [e]n raison de ses caractéristiques objectives ([entre autres] sa facture, prévue pour qu’il supporte uniquement des poids légers, comme par exemple le poids d’un rideau), l’article est conçu en tant que tringle pour rideaux » et que « [l]es tringles pour rideaux sont classées dans la position 8302 [voir également les notes explicatives du [SH] relatives à la position 8302, deuxième alinéa, point D), 5)] ».

47      En l’occurrence, la juridiction de renvoi considère, à bon droit, que l’étiquetage des tubes en métal en cause au principal, qui indique leur destination en tant que tringles à rideaux, ne saurait être décisif aux fins du classement de ces tubes dans la sous-position 8302 41 90 de la NC. En effet, il est constant que ni les termes de la position 8302 de la NC ni les notes figurant en tête du chapitre 83 de la NC ne font référence à la présentation du produit, ce dont il résulte que cet élément n’a pas de valeur déterminante pour son classement dans la NC (voir, par analogie, ordonnance du 9 janvier 2007, Juers Pharma, C‑40/06, EU:C:2007:2, point 29 et jurisprudence citée, ainsi que arrêt du 15 décembre 2016, LEK, C‑700/15, EU:C:2016:959, point 45).

48      Toutefois, selon les constatations factuelles opérées par cette juridiction, le produit en cause au principal semble présenter les caractéristiques objectives de tringles à rideaux en métaux communs pouvant relever de la sous-position 8302 41 90 de la NC. En effet, la décision de renvoi indique que les tubes concernés sont emballés individuellement dans un film protecteur et fermés à leurs extrémités par des bouchons en plastique susceptibles de servir d’embouts décoratifs, ce qui est révélateur d’une utilisation prévue pour laquelle l’aspect extérieur du produit, voire sa fonction ornementale, constitue un critère important, par opposition à ce qui pourrait être constaté, par exemple, en cas d’utilisation de celui-ci comme tuyauterie. En outre, il apparaît que, même s’ils ne sont ni percés ou fraisés ni munis de rainures pour glissières, comme le bureau principal des douanes l’a invoqué devant la juridiction de renvoi, les surfaces des tubes concernés sont cependant galvanisées ou laquées, ce qui leur donne un aspect cuivré ou coloré, de sorte qu’il ne s’agit pas de tubes simplement coupés de longueur, au sens de l’exception prévue au deuxième alinéa, point D), 5), in fine, de la note explicative du SH relative à la position 8302.

49      Par ailleurs, contrairement à ce que le bureau principal des douanes a objecté devant la juridiction de renvoi, la circonstance que le produit concerné n’ait pas été importé systématiquement avec les supports permettant sa fixation au mur ou au plafond ne saurait, en soi, être de nature à enlever à ce produit ses caractéristiques objectives de tringle à rideaux en métaux communs. En effet, il ne ressort nullement des termes de la NC ou des notes explicatives de celle-ci et du SH que cette circonstance puisse faire obstacle au classement d’un produit tel que celui en cause au principal dans la sous-position 8302 41 90 de la NC.

50      Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que la nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement no 2658/87, telle que modifiée par le règlement no 861/2010, doit être interprétée en ce sens que des tringles à rideaux en métaux communs relèvent de la sous-position 8302 41 90, à moins que ces tringles consistent en des profilés, tubes ou barres ayant simplement été coupés à la longueur voulue, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier afin de procéder elle-même au classement tarifaire des produits en cause au principal, au regard des éléments fournis par la Cour en réponse à cette question.

 Sur la seconde question

51      Compte tenu de la réponse apportée à la première question, il n’y a pas lieu de répondre à la seconde question.

 Sur les dépens

52      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

La nomenclature combinée figurant à l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature douanière et statistique et au tarif douanier commun, telle que modifiée par le règlement (UE) no 861/2010 de la Commission, du 5 octobre 2010, doit être interprétée en ce sens que les tringles à rideaux en métaux communs relèvent de la sous-position tarifaire 8302 41 90, à moins que ces tringles consistent en des profilés, tubes ou barres ayant simplement été coupés à la longueur voulue, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier afin de procéder elle-même au classement tarifaire des produits en cause au principal, au regard des éléments fournis par la Cour en réponse à la première question posée.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.