Language of document : ECLI:EU:C:2019:534

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

26 juin 2019 (*)

« Manquement d’État – Article 258 TFUE – Article 49 TFUE – Directive 2006/123/CE – Article 15, paragraphes 2 et 3 – Directive 2005/36/CE – Articles 13, 14, 50 et annexe VII – Liberté d’établissement – Reconnaissance des qualifications professionnelles – Règles nationales concernant les prestataires de formation des médiateurs »

Dans l’affaire C‑729/17,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 22 décembre 2017,

Commission européenne, représentée par Mme H. Tserepa-Lacombe et M. H. Støvlbæk, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

République hellénique, représentée par Mmes M. Tassopoulou et D. Tsagkaraki, et M. C. Machairas, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. M. Vilaras, président de chambre, Mme K. Jürimäe, MM. D. Šváby, S. Rodin (rapporteur) et N. Piçarra, juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 décembre 2018,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 28 février 2019,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en limitant la forme juridique des organismes de formation de médiateurs à des sociétés sans but lucratif, qui doivent être constituées d’au moins une association d’avocats et d’au moins une chambre professionnelle de Grèce, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 TFUE et de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), et paragraphe 3, de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur (JO 2006, L 376, p. 36). En outre, cette institution demande à la Cour de constater que, en subordonnant la procédure de reconnaissance des qualifications académiques à des exigences supplémentaires concernant le contenu des certificats et à des mesures compensatoires sans évaluation préalable des différences substantielles et en maintenant en vigueur des dispositions discriminatoires qui obligent les demandeurs d’une accréditation de médiateur qui possèdent des titres d’agrément obtenus à l’étranger ou délivrés par un organisme de formation reconnu de l’étranger à l’issue d’une formation dispensée en Grèce à justifier d’une expérience d’au moins trois participations à une procédure de médiation, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 TFUE, ainsi qu’en vertu des articles 13 et 14, de l’article 50, paragraphe 1, et de l’annexe VII de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 septembre 2005, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles (JO 2005, L 255, p. 22), telle que modifiée par la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil, du 20 novembre 2013 (JO 2013, L 354, p. 132) (ci-après la « directive 2005/36 »).

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive 2006/123

2        Le considérant 6 de la directive 2006/123 est ainsi libellé :

« La suppression [des obstacles à la liberté d’établissement et à la libre circulation des services entre États membres] ne peut se faire uniquement par l’application directe des articles [49] et [56] du traité, étant donné que, d’une part, le traitement au cas par cas par des procédures d’infraction à l’encontre des États membres concernés serait, en particulier suite aux élargissements, extrêmement compliqué pour les institutions nationales et communautaires et que, d’autre part, la levée de nombreux obstacles nécessite une coordination préalable des systèmes juridiques nationaux, y compris la mise en place d’une coopération administrative. Comme l’ont reconnu le Parlement européen et le Conseil, un instrument législatif communautaire permet la mise en place d’un véritable marché intérieur des services. »

3        Le considérant 73 de cette directive énonce :

« Parmi les exigences à examiner figurent les régimes nationaux qui, pour des raisons autres que celles afférentes aux qualifications professionnelles, réservent l’accès à certaines activités à des prestataires particuliers. Ces exigences incluent également l’obligation faite au prestataire d’être constitué sous une forme juridique particulière, notamment d’être une personne morale, une société personnelle, une entité sans but lucratif ou une société appartenant exclusivement à des personnes physiques, ainsi que les exigences relatives à la détention du capital d’une société, notamment l’obligation de disposer d’un capital minimum pour certaines activités de services ou d’avoir une qualification particulière pour détenir du capital social ou gérer certaines sociétés. L’évaluation de la compatibilité des tarifs obligatoires minimums ou maximums avec la liberté d’établissement ne vise que les tarifs imposés par les autorités compétentes spécifiquement pour la prestation de certains services et non, par exemple, les règles générales relatives à la fixation des prix comme pour la location d’un logement. »

4        L’article 15, paragraphes 1 à 3, de ladite directive dispose :

« 1.      Les États membres examinent si leur système juridique prévoit les exigences visées au paragraphe 2 et veillent à ce que ces exigences soient compatibles avec les conditions visées au paragraphe 3. Les États membres adaptent leurs dispositions législatives, réglementaires ou administratives afin de les rendre compatibles avec ces conditions.

2.      Les États membres examinent si leur système juridique subordonne l’accès à une activité de service ou son exercice au respect de l’une des exigences non discriminatoires suivantes :

[...]

b)      les exigences qui imposent au prestataire d’être constitué sous une forme juridique particulière ;

c)      les exigences relatives à la détention du capital d’une société ;

[...]

3.      Les États membres vérifient que les exigences visées au paragraphe 2 remplissent les conditions suivantes :

a)      non-discrimination : les exigences ne sont pas directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, de l’emplacement de leur siège statutaire ;

b)      nécessité : les exigences sont justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général ;

c)      proportionnalité : les exigences doivent être propres à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d’autres mesures moins contraignantes ne doivent pas permettre d’atteindre le même résultat. »

 La directive 2005/36

5        Aux termes de son article 1er, la directive 2005/36 établit les règles selon lesquelles un État membre qui subordonne l’accès à une profession réglementée ou à son exercice, sur son territoire, à la possession de qualifications professionnelles déterminées, dénommé « État membre d’accueil », reconnaît, pour l’accès à cette profession et à son exercice, les qualifications professionnelles acquises dans un ou plusieurs autres États membres et qui permettent au titulaire desdites qualifications d’y exercer la même profession.

6        Il résulte de l’article 2, paragraphe 1, de cette directive que celle-ci s’applique à tout ressortissant d’un État membre, y compris les membres des professions libérales, voulant exercer une profession réglementée dans un État membre autre que celui où il a acquis ses qualifications professionnelles, soit à titre indépendant, soit à titre salarié.

7        L’article 3, paragraphe 1, sous a) à c) et e), de la directive 2005/36 prévoit :

« 1.      Aux fins de la présente directive, on entend par :

a)      “profession réglementée”: une activité ou un ensemble d’activités professionnelles dont l’accès, l’exercice ou une des modalités d’exercice est subordonné directement ou indirectement, en vertu de dispositions législatives, réglementaires ou administratives, à la possession de qualifications professionnelles déterminées ; l’utilisation d’un titre professionnel limitée par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives aux détenteurs d’une qualification professionnelle donnée constitue notamment une modalité d’exercice. Lorsque la première phrase n’est pas d’application, une profession visée au paragraphe 2 est assimilée à une profession réglementée ;

b)      “qualifications professionnelles” : les qualifications attestées par un titre de formation, une attestation de compétence visée à l’article 11, point a) i) et/ou une expérience professionnelle ;

c)      “titre de formation”: les diplômes, certificats et autres titres délivrés par une autorité d’un État membre désignée en vertu des dispositions législatives, réglementaires ou administratives de cet État membre et sanctionnant une formation professionnelle acquise principalement dans la Communauté. Lorsque la première phrase n’est pas d’application, un titre visé au paragraphe 3 est assimilé à un titre de formation ;

[...]

e)      “formation réglementée” : toute formation qui vise spécifiquement l’exercice d’une profession déterminée et qui consiste en un cycle d’études complété, le cas échéant, par une formation professionnelle, un stage professionnel ou une pratique professionnelle.

La structure et le niveau de la formation professionnelle, du stage professionnel ou de la pratique professionnelle sont déterminés par les dispositions législatives, réglementaires ou administratives de l’État membre en question ou font l’objet d’un contrôle ou d’un agrément par l’autorité désignée à cet effet ;

[...] »

8        L’article 13, paragraphes 1 et 2, de cette directive énonce :

« 1.      Lorsque, dans un État membre d’accueil, l’accès à une profession réglementée ou son exercice est subordonné à la possession de qualifications professionnelles déterminées, l’autorité compétente de cet État membre permet aux demandeurs d’accéder à cette profession et de l’exercer, dans les mêmes conditions que pour ses nationaux, s’ils possèdent une attestation de compétences ou un titre de formation visé à l’article 11 qui est requis par un autre État membre pour accéder à cette même profession sur son territoire ou l’y exercer.

Les attestations de compétences ou les titres de formation sont délivrés par une autorité compétente dans un État membre, désignée conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou administratives de cet État membre.

2.      L’accès à la profession et son exercice, tels que décrits au paragraphe 1, sont également accordés aux demandeurs qui ont exercé la profession en question à temps plein pendant une année ou à temps partiel pendant une durée totale équivalente au cours des dix années précédentes dans un autre État membre qui ne réglemente pas cette profession et qui possèdent une ou plusieurs attestations de compétences ou preuves de titre de formation délivré par un autre État membre qui ne réglemente pas cette profession.

Les attestations de compétences ou les titres de formation remplissent les conditions suivantes :

a)      être délivrés par une autorité compétente dans un État membre, désignée conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou administratives de cet État membre ;

b)      attester la préparation du titulaire à l’exercice de la profession concernée.

L’expérience professionnelle d’un an visée au premier alinéa ne peut cependant être requise si le titre de formation que possède le demandeur certifie une formation réglementée.

[...] »

9        L’article 14, paragraphes 1, 4 et 5, de ladite directive dispose :

« 1.      L’article 13 ne fait pas obstacle à ce que l’État membre d’accueil exige du demandeur qu’il accomplisse un stage d’adaptation pendant trois ans au maximum ou se soumette à une épreuve d’aptitude dans un des cas suivants :

a)      lorsque la formation que le demandeur a reçue porte sur des matières substantiellement différentes de celles couvertes par le titre de formation requis dans l’État membre d’accueil ;

b)      lorsque la profession réglementée dans l’État membre d’accueil comprend une ou plusieurs activités professionnelles réglementées qui n’existent pas dans la profession correspondante dans l’État membre d’origine du demandeur et que la formation requise dans l’État membre d’accueil porte sur des matières substantiellement différentes de celles couvertes par l’attestation de compétences ou le titre de formation du demandeur.

[...]

4.      Aux fins des paragraphes 1 et 5, on entend par “matières substantiellement différentes” des matières dont la connaissance, les aptitudes et les compétences acquises sont essentielles à l’exercice de la profession et pour lesquelles la formation reçue par le migrant présente des différences significatives en termes de contenu par rapport à la formation exigée dans l’État membre d’accueil.

5.      Le paragraphe 1 est appliqué dans le respect du principe de proportionnalité. En particulier, si l’État membre d’accueil envisage d’exiger du demandeur qu’il accomplisse un stage d’adaptation ou passe une épreuve d’aptitude, il doit d’abord vérifier si les connaissances, aptitudes et compétences acquises par le demandeur au cours de son expérience professionnelle ou de l’apprentissage tout au long de la vie, et ayant fait l’objet, à cette fin, d’une validation en bonne et due forme par un organisme compétent, dans un État membre ou dans un pays tiers sont de nature à couvrir, en tout ou en partie, les matières substantiellement différentes définies au paragraphe 4. »

10      L’article 50, paragraphe 1, de la directive 2005/36 énonce :

« Lorsqu’elles statuent sur une demande visant à obtenir l’autorisation d’exercer la profession réglementée concernée en application du présent titre, les autorités compétentes de l’État membre d’accueil peuvent exiger les documents et les certificats énumérés à l’annexe VII.

[...] »

11      L’article 56, paragraphe 3, de cette directive prévoit que chaque État membre désigne, au plus tard le 20 octobre 2007, les autorités et les organismes compétents habilités à délivrer ou à recevoir les titres de formation et autres documents ou informations, ainsi que ceux habilités à recevoir les demandes et à prendre les décisions visées dans la présente directive, et en informe immédiatement les autres États membres et la Commission.

12      Le point 1, sous a) à c), de l’annexe VII de cette directive dispose :

« 1.      Documents

a)      Preuve de la nationalité de l’intéressé.

b)      Copie des attestations de compétence professionnelle ou du titre de formation qui donne accès à la profession en cause et attestation de l’expérience professionnelle de l’intéressé le cas échéant.

Les autorités compétentes de l’État membre d’accueil peuvent inviter le demandeur à fournir des informations concernant sa formation dans la mesure nécessaire pour déterminer l’existence éventuelle de différences substantielles avec la formation nationale exigée, telles que visées à l’article 14. Si le demandeur est dans l’impossibilité de fournir ces informations, l’autorité compétente de l’État membre d’accueil s’adresse au point de contact, à l’autorité compétente ou à tout autre organisme compétent de l’État membre d’origine.

c)      Pour les cas visés à l’article 16, une attestation portant sur la nature et la durée de l’activité, délivrée par l’autorité ou l’organisme compétent de l’État membre d’origine ou de l’État membre de provenance. »

 La directive 2008/52

13      Le considérant 16 de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2008, sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale (JO 2008, L 136, p. 3), est ainsi libellé :

« Pour assurer la confiance réciproque nécessaire en ce qui concerne la confidentialité, les effets sur les délais de prescription ainsi que la reconnaissance et l’exécution des accords issus de la médiation, les États membres devraient encourager, par tout moyen qu’ils jugent approprié, la formation des médiateurs et la mise en place de mécanismes efficaces de contrôle de la qualité relatifs à la fourniture des services de médiation. »

14      L’article 1er, paragraphe 1, de cette directive énonce :

« La présente directive a pour objet de faciliter l’accès à des procédures alternatives de résolution des litiges et de favoriser le règlement amiable des litiges en encourageant le recours à la médiation et en garantissant une articulation satisfaisante entre la médiation et les procédures judiciaires. »

15      L’article 3, paragraphe 1, sous b), de ladite directive prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

b)      “médiateur”, tout tiers sollicité pour mener une médiation avec efficacité, impartialité et compétence, quelle que soit l’appellation ou la profession de ce tiers dans l’État membre concerné et quelle que soit la façon dont il a été nommé pour mener ladite médiation ou dont il a été chargé de la mener. »

16      L’article 4, paragraphes 1 et 2, de la même directive dispose :

« 1.      Les États membres encouragent, par tout moyen qu’ils jugent approprié, l’élaboration de codes volontaires de bonne conduite et l’adhésion à ces codes, par les médiateurs et les organismes fournissant des services de médiation, ainsi que d’autres mécanismes efficaces de contrôle de la qualité relatifs à la fourniture de services de médiation.

2.      Les États membres promeuvent la formation initiale et continue de médiateurs afin de veiller à ce que la médiation soit menée avec efficacité, compétence et impartialité à l’égard des parties. »

 Le droit grec

 La loi 3898/2010

17      L’article 5, paragraphes 1 et 2, de la loi 3898/2010 (FEK A’ 211/16.2.2010) qui a transposé la directive 2008/52 est ainsi libellé :

« 1.      Les organismes de formation de médiateurs peuvent être des sociétés civiles sans but lucratif constituées conjointement d’au moins une association d’avocats et d’au moins une des chambres professionnelles du pays et fonctionnant en vertu d’une autorisation délivrée par le service visé à l’article 7.

2.      Un décret présidentiel, publié sur proposition du ministre de la justice, de la transparence et des droits de l’homme, du ministre de l’économie, de la concurrence et de la marine marchande et du ministre de l’éducation, de l’apprentissage tout au long de la vie et des cultes, fixe plus précisément les conditions d’autorisation et de fonctionnement des organismes de formation de médiateurs, le contenu des programmes d’enseignement de base, de formation et de formation continue, leur durée, le lieu où les cours sont dispensés, les qualifications des formateurs, le nombre des participants, ainsi que les sanctions imposées aux organismes de formation de médiateurs en cas de non-respect de leurs obligations. Ces sanctions consistent en une amende ou en une révocation provisoire ou définitive de leur autorisation d’exercer. Les critères de sélection et le calcul des sanctions seront établis par le décret présidentiel précité.

[...] »

18      L’article 6, paragraphes 1 et 3, de ladite loi prévoit :

« 1.      Une “commission d’accréditation des médiateurs” est constituée sous la surveillance du ministère de la justice, de la transparence et des droits de l’homme. Relèvent notamment de la compétence de la commission l’accréditation des candidats médiateurs, le contrôle du respect des obligations qui incombent aux organismes de formation de médiateurs et le contrôle du respect, par les médiateurs agréés, du code de déontologie. La commission est également chargée de faire rapport au ministre de la justice, de la transparence et des droits de l’homme en vue de l’imposition des sanctions prévues aux articles 5 et 7. La commission est composée de son président et de quatre (4) membres, ainsi que du même nombre de suppléants. La durée de leur mandat est de trois ans.

[...]

3.      L’accréditation des candidats médiateurs fait l’objet d’examens passés devant un jury, auquel participent deux membres de la commission visée au paragraphe 1, désignés par son président, et un magistrat, qui est désigné conformément à la disposition de l’article 41, paragraphe 2, de la loi 1756/1988 et préside ledit jury. Le jury vérifie si le candidat possède les connaissances, les compétences et une formation suffisante dispensée par les organismes de formation visés à l’article 5, pour fournir des services de médiation ; sa décision est écrite et dûment motivée. Pour le secrétariat de la commission visée au paragraphe 1 et du jury d’examen, l’assemblée plénière des associations d’avocats est tenue de mettre à disposition le personnel prévu par le règlement visé au paragraphe 5 du présent article. Par décision conjointe, le ministre des finances et le ministre de la justice, de la transparence et des droits de l’homme fixent :

a)      les modalités et le montant de la rémunération des membres du jury d’examen, laquelle rémunération est à la charge de la Caisse de financement des bâtiments judiciaires,

b)      les droits d’examen que les candidats sont tenus de verser au préalable au jury.

[...] »

19      L’article 7, paragraphe 2, de cette même loi dispose :

« Par arrêté, le ministre de la Justice, de la Transparence et des Droits de l’homme :

a)      définit les conditions particulières pour l’agrément des médiateurs, ainsi que la procédure de reconnaissance du titre d’agrément, obtenu par les médiateurs dans un autre État membre de l’Union européenne. Cette reconnaissance ainsi que la révocation provisoire ou définitive de l’agrément sont subordonnées à l’accord préalable de la commission visée à l’article 6, paragraphe 1,

b)      établit un code de déontologie pour les médiateurs agréés,

c)      prévoit les conditions particulières concernant l’application de sanctions en cas de violation des dispositions du code précité. Ces sanctions, qui sont imposées avec l’accord de la commission visée à l’article 6, paragraphe 1, consistent en la révocation provisoire ou définitive de l’agrément ; et

d)      règlemente toute question connexe. »

20      L’article 14 de la loi 3898/2010 a été modifié par l’acte législatif du 4 décembre 2012 concernant le règlement de questions urgentes relevant de la compétence du ministère des Finances, du ministère du Développement, de la Concurrence, des Infrastructures, des Transports et des Réseaux, du ministère de l’Éducation et des Cultes, du ministère de la Culture et des Sports, du ministère de l’Environnement, de l’Énergie et du Changement climatique, du ministère du Travail, de la Sécurité sociale et de l’Aide sociale, du ministère de la Justice, de la Transparence et des Droits de l’homme, du ministère de la Réforme administrative et de la Gouvernance électronique, et autres dispositions (FEK A’ 237/5.12.2012), qui y a ajouté un paragraphe 2, aux termes duquel « il est permis de reconnaître un titre d’agrément de médiateur délivré par un organisme de formation de l’étranger à l’issue d’une formation dispensée en Grèce, dès lors que ce titre a été obtenu au plus tard à la date d’autorisation et de début de fonctionnement d’un organisme ou d’organismes de formation visés à l’article 5 de la loi 3898/2010 et, en tout état de cause, au plus tard le 31 décembre 2012 ».

 La loi 4512/2018

21      L’article 205 de la loi 4512/2018, du 17 janvier 2018, relative aux règles d’application des réformes structurelles du programme d’adaptation économique et autres dispositions (FEK A’ 5/17.1.2018), est ainsi libellé :

« À compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, toute disposition contraire qui régirait différemment toute question relative à la médiation est abrogée. Les dispositions de l’article 1er de la loi 3898/2010 restent en vigueur. »

 Le décret présidentiel 123/2011

22      L’article 1er, paragraphe 1, du décret présidentiel 123/2011 définissant les conditions d’autorisation et de fonctionnement des organismes de formation de médiateurs en matière civile et commerciale (FEK A’ 255/9.12.2011) dispose :

« Un organisme de formation de médiateurs, ci-après dénommé “organisme”, peut être une société civile sans but lucratif constituée conjointement d’au moins une association d’avocats et d’au moins une des chambres professionnelles du pays et fonctionnant en vertu d’une autorisation délivrée par le service de la profession d’avocat et des huissiers de justice qui appartient à la direction générale de l’administration judiciaire du ministère de la justice, de la transparence et des droits de l’homme (article 5, paragraphe 1, de la loi 3898/2010). »

 L’arrêté ministériel 109088 modifié

23      Le chapitre A, article unique, paragraphes 1, 2 et 5, de l’arrêté ministériel 109088, du 12 décembre 2011, tel que modifié par l’arrêté 107309, du 20 décembre 2012 (ci-après l’« arrêté ministériel 109088 modifié »), prévoit :

« A.      Nous définissons la procédure de reconnaissance des titres d’agrément des médiateurs délivrés par un organisme de formation de l’étranger comme suit :

Les titres de médiateur agréé délivrés par un organisme de formation de l’étranger sont reconnus comme équivalents par la commission d’accréditation des médiateurs selon la procédure suivante :

1.      Les intéressés déposent une demande de reconnaissance du titre de médiateur agréé.

[...]

2.      Le formulaire de demande est accompagné des pièces justificatives suivantes :

[...]

c)      un certificat de l’organisme de formation, adressé à la commission d’accréditation des médiateurs, visé à l’article 6, paragraphe 1, de la loi 3898/2010, et attestant :

aa)      le nombre total des heures de formation,

bb)      les matières enseignées,

cc)      le lieu de la formation,

dd)      le nombre des participants,

ee)      le nombre et les qualifications des formateurs,

ff)      la procédure d’examen et d’évaluation des candidats et les modalités en garantissant l’intégrité.

[...]

5.      La commission d’accréditation des médiateurs accepte l’équivalence du titre d’agrément, pourvu que ce titre provienne d’un organisme reconnu de l’étranger et que l’intéressé puisse justifier d’une expérience d’au moins trois participations à des procédures de médiation en tant que médiateur, assistant de médiateur ou conseil de l’une des parties. La commission peut, à sa discrétion, demander à l’intéressé de se soumettre à un examen complémentaire, notamment lorsque sa formation a été dispensée en Grèce par un organisme d’origine étrangère.

En ce qui concerne la reconnaissance de l’équivalence d’un titre d’agrément obtenu à l’étranger ou délivré par un organisme de formation reconnu de l’étranger à l’issue d’une formation dispensée en Grèce, la commission d’accréditation des médiateurs peut accepter l’équivalence du titre d’agrément, même si l’intéressé ne justifie pas d’une expérience d’au moins trois participations à des procédures de médiation en tant que médiateur, assistant de médiateur ou conseil de l’une des parties, dès lors que l’ensemble des éléments du dossier de l’intéressé fait manifestement apparaître sa formation continue et sa pratique systématique de la médiation et dès lors que ce titre a été obtenu au plus tard le 31 décembre 2012. »

 La procédure précontentieuse

24      À la suite d’une plainte reçue par ses services, la Commission, nourrissant des doutes sur la compatibilité de la loi 3898/2010 et de l’arrêté ministériel 109088 modifié avec les directives 2006/123 et 2005/36, a, le 11 juillet 2013, demandé à la République hellénique des informations sur la formation des médiateurs en Grèce.

25      La République hellénique a répondu à ladite demande par sa lettre du 16 septembre 2013.

26      Le 11 juillet 2014, la Commission a envoyé une lettre de mise en demeure à la République hellénique, l’invitant à présenter ses observations sur la possible incompatibilité de ladite loi et dudit arrêté avec l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), de la directive 2006/123, ainsi qu’avec les articles 13 et 14 de la directive 2005/36. La République hellénique a répondu à ladite lettre le 12 septembre 2014.

27      Le 29 mai 2015, la Commission a envoyé une lettre de mise en demeure complémentaire, par laquelle elle réitérait sa position et se déclarait également préoccupée au sujet de l’incompatibilité de la législation grecque avec l’article 50, paragraphe 1, et l’annexe VII de la directive 2005/36, dans la mesure où la reconnaissance des titres des médiateurs obtenus dans d’autres États membres de l’Union est soumise à des conditions qui vont au-delà de ce que permet cette directive. La Commission a également estimé que la législation grecque contrevenait au principe de non-discrimination, tel que prévu aux articles 45 et 49 TFUE.

28      La République hellénique a répondu à ladite lettre de mise en demeure complémentaire le 23 novembre 2015.

29      N’étant pas convaincue par les réponses de la République hellénique, la Commission a émis, le 25 février 2016, un avis motivé, notifié le 26 février à cet État membre par lequel elle a soutenu que, d’une part, en limitant la forme des organismes de formation de médiateurs à des sociétés sans but lucratif, qui doivent être constituées d’au moins une association d’avocats et d’au moins une chambre professionnelle en Grèce, cette dernière a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 49 TFUE, de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), ainsi que paragraphe 3, de la directive 2006/123.

30      D’autre part, selon l’avis motivé, en subordonnant la procédure de reconnaissance des qualifications académiques à des exigences supplémentaires concernant le contenu des certificats et à des mesures compensatoires sans évaluation préalable des différences substantielles et en maintenant en vigueur des dispositions discriminatoires qui obligent les demandeurs à justifier d’une expérience d’au moins trois participations à une procédure de médiation, la République hellénique avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 45 et 49 TFUE, ainsi qu’en vertu des articles 13 et 14, de l’article 50, paragraphe 1, de la directive 2005/36, ainsi que de l’annexe VII de celle-ci.

31      Par sa réponse du 10 mai 2016, la République hellénique a contesté le manquement reproché, soutenant que, d’une part, l’activité de médiation relève de l’exception prévue à l’article 51, premier alinéa, TFUE, en ce qu’elle constitue une activité participant à l’exercice de l’autorité publique. En tout état de cause, l’intérêt général relatif à l’administration de la justice pourrait être admis en tant que justification à des restrictions à la libre prestation de services. D’autre part, s’agissant de la reconnaissance des qualifications professionnelles, cet État membre a fait valoir que les dispositions nationales en cause ne privaient pas le médiateur ayant acquis des qualifications professionnelles correspondantes dans un autre État membre du droit d’exercer cette profession. Par ailleurs, il résultait des dispositions nationales en cause qu’il était possible d’établir la compétence d’un médiateur à partir des éléments du dossier concernant sa formation continue au lieu du critère de l’expérience qui requiert trois participations à une procédure de médiation.

32      Ne partageant pas l’avis de la République hellénique, la Commission a introduit le présent recours en manquement.

 Sur le recours

 Sur la portée du recours

–        Argumentation des parties

33      Dans le cadre de sa requête, la Commission a formulé deux griefs. D’une part, elle a soutenu que l’article 5, paragraphe 1, de la loi 3898/2010 et l’article 1er, paragraphe 1, du décret présidentiel 123/2011 introduisaient une restriction à la liberté d’établissement telle que définie à l’article 49 TFUE, et enfreignaient l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), et paragraphe 3, de la directive 2006/123. D’autre part, elle a fait valoir que l’arrêté ministériel 109088 modifié violait les articles 13, 14 et 50 de la directive 2005/36, ainsi que l’annexe VII de celle-ci.

34      Dans sa défense, sans contester les griefs de la Commission à l’égard de la loi 3898/2010 et de l’arrêté ministériel 109088 modifié, la République hellénique a affirmé que la loi 3898/2010 ainsi que le décret présidentiel 123/2011 avaient été abrogés à partir de la publication, au Journal officiel de la République hellénique, le 17 janvier 2018, de la loi 4512/2018. Il s’ensuit, selon la République hellénique, que les griefs avancés par la Commission dans son recours n’ont plus de sens.

35      Dans le petitum de son mémoire en réplique ainsi qu’à l’audience, la Commission a fait valoir que le présent recours couvrait également la situation née de ces modifications législatives introduites par la loi 4512/2018, dans la mesure où, conformément à la jurisprudence de la Cour, le système mis en place par la législation contestée au cours de la procédure précontentieuse a été, dans son ensemble, maintenu par les nouvelles mesures adoptées par l’État membre postérieurement à l’avis motivé.

–        Appréciation de la Cour

36      Afin de déterminer la portée du présent recours en manquement, il y a lieu de relever que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements éventuels intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2017, Commission/Grèce, C‑202/16, non publié, EU:C:2017:318, point 37 ainsi que jurisprudence citée).

37      En cas de modification postérieure de la réglementation nationale mise en cause dans le cadre d’une procédure en manquement, la Commission ne modifie pas l’objet de son recours en imputant les griefs formulés à l’encontre de la réglementation antérieure à celle résultant de la modification adoptée, lorsque les deux versions de la réglementation nationale ont un contenu identique (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2013, Commission/France, C‑197/12, non publié, EU:C:2013:202, point 26 ainsi que jurisprudence citée).

38      En revanche, l’objet du litige ne saurait être étendu à des obligations qui découlent de nouvelles dispositions n’ayant pas d’équivalent dans la version initiale de l’acte en cause, sous peine de constituer une violation des formes substantielles de la régularité de la procédure constatant le manquement (voir, en ce sens, arrêt du 5 avril 2017, Commission/Bulgarie, C‑488/15, EU:C:2017:267, point 52 ainsi que jurisprudence citée).

39      Dans la mesure où, ainsi qu’il vient d’être indiqué, la Commission a imputé, dans son mémoire en réplique, le premier grief avancé dans sa requête également sur la loi 4512/2018, il y a lieu de déterminer si cette imputation implique une modification de l’objet du recours.

40      En l’occurrence, il ne ressort ni de la lecture des dispositions pertinentes de la loi 4512/2018 ni de l’argumentation de la Commission y afférente que les dispositions de cette dernière loi ont un contenu identique à celles de la réglementation en vigueur antérieurement.

41      Partant, dans la mesure où le premier grief de la Commission porte également sur les dispositions de la loi 4512/2018, celui-ci modifie l’objet du litige de sorte qu’il y a lieu d’examiner les griefs tels qu’avancés dans la requête de la Commission, sans tenir compte de l’extension du premier grief effectué dans le mémoire en réplique.

42      Dans ces conditions, il convient de rejeter en tant qu’irrecevables les griefs relatifs à la violation des dispositions de l’article 49 TFUE, de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), ainsi que paragraphe 3, de la directive 2006/123, des articles 13 et 14, de l’article 50, paragraphe 1, ainsi que de l’annexe VII de la directive 2005/36 dans la mesure où ces griefs visent la loi 4512/2018.

 Sur le fond

 Sur le grief relatif à la violation de l’article 49 TFUE et de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), et paragraphe 3, de la directive 2006/123

–       Argumentation des parties

43      Selon la Commission, il ressort, d’une part, de l’article 5, paragraphe 1, de la loi 3898/2010 et, d’autre part, de l’article 1er, paragraphe 1, du décret présidentiel 123/2011, que les sociétés fournissant des services de formation en vue de dispenser un enseignement à des médiateurs, pouvant, sur cette base, se présenter à l’examen donnant lieu à l’obtention de l’accréditation de médiateur en Grèce, doivent avoir exclusivement la forme juridique de sociétés sans but lucratif composées conjointement par au moins une association d’avocats et au moins une chambre professionnelle de Grèce et fonctionner en vertu d’une autorisation délivrée par l’autorité visée à l’article 7 de cette loi.

44      La Commission soutient que l’exigence relative à la composition requise de l’organisme de formation ainsi que l’exigence relative à la forme juridique exigée de celui-ci dissuaderaient tant les organismes de formation étrangers qui souhaiteraient s’établir pour la première fois en Grèce que ceux souhaitant y installer un établissement secondaire, de telle sorte que ces exigences restreindraient la liberté d’établissement prévue à l’article 49 TFUE et à l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), et paragraphe 3, de la directive 2006/123.

45      Selon la Commission, il ressort de la loi 3898/2010 que les formations proposées par les organismes qui ne remplissent pas les exigences énoncées par cette loi ne peuvent pas donner accès à l’examen requis, en vertu de l’article 6 de ladite loi, et, in fine, à l’obtention de l’accréditation requise à l’exercice de la profession de médiateur en Grèce.

46      En outre, la Commission fait valoir que ces exigences ne sont ni justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général ni propres à garantir la réalisation de l’objectif qu’elles poursuivent et vont au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. De plus, elles pourraient être appliquées d’une manière pouvant être discriminatoire.

47      Par ailleurs, la Commission estime que, contrairement aux arguments avancés par la République hellénique dans le cadre de la procédure précontentieuse, l’exception prévue à l’article 51 TFUE n’est pas applicable en l’espèce. D’une part, il ne saurait être déduit de l’ordonnance du 17 février 2005, Mauri (C‑250/03, EU:C:2005:96), qui porte sur la participation des avocats au jury de l’examen visé, que la règle nationale en cause est compatible avec le droit de l’Union, dans la mesure où l’article 5 de la loi 3898/2010 porterait sur la composition et la forme juridique des organismes de formation des médiateurs. D’autre part, le manquement reproché concernerait non pas le service de médiation en tant que tel, mais le service de formation des médiateurs qui ne relèverait pas de l’exercice de l’autorité publique, en ce compris l’administration de la justice.

48      S’agissant des raisons impérieuses d’intérêt général susceptibles de justifier les restrictions en cause, la Commission fait valoir, en premier lieu, que l’objectif de garantir la qualité de la médiation pourrait trouver un appui à l’article 4 de la directive 2008/52. Cependant, elle estime que cet article 4 lu à la lumière du considérant 16 de cette directive vise, d’une part, le contrôle de la qualité de la fourniture des services de formation au moyen de mécanismes tels que les codes de bonne conduite et, d’autre part, que cet article 4 n’appréhende pas les règles relatives à l’organisation des organismes de formation de médiateurs telles que celles régissant la forme juridique requise et celles relatives à la détention du capital.

49      En second lieu, la Commission argue que, si, conformément à la jurisprudence de la Cour, la protection des destinataires des services de médiation et la nécessité de garantir un enseignement de niveau élevé peuvent constituer des raisons impérieuses d’intérêt général, la République hellénique demeure en défaut de démontrer que les exigences relatives à la forme juridique et à la détention de capital d’une société permettraient d’atteindre ces objectifs.

50      En tout état de cause, la Commission estime que les restrictions en cause ne sont pas proportionnées aux objectifs poursuivis dans la mesure où, d’une part, il existe des mesures moins restrictives, comme l’introduction d’un programme d’études adéquat, la définition de critères concernant les enseignants et le matériel utilisé ainsi que la fixation de critères concernant les examens obligatoires donnant accès à la profession. D’autre part, la Commission observe que la République hellénique applique déjà d’autres mesures moins restrictives en vue de garantir un niveau d’enseignement élevé, telles que l’exigence selon laquelle la formation est dispensée par des médiateurs expérimentés, le déroulement des examens devant un jury d’État, ou encore la définition par la loi du contenu et de la durée du programme de formation.

51      La République hellénique se limite à remarquer que, à la suite de l’adoption de la loi 4512/2018, le présent grief n’a plus de sens.

–       Appréciation de la Cour

52      À titre liminaire, il convient de relever que le premier grief du présent recours est tiré d’une violation de l’article 49 TFUE ainsi que d’une violation de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), et paragraphe 3, de la directive 2006/123.

53      À cet égard, il convient, en premier lieu, de rappeler qu’il ressort du considérant 6 de la directive 2006/123 que la suppression des obstacles à la liberté d’établissement ne peut se faire uniquement par l’application directe de l’article 49 TFUE en raison, notamment, de l’extrême complexité du traitement au cas par cas des obstacles à cette liberté (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2015, Rina Services e.a., C‑593/13, EU:C:2015:399, point 38) et que, par conséquent, il conviendrait d’adopter une directive en la matière.

54      Il s’ensuit que, lorsqu’une restriction à la liberté d’établissement relève du champ d’application de la directive 2006/123, il n’y a pas lieu de l’examiner également au regard de l’article 49 TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 23 février 2016, Commission/Hongrie, C‑179/14, EU:C:2016:108, point 118, ainsi que du 30 janvier 2018, X et Visser, C‑360/15 et C‑31/16, EU:C:2018:44, point 137).

55      Dès lors, il convient d’apprécier si le grief tiré d’une violation de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), et paragraphe 3, de la directive 2006/123 est fondé.

56      À cet égard, il ressort de l’article 15, paragraphe 1, de la directive 2006/123 que les États membres doivent examiner si leur système juridique prévoit des exigences telles que celles visées au paragraphe 2 de cet article 15et veiller à ce que celles-ci soient compatibles avec les conditions visées au paragraphe 3, dudit article 15.

57      Les conditions cumulatives énumérées audit article 15, paragraphe 3, portent, premièrement, sur le caractère non discriminatoire des exigences concernées, qui ne peuvent être directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, en fonction de l’emplacement de leur siège statutaire, deuxièmement, sur leur caractère nécessaire, à savoir qu’elles doivent être justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général, et, troisièmement, sur leur proportionnalité, lesdites exigences devant être propres à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d’autres mesures moins contraignantes ne devant pas permettre d’atteindre le même résultat.

58      En l’occurrence, les griefs formulés par la Commission tendent à faire constater que les dispositions nationales qu’identifie cette institution dans son recours instituent des exigences du type de celles visées à l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), de la directive 2006/123 et que, à défaut, pour lesdites exigences, de satisfaire aux conditions énoncées au paragraphe 3 de cet article 15, ces dispositions nationales méconnaissent les paragraphes 1 à 3 dudit article.

59      Il importe, en premier lieu, de vérifier si les exigences découlant de l’article 5 de la loi 3898/2010 relèvent, ainsi que le soutient la Commission, de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), de ladite directive.

60      À cet égard, il y a lieu de relever que l’article 15, paragraphe 2, sous b), de la directive 2006/123 lu à la lumière du considérant 73 vise une catégorie d’exigences qui imposent au prestataire d’être constitué sous une forme juridique particulière, ce qui recouvre notamment l’exigence d’être une personne morale ou une entité sans but lucratif.

61      Or, force est de constater que l’exigence relative à la forme juridique de l’organisme de formation des médiateurs requise à l’article 5 de la loi 3898/2010, selon laquelle les organismes de formation des médiateurs doivent être constitués en tant que sociétés sans but lucratif, relève expressément de l’article 15, paragraphe 2, sous b), de la directive 2006/123 (voir, en ce sens, arrêt du 23 février 2016, Commission/Hongrie, C‑179/14, EU:C:2016:108, points 61 et 62).

62      En outre, il convient d’observer que l’article 15, paragraphe 2, sous c), de la directive 2006/123 lu à la lumière du considérant 73 vise une autre catégorie d’exigences qui sont relatives à la détention du capital d’une société.

63      Or, l’exigence relative à la composition de l’organisme de formation en vertu de laquelle les organismes de formation des médiateurs doivent être constitués conjointement d’au moins une association d’avocats et d’au moins une chambre professionnelle de Grèce, requise à l’article 5 de la loi 3898/2010, relève de l’article 15, paragraphe 2, sous c), de la directive 2006/123.

64      En second lieu, il y a lieu de vérifier si les règles nationales en cause relèvent de l’article 15, paragraphe 3, de la directive 2006/123.

65      À cet égard, premièrement, aux termes de l’article 15, paragraphe 3, sous a), de la directive 2006/123, les exigences visées au paragraphe 2 de cet article ne sont pas incompatibles avec les dispositions de cette directive à condition, entre autres, qu’elles ne soient pas directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, s’agissant des sociétés, de l’emplacement de leur siège statutaire.

66      En l’occurrence, il ressort de l’article 5 de la loi 3898/2010 que les exigences relatives à la forme juridique, à la détention de capital et à la composition de l’organisme de formation des médiateurs s’appliquent tant aux organismes de formation établis en Grèce, qu’à ceux établis dans d’autres États membres. Dès lors, ces exigences ne revêtent pas de caractère discriminatoire, au sens de l’article 15, paragraphe 3, sous a), de cette directive.

67      Deuxièmement, s’agissant de la nécessité des règles nationales en cause, si la République hellénique n’avance pas de justifications spécifiques à l’article 5 de la loi 3898/2010, il ressort de son argumentation, exprimée à l’audience devant la Cour, que cette réglementation est apte, conformément à l’article 15, paragraphe 3, sous b), de la directive 2006/123, à assurer un niveau élevé de qualité aux services de formation des médiateurs, ainsi que de faciliter l’installation des organismes de formation dans les régions périphériques.

68      Or, si de telles raisons peuvent constituer des raisons impérieuses d’intérêt général, il n’en reste pas moins que la République hellénique n’a pas avancé d’argumentation susceptible de démontrer que les règles relatives à la forme juridique d’une société de formation et à la détention de capital de celle-ci constituent des mesures nécessaires pour atteindre de tels objectifs.

69      Étant donné que les trois conditions prévues à l’article 15, paragraphe 3, de la directive 2006/123 sont cumulatives, force est de constater que les règles nationales en cause ne respectent pas la deuxième de ces conditions sans qu’il soit nécessaire de vérifier la troisième exigence visée au paragraphe 3 de celui-ci.

70      Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que, en limitant la forme juridique des organismes de formation de médiateurs à des sociétés sans but lucratif, qui doivent être constituées conjointement d’au moins une association d’avocats et d’au moins une chambre professionnelle de Grèce, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), ainsi que paragraphe 3, de la directive 2006/123.

 Sur le grief relatif aux articles 13 et 14 ainsi qu’à l’article 50, paragraphe 1, et à l’annexe VII de la directive 2005/36

–       Argumentation des parties

71      La Commission considère que les dispositions de la loi 3898/2010 et de l’arrêté ministériel 109088 modifié, enfreignent les articles 13 et 14, l’article 50, paragraphe 1, ainsi que l’annexe VII de la directive 2005/36. Ces dispositions enfreindraient également le principe de non-discrimination.

72      À titre liminaire, cette institution fait valoir en rappelant la définition de « profession réglementée », de l’article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive 2005/36, que cette directive n’exige pas un titre d’études précis pour l’accès à la profession de médiateur ni ne limite son application à l’« exercice » d’une profession réglementée. Selon cette institution, si, en l’absence d’harmonisation, les États membres demeurent compétents pour réglementer cette profession et en définir les conditions d’accès, il n’en reste pas moins que les dispositions de la législation nationale ne sauraient constituer un obstacle injustifié à l’exercice des libertés fondamentales garanties par les traités.

73      Étant donné que l’accès à la profession de médiateur serait subordonné, en Grèce, tant à une formation spécifique qu’à une accréditation, octroyée à un candidat qui a réussi l’examen visé, la Commission considère que la profession des médiateurs relève du champ d’application de la directive 2005/36.

74      Elle estime que l’omission par la République hellénique de désigner les autorités et les organismes compétents habilités à délivrer ou à recevoir les titres de formation et les autres documents ou informations, conformément à l’article 56, paragraphe 3, de cette directive, ne saurait être invoquée pour justifier le non-respect des autres dispositions de ladite directive.

75      S’agissant, en premier lieu, du contenu du certificat de l’organisme de formation que doit fournir un médiateur migrant pour obtenir l’accréditation d’exercer cette profession en Grèce, la Commission observe qu’il résulte de l’arrêté ministériel 109088 modifié qu’une demande de reconnaissance, en Grèce, du titre d’études d’un médiateur étranger doit être accompagnée, notamment, d’un certificat de l’organisme de formation attestant la méthode d’enseignement, du nombre de participants, du nombre et des qualifications des formateurs, de la procédure d’examen et d’évaluation des candidats et des modalités en garantissant l’intégrité. De telles conditions iraient au-delà de ce qui est nécessaire pour évaluer le niveau des connaissances et des qualifications professionnelles que le titulaire est présumé posséder. Par conséquent, les conditions susmentionnées seraient contraires aux articles 13 et 14, à l’article 50, paragraphe 1, ainsi qu’à l’annexe VII de la directive 2005/36.

76      À cet égard, la Commission fait valoir qu’il ressort de l’article 13 de la directive 2005/36 que l’autorité compétente de l’État membre d’accueil accorde l’accès à la profession réglementée aux demandeurs qui possèdent une attestation de compétences ou un titre de formation prescrit par un autre État membre pour accéder à cette même profession sur son territoire ou l’y exercer. Si de telles attestations doivent être délivrées par une autorité compétente dans un État membre et attester d’un certain niveau de qualification professionnelle, il n’en reste pas moins, selon la Commission, que la directive 2005/36 n’exige pas que les diplômes délivrés dans d’autres États membres attestent un enseignement et d’une formation équivalents ou comparables à ceux requis dans l’État membre d’accueil.

77      Selon la Commission, l’article 14 de la directive 2005/36 prévoit que les autorités compétentes de l’État membre d’accueil peuvent inviter le demandeur à fournir des informations concernant sa formation, seulement dans la mesure nécessaire pour comprendre l’existence éventuelle de différences substantielles avec la formation nationale exigée par la réglementation de la République hellénique. Or, selon cette institution, les conditions exigées par la législation nationale ne permettent pas d’examiner si la formation reçue par l’intéressé porte sur des matières substantiellement différentes de celles couvertes par le titre de formation requis sur le territoire grec.

78      Par ailleurs, il résulte de l’article 50, paragraphe 1, de la directive 2005/36 que les autorités compétentes de l’État membre d’accueil peuvent, lors de la procédure de reconnaissance, exiger les documents et les certificats énumérés à l’annexe VII de cette directive, tels que des copies des attestations d’aptitude ou du titre d’études qui donne accès à la profession en cause.

79      Or, la Commission soutient qu’il ressort du point 1, sous b), second alinéa, de ladite annexe VII que les autorités compétentes de l’État membre d’accueil peuvent inviter le demandeur à fournir de telles informations concernant sa formation seulement dans la mesure de ce qui est nécessaire pour comprendre l’existence éventuelle de différences substantielles avec la formation nationale exigée. Partant, selon cette institution, les conditions énoncées par la réglementation grecque méconnaissent tant l’article 14, paragraphe 1, que l’article 50, paragraphe 1, et l’annexe VII de la directive 2005/36.

80      S’agissant, en second lieu des mesures de compensation prévues par la République hellénique, la Commission rappelle que le chapitre A, article unique, paragraphe 5, de l’arrêté ministériel 109088 modifié prévoit que la commission d’accréditation des médiateurs peut, à sa discrétion, demander à l’intéressé de se soumettre à un examen complémentaire, notamment lorsque sa formation a été dispensée en Grèce par un organisme d’origine étrangère.

81      Si la Commission admet que la directive 2005/36 n’exige pas que les critères de tels examens soient énoncés, elle observe, toutefois, que, en l’absence des règles nationales régissant la procédure de l’examen, cette dernière peut s’avérer arbitraire, voire discriminatoire. Partant, elle estime qu’une procédure d’examen sans évaluation préalable des différences substantielles avec la formation nationale requise méconnaît les exigences prévues à l’article 14 de la directive 2005/36.

82      En outre, la Commission fait valoir qu’une des conditions de reconnaissance d’équivalence du titre dans la réglementation nationale est celle de la preuve d’une expérience d’au moins trois participations à des procédures de médiation en tant que médiateur, assistant de médiateur ou conseil de l’une des parties. Or, une telle condition ne serait pas exigée pour les médiateurs formés en Grèce. Selon la Commission, cette condition est discriminatoire et contrevient à l’article 13 de la directive 2005/36.

83      S’agissant de la pratique de l’administration grecque de ne pas appliquer la condition précitée si les éléments d’un dossier concerné permettent de prouver une formation continue et une pratique systématique de la médiation, la Commission observe que l’incompatibilité de la législation nationale avec les dispositions du droit de l’Union ne peut être définitivement éliminée qu’au moyen de dispositions à caractère contraignant, ayant la même valeur juridique que celles qui doivent être modifiées, de telle sorte qu’une pratique administrative ne suffirait pas pour être considérée comme une exécution valable des obligations issues du traité FUE. En tout état de cause, cette institution soutient que, selon la législation grecque, la possibilité de ne pas appliquer le critère d’expérience concerne seulement les intéressés qui ont acquis un titre d’agrément de médiateur au plus tard le 31 décembre 2012.

84      La République hellénique souligne que l’arrêté ministériel 109088 modifié a été abrogé avec l’entrée en vigueur de la loi 4512/2018 et estime, dès lors, que le présent grief n’a plus de sens.

–       Appréciation de la Cour

85      À titre liminaire, en ce qui concerne la délimitation du champ d’application de la directive 2005/36 au regard de la directive 2008/52, il convient de relever, à l’instar de M. l’avocat général au point 46 de ses conclusions, que cette dernière directive n’est pas susceptible d’affecter, au présent cas, l’applicabilité de la directive 2005/36. En effet, si la directive 2008/52 porte sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale, il n’en reste pas moins qu’elle n’opère pas une harmonisation des conditions de l’accès à la profession de médiateur.

86      Cela étant précisé, s’agissant de la question de savoir si la profession de médiateur constitue une « profession réglementée », au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous a), de la directive 2005/36, il y a lieu de rappeler que constitue une « profession réglementée » une activité ou un ensemble d’activités professionnelles dont l’accès, l’exercice ou l’une des modalités d’exercice est subordonné directement ou indirectement, en vertu de dispositions législatives, réglementaires ou administratives, à la possession de qualifications professionnelles déterminées (arrêt du 21 septembre 2017, Malta Dental Technologists Association et Reynaud, C‑125/16, EU:C:2017:707, point 34 ainsi que jurisprudence citée).

87      Ainsi, il résulte de l’article 3, paragraphe 1, sous b), c) et e), de la directive 2005/36 que la notion de « qualifications professionnelles » déterminées, figurant à l’article 3, paragraphe 1, sous a), de cette directive, vise toute qualification correspondant à un titre de formation spécifiquement conçu pour préparer ses titulaires à l’exercice d’une profession donnée (arrêt du 21 septembre 2017, Malta Dental Technologists Association et Reynaud, C‑125/16, EU:C:2017:707, point 35 ainsi que jurisprudence citée).

88      Il y a lieu de constater, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 43 de ses conclusions, que la profession de médiateur, telle que régie en Grèce, remplit les critères énoncés aux points 86 et 87 du présent arrêt, dans la mesure où son accès est subordonné au suivi d’une formation appropriée aux fins d’obtention d’une qualification professionnelle et d’un titre permettant spécifiquement d’exercer cette profession, notamment en vertu de l’article 6, paragraphes 1 et 3, de la loi 3898/2010.

89      En ce qui concerne la compatibilité de la réglementation en cause avec les dispositions de la directive 2005/36, il convient de relever que la reconnaissance des titres de formation des médiateurs est régie par les articles 10 à 14 de cette directive.

90      En vertu de l’article 13, paragraphe 1, de ladite directive, l’autorité compétente de l’État membre d’accueil doit permettre aux demandeurs d’accéder à une profession réglementée et de l’exercer, dans les mêmes conditions que pour ses nationaux, s’ils possèdent une attestation de compétences ou un titre de formation, tel que visé à l’article 11 de la même directive, délivrés par l’autorité compétente d’un autre État membre à cette même fin.

91      Si l’article 14 de la directive 2005/36 prévoit que l’article 13 de celle-ci ne fait pas obstacle à ce que l’État membre d’accueil impose des « mesures de compensation », consistant en un stage d’adaptation ou une épreuve d’aptitude, aux personnes souhaitant accéder à une profession réglementée et l’exercer, il n’en reste pas moins, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 56 de ses conclusions, que ce même article 14 limite cette possibilité à des situations listées à son paragraphe 1.

92      Il ressort de l’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive 2005/36, tout d’abord, que les États membres peuvent imposer des mesures de compensation dans le cas où la formation que le demandeur a reçue porte sur des matières substantiellement différentes de celles couvertes par le titre de formation requis dans l’État membre d’accueil. Ensuite, en vertu du paragraphe 4 du même article, la notion de « matières substantiellement différentes » doit être comprise en tant que matières dont la connaissance, les aptitudes et les compétences acquises sont essentielles à l’exercice de la profession et pour lesquelles la formation reçue par le migrant présente des différences significatives en termes de contenu par rapport à la formation exigée dans l’État membre d’accueil. Enfin, le paragraphe 5 dudit article 14 subordonne la possibilité d’exiger des mesures de compensation au respect du principe de proportionnalité.

93      En outre, il ressort de l’article 50, paragraphe 1, de la directive 2005/36 que l’autorité compétente de l’État membre d’accueil peut exiger les documents et les certificats énumérés à l’annexe VII de cette directive. Le point 1, sous b) et c), de cette annexe indique que la production des attestations qui y sont mentionnées peut être demandée dans les conditions fixées en vertu de ces dernières dispositions.

94      C’est à la lumière de ces observations qu’il convient d’examiner la compatibilité de la réglementation grecque avec la directive 2005/36.

95      S’agissant, en premier lieu, de la procédure de reconnaissance des qualifications académiques, subordonnée à des exigences supplémentaires portant sur le contenu du certificat de l’organisme de formation que doit fournir un médiateur migrant pour obtenir l’accréditation d’exercer cette profession en Grèce, il ressort du chapitre A, article unique, paragraphe 2, sous c), de l’arrêté ministériel 109088 modifié, que la réglementation grecque exige que le certificat de l’organisme de formation, adressé à la commission d’accréditation, contienne une série d’informations, parmi lesquelles figurent également celles renseignant sur le lieu de formation, ainsi que sur la procédure d’examen et d’évaluation des candidats et sur les modalités en garantissant l’intégrité.

96      Or, il y a lieu de constater que, d’une part, les conditions énoncées dans la réglementation grecque ne figurent pas dans la directive 2005/36 et, d’autre part, contrairement aux exigences résultant de l’article 14, de l’article 50, paragraphe 1, et de l’annexe VII, point 1, de cette directive, elles ne sont pas, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 60 de ses conclusions, appropriées pour évaluer, de manière proportionnée, le contenu de la formation suivie par les demandeurs.

97      S’agissant, en second lieu, des mesures de compensation exigées par la République hellénique aux demandeurs d’une accréditation de médiateur qui possèdent des titres d’agrément obtenus à l’étranger ou délivrés par un organisme de formation reconnu de l’étranger à l’issue d’une formation dispensée en Grèce, il convient de relever qu’il ressort de l’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive 2005/36 que l’imposition des mesures de compensation présuppose un examen par lequel l’autorité compétente de l’État membre d’accueil vise à déterminer l’existence éventuelle de différences substantielles entre la formation que le demandeur a reçue et la formation nationale.

98      En l’occurrence, il ressort du chapitre A, article unique, paragraphe 5, de l’arrêté ministériel 109088 modifié que, lorsqu’il s’agit de la reconnaissance de l’équivalence d’un titre d’agrément obtenu à l’étranger ou bien délivré par un organisme de formation étranger à l’issue d’une formation dispensée en Grèce, la commission d’accréditation des médiateurs a la faculté d’admettre cette équivalence si le demandeur peut justifier d’une expérience d’au moins trois participations à des procédures de médiation en tant que médiateur, assistant de médiateur ou conseil d’une des parties. En outre, cette commission peut, à sa discrétion, imposer au demandeur un examen complémentaire, notamment dans le cas où la formation a été dispensée en Grèce.

99      À cet égard, il convient de constater, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 63 de ses conclusions, que de telles conditions ne correspondent pas aux types de critères prévus par la directive 2005/36 et qu’elles excèdent la marge d’appréciation que cette dernière laisse aux autorités compétentes des États membres en ce domaine.

100    En effet, dans la mesure où la réglementation nationale en cause ne prévoit pas d’évaluation préalable visant à établir que le demandeur a reçu une formation portant sur des matières substantiellement différentes de celles couvertes par le titre de formation requis dans l’État membre d’accueil, cette évaluation préalable étant nécessaire, en vertu de l’article 14 de la directive 2005/36, pour qu’une commission d’accréditation puisse exiger des mesures de compensation, il ne saurait être soutenu que cette réglementation nationale est conforme à la directive 2005/36.

101    Par ailleurs, il convient de constater que le chapitre A, article unique, paragraphe 5, de l’arrêté ministériel 109088 modifié méconnaît également les obligations prévues à l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2005/36 dans la mesure où il est exigé des personnes qui demandent une accréditation de médiateur après avoir obtenu un titre d’agrément auprès d’un organisme de formation étranger de justifier d’une expérience d’au moins trois participations à des procédures de médiation, tandis qu’une telle condition d’accréditation ne s’applique pas aux personnes ayant obtenu un titre d’agrément auprès d’un organisme de formation national.

102    Ces considérations ne sauraient être remises en cause par l’argument selon lequel la pratique administrative peut laisser une telle condition inappliquée, dans la mesure où il est constant que, même si, dans la pratique, les autorités d’un État membre n’appliquent pas une disposition nationale contraire au droit de l’Union, la sécurité juridique exige néanmoins que cette disposition soit modifiée (voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2007, Commission/Belgique, C‑522/04, EU:C:2007:405, point 70 ainsi que jurisprudence citée).

103    Il ressort des observations qui précèdent que, en subordonnant la procédure de reconnaissance des qualifications académiques à des exigences supplémentaires concernant le contenu des certificats requis et à des mesures de compensation sans évaluation préalable de l’existence éventuelle de différences substantielles avec la formation nationale, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 13 et 14, de l’article 50, paragraphe 1, ainsi que de l’annexe VII de la directive 2005/36.

104     Par conséquent, il y a lieu de constater que :

–        en limitant la forme juridique des organismes de formation de médiateurs à des sociétés sans but lucratif, qui doivent être constituées conjointement d’au moins une association d’avocats et d’au moins une chambre professionnelle de Grèce, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), ainsi que paragraphe 3, de la directive 2006/123 ;

–         en subordonnant la procédure de reconnaissance des qualifications académiques à des exigences supplémentaires concernant le contenu des certificats requis et à des mesures compensatoires sans évaluation préalable de l’existence éventuelle de différences substantielles avec la formation nationale, et en maintenant en vigueur des dispositions discriminatoires qui obligent les demandeurs d’une accréditation de médiateur qui possèdent des titres d’agrément obtenus à l’étranger ou délivrés par un organisme de formation reconnu de l’étranger à l’issue d’une formation dispensée en Grèce à justifier d’une expérience d’au moins trois participations à une procédure de médiation, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 13 et 14, de l’article 50, paragraphe 1, ainsi que de l’annexe VII de la directive 2005/36.

 Sur les dépens

105    En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de condamner cette dernière aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête :

1)            En limitant la forme juridique des organismes de formation de médiateurs à des sociétés sans but lucratif, qui doivent être constituées conjointement d’au moins une association d’avocats et d’au moins une chambre professionnelle de Grèce, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 15, paragraphe 2, sous b) et c), ainsi que paragraphe 3, de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur ;

–        en subordonnant la procédure de reconnaissance des qualifications académiques à des exigences supplémentaires concernant le contenu des certificats requis et à des mesures compensatoires sans évaluation préalable de l’existence éventuelle de différences substantielles avec la formation nationale, et en maintenant en vigueur des dispositions discriminatoires qui obligent les demandeurs d’une accréditation de médiateur qui possèdent des titres d’agrément obtenus à l’étranger ou délivrés par un organisme de formation reconnu de l’étranger à l’issue d’une formation dispensée en Grèce à justifier d’une expérience d’au moins trois participations à une procédure de médiation, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 13 et 14, de l’article 50, paragraphe 1, ainsi que de l’annexe VII de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 septembre 2005, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, telle que modifiée par la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil, du 20 novembre 2013.

2)      La République hellénique est condamnée aux dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : le grec.