Language of document : ECLI:EU:F:2006:71

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

13 juillet 2006 (*)

« Signature de l’avocat du requérant sur la requête – Article 43, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance – Signature au moyen d’un tampon – Recevabilité »

Dans l’affaire F-102/05,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Ole Eistrup, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Knebel (Danemark), représenté par Me S. Hjelmborg, avocat,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par M. H. von Hertzen et Mme L. G. Knudsen, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch, président, Mme I. Boruta (rapporteur) et M. H. Kanninen, juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête parvenue au greffe du Tribunal de première instance des Communautés européennes le 20 octobre 2005 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 24 octobre suivant), le requérant demande l’annulation :

–        de la décision du 13 décembre 2004 par laquelle le Parlement européen a fixé à 85 611,08 euros le montant de l’indemnité à verser au requérant en réparation du préjudice subi du fait de sa réintégration tardive au sein de l’institution après une période de congé de convenance personnelle ;

–        de la décision du 12 juillet 2005, par laquelle le Parlement a rejeté la réclamation dirigée contre la décision du 13 décembre 2004 ;

ainsi que la condamnation du Parlement :

–        à lui payer une somme de 203 357 euros, assortie des intérêts, en réparation du préjudice subi entre le 1er juin 1998 et le 1er septembre 2002 du fait de sa réintégration tardive ;

–        à lui payer une somme de 20 000 euros, assortie des intérêts, en réparation de son préjudice moral ;

–        à supporter les dépens.

2        Ce recours a initialement été enregistré au greffe du Tribunal de première instance sous le numéro T‑389/05.

3        Par lettre du 25 octobre 2005, le greffe du Tribunal de première instance, après avoir constaté que la requête portait « un cachet reproduisant la signature » de l’avocat, a invité ce dernier à présenter des observations à ce propos, en particulier sur le point de savoir si les dispositions de l’article 43, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal de première instance avaient été respectées.

4        Aux termes de cette dernière disposition, « [l]’original de tout acte de procédure doit être signé par l’agent ou l’avocat de la partie. »

5        Le 5 novembre 2005, l’avocat du requérant a fait parvenir une note dans laquelle il confirmait être l’auteur de la signature apposée sur la requête. Il ajoutait qu’il convenait, à l’instar du droit danois, d’admettre ce mode de signature.

6        Par la suite, le greffe du Tribunal de première instance a signifié à la partie défenderesse l’acte introductif d’instance ainsi qu’une copie de la note de l'avocat du requérant du 5 novembre 2005.

7        Par acte séparé déposé le 15 décembre 2005, le Parlement a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure.

8        Le requérant a fait parvenir ses observations quant à cette exception le 10 avril 2006.

9        Par ordonnance du 15 décembre 2005, le Tribunal de première instance, en application de l’article 3, paragraphe 3, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), a renvoyé la présente affaire devant le Tribunal. Le recours a été enregistré au greffe du Tribunal sous le numéro F‑102/05.

10      Le 16 juin 2006, l’avocat du requérant a, sur demande du Tribunal, communiqué au greffe de celui-ci une version de la requête signée de sa propre main.

 Sur la recevabilité

11      Aux termes de l’article 114, paragraphes 1 et 3, du règlement de procédure du Tribunal de première instance (ci-après le « règlement de procédure »), applicable mutatis mutandis au Tribunal, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752, jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier, si une partie demande, par acte séparé, que le Tribunal statue sur l’irrecevabilité, sur l’incompétence ou sur un incident, sans engager de débat au fond, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal.

12      En l’espèce, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces produites par les parties, le Tribunal a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’entendre ces dernières en leurs explications orales.

 Arguments des parties

13      Le Parlement relève que la requête a été signée au moyen d’un tampon reproduisant la signature de l’avocat du requérant, alors qu’il résulte de l’article 43, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure, qu’elle aurait dû, pour qu’il soit permis de s’assurer de l’authenticité de la signature, être signée par l’avocat de façon manuscrite.

14      Il ajoute que l’article 6, paragraphe 3, des instructions au greffier du Tribunal de première instance confirme l’exigence d’une signature manuscrite, puisque, selon ces instructions, seules les pièces portant « l’original de la signature de l’avocat » sont acceptées. Or, la signature par apposition d’un tampon n’est qu’une copie de la signature originale.

15      Le requérant demande au Tribunal d’écarter l’exception d’irrecevabilité pour les raisons suivantes.

16      En premier lieu, ni l’article 43, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure, ni les instructions au greffier, ni même les instructions pratiques aux parties, ne préciseraient ce qu’il convient d’entendre par « signature ». Ces textes ne feraient donc pas obstacle à ce que la signature soit apposée au moyen d’un tampon.

17      En deuxième lieu, le Tribunal de première instance se serait récemment montré « pragmatique et libéral » en matière de signature (arrêts du 13 janvier 2004, Thermenhotel Stoiser Franz e.a./Commission, T‑158/99, Rec. p. II-1, et du 22 février 2006, Le Levant 001 e.a./Commission, T‑34/02, non encore publié au Recueil).

18      En troisième lieu, le droit danois admettrait la validité de la signature par fac-similé, y compris en ce qui concerne les pièces de procédure devant une juridiction.

19      En quatrième lieu, dans l’hypothèse où le Tribunal estimerait que la requête n’a pas été valablement signée, le requérant fait valoir qu’il a fait preuve de bonne foi dans l’interprétation des dispositions relatives à la signature des requêtes et qu’il devrait, pour ce motif, être regardé comme ayant commis une « erreur excusable ».

20      Il ajoute, en dernier lieu, qu’il a été diligent dans la présente affaire. Il a ainsi, dans ses observations du 5 novembre 2005, confirmé que l’avocat avait personnellement signé la requête au moyen d’un tampon reproduisant la signature de ce dernier et s’est déclaré prêt à envoyer un spécimen de cette signature afin de dissiper toute incertitude.

 Appréciation du Tribunal

21      Il ressort des termes de l’article 43, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure qu’une requête doit être signée par l’avocat de la partie requérante.

22      Dans l’ordonnance du 24 février 2000, FTA e.a./Conseil (T‑37/98, Rec. p. II‑373, point 26), le Tribunal de première instance a considéré, à cet égard, que cette disposition devait être interprétée comme exigeant une signature manuscrite de l’avocat du requérant.

23      Or, en l’espèce, il est constant que la signature figurant sur l’original de la requête déposée le 24 octobre 2005 a été apposée au moyen d’un tampon reproduisant la signature de l’avocat du requérant.

24      Une telle irrégularité, constatée au stade du dépôt de la requête, ne saurait toutefois, au regard des circonstances de l’espèce, entraîner l’irrecevabilité du recours.

25      En effet, s’il est vrai que le tampon ne constitue pas une signature directement apposée par l’avocat du requérant, il n’en demeure pas moins que les explications fournies par ce dernier, en réponse à la lettre du greffe du Tribunal de première instance, en date du 25 octobre 2005, ne laissent aucun doute sur le fait que l’avocat du requérant est bien le signataire de la requête [voir, en ce sens, arrêt Le Levant 001 e.a./Commission, précité, point 56, à propos du mandat donné, en application de l’article 44, paragraphe 5, sous b), du règlement de procédure, par le représentant d’une personne morale à un avocat pour introduire une requête, mandat qui avait été signé par l’apposition d’un tampon].

26      À la suite de ces explications, le greffe du Tribunal de première instance a d’ailleurs signifié à la partie défenderesse l’acte introductif d’instance ainsi qu’une copie de la note de l'avocat du requérant du 5 novembre 2005. C’est dans cet état de la procédure que, après le renvoi devant le Tribunal, l’affaire a été enregistrée au greffe de celui-ci.

27      Il convient encore d’ajouter que le Tribunal a reçu du requérant une version de l’acte introductif d’instance signé de façon manuscrite par son avocat.

28      La partie défenderesse n’indique, pour sa part, aucun élément qui démontrerait une atteinte aux droits de la défense pour le cas où la requête serait déclarée recevable au regard des exigences de l’article 43, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure.

29      Ainsi, au vu des circonstances de l’espèce, une déclaration d’irrecevabilité du recours, pour non-respect d’une telle formalité de procédure, sans incidence substantielle pour l’administration de la justice, serait de nature à porter atteinte de façon disproportionnée au droit fondamental d’accès du requérant à un tribunal, particulièrement en première instance.

30      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter comme non fondée l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Parlement et d'ordonner la poursuite de l’instance.

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

1)     L'exception d'irrecevabilité soulevée par le Parlement européen est rejetée.

2)     Un délai sera fixé pour permettre au Parlement européen de présenter un mémoire en défense.

3)     Les dépens sont réservés.





Fait à Luxembourg, le 13 juillet 2006.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

      S. Van Raepenbusch


* Langue de procédure : le danois.