Language of document : ECLI:EU:C:2019:358

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 2 mai 2019(1)

Affaire C28/18

Verein für Konsumenteninformation

contre

Deutsche Bahn AG

[demande de décision préjudicielle formée par l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche)]

« Demande de décision préjudicielle – Règlement (UE) no 260/2012 – Article 9, paragraphe 2 – Exigences techniques et commerciales pour les virements et les prélèvements en euros – Accessibilité des paiements – Paiement par prélèvement SEPA – Conditions générales exigeant du payeur qu’il ait un domicile dans le même État membre que celui du bénéficiaire »






 Introduction

1.        C’est une vérité universellement reconnue que les libertés fondamentales constitutives du marché intérieur souffrent peu les exigences en matière de résidence. En fait de libertés fondamentales, le législateur de l’Union (2) et la Cour ont pour ainsi dire toujours placé la suppression des obstacles fondés sur des critères de résidence au cœur de leur activité. À cet égard, selon une jurisprudence désormais constante de la Cour, une disposition nationale qui prévoit une distinction fondée sur le critère de la résidence risque de jouer principalement au détriment des ressortissants d’autres États membres. En effet, les non-résidents sont le plus souvent des non-nationaux (3). Étant donné que les libertés fondamentales s’adressent en premier lieu aux États membres, les affaires dont la Cour a été saisie concernent principalement des mesures étatiques imposant une condition de résidence (nationale).

2.        L’on en sait bien moins à propos de situations dans lesquelles une personne privée exige d’une autre personne privée que son domicile se situe dans un lieu déterminé. Le droit de l’Union est peu clair en la matière. Est-il légal qu’il soit pratiquement impossible pour un client, qui ne réside pas dans le même État membre que celui dans lequel une banque est établie, d’obtenir un prêt auprès de celle-ci ? Un assureur est-il en droit de refuser une protection à un éventuel client situé dans un autre État membre ? Il est difficile, à tout le moins pour un profane, de concevoir que de telles situations soient conciliables avec l’objectif d’un marché intérieur. Si, pour certains, de telles pratiques sont incompatibles avec le principe d’un marché intérieur « dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée selon les dispositions des traités » (4), d’autres pourraient invoquer une prétendue différence fondamentale entre les activités d’entités publiques et celles d’entités privées, ainsi que le fait que, du point de vue des principes, à tout le moins initialement, l’action publique devait être régie par les libertés fondamentales et l’activité privée par les dispositions en matière de droit de la concurrence. Pour le surplus, l’on s’en remettait à la sagesse du « marché » lui-même.

3.        Les présentes conclusions n’ont pas vocation à trancher cette question fondamentale (5). Force est simplement de constater que, dans un certain nombre de cas, le « marché » n’a pas été à même de régir des situations « horizontales » entre deux entités privées, si bien que le législateur s’est employé à prendre des mesures et à restreindre l’autonomie des parties (6). Le règlement relatif aux prix d’itinérance dans l’Union européenne (7) est une illustration parfaite de l’action du législateur en ce sens. En effet, dans ce dernier cas, le législateur de l’Union est intervenu dans les rapports entre personnes privées – qui entretiennent elles-mêmes une relation asymétrique, à savoir les compagnies téléphoniques, d’une part, et les consommateurs, d’autres part ‑ et a mis en œuvre des instruments classiques du marché intérieur, tels que le principe de non-discrimination dans les relations horizontales (8).

4.        Le cas d’espèce constitue un autre exemple d’intervention législative de l’Union : celui des paiements transfrontaliers à l’intérieur de l’Union. À cet effet, à la veille de l’entrée en vigueur du cours légal de l’euro (9), le Conseil a, le 29 décembre 2001, adopté le règlement (CE) no 2560/2001 (10), abrogé par le règlement (CE) no 924/2009 (11). Le législateur de l’Union a ensuite adopté le règlement (UE) no 260/2012 (12) établissant des exigences techniques et commerciales pour les virements et les prélèvements en euros. C’est de l’interprétation de ce dernier règlement dont il est question dans la présente affaire.

5.        L’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche) s’interroge sur la question de savoir si l’entreprise allemande de transport ferroviaire Deutsche Bahn AG peut exiger des clients souhaitant régler par prélèvement qu’ils aient leur domicile en Allemagne.

6.        Dans les présentes conclusions, je ferai valoir qu’il convient de répondre à cette question par la négative. Mon principal argument peut être résumé comme suit : une société n’est pas obligée de proposer à ses clients un paiement par prélèvement. Toutefois, si une telle possibilité est prévue, elle doit être proposée de manière à éviter les discriminations.

 Le cadre juridique

7.        L’article 1er du règlement no 260/2012, intitulé « Objet et champ d’application » dispose :

« 1.      Le présent règlement établit les règles pour les virements et les prélèvements libellés en euros dans l’Union lorsque tant le prestataire de services de paiement du payeur que celui du bénéficiaire, ou l’unique prestataire de services de paiement intervenant dans l’opération de paiement, sont situés dans l’Union.

2.      Le présent règlement ne s’applique pas :

a)      aux opérations de paiement effectuées entre prestataires de services de paiement et au sein même de ces prestataires, notamment entre leurs agents ou leurs succursales, pour leur propre compte ;

b)      aux opérations de paiement traitées et réglées par l’intermédiaire des systèmes de paiement de montant élevé, à l’exclusion des opérations de prélèvement pour lesquelles le payeur n’a pas explicitement demandé le traitement de l’opération par un système de paiement de montant élevé ;

c)      aux opérations de paiement effectuées au moyen d’une carte de paiement ou d’un dispositif analogue, y compris les retraits d’espèces, à moins que la carte de paiement ou le dispositif analogue ne soit utilisé que pour obtenir les informations nécessaires afin d’effectuer directement un virement ou un prélèvement vers et depuis un compte de paiement identifié par un numéro BBAN ou IBAN ;

d)      aux opérations de paiement effectuées au moyen d’un appareil de télécommunication, numérique ou informatique, si ces opérations de paiement n’entraînent pas un virement ou un prélèvement vers et depuis un compte de paiement identifié par un numéro BBAN ou IBAN ;

e)      aux transmissions de fonds, telles que définies à l’article 4, point 13), de la directive 2007/64/CE (13) ;

f)      aux opérations de paiement de monnaie électronique, telle que définie à l’article 2, point 2), de la directive 2009/110/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 concernant l’accès à l’activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements (14), sauf si ces opérations entraînent un virement ou un prélèvement vers et depuis un compte identifié par un numéro BBAN ou IBAN.

3. Lorsque des schémas de paiement sont fondés sur des opérations de paiement par virement ou prélèvement mais présentent des caractéristiques ou des services additionnels optionnels, le présent règlement ne s’applique qu’aux virements ou prélèvements sous-jacents. »

8.        L’article 2 du règlement no 260/2012, intitulé « Définitions », dispose :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

1)      “virement”, un service de paiement national ou transfrontalier fourni par le prestataire de services de paiement qui détient le compte de paiement d’un payeur, visant à créditer, sur la base d’une instruction donnée par le payeur, le compte de paiement d’un bénéficiaire par une opération ou une série d’opérations de paiement, réalisées à partir du compte de paiement du payeur ;

2)      “prélèvement”, un service de paiement national ou transfrontalier visant à débiter le compte de paiement d’un payeur, lorsque l’opération de paiement est initiée par le bénéficiaire sur la base du consentement du payeur ;

3)      “payeur”, une personne physique ou morale qui est titulaire d’un compte de paiement et autorise un ordre de paiement, à partir de ce compte de paiement, ou, en l’absence de compte de paiement du payeur, une personne physique ou morale qui donne un ordre de paiement vers un compte de paiement du bénéficiaire ;

4)      “bénéficiaire”, une personne physique ou morale qui est titulaire d’un compte de paiement et qui est le destinataire prévu de fonds ayant fait l’objet d’une opération de paiement ;

5)      “compte de paiement”, un compte détenu au nom d’un ou de plusieurs utilisateurs de services de paiement et utilisé aux fins de l’exécution d’opérations de paiement ;

[...]

21)      “mandat”, l’expression du consentement et de l’autorisation donnés par le payeur au bénéficiaire et (directement ou indirectement par l’intermédiaire du bénéficiaire) au prestataire de services de paiement du payeur pour permettre au bénéficiaire de présenter un encaissement en vue de débiter le compte de paiement spécifié du payeur et pour permettre au prestataire de services de paiement du payeur de se conformer à ces instructions ;

[...]

26)      “opération de paiement transfrontalière”, une opération de paiement initiée par un payeur ou un bénéficiaire lorsque le prestataire de services de paiement du payeur et celui du bénéficiaire sont situés dans des États membres différents ;

27)      “opération de paiement nationale”, une opération de paiement initiée par un payeur ou un bénéficiaire lorsque le prestataire de services de paiement du payeur et celui du bénéficiaire sont situés dans le même État membre ;

[...] »

9.        L’article 3 du règlement no 260/2012, intitulé « Accessibilité », dispose :

« 1.      Un prestataire de services de paiement d’un bénéficiaire accessible pour un virement national conformément à un schéma de paiement est accessible, conformément aux règles d’un schéma de paiement à l’échelle de l’Union, pour les virements initiés par un payeur via un prestataire de services de paiement situé dans tout État membre.

2.      Un prestataire de services de paiement d’un payeur accessible pour un prélèvement national conformément à un schéma de paiement est accessible, conformément aux règles d’un schéma de paiement à l’échelle de l’Union, pour les prélèvements initiés par un bénéficiaire via un prestataire de services de paiement situé dans tout État membre.

3.      Le paragraphe 2 s’applique uniquement aux prélèvements mis à la disposition des consommateurs en tant que payeurs dans le cadre du schéma de paiement. »

10.      L’article 9 du règlement no 260/2012, intitulé « Accessibilité des paiements », dispose :

« 1.      Un payeur qui effectue un virement à un bénéficiaire titulaire d’un compte de paiement situé au sein de l’Union ne précise pas l’État membre dans lequel ce compte de paiement doit être situé, pour autant que le compte de paiement soit accessible conformément à l’article 3.

2.      Un bénéficiaire qui accepte un virement ou utilise un prélèvement pour encaisser des fonds provenant d’un payeur détenant un compte de paiement situé au sein de l’Union ne précise pas l’État membre dans lequel ce compte de paiement doit être situé, pour autant que le compte de paiement soit accessible conformément à l’article 3. »

11.      L’article 77, paragraphe 1, de la directive (UE) 2015/2366 (15), intitulé « Demandes de remboursement d’opérations de paiement initiées par ou par l’intermédiaire du bénéficiaire », dispose :

« Les États membres veillent à ce que le payeur puisse demander le remboursement, visé à l’article 76, d’une opération de paiement autorisée initiée par ou par l’intermédiaire du bénéficiaire pendant une période de huit semaines à compter de la date à laquelle les fonds ont été débités. »

12.      L’article 5 du règlement (UE) 2018/302 (16) applicable depuis le 3 décembre 2018, intitulé « Non‑discrimination pour des motifs liés au paiement », dispose :

« 1.      Un professionnel n’applique pas, parmi les différents moyens de paiement acceptés par le professionnel, des conditions différentes pour les opérations de paiement pour des motifs liés à la nationalité, au lieu de résidence ou au lieu d’établissement d’un client, à la localisation du compte de paiement, au lieu d’établissement du prestataire de services de paiement ou au lieu d’émission de l’instrument de paiement dans l’Union, lorsque :

a)      l’opération de paiement est effectuée moyennant une opération électronique, par virement, prélèvement ou utilisation d’un instrument de paiement lié à une carte au sein de la même marque et catégorie de paiement ;

b)      les exigences en matière d’authentification sont remplies, conformément à la directive (UE) 2015/2366 ; et

c)      les opérations de paiement sont effectuées dans une devise que le professionnel accepte.

2.      Lorsque des raisons objectives le justifient, l’interdiction énoncée au paragraphe 1 ne fait pas obstacle à ce que le professionnel suspende la livraison des biens ou la prestation du service jusqu’à ce que le professionnel reçoive la confirmation que l’opération de paiement a été dûment engagée.

3.      L’interdiction énoncée au paragraphe 1 ne fait pas obstacle à ce que le professionnel applique des frais au titre de l’utilisation d’un instrument de paiement lié à une carte pour lequel les commissions d’interchange ne sont pas réglementées par le chapitre II du règlement (UE) 2015/751 (17) et pour les services de paiement auxquels le règlement (UE) no 260/2012 ne s’applique pas, sauf si l’interdiction ou la limitation du droit d’appliquer des frais au titre de l’utilisation d’instruments de paiement conformément à l’article 62, paragraphe 5, de la directive (UE) 2015/2366 a été introduite dans la législation de l’État membre à laquelle l’activité du professionnel est soumise. Ces frais ne peuvent dépasser les coûts directs supportés par le professionnel pour l’utilisation de l’instrument de paiement. »

 Les faits, la procédure et la question préjudicielle

13.      La partie requérante au principal, Verein für Konsumenteninformation, est habilitée à ester en justice aux fins de la protection des consommateurs, conformément au droit autrichien.

14.      La partie défenderesse au principal, Deutsche Bahn, est une société de transport ferroviaire dont le siège se trouve en Allemagne, ce qui permet aux clients autrichiens, entre autres, de réserver des trajets ferroviaires sur internet. À cet effet, elle conclut des contrats avec les consommateurs conformément à ses conditions générales de transport. Ces conditions générales comportent une clause en vertu de laquelle les billets réservés sur la page en ligne sont payables, notamment, par carte de crédit, par virement bancaire instantané ou par prélèvement SEPA (espace unique de paiement en euros), cette dernière possibilité étant réservée aux clients ayant un domicile en Allemagne. En outre, l’activation du schéma de prélèvement SEPA requiert le consentement à une analyse de solvabilité dans le cadre de la procédure d’enregistrement.

15.      Verein für Konsumenteninformation a saisi le Handelsgericht Wien (tribunal de commerce de Vienne, Autriche) d’une action en cessation, par laquelle elle demande que Deutsche Bahn soit condamnée à cesser d’utiliser cette clause dans les contrats conclus avec les consommateurs au motif que cette clause est contraire à l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012, dès lors qu’un consommateur dispose généralement d’un compte de paiement dans une banque établie dans l’État membre dans lequel il a sa résidence.

16.      Par jugement du 13 juillet 2016, le Handelsgericht Wien (tribunal de commerce de Vienne) a fait droit aux conclusions de Verein für Konsumenteninformation en ce qui concerne les consommateurs ayant leur résidence en Autriche, jugeant que la clause litigieuse était contraire à l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012.

17.      Par arrêt rendu en appel le 14 mars 2017, l’Oberlandesgericht Wien (tribunal régional supérieur de Vienne, Autriche) a infirmé le jugement susmentionné et rejeté l’action de Verein für Konsumenteninformation au motif que, bien que l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 exige que les payeurs et les bénéficiaires n’aient plus qu’un seul compte bancaire pour effectuer des paiements nationaux et transfrontaliers au moyen de prélèvements SEPA, ce règlement n’oblige pas les bénéficiaires à accepter, dans tous les cas, des instruments de paiement SEPA spécifiques dans les transactions commerciales avec les consommateurs.

18.      Dans le cadre du pourvoi introduit par Verein für Konsumenteninformation contre l’arrêt en appel susmentionné, l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) a estimé que, dans la mesure où il interdit aux payeurs et aux bénéficiaires de préciser l’État membre dans lequel le compte de paiement de l’autre partie doit être situé, l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 ne s’adresse pas aux prestataires de services de paiement, mais régit les rapports entre les bénéficiaires et les payeurs, et protège ainsi les uns et les autres. S’il est vrai que, interprétée à la lettre, cette disposition se bornerait à interdire d’ériger en critère la localisation géographique du compte de paiement du payeur, il n’en demeure pas moins que l’obligation pour le payeur effectuant un virement d’avoir sa résidence dans le même État membre que celui du bénéficiaire est susceptible d’affecter la disposition en cause, puisque le compte d’un payeur est, en règle générale, situé dans l’État membre dans lequel le payeur est domicilié.

19.      Dans ces circonstances, l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) a décidé, par ordonnance du 20 décembre 2017, reçue à la Cour le 17 janvier 2018, de surseoir à statuer et de saisir la Cour de la question préjudicielle suivante :

« L’article 9, paragraphe 2, du [règlement no 260/2012] doit-il être interprété en ce sens qu’il est interdit au bénéficiaire de soumettre l’acceptation des paiements effectués au moyen d’un prélèvement SEPA à la condition que le payeur ait sa résidence dans l’État membre dans lequel le bénéficiaire a également son siège ou domicile, lorsque d’autres modes de paiement, par exemple par carte de crédit, sont également acceptés ? »

20.      Des observations écrites ont été déposées par les parties au principal et la Commission européenne, qui ont toutes été entendues lors de l’audience de plaidoiries qui s’est tenue le 30 janvier 2019.

 Analyse

21.      La juridiction de renvoi souhaite savoir si l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 doit être interprété en ce sens qu’il est interdit à un bénéficiaire de soumettre l’acceptation des paiements effectués au moyen d’un prélèvement SEPA à la condition que le payeur ait sa résidence dans l’État membre dans lequel le bénéficiaire a également son siège (domicile).

22.      Verein für Konsumenteninformation considère que l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 interdit au bénéficiaire de soumettre l’acceptation des paiements effectués au moyen d’un prélèvement SEPA à la condition que le payeur ait sa résidence dans l’État membre dans lequel le bénéficiaire a également son siège ou domicile, même lorsque d’autres modes de paiement, par exemple par carte de crédit, sont également acceptés. La Commission partage ce point de vue.

23.      Deutsche Bahn n’est pas de cet avis. La partie défenderesse soutient que, si l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 régit les rapports entre payeurs et bénéficiaires, il ne prévoit pas l’obligation pour le bénéficiaire de proposer le schéma de prélèvement SEPA ou l’interdiction pour celui-ci de subordonner l’utilisation par le payeur du schéma de prélèvement SEPA à d’autres conditions. En particulier, cette disposition ne prévoit pas d’obligation pour un bénéficiaire soit de proposer le paiement par prélèvement à tous ses clients, soit de ne pas le proposer du tout. Il ressort en effet sans équivoque de cette disposition que l’utilisation du schéma de prélèvement présuppose le consentement en ce sens des parties au contrat. Ce ne serait que dans ce cas qu’il serait interdit à un bénéficiaire d’exiger que le compte de paiement utilisé aux fins du prélèvement soit situé dans un État membre déterminé.

 L’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 – Obligations du bénéficiaire

24.      L’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 dispose qu’« [u]n bénéficiaire qui accepte un virement ou utilise un prélèvement pour encaisser des fonds provenant d’un payeur détenant un compte de paiement situé au sein de l’Union ne précise pas l’État membre dans lequel ce compte de paiement doit être situé, pour autant que le compte de paiement soit accessible conformément à l’article 3 [dudit règlement] ».

25.      Les termes clés de cette disposition sont définis à l’article 2 dudit règlement. Ainsi, un virement est un service de paiement fourni par le prestataire de services de paiement qui détient le compte de paiement d’un payeur, visant à créditer, sur la base d’une instruction donnée par le payeur, le compte de paiement d’un bénéficiaire par une opération réalisée à partir du compte de paiement du payeur (18). Par « prélèvement », on entend un service de paiement visant à débiter le compte de paiement d’un payeur, lorsque l’opération de paiement est initiée par le bénéficiaire sur la base du consentement du payeur.

26.      Il pourrait être soutenu, en s’appuyant sur le seul libellé de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012, que Deutsche Bahn n’a commis aucune illégalité. En effet, Deutsche Bahn n’exige pas des clients concernés souhaitant utiliser le prélèvement que leur compte de paiement soit situé dans un État membre en particulier.

27.      Toutefois, la question n’est pas aussi simple. Ainsi que je le ferai valoir, il existe des raisons impérieuses, eu égard au contexte et aux objectifs du règlement en question (19), pour lesquelles il conviendrait de retenir une interprétation différente de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012.

28.      Le règlement no 260/2012 a été adopté dans le cadre du projet de créer un espace unique de paiement en euros (SEPA) prévoyant de mettre en place des services de paiement communs à toute l’Union remplaçant les services de paiement nationaux actuels en euros. Afin d’assurer une migration complète vers des virements et des prélèvements en euros à l’échelle de l’Union, ce règlement établit les exigences techniques et commerciales en vue de mettre en place un marché intégré pour les paiements électroniques « où il n’existe aucune différence entre paiements nationaux et paiements transfrontaliers » (20). Ces exigences devraient s’appliquer aux paiements SEPA, transfrontaliers et nationaux, selon les mêmes conditions de base et conformément aux mêmes droits et obligations, « indépendamment de la localisation dans l’Union » (21).

29.      Bien que l’objectif principal du règlement no 260/2012 soit d’établir des exigences techniques et commerciales pour les virements et les prélèvements en vue de la mise en place de services de paiements communs dans l’Union, ce qui signifie qu’il concerne avant tout les bénéficiaires, ce règlement prend également en considération les payeurs et, plus précisément, dans une certaine mesure, les rapports entre bénéficiaires et payeurs. À cet égard, l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012, qui constitue une disposition quelque peu hétérogène dans l’économie du règlement, s’applique spécifiquement aux rapports entre bénéficiaires et payeurs (22). Dans ce cadre, la nécessité d’assurer un niveau élevé de protection des consommateurs est soulignée dans le préambule de ce règlement (23).

30.      Le fait est que, dans l’Union, dans la grande majorité des cas, le lieu de résidence d’une personne correspond à celui de son compte de paiement. Cela semble être d’une évidence telle, qu’il n’y a pas lieu d’en faire davantage la preuve. Exiger d’un payeur qu’il ait son lieu de résidence dans un État membre déterminé revient par conséquent à préciser l’État membre dans lequel un compte de paiement doit être situé. En outre, ainsi que le relève à raison Verein für Konsumenteninformation, exiger du consommateur qu’il justifie d’un domicile en Allemagne à titre de condition pour pouvoir payer par prélèvement, conduit à une restriction encore plus grave que la (simple) ouverture d’un compte de paiement en Allemagne.

31.      Il semblerait par conséquent que la pratique de Deutsche Bahn soit contraire à l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012.

32.      Néanmoins, Deutsche Bahn justifie sa pratique en invoquant deux arguments. Premièrement, cette société soutient qu’il conviendrait de prendre en considération les dispositions et l’esprit du règlement 2018/302. Deuxièmement, Deutsche Bahn considère que sa pratique est justifiée en raison de la prétendue nécessité pour elle d’effectuer des analyses de solvabilité. J’examinerai successivement chacun de ces deux arguments.

 Le règlement 2018/302

33.      Deutsche Bahn est parfaitement consciente du fait que le règlement 2018/302 n’est pas applicable en l’espèce.

34.      Ce règlement est applicable à partir du 3 décembre 2018 (24) et n’est par conséquent pas applicable à la présente affaire ratione temporis. Il ne s’applique pas davantage ratione materiae étant donné qu’il résulte des dispositions combinées de l’article 1er, paragraphe 3, de ce règlement, et de l’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive 2006/123, que les services dans le domaine des transports sont exclus de son champ d’application. En outre, au considérant 9 du règlement 2018/302, le législateur reconnaît que la discrimination peut également se manifester lors de la fourniture de services dans le domaine des transports, en particulier la vente de billets pour le transport de passagers. Ce considérant renvoie à cet égard à quatre règlements en matière de transport, dont trois contiennent des dispositions interdisant les discriminations fondées sur la nationalité ou le lieu de résidence en ce qui concerne l’accès aux transports : le règlement (UE) no 1008/2008 (25), le règlement (UE) no 1177/2010 (26) et le règlement (UE) no 181/2011 (27). En ce qui concerne le quatrième règlement, à savoir le règlement (CE) no 1371/2007 (28), relatif aux droits et obligations des voyageurs ferroviaires, le considérant 9 du règlement 2018/302 indique qu’« il est prévu que le règlement (CE) no 1371/2007 [...] soit modifié à cet effet dans un avenir proche ».

35.      Deutsche Bahn est d’avis qu’il y a néanmoins lieu de tenir compte du règlement 2018/302 aux fins de l’interprétation de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012, afin d’éviter toute contradiction et incohérence dans l’application du droit dérivé de l’Union.

36.      À cet égard, Deutsche Bahn fait valoir que l’article 5 du règlement 2018/302 énonce des prescriptions détaillées indiquant si et quand les discriminations fondées sur le lieu de résidence sont autorisées. L’article 5, paragraphe 1, de ce règlement dispose qu’un professionnel n’applique pas, parmi les différents moyens de paiement acceptés par le professionnel, des conditions différentes pour les opérations de paiement pour des motifs liés, notamment (29), au lieu de résidence, lorsque l’opération de paiement est effectuée moyennant une opération électronique, par virement, prélèvement ou utilisation d’un instrument de paiement lié à une carte au sein de la même marque et catégorie de paiement (30) et les exigences en matière d’authentification sont remplies, conformément à la directive 2015/2366 (31). Deutsche Bahn soutient que c’est précisément ces exigences en matière d’authentification (32) qui ne sont pas remplies en l’espèce, ce qui signifie qu’une discrimination fondée sur le lieu de résidence serait possible.

37.      Deutsche Bahn considère que, dès lors que, dans la présente affaire – dans l’hypothèse où elle relèverait du champ d’application du règlement 2018/302 – une discrimination fondée sur le lieu de résidence serait envisageable au titre de l’article 5 de ce règlement, une telle discrimination devrait également être envisageable en vertu de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012. Il conviendrait dès lors que la Cour interprète l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 en ce sens qu’il autorise une discrimination fondée sur le lieu de résidence.

38.      Je ne suis pas convaincu par le renvoi au règlement 2018/302 – ni par les éventuelles analogies négatives susceptibles d’en être tirées – pour les besoins de la présente affaire (33).

39.      Le règlement 2018/302 constitue un exemple dans lequel le législateur de l’Union a précisé davantage les critères de détermination des conditions dans lesquelles une différence de traitement fondée sur le lieu de résidence d’un payeur est interdite (ou, en d’autres termes, des conditions dans lesquelles une telle différence de traitement est autorisée). Ce niveau de précision est applicable dans le cadre du règlement 2018/302 et uniquement dans ce cadre. Il est lié aux particularités du blocage géographique, qui sont tout à fait différentes de celles du paiement par prélèvement. Le législateur de l’Union aurait été libre, s’il l’avait souhaité, de prévoir un même niveau de précision pour les paiements par prélèvement SEPA dans le cadre du règlement no 260/2012. Or, en l’absence de renvoi clair, dans ce dernier règlement, à d’autres textes tels que le règlement 2018/302, un tel parallélisme conceptuel m’apparaît difficile – d’autant plus qu’il s’agit en l’espèce d’un rapport horizontal entre deux personnes privées. Dans ces conditions, le postulat selon lequel le législateur de l’Union a déjà pris en considération et pondéré tous les intérêts en présence est conforté et il n’y a aucune raison de le remettre en question.

40.      En conclusion, il n’y a pas, par conséquent, lieu de tenir compte du règlement 2018/302 aux fins de l’interprétation de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012. Les références faites au règlement 2018/302 et les prétendues analogies avec ce règlement sont davantage source de confusion que de certitude.

 Exceptions aux obligations du bénéficiaire

41.      Je souhaite enfin aborder la question de savoir si la restriction à la liberté de paiement dont l’interdiction est énoncée à l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012 peut être éventuellement justifiée, en d’autres termes, s’il est possible pour une entreprise de s’écarter des exigences énoncées à l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012.

42.      Deutsche Bahn invoque le risque d’abus et de non-paiement liés à l’encaissement par prélèvement. Deutsche Bahn prétend qu’un tel risque serait élevé lorsque, comme dans le litige au principal, le mandat SEPA est émis directement par le client et adressé au bénéficiaire, sans l’intervention du prestataire de services de paiement du client ou du bénéficiaire. En effet, dans le cas d’autres modes de paiement, le prestataire de services de paiement n’accepterait le paiement du client qu’en cas de prévision de paiement positive. En revanche dans le cas d’un paiement par prélèvement, le bénéficiaire doit lui‑même évaluer le risque que le client ne paie pas. C’est le bénéficiaire qui s’acquitte de ses obligations en premier, en émettant le billet. Par conséquent, le bénéficiaire encourt le risque que le payeur ne paie pas.

43.      Deutsche Bahn estime donc nécessaire d’être mise en mesure de procéder à des analyses de solvabilité. Les sociétés proposent en général ce type de services à l’échelle nationale. Deutsche Bahn souligne qu’il n’est tout simplement pas possible d’effectuer dans les mêmes conditions une analyse de solvabilité appropriée dans tous les pays de l’espace SEPA. Une analyse de solvabilité concernant des clients dont le lieu de résidence se situe en Autriche est environ quinze fois plus coûteuse que pour les clients dont le lieu de résidence se trouve en Allemagne. Le bénéficiaire subirait une charge financière importante s’il devait adapter ses propres systèmes de règlement et interfaces de manière à pouvoir prendre en compte des analyses de solvabilité dans l’ensemble de l’espace SEPA. Eu égard à ces coûts, le schéma de prélèvement ne serait fréquemment tout simplement pas rentable et ne pourrait plus être proposé. Telle ne pourrait pas avoir été la volonté du législateur de l’Union.

44.      Deutsche Bahn fait en outre valoir que l’intégration d’une évaluation de solvabilité à un mode de paiement aménagé par l’opérateur lui-même ne serait pas réalisable pour tous les bénéficiaires de l’espace SEPA, ni possible dans des conditions commerciales acceptables dans tous les États membres. Aucun opérateur ne fournirait d’informations en matière de solvabilité à l’échelle de l’espace SEPA. Pour certains États membres de l’espace SEPA, il serait impossible d’accéder à la moindre information, ne serait-ce que partielle, en matière de solvabilité des clients. Le bénéficiaire ne serait dès lors pas en mesure de réduire de manière adéquate le risque de défaillance de ces clients dans le cadre des prélèvements SEPA et, s’il était obligé de proposer le paiement par prélèvement aux clients établis dans ces pays, le bénéficiaire supporterait consciemment un risque incalculable. En outre, eu égard aux différences dans les habitudes de paiement et/ou les exigences de la clientèle dans les différents pays de l’espace SEPA, le coût d’obtention d’informations en matière de solvabilité des clients serait sensiblement différent, de sorte qu’il ne serait pas rentable dans certains États membres de préférer le prélèvement à d’autres modes de paiement moins coûteux.

45.      Si je conçois les arguments commerciaux invoqués par Deutsche Bahn, je ne peux partager cet argumentaire du point de vue juridique.

46.      Ni l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012, ni aucune autre disposition de ce règlement ne prévoient de justification. Lire le texte dudit règlement en ce sens qu’il contient d’éventuelles justifications (ce qui serait, selon toute vraisemblance, contraire à la volonté du législateur de l’Union, sans quoi celui-ci aurait traité de la question) n’est pas une voie dans laquelle j’encouragerais la Cour à s’engager.

47.      Une fois de plus, je maintiens que les différents intérêts en jeu entre payeurs et bénéficiaires ont été pris en considération aux fins de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012, en ce qui concerne le paiement par prélèvement. Quel que soit l’angle sous lequel la question est abordée, il y a lieu de constater que cette disposition ne prévoit pas d’exceptions. Le législateur de l’Union a fait son travail et, s’il le souhaite, il est libre de modifier toute disposition, s’il estime, par exemple, que certaines dispositions sont impossibles à mettre en œuvre.

48.      Le seul fait que, dans la pratique commerciale, il n’y ait pas de marché intérieur en matière de registres de débiteurs et d’évaluation de solvabilité ne saurait justifier le critère du lieu de résidence en cause. En outre, un tel raisonnement confine dangereusement à un argumentaire de nature purement économique dans le cadre des quatre libertés. Cet argument ne saurait prospérer. Il est notoire que des arguments de nature purement économique ne peuvent pas être invoqués par les États membres à titre de raison impérieuse d’intérêt général. Certes, dans le cadre de rapports horizontaux, il n’y a pas d’intérêts publics en jeu et des intérêts privés sont généralement de nature économique. Pour autant, la seule affirmation qu’il n’y aurait pas de marché intérieur en matière de registres de débiteurs ne suffit pas.

49.      Il est vrai que certaines sociétés bénéficiaires pourraient préférer, pour des raisons commerciales ou autres, ne pas proposer aux payeurs la possibilité de payer par prélèvement. Il s’agit là d’un choix parfaitement légitime dans le cadre de l’article 9, paragraphe 2, du règlement no 260/2012. En effet, cette disposition ne s’applique que pour autant que le choix ait été fait d’accepter le paiement par prélèvement. Dans une telle situation, il ne saurait être question de discrimination. S’il en résulte que, au lieu de proposer des formes de paiement discriminatoires, un bénéficiaire décide de ne proposer aucune forme spécifique de paiement, il s’agit là d’une réalité économique qui ne pourrait être qu’acceptée.

 Conclusion

50.      Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour la réponse suivante à la question préjudicielle posée par l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche) :

L’article 9, paragraphe 2, du règlement (UE) no 260/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 14 mars 2012, établissant des exigences techniques et commerciales pour les virements et les prélèvements en euros et modifiant le règlement (CE) no 924/2009, tel que modifié par le règlement (UE) no 248/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, doit être interprété en ce sens qu’il est interdit à un bénéficiaire de soumettre l’acceptation des paiements effectués au moyen d’un prélèvement SEPA à la condition que le payeur ait son domicile dans l’État membre dans lequel le bénéficiaire a également son siège (domicile).


1      Langue originale : l’anglais.


2      Voir, par exemple, articles 20 et 21 de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur (JO 2006, L 376, p. 36).


3      Voir, par exemple, arrêt du 7 mai 1998, Clean Car Autoservice (C‑350/96, EU:C:1998:205, point 29 et jurisprudence citée).


4      Voir article 26, paragraphe 2, TFUE.


5      La vérité se situe en effet vraisemblablement quelque part à mi-chemin entre ces deux points de vue.


6      En ce qui concerne l’autonomie privée et le droit de l’Union, voir Leczykiewicz, D., Weatherill, St., « Private Law Relationships in EU Law », D. Leczykiewicz/St. Weatherill (éd.), The Involvement of EU Law in Private Law Relationships, Hart Publishing, Oxford et Portland, Oregon, 2013, p. 1 à 8, en particulier p. 3 à 5.


7      Voir règlement (UE) no 531/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juin 2012, concernant l’itinérance sur les réseaux publics de communications mobiles à l’intérieur de l’Union (JO 2012, L 172, p. 10).


8      L’Union a évidemment légiféré, par voie d’harmonisation, sur certains aspects du droit privé, à savoir sur des situations horizontales par définition (par exemple, concernant les agents commerciaux, la responsabilité des produits, les assurances et, plus généralement, la protection des consommateurs). Toutefois, bien que la finalité ultime en soit, là encore, l’établissement d’un marché intérieur (voir, plus précisément, Müller-Graff, P.-Chr., « Allgemeines Gemeinschaftsprivatrecht », M. Gebauer/Chr. Teichmann (éd.), Europäisches Privat- und Unternehmensrecht (Enzyklopädie Europarecht, Band 6), Nomos, Baden-Baden, 2014, p. 69 à 151, points 43 et suivants), les instruments utilisés ne sont pas les mêmes. Le législateur va, à cet égard, au-delà de la simple transposition des mêmes notions auxquelles il a habituellement recours dans le cadre des libertés fondamentales.


9      Le 1er janvier 2002.


10      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 19 décembre 2001 concernant les paiements transfrontaliers en euros (JO 2001, L 344, p. 13).


11      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 concernant les paiements transfrontaliers dans la Communauté et abrogeant le règlement (CE) no 2560/2001 (JO 2009, L 266, p. 11).


12      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2012 établissant des exigences techniques et commerciales pour les virements et les prélèvements en euros et modifiant le règlement (CE) no 924/2009 (JO 2012, L 94, p. 22), tel que modifié par le règlement (UE) no 248/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014 (JO 2014, L 84, p. 1) (ci‑après le « règlement no 260/2012 »).


13      Directive du Parlement européen et du Conseil, du 13 novembre 2007, concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 97/7/CE, 2002/65/CE, 2005/60/CE ainsi que 2006/48/CE et abrogeant la directive 97/5/CE (JO 2007, L 319, p. 1).


14      JO 2009, L 267, p. 7.


15      Directive du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2015, concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 2002/65/CE, 2009/110/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) no 1093/2010, et abrogeant la directive 2007/64/CE (JO 2015, L 337, p. 35).


16      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2018 visant à contrer le blocage géographique injustifié et d’autres formes de discrimination fondée sur la nationalité, le lieu de résidence ou le lieu d’établissement des clients dans le marché intérieur, et modifiant les règlements (CE) no 2006/2004 et (UE) 2017/2394 et la directive 2009/22/CE (JO 2018, L 601, p. 1).


17      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 relatif aux commissions d’interchange pour les opérations de paiement liées à une carte (JO 2015, L 123, p. 1).


18      Voir article 2, paragraphe 1, du règlement no 260/2012.


19      Conformément à une jurisprudence constante de la Cour, afin d’interpréter une disposition du droit de l’Union, il convient de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie et, notamment, de la genèse de cette réglementation (voir, en ce sens, arrêt du 17 avril 2018, Egenberger, C‑414/16, EU:C:2018:257, point 44 et jurisprudence citée).


20      Voir considérant 1 du règlement no 260/2012.


21      Voir considérant 1 du règlement no 260/2012.


22      Une juridiction régionale allemande a même qualifié cet article de disposition de protection des consommateurs. Voir Oberlandesgericht Karlsruhe, 20 avril 2018, 4 U 120/17, points 10 et suiv., MultiMedia und Recht (MMR), 2018, p. 611.


23      Voir considérant 32 du règlement no 260/2012, qui fait également référence à un « niveau élevé de protection des consommateurs ».


24      Voir article 11, paragraphe 1, du règlement 2018/302.


25      Règlement du Parlement européen et du Conseil, du 24 septembre 2008, établissant des règles communes pour l’exploitation de services aériens dans la Communauté (JO 2008, L 293, p. 3). Voir article 23, paragraphe 2, de ce règlement : « Sans préjudice de l’article 16, paragraphe 1, l’accès aux tarifs des passagers et aux tarifs de fret pour les services aériens au départ d’un aéroport situé sur le territoire d’un État membre auquel le traité s’applique, disponibles au public, est accordé sans aucune discrimination fondée sur la nationalité ou le lieu de résidence du client ou sur le lieu d’établissement de l’agent du transporteur aérien ou d’un autre vendeur de billets au sein de la Communauté. » (mise en italique par mes soins).


26      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 concernant les droits des passagers voyageant par mer ou par voie de navigation intérieure et modifiant le règlement (CE) no 2006/2004 (JO 2010, L 334, p. 1). Voir article 4, paragraphe 2, de ce règlement : « Sans préjudice des tarifs sociaux, les conditions contractuelles et les tarifs appliqués par les transporteurs ou les vendeurs de billets sont proposés au public sans discrimination directe ou indirecte fondée sur la nationalité du client final, ni sur le lieu d’établissement des transporteurs ou des vendeurs de billets au sein de l’Union. »


27      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 16 février 2011 concernant les droits des passagers dans le transport par autobus et autocar et modifiant le règlement (CE) no 2006/2004 (JO 2011, L 55, p. 1). Voir article 4, paragraphe 2, de ce règlement : « Sans préjudice des tarifs sociaux, les conditions contractuelles et les tarifs appliqués par les transporteurs sont proposés au public sans discrimination directe ou indirecte fondée sur la nationalité du client final ou sur le lieu d’établissement des transporteurs ou des vendeurs de billets dans l’Union. »


28      Règlement du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires (JO 2007, L 315, p. 14).


29      Ainsi que pour des motifs liés à la nationalité ou au lieu d’établissement d’un client, à la localisation du compte de paiement, au lieu d’établissement du prestataire de services de paiement ou au lieu d’émission de l’instrument de paiement dans l’Union.


30      Article 5, paragraphe 1, sous a), du règlement 2018/302.


31      Article 5, paragraphe 1, sous a), du règlement 2018/302 ; ainsi que lorsque les opérations de paiement sont effectuées dans une devise que le professionnel accepte [sous a) de cette disposition].


32      Voir article 97 de la directive 2015/2366.


33      Il convient de relever que, compte tenu des observations écrites de Deutsche Bahn, la Cour a invité, en vertu de l’article 61, paragraphe 1, du règlement de procédure, les parties présentes à l’audience à prendre position sur l’éventuelle pertinence du règlement 2018/302. J’ai été éclairé en ce sens que j’ai quitté l’audience convaincu qu’il n’y avait pas lieu de tenir compte dudit règlement aux fins de la présente affaire.