Language of document : ECLI:EU:F:2010:163

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

14 décembre 2010 (*)

«Fonction publique – Fonctionnaires – Nomination – Classement en grade en application des nouvelles règles moins favorables – Articles 2 et 13 de l’annexe XIII du statut – Principe de transparence – Principe de correspondance entre le grade et l’emploi – Interdiction de toute discrimination en raison de l’âge – Devoir de sollicitude – Principe de bonne administration – Principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité – Règle de l’interdiction de la reformatio in pejus – Principe de protection de la confiance légitime – Principe de bonne foi –Principe patere legem quam ipse fecisti»

Dans l’affaire F‑25/07,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Thomas Bleser, fonctionnaire de la Cour de justice de l’Union européenne, demeurant à Nittel (Allemagne), représenté par Mes P. Goergen et M. Wehrheim, avocats,

partie requérante,

contre

Cour de justice de l’Union européenne, représentée initialement par M. M. Schauss, en qualité d’agent, puis par MM. A. V. Placco et M. Glaeser, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mmes M. Arpio Santacruz et M. Simm, en qualité d’agents,

partie intervenante,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE

(deuxième chambre),

composé de MM. P. Mahoney, président, H. Tagaras et S. Van Raepenbusch (rapporteur), juges,

greffier: Mme W. Hakenberg,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 mars 2010,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 mars 2007, M. Bleser, lauréat d’un concours publié avant le 1er mai 2004, demande, premièrement, l’annulation de la décision le nommant fonctionnaire de la Cour de justice des Communautés européennes, en ce que cette décision le classe à un grade inférieur à celui annoncé dans l’avis de concours, deuxièmement, l’annulation de l’article 32 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le «statut»), ainsi que des articles 2 et 13 de l’annexe XIII de celui-ci, troisièmement, la reconstitution de sa carrière et, quatrièmement, l’allocation de dommages et intérêts.

 Cadre juridique

2        Le statut et le régime applicable aux autres agents de l’Union, tels que modifiés par le règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004 (JO L 124, p. 1), sont entrés en vigueur, ainsi que prévu par l’article 2 dudit règlement, le 1er mai 2004.

3        Le règlement n° 723/2004 a introduit un nouveau système de carrières dans la fonction publique européenne en substituant les nouveaux groupes de fonctions d’administrateurs et d’assistants aux anciennes catégories de fonctionnaires A, B, C et D.

4        L’article 5 du statut dispose:

«1. Les emplois relevant du présent statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquelles ils correspondent, en un groupe de fonctions des administrateurs (ci-après dénommés ‘AD’) et un groupe de fonctions des assistants (ci-après dénommés ‘AST’).

2. Le groupe de fonctions AD comporte douze grades correspondant à des fonctions de direction, de conception et d’étude ainsi qu’à des fonctions linguistiques ou scientifiques. Le groupe de fonctions AST comporte onze grades correspondant à des fonctions d’application, de nature technique et d’exécution.

[…]

5. Les fonctionnaires appartenant au même groupe de fonctions sont soumis à des conditions identiques de recrutement et de déroulement de carrière.»

5        L’article 7, paragraphe 1, du statut prévoit:

«L’autorité investie du pouvoir de nomination affecte, par voie de nomination ou de mutation, dans le seul intérêt du service et sans considération de nationalité, chaque fonctionnaire à un emploi de son groupe de fonctions correspondant à son grade.

[…]»

6        L’article 32 du statut dispose:

«Le fonctionnaire recruté est classé au premier échelon de son grade.

L’autorité investie du pouvoir de nomination peut, pour tenir compte de l’expérience professionnelle de l’intéressé, lui accorder une bonification d’ancienneté de 24 mois au maximum. Chaque institution arrête les dispositions générales d’exécution du présent article.

L’agent temporaire dont le classement a été fixé conformément aux critères de classement arrêtés par l’institution garde l’ancienneté d’échelon qu’il a acquise en qualité d’agent temporaire lorsqu’il a été nommé fonctionnaire dans le même grade à la suite immédiate de cette période.»

7        L’article premier de l’annexe XIII du statut prévoit:

«1. Pendant la période comprise entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006, les paragraphes 1 et 2 de l’article 5 du statut sont remplacés par le texte suivant:

‘1. Les emplois relevant du statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquelles ils correspondent, en quatre catégories désignées dans l’ordre hiérarchique décroissant par les lettres A*, B*, C*, D*.

2. La catégorie A* comprend douze grades, la catégorie B* neuf grades, la catégorie C* sept grades et la catégorie D* cinq grades.’

2. Toute référence à la date de recrutement s’entend comme faite à la date d’entrée en service.»

8        L’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut est rédigé comme suit:

«Le 1er mai 2004 et sous réserve de l’article 8 de la présente annexe, les grades des fonctionnaires placés dans l’une des positions visées à l’article 35 du statut sont renommés comme suit:

Ancien grade

Nouveau grade (intermédiaire)

Ancien grade

Nouveau grade (intermédiaire)

Ancien grade

Nouveau grade (intermédiaire)

Ancien grade

Nouveau grade (intermédiaire)

A 1

A*16

      

A 2

A*15

      

A 3/LA 3

A*14

      

A 4/LA 4

A*12

      

A 5/LA 5

A*11

      

A 6/LA 6

A*10

B 1

B*10

    

A 7/LA 7

A*8

B 2

B*8

    

A 8/LA 8

A*7

B 3

B*7

C 1

C*6

  
  

B 4

B*6

C 2

C*5

  
  

B 5

B*5

C 3

C*4

D 1

D*4

    

C 4

C*3

D 2

D*3

    

C 5

C*2

D 3

D*2

      

D 4

D*1

»

9        L’article 2, paragraphe 2, de l’annexe XIII du statut fixe les traitements mensuels de base pour chaque grade et pour chaque échelon. Il prévoit, notamment, que les «nouveaux grades intermédiaires» A*8 à A*10 correspondent, en ce qui concerne la rémunération, aux anciens grades A 6 et A 7.

10      L’article 13, paragraphe 1, de la même annexe prévoit:

«Les fonctionnaires inscrits sur une liste d’aptitude avant le 1er mai 2006 et recrutés après cette date sont classés selon le tableau suivant:

Grade du concours

Grade du recrutement

[…]

[…]

A 7/LA 7 et A 6/LA 6

A*6

AD 6

[…]

[…]

»

 Faits à l’origine du litige

11      Le 16 mars 2004, l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) a publié au Journal officiel de l’Union européenne (JO C 66 A, p. 1) l’avis de concours général EPSO/A/16/04, qui avait pour but de constituer une réserve de recrutement d’administrateurs de grade A 7 ou A 6 dans le domaine de l’informatique pour des emplois vacants au sein des institutions européennes (ci-après l’«avis de concours»).

12      La note 1 de bas de page signalait toutefois:

«Ce concours est publié au niveau A 7/A 6 conformément aux dispositions du statut actuel. Toutefois, la Commission [européenne] a formellement transmis au Conseil [de l’Union européenne] une proposition de modification du statut. Cette proposition comporte notamment un nouveau système de carrière. Les lauréats de ce concours pourront se voir proposer un recrutement sur base des dispositions du statut […], suivant l’adoption de celles-ci par le Conseil. Selon les modalités établies à l’annexe XIII, section 2, articles 11 et 12, du statut […], les grades A 7/LA 7 et A 6/LA 6 sont remplacés, pendant la période de transition du 1er mai 2004 au 30 avril 2006, par le grade A* 6 et après cette date par le grade AD 6.»

13      De plus, au titre «D. Informations générales» de l’avis de concours il était précisé ce qui suit:

«[…]

7. Catégorie et grade

La réserve de recrutement d’administrateurs porte sur les grades 7/6 de la catégorie A.

8. Rémunérations

Traitement de base mensuel à la date du 1er mai 2004: grade A*6 (voir note 1 de bas de page), premier échelon: 4 311,55 euros».

14      Le requérant a réussi les épreuves du concours général EPSO/A/16/04.

15      Le 11 mars 2006, l’autorité investie du pouvoir de nomination de la Cour de justice (ci-après l’«AIPN») a marqué son accord sur une proposition des services concernés tendant à recruter l’intéressé en qualité de fonctionnaire stagiaire au grade A*6, échelon 2, à partir du 1er juillet 2006.

16      Le requérant a reçu, à cet effet, un courrier de la direction du personnel de la Cour de justice, daté du 16 mars 2006, lui demandant s’il acceptait cette nomination. Ce courrier mentionnait un classement au grade A*6 échelon 2 et un traitement de base de 4 623,72 euros.

17      Le requérant a accepté l’emploi proposé et est entré en fonction le 1er juillet 2006 en qualité de fonctionnaire stagiaire.

18      Le 17 juillet 2006, la direction du personnel de la Cour de justice a adressé au requérant une «notification d’engagement» portant détermination de ses droits individuels qui indiquait un classement au grade AD 6, échelon 2.

19      Le 16 octobre 2006, le requérant a introduit, en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut, une réclamation à l’encontre de la décision du 17 juillet 2006. Cette réclamation a été rejetée par l’AIPN par décision du 28 novembre suivant.

 Conclusions des parties et procédure

20      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

«– annuler le classement en grade octroyé dans la décision relative à son recrutement [...] et annuler [...] notamment les articles 2 et 13 de l’annexe XIII et l’article 32 du statut;

– en conséquence, inviter la Cour de justice à reconstituer [s]a carrière [...] (avec valorisation adéquate de son expérience professionnelle dans le classement en grade ainsi rectifié avec droits à l’avancement d’échelon et droits à pension à compter de la décision de recrutement, en partant du grade auquel il aurait dû être nommé sur la base de l’avis de concours, concours à l’issue duquel il a été placé sur la liste de réserve de recrutement, et en le nommant soit au grade figurant dans cet avis, soit au grade équivalent selon le classement prévu par le […] statut (et à l’échelon approprié, conformément aux règles applicables avant le 1er mai 2004), ainsi qu’à l’échelon approprié, compte tenu de sa longue expérience professionnelle;

– [lui octroyer], jusqu’à l’adoption en bonne et due forme de la décision de classement dans un grade correspondant à son expérience professionnelle et à son ancienneté, pour le préjudice matériel qui lui aura été causé, une indemnité égale à la différence totale – soit (sur la base du traitement de base mensuel) 3 370,63 euros, ou subsidiairement 2 738,85 euros, ou plus subsidiairement 1 903,45 euros, ou encore plus subsidiairement 254,52 euros, ou alternativement une somme déterminée à dire d’experts – entre les traitements versés sur la base du classement figurant dans la décision de recrutement et ceux dus sur la base du classement auquel il avait droit, majorée d’intérêts de retard à un taux fondé sur celui fixé par la Banque centrale européenne, jusqu’à la date où interviendra la décision de son classement régulier en grade;

– [lui octroyer], pour le préjudice moral qui lui a été causé, la somme de 10 000 euros, majorée d’intérêts de retard sur la base du taux fixé par la Banque centrale européenne, et courant à compter de la date de son recrutement à la Cour de justice ou subsidiairement à compter de la date à laquelle le présent recours a été introduit, jusqu’à son complet paiement;

– condamner la partie défenderesse à l’entièreté des dépens.»

21      Il ressort, cependant, des développements de la requête que le «recours conteste en outre la décision [...] par laquelle l’AIPN a rejeté [...] la réclamation formée par le requérant».

22      Par ailleurs, en réponse à une question du Tribunal, lors de l’audience, le requérant a précisé que le premier chef de conclusions, dans lequel il demande, notamment, l’annulation de l’article 32 du statut et des articles 2 et 13 de l’annexe XIII de celui-ci, doit se comprendre, à cet égard, comme soulevant des exceptions d’illégalité.

23      La partie défenderesse conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

«– rejeter le recours;

– condamner le requérant aux dépens conformément aux dispositions applicables.»

24      Par courrier déposé au greffe du Tribunal le 24 avril 2007, le Conseil a demandé à intervenir dans l’affaire au soutien des conclusions de la Cour de justice. Le président de la deuxième chambre du Tribunal a fait droit à cette demande par ordonnance du 4 juin 2007.

25      Par son mémoire en intervention, parvenu au greffe du Tribunal le 16 juillet 2007, le Conseil conclut au rejet du recours comme irrecevable ou en tous cas non fondé.

26      Par ordonnance du 16 janvier 2008, le président de la deuxième chambre du Tribunal a décidé de suspendre la procédure jusqu’au prononcé de la décision de la Cour de justice mettant fin à l’instance dans l’affaire C‑443/07 P, Centeno Mediavilla e.a./Commission.

27      Après le prononcé de l’arrêt de la Cour du 22 décembre 2008, Centeno Mediavilla e.a./Commission (C‑443/07 P, Rec. p. I‑10945, ci-après l’«arrêt de la Cour Centeno Mediavilla»), les parties ont été invitées à la demande du Tribunal, par lettre du greffe du 18 mars 2009, à faire part de leurs observations sur les conséquences éventuelles de cet arrêt sur la suite de la procédure. Le Conseil, le requérant et la partie défenderesse ont déféré à cette demande, respectivement les 27 mars, 19 mai et 20 mai 2009.

 Quant au recours en annulation

A –  Sur la recevabilité du recours et de certains chefs de conclusions

1.     Sur la recevabilité du recours dans son ensemble

a)     Arguments des parties

28      Le Conseil, partie intervenante, fait valoir que la nomination et le classement du requérant ont eu lieu sur la base de la décision de recrutement portée à sa connaissance par l’offre d’emploi du 16 mars 2006. Le fait que cette nomination ait été subordonnée à la prise de fonctions effective de l’intéressé le 1er juillet 2006 ne changerait rien à la circonstance que «la notification de la décision au destinataire» prévue par l’article 90, paragraphe 2, du statut a été effectuée par cette offre d’emploi. En conséquence, la réclamation déposée le 16 octobre 2006 l’aurait été hors délai et le présent recours serait irrecevable.

29      Le requérant répond que sa réclamation était dirigée contre la décision de l’engager dont il a pris connaissance le 19 juillet 2006. Cette décision constituerait un acte faisant grief. Il fait, en outre, valoir que l’offre d’emploi et la notification de son engagement étaient rédigées en français, alors qu’il avait indiqué dans la procédure de concours qu’il parlait l’allemand et l’anglais.

b)     Appréciation du Tribunal

30      L’article 90, paragraphe 2, premier alinéa, du statut dispose que la réclamation doit être introduite dans les trois mois «du jour de la notification de la décision au destinataire et en tout cas au plus tard du jour où l’intéressé en a eu connaissance s’il s’agit d’une mesure de caractère individuel».

31      En l’espèce, le courrier de la partie défenderesse du 16 mars 2006, sur lequel le Conseil fonde son exception d’irrecevabilité et qu’il convient d’examiner d’office, a informé le requérant que «l’autorité compétente [l’] a[vait] nommé fonctionnaire stagiaire [...] à partir du 1er juillet 2006». Toutefois, ce même courrier invitait le requérant à «faire savoir [...] s[’il] accept[ait] cette nomination».

32      Il ressort de cette dernière précision que même si le courrier du 16 mars 2006 adressé par la Cour de justice au requérant lui annonce déjà sa nomination, ce courrier ne constitue en réalité qu’une offre d’emploi, qui ne saurait faire courir le délai de réclamation.

33      De plus, si l’article 90, paragraphe 2, du statut prévoit, en effet, que le délai de réclamation peut courir à compter du jour où l’intéressé a eu connaissance de l’acte lui faisant grief, cette disposition, de nature procédurale et destinée à couvrir un grand nombre de situations, doit être interprétée à la lumière des règles fondamentales du statut régissant l’information des fonctionnaires sur les éléments essentiels de leur relation d’emploi, notamment en ce qui concerne la forme que doit prendre cette information (arrêt du Tribunal du 28 juin 2006, Grünheid/Commission, F‑101/05, RecFP p. I‑A‑1‑55 et II‑A‑1‑199, point 56).

34      Or, il ressort de l’économie des règles du statut et, en particulier, des articles 25 et 26 de celui-ci, que les décisions de classement, comme d’ailleurs la décision de nomination, doivent être dûment notifiées à l’intéressé et que l’administration ne saurait se borner à en informer ce dernier par un document qui, à l’instar de l’offre d’emploi de l’espèce, ne ferait que tirer les conséquences de ces décisions, ni s’abstenir de veiller à ce que ce type de décision parvienne effectivement à son destinataire (voir, en ce sens, arrêt Grünheid/Commission, précité, point 49).

35      En effet, imposer au fonctionnaire concerné l’obligation d’introduire une réclamation au plus tard dans les trois mois à compter de la réception d’une offre d’emploi, sans lui permettre d’attendre la notification de l’acte de sa nomination, reviendrait à vider de leur substance les articles 25, deuxième alinéa, et 26, deuxième et troisième alinéas, du statut en ce qui concerne la nomination et le classement en grade qui constituent la base de la carrière de l’intéressé, alors que la finalité de ces articles est précisément de permettre aux fonctionnaires de prendre effectivement connaissance des décisions relatives, notamment, à leur situation administrative et de faire valoir leurs droits garantis par le statut (arrêt Grünheid/Commission, précité, point 52).

36      En l’espèce, il est constant qu’aucun acte de nomination n’a été formellement notifié au requérant.

37      Dans ces conditions, il ne saurait être reproché au requérant de ne pas avoir considéré le courrier du 16 mars 2006 comme faisant courir le délai de réclamation. Le recours est, par conséquent, recevable.

2.     Sur la recevabilité de certains chefs de conclusions

38      Dans son deuxième chef de conclusions, le requérant demande, en substance, au Tribunal d’inviter la partie défenderesse à reconstituer sa carrière en le nommant au grade figurant dans l’avis de concours ou dans un grade équivalent et à un échelon plus approprié compte tenu de son expérience professionnelle.

39      Toutefois, le Tribunal n’est pas compétent pour prononcer une injonction dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 91 du statut. Le deuxième chef des conclusions du recours est donc irrecevable.

40      Par ailleurs, en réponse à la seconde branche du troisième moyen, la partie défenderesse considère que le requérant n’est pas recevable à contester son classement en échelon dans la mesure où il ne l’a pas critiqué dans sa réclamation préalable.

41      Cette question, qui a trait à l’objet du recours plutôt qu’à sa cause, doit être tranchée d’emblée.

42      Il convient, à cet égard, de rappeler que la règle de la concordance entre la réclamation administrative préalable et le recours implique que les conclusions déposées devant le Tribunal doivent avoir le même objet et reposer sur la même cause que celles exposées dans la réclamation (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 16 septembre 1998, Rasmussen/Commission, T‑193/96, RecFP p. I‑A‑495 et II‑1495, point 47, et du 7 juin 2005, Cavallaro/Commission, T‑375/02, RecFP p. I‑A‑151 et II‑673, point 97; arrêts du Tribunal du 11 septembre 2008, Bui Van/Commission, F‑51/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 24, et du 1er juillet 2010, Mandt/Parlement, F‑45/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, points 110 et 119).

43      Or, la réclamation du 16 octobre 2006, a un objet plus limité que celui du recours, puisque l’auteur de la réclamation se borne à y critiquer son classement en grade et n’y conteste pas son classement en échelon.

44      Le requérant n’est donc pas recevable à contester, devant le Tribunal, son classement en échelon.

45      Enfin, le requérant conteste la décision par laquelle l’AIPN a rejeté sa réclamation.

46      Or, il y a lieu de rappeler que les conclusions en annulation formellement dirigées contre le rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée, lorsqu’elles sont, comme telles, dépourvues de contenu autonome (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. 23, point 8; arrêt du Tribunal de première instance du 6 avril 2006, Camόs Grau/Commission, T‑309/03, Rec. p. II‑1173, point 43; arrêt du Tribunal du 11 décembre 2008, Reali/Commission, F‑136/06, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 37).

47      Il convient donc de considérer, même si l’intérêt légitime du requérant à demander l’annulation de la décision portant rejet de sa réclamation en même temps que celle de l’acte lui faisant grief ne peut être nié, que le recours est censé être dirigé contre la décision de le nommer notifiée le 17 juillet 2006, en ce que celle-ci fixe son classement au grade AD 6.

48      En conclusion, il ressort de ce qui précède que le recours est seulement recevable en tant qu’il tend à l’annulation de la décision de nomination en ce que celle-ci fixe le classement en grade du requérant (ci-après la «décision attaquée»).

B –  Sur le fond

49      Le requérant invoque quatre moyens à l’appui de son recours. Au vu de l’ensemble de la requête, ces moyens peuvent être circonscrits de la manière suivante:

–        le premier moyen est tiré de la violation des articles 1 et 2 de l’annexe XIII du statut;

–        le deuxième moyen est tiré de la violation du principe de transparence;

–        le troisième moyen comporte deux branches. La première branche est tirée de la violation du principe de correspondance entre le grade et l’emploi et de la méconnaissance du principe d’égalité. La seconde branche est déduite de la violation de l’interdiction de toute discrimination en raison de l’âge;

–        le quatrième moyen est tiré de la violation, premièrement, du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration, deuxièmement, des droits de la défense, troisièmement, des principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité, quatrièmement, du principe selon lequel la personne introduisant un recours ne peut se trouver dans une position plus défavorable que celle dans laquelle elle se trouverait en l’absence de recours (principe de l’interdiction de la reformatio in pejus), cinquièmement, du principe de confiance légitime, sixièmement, de la règle patere legem quam ipse fecisti et du principe de bonne foi, septièmement, du principe de transparence.

1.     Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 1 et 2 de l’annexe XIII du statut

a)     Arguments des parties

50      Le requérant fait valoir que, selon l’article 1er, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, la catégorie A* ne devait exister que jusqu’au 30 avril 2006. Il en déduit que le classement au grade A*6, échelon 2, figurant dans l’offre d’emploi qui lui a été adressée le 16 mars 2006 était illégal dans la mesure où cette offre concernait un emploi avec prise de fonctions le 1er juillet suivant.

51      Le requérant ajoute que son classement au grade A*6, puis au grade AD 6 en vertu de l’article 13 de l’annexe XIII du statut, viole les dispositions de l’article 2, paragraphe 1, de la même annexe, selon lequel le grade A 6, mentionné dans l’avis de concours, était renommé A*10. La circonstance qu’il ne se trouvait pas dans l’une des positions visées à l’article 35 du statut, comme le prévoient lesdites dispositions, ne ferait pas obstacle à l’application de l’article 2, paragraphe 1, susmentionné, et à la conversion consécutive du grade qui lui avait été proposé.

52      La partie défenderesse répond, d’une part, que l’offre d’emploi du 16 mars 2006 mentionnait un classement au grade A*6 conformément aux dispositions applicables pendant la période transitoire s’étendant du 1er mai 2004 au 30 avril 2006 et, d’autre part, que le requérant a été nommé au grade AD 6 lors de son entrée en service, le 1er juillet 2006, en application des nouvelles règles en vigueur depuis le 1er mai précédent. De plus, la partie défenderesse fait valoir que même si le classement figurant dans l’offre d’emploi était illégal, cette illégalité ne saurait entraîner l’annulation du classement du requérant, lequel a été fixé au moment de son entrée en fonctions, au grade AD 6, conformément à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

53      Par ailleurs, l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ne serait pas applicable au requérant qui a été recruté seulement le 1er juillet 2006. Cette disposition concernerait uniquement les fonctionnaires qui, au 1er mai, 2004, étaient placés dans l’une des positions visées à l’article 35 du statut.

b)     Appréciation du Tribunal

54      S’agissant, en premier lieu, du grief tiré de la violation de l’article 1er de l’annexe XIII du statut, il convient d’observer que, compte tenu de la nature statutaire des relations d’emploi entre la partie défenderesse et ses fonctionnaires, l’offre d’emploi du 16 mars 2006 ne pouvait constituer qu’une simple information, de sorte que sa prétendue illégalité serait inopérante sur la validité du classement du requérant au grade AD 6, opéré le 1er juillet 2006 sur la base de l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

55      De plus, force est d’observer qu’il ressort de l’article 1er de l’annexe XIII du statut et des articles 12 et 13, paragraphe 1, de la même annexe que, le 16 mars 2006, les emplois relevant du statut étaient encore classés en quatre catégories, dont la catégorie A*, et que cette catégorie comprenait douze grades, dont le grade A*6.

56      En toute hypothèse, le requérant n’a pas intérêt à soulever la prétendue illégalité de la mention de ce grade, le statut attaché à l’octroi du grade A*6 durant la période transitoire du 1er mai 2004 au 30 avril 2006 et celui résultant d’une nomination au grade AD 6, à compter du 1er mai 2006, étant identiques.

57      S’agissant, en second lieu, du grief tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, il convient d’observer que cette disposition a seulement pour objet de convertir, durant la période transitoire allant du 1er mai 2004 au 30 avril 2006, les grades attribués à ceux qui avaient déjà la qualité de fonctionnaire le 30 avril 2004 dans la perspective de leur rendre applicable la nouvelle structure de carrière appelée à entrer pleinement en vigueur le 1er mai 2006. L’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ne saurait, dès lors, se voir reconnaître une portée s’étendant au-delà de l’établissement d’une relation intermédiaire entre l’ancien et le nouveau classement en grade des fonctionnaires déjà recrutés le 1er mai 2004 (voir, en ce sens l’arrêt du Tribunal de première instance du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission, T‑58/05, Rec. p. II‑2523, points 112 à 115, ci-après l’«arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla»). Cette disposition n’était donc pas applicable au requérant.

58      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen, tiré de la violation des articles 1 et 2 de l’annexe XIII du statut, n’est pas fondé.

2.     Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation du principe de transparence

a)     Argument des parties

59      Le requérant soulève une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut en ce qu’il violerait le principe de transparence.

60      Le requérant soutient, en premier lieu, que le principe de transparence est violé en ce que l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut entre en contradiction avec l’article 2, paragraphe 1, de la même annexe. En effet, l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ferait correspondre le grade A 6, mentionné dans l’avis de concours, au grade AD 6, alors que selon l’article 2, paragraphe 1, de la même annexe cette correspondance s’établirait avec le grade A*10.

61      Le requérant relève, en second lieu, que la décision attaquée l’a classé trois ou quatre grades en dessous de ceux indiqués dans l’avis de concours, ce qui illustrerait ainsi la contradiction existant entre l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut et l’article 31, paragraphe 1, du statut.

62      La partie défenderesse répond qu’une règle de droit ne saurait prévaloir sur une autre règle de même rang. Les règles de droit de même rang devraient être lues ensemble et appliquées de manière à leur assurer une application cohérente.

63      Le Conseil relève, pour sa part, que le requérant ne précise ni le fondement sur lequel reposerait le principe de transparence qu’il invoque ni le contenu de ce principe. Il ajoute que les articles 2 et 13 de l’annexe XIII du statut ont chacun un champ d’application ratione personae différent. L’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ne serait applicable qu’aux fonctionnaires qui se trouvaient, à la date du 1er mai 2004, dans l’une des positions visées à l’article 35 du statut. Il s’expliquerait par la volonté du législateur de rendre la nouvelle structure des carrières applicable à tous les fonctionnaires, en ce compris les fonctionnaires déjà en service au moment de la réforme statutaire. Pour y parvenir, le législateur aurait renommé les grades de ces fonctionnaires selon le tableau figurant dans cette disposition, mais aurait affecté la nouvelle grille des salaires afférents à ces grades d’un facteur de multiplication pour le calcul de la rémunération des intéressés. En revanche, l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ne s’appliquerait qu’aux fonctionnaires recrutés après le 1er mai 2006.

64      Le Conseil souligne encore que l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut constitue une lex specialis par rapport à l’article 31, paragraphe 1, du statut. Cette disposition transitoire aurait été nécessaire pour établir une correspondance entre, d’une part, les grades indiqués dans les avis de concours publiés avant le 1er mai 2004 et qui n’existaient plus après cette date et, d’autre part, les grades qui pouvaient être conférés après celle-ci.

b)     Appréciation du Tribunal

65      Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur le point de savoir si la cohérence des dispositions législatives constitue, au titre de la transparence, un principe général du droit dont la violation serait susceptible d’être invoquée de manière autonome, il suffit de constater que l’article 31 du statut, ainsi que l’article 2, paragraphe 1, et l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, ont une même valeur réglementaire, de sorte que les premiers ne sauraient prévaloir sur le dernier.

66      Au contraire, en tant que disposition transitoire de caractère spécial, l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut peut insérer une dérogation à la règle de caractère général prévue à l’article 31 du statut applicable à une catégorie déterminée de fonctionnaires (voir, en ce sens et à propos de l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, point 101).

67      Par ailleurs, l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut concerne seulement ceux qui avaient déjà la qualité de fonctionnaire le 30 avril 2004 (voir point 57 ci-dessus), tandis que l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ne s’applique qu’aux fonctionnaires recrutés après le 1er mai 2006. Ces deux dispositions ont ainsi chacune un champ d’application personnel différent.

68      Il s’ensuit qu’il n’y a aucune contradiction et, partant, aucune incohérence entre l’article 31 du statut et l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, d’une part, et l’article 13, paragraphe 1, de la même annexe, d’autre part.

69      Le deuxième moyen, tiré d’une violation d’un prétendu principe de transparence n’est donc, en toute hypothèse, pas fondé.

3.     Sur le troisième moyen

a)     Sur la première branche du troisième moyen, tirée de la violation du principe de correspondance entre le grade et l’emploi et de la méconnaissance du principe d’égalité

 Arguments des parties

70      Le requérant fait valoir que le grade AD 6 qui lui a été conféré ne correspond à aucun des grades prévus dans l’ancien statut et que les travaux préparatoires du règlement n° 723/2004 ont souligné l’importance de l’interdiction de toute discrimination dans l’évolution de la carrière des fonctionnaires.

71      Or, les fonctionnaires nommés après le 1er mai 2006 auraient été recrutés dans des conditions moins favorables que celles offertes aux fonctionnaires qui ont été engagés avant cette date sur la base du même concours.

72      De plus, l’entrée en vigueur des dispositions transitoires de l’annexe XIII du statut, le 1er mai 2004, aurait gravement discriminé les fonctionnaires engagés après cette date mais qui s’étaient inscrits à un concours sur la base des dispositions de l’ancien statut, alors en vigueur.

73      Le requérant s’estime, en conséquence, victime d’une violation du principe d’égalité et d’une violation du principe de correspondance entre le grade et l’emploi.

74      Le Conseil considère que le grief tiré du principe de correspondance entre le grade et l’emploi n’est pas recevable dans la mesure il ne ferait l’objet d’aucun développement dans la requête.

75      La partie défenderesse répond, quant à elle, que la correspondance entre le grade et l’emploi est prévue à l’article 7 du statut. Rappelant le principe de la hiérarchie des normes, elle soutient que cette disposition ne saurait prévaloir sur l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

76      S’agissant du principe d’égalité qui aurait été méconnu, la partie défenderesse et le Conseil contestent l’existence d’une différence de traitement et, partant, d’une discrimination, entre les fonctionnaires recrutés entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006, d’une part, et ceux qui ont été engagés après cette dernière date, d’autre part.

77      Dans la mesure où le requérant se prévaudrait plutôt d’une inégalité de traitement entre fonctionnaires recrutés sur la base du même concours selon qu’ils ont été recrutés avant ou après le 1er mai 2004, la partie défenderesse et le Conseil déduisent des arrêts Centeno Mediavilla de la Cour et du Tribunal de première instance que les fonctionnaires recrutés avant cette date ne se trouvent pas dans la même situation juridique que les fonctionnaires recrutés après cette date et que ces derniers peuvent donc être traités différemment des premiers.

 Appréciation du Tribunal

78      Sans qu’il soit nécessaire d’examiner la question de savoir si le grief tiré du principe de correspondance entre le grade et l’emploi est recevable, il suffit de constater que ce principe est consacré par l’article 7, paragraphe 1, du statut et qu’il n’a pas, comme tel, de force obligatoire supérieure à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut sur la base duquel l’AIPN a déterminé le grade du requérant sans disposer d’aucun pouvoir d’appréciation.

79      Il s’ensuit que le requérant ne peut invoquer valablement une prétendue violation du principe de correspondance entre le grade et l’emploi pour obtenir l’annulation de la décision attaquée.

80      S’agissant de la prétendue violation du principe d’égalité, il convient d’observer qu’aucun fonctionnaire n’a été recruté sur la base du concours EPSO/A/16/04 avant le 1er mai 2004 et que l’annexe XIII du statut n’opère aucune différence de traitement entre les fonctionnaires issus d’un même concours, recrutés entre le 1er mai 2004 et le 30 avril 2006, d’une part, et ceux qui, comme le requérant, ont été engagés après cette dernière date, d’autre part.

81      Dans la mesure où le requérant compare les grades attribués avant le 1er mai 2004 et après le 1er mai 2006, il y a lieu de relever que les fonctionnaires recrutés à ces différents moments ne se trouvaient pas dans la même situation de fait et de droit et qu’ils ne devaient, dès lors, pas être traités de la même manière eu égard à la réforme statutaire intervenue entre ces deux dates.

82      À cet égard, le Tribunal de première instance a considéré, dans son arrêt Centeno Mediavilla (points 77, 79 et 80), que, à partir du 1er mai 2004, le classement en grade des lauréats de concours ne pouvait être légalement effectué qu’en application des nouveaux critères, tandis que les lauréats nommés avant cette date ont nécessairement dû être classés en grade sur le fondement des anciens critères encore en vigueur à la date de leur nomination mais abolis depuis, du fait de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions statutaires. En conséquence, le Tribunal de première instance a jugé que les lauréats recrutés avant et après le 1er mai 2004 ne pouvaient pas être regardés comme relevant d’une même catégorie de fonctionnaires.

83      Sur pourvoi, la Cour a jugé, dans son arrêt Centeno Mediavilla (point 79), que «le législateur, en adoptant l’article 12, paragraphe 3, de l’annexe XIII du statut, duquel il résulte une différence de traitement entre les fonctionnaires lauréats d’un même concours recrutés, respectivement, avant et après la réforme, n’a pas violé [le] principe [général d’égalité de traitement], dès lors que le traitement différencié affecte des fonctionnaires ne faisant pas partie d’une seule et même catégorie.»

84      L’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ayant une portée comparable à celle de l’article 12, paragraphe 3, de la même annexe, il ressort de ce qui précède que le requérant invoque vainement la violation du principe d’égalité en ce qu’il aurait été traité différemment des lauréats du même concours que le sien, recrutés avant l’entrée en vigueur de la réforme statutaire.

85      Au demeurant, sous peine d’empêcher toute évolution législative, le principe d’égalité ne saurait entraver la liberté du législateur d’apporter à tout moment aux règles statutaires les modifications qu’il estime conformes à l’intérêt du service, même si ces dispositions s’avèrent moins favorables pour les fonctionnaires que les anciennes (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 30 septembre 1998, Ryan/Cour des comptes, T‑121/97, Rec. p. II‑3885, points 98 et 104; du 29 novembre 2006, Campoli/Commission, T‑135/05, RecFP p. I‑A‑2‑297 et II‑A‑2‑1527 point 105, et Centeno Mediavilla, points 86 et 113; arrêt du Tribunal du 19 juin 2007, Davis e.a./Conseil, F‑54/06, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 81).

86      La première branche du troisième moyen, tirée de la violation du principe de correspondance entre le grade et l’emploi et de la méconnaissance du principe d’égalité, n’est donc pas fondée.

b)     Sur la seconde branche du troisième moyen, tirée de la violation de l’interdiction de toute discrimination en raison de l’âge

 Arguments des parties

87      Le requérant fait valoir que, selon le 11ème considérant du règlement n° 723/2004, le nouveau système de carrière, introduit par la réforme statutaire, impliquait une meilleure reconnaissance de l’expérience professionnelle des fonctionnaires. Or, sa propre expérience professionnelle n’aurait pas été prise en compte. Ainsi, deux des quatre fonctionnaires recrutés par la partie défenderesse sur la base du concours EPSO/A/16/04 auraient été recrutés au même grade et au même échelon que lui, alors que leurs expériences professionnelles respectives étaient nettement inférieures à la sienne. L’expérience professionnelle étant, selon lui, liée à l’âge et son classement au grade AD 6, échelon 2, résultant de l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut et de l’article 32 de celui-ci, il en déduit que ces dispositions et la décision attaquée violent l’interdiction de toute discrimination en raison de l’âge.

88      Le requérant prétend, en outre, que d’autres fonctionnaires, investis des mêmes responsabilités que lui et justifiant d’une expérience professionnelle comparable à la sienne, ont été classés à un grade supérieur uniquement parce qu’ils ont été recrutés avant 1er mai 2004. Il estime que cette discrimination trouve son origine dans le fait que les intéressés ont acquis leur expérience professionnelle au sein des institutions de l’Union et non, comme lui, dans le secteur privé.

89      La partie défenderesse et le Conseil contestent, tout d’abord, la recevabilité du grief. Ils considèrent que celui-ci manque de clarté et de précision, dans la mesure où le requérant y soulèverait tantôt l’illégalité de l’article 32 du statut et de l’article 13, paragraphe 1, de son annexe XIII, tantôt, seulement une application incorrecte de ces dispositions.

90      En toute hypothèse, la partie défenderesse fait valoir que l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut se limite, pour les fonctionnaires inscrits sur une liste de réserve avant le 1er mai 2006 et recrutés après cette date, à établir une correspondance entre les anciens grades, prévus dans les avis de concours publiés avant le 1er mai 2004, et le grade conféré lorsque le recrutement a été effectué postérieurement à la réforme statutaire. La partie défenderesse concède que le classement en grade ne prend en compte ni l’expérience professionnelle ni l’âge des intéressés, mais elle souligne que ces éléments ne sont pas moins pris en compte que dans l’article 31 du statut. En effet, l’intention du législateur aurait été d’adapter le classement en grade aux exigences de l’emploi à pourvoir et non à l’expérience professionnelle personnelle des candidats recrutés. Selon la partie défenderesse, ce choix du législateur ne pourrait être contesté qu’à condition de démontrer qu’il aurait pour conséquence une discrimination arbitraire manifestement inadéquate au regard des objectifs poursuivis par la réglementation en cause. Or le requérant resterait en défaut de fournir cette démonstration. La partie défenderesse et le Conseil relèvent que, au demeurant, le classement du requérant n’est que la conséquence du fait qu’il a décidé de participer à un concours nécessitant seulement trois ans d’expérience professionnelle.

91      Enfin, la partie défenderesse soutient que l’âge n’est pas le critère déterminant du classement en échelon mais que celui-ci est fixé en fonction de l’expérience professionnelle de l’intéressé. Elle ajoute que, en vertu de l’article 32 du statut, le fonctionnaire recruté est classé au premier échelon de son grade, mais que l’AIPN peut tenir compte de son expérience professionnelle pour lui accorder une bonification d’ancienneté de 24 mois au maximum. Tel aurait été le cas en l’espèce, puisque cette bonification a été accordée au requérant.

 Appréciation du Tribunal

92      En substance et, contrairement à ce que soutiennent la partie défenderesse et le Conseil, sans que ses arguments soient obscurs ou imprécis, le requérant conteste la légalité de la décision attaquée et celle de son classement en échelon au motif que l’article 32 du statut et l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII de celui-ci méconnaîtraient l’interdiction de toute discrimination en raison de l’âge et que ces dispositions lui auraient, à cet égard, été appliquées incorrectement.

93      Il ressort, cependant, des points 40 et suivants ci-dessus que le recours n’est pas recevable en tant qu’il porte sur le classement en échelon du requérant. Partant, il n’y a pas lieu d’examiner la compatibilité de l’article 32 du statut, qui règle le classement en échelon, avec l’interdiction de toute discrimination en raison de l’âge.

94      S’agissant du classement en grade du requérant sur la base de l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, il a été exposé au point 85 du présent arrêt que le principe d’égalité ne peut entraver la liberté du législateur d’apporter à tout moment aux règles statutaires les modifications qu’il estime conformes à l’intérêt du service, même si les nouvelles dispositions s’avèrent moins favorables que les précédentes pour les fonctionnaires.

95      Aussi, le législateur a-t-il pu, dans le cadre de la réforme du statut, d’une part, disposer que les lauréats des concours pour lesquels un recrutement au grade A 7 ou A 6 avait été prévu avant le 1er mai 2004 seraient désormais engagés au grade AD 6 et, d’autre part, réduire, à cette occasion, les rémunérations qui étaient afférentes à ces grades.

96      En procédant de la sorte, le législateur n’a pas violé le principe d’égalité et, en particulier, l’interdiction de toute discrimination en raison de l’âge, dès lors que le tableau de correspondance des grades figurant à l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut et les traitements mensuels de base sont manifestement étrangers à toute prise en considération, directe ou indirecte, de l’âge des intéressés (voir, en ce sens, arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, point 83; arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, point 89).

97      De plus, conformément à la règle qui découle de l’article 7, paragraphe 1, de l’article 27, premier alinéa, et de l’article 29, paragraphe 1, du statut, en vertu de laquelle le niveau des emplois est fixé en fonction de leur nature, de leur importance et de leur ampleur, indépendamment des qualifications des intéressés, le tableau de correspondance des grades, susmentionné, distingue le grade de base AD 5 du grade immédiatement supérieur AD 6, auquel le requérant a, au demeurant, été nommé, afin de tenir compte de l’expérience requise pour les emplois de ce niveau.

98      Il ne saurait, dès lors, être soutenu que l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut s’oppose à la prise en considération de l’expérience professionnelle; il impose au contraire à l’AIPN d’en tenir compte dans l’intérêt du service, lors de la détermination, de manière objective et au début de la procédure de recrutement, du niveau des emplois à pourvoir.

99      Le requérant prétend encore que l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut discriminerait les fonctionnaires qui ont acquis une partie de leur expérience professionnelle dans le secteur privé.

100    À supposer que ce grief puisse être rattaché à l’interdiction de toute discrimination fondée sur l’âge, il y a lieu d’observer que l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ne base pas le classement en grade des fonctionnaires sur le type d’expérience professionnelle acquise par ceux-ci, mais sur les exigences objectives des emplois à pourvoir, compte tenu de la nouvelle structure des grades.

101    Il découle de ce qui précède que le législateur n’a pas méconnu l’interdiction de toute discrimination en raison de l’âge en adoptant l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

102    Dans la mesure où le requérant invoque l’illégalité de son classement en grade, en tant que tel, il convient d’observer que ce classement est la conséquence immédiate de l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, qui ne laissait aucun pouvoir d’appréciation à l’AIPN.

103    De plus, l’avis de concours précisait notamment, au paragraphe 2 «Expérience professionnelle» du point II «Conditions d’admission (profil requis)» de son titre A, que «[l]es candidats d[evai]ent avoir acquis, postérieurement au diplôme donnant accès au concours, une expérience professionnelle d’une durée minimale de trois ans à temps complet en rapport avec la nature des fonctions». Aucun traitement défavorable n’était ainsi réservé à l’expérience professionnelle acquise dans le secteur privé. En outre, il ressort de cette condition d’admission au concours auquel le requérant s’est porté candidat, et sur le fondement duquel son classement en grade a été fixé, que ce classement est la conséquence de sa décision de participer à un concours nécessitant seulement trois ans d’expérience professionnelle, alors qu’il prétend en compter davantage.

104    Dans ce contexte, il n’apparaît pas que la décision attaquée ait, en tant que telle, méconnu l’interdiction de toute discrimination en raison de l’âge.

105    Le troisième moyen, en sa seconde branche, est, en conséquence, mal fondé.

c)     Sur le quatrième moyen, tiré de la violation, premièrement du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration, deuxièmement, des droits de la défense, troisièmement, des principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité, quatrièmement, de l’interdiction de la reformatio in pejus, cinquièmement, du principe de confiance légitime, sixièmement, de la règle patere legem quam ipse fecisti et du principe de bonne foi, septièmement, du principe de transparence

 Arguments des parties

106    Le requérant soutient, premièrement, que le devoir de sollicitude a été violé dans la mesure où la partie défenderesse aurait dû lui garantir, d’une part, un recrutement dans l’un des deux grades mentionnés dans l’avis de concours et, d’autre part, la prise en considération de son âge et de son expérience professionnelle pour l’attribution de son échelon. En outre, l’AIPN aurait méconnu ce même devoir en ne tenant pas suffisamment compte de ses intérêts lorsqu’elle a commis les autres irrégularités exposées dans la requête et dans la mesure où la procédure de recrutement a nui aux relations de travail.

107    Il estime, deuxièmement, que les droits de la défense n’ont pas été respectés en ce qu’il n’a pas été entendu dans une langue qu’il maîtrise.

108    Le requérant prétend, troisièmement, que son classement au grade A*6, puis au grade AD 6, constitue une violation des principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité, en ce que ces deux principes interdiraient d’appliquer des règles nouvelles à des situations antérieures à leur entrée en vigueur. S’étant porté candidat à un concours de recrutement aux grades A 7 ou A 6 et son droit d’être recruté à l’un de ces grades étant né au plus tard au moment de son inscription sur la liste de réserve dudit concours, soit le 9 novembre 2005, il estime qu’il aurait dû être classé au nouveau grade A*10 en vertu de l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut. Le requérant conteste, à cet égard, l’enseignement de l’arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla (points 58 et suivants) selon lequel un fonctionnaire, confronté à la réforme du statut, ne peut invoquer la protection des droits acquis que si sa nomination est antérieure à la réforme statutaire. Le requérant considère, au contraire, que la partie défenderesse était déjà liée par l’avis de concours.

109    Il allègue, quatrièmement, que compte tenu des conditions de recrutement figurant dans l’avis de concours, la procédure de recrutement ne pouvait aboutir à une détérioration des conditions d’engagement en vertu de l’interdiction de la reformatio in pejus et qu’en conséquence la décision attaquée méconnaîtrait cette interdiction.

110    Le requérant fait valoir, cinquièmement, que la décision attaquée méconnaîtrait la confiance légitime qu’il avait pu placer dans l’indication des grades de recrutement figurant dans ledit avis de concours.

111    La partie défenderesse aurait violé, sixièmement, le principe de bonne foi et la règle patere legem quam ipse fecisti, en vertu de laquelle l’administration est liée par ses propres actes. La décision attaquée méconnaîtrait, en effet, les termes de l’avis de concours et l’offre d’emploi qui lui a été adressée le 16 mars 2006. En outre, les actes qui lui ont été notifiés ont été rédigés en langue française, alors qu’il aurait fait choix de l’allemand et de l’anglais dans le cadre du concours litigieux.

112    Enfin, le requérant prétend, septièmement, que le principe de transparence a été méconnu dans la mesure où la référence à la réforme statutaire figurant dans l’avis de concours n’exposait pas les conséquences de celle-ci. Il relève, en outre, que l’avis de concours précisait que la réserve de recrutement était destinée à pourvoir des postes d’administrateurs, classés aux grades 6 ou 7 de la catégorie A, mais que la rémunération indiquée était celle correspondant au grade applicable après la réforme statutaire. Enfin, le principe de transparence aurait été violé par le fait que le même grade de recrutement aurait été assorti d’une rémunération différente selon que le recrutement serait intervenu avant ou après le 1er mai 2006.

113    La partie défenderesse répond, premièrement, que le principe de bonne administration, le devoir de sollicitude et le principe de bonne foi trouvent leur limite dans le respect des normes en vigueur. Ainsi, l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ne laissant aucune marge d’appréciation à la partie défenderesse, celle-ci n’aurait pu accorder au requérant un classement plus favorable que celui prescrit par cette disposition.

114    La partie défenderesse estime, deuxièmement, que le grief tiré de la violation des droits de la défense n’est pas développé et qu’il est, en conséquence, irrecevable. Il serait, en tout état de cause, inopérant puisque l’AIPN avait compétence liée pour prendre la décision attaquée en conformité avec l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

115    La partie défenderesse et le Conseil objectent, troisièmement, que les principes de protection de la confiance légitime, de sécurité juridique, de transparence et d’interdiction de la reformatio in pejus ne sauraient empêcher qu’une nouvelle réglementation s’applique aux effets futurs de situations nées sous l’empire de la réglementation antérieure. Il ne saurait, d’ailleurs, être question de reformatio in pejus, puisque l’AIPN a seulement appliqué les dispositions qui étaient en vigueur au moment du recrutement du requérant. De plus, l’arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla aurait confirmé qu’un fonctionnaire ne peut se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime pour s’opposer à la légalité d’une nouvelle disposition réglementaire. De surcroît, il ressortirait également de cet arrêt qu’un avis de concours ne confère pas au lauréat un droit à un classement déterminé.

116    Selon la partie défenderesse, le requérant ne saurait, en particulier, se plaindre d’une violation du principe patere legem quam ipse fecisti, dès lors que l’avis de concours annonçait une modification statutaire, que ces modifications ont été publiées au Journal officiel du 27 avril 2004 et que l’intéressé a accepté l’offre d’emploi qui lui a été faite.

 Appréciation du Tribunal

117    Il convient d’examiner successivement les différents griefs soulevés par le requérant.

118    Force est néanmoins de rappeler, à titre liminaire, qu’il ressort des points 38 et suivants du présent arrêt que le recours n’est pas recevable en tant qu’il porte sur le classement en échelon du requérant. Partant, il n’y a pas lieu d’examiner la question de savoir si la partie défenderesse a méconnu les devoirs de sollicitude et principes invoqués à l’appui du quatrième moyen lors du classement en échelon.

–       Sur le premier grief, tiré de la violation du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration

119    Le principe de bonne administration n’a pas une intensité de force obligatoire supérieure à celle d’un règlement (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 22 juin 1994, Rijnoudt et Hocken/Commission, T‑97/92 et T‑111/92, RecFP p. I‑A‑159 et II‑511, point 104, et Campoli/Commission, précité, point 149; arrêt du Tribunal du 23 janvier 2007, Chassagne/Commission, F‑43/05, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 111). Il en va de même du devoir de sollicitude de l’administration à l’égard de ses agents qui reflète l’équilibre des droits et des obligations réciproques que le statut a créé dans les relations entre l’autorité publique et les agents du service public et qui, dès lors, doit toujours trouver sa limite dans le respect des normes en vigueur (arrêt du Tribunal de première instance du 27 mars 1990, Chomel/Commission, T‑123/89, Rec. p. II‑131, point 32).

120    Le principe de bonne administration et le devoir de sollicitude ne sauraient donc fonder une exception d’illégalité à l’encontre de l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

121    En outre, et pour autant que le grief doive être interprété comme étant directement dirigé contre la décision attaquée, il convient d’observer que, en raison de la place qu’occupent ainsi le principe de bonne administration et le devoir de sollicitude dans la hiérarchie des normes, le requérant ne peut prétendre obtenir sur leur base un résultat différent de celui découlant de l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut, dès lors que la partie défenderesse est liée par ces dispositions (voir, en ce qui concerne le devoir de sollicitude, arrêt du Tribunal de première instance du 2 mars 2004, Di Marzo/Commission, T‑14/03, RecFP p. I‑A‑43 et II‑167, point 100).

122    Il s’ensuit que le premier grief, tiré du principe de bonne administration et du devoir de sollicitude, n’est pas fondé.

–       Sur le deuxième grief, tiré de la violation des droits de la défense

123    Il convient de rappeler qu’il faut, pour qu’une violation des droits de la défense puisse être retenue, que, en l’absence de cette irrégularité, la procédure ait pu aboutir à un résultat différent (arrêt du Tribunal de première instance du 23 avril 2002, Campolargo/Commission, T‑372/00, RecFP p. I‑A‑49 et II‑223, point 39). Or, en l’espèce, l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut liait entièrement l’AIPN et le classement en grade du requérant n’aurait pu être différent.

124    En toute hypothèse, et dans la mesure où le requérant critique la langue dans laquelle il a été répondu à sa réclamation, la jurisprudence est fixée en ce sens que, si le destinataire d’une décision de rejet d’une réclamation ne peut en prendre utilement connaissance en raison de la langue dans laquelle elle est rédigée, il lui appartient de demander à l’institution, avec toute la diligence requise, de lui fournir une traduction soit dans la langue de la réclamation, soit dans sa langue maternelle. Dans ce cas, l’utilisation d’une autre langue implique que le délai de recours ne commence à courir qu’à compter de la date à laquelle la traduction est notifiée à l’intéressé (arrêt du Tribunal de première instance du 7 février 2001, Bonaiti Brighina/Commission, T‑118/99, RecFP p. I‑A‑25 et II‑97, points 18 et 19; arrêt du Tribunal du 3 mars 2009, Patsarika/Cedefop, F‑63/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 31). Le requérant n’ayant pas, en l’espèce, formulé une telle demande de traduction, alors qu’il le pouvait sans nuire à ses possibilités de recours, il ne saurait critiquer, devant le Tribunal, la langue utilisée par l’AIPN pour répondre à sa réclamation.

125    Le deuxième grief, tiré de la violation des droits de la défense, n’est donc pas fondé.

–       Sur le troisième grief, tiré de la violation des principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité

126    L’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut est isssu du règlement n° 723/2004 lequel est entré en vigueur le 1er mai 2004, soit à une date postérieure à celle de sa publication, le 27 avril précédent. Il ne peut donc être tenu pour rétroactif.

127    En outre, en ce qu’il définit de nouveaux critères de classement en grade applicables lors du recrutement des lauréats de concours publiés avant le 1er mai 2004, inscrits sur des listes d’aptitude antérieurement au 1er mai 2006 et recrutés après cette date, l’article 13, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut est conforme au principe selon lequel, en cas de modification de dispositions d’application générale et, singulièrement, de dispositions statutaires, la règle nouvelle s’applique immédiatement aux effets futurs des situations juridiques, qui sont nées, sans être cependant entièrement constituées, sous l’empire de la règle antérieure (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, point 51, confirmé par l’arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, points 61 et 62).

128    En effet, un droit est seulement considéré comme acquis lorsque le fait générateur de celui-ci s’est produit avant la modification législative (arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, point 63). S’agissant du classement en grade d’un lauréat de concours général, il convient de rappeler que ce classement ne peut être considéré comme acquis aussi longtemps que l’intéressé n’a pas fait l’objet d’une décision de nomination en bonne et due forme (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, point 53, confirmé par l’arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, point 64). Or, force est de constater que, à la date d’entrée en vigueur de la réforme statutaire, le requérant n’était que candidat au concours EPSO/A/16/04 et n’avait donc même pas, en cette seule qualité de candidat, la simple vocation à être nommé fonctionnaire stagiaire.

129    Enfin, force est de relever que le principe de sécurité juridique, également invoqué par le requérant, ne trouve à s’appliquer à une situation du type de celle ici en cause que lorsqu’un acte réglementaire voit son point de départ fixé à une date antérieure à sa publication et que les règles qu’il comporte visent des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur, hypothèses étrangères au cas d’espèce (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, point 60).

130    En dernier lieu, il convient de rappeler que, ainsi qu’indiqué au point 57 du présent arrêt, le requérant ne peut revendiquer le bénéfice de l’article 2, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut.

131    Le troisième grief, tiré de la violation des principes de sécurité juridique et de non-rétroactivité, n’est donc pas fondé.

–       Sur le quatrième grief, tiré de la violation du principe de l’interdiction de la reformatio in pejus

132    À supposer même que le principe de l’interdiction de la reformatio in pejus puisse être invoqué dans un contentieux non pénal, cette interdiction ne saurait, en toute hypothèse, être opposée ni au législateur, lorsqu’il modifie les règles statutaires, ni à l’administration, lorsqu’elle fixe le classement en grade des fonctionaires. En effet cette interdiction est étroitement liée au principe dispositif, lequel implique la libre disposition par les parties de l’objet de leur recours, alors que le classement en grade n’est pas déterminé à l’occasion de l’exercice d’une voie de recours.

133    Au demeurant, l’interdiction de la reformatio in pejus est sous-tendue par les principes du respect des droits de la défense, de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime (arrêt de la Cour du 25 novembre 2008, Heemskerk et Schaap, C‑455/06, Rec. p. I‑8763, point 47). Or, il ressort des points 123 et suivants et 129 et suivants ci-dessus, ainsi que des points 135 et suivants du présent arrêt, que ces trois principes n’ont pas été méconnus.

134    Le quatrième grief, tiré de la violation du principe de l’interdiction de la reformatio in pejus, n’est donc pas fondé.

–       Sur le cinquième grief, tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime

135    En premier lieu, il convient de rappeler qu’un fonctionnaire ne saurait se prévaloir du principe de protection de la confiance légitime pour s’opposer à la légalité d’une disposition réglementaire nouvelle, surtout dans un domaine dans lequel le législateur dispose, comme en l’espèce, d’un large pouvoir d’appréciation quant à la nécessité de réformes statutaires (arrêt du Tribunal de première instance Centeno Mediavilla, point 95).

136    En deuxième lieu, il convient de rappeler également que le droit de réclamer la protection de la confiance légitime suppose, notamment, que les assurances données soient conformes aux normes applicables (arrêts du Tribunal de première instance du 11 juillet 2002, Wasmeier/Commission, T‑381/00, RecFP p. I‑A‑125 et II‑677, point 106; du 4 mai 2005, Castets/Commission, T‑398/03, RecFP p. I‑A‑109 et II‑507, point 34; du 23 février 2006, Cementbouw Handel & Industrie/Commission, T‑282/02, Rec. p. II‑319, point 77, et du 4 février 2009, Omya/Commission, T‑145/06, Rec. p. II‑145, point 117).

137    Or, il ressort de la jurisprudence que l’AIPN aurait pris une décision illégale, parce que non conforme au statut, en classant le requérant, après le 1er mai 2004, selon les dispositions de l’ancien statut relatives aux grades et aux carrières qui n’étaient plus en vigueur (voir, en ce sens, arrêt de la Cour Centeno Mediavilla, point 100).

138    Le requérant ne peut, par conséquent, se fonder sur l’avis de concours pour établir l’existence, dans son chef, d’une confiance légitime en un classement conforme aux grades indiqués dans ledit avis de concours.

139    En troisième lieu, le Tribunal de première instance a rappelé, dans son arrêt Centeno Mediavilla (points 96 et 97), que le droit de réclamer la protection de la confiance légitime s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration a fait naître chez lui des espérances fondées, en lui fournissant des assurances précises sous la forme de renseignements précis, inconditionnels et concordants, émanant de sources autorisées et fiables, et qu’en revanche nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration.

140    Or, la partie défenderesse n’a donné au requérant aucune assurance précise qu’il serait classé au grade A 7 ou ou au grade A 6. Au contraire, l’avis de concours avertissait les candidats que les lauréats pourraient se voir proposer un recrutement sur la base des nouvelles dispositions statutaires.

141    Il s’ensuit que le cinquième grief, tiré de la violation du principe de la confiance légitime, n’est pas fondé.

–       Sur le sixième grief, tiré de la violation du principe de bonne foi et du principe patere legem quam ipse fecisti

142    Il convient de rappeler que l’action de l’autorité publique, dans le domaine administratif comme dans le domaine contractuel, est toujours soumise au respect du principe de bonne foi (arrêt du Tribunal de première instance du 8 mai 2007, Citymo/Commission, T‑271/04, Rec. p. II‑1375, point 107).

143    Dans la mesure où ce principe peut apparaître comme le corollaire de celui de protection de la confiance légitime (voir arrêt de la Cour du 25 mai 2000, Kögler/Cour de justice, C‑82/98 P, Rec. p. I‑3855, point 41), il suffit de constater que la partie défenderesse n’a pas assuré le requérant que, quelle que soit l’issue de la réforme statutaire, il serait classé dans l’un des grades annoncés dans l’avis de concours (point 140 ci-dessus), pour en déduire qu’elle n’a pas non plus manqué au principe de bonne foi en classant le requérant au grade AD 6. De plus, dans la mesure où le principe de bonne foi implique de tenir compte des intérêts légitimes des fonctionnaires (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 12 décembre 2000, Dejaiffe/OHMI, T‑223/99, RecFP p. I‑A‑277 et II‑1267, point 79), ce principe s’apparente au devoir de sollicitude de sorte que le grief du requérant tiré de sa violation doit aussi être rejeté pour les motifs retenus aux points 118 et suivants du présent arrêt pour écarter le grief tiré de la violation du devoir de sollicitude.

144    Par ailleurs, le principe patere legem quam ipse fecisti ne pouvait contraindre la partie défenderesse à classer le requérant dans l’un des grades annoncés dans l’avis de concours, car le règlement n° 723/2004, qui est une norme hiérarchiquement supérieure à cet avis de concours, a substitué une nouvelle structure de grades à la structure de grades sur la base de laquelle ledit avis de concours avait été rédigé.

145    Enfin, le principe patere legem quam ipse fecisti n’impose le respect que de règles de portée générale et ne saurait s’appliquer à la prétendue méconnaissance par l’AIPN des termes de l’offre d’emploi du 16 mars 2006 qui concernait exclusivement le requérant. Au demeurant, le grade AD 6, auquel il a été nommé, correspond au grade A*6 annoncé dans cette offre. Il ne saurait, non plus, s’appliquer au formulaire d’inscription du concours EPSO/A/16/04 dans lequel le requérant a indiqué les langues dans lesquelles il souhaitait passer les épreuves.

146    Il s’ensuit que le sixième grief, tiré de la violation du principe de bonne foi et du principe patere legem quam ipse fecisti, n’est pas fondé.

–       Sur le septième grief, tiré de la violation du principe de transparence

147    À supposer que la transparence constitue un principe général de droit dont la violation puisse être invoquée de manière autonome, il n’apparaît pas que le législateur ou l’administration ait agi en l’espèce de manière obscure, imprécise ou équivoque.

148    En premier lieu, le requérant ne peut se plaindre de ce que la réforme statutaire a eu pour effet qu’un même grade soit assorti d’une rémunération différente avant et après le 1er mai 2006. En effet, cette réforme a substitué une nouvelle structure des carrières et de nouveaux grades à la structure et aux grades figurant dans l’ancien statut.

149    Par ailleurs, le principe de transparence ne saurait empêcher le législateur de modifier la structure des grades et les traitements qui y sont attachés à l’occasion d’une réforme statutaire, pourvu que cette modification législative satisfasse à des conditions qualitatives dont, entre autres, celles d’accessibilité et de prévisibilité. Or, en l’espèce, les nouveaux grades et les rémunérations y afférentes sont, à suffisance de droit, fixés, pour la période transitoire, par l’annexe XIII du statut et, pour la période postérieure au 1er mai 2006, aux articles 5 et 66 du statut lui-même.

150    En second lieu, le requérant relève, à juste titre, qu’en l’espèce, l’avis de concours indiquait que «la réserve de recrutement d’administrateurs porte[rait] sur les grades 7/6 de la catégorie A», tout en mentionnant que, à la date du 1er mai 2004, le traitement de base mensuel attaché au grade A*6, premier échelon, serait de 4 311,55 euros.

151    Cette mention était, néanmoins, accompagnée d’un renvoi à la «note 1 de bas de page». Celle-ci précisait, d’une part, que «[le] concours [était] publié au niveau A 7/A 6 conformément aux dispositions du statut actuel», d’autre part, que toutefois une proposition de la Commission visant la réforme du statut était en cours d’examen et, enfin, que «les grades A 7/LA 7 et A 6/LA 6 [seraient] remplacés, pendant la période de transition du 1er mai 2004 au 30 avril 2006, par le grade A*6 et après cette date par le grade AD 6».

152    L’avis de concours indiquait ainsi clairement que les grades de recrutement A 7/A 6, en vigueur au moment de sa publication, seraient remplacés par le grade A*6, pendant la période transitoire du 1er mai 2004 au 30 avril 2006 et, ensuite, par le grade AD 6. Il précisait aussi sans ambiguïté que le traitement de base mensuel à la date du 1er mai 2004 pour le grade A*6, échelon 1, serait de 4 311,55 euros.

153    Le septième grief, tiré du prétendu principe de transparence, n’est, en conséquence, pas fondé.

154    Il découle de tout ce qui précède que le recours en annulation doit être rejeté.

 Quant au recours en indemnité

A –  Arguments des parties

155    Faute d’avoir été classé dans le grade indiqué dans l’avis de concours et à un échelon correspondant à son expérience professionnelle, le requérant prétend avoir subi un préjudice matériel équivalent à la différence entre le traitement correspondant à ce grade et le traitement correspondant au grade AD 6 qui lui a été attribué par la décision attaquée. Le requérant évalue ce préjudice matériel à un montant mensuel allant de 254,52 à 3 370,63 euros.

156    Le requérant estime aussi avoir subi un préjudice moral résultant des désagréments inhérents au procès, de la dégradation de l’ambiance de travail et de la nécessité, pour étayer son argumentation, d’avoir dû demander à des collègues des renseignements sur leur propre carrière. Le requérant évalue ce préjudice moral à la somme forfaitaire de 10 000 euros.

157    La partie défenderesse répond qu’il n’y a aucun motif d’allouer des dommages et intérêts au requérant puisqu’aucun moyen du recours n’est fondé.

B –  Appréciation du Tribunal

158    Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité de l’Union suppose la réunion d’un ensemble de conditions en ce qui concerne l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué (arrêt de la Cour du 16 décembre 1987, Delauche/Commission, 111/86, Rec. p. 5345, point 30; arrêt du Tribunal du 30 avril 2009, Aayhan e.a./Parlement, F‑65/07, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 142).

159    Or, il ressort de l’examen du recours en annulation que la partie défenderesse n’a commis aucune irrégularité susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard du requérant.

160    En conséquence, la condition relative à l’existence d’un comportement illégal de la part de la partie défenderesse faisant défaut, il y a lieu de rejeter le recours en indemnité.

  Sur les dépens

161    En vertu de l’article 122 du règlement de procédure, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de l’Union européenne pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

162    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de l’Union européenne, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre l’Union et ses agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

163    Selon l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal de l’Union européenne, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs propres dépens.

164    Le requérant ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE

(deuxième chambre)

déclare et arrête:

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Mahoney

Tagaras

Van Raepenbusch

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 décembre 2010.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

      P. Mahoney

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions de l’Union européenne citées dans celle-ci sont disponibles sur le site internet www.curia.europa.eu


* Langue de procédure: l’allemand.