Language of document : ECLI:EU:T:2018:643

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

4 octobre 2018 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Documents afférents à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive 2007/46/CE permettant à un État membre de refuser l’immatriculation de véhicules compromettant gravement la sécurité routière ou nuisant fortement à l’environnement ou à la santé publique – Refus d’accès – Exception relative à la protection des activités d’inspection, d’enquête et d’audit – Présomption générale – Convention d’Aarhus – Refus d’accès au dossier – Article 41 de la charte des droits fondamentaux »

Dans l’affaire T‑128/14,

Daimler AG, établie à Stuttgart (Allemagne), représentée par Mes C. Arhold, B. Schirmer et N. Wimmer, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par Mme F. Clotuche-Duvieusart, puis par M. G. Wilms et Mme Clotuche-Duvieusart et enfin par M. H. Krämer et Mme Clotuche-Duvieusart, en qualité d’agents, assistés initialement de Me R. Van der Hout, puis de Mes Van der Hout et C. Wagner, avocats,

partie défenderesse,

soutenue par

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mmes M. Simm et A. Jensen, en qualité d’agents,

et par

Parlement européen, représenté par MM. N. Görlitz et L. Visaggio, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision Ares(2013) 3715941 de la Commission, du 13 décembre 2013, refusant d’accorder à la requérante l’accès aux documents relatifs à la procédure engagée par la République française au titre de l’article 29 de la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 septembre 2007, établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules (directive-cadre) (JO 2007, L 263, p. 1),

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. D. Gratsias, président, A. Dittrich et P. G. Xuereb (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 septembre 2007, établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules (directive-cadre) (JO 2007, L 263, p. 1, ci-après la « directive-cadre »), a remplacé les systèmes de réception des véhicules des États membres par une procédure de réception harmonisée au sein de l’Union européenne, dite « réception CE par type ». Cette réception CE par type est définie, à l’article 3, paragraphe 5, de la directive-cadre, comme étant l’acte par lequel un État membre certifie qu’un type de véhicule, de système, de composant ou d’entité technique satisfait aux dispositions administratives et aux exigences techniques applicables de ladite directive et des actes réglementaires énumérés dans certaines de ses annexes.

2        L’article 5, paragraphe 4, de la directive 2006/40/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 mai 2006, concernant les émissions provenant des systèmes de climatisation des véhicules à moteur et modifiant la directive 70/156/CEE du Conseil (JO 2006, L 161, p. 12, ci-après la « directive sur les systèmes de climatisation »), prévoit que, à compter du 1er janvier 2011, les États membres n’accordent plus la réception CE d’un type de véhicule équipé d’un système de climatisation conçu pour contenir des gaz à effet de serre fluorés dont le potentiel de réchauffement planétaire est supérieur à 150. Cependant, cette directive ne prescrit pas un type de réfrigérant spécifique. La mise en œuvre de cette interdiction a été reportée par la Commission européenne au 1er janvier 2013.

3        Les producteurs européens de véhicules ont convenu, dans le cadre d’un processus international d’harmonisation qui a eu lieu en 2009, d’utiliser le réfrigérant portant la référence « R1234yf ».

4        En 2013, la requérante, Daimler AG, un constructeur automobile établi en Allemagne qui produit notamment des véhicules automobiles de la marque Mercedes, a soulevé des doutes en ce qui concerne la sécurité de l’utilisation de ce réfrigérant.

5        En mai 2013, le Kraftfahrt-Bundesamt (KBA, office fédéral du transport automobile, Allemagne) a accueilli une demande de Daimler tendant à ce que soit étendue la réception du type de véhicule 245G. Étant donné que, initialement, le type de véhicule 245G avait été réceptionné en 2008, il n’était pas soumis à l’obligation d’utiliser un réfrigérant compatible avec la directive sur les systèmes de climatisation. L’extension de la réception de ce type de véhicules a été notifiée à la Commission par lettre du 22 mai 2013.

6        Le 10 juin 2013, la Commission a ouvert la procédure EU Pilot sous la référence 5160/11/ENTR, dont l’objectif était de vérifier dans quelle mesure la République fédérale d’Allemagne avait, dans le cadre de l’octroi, à la requérante, des extensions de réceptions CE par type, respecté la directive-cadre et la directive sur les systèmes de climatisation.

7        Le 26 juillet 2013, le ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie français a adopté une décision par laquelle il a refusé l’immatriculation, sur le territoire français, de certains véhicules de la marque Mercedes, pour lesquels une extension des réceptions CE par type avait été accordée par les autorités allemandes, au motif que ces véhicules étaient équipés d’un système de climatisation conçu pour contenir des gaz à effet de serre fluorés dont le potentiel de réchauffement planétaire était supérieur à 150, en méconnaissance de l’article 5, paragraphe 4, de la directive sur les systèmes de climatisation.

8        Ce refus d’immatriculation était fondé sur la disposition française qui transpose l’article 29, paragraphe 1, première phrase, de la directive-cadre. Cet article, qui figure au chapitre XII, intitulé « Clauses de sauvegardes », dispose qu’un État membre peut, pendant six mois au maximum, refuser d’immatriculer des véhicules ayant fait l’objet d’une réception CE par type, s’il considère que ces véhicules nuisent fortement à l’environnement ou à la santé publique.

9        Le 26 juillet 2013, conformément à l’article 29, paragraphe 1, deuxième phrase, de la directive-cadre, la République française a informé la Commission de son refus d’immatriculer certains véhicules de la marque Mercedes. Conformément à l’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre, la Commission a consulté les parties concernées afin de préparer une décision concernant ce refus.

10      Le 2 août 2013, un recours a été introduit par Mercedes-Benz France, une entreprise du groupe Daimler, à l’encontre de la décision du 26 juillet 2013 du ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie français par laquelle il avait refusé l’immatriculation, sur le territoire français, de certains véhicules de la marque Mercedes.

11      Par lettre du 19 août 2013 adressée à la Commission, la requérante a pris position sur le refus de la République française. Dans cette lettre, la requérante a notamment indiqué ce qui suit :

« […] en vertu de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la charte des droits fondamentaux, le droit d’accès au dossier fait également partie des droits fondamentaux protégés. Nous entendons faire usage de ce droit et sollicitons dès lors la possibilité d’avoir pleinement accès à l’ensemble des pièces afférentes à la présente procédure au titre de l’article 29 de la [directive-cadre] (y compris ceux figurant dans d’autres pièces qui ont été utilisées et dont il convient de tenir compte en l’espèce), en particulier à toute éventuelle prise de position, notamment du service juridique de la Commission, en ce qui concerne l’application de l’article 29 de la [directive-cadre]. »

12      Par courriel du 17 septembre 2013 adressé à la requérante, la Commission a accusé réception de cette lettre et de la demande d’accès aux documents contenue dans cette lettre, qu’elle a considérée comme étant fondée sur le règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), et qu’elle a enregistrée sous la référence GESTDEM 2013/4643. Dans ce courriel, la Commission a également demandé à la requérante de confirmer qu’elle demandait l’accès aux documents mentionnés au point 11 ci-dessus.

13      Par courriel du 20 septembre 2013, la requérante a confirmé que sa demande d’accès portait sur l’ensemble des documents afférents à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre, en particulier à toute éventuelle prise de position du service juridique de la Commission sur l’application de l’article 29 de la directive-cadre. Elle a indiqué à la Commission que, si cette dernière souhaitait une demande plus précise, elle devait lui fournir une liste de tous les documents relatifs à cette procédure. En outre, la requérante a souligné que sa demande d’accès était fondée sur son droit d’accès au dossier prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »). Selon la requérante, cet article était applicable au motif que la procédure prévue à l’article 29 de la directive-cadre la concernait directement et individuellement, l’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre obligeant la Commission à l’entendre avant d’adopter une décision.

14      Par décision du 16 octobre 2013, la Commission a indiqué qu’elle disposait de quatorze documents visés par la demande d’accès de la requérante dont la liste figurait en annexe. Elle a précisé qu’elle accordait l’accès à cinq de ces documents et qu’elle refusait l’accès aux neuf autres. La Commission a fondé son refus d’accès à six documents sur l’exception visée à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, relative à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit. Elle a fondé son refus d’accès aux trois autres documents sur l’exception visée à l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001, relative à la protection du processus décisionnel. La Commission a ajouté qu’un accès partiel à ces neuf documents n’était pas possible. Enfin, elle a indiqué qu’il n’y avait pas d’intérêt public supérieur justifiant leur divulgation.

15      Le 30 octobre 2013, la requérante a formulé une demande confirmative d’accès conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001. Dans cette demande, elle a relevé qu’il aurait dû y avoir plus de documents couverts par sa demande d’accès que les quatorze identifiés par la Commission dans sa décision du 16 octobre 2013. Elle a indiqué que les exceptions invoquées par la Commission n’étaient pas pertinentes et qu’il existait un intérêt public supérieur à la divulgation des documents demandés en raison de l’importance de l’affaire pour la réalisation de la libre circulation des marchandises. Dans cette demande confirmative, la requérante invoquait non seulement le droit d’accès aux documents prévu à l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, mais également le droit d’accès au dossier, prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

16      Par décision du 13 décembre 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la Commission a confirmé son refus de donner accès aux neufs documents qu’elle avait identifiés comme ne pouvant pas lui être communiqués dans sa décision du 16 octobre 2013.

17      En outre, elle a relevé que, après des recherches supplémentaires, elle avait constaté qu’elle disposait, en plus des quatorze documents identifiés dans sa décision du 16 octobre 2013, de 349 courriels supplémentaires. Elle a indiqué que ces documents consistaient en :

–        55 courriels internes échangés entre des agents de l’unité « Industrie automobile » de la direction générale (DG) « Entreprises et industrie » ;

–        170 courriels internes à la DG « Entreprises et industrie » ;

–        25 courriels échangés avec le service juridique ;

–        25 courriels échangés avec d’autres directions générales de la Commission ;

–        45 courriels échangés avec des États membres ;

–        29 courriels échangés avec des personnes morales.

18      La Commission a estimé que l’enquête menée sur le fondement de l’article 29 de la directive-cadre concernant le refus de la République française d’immatriculer certains véhicules de la marque Mercedes et l’enquête préliminaire concernant la République fédérale d’Allemagne visant à établir un éventuel manquement étaient fortement liées et a considéré que les documents demandés faisaient tous partie du dossier administratif respectif de chacune de ces enquêtes.

19      Ensuite, la Commission a examiné si la divulgation de ces documents portait atteinte, d’une part, à l’objectif de l’enquête engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre et, d’autre part, à l’objectif de l’enquête préliminaire concernant la République fédérale d’Allemagne.

20      En ce qui concerne l’atteinte à l’objectif de l’enquête engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre, la Commission a estimé, en substance, que la diffusion des documents demandés aurait eu pour effet de remettre en cause l’effet utile de la clause de sauvegarde prévue à l’article 29 de la directive-cadre, et en particulier l’objectif des enquêtes menées dans ce contexte, qui était de déterminer si les États membres avaient légitimement appliqué cette clause et d’assurer un niveau élevé de sécurité routière, de santé et de protection de l’environnement.

21      La Commission a donc conclu que les documents demandés, qui faisaient tous partie du dossier administratif de l’enquête engagée sur le fondement de l’article 29 de la directive-cadre, étaient couverts par une présomption générale de non-divulgation fondée sur la protection des enquêtes prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001.

22      En ce qui concerne l’atteinte à l’objectif de l’enquête préliminaire concernant la République fédérale d’Allemagne, visant à établir un éventuel manquement, la Commission a relevé en substance que, pour qu’elle pût effectuer ses tâches efficacement, il devait régner un climat de confiance réciproque entre la Commission et les États membres jusqu’à ce que le cas fût définitivement clôturé et qu’elle pouvait s’appuyer sur une présomption générale de non-divulgation pour refuser l’accès aux documents demandés.

23      De surcroît, la Commission a estimé qu’il n’existait pas d’intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents demandés et que l’intérêt public était mieux servi si l’objectif des enquêtes en cours était protégé.

24      Par ailleurs, la Commission a considéré qu’elle ne pouvait pas donner d’accès partiel aux documents demandés.

25      Enfin, en ce qui concerne la référence faite par la requérante à la Charte et, en particulier, au droit d’accès au dossier prévu à son article 41, paragraphe 2, la Commission a estimé qu’elle ne pouvait pas fonder sa décision directement sur cette disposition et qu’elle devait plutôt prendre en considération les limites et les conditions de l’exercice de ce droit tel que défini par le traité FUE et le règlement no 1049/2001.

 Procédure

26      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 21 février 2014, la requérante a introduit le présent recours.

27      Dans le mémoire en défense déposé au greffe du Tribunal le 7 mai 2014, la Commission a demandé la suspension de la procédure.

28      Par ordonnance du 1er juillet 2014, le président de la cinquième chambre, les parties entendues, a ordonné, en application de l’article 77, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, la suspension de la procédure dans la présente affaire dans l’attente des décisions de la Cour mettant fin à l’instance dans les affaires C‑612/13 P, ClientEarth/Commission, et C‑673/13 P, Commission/Stichting Greenpeace.

29      Le 5 mars 2015, la requérante a déposé une demande de reprise de la procédure. Le 20 mars 2015, la Commission a déposé des observations concernant ladite demande. Par décision du 8 avril 2015, le président de la cinquième chambre a rejeté cette demande.

30      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement, le 4 et le 14 avril 2014, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

31      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, la présente affaire a été réattribuée à la cinquième chambre, dans sa nouvelle composition, et à un nouveau juge rapporteur.

32      Les décisions, dans l’attente desquelles la procédure dans la présente affaire avait été suspendue, sont intervenues par arrêts du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission (C‑612/13 P, EU:C:2015:486), et du 23 novembre 2016, Commission/Stichting Greenpeace Nederland et PAN Europe (C‑673/13 P, EU:C:2016:889).

33      Par décisions du 7 décembre 2016, le président de la cinquième chambre a admis les interventions du Parlement et du Conseil. Ces derniers ont déposé leurs mémoires en intervention et les parties principales ont déposé leurs observations sur ces mémoires dans les délais impartis.

34      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, le Tribunal a, par lettres du 3 octobre 2017 et des 3, 24 janvier et 17 mai 2018, posé des questions écrites à la Commission et à la requérante auxquelles elles ont répondu dans les délais impartis.

35      Dans le cadre des mesures d’instruction prévues à l’article 91, sous c), du règlement de procédure, le Tribunal a ordonné à la Commission de produire une copie intégrale des 29 courriels, échangés entre elle et des personnes morales, identifiés par celle-ci dans la décision attaquée comme étant afférents à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre. La Commission a déféré à cette ordonnance dans le délai imparti.

36      Par lettre du 8 juin 2018, la requérante a demandé, au vu de la réponse donnée le 28 mai 2018 par la Commission à une question écrite du Tribunal, que ce dernier adopte une nouvelle mesure d’organisation de la procédure afin de poser deux questions à la Commission.

37      En vertu de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, en l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure, le Tribunal peut décider de statuer sur le recours sans phase orale de la procédure. En l’espèce, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a décidé, en l’absence d’une telle demande, de statuer sans phase orale de la procédure.

 Conclusions des parties

38      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

39      La Commission, soutenue par le Parlement et le Conseil, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

40      À l’appui de son recours, la requérante soulève quatre moyens. Le premier est tiré de la violation du droit d’accès au dossier prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte. Le deuxième est tiré de la violation de la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998 (ci-après la « convention d’Aarhus »), et du règlement (CE) no 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus (JO 2006, L 264, p. 13). Le troisième est tiré de la violation de l’article 42 de la Charte, de l’article 15, paragraphe 3, TFUE, du règlement no 1049/2001 et du règlement no 1367/2006. Enfin, le quatrième est tiré de la violation de l’obligation de motivation.

41      La Commission conteste l’ensemble de ces moyens. Le Conseil et le Parlement n’ont présenté des arguments qu’en ce qui concerne l’argumentation de la requérante, développée dans le deuxième moyen, relative à la violation de la convention d’Aarhus.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du droit d’accès au dossier prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte

42      Dans le cadre du premier moyen, la requérante soutient que la Commission a violé son droit fondamental d’accès au dossier garanti par l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

43      À cet égard, la requérante fait valoir que, contrairement à ce qui ressort de la décision attaquée, le droit d’accès au dossier n’est pas défini, aménagé ou réduit par les dispositions du droit primaire ou dérivé de l’Union. Le droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne, prévu par l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte, serait au contraire indépendant du droit d’accès aux documents des institutions prévu par l’article 42 de la Charte. Tandis que ce dernier droit serait un droit reconnu à tout citoyen de l’Union, le droit d’accès au dossier serait un droit reconnu à une partie à une procédure spécifique. La Commission aurait méconnu cette différence fondamentale dans la décision attaquée. Le règlement no 1049/2001 ne concernerait que le droit d’accès aux documents des institutions dont bénéficierait tous les citoyens de l’Union, et non le droit fondamental d’accéder au dossier. Ce dernier droit bénéficierait d’une protection beaucoup plus importante que le droit d’accès aux documents.

44      En outre, la requérante rappelle que l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte consacre « le droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne, dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires ». Or, elle estime que les documents relatifs à la procédure engagée par la République française au titre de l’article 29 de la directive-cadre la concernent de manière directe et individuelle.

45      De surcroît, la requérante souligne que, si, certes, le droit d’accès au dossier est limité par la garantie des intérêts légitimes de la confidentialité et du secret professionnel et des affaires, la question de savoir si l’accès au dossier doit être accordé ou refusé en raison de la protection de ces intérêts légitimes doit être appréciée au cas par cas. Or, la Commission aurait exclu de l’accès au dossier, en bloc et sans aucune précision, l’ensemble des documents qui étaient, selon elle, confidentiels, ce qui serait contraire à la jurisprudence de la Cour.

46      Dans la réplique, la requérante souligne que sa demande initiale d’accès et sa demande confirmative étaient fondées sur l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte et que, dans la décision attaquée, la Commission a examiné cette disposition et a conclu au rejet de la demande d’accès au dossier. Selon la requérante, le droit d’accès au dossier fondé sur l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte faisait, par conséquent, bien l’objet de la décision attaquée, contrairement à ce que la Commission soutient.

47      De surcroît, la requérante fait valoir que la jurisprudence rendue dans des affaires d’ententes, invoquée par la Commission et selon laquelle le refus d’accès au dossier n’est pas un acte attaquable, n’est pas pertinente. Cette jurisprudence serait, en effet, fondée de manière déterminante sur le fait que le droit d’accès au dossier est pleinement reconnu comme garantie procédurale dans ce type d’affaires et que son exécution est régie de manière détaillée par un règlement. Par ailleurs, en réponse à une question posée par le Tribunal, la requérante a souligné qu’il n’était pas établi que l’illégalité attachée au refus d’accès au dossier pouvait être invoquée à l’appui d’un recours dirigé contre une décision finale. L’article 29 de la directive-cadre ne prévoirait pas, en effet, la possibilité, pour le constructeur, d’introduire un recours contre une décision finale. La requérante a également souligné que la Commission ne saurait lui opposer le fait qu’elle avait présenté ses observations dans le court délai imparti sans avoir exercé son droit d’accès au dossier, dès lors que cet accès au dossier ne lui avait pas été proposé au préalable. Il serait évident que la requérante aurait été habilitée à compléter ses observations après avoir accédé au dossier.

48      En outre, la requérante a également souligné que l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte accordait une importance déterminante à la qualité de « personne concernée » par une procédure et que cette personne ne pouvait exercer de manière effective son droit d’être entendu sur l’affaire qu’à la condition d’avoir une pleine connaissance du dossier. Ainsi, le droit de formuler des observations, qui reconnaîtrait la qualité de personne concernée à celui qui formule des observations, impliquerait en règle générale également le droit d’accès au dossier. L’article 29, paragraphe 1, de la directive-cadre soulignerait la position procédurale particulière du constructeur concerné par un refus d’immatriculation, dans la mesure où cette disposition prévoirait que l’État membre qui prendrait cette décision en informerait immédiatement les autres États membres, la Commission et le constructeur concerné. L’article 29, paragraphe 1, de la directive-cadre conférerait, dès lors, un statut de partie concernée par la procédure au constructeur, avec cette conséquence que la Commission devrait le consulter, conformément à l’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre.

49      Enfin, la requérante soutient qu’il est manifeste que son accès au dossier peut avoir une influence sur la procédure qui la concerne. En tant que constructeur visé par la procédure engagée par la République française au titre de l’article 29 de la directive-cadre, la requérante pourrait fournir des indications très précises sur les aspects techniques en jeu et livrer des informations pertinentes pour la décision à intervenir.

50      La Commission reconnaît que le droit d’accès au dossier prévu par l’article 41, paragraphe 2, point b), de la Charte est distinct du droit d’accès aux documents garanti par l’article 42 de la Charte, par l’article 15, paragraphe 2, TFUE et par le règlement no 1049/2001. Elle soutient que, par conséquent, la requérante ne peut pas demander l’annulation d’une décision adoptée par la Commission sur le fondement de l’article 4 du règlement no 1049/2001 au motif qu’elle viole son droit d’accès au dossier. La Commission ajoute qu’elle n’a pas examiné la demande d’accès au dossier de la requérante, puisque tel n’est pas l’objet d’une procédure engagée au titre du règlement no 1049/2001. Dans la décision attaquée, elle aurait uniquement statué sur le droit d’accès aux documents de la requérante en vertu du règlement no 1049/2001. Les considérations, contenues dans la décision attaquée, concernant l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte n’indiqueraient nullement, contrairement à ce que la requérante soutient, qu’elle a rendu une décision sur la demande d’accès au dossier. Au contraire, elle aurait explicitement déclaré, dans la décision attaquée, qu’elle avait examiné la demande exclusivement sur le fondement du règlement no 1049/2001. La requérante ne pourrait donc pas écarter ou contourner les conditions de ce droit d’accès, régies par le droit dérivé, en invoquant un droit d’accès au dossier qui lui serait ouvert en tant que partie à une procédure administrative conduite par la Commission.

51      En outre, la Commission rappelle que le droit d’accès au dossier portait sur l’implication de la requérante dans une procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre et que, concernant cette procédure, le refus d’accorder l’accès au dossier n’équivalait pas à une décision définitive de la Commission adoptée au terme de cette procédure, de sorte que, en vertu de la jurisprudence, ce refus ne constituait pas encore un acte juridique attaquable. Les griefs relatifs à la légalité d’une mesure intermédiaire – telle qu’une décision sur une demande d’accès au dossier – ne pourraient être soulevés qu’à titre incident, dans le cadre du recours contre la décision clôturant la procédure. La requérante n’aurait en outre pas démontré qu’un recours contre une décision finale ne lui assurerait pas une protection juridique suffisante.

52      En réponse aux questions posées par le Tribunal, la Commission a souligné que l’article 29 de la directive-cadre ne disposait pas que le constructeur bénéficiait d’un droit d’accès au dossier et qu’un tel droit des constructeurs concernés aurait pu tout au plus être tiré de l’article 41, paragraphe 2, point b), de la Charte. Selon la Commission, un droit procédural qui permet à l’intéressé d’assurer correctement sa défense n’échoit qu’aux parties à la procédure. Or, les constructeurs ne seraient pas parties à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre. Il ne découlerait en effet pas de la circonstance que la Commission entend les opérateurs économiques concernés pour instruire tous les faits pertinents que ces derniers occupent dans la procédure une position qui leur conférerait des droits particuliers.

53      La Commission ajoute que le droit d’accès au dossier n’est pas accordé sans réserve aux parties à une procédure étant donné que celles-ci peuvent se voir refuser l’accès au dossier lorsque des intérêts supérieurs de confidentialité y font obstacle. Les limites du droit d’accès au dossier visé à l’article 41, paragraphe 2, point b), de la Charte correspondraient aux exceptions prévues à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 relatives à la protection des enquêtes. Ainsi, selon la Commission, le droit d’accès au dossier, s’il avait fait l’objet de la décision attaquée, aurait aussi pu être limité de manière proportionnée pour des raisons comparables à celles relatives au droit d’accès visé par cette décision.

54      Enfin, la Commission relève que, en vertu de la jurisprudence, la requérante, afin de prouver une violation du droit d’accès au dossier, doit démontrer que le refus d’accès a pu influencer le déroulement de la procédure et le contenu de la décision de la Commission. Or, la requérante ne l’aurait pas fait. De plus, une telle influence serait exclue pour des raisons chronologiques, la requérante ayant présenté ses observations, dans la procédure engagée sur le fondement de l’article 29 de la directive-cadre, le 19 août 2013, c’est-à-dire avant d’avoir introduit sa demande d’accès aux documents par courrier daté du même jour.

55      Il convient de déterminer, tout d’abord, si, dans la décision attaquée, la Commission s’est, ainsi qu’elle le soutient, uniquement prononcée sur la demande d’accès aux documents fondée sur le règlement no 1049/2001, ou si elle s’est également prononcée sur la demande d’accès au dossier fondée sur l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

56      Dans la lettre du 19 août 2013, adressée à la Commission, dans laquelle la requérante a pris position sur le refus de la République française d’immatriculer certains véhicules de la marque Mercedes, la requérante a fondé sa demande d’accès à l’ensemble des pièces afférentes à la procédure engagée par la République française au titre de l’article 29 de la directive-cadre uniquement sur l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

57      En outre, à la suite du courriel de la Commission adressé à la requérante selon lequel elle estimait que la demande d’accès contenue dans la lettre du 19 août 2013 était une demande d’accès aux documents fondée sur le règlement no 1049/2001, la requérante a, par courriel du 20 septembre 2013, souligné que sa demande d’accès était fondée sur son droit d’accès au dossier prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

58      Enfin, dans sa demande confirmative d’accès du 30 octobre 2013, la requérante a invoqué non seulement le droit d’accès aux documents prévu à l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, mais également le droit d’accès au dossier, prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

59      Ainsi, les demandes initiales d’accès aux documents, formulées respectivement dans la lettre du 19 août 2013 et le courriel du 20 septembre 2013, étaient fondées uniquement sur l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte et la demande confirmative d’accès était fondée tant sur le droit d’accès aux documents prévu à l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001 que sur le droit d’accès au dossier, prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

60      En outre, il est vrai que la décision attaquée est intitulée « Décision de la Secrétaire générale prise en vertu de l’article 4 des dispositions concernant la mise en œuvre du règlement […] no 1049/2001 » et a pour objet « votre demande confirmative d’accès aux documents formée au titre du règlement […] no 1049/2001 – GESTDEM 2013/4643 » et que, sous le titre « Appréciation et conclusions sur le fondement du règlement no 1049/2001 » de la décision attaquée, la Commission a affirmé que, « [lo]rsqu’elle apprécie une demande de divulgation de documents au titre du règlement […] no 1049/2001, la Commission ne saurait se prononcer sur les éventuels manquements à un droit d’accès privilégié fondé sur d’autres actes législatifs (tels que la directive[-cadre] et la directive [sur les systèmes de climatisation], en ce qu’elles prévoient un tel droit d’accès aux documents) », et que, « ce grief ne fait dès lors pas l’objet de la présente décision ».

61      Toutefois, la décision attaquée contient non seulement un titre intitulé « Appréciation et conclusions sur le fondement du règlement no 1049/2001 », mais également un titre intitulé « Références à la [Charte] ». Or, sous ce titre, la décision attaquée se lit comme suit :

« Dans votre demande confirmative, vous vous référez en outre à la [Charte] et plus particulièrement au droit d’accès de toute personne au dossier qui la concerne prévu à l’article 41, paragraphe 2, et vous demandez que votre demande soit également examinée à l’aune de ces dispositions.

Le règlement no 1049/2001 est certes conforme à la [Charte], mais il a été adopté sur [le fondement] de l’article 15, paragraphe 3, [TFUE] qu’il transpose.

En vertu de l’article 52, paragraphe 2, de la [Charte], les droits reconnus par la présente Charte qui trouvent leur fondement dans les traités […] s’exercent dans les conditions et limites définies par ceux-ci.

Il convient dès lors d’exercer le droit d’accès prévu par la [Charte] dans les conditions et limites définies par l’article 15, paragraphe 3, TFUE et par le règlement no 1049/2001.

C’est pourquoi la Commission ne peut pas fonder sa décision sur votre demande d’accès directement sur le droit d’accès inscrit dans la [Charte]. Elle doit au contraire avoir égard aux conditions et limites définies par le [traité FUE] et le règlement no 1049/2001. »

62      Il ressort donc de ce passage de la décision attaquée que la Commission a examiné la demande d’accès au dossier fondée sur l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte et qu’elle l’a rejetée, en substance, au motif que le droit d’accès au dossier était également limité par les exceptions prévues par le règlement no 1049/2001.

63      En outre, il convient de relever que, dans le mémoire en défense, si la Commission soutient, dans son argumentation relative au premier moyen, qu’elle ne s’est pas prononcée sur la demande d’accès au dossier de la requérante fondée sur l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte, dans son argumentation relative au quatrième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, la Commission affirme que, dans la décision attaquée, elle « s’est bien prononcée sur le droit d’accès au dossier » et qu’’« [e]lle a établi qu’il convenait, en définitive, de refuser le droit d’accès au dossier pour la même raison que l’accès global aux documents au sens du règlement […] no 1049/2001 ».

64      De surcroît, l’argument de la Commission selon lequel une demande d’accès au dossier ne fait pas, en principe, l’objet d’une procédure fondée sur le règlement no 1049/2001 et celui selon lequel elle n’était pas tenue de se prononcer sur cette demande dans la décision attaquée ne remettent pas en cause le fait que la Commission s’est prononcée sur cette demande dans cette décision.

65      Partant, il y a lieu de considérer que la décision attaquée contient un refus d’accès au dossier demandé par la requérante sur le fondement de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte.

66      Il convient, dès lors, de déterminer si la Commission soutient à juste titre qu’un tel refus d’accès n’est pas un acte attaquable.

67      Selon une jurisprudence constante, s’agissant d’actes ou de décisions dont l’élaboration s’effectue en plusieurs phases, ne constituent, en principe, des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation que les mesures qui fixent définitivement la position de l’institution concernée au terme de la procédure, les mesures préliminaires ou de nature purement préparatoire ne pouvant, elles, faire l’objet d’un recours en annulation (voir ordonnance du 15 février 2012, Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑208/11 P, non publiée, EU:C:2012:76, point 29 et jurisprudence citée).

68      Il résulte de la jurisprudence rendue en matière de concurrence que, même s’ils sont susceptibles d’être constitutifs d’une violation des droits de la défense, des actes de la Commission refusant l’accès au dossier ne produisent, en principe, que des effets limités propres à un acte préparatoire s’insérant dans le cadre d’une procédure administrative préalable. Or, seuls des actes affectant immédiatement et de manière irréversible la situation juridique des entreprises concernées seraient de nature à justifier, dès avant l’achèvement de la procédure administrative, la recevabilité d’un recours en annulation (arrêt du 18 décembre 1992, Cimenteries CBR e.a./Commission, T‑10/92 à T‑12/92 et T‑15/92, EU:T:1992:123, point 42 ; ordonnances du 5 décembre 2001, Reisebank/Commission, T‑216/01 R, EU:T:2001:277, point 46, et du 27 janvier 2009, Intel/Commission, T‑457/08 R, non publiée, EU:T:2009:18, point 53).

69      Le fait, invoqué par la requérante, que, en matière de concurrence, le droit d’accès au dossier soit prévu par un règlement ne justifie pas que le Tribunal adopte une approche différente en l’espèce. Les décisions citées au point 68 ci-dessus étaient fondées, en substance, sur la circonstance que, jusqu’à l’adoption de la décision de la Commission à l’issue d’une procédure administrative, le refus d’accès au dossier était, en principe, réversible et que l’illégalité éventuelle entachant le refus d’accès pourrait être invoquée à l’appui d’un recours dirigé contre la décision prise à l’issue de la procédure administrative.

70      En l’espèce, il ressort de l’article 29, paragraphe 1, de la directive-cadre que les États membres communiquent à la Commission le refus d’immatriculer des véhicules ou d’autoriser la vente ou la mise en service sur leur territoire des véhicules, des composants ou des entités techniques ainsi que les motifs de ce refus. En outre, l’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre prévoit que la Commission consulte les parties concernées, afin de préparer une décision.

71      Cette décision précisera la position juridique de la Commission sur la compatibilité du refus d’immatriculation notifié par l’État membre avec, notamment, la libre circulation des marchandises dans le marché intérieur.

72      La requérante n’explique pas pourquoi elle ne pourrait pas contester l’éventuelle illégalité entachant le refus d’accès au dossier lors d’un recours contre la décision prévue à l’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre qui sera adoptée par la Commission.

73      Il convient d’ailleurs de relever que l’article 11 de la directive 2006/42/CE du Parlement européen et du Conseil, du 17 mai 2006, relative aux machines et modifiant la directive 95/16/CE (JO 2006, L 157, p. 24), prévoit une clause de sauvegarde permettant aux États membres de retirer du marché certaines machines, munies du marquage « CE », qui risquent de compromettre la santé ou la sécurité des personnes. Cette clause de sauvegarde est semblable à celle qui est prévue à l’article 29, paragraphe 1, de la directive-cadre. Or, dans l’arrêt du 15 juillet 2015, CSF/Commission (T‑337/13, EU:T:2015:502, points 16 à 35), le Tribunal a estimé recevable un recours en annulation introduit par le fabricant d’une machine contre une décision de la Commission concluant au caractère justifié des mesures adoptées par les autorités danoises, fondées sur la clause de sauvegarde prévue à l’article 11 de la directive 2006/42, à propos des conditions dans lesquelles cette machine était mise sur le marché danois.

74      Il s’ensuit que le refus d’accès au dossier contenu dans la décision attaquée n’est pas susceptible de produire des effets juridiques de nature à affecter, d’ores et déjà, et avant l’intervention éventuelle d’une décision finale de la Commission, les intérêts de la requérante.

75      Partant, le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de la convention d’Aarhus et du règlement no 1367/2006

76      La requérante soutient que les documents demandés contiennent des informations environnementales et donc que, en refusant de lui communiquer ces documents, la Commission a méconnu le droit d’accès aux documents des institutions fondé sur la convention d’Aarhus et le règlement no 1367/2006.

77      Ce moyen se divise en deux branches.La première branche est tirée, en substance, de l’incompatibilité de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 avec l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Aarhus. La seconde branche est tirée d’une violation de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la convention d’Aarhus et de l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006.

 Sur la première branche, tirée de l’incompatibilité de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 avec l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Aarhus

78      La requérante soutient que l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, en ce qu’il prévoit une exception à l’accès aux informations environnementales qui n’est pas prévue à l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Aarhus, à savoir celle relative aux enquêtes, est incompatible avec ce dernier article. Selon la requérante, certes, l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Aarhus prévoit qu’une demande d’accès à des informations environnementales peut être rejetée pour protéger l’objectif d’enquêtes de nature pénale ou disciplinaire. Toutefois, cet article ne prévoirait pas la possibilité de rejeter une telle demande pour protéger l’objectif d’enquêtes administratives, telle qu’une enquête engagée par la Commission au titre de la procédure prévue par l’article 29 de la directive-cadre ou qu’une enquête préalable à un éventuel recours en manquement.

79      De plus, selon la requérante, si, certes, les parties contractantes à la convention d’Aarhus, dont fait partie l’Union, disposent d’une marge de manœuvre pour transposer les dispositions de cette dernière, cette marge de manœuvre ne permettrait pas à la Commission d’introduire de nouvelles causes de refus à l’accès aux informations environnementales non prévues par la convention d’Aarhus. Elle soutient enfin que l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Aarhus est suffisamment précis pour être appliqué directement.

80      En outre, la requérante conteste l’argument de la Commission selon lequel la légalité de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 ne peut pas être appréciée au regard de la convention d’Aarhus. Elle soutient que l’Union, en adoptant le règlement no 1367/2006 et, en particulier, l’article 6, paragraphe 1, de ce règlement, a entendu transposer les obligations résultant de la convention d’Aarhus. Partant, en vertu des principes dégagés par la Cour dans les arrêts du 22 juin 1989, Fediol/Commission (70/87, EU:C:1989:254), et du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil (C‑69/89, EU:C:1991:186), la légalité, l’interprétation et l’application du règlement no 1367/2006 et, en particulier, de son article 6 pourraient s’apprécier à l’aune de la convention d’Aarhus. L’arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission (C‑612/13 P, EU:C:2015:486), ne s’opposerait d’ailleurs pas à un contrôle de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, au regard de la convention d’Aarhus.

81      La Commission rétorque, à titre liminaire, que, la requérante n’ayant invoqué ni dans sa première demande d’accès aux documents ni dans sa demande confirmative un droit d’accès aux informations environnementales en vertu de la convention d’Aarhus, elle n’aurait pas, dans la décision attaquée, approuvé ou nié l’existence d’un tel droit, qui ne pourrait pas, dès lors, faire l’objet du présent recours.

82      La Commission fait également valoir que la convention d’Aarhus n’est pas applicable en l’espèce dans la mesure où les documents demandés ne contiennent pas d’informations sur l’environnement au sens de cette convention. De plus, la Commission soutient qu’il n’est pas possible d’examiner la validité de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006 au regard de l’article 4, paragraphe 4, de ladite convention étant donné que ce dernier article est dépourvu d’effet direct. En outre, elle fait valoir que l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006 est compatible avec la convention d’Aarhus et que, à supposer que ce ne soit pas le cas, le règlement no 1049/2001 n’ayant pas été adopté afin de transposer la convention d’Aarhus, il ne serait pas possible de conclure à l’inapplicabilité des exceptions à l’accès aux documents prévues par ce règlement.

83      Le Conseil et le Parlement font valoir, en substance, qu’il résulte de l’arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission (C‑612/13 P, EU:C:2015:486), que la requérante ne peut pas invoquer l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Aarhus.

84      Il convient de relever que la présente branche porte sur la question de savoir si l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, en ce qu’il prévoit une exception pour les « enquêtes, notamment celles relatives à de possibles manquements au droit communautaire », est compatible avec l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Aarhus.

85      L’article 6 du règlement no 1367/2006 ajoute au règlement no 1049/2001 des règles spécifiques concernant des demandes d’accès à des informations environnementales. L’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 prévoit que, en ce qui concerne les dispositions de l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement no 1049/2001, à l’exception des enquêtes, notamment celles relatives à de possibles manquements au droit de l’Union, la divulgation est réputée présenter un intérêt public supérieur lorsque les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement.

86      En vertu de l’article 216, paragraphe 2, TFUE, les accords internationaux conclus par l’Union lient les institutions de celle‑ci et prévalent, par conséquent, sur les actes qu’elles édictent (voir arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 33 et jurisprudence citée).

87      Il s’ensuit que la validité d’un acte de l’Union peut être affectée par l’incompatibilité de cet acte avec de telles règles du droit international (voir arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 34 et jurisprudence citée).

88      Il ressort toutefois d’une jurisprudence constante de la Cour que le juge de l’Union ne peut procéder à l’examen de l’incompatibilité alléguée d’un acte de l’Union avec les dispositions d’un accord international auquel l’Union est partie qu’à la condition, d’une part, que la nature et l’économie de cet accord ne s’y opposent pas et, d’autre part, que ces dispositions apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises (voir arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 35 et jurisprudence citée).

89      À cet égard, il convient de relever qu’il découle de l’arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission (C‑612/13 P, EU:C:2015:486, points 40 à 43), que l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Arhus n’est pas, du point de vue de son contenu, inconditionnel et suffisamment précis pour que le juge de l’Union puisse procéder à l’examen de la compatibilité d’un acte de l’Union au regard de cet article, en application de la jurisprudence citée au point 88 ci-dessus.

90      Il est, certes, vrai, ainsi que le relève la requérante, que la Cour a également estimé que, dans l’hypothèse où l’Union a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée en vertu des accords conclus dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ou lorsque l’acte du droit de l’Union en cause renvoie expressément à des dispositions précises de ces accords, il appartient à la Cour, le cas échéant, de contrôler la légalité de l’acte de l’Union en cause au regard des règles de l’OMC (voir arrêt du 18 décembre 2014, LVP, C‑306/13, EU:C:2014:2465, point 47 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêts du 22 juin 1989, Fediol/Commission, 70/87, EU:C:1989:254, points 19 à 22, et du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil, C‑69/89, EU:C:1991:186, points 29 à 32).

91      Toutefois, la Cour a précisé que ces deux exceptions n’avaient été justifiées que par les particularités des accords ayant donné lieu à leur application (arrêt du 13 janvier 2015, Conseil e.a./Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht, C‑401/12 P à C‑403/12 P, EU:C:2015:4, points 57 à 59).

92      En l’espèce, l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 n’effectue pas de renvoi direct à des dispositions précises de la convention d’Aarhus ni ne confère aux particuliers le droit de se prévaloir des dispositions de cette convention. Par conséquent, en l’absence d’un tel renvoi explicite à des dispositions d’un accord international, l’arrêt du 22 juin 1989, Fediol/Commission (70/87, EU:C:1989:254), ne saurait être considéré comme pertinent en l’espèce (arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 37).

93      En outre, l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Arhus ne prévoit pas une obligation particulière au sens de l’arrêt du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil (C‑69/89, EU:C:1991:186), dans la mesure où les parties contractantes à cette convention disposent d’une marge d’appréciation quant à l’interprétation de la notion d’« enquête d’ordre pénal ou disciplinaire » de l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Arhus et donc quant à la mise en œuvre de l’obligation qui découlerait de cet article (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 42).

94      Il résulte des considérations qui précèdent que la requérante ne peut pas invoquer l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la convention d’Aarhus afin de contester la légalité de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006.

95      La première branche du deuxième moyen doit donc être rejetée.

 Sur la seconde branche, tirée d’une violation de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la convention d’Aarhus et de l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006

96      La requérante soutient que, selon l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006, l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 est d’interprétation stricte et que le fait que les informations demandées aient trait à des émissions dans l’environnement doit plus particulièrement être pris en compte. Elle ajoute que l’interprétation stricte de l’exception relative aux procédures d’enquêtes, qu’imposeraient l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la convention d’Aarhus et l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006, exige que chaque document pertinent en matière d’émissions fasse l’objet d’un examen individuel afin de savoir si l’intérêt public lié à sa divulgation prime l’intérêt de confidentialité de l’enquête.

97      La Commission rétorque que les documents visés par la demande d’accès de la requérante ne contiennent pas d’informations relatives à des émissions dans l’environnement au sens de l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006. Elle fait également valoir que, même si cela avait été le cas, il n’en demeurerait pas moins que l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006 ne serait pas applicable.

98      Il convient de relever que l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la convention d’Aarhus prévoit que les motifs de rejet des demandes d’information sur l’environnement doivent être interprétés de manière restrictive.

99      Le juge de l’Union a estimé que l’obligation d’interpréter de manière restrictive les motifs de refus d’accès prévue par l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la convention d’Aarhus ne saurait être comprise comme impliquant une obligation précise (arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 42). La requérante ne peut donc pas se prévaloir directement de cette disposition.

100    L’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006 dispose que, « [p]our ce qui est des autres exceptions prévues à l’article 4 du [règlement no 1049/2001], les motifs de refus doivent être interprétés de manière stricte, compte tenu de l’intérêt public que présente la divulgation et du fait de savoir si les informations demandées ont trait à des émissions dans l’environnement ».

101    Or, il ressort du libellé et de l’économie de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006 que les « autres exceptions », au sens de la seconde phrase de ce paragraphe, ne comprennent pas la protection de l’objectif des « enquêtes, notamment celles relatives à de possibles manquements au droit [de l’Union] ».

102    En effet, l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006 établit une règle concernant les exceptions figurant à l’article 4, paragraphe 2, premier et troisième tirets, du règlement no 1049/2001. L’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006 mentionne non pas simplement les « autres exceptions », mais les « autres exceptions prévues à l’article 4 du règlement [no 1049/2001] ». Sont donc visées par cette disposition les exceptions figurant à l’article 4, paragraphe 1, paragraphe 2, deuxième tiret, paragraphes 3 et 5, du règlement no 1049/2001. L’activité d’enquête, au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, laquelle est visée par l’article 6, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 1367/2006, n’est pas comprise dans la notion d’« autres exceptions » figurant dans la seconde phrase de cette disposition (arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 83).

103    Partant, l’article 6, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement no 1367/2006 n’a pas d’incidence sur l’examen que doit effectuer la Commission en vertu du règlement no 1049/2001 lorsqu’une demande d’accès a pour objet des documents afférents à une procédure d’enquête.

104    En tout état de cause, il convient de relever que, certes, l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1367/2006, en tant que règle spéciale eu égard aux dispositions de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, contient des précisions relatives à l’interprétation stricte des exceptions qui sont prévues dans lesdites dispositions ainsi qu’à la mise en balance des intérêts divergents, ce qui peut aboutir à un accès à des informations environnementales plus large que l’accès à d’autres informations contenues dans des documents détenus par les institutions. Toutefois, ce constat n’a pas d’incidence sur la question de savoir si l’institution concernée doit ou non effectuer un examen concret et individuel des documents ou des informations demandés (arrêt du 9 septembre 2011, LPN/Commission, T‑29/08, EU:T:2011:448, point 117).

105    La requérante soutient donc à tort que, compte tenu de la nature des documents demandés, la Commission aurait dû procéder à un examen individuel de chaque document.

106    La seconde branche du deuxième moyen doit donc être rejetée.

107    Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté comme non fondé sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur l’argument de la Commission selon lequel les documents dont la requérante demande l’accès n’ont pas trait à des émissions dans l’environnement ou sur celui selon lequel, la requérante n’ayant pas invoqué de droit d’accès à l’information sur l’environnement en vertu de la convention d’Aarhus dans sa demande d’accès aux documents, un tel droit ne peut pas faire l’objet du présent recours.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 42 de la Charte, de l’article 15, paragraphe 3, TFUE, du règlement no 1049/2001 et du règlement no 1367/2006

108    À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 15, paragraphe 3, TFUE et de l’article 42 de la Charte, tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre ont un droit d’accès aux documents des institutions, des organes et des organismes de l’Union, sous réserve des principes et des conditions qui sont fixés conformément à l’article 15, paragraphe 3, TFUE. Notamment, en vertu du deuxième alinéa de cette dernière disposition, lesdits principes et conditions sont fixés par voie de règlements par le Parlement et le Conseil, statuant conformément à la procédure législative ordinaire.

109    Sur ce fondement, le règlement no 1049/2001 vise à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions de l’Union qui soit le plus large possible, tout en étant soumis, comme cela ressort notamment du régime d’exceptions prévu par son article 4, à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé (arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 51, et du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 61).

110    En particulier, il résulte de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, invoqué par la Commission pour refuser la communication des documents demandés par la requérante, que les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection des objectifs des activités d’inspection, d’enquête et d’audit, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie une telle divulgation.

111    Selon la jurisprudence, le régime d’exceptions prévu à l’article 4 du règlement no 1049/2001, et notamment au paragraphe 2 de celui-ci, est fondé sur une mise en balance des différents intérêts en présence, à savoir ceux qui seraient favorisés par la divulgation du ou des documents demandés et ceux qu’elle menacerait (arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 42, et du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 63).

112    Les exceptions que cet article prévoit dérogeant au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents des institutions de l’Union, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (arrêts du 17 octobre 2013, Conseil/Access Info Europe, C‑280/11 P, EU:C:2013:671, point 30, et du 3 juillet 2014, Conseil/in 't Veld, C‑350/12 P, EU:C:2014:2039, point 48).

113    Par conséquent, pour justifier le refus d’accès à un document dont la divulgation a été demandée, il ne suffit pas, en principe, que ce document relève d’une activité mentionnée à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001. Il incombe encore, en principe, à l’institution destinataire de la demande d’expliquer comment l’accès audit document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par l’exception ou les exceptions qu’elle invoque (arrêts du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, EU:C:2008:374, point 49, et du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 64). En outre, le risque d’une telle atteinte doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (arrêts du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, EU:C:2008:374, point 43, et du 17 octobre 2013, Conseil/Access Info Europe, C‑280/11 P, EU:C:2013:671, point 31).

114    Cependant, il est loisible à l’institution concernée de se fonder sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents, des considérations similaires étant susceptibles de s’appliquer à des demandes portant sur des documents de même nature (arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 54, et du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 65).

115    Ainsi, la Cour a reconnu l’existence de présomptions générales de refus d’accès à des documents en ce qui concerne les documents du dossier administratif afférent à une procédure de contrôle des aides d’État (arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 61), les documents échangés entre la Commission et les parties notifiantes ou des tiers dans le cadre d’une procédure de contrôle des opérations de concentration entre entreprises (arrêts du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 123, et du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, point 64), les mémoires déposés par une institution dans le cadre d’une procédure juridictionnelle (arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission, C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 94), les documents afférents à une procédure en manquement au stade de la procédure précontentieuse (arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 65), les documents figurant dans un dossier relatif à une procédure d’application de l’article 101 TFUE (arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 93) ainsi que les documents relatifs à une procédure dite « EU Pilot » (arrêt du 11 mai 2017, Suède/Commission, C‑562/14 P, EU:C:2017:356, point 51).

116    Le Tribunal a reconnu l’existence de présomptions générales en ce qui concerne les offres des soumissionnaires dans une procédure de marché public en cas de demande d’accès formulée par un autre soumissionnaire (arrêt du 29 janvier 2013, Cosepuri/EFSA, T‑339/10 et T‑532/10, EU:T:2013:38, point 101), les documents transmis, au titre de l’article 11, paragraphe 4, du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), par les autorités nationales de concurrence à la Commission (arrêt du 12 mai 2015, Unión de Almacenistas de Hierros de España/Commission, T‑623/13, EU:T:2015:268, point 64), les questions à choix multiples posées lors d’un concours général organisé par l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) (arrêt du 12 novembre 2015, Alexandrou/Commission, T‑515/14 P et T‑516/14 P, EU:T:2015:844, point 94), les documents relatifs à une enquête de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (arrêt du 26 mai 2016, International Management Group/Commission, T‑110/15, EU:T:2016:322, point 44) ainsi que les documents relatifs à une procédure pour abus de position dominante qui a été classée (arrêt du 28 mars 2017, Deutsche Telekom/Commission, T‑210/15, EU:T:2017:224).

117    Il convient également de rappeler que, lorsqu’une demande d’accès vise non pas un seul document, mais un ensemble de documents, la reconnaissance d’une présomption générale selon laquelle la divulgation de documents d’une certaine nature porterait, en principe, atteinte à la protection de l’un des intérêts énumérés à l’article 4 du règlement no 1049/2001 permet à l’institution concernée de traiter une demande globale et de répondre à celle-ci de la manière correspondante (voir arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 68 et jurisprudence citée).

118    Il convient enfin de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, l’activité administrative de la Commission n’exige pas la même étendue de l’accès aux documents que celle requise par l’activité législative d’une institution de l’Union (arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 87 ; voir également, en ce sens, arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 60, et du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission, C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 77).

119    Le présent moyen se divise, en substance, en deux branches. La première branche est tirée de ce que la Commission ne pouvait pas se prévaloir de l’exception relative à la protection des activités d’enquête prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 et d’une présomption générale de non-divulgation. La seconde branche est tirée de ce que la Commission a considéré, à tort, qu’il n’existait pas d’intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents demandés.

120    En ce qui concerne la première branche, tirée de ce que la Commission ne pouvait pas se prévaloir de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001 et d’une présomption générale de non-divulgation, en premier lieu, la requérante soutient que la divulgation des documents demandés ne porte atteinte à aucune « enquête » puisque le litige porte exclusivement sur la valeur juridique à donner à des événements effectivement établis et terminés, c’est-à-dire sur la question de savoir si le ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie français était en droit de suspendre l’immatriculation des véhicules à moteur concernés en raison d’un prétendu danger pour l’environnement.

121    En deuxième lieu, la requérante soutient que la Commission ne pouvait pas se fonder sur une présomption générale de non-divulgation pour rejeter sa demande d’accès aux documents afférents à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre.

122    À cet égard, elle fait valoir que refuser les documents demandés au motif, notamment, que la réussite de l’enquête dépend d’un échange d’informations se déroulant dans un climat de discrétion et de confiance mutuelle et qu’une divulgation de ces documents soumettrait la procédure à l’influence de tiers revient à créer un domaine d’exception pour la durée de l’enquête, qui n’existe pas dans le règlement no 1049/2001.

123    La requérante ajoute qu’elle ne comprend pas pourquoi, selon la Commission, l’objectif de l’enquête engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre serait vidé de sa substance en cas de divulgation des documents demandés. Le fait que le constructeur concerné puisse avoir accès aux documents concernant la procédure engagée au titre dudit article contribuerait au contraire, selon la requérante, à l’objectif de cette procédure, qui vise à mettre en œuvre la politique commune de circulation dans le domaine de la sécurité routière. Il en irait de même si le public y avait accès dans la mesure où, selon la République française, qui a refusé l’immatriculation des véhicules de la requérante, les intérêts du public en matière de sécurité et d’écologie étaient affectés.

124    En outre, la requérante soutient que la jurisprudence relative aux procédures en manquement ne peut pas être transposée à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre. À cet égard, elle fait valoir que les questions qui se posent dans le cadre de cette dernière procédure sont distinctes de celles qui se posent dans le cadre d’une procédure en manquement. Elle soutient également que l’ouverture de la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre ne présume pas l’existence d’une éventuelle procédure en manquement et qu’elle n’est donc pas une « procédure précontentieuse » d’une procédure en manquement. Elle ajoute que la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre est totalement distincte de la procédure en manquement étant donné qu’elle implique d’autres personnes, poursuit d’autres objectifs et obéit à ses propres règles. En particulier, les parties à cette procédure ne sont pas seulement la Commission et l’État membre qui a prétendument violé le droit de l’Union, mais également l’État membre qui a adopté la mesure de protection et le constructeur automobile concerné, qui est, en l’espèce, la requérante. Ainsi, selon cette dernière, la simple possibilité que la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre soit suivie d’une procédure en manquement ne serait pas suffisante pour refuser l’accès aux documents demandés. La Commission aurait même refusé l’accès à ces documents avant même de savoir si les conditions prévues à l’article 29, paragraphe 1, de la directive-cadre étaient réunies.

125    Enfin, la requérante soutient que les conditions permettant d’appliquer une présomption générale de non-divulgation ne sont pas réunies en ce qui concerne les documents afférents à une procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre. La requérante reconnaît que sa demande d’accès portait sur un ensemble de documents, mais relève toutefois qu’elle portait sur des documents de natures extrêmement diverses. En outre, les conditions pour reconnaître une présomption générale de non-divulgation ne seraient pas remplies en l’espèce, étant donné que la directive-cadre ne contient aucune règle procédurale relative à l’accès aux documents.

126    En troisième lieu, la requérante soutient que la Commission ne pouvait pas s’appuyer sur une présomption générale de non-divulgation des documents afférents à une procédure EU pilot. Interrogée sur les conséquences de l’arrêt du 11 mai 2017, Suède/Commission (C‑562/14 P, EU:C:2017:356), sur le présent moyen, la requérante a pris acte du fait que la Cour avait confirmé qu’une présomption de non-divulgation pouvait être invoquée à l’égard des documents afférents à une procédure EU Pilot. Elle a toutefois rappelé que sa demande d’accès ne portait pas sur des documents afférents à une procédure EU Pilot, mais sur des documents afférents à une procédure administrative distincte, à savoir une procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre, pour laquelle il n’existe pas de présomption de confidentialité. La requérante a également souligné que les documents visés par ces deux procédures pouvaient être en partie identiques, mais qu’elle ne considérait pas que tous les documents de la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre se soient également trouvés dans le dossier de la procédure EU Pilot 5160/11. Or, il s’agirait d’une condition sine qua non pour que ces documents puissent relever de la présomption de confidentialité reconnue pour les documents afférents à une procédure EU Pilot.

127    La Commission répond, en premier lieu, qu’elle pouvait se fonder sur une présomption générale de non-divulgation en ce qui concerne les documents afférents à une procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre. Elle soutient, à cet égard, qu’il existe un lien fonctionnel étroit entre cette procédure et la procédure EU Pilot 5160/11 parallèle, qui précède une procédure en manquement à l’encontre de la République fédérale d’Allemagne. Une des mesures pouvant être prise par la Commission sur le fondement de l’article 29, paragraphe 4, de la directive-cadre serait en effet l’engagement d’une procédure en manquement. En outre, la Commission soutient que, indépendamment de ce lien fonctionnel, une présomption générale de non-divulgation peut être admise dans une procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre. Étant donné que la procédure qui est prévue dans cet article ne prévoit pas, pour les parties, de droit de participation autre que la consultation requise, et notamment pas de droit d’accès au dossier, il y aurait en effet lieu d’admettre une telle présomption. Par ailleurs, selon la Commission, la divulgation des documents demandés porterait atteinte à l’objectif de cette enquête. Elle rappelle à cet égard les considérations avancées dans la décision attaquée.

128    La Commission répond, en second lieu, en invoquant l’arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission (T‑306/12, EU:T:2014:816, points 19, 22 et 39), qui a été confirmé par l’arrêt du 11 mai 2017, Suède/Commission (C‑562/14 P, EU:C:2017:356), qu’elle pouvait se fonder sur une présomption générale de non-divulgation en ce qui concerne les documents afférents à une procédure EU Pilot. Elle fait également valoir qu’un ensemble de documents peut être couvert par une présomption lorsque ces documents portent sur une procédure unique, comme en l’espèce. Enfin, la Commission rappelle qu’une procédure EU Pilot était déjà ouverte à la date de la décision attaquée et que, contrairement à ce que soutient la requérante, il existe une présomption de confidentialité même si, à la date de la décision attaquée, une procédure en manquement n’avait pas encore été ouverte. Interrogée par le Tribunal, la Commission a souligné que tous les documents de la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre étaient des éléments de l’enquête EU Pilot 5160/11 et que le fait que ces documents n’avaient pas tous été « physiquement versés » au dossier de la procédure EU Pilot n’était pas en contradiction avec une telle affirmation.

129    Dans la mesure où la requérante soutient que la divulgation des documents demandés ne porte atteinte à aucune « enquête », puisque le litige porte exclusivement sur la valeur juridique à donner à des événements effectivement établis et terminés, il convient d’examiner, d’abord, si la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre peut être considérée comme une activité d’enquête au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001.

130    À cet égard, il convient de relever que la notion d’enquête, figurant à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, est une notion autonome du droit de l’Union, qui doit être interprétée en tenant compte, notamment, de son sens habituel ainsi que du contexte dans lequel elle s’insère (arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter, C‑331/15 P, EU:C:2017:639, point 45).

131    La Cour a jugé que, sans qu’il soit besoin de dégager une définition exhaustive des « activités d’enquête », au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001, il y avait lieu de considérer que constitue une telle activité une procédure structurée et formalisée de la Commission dont l’objectif est la collecte et l’analyse d’informations afin que cette institution puisse adopter une position dans le cadre de l’exercice de ses fonctions prévues par le traité UE et le traité FUE (arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter, C‑331/15 P, EU:C:2017:639, point 46).

132    La Cour a précisé que cette procédure ne devait pas nécessairement viser à détecter ou à poursuivre une infraction ou une irrégularité. La notion d’« enquête » est susceptible de couvrir également l’activité de la Commission visant à constater des faits afin d’évaluer une situation donnée (arrêt du 7 septembre 2017, France/Schlyter, C‑331/15 P, EU:C:2017:639, point 47).

133    En l’espèce, tout d’abord, il convient de relever que l’article 29 de la directive-cadre détermine, dans ses paragraphes 1 à 4, un enchaînement procédural relatif, premièrement, à la notification, par l’État membre, d’une décision de refuser d’immatriculer de nouveaux véhicules, systèmes, composants ou entités techniques compromettant gravement la sécurité routière ou nuisant fortement à l’environnement ou à la santé publique ou d’autoriser la vente ou la mise en service sur son territoire de tels véhicules, composants ou entités techniques, deuxièmement, à la consultation, par la Commission, des parties concernées et, troisièmement, à l’adoption d’une décision et à la prise éventuelle des mesures appropriées par la Commission. Il convient donc de considérer que la procédure prévue à l’article 29 de la directive-cadre est une procédure structurée et formalisée.

134    Ensuite, il ressort de l’article 29, paragraphe 1, de la directive-cadre que les États membres communiquent à la Commission non seulement la décision de refus d’immatriculer des véhicules ou d’autoriser la vente ou la mise en service sur leur territoire des véhicules, composants ou entités techniques, mais également les motifs de ce refus et, en particulier, indiquent si ce refus découle de lacunes dans les actes réglementaires applicables ou de l’application incorrecte des exigences applicables. En outre, l’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre prévoit que la Commission consulte les parties concernées, afin de préparer une décision. La préparation de cette décision implique, de toute évidence, l’existence d’une analyse préalable des informations qui sont à la disposition de la Commission. Il convient donc de considérer que la procédure prévue à l’article 29 de la directive-cadre a pour objectif la collecte et l’analyse d’informations.

135    Enfin, selon l’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre, la Commission prend une décision qui précise sa position juridique s’agissant de la compatibilité du refus d’immatriculation ou d’autorisation notifié par l’État membre avec, notamment, la libre circulation des marchandises dans le marché intérieur. Il convient donc de considérer que la procédure prévue à l’article 29 de la directive-cadre a pour finalité de permettre à la Commission d’adopter une position dans le cadre de l’exercice de ses fonctions prévues par le traité UE et le traité FUE.

136    Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de considérer que la procédure prévue à l’article 29 de la directive-cadre est une activité d’enquête au sens de l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001.

137    Dès lors, il convient de déterminer si la Commission s’est valablement fondée sur une présomption générale de non-divulgation pour refuser l’accès aux documents afférents à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre.

138    D’une part, il ressort de la jurisprudence citée aux points 115 et 116 ci-dessus que, pour qu’une présomption générale soit valablement opposée à la personne qui demande l’accès à des documents sur le fondement du règlement no 1049/2001, il est nécessaire que les documents demandés fassent partie d’une même catégorie de documents ou soient de même nature (voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 65 et jurisprudence citée).

139    D’autre part, il découle de cette jurisprudence que l’application des présomptions générales est essentiellement dictée par l’impérative nécessité d’assurer le fonctionnement correct des procédures en question et de garantir que leurs objectifs ne soient pas compromis. Ainsi, la reconnaissance d’une présomption générale peut être fondée sur l’incompatibilité de l’accès aux documents de certaines procédures avec le bon déroulement de celles-ci et sur le risque qu’il soit porté atteinte à celles-ci, étant entendu que les présomptions générales permettent de préserver l’intégrité du déroulement de la procédure en limitant l’ingérence des tierces parties (voir, en ce sens, arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑306/12, EU:T:2014:816, points 57 et 58, et conclusions de l’avocat général Wathelet dans les affaires jointes LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:528, points 66, 68, 74 et 76).

140    L’application de règles spécifiques prévues par un acte juridique relatif à une procédure conduite devant une institution de l’Union pour les besoins de laquelle les documents demandés ont été produits est l’un des critères de nature à justifier la reconnaissance d’une présomption générale (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2015, McCullough/Cedefop, T‑496/13, non publié, EU:T:2015:374, point 91 et jurisprudence citée, et conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire Conseil/Access Info Europe, C‑280/11 P, EU:C:2013:325, point 75).

141    En premier lieu, il convient de déterminer si les documents demandés relèvent d’une même catégorie ou sont de même nature. À cet égard, il suffit de relever qu’il est constant que ces documents font tous partie du même dossier administratif, à savoir celui de la procédure en cours engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre, et donc qu’ils appartiennent tous à une même catégorie (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, points 74 et 78).

142    En second lieu, il convient de déterminer si les motifs invoqués par la Commission dans la décision attaquée pour refuser l’accès aux documents afférents à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre étaient de nature à justifier la reconnaissance d’une nouvelle présomption générale de non-divulgation.

143    À cet égard, il convient de rappeler que, dans la décision attaquée, la Commission a souligné, en invoquant l’arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau (C‑139/07 P, EU:C:2010:376), que ni le règlement no 1049/2001 ni la directive-cadre ne contenaient de dispositions consacrant expressément la primauté d’un de ces actes sur l’autre et que, partant, il y avait lieu de garantir une application compatible de chacun de ces actes avec l’autre et permettant une mise en œuvre cohérente de ces actes.

144    La Commission a également relevé que l’ouverture et la conduite des enquêtes qui suivent une notification fondée sur l’article 29 de la directive-cadre faisaient partie de ses fonctions administratives et que l’application du règlement no 1049/2001 ne devait pas avoir pour conséquence que ledit article soit privé d’effet utile.

145    La Commission a en outre indiqué, premièrement, que six documents, faisant partie du dossier de l’enquête engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre, consistaient en des réponses des États membres aux consultations qu’elle avait lancées dans le cadre de cette enquête. Elle a relevé que ce dossier contenait également 45 courriels échangés avec des États membres. La Commission a considéré que, afin que son enquête soit réussie, il était essentiel qu’elle se déroule dans un climat de discrétion et de confiance propice à un échange d’informations et de vues libre entre elle et les États membres. Elle a ajouté que, en l’absence de cette confidentialité, les États membres hésiteraient à exprimer librement leur point de vue à propos du respect ou du manque de respect des dispositions de la directive-cadre.

146    La Commission a indiqué, deuxièmement, que le dossier de l’enquête engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre contenait de nombreux documents consistant en des échanges de vues internes, notamment entre différentes directions générales et avec le service juridique de la Commission, effectués dans le cadre de délibérations préliminaires sur l’enquête en cours concernant l’application par la République française et la République fédérale d’Allemagne de la directive-cadre. Elle a également relevé que certains documents consistaient en des courriels échangés avec des entreprises privées. La Commission a souligné que toute diffusion prématurée de ces échanges préliminaires exposerait la procédure d’enquête à des ingérences indues de tiers, fondées sur des constats ou des opinions non corroborées, compromettant la vitesse et l’efficacité de l’enquête. La diffusion de ces documents porterait atteinte à la confiance des États membres dans l’objectivité, l’impartialité et la confidentialité de la procédure d’enquête et réduirait donc la volonté des États membres, une fois l’enquête close, de contribuer de façon constructive à un suivi efficace des conclusions de l’enquête.

147    La diffusion des documents demandés aurait donc eu pour effet, selon la Commission, de remettre en cause l’effet utile de la clause de sauvegarde prévue à l’article 29 de la directive-cadre, et en particulier l’objectif des enquêtes menées dans ce contexte, qui est de déterminer si l’État membre en cause a légitimement appliqué cette clause et d’assurer un niveau élevé de sécurité routière, de santé et de protection de l’environnement.

148    La Commission a donc conclu que les documents demandés, qui faisaient tous partie du dossier administratif de l’enquête engagée sur le fondement de l’article 29 de la directive-cadre, étaient couverts par une présomption générale de non-divulgation fondée sur la protection des enquêtes prévue à l’article 4, paragraphe 2, troisième tiret, du règlement no 1049/2001.

149    S’agissant du motif avancé par la Commission dans la décision attaquée pour appliquer une présomption générale de non-divulgation aux documents demandés, tiré de la nécessité de garantir une application cohérente du règlement no 1049/2001 et de la directive-cadre, il convient de relever que la Commission n’a pas indiqué, dans la décision attaquée, quelle incohérence entre ces deux textes l’application d’une présomption générale de non-divulgation visait à éviter.

150    Il convient également de rappeler que, dans l’arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau (C‑139/07 P, EU:C:2010:376), sur lequel la Commission s’est fondée en l’espèce, la Cour avait reconnu l’existence d’une présomption générale de non-divulgation des documents afférents à une procédure de contrôle des aides d’État. Après avoir rappelé que l’article 6, paragraphe 2, du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), disposait que les observations reçues par la Commission, dans le cadre d’une telle procédure de contrôle, étaient communiquées à l’État membre concerné, ce dernier ayant ensuite la possibilité de répondre à ces observations dans un délai déterminé, la Cour a indiqué qu’il découlait du règlement no 659/1999 que les intéressés, à l’exception de l’État membre responsable de l’octroi de l’aide, ne disposaient pas, dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État, du droit de consulter les documents du dossier administratif de la Commission et, donc, que si ces intéressés étaient en mesure d’obtenir l’accès, sur le fondement du règlement no 1049/2001, aux documents du dossier administratif de la Commission, le régime de contrôle des aides d’État serait mis en cause (arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, points 57 et 58).

151    Or, contrairement au règlement no 659/1999, la directive-cadre ne contient pas de disposition prévoyant que l’État membre (ou les États membres) concerné par la procédure prévue à l’article 29 de la directive-cadre a accès aux documents du dossier administratif de ladite procédure, dont il pourrait découler, a contrario, que les autres parties concernées par cette procédure n’aient pas un tel droit. En outre, l’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre, qui porte sur la consultation des parties concernées par la procédure prévue audit article et non sur l’accès aux documents de cette procédure, ne saurait être interprété comme une disposition régissant de manière restrictive l’usage des documents figurant dans le dossier de la Commission, contrairement à ce que cette dernière semble soutenir.

152    La directive-cadre ne contient donc aucune règle régissant spécifiquement les modalités d’accès au dossier administratif de la Commission dans le cadre de la procédure prévue à l’article 29 de la directive-cadre.

153    Partant, les motifs avancés par la Commission dans la décision attaquée pour appliquer une présomption générale de non-divulgation aux documents demandés, tirés de la nécessité de garantir une application cohérente du règlement no 1049/2001 et de la directive-cadre ainsi que de l’arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau (C‑139/07 P, EU:C:2010:376), ne sont pas convaincants en l’espèce.

154    Il est vrai que la circonstance selon laquelle il n’existe pas de texte législatif régissant spécifiquement les modalités d’accès aux documents demandés n’est pas, à elle seule, de nature à justifier l’exclusion de toute possibilité de reconnaître l’existence d’une présomption générale sur la base de laquelle l’accès aux documents demandés peut être refusé (voir, en ce sens, arrêt du 26 mai 2016, International Management Group/Commission, T‑110/15, EU:T:2016:322, point 31).

155    Toutefois, dans la mesure où la possibilité d’avoir recours à des présomptions générales a non seulement pour effet d’encadrer le principe fondamental de transparence consacré par l’article 11 TUE, l’article 15 TFUE et le règlement no 1049/2001, mais aussi et nécessairement de limiter en pratique l’accès aux documents en cause, l’usage de telles présomptions doit se fonder sur des raisons solides et convaincantes (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Wathelet dans les affaires jointes LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:528, point 57).

156    Ainsi, afin de pouvoir opposer à la requérante une présomption générale de non-divulgation des documents demandés, la Commission aurait dû expliquer en quoi cette présomption était nécessaire pour assurer le fonctionnement correct de la procédure en cause en l’espèce, à savoir celle engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre, et pour garantir que les objectifs de cette procédure ne soient pas compromis.

157    Or, outre les motifs tirés de la nécessité de garantir une application cohérente du règlement no 1049/2001 et de la directive-cadre ainsi que de l’arrêt du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau (C‑139/07 P, EU:C:2010:376), qui ne sont pas convaincants en l’espèce, la Commission, pour appliquer une présomption générale de non-divulgation aux documents demandés, a invoqué, en substance, la nécessité de garantir un climat de discrétion et de confiance avec les États membres et d’éviter l’ingérence de tiers dans l’enquête en cours.

158    Force est de constater que ces motifs sont valables pour n’importe quelle procédure d’enquête en cours, ouverte à l’égard d’un État membre.

159    Admettre qu’une présomption générale de non-divulgation puisse être appliquée pour de tels motifs serait contraire à la jurisprudence selon laquelle les présomptions doivent être interprétées et appliquées de façon stricte, étant donné qu’elles constituent une exception à l’obligation d’examen concret et individuel, par l’institution concernée, de chaque document visé par une demande d’accès ainsi que, d’une manière plus générale, au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents détenus par les institutions de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 81).

160    En outre, il convient d’ajouter que, en ce qui concerne les 29 courriels que la Commission a échangés avec des personnes morales dans le cadre de la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre, il est manifeste que les motifs donnés par la Commission pour appliquer la présomption selon laquelle leur divulgation porterait atteinte à l’objectif de l’enquête engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre ne sont pas pertinents. En effet, il est difficile de comprendre, à la lecture de la décision attaquée, en quoi la divulgation de ces échanges pourrait porter atteinte à la confiance des États membres dans l’objectivité et l’impartialité de l’enquête menée par la Commission ou exposer ladite enquête à des ingérences indues de tiers.

161    Dans le cadre des mesures d’instruction prévues à l’article 91, sous c), du règlement de procédure, il a été ordonné à la Commission la production d’une copie intégrale de ces 29 courriels.

162    Dans ces courriels, en substance, les personnes morales en question expriment leur point de vue sur le réfrigérant R1234yf, utilisé dans les systèmes de climatisation des véhicules de la requérante. Il ne ressort pas de ces 28 courriels (un des 29 courriels étant en réalité un courriel interne à la Commission, ainsi que cette dernière l’a relevé elle-même dans sa lettre accompagnant la copie de ces documents) que la divulgation de l’avis de certaines personnes morales sur le réfrigérant R1234yf porterait atteinte à la confiance des États membres dans l’objectivité, l’impartialité et la confidentialité de la procédure d’enquête et exposerait la procédure d’enquête à des ingérences indues de tiers. En outre, si, certes, en pièce jointe à un de ces courriels figure un rapport du KBA sur le réfrigérant R1234yf et si de nombreux courriels rapportent le contenu de ce rapport, celui-ci est divulgué par des tiers et est disponible sur le site Internet du KBA. Il n’y a donc pas lieu de considérer que la divulgation de ces courriels porterait atteinte à la confiance d’une autorité nationale.

163    Partant, les motifs donnés par la Commission pour appliquer une présomption générale de non-divulgation aux documents afférents à la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre ne sont pas pertinents s’agissant des échanges entre la Commission et des personnes morales et ne sont pas solides ni convaincants s’agissant des autres catégories de documents qu’elle a identifiés.

164    La Commission ne pouvait donc pas, au vu des raisons qu’elle a avancées dans la décision attaquée, appliquer une présomption générale de non-divulgation aux documents demandés.

165    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la Commission selon lequel il existe un lien fonctionnel étroit entre la procédure EU Pilot 5160/11 et la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre.

166    À cet égard, tout d’abord, il convient de relever que la Commission a admis, dans ses réponses aux questions écrites du Tribunal, que les documents demandés n’avaient pas été versés au dossier EU pilot 5160/11. Or, la Cour a considéré que le fait que des documents avaient été versés au dossier d’une procédure administrative était déterminant pour conclure que ces documents étaient afférents à cette procédure (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 76). La requérante soutient donc à juste titre que la Commission ne peut pas se prévaloir de la présomption générale de non-divulgation des documents afférents aux procédures EU Pilot, reconnue par le Tribunal dans l’arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission (T‑306/12, EU:T:2014:816, points 19, 22 et 39), qui a été confirmé par l’arrêt du 11 mai 2017, Suède/Commission (C‑562/14 P, EU:C:2017:356).

167    Ensuite, il est vrai que, en l’espèce, la République française a justifié son refus d’immatriculation par le fait que les extensions de réceptions CE par types de véhicules octroyées par les autorités allemandes ne respectaient pas la directive sur les systèmes de climatisation. Toutefois, un refus d’immatriculation peut être justifié par d’autres motifs que le non-respect par les autorités nationales compétentes en matière de réception de véhicules de la législation applicable. Ainsi, il ressort de l’article 29, paragraphe 1, deuxième phrase, premier tiret, de la directive-cadre que ce refus peut être justifié par des lacunes dans les actes réglementaires applicables. Dans cette hypothèse, il n’existe pas de lien entre la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre et une procédure EU Pilot.

168    De surcroît, la procédure engagée, en l’espèce, au titre de l’article 29, paragraphe 1, de la directive-cadre ne constitue pas la phase antérieure à la procédure en manquement ouverte à l’encontre de la République fédérale d’Allemagne, cette phase antérieure étant la procédure EU Pilot 5160/11.

169    Enfin, il convient de relever que, pour justifier une approche commune en ce qui concerne les procédures EU Pilot et la procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, le Tribunal a notamment souligné, dans l’arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission (T‑306/12, EU:T:2014:816, point 61), que la procédure EU Pilot, tout comme la phase précontentieuse de la procédure en manquement, est de nature bilatérale, entre la Commission et l’État membre concerné, et ce en dépit du fait qu’une plainte pût l’avoir déclenchée, car, en tout état de cause, l’éventuel plaignant n’a aucun droit dans la suite de la procédure en manquement. Or, contrairement à une procédure EU Pilot ou une procédure en manquement, la procédure engagée au titre de l’article 29 de la directive-cadre n’est pas une procédure bilatérale entre la Commission et l’État membre concerné. L’article 29, paragraphe 2, de la directive-cadre prévoit en effet que la Commission consulte les parties concernées dans les meilleurs délais, afin de préparer une décision. Il ressort de cette disposition que le constructeur, en tant que partie concernée, a le droit d’être consulté et donc qu’il est impliqué dans le cadre de ladite procédure, contrairement à l’éventuel plaignant dans le cadre des procédures en manquement.

170    En outre, il convient de rappeler que, en l’espèce, la Commission a consulté tant d’autres États membres que des personnes morales afin d’obtenir des informations qu’elle semble avoir considéré utiles ou nécessaires pour les besoins de son enquête. Or, ces éléments de consultation distinguent très nettement la procédure menée par la Commission en l’espèce d’une procédure en manquement et d’une procédure EU Pilot. En tout état de cause, il n’est pas possible, eu égard au nombre et à la diversité des personnes consultées par la Commission, de présumer que toutes les informations reçues par elle dans le cadre de ces consultations sont couvertes par l’exception relative à la protection des activités d’inspection, d’enquête et d’audit.

171    Partant, il n’y a pas lieu d’appliquer, par analogie, la jurisprudence relative aux procédures EU Pilot et à la procédure en manquement.

172    Il découle de tout ce qui précède qu’il convient d’accueillir la première branche du troisième moyen et, partant, d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit besoin d’examiner la seconde branche du troisième moyen et le quatrième moyen ni de se prononcer sur la demande de mesure d’organisation de la procédure formulée par la requérante dans sa lettre du 8 juin 2018.

 Sur les dépens

173    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

174    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens. Le Conseil et le Parlement supporteront donc leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision Ares(2013) 3715941 de la Commission européenne, du 13 décembre 2013, refusant d’accorder à Daimler AG l’accès aux documents relatifs à la procédure engagée par la République française au titre de l’article 29 de la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil, du 5 septembre 2007, établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules (directive-cadre), est annulée.

2)      La Commission supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Daimler.

3)      Le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen supporteront leurs propres dépens.

Gratsias

Dittrich

Xuereb

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 octobre 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.