Language of document : ECLI:EU:C:2019:1048

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

5 décembre 2019 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question de droit pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non‑admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑664/19 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 4 septembre 2019,

Agencja Wydawnicza Technopol sp. z o.o., établie à Częstochowa (Pologne), représentée par Me C. Rogula, adwokat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, vice‑présidente de la Cour, MM. E. Juhász (rapporteur) et C. Lycourgos, juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. M. Szpunar, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Agencja Wydawnicza Technopol sp. z o.o. demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 26 juin 2019, Agencja Wydawnicza Technopol/EUIPO (200 PANORAMICZNYCH e.a.) (T‑117/18 à T‑121/18, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2019:447), par lequel celui-ci a rejeté ses recours tendant à l’annulation de cinq décisions de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 15 décembre 2017 (affaires R 2194/2016‑5, R 2195/2016‑5, R 2200/2016‑5, R 2201/2016‑5 et R 2208/2016‑5) (ci-après les « décisions litigieuses »), relatives aux demandes d’enregistrement des signes verbaux 200  PANORAMICZNYCH, 300 PANORAMICZNYCH, 400 PANORAMICZNYCH, 500 PANORAMICZNYCH et 1000 PANORAMICZNYCH comme marques de l’Union européenne (ci-après les « marques demandées »).

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, dudit statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphe 3, de ce règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante fait valoir que le pourvoi soulève des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

7        En premier lieu, en tant que question importante pour l’unité du droit de l’Union, la requérante considère que le Tribunal, étant donné qu’il a constaté l’enregistrement de la marque antérieure « 100 PANORAMICZNYCH » par l’EUIPO, aurait dû annuler les décisions de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO, qui avaient qualifié les marques demandées de descriptives. La requérante considère qu’une telle appréciation différente des signes verbaux similaires viole l’unité du droit de l’Union, dans la mesure où la protection des marques demandées est refusée alors que celle du signe verbal « 100 PANORAMICZNYCH » a été admise.

8        En outre, la requérante souligne que le fait que le refus d’enregistrement de l’Urząd Patentowy Rzeczypospolitej Polskiej (Office des brevets polonais) a été retenu comme un élément justifiant le refus d’enregistrement des marques demandées constitue une violation du principe d’autonomie du système de protection des marques de l’Union européenne, tel qu’il ressort de l’arrêt arrêt du 6 mars 2012, ThyssenKrupp Steel Europe/OHMI (Highprotect) (T‑565/10, non publié, EU:T:2012:107, point 27).

9        En deuxième lieu, la requérante expose que son pourvoi soulève une autre question importante pour l’unité du droit de l’Union, à savoir l’impossibilité d’enregistrer ses marques désignant des titres de revue de presse, qui la prive de toute forme de protection, en raison de l’absence d’un autre système de protection des signes désignant des revues en droit de l’Union. Elle considère que cette absence de réglementation spécifique aux titres de revue de presse se traduit par une différenciation importante et illégale des niveaux de protection pour les entreprises du marché de l’édition par rapport aux entreprises d’autres marchés.

10      En troisième lieu, en tant que dernière question importante pour l’unité du droit de l’Union, la requérante estime que le Tribunal aurait dû considérer le consommateur moyen comme relativement bien informé, et non normalement informé.

11      En quatrième lieu, la requérante soutient que son pourvoi soulève des questions importantes pour la cohérence du droit de l’Union, en ce que le Tribunal aurait erronément ajouté l’exigence de caractère fantaisiste pour l’enregistrement des marques demandées, auxquelles il a refusé de reconnaître un tel caractère, et qu’il aurait erronément appliqué l’arrêt du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee (C‑108/97 et C‑109/97, EU:C:1999:230, point 49), au cas d’espèce, en portant préjudice au principe de sécurité juridique par l’interprétation indûment extensive de cet arrêt, qui concernerait le caractère distinctif d’une marque spécifique, se référant à l’origine géographique des produits, ces derniers portant de surcroît le nom de l’entreprise, identique au nom de l’origine géographique.

12      En cinquième lieu, la requérante, en soutenant que son pourvoi soulève une question importante pour le développement du droit de l’Union, allègue la violation de l’article 4, sous a), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), au motif que la condition relative à la possibilité de distinguer les produits d’une entreprise de ceux d’autres entreprises a été appliquée en l’espèce sans tenir compte des caractéristiques du marché atypique des périodiques et revues.

13      À titre liminaire, il convient de relever que c’est à la requérante qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 16 septembre 2019, Kiku/OCVV, C‑444/19 P, non publiée, EU:C:2019:746, point 11).

14      Il convient de relever également que, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour, lu en combinaison avec l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure de la Cour, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments permettant à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis du statut de la Cour vise à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 14 et jurisprudence citée).

15      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été violée par l’arrêt attaqué, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal, et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt attaqué. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la violation de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 15 et jurisprudence citée).

16      Dès lors, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent ne saurait être, d’emblée, susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 16 et jurisprudence citée).

17      En l’occurrence, s’agissant, premièrement, de l’argumentation évoquée au point 7 de la présente ordonnance, il y a lieu de relever que la requérante ne démontre pas en quoi le fait que la constatation par le Tribunal de l’enregistrement antérieur de la marque « 100 PANORAMICZNYCH » n’a pas abouti à l’annulation des décisions litigieuses est susceptible de soulever une question importante pour l’unité du droit de l’Union. Force est d’indiquer, à cet égard, que la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO doit être appréciée uniquement sur la base du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié, ou du règlement 2017/1001, tels qu’interprétés par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure des instances de l’EUIPO (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, EU:C:2005:547, point 47).

18      En ce qui concerne l’argumentation figurant au point 8 de la présente ordonnance, il importe de souligner que, d’une part, le Tribunal a exposé de façon claire, circonstanciée et nuancée, aux points 105 à 109 de l’arrêt attaqué, les raisons justifiant que, sous réserve de l’autonomie du régime de protection des marques de l’Union européenne, les enregistrements d’ores et déjà effectués dans des États membres constituent un élément qui, sans être déterminant et sans pouvoir lier la chambre de recours dans des circonstances dans lesquelles elle considère que la marque demandée est en conflit avec les motifs absolus de refus, peut être pris en considération aux fins de l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne. D’autre part, la requérante ne démontre aucunement que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal s’est écarté, sans justification, du point 27 de l’arrêt du 6 mars 2012, ThyssenKrupp Steel Europe/OHMI (Highprotect) (T‑565/10, non publié, EU:T:2012:107). De surcroît, la lecture du point 28 dudit arrêt, auquel il est fait expressément référence au point 105 de l’arrêt attaqué, démontre que le Tribunal ne s’est en réalité pas écarté de sa jurisprudence.

19      Deuxièmement, pour ce qui est, de l’argumentation figurant au point 9 de la présente ordonnance, selon laquelle le refus du Tribunal d’enregistrer la marque de la requérante priverait les entreprises du marché de l’édition de moyens de protéger leurs titres de presse, il convient de relever que la requérante ne précise pas clairement l’erreur de droit commise par le Tribunal lors de l’application du règlement 2017/1001. Elle ne démontre pas non plus en quoi l’absence de prise en considération des spécificités du marché de l’édition, à la supposer établie, revêt nécessairement une importance pour l’unité du droit de l’Union.

20      Troisièmement, quant à l’argument, figurant au point 10 de la présente ordonnance, tiré de la prétendue erreur commise par le Tribunal dans la détermination du degré d’information du consommateur moyen, la requérante ne démontre pas en quoi cette erreur, à la supposer établie, pourrait affecter l’unité du droit de l’Union.

21      Quatrièmement, s’agissant de l’argumentation figurant au point 11 de la présente ordonnance, il convient de constater, d’une part, que, si la requérante allègue que le Tribunal aurait erronément ajouté l’exigence de caractère fantaisiste pour l’enregistrement des marques demandées, elle n’identifie nullement le point de l’arrêt attaqué contenant un tel ajout. Or, les termes « caractère fantaisiste », figurant aux points 28 et 68 de l’arrêt attaqué faisant partie de la présentation des arguments de la requérante, n’apparaissent qu’une seule fois dans l’appréciation du Tribunal, au point 51 de l’arrêt attaqué, mais ce dernier point se limite à évoquer une énonciation de la requérante et ne mentionne aucune exigence pour l’enregistrement des marques demandées.

22      D’autre part, en ce qui concerne l’argument de la requérante quant à l’application erronée opérée par le Tribunal de l’arrêt du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee (C‑108/97 et C‑109/97, EU:C:1999:230, point 49) à la présente affaire, il convient de rappeler que, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, une telle argumentation n’est pas, en soi, suffisante pour établir que ce pourvoi soulève une question importante pour la cohérence du droit de l’Union, le demandeur devant respecter, à cette fin, l’ensemble des exigences énoncées au point 15 de la présente ordonnance (voir, en ce sens, ordonnance du 7 octobre 2019, L'Oréal/EUIPO, C‑586/19 P, non publiée, EU:C:2019:845, point 16). Force est de constater que, en l’occurrence, la requérante n’a pas respecté de telles exigences.

23      Cinquièmement, en ce qui concerne l’argumentation évoquée au point 12 de la présente ordonnance, il y a lieu de constater que la requérante n’expose pas de manière spécifique en quoi l’erreur de droit supposément commise par le Tribunal revêt une importance pour le développement du droit de l’Union. En effet, cette dernière se limite à souligner, à cet égard, l’importance de la protection du titre de sa revue en tant que marque. De surcroît, il convient de relever que, au point 129 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a accepté d’envisager l’hypothèse de la requérante selon laquelle, sur le marché des revues périodiques, les titres des revues constituent pour le consommateur le seul moyen de distinguer un produit d’un autre. Néanmoins, au même point, le Tribunal a souligné, sans que cela soit remis en cause expressément par la requérante, qu’une telle circonstance ne saurait, en tout état de cause, exempter ces titres des conditions énoncées à l’article 7 du règlement 2017/1001.

24      Dans ces conditions, il convient de conclure que l’argumentation présentée par la requérante à l’appui de sa demande d’admission de son pourvoi n’est pas de nature à établir que ce dernier soulève des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

25      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

26      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

27      En l’espèce, la présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Agencja Wydawnicza Technopol sp. z o.o. supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : le polonais.