Language of document : ECLI:EU:T:2019:139

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)

6 mars 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale NOCUVANT – Marques verbales antérieures NOCUTIL – Preuve de l’usage sérieux – Article 47, paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001 – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑321/18,

Serenity Pharmaceuticals LLC, établie à Milford, Pennsylvanie (États-Unis), représentée par M. J. Day, solicitor,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Lukošiūtė et M. H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Gebro Holding GmbH, établie à Fieberbrunn (Autriche), représentée par Me M. Konzett, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 8 mars 2018 (affaire R 584/2017-2), relative à une procédure d’opposition entre Gebro Holding et Allergan, Inc.,

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, D. Spielmann (rapporteur) et Z. Csehi, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 18 mai 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 10 août 2018,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 10 août 2018,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 3 juillet 2014, Allergan, Inc., a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal NOCUVANT.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques pour le traitement de la nycturie ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 158/2014, du 26 août 2014.

5        Le 25 novembre 2014, l’intervenante, Gebro Holding GmbH, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque de l’Union européenne verbale NOCUTIL déposée le 29 avril 2004 et enregistrée le 8 septembre 2005 sous le numéro 3804903, désignant les produits relevant de la classe 5 correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, vétérinaires et hygiéniques ; préparations hormonales, produits de traitement de l’énurésie nocturne, du diabète insipide et du syndrome de polyurie » ;

–        la marque autrichienne verbale NOCUTIL déposée le 20 septembre 1994 et enregistrée le 5 octobre 1994 sous le numéro 154716, désignant notamment les produits relevant de la classe 5 correspondant à la description suivante : « Préparations à base d’hormones » ;

–        la marque internationale verbale NOCUTIL (désignant la Belgique, la Bulgarie, la République tchèque, le Danemark, l’Allemagne, la Grèce, l’Espagne, la France, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, la Slovénie, la Slovaquie, la Finlande et la Suède), déposée et enregistrée le 3 janvier 1995 sous le numéro 630579, désignant notamment les produits relevant de la classe 5 correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, vétérinaires et hygiéniques ; substances diététiques à usage médical, aliments pour bébés ; emplâtres, matériel pour pansements ; matières pour plomber les dents et pour empreintes dentaires ; désinfectants ; produits pour la destruction des animaux nuisibles et des mauvaises herbes » ;

–        la marque allemande verbale NOCUTIL déposée le 21 novembre 1958 et enregistrée le 21 août 1959 sous le numéro 728249, désignant notamment les produits relevant de la classe 5 correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

8        Sur requête d’Allergan, l’intervenante a été invitée, conformément à l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), à apporter la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures pour les produits pour lesquels elles étaient enregistrées et sur lesquels l’opposition était fondée.

9        L’intervenante a alors produit divers documents aux fins de prouver l’usage sérieux des marques antérieures.

10      Le 27 janvier 2017, la division d’opposition a fait droit à l’opposition, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, en se fondant uniquement sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure NOCUTIL. Elle a conclu que l’usage sérieux de cette marque n’avait pas été établi pour tous les produits couverts par ladite marque, mais uniquement pour les « produits pharmaceutiques pour le traitement de l’énurésie nocturne, du diabète insipide et du syndrome de polyurie », pour les « préparations hormonales pour le traitement de l’énurésie nocturne, du diabète insipide et du syndrome de polyurie » et pour les « produits de traitement de l’énurésie nocturne, du diabète insipide et du syndrome de polyurie », et qu’il existait, en l’occurrence, un risque de confusion dans l’esprit du public germanophone et hispanophone, compte tenu de l’identité des produits et du degré moyen de similitude entre les marques.

11      Le 24 mars 2017, Allergan a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition. L’intervenante a, par un recours subsidiaire, contesté la décision de la division d’opposition en ce qu’elle avait conclu que l’usage sérieux n’avait pas été établi en ce qui concernait les « préparations de traitement de la nycturie ».

12      Par décision du 8 mars 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours principal et accueilli le recours subsidiaire.

13      En premier lieu, elle a confirmé la conclusion de la division d’opposition selon laquelle l’intervenante avait prouvé l’usage sérieux de la marque antérieure au cours de la période pertinente.

14      En second lieu, dans le cadre de l’examen du risque de confusion, tout d’abord, la chambre de recours a confirmé l’appréciation de la division d’opposition, non contestée par Allergan, selon laquelle le public pertinent était le grand public et des professionnels possédant des connaissances et une expertise spécifique dans le domaine des soins de santé. Ensuite, s’agissant de la comparaison des produits en cause, qui relèvent tous de la classe 5, la chambre de recours a estimé que ceux-ci étaient identiques et, à tout le moins, fortement similaires. S’agissant de la comparaison des marques en conflit, la chambre de recours a conclu que ces marques étaient similaires à un degré moyen sur les plans visuel et phonétique. Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a estimé que, les deux signes étant dépourvus de signification, une comparaison conceptuelle n’était pas possible. Enfin, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, la chambre de recours a conclu, malgré le niveau d’attention élevé des consommateurs et au vu de l’identité des produits en cause, du caractère distinctif moyen de la marque antérieure et du fait que, dans leur ensemble, les marques en conflit étaient similaires à un degré moyen, à l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

15      À la suite d’une demande déposée le 17 mai 2018, le transfert de propriété de la demande de marque NOCUVANT de Allergan no 13053434 au profit de la requérante, Serenity Pharmaceuticals LLC, a été enregistré au registre de l’EUIPO le 18 mai 2018.

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la décision de la division d’opposition ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

17      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

18      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        confirmer la décision attaquée ;

–        rejeter la demande d’enregistrement dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens afférents tant à la procédure devant l’EUIPO qu’à celle devant le Tribunal.

 En droit

 Sur la recevabilité des annexes A 8 et A 9 de la requête

19      La requérante a produit, en annexe A 8 de la requête, des exemples visant à démontrer la large compréhension de l’élément verbal « noc » dans les domaines médical et physiologique et, par voie de conséquence, le faible caractère distinctif de cet élément dans ces domaines. Elle a également communiqué, en annexe A 9 de la requête, un résumé de ses recherches portant sur l’utilisation dans l’Union européenne de marques contenant le préfixe « noc » dans le domaine pharmaceutique.

20      L’EUIPO et l’intervenante excipent de l’irrecevabilité de ces deux annexes au motif qu’elles ont été produites pour la première fois devant le Tribunal.

21      À cet égard, il convient de rappeler que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui [arrêts du 19 novembre 2008, Rautaruukki/OHMI (RAUTARUUKKI), T‑269/06, non publié, EU:T:2008:512, point 20, et du 23 janvier 2018, Wenger/EUIPO – Swissgear (SWISSGEAR), T‑869/16, non publié, EU:T:2018:23, point 21].

22      En conséquence, il y a lieu de déclarer irrecevables les annexes A 8 et A 9 de la requête, qui n’ont pas été produites par la requérante dans le cadre de la procédure administrative. Le contrôle de légalité se fera, dès lors, au regard des seuls éléments qui ont été communiqués lors de cette procédure et qui figurent dans le dossier de l’EUIPO [voir arrêt du 22 mars 2018, Safe Skies/EUIPO – Travel Sentry (TSA LOCK), T‑60/17, non publié, EU:T:2018:164, point 13 et jurisprudence citée].

23      Il convient donc d’écarter lesdites pièces sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 19 et jurisprudence citée].

 Sur le fond

24      Au soutien de son recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, d’une violation de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 et, le second, d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001

25      Par son premier moyen, la requérante soutient, en substance, que c’est à tort que la chambre de recours a confirmé la conclusion de la division d’opposition selon laquelle l’intervenante avait prouvé à suffisance de droit l’usage sérieux de la marque antérieure. Elle estime notamment que la conclusion de la chambre de recours quant à la portée géographique de l’usage de la marque antérieure n’est pas étayée par les preuves produites et que la décision attaquée est entachée d’une contradiction à cet égard.

26      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante et concluent au rejet du présent moyen.

27      Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, l’auteur d’une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne visée par une procédure d’opposition peut requérir la preuve que la marque antérieure invoquée à l’appui de cette procédure a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande.

28      Selon une jurisprudence constante, la ratio legis de l’exigence selon laquelle la marque antérieure doit avoir fait l’objet d’un usage sérieux pour être opposable à une demande de marque de l’Union européenne consiste à limiter les conflits entre deux marques, pour autant qu’il n’existe pas de juste motif économique découlant d’une fonction effective de la marque sur le marché. En revanche, lesdites dispositions ne visent ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes [arrêt du 26 septembre 2013, Centrotherm Systemtechnik/centrotherm Clean Solutions, C‑609/11 P, EU:C:2013:592, point 72 ; voir, également, arrêt du 13 juillet 2018, Star Television Productions/EUIPO – Marc Dorcel (STAR), T‑797/17, non publié, EU:T:2018:469, point 25 et jurisprudence citée].

29      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43 ; voir, également, arrêt du 8 juin 2017, W. F. Gözze Frottierweberei et Gözze, C‑689/15, EU:C:2017:434, point 37 et jurisprudence citée).

30      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque (voir arrêt du 17 mars 2016, Naazneen Investments/OHMI, C‑252/15 P, non publié, EU:C:2016:178, point 56 et jurisprudence citée).

31      Afin de savoir si un usage est suffisamment important pour maintenir ou créer des parts de marché pour lesdits produits ou services, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce [arrêts du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI – Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 8 juillet 2004, Sunrider/OHMI – Espadafor Caba (VITAFRUIT), T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42].

32      À cet égard, les caractéristiques des produits ou des services protégés par la marque, la fréquence ou la régularité de l’usage de cette marque, le fait que ladite marque est utilisée pour commercialiser l’ensemble des produits ou des services identiques de l’entreprise titulaire ou simplement certains d’entre eux ainsi que l’importance territoriale de l’usage sont au nombre des facteurs qui peuvent être pris en considération (voir, par analogie, ordonnance du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, EU:C:2004:50, point 22 ; arrêts du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 76, et du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 30).

33      Enfin, il importe de souligner qu’il n’est pas possible de fixer a priori, de façon abstraite, le seuil quantitatif ou l’étendue territoriale qui devrait être retenu pour déterminer si l’usage avait ou non un caractère sérieux, de sorte qu’une règle de minimis, qui ne permettrait pas à l’EUIPO ou, sur recours, au Tribunal d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui leur est soumis, ne saurait être fixée (voir, par analogie, arrêts du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 72, et du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 55).

34      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a confirmé que l’intervenante avait prouvé à suffisance de droit que la marque de l’Union européenne verbale antérieure NOCUTIL, seule examinée par la division d’opposition, avait fait l’objet d’un usage sérieux au cours de la période pertinente.

35      En l’occurrence, la demande de marque ayant été publiée le 26 août 2014, la période de cinq années visée à l’article 47, paragraphes 2 et 3, du règlement 2017/1001 s’étend, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 26 de la décision attaquée, du 26 août 2009 au 25 août 2014 inclus (ci-après la « période pertinente »), ce que la requérante ne conteste pas. La marque antérieure en cause étant une marque de l’Union européenne, le territoire pertinent est l’Union.

36      Il ressort de la documentation contenue dans le dossier de l’EUIPO transmis au Tribunal que, faisant suite à l’invitation qui lui avait été faite, l’intervenante a produit un certain nombre de pièces afin d’établir l’usage sérieux de la marque antérieure au cours de la période pertinente.

37      Ces documents consistent en particulier en :

–        des copies d’une notice, partiellement traduite en langue anglaise, relative à des comprimés de NOCUTIL commercialisés en Allemagne et qui sont notamment utilisés pour le traitement de l’énurésie nocturne ;

–        des extraits imprimés des éditions pour les années 2011-2012 et 2012-2013 de l’Austria-Codex, une publication autrichienne spécialisée relative à la fabrication et à la mise en circulation de produits pharmaceutiques, en vue de la prescription de NOCUTIL sous forme de comprimés et de sprays nasaux ;

–        des factures pour des comprimés de NOCUTIL ainsi que des bons de livraison datés de 2009 à 2014 adressés à différents clients au Danemark, en Allemagne, en Hongrie et en Suède ;

–        du matériel publicitaire et des documents de promotion commerciale en différentes langues (ainsi que des commandes et des reçus correspondant à ceux-ci) se référant à des produits couverts par la marque NOCUTIL.

38      Il n’est pas contesté que ces documents, qui datent de la période pertinente et qui font explicitement référence à la marque NOCUTIL, sont propres à démontrer, ainsi que l’exige une jurisprudence constante, une exploitation commerciale de celle-ci. Ces documents sont, en effet, de nature à établir que la marque antérieure a fait l’objet d’un usage qui peut être considéré comme justifié, dans le secteur économique concerné, pour maintenir ou créer des parts de marché pour les produits protégés par la marque (voir, en ce sens, arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 72 et jurisprudence citée).

39      Il n’est pas davantage contesté que, ainsi que l’a confirmé la chambre de recours au point 30 de la décision attaquée, la marque a été utilisée telle qu’elle a été enregistrée.

40      Pour justifier sa conclusion selon laquelle l’usage sérieux de la marque antérieure avait été prouvé, la chambre de recours a, en substance, estimé, d’une part, que l’usage qui avait été fait de cette marque sur le territoire de l’Allemagne était en l’occurrence suffisant et, d’autre part, que les preuves fournies portaient également sur d’autres territoires, à savoir le Danemark, la Hongrie, l’Autriche et la Suède.

41      Toutefois, selon la requérante, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle l’intervenante avait apporté la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure serait erronée pour deux raisons principales ayant trait, en substance, à l’étendue géographique et à l’intensité de l’usage qui a été fait de la marque antérieure.

42      Premièrement, en ce qui concerne la portée géographique de l’usage, la requérante soutient que, dès lors que l’intervenante ne se serait pas prévalue – ni n’aurait d’ailleurs produit – de preuves que des ventes effectives de produits sous la marque NOCUTIL avaient été effectuées en dehors de l’Allemagne et de la Hongrie, il ne serait pas établi que cette marque avait fait l’objet d’un usage dans toute l’Union. Or, selon elle, aucune caractéristique propre au marché des produits pharmaceutiques ne pourrait expliquer la portée géographique restreinte de l’usage qui a été fait de cette marque. En l’absence d’un exposé clair de la répartition des ventes pays par pays, il serait ainsi impossible de déterminer si la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans un ou plusieurs États membres.

43      À cet égard, il importe de rappeler, ainsi que l’a indiqué la chambre de recours au point 32 de la décision attaquée, qu’il n’est pas nécessaire que l’usage d’une marque soit géographiquement étendu pour être qualifié de sérieux. Il découle en effet de la jurisprudence qu’il n’est pas exclu que, dans certaines circonstances, le marché des produits ou des services pour lesquels une marque de l’Union européenne a été enregistrée soit, de fait, cantonné au territoire d’un seul État membre. Dans un tel cas, un usage de la marque de l’Union européenne sur ce territoire pourrait répondre à la condition de l’usage sérieux d’une marque de l’Union européenne (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, points 50 et 54). Tel peut notamment être le cas du marché pharmaceutique, qui se caractérise par un système d’autorisation de mise sur le marché et de certification de protection qui peuvent être délivrées sur une base nationale.

44      Outre les caractéristiques spécifiques de ce marché, il n’est pas contesté, en l’occurrence, que, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué au point 33 de la décision attaquée, le marché allemand, auquel la majorité des factures fournies par l’intervenante se rapportent, représente une partie substantielle du territoire de l’Union.

45      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que l’importance territoriale de l’usage n’est qu’un des facteurs devant être pris en compte, parmi d’autres, pour déterminer s’il est sérieux ou non (arrêts du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 76, et du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 30).

46      En tout état de cause, il apparaît que les preuves de l’usage de la marque antérieure ne se rapportaient pas à un seul, mais à plusieurs États membres. Ainsi que la chambre de recours l’a relevé, les factures et les bons de livraison fournis à titre d’exemples étaient adressés à des clients au Danemark, en Allemagne, en Hongrie et en Suède. Par ailleurs, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que, bien que la requérante n’eût pas fourni de factures pour l’Autriche, les extraits de l’Austria-Codex, qui recense uniquement les produits pharmaceutiques effectivement mis en vente, étaient de nature à établir que des produits avaient été commercialisés sous la marque NOCUTIL en Autriche également. L’ensemble de ces documents attestent que l’usage qui a été fait de la marque antérieure ne saurait être qualifié de purement symbolique.

47      Contrairement à ce que soutient la requérante, le point 35 de la décision attaquée n’est pas entaché d’une contradiction. La chambre de recours a en effet simplement entendu y indiquer que, si certains documents fournis, notamment les bons de commandes et les reçus pour l’impression de matériel de publicité et d’emballage des produits, ne permettaient pas de tirer des conclusions chiffrées précises sur l’ampleur de la distribution des produits, ils prouvaient en revanche que l’usage de la marque antérieure avait été d’une certaine importance. C’est dans le même sens que la chambre de recours s’est prononcée au point 36 de la décision attaquée s’agissant de l’usage de la marque antérieure en Autriche en rappelant, à juste titre, qu’il n’était pas toujours nécessaire de fournir des informations sur la quantité de produits effectivement vendus pour établir un usage sérieux.

48      Deuxièmement, s’agissant de l’intensité de l’usage qui a été fait de la marque antérieure, la requérante considère que, contrairement à ce qu’a conclu la chambre de recours, outre le fait que les caractéristiques propres aux produits pharmaceutiques ne sauraient expliquer l’existence d’un marché restreint sur le plan géographique, elle exigerait la réalisation d’un chiffre d’affaires d’un certain niveau. Elle considère que les ventes des produits en cause, qui se sont élevées à 677 000 euros sur une période de cinq ans, sont infimes lorsqu’elles sont rapportées au marché pharmaceutique de l’Union.

49      À cet égard, il suffit de rappeler que, conformément à une jurisprudence bien établie (voir point 28 ci-dessus), l’exigence d’un usage sérieux ne vise ni à évaluer la réussite commerciale, ni à contrôler la stratégie économique d’une entreprise ou encore à réserver la protection des marques à leurs seules exploitations commerciales quantitativement importantes.

50      Dès lors, le chiffre d’affaires réalisé ainsi que la quantité de ventes de produits sous la marque antérieure ne sauraient être appréciés dans l’absolu, mais doivent l’être en rapport avec d’autres facteurs pertinents, tels que le volume de l’activité commerciale, les capacités de production ou de commercialisation ou le degré de diversification de l’entreprise exploitant la marque ainsi que les caractéristiques des produits ou des services sur le marché concerné. De ce fait, il n’est pas nécessaire que l’usage de la marque antérieure soit toujours quantitativement important pour être qualifié de sérieux (arrêts du 8 juillet 2004, HIPOVITON, T‑334/01, EU:T:2004:223, point 36, et du 8 juillet 2004, VITAFRUIT, T‑203/02, EU:T:2004:225, point 42).

51      En l’occurrence, à supposer même que, ainsi que le soutient la requérante, la réalisation d’un chiffre d’affaires de 677 000 euros sur une période de cinq années soit considérée comme faible lorsqu’elle est rapportée au marché pharmaceutique de l’Union pris dans son ensemble, elle n’atteste nullement que la marque antérieure n’ait pas fait l’objet d’un usage sérieux sur le territoire pertinent.

52      À cet égard, à la différence de la situation mise en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 15 septembre 2017, Viridis Pharmaceutical/EUIPO – Hecht-Pharma (Boswelan) (T‑276/16, non publié, sous pourvoi, EU:T:2017:611), auquel se réfère expressément la requérante dans ses écritures, force est de constater que l’intervenante a, en l’espèce, été en mesure de fournir, aux fins de l’opposition, des preuves d’un usage externe de la marque antérieure, c’est-à-dire de ventes ou de démarches de commercialisation de produits sous ladite marque.

53      Il résulte de l’ensemble de ces considérations que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant que, appréciés globalement, les documents fournis par l’intervenante suffisaient à établir l’usage sérieux de la marque antérieure sur le territoire de l’Union pendant la période pertinente.

54      Par conséquent, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le second moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

55      Par son second moyen, la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir conclu à tort à la similitude des signes en cause et, partant, à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

56      L’EUIPO et l’intervenante réfutent les arguments de la requérante et concluent au rejet du présent moyen.

57      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

58      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

59      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir, par analogie, arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

–       Sur le public pertinent

60      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

61      Au point 42 de la décision attaquée, la chambre de recours a confirmé la conclusion de la division d’opposition selon laquelle le public pertinent était constitué du grand public et des professionnels possédant des connaissances et une expertise spécifiques dans le domaine des soins de santé. Elle a également considéré que le niveau d’attention des consommateurs des produits en cause était élevé, étant donné que ceux-ci ont un impact sur la santé.

62      Il n’y a pas lieu de remettre en cause ces conclusions. En effet, à supposer même qu’il faille en l’occurrence, ainsi que le soutient la requérante, accorder davantage de poids au public de professionnels, étant donné que les produits en question sont des médicaments délivrés sur prescription médicale, il n’en reste pas moins que la chambre de recours a, en définitive, aux fins de l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion, considéré que l’ensemble du public pertinent faisait preuve d’un niveau d’attention élevé. La chambre de recours a ainsi conclu, au point 62 de la décision attaquée, que, « [m]ême pour la partie qui pourrait percevoir [l’élément] “nocu” comme une allusion à “nocturia” ou “nocturnal”, il exist[ait] un risque de confusion ».

63      En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que, même si le choix de certains produits est influencé ou déterminé par des intermédiaires, un risque de confusion peut également exister pour le public général, dès lors qu’il est susceptible d’être confronté à ces produits, fût-ce lors d’opérations d’achat ayant lieu, pour chacun desdits produits pris individuellement, à des moments différents [voir, en ce sens, arrêts du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, points 56 à 63, et du 9 février 2011, Ineos Healthcare/OHMI – Teva Pharmaceutical Industries (ALPHAREN), T‑222/09, EU:T:2011:36, points 42 à 45].

–       Sur la comparaison des produits

64      Étant donné que les parties ne contestent pas la conclusion de la chambre de recours, au point 44 de la décision attaquée, selon laquelle les produits couverts par les deux marques, tous utilisés pour le traitement de la nycturie, sont identiques et qu’une telle conclusion n’apparaît pas erronée, il y a lieu de confirmer celle-ci.

–       Sur la comparaison des signes

65      Il y a lieu de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée). Il convient de relever que le caractère distinctif plus ou moins élevé des éléments composant les marques en conflit est un des facteurs pertinents dans le cadre de l’appréciation de la similitude des signes [voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2017, Aldi Einkauf/EUIPO – Weetabix (Alpenschmaus), T‑103/16, non publié, EU:T:2017:605, point 47 et jurisprudence citée].

66      En l’espèce, la requérante soutient, en substance, que les marques verbales NOCUVANT et NOCUTIL ne sont pas similaires, dans la mesure où le préfixe « noc », qui, ainsi qu’en attesterait le nombre important d’enregistrements de marques contenant un tel suffixe, a un caractère allusif, a un poids limité dans la comparaison des signes en conflit. Ainsi que cela serait très courant dans le domaine pharmaceutique, ce préfixe ferait directement allusion à l’affection à laquelle les produits en cause sont destinés à remédier, en l’occurrence le traitement de la nycturie ou de l’énurésie nocturne. Il aurait, dès lors, un caractère faiblement distinctif. Les éléments verbaux « vant » et « util » étant clairement différents sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, les signes en cause ne pourraient, selon la requérante, être considérés comme étant similaires.

67      Il y a lieu de relever que les deux marques comportent l’élément verbal « nocu », qui correspond, en outre, aux deux premières syllabes de chacune d’elles.

68      Or, conformément à la jurisprudence, le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des marques. Ce n’est que lorsque l’élément placé dans la partie initiale a un faible caractère distinctif eu égard aux produits visés par les marques en conflit que le public pertinent attachera plus d’importance à la partie finale de celles-ci, qui est la plus distinctive [voir arrêt du 6 juin 2013, McNeil/OHMI – Alkalon (NICORONO), T‑580/11, non publié, EU:T:2013:301, points 60 et 61 et jurisprudence citée ; arrêt du 11 septembre 2014, Continental Wind Partners/OHMI – Continental Reifen Deutschland (CONTINENTAL WIND PARTNERS), T‑185/13, non publié, EU:T:2014:769, point 52].

69      À cet égard, c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé qu’il ne saurait être présumé que l’élément « nocu », commun aux marques en cause, serait perçu par l’ensemble du public pertinent comme étant descriptif, ou du moins allusif, des produits en cause. Le fait que les quatre premières lettres des signes verbaux en cause (sur les sept ou huit lettres qui respectivement les composent) coïncident ne peut, lors de la comparaison des signes, être ignoré du seul fait que le préfixe « nocu » pourrait, pour une partie du public pertinent, présenter un faible caractère distinctif.

70      En effet, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [voir arrêt du 22 septembre 2016, Sun Cali/EUIPO – Abercrombie & Fitch Europe (SUN CALI), T‑512/15, EU:T:2016:527, points 58 et 67 et jurisprudence citée].

71      Or, le fait que les quatre premières lettres des signes verbaux en conflit, composés, respectivement, de sept et de huit lettres, coïncident amène à conclure qu’il existe une égalité partielle entre ceux-ci impliquant qu’ils présentent une certaine similitude sur les plans visuel et phonétique

72      Par ailleurs, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a notamment conclu, au point 49 de la décision attaquée, qu’il n’avait pas été établi que, pour une partie significative du public pertinent, en particulier pour les consommateurs germanophones, le préfixe « noc[u] » soit perçu comme faisant référence aux termes « nocturia » (nycturie) ou « nocturnal » (nocturne) et ainsi comme étant descriptif des produits en cause, ou du moins comme y faisant allusivement référence.

73      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a constaté, au point 51 de la décision attaquée, que, pour cette partie du public pertinent, les signes en cause étaient similaires à un degré moyen sur les plans visuel et phonétique.

74      En ce qui concerne la comparaison conceptuelle entre les deux marques en conflit, la chambre de recours n’a commis aucune erreur d’appréciation en constatant qu’une telle comparaison ne pouvait pas être effectuée, dès lors que les termes en cause n’avaient aucune signification pour le consommateur.

75      Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que les signes en conflit présentent un degré de similitude moyen, ce qui correspond à la conclusion à laquelle est parvenue la chambre de recours.

76      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel aucune entité ne saurait raisonnablement prétendre à l’exclusivité du préfixe allusif « noc ».

77      Outre le fait qu’il n’a pas été établi, en l’occurrence, que ce préfixe était dépourvu de caractère distinctif pour une partie du public pertinent, il convient, en tout état de cause, de considérer que la constatation de l’existence d’un risque de confusion entre les marques NOCUVANT et NOCUTIL ne revient pas à reconnaître au titulaire de la marque antérieure un monopole sur l’élément « noc », étant donné que l’existence d’un risque de confusion aboutit uniquement à la protection d’une certaine combinaison d’éléments sans toutefois protéger en tant que tel un élément éventuellement descriptif faisant partie de cette combinaison [voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2015, Deutsche Rockwool Mineralwoll/OHMI – Redrock Construction (REDROCK), T‑548/12, EU:T:2015:478, point 94 et jurisprudence citée].

–       Sur l’appréciation globale du risque de confusion

78      Selon une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

79      Par ailleurs, le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important [arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24, et du 7 juillet 2017, Axel Springer/EUIPO – Stiftung Warentest (TestBild), T‑359/16, non publié, EU:T:2017:477, point 76].

80      En outre, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives (voir arrêt du 22 janvier 2009, easyHotel, T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée).

81      Étant donné que les produits visés par les marques en conflit sont identiques – ce que la requérante ne conteste pas – et que lesdites marques sont moyennement similaires, la chambre de recours était en droit de conclure, malgré le niveau d’attention élevé des consommateurs, qu’il existait un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

82      Par conséquent, le second moyen doit être rejeté comme non fondé.

83      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble, en faisant, dès lors, droit au premier chef de conclusions de l’EUIPO et, en substance, aux premier à troisième chefs de conclusions de l’intervenante.

84      À cet égard, il convient de relever que les deuxième et troisième chefs de conclusions de l’intervenante équivalent à demander le rejet du recours et se confondent donc avec son premier chef de conclusions [voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2018, Consejo Regulador del Cava/EUIPO – Cave de Tain-l’Hermitage, union des propriétaires (CAVE DE TAIN), T‑774/16, non publié, EU:T:2018:441, point 99 et jurisprudence citée].

 Sur les dépens

85      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

86      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

87      En ce qui concerne les conclusions de l’intervenante ayant trait aux dépens afférents à la procédure devant l’EUIPO, il suffit de constater que ceux-ci restent régis par la décision attaquée [voir, en ce sens, arrêt du 10 novembre 2016, Polo Club/EUIPO – Lifestyle Equities (POLO CLUB SAINT-TROPEZ HARAS DE GASSIN), T‑67/15, non publié, EU:T:2016:657, point 120].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Serenity Pharmaceuticals LLC est condamnée aux dépens.

Berardis

Spielmann

Csehi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 mars 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.