Language of document : ECLI:EU:C:2007:497

Affaire C-17/06

Céline SARL

contre

Céline SA

(demande de décision préjudicielle, introduite par la cour d'appel de Nancy)

«Marques — Articles 5, paragraphe 1, sous a), et 6, paragraphe 1, sous a), de la première directive 89/104/CEE — Droit pour le titulaire d’une marque enregistrée de s'opposer à l'usage par un tiers d'un signe identique à la marque — Usage du signe en tant que dénomination sociale, nom commercial ou enseigne — Droit pour le tiers de faire usage de son nom»

Sommaire de l'arrêt

1.        Rapprochement des législations — Marques — Directive 89/104 — Droit pour le titulaire d'une marque de s'opposer à l'usage par un tiers d'un signe identique pour des produits identiques — Usage de la marque au sens de l'article 5, paragraphe 1, sous a), de la directive — Notion

(Directive du Conseil 89/104, art. 5, § 1, a))

2.        Rapprochement des législations — Marques — Directive 89/104 — Droit pour le titulaire d'une marque de s'opposer à l'usage par un tiers d'un signe identique pour des produits identiques — Portée

(Directive du Conseil 89/104, art. 5, § 1, a))

3.        Rapprochement des législations — Marques — Directive 89/104 — Limitation des effets de la marque

(Directive du Conseil 89/104, art. 6, § 1, a))

1.        L'usage, par un tiers qui n'y a pas été autorisé, d'une dénomination sociale, d'un nom commercial ou d'une enseigne identique à une marque antérieure constitue un «usage pour des produits ou des services» lorsque l'usage est effectué aux fins de distinguer lesdits produits ou services.

Tel est le cas lorsqu'un tiers appose le signe constituant sa dénomination sociale, son nom commercial ou son enseigne sur les produits qu'il commercialise ou, même en l'absence d'apposition, lorsque le tiers utilise ledit signe de telle sorte qu'il s'établit un lien entre le signe constituant la dénomination sociale, le nom commercial ou l'enseigne du tiers et les produits commercialisés ou les services fournis par le tiers. Par contre, ladite notion ne comprend pas l'usage se limitant à identifier une société ou à signaler un fonds de commerce, puisqu'un tel usage n'a pas, en soi, pour finalité de distinguer des produits ou des services. Il appartient à la juridiction nationale de vérifier si l'usage d'un signe constitue un usage pour des produits ou services au sens de l'article 5, paragraphe 1, de la directive.

(cf. points 20-24 et disp.)

2.        L'usage, par un tiers qui n'y a pas été autorisé, d'un signe identique à une marque enregistrée pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels cette marque est enregistrée ne peut être interdit, conformément à l'article 5, paragraphe 1, sous a), de la première directive 89/104 sur les marques, que s'il porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de ladite marque et notamment à sa fonction essentielle qui est de garantir aux consommateurs la provenance des produits ou des services. Il en est ainsi lorsque le signe est utilisé par le tiers pour ses produits ou ses services de telle sorte que les consommateurs sont susceptibles de l'interpréter comme désignant la provenance des produits ou des services en cause. Il appartient à la juridiction nationale de vérifier si l'usage d'un tel signe porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte à la fonction essentielle de la marque.

(cf. points 26-28 et disp.)

3.        Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, sous a), de la première directive 89/104 sur les marques, le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire à un tiers l'usage, dans la vie des affaires, de son nom et de son adresse, pour autant que cet usage soit fait conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale. Il appartient à la juridiction nationale d'apprécier le respect de ladite condition en tenant compte de la mesure dans laquelle, d'une part, l'usage de son nom par le tiers est compris par le public visé ou au moins une partie significative de ce public comme indiquant un lien entre les produits ou les services du tiers et le titulaire de la marque ou d'une personne habilitée à utiliser la marque et, d'autre part, le tiers aurait dû en être conscient. Constitue également un facteur devant être pris en compte lors de cette appréciation la circonstance qu'il s'agit d'une marque qui jouit, dans l'État membre où elle est enregistrée et où sa protection est demandée, d'une certaine renommée dont le tiers pourrait tirer profit pour la commercialisation de ses produits ou services.

(cf. points 30, 34-35 et disp.)