Language of document : ECLI:EU:F:2012:172

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

5 décembre 2012 (*)

« Fonction publique – Concours général – Avis de concours EPSO/AD/147/09 – Constitution d’une liste de réserve de recrutement d’administrateurs de citoyenneté roumaine – Connaissance approfondie de la langue officielle de la Roumanie – Minorité de langue hongroise en Roumanie – Non-admission à l’épreuve orale – Principes d’égalité de traitement et de non-discrimination – Portée »

Dans l’affaire F‑29/11,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

BA, demeurant à Wezembeek-Oppem (Belgique), initialement représentée par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.‑N. Louis et É. Marchal, avocats, puis par Mes S. Orlandi, A. Coolen, J.‑N. Louis, É. Marchal et D. Abreu Caldas, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, initialement représentée par Mme B. Eggers et M. P. Pecho, en qualité d’agents, puis par Mme B. Eggers, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre),

composé de MM. H. Kreppel, président, E. Perillo (rapporteur) et R. Barents, juges,

greffier : M. J. Tomac, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 juillet 2012,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 21 mars 2011, BA a introduit le présent recours tendant à l’annulation de la décision du directeur de l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) du 10 décembre 2010 portant rejet de sa réclamation et de la décision du jury du concours EPSO/AD/147/09 de ne pas l’admettre à l’épreuve orale du concours.

 Cadre juridique

2        L’article 1er quinquies du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») dispose :

« 1.      Dans l’application du présent statut est interdite toute discrimination, telle qu’une discrimination fondée sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.

[…]

5.      Dès lors qu’une personne relevant du présent statut, qui s’estime lésée par le non-respect à son égard du principe de l’égalité de traitement tel que défini ci-dessus, établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, il incombe à l’institution de prouver qu’il n’y a pas eu violation du principe de l’égalité de traitement. Cette disposition ne s’applique pas dans les procédures disciplinaires.

6.      Dans le respect du principe de non-discrimination et du principe de proportionnalité, toute limitation de ces principes doit être objectivement et raisonnablement justifiée et doit répondre à des objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel. Ces objectifs peuvent notamment justifier la fixation d’un âge obligatoire de la retraite et d’un âge minimum pour bénéficier d’une pension d’ancienneté. »

3        L’article 27 du statut dispose :

« Le recrutement doit viser à assurer à l’institution le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, recrutés sur une base géographique aussi large que possible parmi les ressortissants des États membres de l’Union.

Aucun emploi ne doit être réservé aux ressortissants d’un État membre déterminé. »

4        L’article 28 du statut dispose :

« Nul ne peut être nommé fonctionnaire :

a)      s’il n’est ressortissant d’un des États membres de l’Union, sauf dérogation accordée par l’autorité investie du pouvoir de nomination, et s’il ne jouit de ses droits civiques ;

[…]

f)      s’il ne justifie posséder une connaissance approfondie d’une des langues de l’Union et une connaissance satisfaisante d’une autre langue de l’Union dans la mesure nécessaire aux fonctions qu’il est appelé à exercer. »

5        L’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe III du statut dispose :

« 1.      L’avis de concours est arrêté par l’autorité investie du pouvoir de nomination, après consultation de la commission paritaire.

Il doit spécifier :

[…]

f)      éventuellement, les connaissances linguistiques requises par la nature particulière des postes à pourvoir ;

[…] »

6        Aux termes de l’article 1er du règlement no 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), dans sa rédaction applicable dans la présente espèce :

« Les langues officielles et les langues de travail des institutions de l’Union sont le bulgare, l’espagnol, le tchèque, le danois, l’allemand, l’estonien, le grec, l’anglais, le français, l’irlandais, l’italien, le letton, le lituanien, le hongrois, le maltais, le néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque, le slovène, le finnois et le suédois. »

7        L’article 2 du règlement no 1 prévoit :

« Les textes adressés aux institutions par un État membre ou par une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés au choix de l’expéditeur dans l’une des langues officielles. La réponse est rédigée dans la même langue. »

8        Selon l’article 3 du règlement no 1 :

« Les textes adressés par les institutions à un État membre ou à une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés dans la langue de cet État. »

9        L’article 6 du règlement no 1 dispose :

« Les institutions peuvent déterminer les modalités d’application de ce régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. »

10      L’article 8 du règlement no 1 prévoit :

« En ce qui concerne les États membres où existent plusieurs langues officielles, l’usage de la langue sera, à la demande de l’État intéressé, déterminé suivant les règles générales découlant de la législation de cet État.

[…] »

11      Aux termes de l’article 2 du règlement (CE, Euratom) no 401/2004 du Conseil, du 23 février 2004, instituant, à l’occasion de l’adhésion de Chypre, de l’Estonie, de la Hongrie, de la Lettonie, de la Lituanie, de Malte, de la Pologne, de la République tchèque, de la Slovaquie et de la Slovénie, des mesures particulières et temporaires concernant le recrutement de fonctionnaires des Communautés européennes (JO L 67, p. 1) :

« Jusqu’au 31 décembre 2010, des concours généraux sont également organisés en vue du recrutement de fonctionnaires ayant comme langue principale l’une des onze langues officielles actuelles. Ces concours couvriront simultanément toutes ces langues. »

12      Le règlement (CE, Euratom) no 1760/2006 du Conseil, du 28 novembre 2006, instituant, à l’occasion de l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie à l’Union européenne, des mesures particulières et temporaires concernant le recrutement de fonctionnaires des Communautés européennes (JO L 335, p. 5) dispose :

« […]

(1)      À l’occasion de l’adhésion prochaine de la Bulgarie et de la Roumanie à l’Union européenne, il convient d’adopter des mesures particulières et temporaires, dérogatoires au statut […].

(2)      Au vu de la taille relative des États adhérents et du nombre de personnes potentiellement concernées, il importe que ces mesures, bien que temporaires, restent en vigueur pendant une période suffisante. Le délai du 31 décembre 2011 paraît le plus approprié à cet égard.

(3)      Étant donné la nécessité de procéder aux recrutements prévus le plus rapidement possible après l’adhésion, il convient d’adopter le présent règlement avant la date effective de cette adhésion,

[…]

Article premier

1.      Nonobstant l’article 4, deuxième et troisième alinéas, l’article 7, paragraphe 1, l’article 27, deuxième alinéa, et l’article 29, paragraphe 1, [sous] a) et b), du statut, il peut être pourvu, après la date effective de l’adhésion des pays concernés et jusqu’au 31 décembre 2011, à des emplois vacants par la nomination de ressortissants de la Bulgarie et de la Roumanie, dans la limite des postes prévus à cet effet et compte tenu des délibérations budgétaires.

2.      Les nominations sont effectuées :

a)      pour tous les grades, après la date effective de l’adhésion ;

b)      à l’exception des postes d’encadrement supérieur (directeurs généraux ou leur équivalent de grade AD 16 ou AD 15 et directeurs ou leur équivalent de grade AD 15 ou AD 14), à l’issue de concours sur titres et épreuves organisés dans les conditions prévues à l’annexe III du statut.

[…] »

13      Le 21 janvier 2009 a été publié l’avis de concours général EPSO/AD/147/09, organisé par l’EPSO notamment pour la constitution d’une réserve de recrutement d’administrateurs (AD 5) de citoyenneté roumaine dans le domaine de l’administration publique européenne (JO C 14 A, p. 1), modifié par un rectificatif publié le 13 mars 2009 (JO C 59 A/2, p. 2) (ci-après l’« avis de concours »).

14      Le titre I, B, point 2, sous c), de l’avis de concours, intitulé « Connaissances linguistiques », prévoit :

« Langue principale (langue 1)

Les candidats doivent posséder :

[…]

–        une connaissance approfondie de la langue roumaine [...]

Deuxième langue (langue 2)

Les candidats doivent posséder une connaissance satisfaisante de l’allemand, de l’anglais ou du français.

[…] »

15      Le titre III, point 1, de l’avis de concours, intitulé « Épreuves écrites – Notation », prévoit :

« Les épreuves écrites a) et b) se dérouleront en allemand, en anglais ou en français (langue 2).

a)      Épreuve constituée d’une série de questions à choix multiple visant à évaluer les connaissances spécifiques des candidats dans le domaine choisi.

[…]

b)      Épreuve sur un sujet au choix, dans le domaine choisi […]

c)      Rédaction d’une brève note, dans la langue principale (langue 1) du candidat, exposant les arguments et les conclusions de l’épreuve écrite b). Cette épreuve vise à tester la maîtrise du candidat de sa langue principale tant par la qualité de la rédaction que de la présentation.

      Cette épreuve est notée de 0 à 10 points (minimum requis : 8 points).

[…] »

16      Par ailleurs, l’annexe de l’avis de concours précise :

« […]

Demande de réexamen

Introduire, dans un délai de dix jours de calendrier à compter de la date d’envoi en ligne de la lettre notifiant la décision, une demande de réexamen sous forme d’une lettre motivée […] »

 Faits à l’origine du litige

17      La partie requérante, de nationalités roumaine et hongroise, appartient à la minorité hongroise de Roumanie.

18      Elle s’est portée candidate, en sa qualité de citoyenne roumaine, au concours général EPSO/AD/147/09, organisé par l’EPSO notamment pour la constitution d’une réserve de recrutement d’administrateurs de citoyenneté roumaine dans le domaine de l’« Administration publique européenne ». Après avoir passé les tests d’accès avec succès, la partie requérante a été admise à passer les épreuves écrites.

19      Par lettre du 21 avril 2010, l’EPSO a communiqué à la partie requérante ses résultats aux épreuves écrites. Celle-ci a obtenu des notes supérieures au minimum requis s’agissant des épreuves a) et b), pour lesquelles il était fait usage de la langue 2 (l’allemand, l’anglais ou le français) choisie par le candidat, langue dont une « connaissance satisfaisante » était exigée par l’avis de concours. En revanche, la partie requérante a obtenu une note éliminatoire de 6/10 à l’épreuve c), pour laquelle il était fait usage de la langue 1 (le roumain), dont une « connaissance approfondie » était exigée par l’avis de concours.

20      En réponse à une demande de réexamen introduite le 21 avril 2010, l’EPSO a informé la partie requérante, par une lettre du 18 juin 2010, que, après avoir réexaminé sa copie de l’épreuve écrite c), le jury confirmait sa décision de ne pas l’admettre à l’épreuve orale.

21      Par courriel du 7 juillet 2010, la partie requérante a demandé qu’il soit procédé à un nouvel examen de sa situation, car elle s’estimait victime d’une discrimination en raison du fait qu’elle avait dû passer l’épreuve écrite c) en roumain et non en hongrois, qui est pourtant sa langue maternelle.

22      Par lettre du 20 septembre 2010, enregistrée par l’EPSO le jour suivant, la partie requérante a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, contestant la décision du jury de lui attribuer la note de 6/10 au titre de l’épreuve écrite c), ainsi que la légalité de l’avis de concours.

23      Par lettre du 10 décembre 2010, le directeur de l’EPSO, en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »), a rejeté la réclamation de la partie requérante (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

 Conclusions des parties

24      La partie requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de rejet de la réclamation ;

–        pour autant que de besoin, annuler la décision du jury du concours d’attribuer à la partie requérante la note éliminatoire de 6/10 au titre de l’épreuve écrite c) ;

–        organiser une nouvelle épreuve écrite c) ;

–        condamner la Commission européenne aux dépens.

25      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la partie requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du recours

26      Par son premier chef de conclusions, la partie requérante demande l’annulation de la décision de rejet de la réclamation.

27      Selon une jurisprudence constante, des conclusions en annulation formellement dirigées contre la décision de rejet d’une réclamation ont, dans le cas où cette décision est dépourvue de contenu autonome, pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, point 8).

28      En l’espèce, la réclamation du 20 septembre 2010, rejetée par l’AIPN le 10 décembre 2010, était dirigée contre la décision du jury d’attribuer à la partie requérante la note de 6/10 à l’épreuve écrite c). La décision de rejet de la réclamation est dépourvue de contenu autonome, dans la mesure où elle se borne à confirmer la décision prise le 18 juin 2010, après réexamen par le jury, par une motivation qui reprend en substance, mais de manière plus étoffée, la motivation de ladite décision (arrêt du Tribunal du 1er juillet 2010, Mandt/Parlement, F‑45/07, point 43).

29      Par ailleurs, lorsqu’une partie dont la demande d’admission à un concours organisé par les institutions de l’Union a été rejetée sollicite le réexamen de cette décision sur la base d’une disposition précise liant l’administration, c’est la décision prise par le jury après réexamen qui constitue l’acte faisant grief, au sens de l’article 90, paragraphe 2, ou, le cas échéant, de l’article 91, paragraphe 1, du statut (arrêt du Tribunal du 1er juillet 2010, Časta/Commission, F‑40/09, point 27, et la jurisprudence citée).

30      En l’espèce, conformément à l’annexe de l’avis de concours, la partie requérante a demandé, le 21 avril 2010, le réexamen de la décision du jury du concours de ne pas l’admettre à l’épreuve orale.

31      Par une lettre du 18 juin 2010, l’EPSO a répondu à la partie requérante que le jury s’était réuni le 11 juin 2010 et avait décidé de confirmer la note de 6/10 qu’elle avait obtenue à l’épreuve écrite c), ainsi que la décision de ne pas l’admettre à l’épreuve orale.

32      La décision du 18 juin 2010, communiquée le jour même à la partie requérante, constitue, en l’espèce, l’acte faisant grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

33      Il résulte de ce qui précède que le présent recours doit être regardé comme tendant à l’annulation de la décision du 18 juin 2010 prise après réexamen (ci-après la « décision attaquée »).

 Sur la recevabilité

 Arguments des parties

34      La Commission soutient, à titre principal, que le recours est manifestement irrecevable. La partie requérante aurait attaqué la décision de ne pas l’admettre à la phase ultérieure du concours, non pas en raison d’une erreur manifeste d’appréciation dans la correction de l’épreuve écrite c), mais uniquement en raison du fait qu’au cours de cette épreuve elle n’avait pas pu utiliser le hongrois, c’est-à-dire sa langue maternelle. Dans la mesure où il impose le déroulement de cette épreuve uniquement en roumain, l’avis de concours serait donc la décision faisant effectivement grief à la partie requérante. N’ayant pas introduit de recours dans le délai imparti à compter de la publication de l’avis de concours, la partie requérante serait forclose à agir.

35      La partie requérante estime que l’avis de concours n’est pas, en principe, un acte faisant grief et considère que, en l’espèce, l’avis de concours ne l’exclut pas directement des épreuves. En revanche, elle soutient qu’elle peut se prévaloir d’irrégularités intervenues lors du déroulement du concours, y compris celles dont l’origine se trouve dans l’avis de concours, à l’occasion d’un recours dirigé contre une décision individuelle qui lui fait grief et que, par suite, elle est recevable à contester l’avis de concours par voie incidente.

36      Par ailleurs, dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN a fait valoir que la réclamation était irrecevable pour violation des délais statutaires. La partie requérante aurait pris connaissance de la décision attaquée le 18 juin 2010 et aurait dû formuler une réclamation au plus tard le 18 septembre 2010, et non le 20 septembre 2010.

37      La partie requérante invoque l’article 100, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, aux termes duquel « [s]i le délai prend fin un samedi, un dimanche ou un jour férié légal, l’expiration en est reportée à la fin du jour ouvrable suivant ». Le 18 septembre 2010 étant un samedi, la partie requérante soutient que le recours était recevable, puisque la réclamation a été introduite le lundi 20 septembre 2010, premier jour ouvrable suivant la fin dudit délai.

38      En défense, la Commission ne prétend pas que la réclamation aurait été introduite hors délai.

 Appréciation du Tribunal

39      Eu égard à la nature particulière de la procédure de recrutement, qui est une opération administrative complexe composée d’une succession de décisions très étroitement liées, un requérant est en droit de se prévaloir d’irrégularités intervenues lors du déroulement du concours, y compris celles dont l’origine peut être trouvée dans le texte même de l’avis de concours, à l’occasion d’un recours dirigé contre une décision individuelle ultérieure, telle une décision de non-admission aux épreuves (arrêt de la Cour du 11 août 1995, Commission/Noonan, C‑448/93 P, point 19 ; arrêt du Tribunal du 14 avril 2011, Clarke e.a./OHMI, F‑82/08, point 79).

40      En effet, dans une telle procédure, il ne saurait être exigé d’un requérant qu’il forme autant de recours que ladite procédure comporte d’actes susceptibles de lui faire grief (arrêt Commission/Noonan, précité, point 17).

41      Il a également été jugé qu’il n’y a pas lieu de distinguer selon le degré de clarté et de précision de l’avis de concours (arrêt Commission/Noonan, précité, point 19).

42      Enfin, il a été précisé qu’un avis de concours peut également, à titre exceptionnel, faire l’objet d’un recours en annulation lorsque, en imposant des conditions excluant la candidature du requérant, il constitue une décision lui faisant grief au sens des articles 90 et 91 du statut (arrêt Clarke e.a./OHMI, précité, point 79).

43      En d’autres termes, même en admettant, pour les seuls besoins du raisonnement, que l’avis de concours aurait pu être contesté par la partie requérante par la voie d’un recours en annulation, cette circonstance, à elle seule, n’entraîne ni la forclusion de la partie requérante à agir contre la décision attaquée ni, à titre surabondant, l’irrecevabilité des moyens qui tendent, le cas échéant, à remettre en cause la légalité de l’avis de concours.

44      Par ailleurs, la réclamation n’était pas tardive.

45      En effet, la décision prise par le jury après réexamen constituant l’acte faisant grief, c’est également cette décision, prise après réexamen, qui fait courir le délai de réclamation et de recours (arrêt Časta/Commission, précité, point 27).

46      Il est constant entre les parties que la partie requérante a pris connaissance de la décision attaquée le 18 juin 2010 et que la réclamation contre cette décision a été introduite le 20 septembre 2010.

47      Or, l’article 100, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, auquel fait référence la partie requérante, n’est pas applicable à la procédure précontentieuse.

48      En l’absence, dans le statut lui-même, de règles spécifiques concernant les délais visés à son article 90, il convient de se référer au règlement (CEE, Euratom) no 1182/71 du Conseil, du 3 juin 1971, portant détermination des règles applicables aux délais, aux dates et aux termes (JO L 124, p. 1) (ordonnance du Tribunal du 8 juillet 2009, Sevenier/Commission, F‑62/08, point 27). L’article 3, paragraphe 4, de ce règlement prévoit que si le dernier jour du délai est un jour férié, un dimanche ou un samedi, le délai prend fin à l’expiration de la dernière heure du jour ouvrable suivant.

49      En l’espèce, le dernier jour du délai, le 18 septembre 2010, étant un samedi, le délai a pris fin le 20 septembre 2010. La réclamation n’était donc pas tardive.

50      Compte tenu de ce qui précède, le recours doit être considéré comme recevable.

 Sur le fond

51      La partie requérante précise qu’elle invoque, à l’appui de son recours, la violation :

–        des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination ;

–        de l’article 1er quinquies, paragraphes 1, 5 et 6, du statut ;

–        de l’article 2 TUE ;

–        de l’article 21 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;

–        des articles 3, 4, 5, 10 et 19 de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales conclue à Strasbourg le 1er février 1995 (ci-après la « Convention-cadre »).

 Sur les moyens tirés de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination et de la violation de l’article 1er quinquies, paragraphes 1, 5 et 6, du statut

52      Il y a lieu d’examiner ces deux moyens ensemble.

–       Arguments des parties

53      La partie requérante soutient que le fait de ne pas avoir pu passer l’épreuve écrite c) dans sa langue principale, à savoir le hongrois, serait constitutif d’une violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination.

54      Elle rappelle que sa langue maternelle et principale est le hongrois, qui est une langue officielle de l’Union européenne. Bien que n’étant pas une langue officielle de la Roumanie, le hongrois serait néanmoins la langue de communication dont ce pays reconnaît l’usage à la minorité hongroise. La Roumanie se conformerait ainsi à l’objectif poursuivi par les institutions européennes de protection des minorités nationales. La partie requérante considère que la minorité hongroise de Roumanie n’a cessé d’acquérir de nouveaux droits au cours du temps, dont celui, pour ses membres, de poursuivre leur scolarité en langue hongroise. La partie requérante souligne qu’elle a obtenu ses diplômes d’enseignement primaire, secondaire et universitaire en langue hongroise et que le diplôme obtenu au terme de son cursus lui confère en Roumanie les mêmes droits que ceux accordés aux personnes ayant obtenu le même diplôme en langue roumaine.

55      Par conséquent, le fait de ne pas avoir pu passer l’épreuve écrite c) en hongrois l’aurait objectivement défavorisée par rapport à ses concitoyens ayant suivi un cursus scolaire et universitaire en roumain.

56      Elle considère que, dans les circonstances de l’espèce, la possibilité devrait être offerte aux candidats de choisir entre les langues parlées en Roumanie dès lors qu’il s’agit de langues officielles de l’Union.

57      Au soutien de cet argument, la partie requérante invoque le fait que l’avis de concours général EPSO/AD/53/06 (JO C 172 A, p. 3), réservé aux citoyens chypriotes en vertu de l’article 2 du règlement no 401/2004, imposait la connaissance approfondie de la langue grecque en tant que langue principale, tout en prévoyant la possibilité, à titre exceptionnel, pour les ressortissants chypriotes dont la langue principale n’était pas le grec, de choisir l’une des autres langues officielles de l’Union, la deuxième langue devant être, dans ce cas, différente de la langue principale choisie.

58      Selon la partie requérante, la discrimination viendrait aussi du fait que, pour la participation au concours en cause en l’espèce, la Commission a imposé à la fois la condition de la nationalité et celle de la langue de l’État membre concerné. La partie requérante considère que, s’il s’avérait nécessaire de recruter des citoyens parlant le roumain, il n’y aurait pas lieu de limiter le recrutement aux seules personnes de nationalité roumaine. Si l’objectif était, en revanche, le recrutement de citoyens roumains, le seul critère aurait dû être celui de la nationalité.

59      La partie requérante souligne que, en application de l’article 1er quinquies du statut, il incomberait en tout état de cause à la Commission de démontrer, d’une part, que la décision de faire passer l’épreuve écrite c) en langue roumaine n’est pas constitutive d’une violation du principe d’égalité de traitement et, d’autre part, que la limitation éventuelle de ce principe est objectivement et raisonnablement justifiée.

60      S’agissant de la question de savoir si la différence de traitement est justifiée, notamment par l’objectif invoqué par la Commission d’atteindre une balance géographique raisonnable, la partie requérante estime qu’il n’est pas légitime d’exclure les candidats roumains relevant de la minorité hongroise au motif que la Roumanie n’a pas déclaré le hongrois comme langue officielle en vertu du règlement no 1.

61      Elle estime que la Commission n’explique pas en quoi les nécessités du service exigeraient l’utilisation exclusive de la langue roumaine par les lauréats du concours EPSO/AD/147/09 nommés fonctionnaires.

62      En outre, il conviendrait d’opérer une distinction entre « l’intérêt du service » et « l’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel ». Si le recrutement de fonctionnaires roumains était motivé par la nécessité de communiquer avec les milieux économiques et sociaux des États membres, il serait pertinent de recruter des personnes relevant de la minorité hongroise pour communiquer avec les acteurs économiques et sociaux en lien avec cette minorité.

63      Enfin, la partie requérante précise qu’elle répond aux exigences de l’article 28 du statut, qui, selon elle, n’ajoute aucune condition de connaissance d’une langue dont le fonctionnaire possède la nationalité.

64      La Commission estime en revanche que la partie requérante n’a été victime d’aucune inégalité de traitement et que, en tout état de cause, les conditions linguistiques du concours sont justifiées par l’intérêt du service, répondent aux objectifs d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel et sont proportionnées.

65      En premier lieu, la Commission souligne qu’il convient de distinguer les « langues de l’Union », c’est-à-dire les langues à utiliser en application du règlement no 1, des « langues parlées dans un État membre ». En effet, en application des articles 27 et 28 du statut et du règlement no 1, aucun candidat à un concours ne pourrait exiger l’usage, aux épreuves écrites dudit concours, d’une langue autre que les langues de l’Union pertinentes en vertu du règlement no 1.

66      Les institutions disposent, par ailleurs, d’un large pouvoir d’appréciation dans la détermination des langues officielles à utiliser au sein de leurs organes et par conséquent dans le choix des langues dont la connaissance peut être exigée des candidats à un concours. À cet égard, d’ailleurs, l’article 1er, paragraphe 1, sous f), de l’annexe III du statut permet justement à l’AIPN de spécifier les connaissances linguistiques requises par la nature particulière des postes à pourvoir.

67      Par ailleurs, la Commission se prévaut du fait que, jusqu’à présent, la Roumanie n’a pas déclaré le hongrois en tant qu’autre langue de l’Union au titre de l’article 8 du règlement no 1.

68      La Commission rappelle que le concours EPSO/AD/147/09 est un « concours ‘élargissement’ », organisé précisément en application du règlement no 1760/2006, lequel déroge, pour une période transitoire, pour les besoins du recrutement de ressortissants roumains, aux règles du statut, notamment à l’article 27 qui interdit de réserver les emplois vacants aux ressortissants d’un État membre déterminé. Il aurait été nécessaire de recruter, dans les meilleurs délais, du personnel de nationalité roumaine et maîtrisant la langue roumaine, pour répondre aux besoins du service créés par l’adhésion de la Roumanie et, notamment, pour communiquer dans la langue de l’Union à utiliser dans les relations avec la Roumanie.

69      Dans ces circonstances, la Commission soutient que l’exigence de la connaissance du roumain dans l’avis de concours litigieux répond à des objectifs de caractère général découlant de l’application du règlement dérogatoire no 1760/2006 et se justifie objectivement par l’intérêt du service, à la lumière notamment de l’article 1, paragraphe 1, sous f), de l’annexe III du statut.

70      La Commission précise enfin qu’il est exigé des candidats audit concours de posséder une bonne maîtrise de la langue roumaine et non pas une maîtrise parfaite de celle-ci, ce qui laisserait de facto aux candidats roumains ayant une autre langue maternelle que le roumain, la possibilité de réussir l’épreuve écrite c).

–       Appréciation du Tribunal

71      À titre liminaire, il y a lieu d’observer que, dans son mémoire en réplique, la partie requérante soutient que le règlement no 1, sur lequel la Commission fonde une grande partie de son argumentation, ne devrait pas contrevenir aux dispositions des traités, de toute autre règle de droit supérieure ou de tout principe général de droit.

72      Or, même en supposant, pour les seuls besoins du raisonnement, qu’une telle exception d’illégalité se rattache étroitement à la réclamation et qu’elle ne soit pas tardive, force est de constater qu’elle n’est assortie d’aucune précision permettant au Tribunal d’en examiner le bien-fondé.

73      En vertu de l’article 35, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure, la requête doit contenir l’exposé des moyens et des arguments de fait et de droit invoqués. Selon une jurisprudence constante, ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même (arrêt du Tribunal du 15 février 2011, AH/Commission, F‑76/09, point 29).

74      Partant, en l’absence de toute indication quant aux raisons pour lesquelles le règlement no 1 contreviendrait aux dispositions des traités, l’exception d’illégalité du règlement no 1 soulevée par la partie requérante est irrecevable au regard de l’article 35, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure.

75      Quant au moyen tiré de la violation du principe d’égalité de traitement et de non-discrimination, il y a lieu de rappeler que le principe d’égalité de traitement, en tant que principe général du droit de l’Union, impose que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêt de la Cour du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a., C‑127/07, point 23). Aussi, il y a violation du principe d’égalité de traitement, applicable au droit de la fonction publique de l’Union, lorsque deux catégories de personnes au service de l’Union, dont les situations factuelles et juridiques ne présentent pas de différence essentielle, se voient appliquer un traitement différent et qu’une telle différence de traitement n’est pas objectivement justifiée (arrêt du Tribunal du 25 février 2010, Pleijte/Commission, F‑91/08, point 36).

76      La partie requérante estimant que, en l’espèce, il y a eu violation du principe d’égalité de traitement du fait d’un traitement égal de situations différentes, il convient de vérifier si les situations de l’espèce sont différentes d’un point de vue factuel et juridique.

77      Certes, il est constant entre les parties en cause que la langue maternelle et principale de la partie requérante, de nationalités roumaine et hongroise, est, en fait, le hongrois. Toutefois, la langue maternelle et principale de la partie requérante n’est pas la langue nationale de la Roumanie. Comme le reconnaît la partie requérante elle-même, le hongrois ne bénéficie pas non plus, dans l’ordre juridique roumain, d’une reconnaissance légale en tant que langue officielle. À cet égard, au cours de l’audience, la Commission a soumis à l’attention du Tribunal des documents concernant certains actes législatifs roumains se rattachant notamment aux droits et aux obligations des personnes appartenant aux différentes et nombreuses minorités nationales existant en Roumanie. Parmi ces actes, figure en particulier la loi roumaine no 188/1999, dont l’article 54 relatif au recrutement de fonctionnaires dispose que, pour occuper une fonction publique en Roumanie, il faut remplir les conditions suivantes : « a) être citoyen roumain et avoir son domicile en Roumanie ; b) connaître la langue roumaine, écrite et orale ». Par ailleurs, le fait que le hongrois soit une langue officielle de l’Union est, dans le cas d’espèce, sans pertinence, s’agissant, en effet, d’un « concours ‘élargissement’ », exceptionnellement réservé, sur la base du règlement no 1760/2006, aux seuls ressortissants de l’État membre concerné. C’est d’ailleurs justement en raison de sa qualité de ressortissante roumaine que la partie requérante s’est portée candidate et a été admise à participer audit concours. Il découle de ce qui précède que la situation de la partie requérante n’est pas différente de celle des autres candidats au concours en question.

78      En outre, le concours EPSO/AD/147/09 se distingue nettement du concours EPSO/AD/53/06 organisé exclusivement au bénéfice des ressortissants chypriotes, concours que la partie requérante invoque au soutien de son argumentation. En effet, selon l’article 2 du règlement no 401/2004, des concours généraux devaient être organisés en vue du recrutement de fonctionnaires ayant comme langue principale une des onze langues officielles de l’Union à la date d’adoption du règlement no 401/2004 et ces concours couvraient simultanément toutes ces langues. L’une des langues officielles de la République de Chypre étant le turc, qui cependant n’est pas une des langues officielles de l’Union, il était nécessaire, comme l’a précisé la Commission à l’audience, de prévoir une langue alternative au grec, qui est l’autre langue officielle de cet État membre. La langue choisie a alors été l’anglais, qui était également l’une des trois langues pouvant être choisie pour la deuxième épreuve écrite. Dans les circonstances de l’espèce, la Commission était tenue d’assurer l’organisation de concours généraux dans les conditions fixées par le législateur de l’Union dans le règlement no 401/2004. Or, aucune disposition comparable à l’article 2 du règlement no 401/2004 ne figure en revanche dans le règlement no 1760/2006, sur le fondement duquel a été organisé le concours EPSO/AD/147/09 en cause en l’espèce.

79      En tout état de cause, même si le fait de passer l’épreuve écrite c) en roumain avait pu entraîner un désavantage pour la partie requérante par rapport aux candidats de langue maternelle roumaine, il convient de rappeler que des différences de traitement, justifiées sur la base de critères objectifs, raisonnables et proportionnés au but poursuivi, ne constituent pas une violation du principe d’égalité de traitement. À cet égard, il convient aussi de rappeler que, parmi les critères susceptibles de justifier une différence de traitement entre fonctionnaires, figure l’intérêt du service (arrêt Pleijte/Commission, précité, point 57).

80      Or, le règlement no 1760/2006, dont la légalité n’a pas été remise en cause au cours de la présente procédure, fournit la base juridique autorisant, exceptionnellement et par dérogation aux règles statutaires applicables, le recrutement de ressortissants roumains par des concours réservés à ces derniers. S’il est vrai que ce règlement, à la différence du règlement no 401/2004, ne contient aucune indication en matière de choix de langue, il est cependant constant que la Roumanie n’a choisi comme langue officielle au sens du règlement no 1 que le roumain. Au demeurant, le roumain est, selon la Constitution roumaine, la seule langue officielle de cet État.

81      Le fait d’imposer une épreuve en roumain au concours EPSO/AD/147/09 doit de ce fait être considéré comme légitime, car justifié par des exigences supérieures découlant précisément de l’adhésion de la Roumanie à l’Union européenne. Les exigences en question se basent donc sur des critères objectifs et raisonnables et la différence de traitement, dans l’organisation d’un « concours ‘élargissement’ », limitée à une période de temps transitoire, successive à l’adhésion dudit État, apparaît proportionnée au but poursuivi.

82      Il découle de ce qui précède que les services administratifs de l’Union, tels que l’EPSO, appelés à organiser, sur la base d’un règlement dérogatoire, tel le règlement no 1760/2006, des concours réservés aux ressortissants de la Roumanie en tant qu’État venant d’adhérer à l’Union ne sauraient, sans enfreindre le principe d’égalité de traitement, employer une langue autre que la seule langue officielle de ce pays, lorsqu’il s’agit du déroulement de certaines épreuves écrites de sélection visant précisément à vérifier la connaissance approfondie de ladite langue. Il en irait différemment si cet État membre, en ce qui concerne sa participation à l’action des institutions de l’Union, reconnaissait formellement, au titre de l’article 1er du règlement no 1, une langue minoritaire existant au sein de son territoire qui, sans être une langue officielle de cet État, serait néanmoins une langue officielle de l’Union.

83      En outre, le fait d’imposer « la connaissance approfondie du roumain », en tant que langue principale du concours en cause en l’espèce, lequel est réservé à des ressortissants roumains, n’est ni arbitraire ni manifestement contraire à l’intérêt du service.

84      En effet, il a déjà été jugé que l’administration peut, lorsque les nécessités du service ou celles de l’emploi l’exigent, légitimement spécifier la ou les langues dont la connaissance approfondie ou satisfaisante est requise (arrêt du Tribunal de première instance du 5 avril 2005, Hendrickx/Conseil, T‑376/03, point 26 ; arrêt du Tribunal du 29 juin 2011, Angioi/Commission, F‑7/07, point 90, et la jurisprudence citée).

85      Or, comme la Commission l’a indiqué au cours de la présente procédure, la connaissance du roumain est utile, voire nécessaire, en raison du fait que les administrateurs ainsi recrutés participent à diverses tâches « à l’intérieur de l’institution et, le cas échéant, en relation avec les milieux économiques et sociaux des États membres et les autres institutions [de l’Union] ». Ces précisions justifient en termes objectifs et raisonnables le fait d’imposer une épreuve en roumain dans le cadre de l’un des premiers « concours ‘élargissement’ » organisés après l’adhésion de la Roumanie à l’Union.

86      Par conséquent, il ressort de ce qui précède que, en vertu du règlement n1760/2006, l’administration était en droit d’organiser un concours ouvert, pour partie, uniquement aux ressortissants roumains et d’imposer à ces candidats, dans l’intérêt du service, la connaissance approfondie de leur langue nationale, à savoir le roumain, seule langue officielle de la Roumanie au sens du règlement no 1.

87      Partant, rien ne laisse penser que le fait d’exiger une connaissance approfondie du roumain dans le cadre du concours en cause en l’espèce serait manifestement contraire à l’intérêt du service ou donnerait lieu à une différenciation arbitraire.

88      Les moyens tirés de la violation des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination et de la violation de l’article 1er quinquies, paragraphes 1, 5 et 6 du statut doivent donc être rejetés.

 Sur les moyens tirés de la violation de l’article 2 TUE, de l’article 21 de la Charte et des articles 3, 4, 5, 10 et 19 de la Convention-cadre

89      Pour autant que la requête puisse être comprise comme faisant grief à la Commission d’avoir violé l’article 2 TUE et l’article 21 de la Charte en imposant une épreuve en langue roumaine dans le cadre du concours EPSO/AD/147/09, il y a lieu, en l’absence de toute discrimination (voir les points 75 à 88 ci-dessus), de rejeter ce moyen comme non fondé, sans qu’il soit nécessaire d’aborder la question, soulevée à l’audience, de savoir si l’article 2 TUE peut avoir un effet direct et faire naître un droit subjectif dans le chef de la partie requérante.

90      S’agissant de la référence aux articles 3, 4, 5, 10 et 19 de la Convention-cadre figurant dans la requête, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 35, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure, la requête doit contenir l’exposé des moyens et des arguments de fait et de droit invoqués. Pour des raisons de sécurité juridique et de bonne administration de la justice, déjà indiquées au point 73 du présent arrêt, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle-même.

91      Ainsi, la seule référence, dans la requête, aux articles 3, 4, 5, 10 et 19 de la Convention-cadre, ne saurait être considérée, en l’absence de toute allégation à cet égard, comme suffisante au regard du règlement de procédure. Il convient, dès lors, de l’écarter comme irrecevable.

 Sur le troisième chef de conclusions

92      En substance, la partie requérante demande au Tribunal d’ordonner à la Commission d’organiser une nouvelle épreuve de concours écrite c).

93      Le juge de l’Union étant incompétent pour adresser des injonctions aux institutions (arrêt du Tribunal du 5 juillet 2011, V/Parlement, F‑46/09, point 63, et la jurisprudence citée), il convient de déclarer irrecevable la demande fondée sur ce chef.

94      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter comme non fondé le recours dans sa totalité.

 Sur les dépens

95      Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

96      Il résulte des motifs énoncés ci-dessus que la partie requérante a succombé en son recours. En outre, la Commission a, dans ses conclusions, expressément demandé que la partie requérante soit condamnée aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie requérante doit supporter ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      BA supporte ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par la Commission européenne.

Kreppel

Perillo

Barents

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 décembre 2012.

Le greffier

 

      Le président

W. Hakenberg

 

      H. Kreppel


* Langue de procédure : le français.