Language of document : ECLI:EU:T:2019:778

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

7 novembre 2019 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché du recyclage de batteries automobiles plomb-acide – Décision constatant une infraction à l’article 101 TFUE – Amendes – Valeur des achats – Paragraphe 37 des lignes directrices pour le calcul du montant des amendes – Obligation de motivation – Droits de la défense – Preuve de l’infraction – Notion d’infraction continue ou répétée – Durée de l’infraction – Interruption de la participation à l’infraction – Restriction de concurrence par objet – Circonstances atténuantes – Compétence de pleine juridiction »

Dans l’affaire T‑240/17,

Campine NV, établie à Beerse (Belgique),

Campine Recycling NV, établie à Beerse,

représentées par Mes C. Verdonck, S. De Cock, Q. Silvestre et B. Gielen, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée par Mme F. van Schaik, MM. S. Baches Opi et M. Farley, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision C(2017) 900 final de la Commission, du 8 février 2017, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE (affaire AT.40018 – Recyclage de batteries automobiles), pour autant qu’elle concerne les requérantes, et, à titre subsidiaire, à la suppression ou à la réduction du montant de l’amende infligée à ces dernières dans cette décision,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. A. M. Collins (rapporteur), président, Mme M. Kancheva et M. R. Barents, juges,

greffier : Mme N. Schall, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 21 novembre 2018,

rend le présent

Arrêt

I.      Antécédents du litige

1        Campine NV et Campine Recycling NV (ci-après, prises ensemble, les « requérantes » ou « Campine ») sont des sociétés établies en Belgique actives dans la production de plomb recyclé, d’alliages de plomb et d’autres produits.

2        Par la décision C(2017) 900 final, du 8 février 2017, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE (affaire AT.40018 – Recyclage de batteries automobiles) (ci-après la « décision attaquée »), la Commission européenne a constaté l’existence d’une infraction à l’article 101 TFUE dans le secteur de l’achat de déchets de batteries automobiles plomb-acide utilisés pour la production de plomb recyclé. Cette infraction, à laquelle quatre entreprises auraient participé, à savoir, premièrement, Campine, deuxièmement, Eco-Bat Technologies Ltd, Berzelius Metall GmbH et Société de traitement chimique des métaux SAS (ci-après, prises ensemble, « Eco-Bat »), troisièmement, Johnson Controls, Inc., Johnson Controls Tolling GmbH & Co. KG et Johnson Controls Recycling GmbH (ci-après, prises ensemble, « JCI ») et, quatrièmement, Recylex SA, Fonderie et Manufacture de Métaux SA et Harz-Metall GmbH (ci-après, prises ensemble, « Recylex »), aurait été commise durant la période allant du 23 septembre 2009 au 26 septembre 2012 (considérants 1 et 2 et article 1er, paragraphe 1, de la décision attaquée).

3        Selon la Commission, l’infraction en cause, qui constitue une infraction unique et continue, a pris la forme d’accords ou de pratiques concertées sur les territoires de la Belgique, de l’Allemagne, de la France et des Pays-Bas. Elle a consisté, pour les quatre entreprises visées au point 2 ci-dessus, à coordonner leur comportement en matière de prix d’achat de déchets de batteries automobiles plomb-acide utilisés pour la production de plomb recyclé (considérants 1 et 2 et article 1er, paragraphe 1, de la décision attaquée).

4        Eu égard à l’infraction constatée, la Commission a infligé aux requérantes, conjointement et solidairement, une amende d’un montant de 8 158 000 euros [article 2, paragraphe 1, sous a), de la décision attaquée].

A.      Procédure administrative à l’origine de la décision attaquée

5        La procédure administrative a été ouverte à la suite d’une demande d’immunité, au sens de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17, ci-après la « communication sur la coopération »), déposée le 22 juin 2012 par JCI. Le 13 septembre 2012, la Commission a accordé une immunité conditionnelle à cette entreprise, conformément au paragraphe 18 de cette communication (considérant 29 de la décision attaquée).

6        Du 26 au 28 septembre 2012, la Commission a, en application de l’article 20, paragraphe 4, du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [101] et [102 TFUE] (JO 2003, L 1, p. 1), procédé à des inspections inopinées dans les locaux des entreprises mentionnées au point 2 ci-dessus ainsi que de Métal Blanc SAS, un producteur français de plomb recyclé (considérant 30 de la décision attaquée).

7        Eco-Bat, le 27 septembre 2012, et Recylex, le 23 octobre 2012, ont présenté une demande d’immunité ou, à défaut, une demande de réduction du montant de l’amende au titre de la communication sur la coopération. Le 4 décembre 2012, Campine a présenté une demande de réduction du montant de l’amende au titre de la même communication (considérant 31 de la décision attaquée).

8        Dans le cadre de son enquête, en application de l’article 18, paragraphe 2, du règlement no 1/2003, la Commission a adressé des demandes d’informations aux entreprises mentionnées au point 2 ci-dessus ainsi qu’à diverses entreprises tierces (considérant 32 de la décision attaquée).

9        Le 24 juin 2015, la Commission a engagé la procédure administrative à l’encontre des quatre entreprises mentionnées au point 2 ci-dessus ainsi que de Métal Blanc et de sa société sœur aux Pays-Bas, Van Peperzeel BV, et leur a adressé une communication des griefs (considérant 33 de la décision attaquée).

10      À la communication des griefs était annexé un CD-ROM qui contenait les parties accessibles du dossier de la Commission. Les destinataires de la communication des griefs ont fait usage de leur droit d’accès aux parties du dossier de la Commission qui n’étaient disponibles que dans les locaux de cette dernière (considérant 34 de la décision attaquée).

11      Par lettre du 24 juin 2015, la Commission a informé Eco-Bat et Recylex de sa conclusion provisoire selon laquelle les éléments de preuve que ces dernières lui avaient communiqués constituaient une valeur ajoutée significative au sens des paragraphes 24 et 25 de la communication sur la coopération et, partant, de son intention de réduire le montant de l’amende qui leur serait infligée. Par lettre du même jour, la Commission a informé Campine de sa conclusion provisoire selon laquelle cette dernière ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d’une réduction du montant de l’amende en vertu de cette communication (considérant 33 de la décision attaquée).

12      Les destinataires de la communication des griefs ont fait connaître à la Commission, par écrit, leur point de vue sur les objections soulevées à leur égard dans le délai prescrit. Ils ont également exercé leur droit d’être entendus oralement lors de l’audition qui s’est tenue les 17 et 18 novembre 2015 (considérant 35 de la décision attaquée).

13      Par lettre du 13 décembre 2016 (ci-après la « lettre du 13 décembre 2016 »), la Commission a informé Campine, Eco-Bat, JCI et Recylex qu’elle avait l’intention d’appliquer aux amendes qui leur seraient imposées une augmentation spécifique sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement no 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices »). Campine a présenté des observations sur cette lettre le 11 janvier 2017.

14      Le 8 février 2017, la Commission a adopté la décision attaquée, dans laquelle, notamment, elle reprochait aux requérantes d’avoir participé à l’infraction, visée au point 3 ci-dessus et décrite plus en détail aux points 27 à 41 ci-après, du 23 septembre 2009 au 26 septembre 2012 et leur infligeait, conjointement et solidairement, une amende d’un montant de 8 158 000 euros.

15      Le 6 avril 2017, la Commission a adopté la décision C(2017) 2223 final, rectifiant la décision attaquée (ci-après la « décision rectificative »). L’adoption de la décision rectificative était justifiée par le fait que la Commission, d’une part, avait omis d’indiquer, dans la décision attaquée, la valeur des achats qu’elle avait prise en compte pour déterminer le montant de base des amendes à infliger et, d’autre part, avait commis certaines erreurs matérielles dans le calcul du montant de base de l’amende à infliger à JCI (considérants 2 et 4 de la décision rectificative). Cette omission et ces erreurs matérielles n’auraient toutefois eu aucun impact sur le montant des amendes infligées dans la décision attaquée (considérants 2 et 4 de la décision rectificative).

B.      Décision attaquée

1.      Secteur concerné

16      Les produits concernés par l’infraction sont les déchets de batteries automobiles plomb-acide destinés à être traités et valorisés en vue de la production de plomb recyclé (considérant 3 de la décision attaquée).

17      Quatre groupes d’opérateurs sont présents dans le secteur du recyclage de plomb, à savoir, premièrement, les collecteurs de ferraille, deuxièmement, les ferrailleurs ou négociants, troisièmement, les entreprises de recyclage et, quatrièmement, les fabricants de batteries (considérant 13 de la décision attaquée).

18      Les collecteurs de ferraille récupèrent les déchets de batteries auprès de différents points de collecte et les vendent soit aux ferrailleurs ou négociants soit directement aux entreprises de recyclage (considérant 13 de la décision attaquée).

19      Les ferrailleurs ou négociants agissent en tant qu’intermédiaires entre, d’une part, les collecteurs de ferraille et, d’autre part, les entreprises de recyclage. En général, ils agissent principalement au nom d’une entreprise de recyclage (considérant 13 de la décision attaquée).

20      Les entreprises de recyclage procèdent au traitement et à la valorisation des déchets de batteries qu’elles recueillent directement auprès de leurs propres points de collecte ou bien qu’elles acquièrent auprès des collecteurs de ferraille ou des ferrailleurs ou négociants (considérant 13 de la décision attaquée).

21      Les entreprises de recyclage sont souvent actives à plusieurs niveaux de la chaîne d’approvisionnement. Ainsi, Eco-Bat et JCI opèrent à la fois en tant qu’entreprises de recyclage et que collecteurs de déchets de batteries. JCI est en outre un fabricant de batteries, tandis qu’Eco-Bat est également active dans la vente en gros et au détail de batteries plomb-acide neuves et d’autres types de batteries. Campine, en revanche, n’opère qu’en tant qu’entreprise de recyclage. Les entreprises de recyclage interagissent donc les unes avec les autres en tant que fournisseurs, clients et concurrents. Campine, Eco-Bat et Recylex fournissent du plomb recyclé à JCI, mais entrent également en concurrence avec cette dernière pour l’achat de déchets de plomb auprès des collecteurs de ferraille, des ferrailleurs ou des négociants (considérant 18 de la décision attaquée).

22      Durant la période infractionnelle, les principaux fournisseurs tiers de déchets de batteries auprès de Campine, d’Eco‑Bat, de JCI et de Recylex étaient des collecteurs de ferraille ou des ferrailleurs ou négociants établis en Belgique, en Allemagne, en France et aux Pays-Bas (considérant 16 de la décision attaquée).

23      Les fabricants de batteries acquièrent le plomb recyclé auprès des entreprises de recyclage (considérant 13 de la décision attaquée).

24      Certains fabricants de batteries disposent de leurs propres réseaux de collecte de déchets de batteries ou sont verticalement intégrés avec des collecteurs de déchets de batteries. Ils confient alors le recyclage de ces déchets à des entreprises de recyclage dans le cadre de contrats de travail à façon (considérant 13 de la décision attaquée). Ainsi, durant la période infractionnelle, Campine, Eco-Bat et Recylex avaient, chacune, conclu de tels contrats avec JCI. Ceux conclus entre JCI et Campine représentaient une partie importante de la production de cette dernière, laquelle achetait des déchets de batteries tant pour son propre usage que pour le compte de JCI (considérant 22 de la décision attaquée).

25      D’autres fabricants de batteries disposent de leurs propres installations de recyclage (considérant 13 de la décision attaquée).

26      Le prix des déchets de batteries plomb-acide est le principal élément de coût dans le processus de recyclage du plomb. Le plomb primaire se négocie au London Metal Exchange (LME, marché des métaux de Londres, Royaume-Uni). Les prix du plomb fixés au LME servent de base pour la détermination des prix tant du plomb primaire que du plomb recyclé (considérant 24 de la décision attaquée). Les prix des déchets de batteries suivent généralement les prix fixés au LME et peuvent être exprimés en pourcentage de ces derniers (considérant 25 de la décision attaquée).

2.      Description de l’infraction

27      Aux considérants 40 à 182 de la décision attaquée, la Commission a décrit l’infraction en cause.

28      En premier lieu, la Commission a exposé les principes directeurs de l’entente et la manière dont celle-ci était organisée (considérants 40 à 58 de la décision attaquée).

29      Tout d’abord, la Commission a indiqué que l’objectif de l’entente était de coordonner les prix (prix indicatifs, prix maximaux ou réductions forfaitaires des prix) pour l’achat de déchets de batteries automobiles plomb-acide et de restreindre le jeu de la concurrence pour l’achat de ces déchets. Selon elle, en réduisant le prix d’achat desdits déchets ou en empêchant toute augmentation de ce prix, les participants à l’entente cherchaient à accroître leur marge bénéficiaire (considérant 40 de la décision attaquée).

30      La Commission a exposé que les participants à l’entente coordonnaient leur comportement par le biais de contacts portant sur les prix, le comportement futur sur le marché et les négociations avec les fournisseurs (considérant 41 de la décision attaquée).

31      Ainsi, s’agissant des prix, les participants à l’entente auraient conclu des accords entre eux visant à maintenir à un certain niveau les prix proposés aux fournisseurs tiers de déchets de batteries ou à les réduire d’un certain montant, parfois par des réductions échelonnées sur une période de temps définie. Ils auraient échangé des informations et se seraient mis d’accord sur les prix proposés à certains fournisseurs, sur les prix maximaux et les prix indicatifs ainsi que sur les évolutions de prix prévues et les intentions d’achat en Belgique, en Allemagne, en France et aux Pays-Bas. Ils auraient également essayé de faire en sorte que les prix d’achat ne tombent pas au-dessous d’un certain niveau qui aurait incité les fournisseurs à vendre leurs déchets à des entreprises tierces (considérant 42 de la décision attaquée).

32      S’agissant du comportement futur sur le marché, en plus d’échanger des informations sur les prix, en cours ou à venir, proposés aux fournisseurs, les participants à l’entente auraient également, à certaines occasions, échangé des informations sur les prévisions en matière de volumes d’achat, sur les niveaux des stocks et sur les niveaux d’activité (considérant 43 de la décision attaquée).

33      S’agissant des négociations de prix avec les fournisseurs, les participants à l’entente se seraient mutuellement informés sur les prix qu’ils proposaient à leurs collecteurs de ferraille ou ferrailleurs tiers respectifs, lesquels entraient directement en concurrence avec eux pour l’achat de déchets de batteries (considérant 44 de la décision attaquée).

34      Ensuite, la Commission a identifié les personnes qui avaient participé à l’entente, en précisant à chaque fois le nom de la société à laquelle elles appartenaient, le poste à responsabilité, essentiellement d’encadrement supérieur, qu’elles y occupaient et leur période de travail au sein de la société concernée durant la période infractionnelle (considérants 45 à 48 de la décision attaquée). Ainsi, s’agissant de Campine, elle a cité les noms de MM. C. (directeur général au sein de Campine Recycling) et G. (directeur principal des achats, puis directeur commercial au sein de Campine Recycling). Par ailleurs, elle a notamment relevé que M. M., directeur des achats au sein de JCI, agissait fréquemment en tant qu’intermédiaire entre les participants à l’entente (considérant 47 de la décision attaquée).

35      Enfin, la Commission a décrit la manière dont l’entente était organisée (considérants 49 à 58 de la décision attaquée).

36      À cet égard, la Commission a relevé que JCI, Eco-Bat et Recylex avaient confirmé que, durant la période s’étendant du 23 septembre 2009 au moins au 26 septembre 2012, une série de réunions et de contacts avaient eu lieu entre les participants à l’entente. Ces derniers se seraient tenus mutuellement informés, directement ou indirectement, de ce dont ils avaient discuté les uns avec les autres. La Commission a indiqué que la plupart des contacts anticoncurrentiels étaient bilatéraux et qu’ils avaient principalement eu lieu par téléphone, courriel ou SMS. Des rencontres en face à face auraient également eu lieu, soit lors de réunions bilatérales, soit, plus rarement, lors de réunions multilatérales. Certains des contacts seraient intervenus en marge de manifestations commerciales internationales ou de manifestations organisées par des associations professionnelles nationales. Généralement, lors de ces différents contacts, les personnes impliquées se seraient échangé des informations sur les prix qu’elles offraient pour l’achat de déchets de batteries et sur ceux qu’elles entendaient offrir dans un futur proche, et ce pour la Belgique, l’Allemagne, la France et les Pays-Bas. Elles se seraient ensuite mises d’accord sur les prix indicatifs ou maximaux à payer à leurs fournisseurs, ou sur des réductions de prix déterminées (considérants 49 et 50 de la décision attaquée).

37      La Commission a également exposé le schéma selon lequel les contacts bilatéraux se présentaient généralement, en précisant notamment que la fréquence et l’intensité de ceux-ci étaient fonction de l’évolution des prix du plomb fixés au LME (considérants 53 et 54 de la décision attaquée).

38      Par ailleurs, la Commission a indiqué que les participants à l’entente contrôlaient la bonne application des prix convenus (considérant 55 de la décision attaquée). Elle a également relevé qu’ils étaient conscients du caractère illégal des contacts et qu’ils essayaient d’éviter de communiquer par écrit. Certaines des personnes impliquées auraient même utilisé dans leurs communications un langage codé faisant référence à des conditions météorologiques (considérant 56 de la décision attaquée).

39      Enfin, la Commission a fourni un tableau indiquant la date de chacun des contacts anticoncurrentiels intervenus, la nature de ces contacts (réunion, courriel, appel téléphonique, SMS, conférence téléphonique ou contact non déterminé) ainsi que les entreprises et représentants de celles-ci qui y avaient pris part (considérant 58 de la décision attaquée).

40      S’agissant de Campine, six contacts ont été retenus à son endroit : premièrement, la participation de M. C. (Campine) à une réunion avec des représentants des trois autres entreprises concernées à Windhagen (Allemagne) le 23 septembre 2009 ; deuxièmement, un courriel du 10 février 2010 de M. C. à M. M. (JCI) (ci-après le « courriel du 10 février 2010 ») ; troisièmement, la participation de M. C. à une réunion avec des représentants des trois autres entreprises concernées à Cologne (Allemagne) le 4 avril 2011 ; quatrièmement, un SMS du 7 mars 2012 de M. M. à M. C. ; cinquièmement, un contact non déterminé et un échange de SMS entre ces mêmes personnes les 30 et 31 mai 2012 et, sixièmement, un entretien téléphonique entre MM. C. et M. intervenu aux alentours du 27 juin 2012 concernant des échanges ayant eu lieu quelques jours plus tôt entre d’autres participants à l’entente.

41      En second lieu, la Commission a exposé la « chronologie des événements », en décrivant les différents contacts anticoncurrentiels qui étaient intervenus entre les participants à l’entente et certains autres faits pertinents liés à ces contacts (considérants 59 à 182 de la décision attaquée).

3.      Appréciation juridique de l’infraction par la Commission

42      Aux considérants 183 à 243 de la décision attaquée, la Commission a exposé son appréciation juridique du comportement des entreprises concernées.

43      En premier lieu, la Commission a décrit la nature de l’infraction en cause (considérants 185 à 230 de la décision attaquée).

44      À cet égard, premièrement, la Commission a fait valoir une série de considérations aux fins d’établir, en renvoyant aux faits décrits dans la « chronologie des événements », que le comportement reproché aux entreprises concernées présentait toutes les caractéristiques d’un accord ou d’une pratique concertée au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE (considérants 185 à 196 de la décision attaquée).

45      Deuxièmement, la Commission a exposé que chacun des aspects du comportement reproché aux entreprises concernées avait pour objet de restreindre le jeu de la concurrence et, partant, constituait une violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE. Elle a considéré qu’il pouvait toutefois être conclu que ces différentes violations individuelles de l’article 101, paragraphe 1, TFUE constituaient ensemble une infraction unique et continue dont toutes ces entreprises pouvaient être tenues pour responsables, dès lors que, tout d’abord, leur comportement s’inscrivait dans un plan d’ensemble poursuivant un objectif anticoncurrentiel commun, ensuite, elles entendaient toutes contribuer à ce plan d’ensemble et, enfin, elles avaient connaissance du comportement infractionnel envisagé ou mis en œuvre par chacune d’entre elles dans la poursuite des mêmes objectifs, ou pouvaient raisonnablement le prévoir et étaient prêtes à en accepter le risque (considérants 197 à 230 de la décision attaquée).

46      En deuxième lieu, la Commission a considéré que le comportement reproché aux participants à l’entente était constitutif d’une restriction de concurrence par objet au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE (considérants 231 à 238 de la décision attaquée).

47      En troisième lieu, la Commission a constaté que ce comportement était susceptible d’affecter le commerce entre États membres, après avoir indiqué, en substance, que le marché concerné se caractérisait par un volume commercial substantiel entre les États membres, que ledit comportement couvrait au moins la Belgique, l’Allemagne, la France et les Pays-Bas et qu’il concernait tant les importations que les exportations (considérants 239 à 241 de la décision attaquée).

48      En quatrième lieu, la Commission a relevé que, en l’espèce, il n’y avait pas d’indications selon lesquelles les conditions de l’article 101, paragraphe 3, TFUE pourraient être remplies et qu’aucun des participants à l’entente n’avait d’ailleurs prétendu qu’elles l’étaient (considérants 242 et 243 de la décision attaquée).

4.      Durée de la participation à l’infraction

49      Aux considérants 244 à 264 de la décision attaquée, la Commission a examiné la question de la durée de la participation des entreprises concernées à l’infraction.

50      En premier lieu, la Commission a fixé au 23 septembre 2009 la date du début de l’infraction, date correspondant à celle de la réunion ayant eu lieu à Windhagen, à laquelle toutes les entreprises concernées avaient participé. S’agissant de la date de la fin de l’infraction, elle a retenu le 26 septembre 2012 pour Campine, Eco-Bat et Recylex, date correspondant à celle du début de ses inspections, et le 22 juin 2012 pour JCI, date à laquelle cette dernière a déposé sa demande d’immunité (considérants 244 et 245 de la décision attaquée).

51      En second lieu, la Commission a examiné s’il existait des éléments de preuve qui se rapportaient à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon qu’il pût être raisonnablement admis que l’infraction s’était poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises (considérants 246 à 264 de la décision attaquée). En ce qui concerne plus particulièrement Campine, elle a considéré que cette dernière avait participé à l’infraction sans interruption du 23 septembre 2009 au 26 septembre 2012, soit durant une période de « trois ans et quatre jours », et ce en dépit du fait qu’il n’existait aucune preuve directe de sa participation à des contacts anticoncurrentiels durant une première période de onze mois et une seconde période de dix mois (considérants 248 à 253 de la décision attaquée).

5.      Responsabilité de l’infraction

52      Aux considérants 265 à 287 de la décision attaquée, la Commission a examiné la question de l’imputation de la responsabilité de l’infraction.

53      S’agissant plus particulièrement des requérantes, la Commission a relevé que Campine Recycling avait directement participé à l’infraction par l’intermédiaire de MM. C. et G. et que, durant toute la période infractionnelle, 100 % de ses parts étaient détenues par Campine NV. Partant, elle a tenu ces deux sociétés pour solidairement responsables de l’infraction (considérants 272 à 275 de la décision attaquée).

6.      Calcul du montant des amendes

54      Aux considérants 288 à 420 de la décision attaquée, la Commission a examiné la question des amendes à infliger aux destinataires de celle-ci, et ce après avoir considéré qu’il convenait de leur ordonner de mettre immédiatement fin, s’ils ne l’avaient pas déjà fait, à l’infraction et de s’abstenir désormais de toute pratique restrictive ayant un objet ou un effet identique ou équivalent. Par ailleurs, elle a rejeté les allégations de Campine selon lesquelles celle-ci n’avait pas participé intentionnellement à l’infraction et il n’était pas prouvé qu’elle avait connaissance d’un quelconque plan d’ensemble portant sur l’infraction unique et continue (considérants 290 à 293 de la décision attaquée).

55      S’agissant du calcul du montant des amendes, la Commission a fait application, dans la décision attaquée, de la méthodologie exposée dans les lignes directrices ainsi que de la communication sur la coopération.

a)      Point de départ pour la détermination du montant de base des amendes

56      Pour déterminer le montant de base des amendes, la Commission a pris en compte la valeur des achats de déchets de batteries automobiles plomb-acide effectués au cours de la totalité de l’exercice social 2011 par chacune des entreprises concernées auprès des collecteurs de ferraille, des ferrailleurs ou des négociants établis en Belgique, en Allemagne, en France et aux Pays-Bas, y compris les achats effectués directement auprès des points de collecte où étaient déposées les batteries usagées (considérants 297 à 319 de la décision attaquée).

b)      Montant de base des amendes

57      La Commission a rappelé que, conformément aux lignes directrices, le montant de base des amendes se composait d’un montant compris entre 0 et 30 % de la valeur des achats concernés de l’entreprise en fonction du degré de gravité de l’infraction, multiplié par le nombre d’années de participation de l’entreprise à l’infraction, et d’un montant additionnel compris entre 15 et 25 % de la valeur des achats concernés de l’entreprise indépendamment de la durée (considérant 320 de la décision attaquée).

58      Pour fixer la proportion de la valeur des achats en fonction du degré de gravité de l’infraction, la Commission a examiné et pris en considération la nature de celle-ci (considérants 321 à 334 de la décision attaquée). À cet égard, elle a retenu, pour toutes les entreprises concernées, un pourcentage de 15 % en arguant du fait que cette infraction consistait en un accord horizontal de fixation de prix qui, par sa nature même, faisait partie des restrictions à la concurrence les plus graves.

59      Compte tenu d’une durée de participation de Campine, d’Eco-Bat et de Recylex à l’infraction de 1 100 jours, la Commission a fixé à 3,01 le coefficient multiplicateur à appliquer à ces entreprises pour la durée de l’infraction (considérant 344 de la décision attaquée). Elle a retenu un coefficient multiplicateur de 2,74 pour JCI, qui avait participé à l’infraction pendant 1 004 jours (considérant 344 de la décision attaquée).

60      Afin de dissuader les entreprises de participer à des accords ou pratiques concertées interdits comme étant incompatibles avec le marché intérieur, la Commission a, sur le fondement des dispositions du paragraphe 25 des lignes directrices et en considération de son appréciation de la nature de l’infraction (voir point 58 ci-dessus), inclus dans le montant de base des amendes un montant additionnel correspondant à 15 % de la valeur de leurs achats (considérants 345 à 347 de la décision attaquée).

61      Au terme de cette première étape, la Commission a fixé à 7 807 000 euros le montant de base de l’amende à infliger à Campine (considérant 348 de la décision attaquée).

c)      Ajustements du montant de base des amendes

62      La Commission n’a retenu l’existence d’aucune circonstance aggravante pour les destinataires de la décision attaquée (considérants 349 et 350 de la décision attaquée).

63      La Commission a accordé à Campine une réduction de 5 % du montant de base au titre des circonstances atténuantes, au motif, en substance, que cette dernière n’avait joué qu’un rôle mineur ou périphérique dans l’infraction (considérants 351, 352, 355 et 358 de la décision attaquée).

64      Par ailleurs, à aucun des destinataires de la décision attaquée la Commission n’a estimé nécessaire d’imposer une majoration du montant de base de l’amende au titre du paragraphe 30 des lignes directrices (considérants 360 et 361 de la décision attaquée).

65      Enfin, sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, la Commission a décidé d’augmenter de 10 % le montant de l’amende à infliger à chacun des destinataires de la décision attaquée, et ce afin de tenir compte des particularités de l’affaire et d’atteindre un niveau dissuasif (considérants 363 à 380 de la décision attaquée). En substance, elle a justifié cette augmentation par le fait que, en l’espèce, une entente en matière d’achat était en cause et que la valeur des achats n’était pas en soi susceptible de constituer une valeur de remplacement adéquate pour refléter l’importance économique de l’infraction. Elle a expliqué à cet égard que plus une entente ayant pour objectif de réduire les prix d’achat ou d’empêcher leur augmentation était mise en œuvre avec succès, plus le montant de la valeur des achats, et, partant, celui de l’amende, était bas.

d)      Application du plafond de 10 % du chiffre d’affaires

66      La Commission a fait application du plafond de 10 % du chiffre d’affaires, en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003. Le montant de l’amende fixé pour Campine après application de ce plafond était de 8 158 315 euros (considérants 381 à 383 de la décision attaquée).

e)      Application de la communication sur la coopération et montant final des amendes

67      Aux considérants 384 à 411 de la décision attaquée, la Commission s’est prononcée sur l’application de la communication sur la coopération.

68      S’agissant de Campine, tout d’abord, la Commission a relevé que, dans sa demande de réduction du montant de l’amende du 4 décembre 2012, elle n’avait pas « dévoilé » sa participation à l’entente au sens du paragraphe 23 de cette communication (considérants 406 et 407 de la décision attaquée). Ensuite, elle a indiqué que cette demande contenait principalement des commentaires sur les documents trouvés lors des vérifications opérées dans les locaux de Campine et qui n’apportaient aucune valeur ajoutée significative par rapport aux informations déjà en sa possession (considérant 408 de la décision attaquée). Par ailleurs, elle a observé que Campine avait été la dernière entreprise concernée à demander à pouvoir bénéficier de mesures de clémence et que, à la date à laquelle cette dernière avait présenté sa demande, elle pouvait déjà se fonder sur les informations et éléments de preuve fournis par JCI, Eco‑Bat et Recylex, en plus des documents obtenus lors des vérifications (considérant 409 de la décision attaquée). Enfin, elle a constaté que, outre les documents trouvés lors des vérifications opérées dans les locaux de Campine, les seuls documents provenant de cette dernière qui avaient été utilisés pour décrire l’infraction étaient ceux figurant dans ses réponses aux demandes de renseignements (considérant 410 de la décision attaquée).

69      Eu égard à ces différents éléments, la Commission a estimé qu’il n’y avait pas lieu d’accorder à Campine une réduction du montant de l’amende au titre de la communication sur la coopération (considérant 411 de la décision attaquée).

70      Le montant final des amendes infligées a été de 8 158 000 euros pour Campine, de 32 712 000 euros pour Eco-Bat, de 0 euro pour JCI et de 26 739 000 euros pour Recylex (considérant 420 et article 2 de la décision attaquée). 

II.    Procédure et conclusions des parties

71      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 avril 2017, les requérantes ont introduit le présent recours.

72      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure, a invité la Commission à répondre par écrit à certaines questions et à produire certains documents. La Commission a répondu à ces questions et a produit les documents demandés dans le délai imparti, à l’exception de la version intégrale du courriel du 10 février 2010 (voir point 40 ci-dessus), qui, selon elle, contenait des données confidentielles relatives à une partie tierce, à savoir JCI.

73      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 19 octobre 2018, les requérantes ont demandé au Tribunal d’inviter la Commission, dans le cadre d’une mesure d’instruction prise en vertu de l’article 91, sous b), du règlement de procédure, à produire la version intégrale du courriel du 10 février 2010. La Commission ayant, par lettre déposée au greffe du Tribunal le 5 novembre 2018 et notifiée aux requérantes le 7 novembre suivant, communiqué spontanément cette version intégrale, la demande de mesure d’instruction est devenue sans objet.

74      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 21 novembre 2018.

75      Lors de l’audience, les requérantes ont produit une copie d’une lettre du 9 avril 2010 adressée à M. C. (Campine) par M. M. (JCI), à laquelle était annexée une copie d’un contrat, daté du 16 décembre 2009, relatif à la vente par Campine et à JCI de plomb léger ou d’alliages de plomb pour l’année 2010. Le Tribunal a décidé de verser ces documents au dossier de l’affaire après en avoir remis une copie à la Commission et avoir entendu cette dernière, tout en réservant sa décision sur leur recevabilité.

76      Lors de l’audience également, les requérantes ont demandé que soit retiré du dossier de l’affaire le courriel du 10 février 2010, en faisant valoir qu’elles n’avaient eu accès à la version intégrale de celui-ci que le 7 novembre 2018 et qu’il avait de la sorte été porté atteinte à leurs droits de la défense.

77      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler la décision attaquée dans la mesure où elle les concerne ;

–        à titre subsidiaire, supprimer ou réduire le montant de l’amende conformément aux arguments soumis dans la requête ;

–        condamner la Commission aux dépens.

78      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

III. En droit

79      À l’appui du recours, Campine invoque quatre moyens.

80      En premier lieu, Campine prétend que la Commission a violé l’obligation de motivation, ses droits de la défense ainsi que les principes de bonne administration, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination lorsque, sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, elle a majoré de 10 % le montant de l’amende pour tous les destinataires de la décision attaquée.

81      En deuxième lieu, Campine affirme que la Commission n’a pas établi à suffisance de droit qu’elle avait commis une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE.

82      En troisième lieu, Campine invoque une violation de l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003 et des lignes directrices, en ce que la Commission n’aurait pas correctement apprécié la gravité de l’infraction, la durée de celle-ci et les circonstances atténuantes, ainsi que du principe de non-discrimination lors du calcul du montant de base de l’amende.

83      En quatrième lieu, Campine fait valoir que, si le Tribunal n’annule pas la décision attaquée sur la base des griefs invoqués dans le cadre du premier moyen d’annulation, il devrait à tout le moins annuler la majoration de 10 % du montant de l’amende appliquée sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices.

84      Les deux premiers moyens sont invoqués au soutien de ses conclusions présentées à titre principal et visant à l’annulation de la décision attaquée, et les deux derniers au soutien de ses conclusions présentées à titre subsidiaire et visant à la suppression ou à la réduction du montant de l’amende.

85      Avant d’examiner ces différents moyens, il convient de statuer sur la recevabilité des documents produits pour la première fois lors de l’audience par Campine ainsi que sur sa demande de voir retiré du dossier de l’affaire le courriel du 10 février 2010.

A.      Sur la recevabilité des documents produits par Campine lors de l’audience et sur sa demande de voir retiré du dossier de l’affaire le courriel du 10 février 2010

86      En premier lieu, s’agissant de la lettre du 9 avril 2010 de M. M. (JCI) à M. C. (Campine) et du contrat qui y est annexé, produits à l’audience par Campine, il convient de constater qu’il ressort des plaidoiries de cette dernière devant le Tribunal qu’elle invoque ces documents pour corroborer son allégation, déjà formulée dans ses écritures, selon laquelle le courriel du 10 février 2010, auquel elle n’a obtenu un accès intégral qu’après la clôture de la phase écrite de la procédure (voir point 73 ci-dessus), concerne exclusivement les relations qu’elle entretenait avec JCI dans le contexte d’un contrat de travail à façon.

87      Lors de l’audience, la Commission n’a formulé aucune objection à ce que ces documents soient versés au dossier de l’affaire et a pris position sur leur pertinence et leur valeur probante.

88      Au vu des éléments exposés aux points 86 et 87 ci-dessus, il convient d’admettre la recevabilité des documents en question dans le cadre de la présente procédure.

89      En second lieu, pour ce qui est de la demande de retrait du courriel du 10 février 2010 du dossier de l’affaire, Campine, lors de l’audience, l’a justifiée par le fait que le défaut de la Commission de lui communiquer la version intégrale de ce courriel avait porté atteinte à ses droits de la défense. Campine estime en effet que, si elle avait eu accès aux éléments occultés dans la version non confidentielle du courriel du 10 février 2010, elle aurait pu établir que ce courriel, dans son ensemble, à savoir même s’agissant des éléments retenus à son endroit, s’inscrivait dans le contexte tout à fait légitime des relations en matière de contrat de travail à façon qu’elle entretenait avec JCI. Ses droits de la défense auraient d’autant plus été méconnus que, selon elle, les passages occultés dudit courriel ne pouvaient présenter un caractère confidentiel à son égard, puisqu’elle était elle-même l’auteur de ce document.

90      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le respect des droits de la défense dans la conduite des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général du droit de l’Union européenne dont les juridictions de l’Union assurent le respect (voir arrêt du 18 juin 2013, ICF/Commission, T‑406/08, EU:T:2013:322, point 115 et jurisprudence citée).

91      Le respect des droits de la défense exige que l’entreprise intéressée ait été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une infraction au traité (arrêts du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, EU:C:1983:158, point 10, et du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 66).

92      En ce sens, l’article 27, paragraphe 1, du règlement no 1/2003 prévoit, d’une part, que la Commission donne aux entreprises et aux associations d’entreprises visées par la procédure qu’elle mène l’occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs qu’elle retient et, d’autre part, que la Commission ne fonde ses décisions que sur les griefs au sujet desquels les parties concernées ont pu faire valoir leurs observations.

93      Il convient également de rappeler que, selon la jurisprudence, il y a violation des droits de la défense lorsqu’il existe une possibilité que, en raison d’une irrégularité commise par la Commission, la procédure administrative menée par elle ait pu aboutir à un résultat différent. Une entreprise requérante établit qu’une telle violation a eu lieu lorsqu’elle démontre à suffisance non pas que la décision de la Commission aurait eu un contenu différent, mais bien qu’elle aurait pu mieux assurer sa défense en l’absence de l’irrégularité, par exemple en raison du fait qu’elle aurait pu utiliser pour sa défense des documents dont l’accès lui avait été refusé lors de la procédure administrative (voir arrêt du 24 mai 2012, MasterCard e.a./Commission, T‑111/08, EU:T:2012:260, point 269 et jurisprudence citée).

94      Il ne saurait, à cet égard, être exigé des parties requérantes qui ont soulevé un moyen tiré d’une violation de leurs droits de la défense que, dans la requête, elles développent une argumentation élaborée ou détaillent un faisceau d’indices pour démontrer que la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent si elles avaient eu accès à certains éléments qui, en fait, ne leur ont jamais été communiqués. Une telle approche reviendrait en effet à exiger d’elles une probatio diabolica (arrêt du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T‑25/95, T‑26/95, T‑30/95 à T‑32/95, T‑34/95 à T‑39/95, T‑42/95 à T‑46/95, T‑48/95, T‑50/95 à T‑65/95, T‑68/95 à T‑71/95, T‑87/95, T‑88/95, T‑103/95 et T‑104/95, EU:T:2000:77, point 161).

95      Il appartient, toutefois, à la partie requérante de fournir un premier indice de l’utilité, pour sa défense, des documents non communiqués (arrêt du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T‑25/95, T‑26/95, T‑30/95 à T‑32/95, T‑34/95 à T‑39/95, T‑42/95 à T‑46/95, T‑48/95, T‑50/95 à T‑65/95, T‑68/95 à T‑71/95, T‑87/95, T‑88/95, T‑103/95 et T‑104/95, EU:T:2000:77, points 409, 415 et 421).

96      En l’espèce, le document dont Campine sollicite le retrait du dossier est un courriel adressé le 10 février 2010 par l’un de ses dirigeants, M. C., au directeur des achats au sein de JCI, M. M. Il est constant que, lors de la procédure administrative, JCI a demandé et obtenu le traitement confidentiel de ce courriel et que, partant, à tout le moins jusqu’au 7 novembre 2018 (voir point 73 ci-dessus), Campine n’a eu accès qu’à une version de celui-ci dans laquelle les éléments déclarés confidentiels avaient été occultés. Dans ses écritures, Campine a expliqué que, bien qu’elle fût l’auteur dudit courriel, elle n’en avait pas retrouvé l’original.

97      À cet égard, premièrement, il convient de souligner que tous les éléments tirés du courriel du 10 février 2010 qui ont été retenus à l’endroit de Campine dans la décision attaquée figurent dans la version non confidentielle de ce courriel à laquelle elle a eu accès au cours de la procédure administrative.

98      Deuxièmement, il y a lieu de constater que, ainsi que la Commission l’a fait observer dans ses écritures sans être contredite par Campine, cette dernière n’a pas demandé au conseiller-auditeur d’avoir accès aux passages occultés du courriel du 10 février 2010, comme elle était en droit de le faire, conformément à l’article 7, paragraphe 1, de la décision 2011/695/UE du président de la Commission européenne, du 13 octobre 2011, relative à la fonction et au mandat du conseiller-auditeur dans certaines procédures de concurrence (JO 2011, L 275, p. 29).

99      Troisièmement, il convient de relever que, si Campine n’a eu accès à la version intégrale du courriel du 10 février 2010 qu’à un stade avancé de la procédure devant le Tribunal, cela ne l’a cependant pas empêchée de faire valoir, dans la requête et la réplique, que ce courriel ne concernait que les relations qu’elle entretenait avec JCI dans le cadre d’un contrat de travail à façon. Campine aurait donc pu avancer le même argument dès le stade de la procédure administrative, ce qu’elle n’a toutefois pas fait.

100    Quatrièmement, force est de constater que Campine, qui a pu pleinement se prononcer lors de l’audience sur les passages occultés du courriel du 10 février 2010, notamment en produisant de nouveaux documents (voir points 75 et 86 à 88 ci-dessus), ne fournit pas un premier indice de l’utilité, pour sa défense, de ces passages. Si, ainsi que la Commission l’a au demeurant admis lors de l’audience, lesdits passages concernent des discussions relatives à un contrat de travail à façon entre Campine et JCI, ils se distinguent toutefois manifestement tant sur la forme que sur le fond du passage du même courriel retenu à l’endroit de Campine dans la décision attaquée. Il convient d’ajouter que l’interprétation que la Commission a donnée de ce dernier passage est corroborée par l’une des déclarations orales faites par JCI dans le cadre de sa demande d’immunité (voir point 158 ci-après).

101    À la lumière de ce qui précède, il y a lieu de considérer que Campine n’a pas établi à suffisance de droit que le fait que la Commission ne lui avait donné accès à la version intégrale du courriel du 10 février 2010 qu’à un stade très tardif de la procédure devant le Tribunal l’avait empêchée d’exercer de manière appropriée ses droits de la défense. Partant, rien ne justifie de procéder au retrait de ce courriel du dossier.

B.      Sur les conclusions présentées à titre principal et visant à l’annulation de la décision attaquée

102    Il convient d’examiner, tout d’abord, le deuxième moyen, dans le cadre duquel Campine avance que la Commission n’a pas établi à suffisance de droit qu’elle avait commis une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE.

1.      Sur le deuxième moyen, tiré de ce que la Commission n’a pas établi à suffisance de droit que Campine avait commis une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE

a)      Observations liminaires

103    Campine divise le deuxième moyen en deux branches. Par la première branche, elle fait valoir que la Commission a erronément apprécié les éléments de preuve relatifs aux six contacts collusoires retenus à son endroit. En effet, ces éléments de preuve n’étaieraient pas les faits tels que décrits dans la décision attaquée. Par la seconde branche, elle soutient que lesdits éléments de preuve ne démontrent pas qu’elle a commis une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE. Plus particulièrement, la Commission ne serait pas parvenue à prouver, premièrement, qu’elle avait participé à l’accord global décrit dans la décision attaquée, deuxièmement, que le comportement qui lui était imputé constituait une infraction unique et continue et, troisièmement, que ce comportement avait un objet ou effet anticoncurrentiel.

104    Il convient d’emblée de relever que, dans le cadre du présent moyen, Campine adopte une approche sélective consistant à contester le bien-fondé des conclusions de la Commission relatives à sa participation à l’entente en cause en examinant séparément chacun des six contacts anticoncurrentiels qui sont spécifiquement retenus à son endroit, et ce en faisant totalement abstraction des dizaines d’autres contacts anticoncurrentiels identifiés dans la décision attaquée, de l’ensemble des éléments factuels et des éléments de preuve se rapportant à ceux-ci ainsi que du contexte général de l’infraction. En outre, une telle approche n’est pas conciliable avec la position de Campine, qui ressort de plusieurs passages de ses écritures et qu’elle a au demeurant confirmée lors de l’audience en réponse à une question du Tribunal, selon laquelle, dans la décision attaquée, la Commission a démontré à suffisance de droit l’existence de l’entente en cause pour ce qui est des trois autres entreprises concernées, à savoir Eco-Bat, JCI et Recylex.

105    Par ailleurs, dans le prolongement de ce qui précède et eu égard à l’approche retenue par Campine, il y a lieu, aux fins de la présente procédure, de considérer comme acquis les éléments factuels et les éléments de preuve qui ne sont pas contestés par cette dernière ainsi que les conclusions que la Commission en tire dans la décision attaquée. Lors de l’audience, interrogée à ce sujet par le Tribunal, Campine a d’ailleurs déclaré qu’elle ne remettait en cause la décision attaquée qu’en ce qui concerne les allégations qui y sont formulées à son égard et que dans la mesure où une quelconque infraction aux règles de la concurrence qui y est décrite lui était imputée.

106    Enfin, il convient de rappeler certains principes en matière de charge et d’administration de la preuve des comportements anticoncurrentiels.

107    Conformément à une jurisprudence bien établie, dans le domaine du droit de la concurrence, il appartient à la Commission de rapporter la preuve des infractions qu’elle constate et d’établir les éléments de preuve propres à démontrer, à suffisance de droit, l’existence des faits constitutifs d’une infraction (arrêts du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission, C‑185/95 P, EU:C:1998:608, point 58, et du 14 octobre 2004, Dresdner Bank/Commission, T‑44/02, non publié, EU:T:2004:299, point 59).

108    S’il subsiste un doute dans l’esprit du juge, il doit profiter à l’entreprise destinataire de la décision constatant une infraction (voir arrêt du 12 avril 2013, CISAC/Commission, T‑442/08, EU:T:2013:188, point 92 et jurisprudence citée). En effet, la présomption d’innocence constitue un principe général du droit de l’Union, qui est énoncé à l’article 48, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, lequel s’applique aux procédures relatives à des violations des règles de concurrence susceptibles d’aboutir à l’infliction d’amendes ou d’astreintes (voir, en ce sens, arrêt du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission, C‑89/11 P, EU:C:2012:738, points 72 et 73).

109    Ainsi, il est nécessaire que la Commission fasse état de preuves précises et concordantes pour établir l’existence de l’infraction et pour fonder la ferme conviction que les infractions alléguées constituent des restrictions de la concurrence au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE (voir arrêt du 12 avril 2013, CISAC/Commission, T‑442/08, EU:T:2013:188, point 96 et jurisprudence citée).

110    Toutefois, chacune des preuves apportées par la Commission ne doit pas nécessairement répondre à ces critères en ce qui concerne chaque élément de l’infraction. Il suffit que le faisceau d’indices invoqué par l’institution, apprécié globalement, réponde à cette exigence (voir arrêt du 27 juin 2012, Coats Holdings/Commission, T‑439/07, EU:T:2012:320, point 40 et jurisprudence citée).

111    En effet, les indices invoqués par la Commission dans la décision qui est attaquée afin de prouver l’existence d’une violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE par une entreprise doivent être appréciés non pas isolément, mais dans leur ensemble (arrêts du 8 juillet 2008, BPB/Commission, T‑53/03, EU:T:2008:254, point 185, et du 12 décembre 2014, Eni/Commission, T‑558/08, EU:T:2014:1080, point 35).

112    Il convient également de tenir compte du fait que les activités que des pratiques et des accords anticoncurrentiels comportent se déroulent de manière clandestine, que les réunions se tiennent secrètement et que la documentation qui y est afférente est réduite au minimum. Il s’ensuit que, même si la Commission découvre des pièces attestant de manière explicite une prise de contact illégitime entre des opérateurs, celles-ci ne seront normalement que fragmentaires et éparses, de sorte qu’il se révèle souvent nécessaire de reconstituer certains détails par des déductions. Dès lors, dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de concurrence (arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, points 55 à 57, et du 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission, C‑403/04 P et C‑405/04 P, EU:C:2007:52, point 51).

113    En outre, lorsqu’il s’agit d’une infraction s’étendant sur plusieurs années, le fait que la preuve directe de la participation d’une société à cette infraction pendant une période déterminée n’a pas été apportée ne fait pas obstacle à ce que cette participation, également pendant cette période, soit constatée, pour autant que cette constatation repose sur des indices objectifs et concordants (arrêt du 17 septembre 2015, Total Marketing Services/Commission, C‑634/13 P, EU:C:2015:614, point 27).

114    Il convient également de relever que, selon la jurisprudence, s’il incombe à l’autorité qui allègue une violation des règles de concurrence d’en apporter la preuve, il appartient à l’entreprise soulevant un moyen de défense contre la constatation d’une infraction à ces règles d’apporter la preuve que les conditions d’application de la règle dont est déduit ce moyen de défense sont remplies, de sorte que ladite autorité devra alors recourir à d’autres éléments de preuve (arrêt du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, point 29).

115    De surcroît, même si la charge de la preuve incombe, selon ces principes, soit à la Commission, soit à l’entreprise concernée, les éléments factuels qu’une partie invoque peuvent être de nature à obliger l’autre partie à fournir une explication ou une justification, faute de quoi il est permis de conclure qu’il a été satisfait aux règles en matière de charge de la preuve (arrêt du 17 juin 2010, Lafarge/Commission, C‑413/08 P, EU:C:2010:346, point 30).

116    Ainsi, lorsque la Commission se fonde sur des éléments de preuve qui sont, en principe, suffisants pour démontrer l’existence de l’infraction, il ne suffit pas que l’entreprise concernée évoque la possibilité qu’une circonstance s’est produite, qui pourrait affecter la valeur probante de ces éléments de preuve, pour que la Commission supporte la charge de prouver que cette circonstance n’a pas pu affecter la valeur probante de ceux-ci. Au contraire, sauf dans les cas où une telle preuve ne pourrait être fournie par l’entreprise concernée, en raison du comportement de la Commission elle-même, il appartient à l’entreprise concernée d’établir à suffisance de droit, d’une part, l’existence de la circonstance qu’elle invoque et, d’autre part, que cette circonstance met en cause la valeur probante des éléments de preuve sur lesquels se fonde la Commission (arrêt du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission, C‑89/11 P, EU:C:2012:738, point 76).

117    Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, aucune disposition ni aucun principe général du droit de l’Union n’interdit à la Commission de se prévaloir, à l’encontre d’une entreprise, des déclarations d’autres entreprises incriminées. Si tel n’était pas le cas, la charge de la preuve de comportements contraires aux articles 101 et 102 TFUE, qui incombe à la Commission, serait insoutenable et incompatible avec la mission de surveillance de la bonne application de ces dispositions qui lui est attribuée par le traité FUE (voir arrêt du 27 juin 2012, Coats Holdings/Commission, T‑439/07, EU:T:2012:320, point 46 et jurisprudence citée).

118    Une certaine méfiance à l’égard de dépositions volontaires des principaux participants à une entente illicite est compréhensible, dès lors que ces derniers pourraient minimiser l’importance de leur contribution à l’infraction et maximiser celle des autres. Néanmoins, compte tenu de la logique inhérente à la procédure prévue par la communication sur la coopération, le fait de demander le bénéfice de son application en vue d’obtenir une réduction du montant de l’amende ne crée pas nécessairement une incitation à présenter des éléments de preuve déformés quant aux autres participants à l’entente incriminée. En effet, toute tentative d’induire la Commission en erreur pourrait remettre en cause la sincérité ainsi que la complétude de la coopération de l’entreprise et, partant, mettre en danger la possibilité pour celle-ci de tirer pleinement bénéfice de ladite communication (voir, par analogie, arrêt du 27 juin 2012, Coats Holdings/Commission, T‑439/07, EU:T:2012:320, point 47 et jurisprudence citée).

119    En particulier, il y a lieu de considérer que le fait pour une personne d’avouer qu’elle a commis une infraction et d’admettre ainsi l’existence de faits qui dépassent ceux dont l’existence pouvait être déduite de manière directe des documents en question implique a priori, en l’absence de circonstances particulières de nature à indiquer le contraire, que cette personne a pris la résolution de dire la vérité. Ainsi, les déclarations allant à l’encontre des intérêts du déclarant doivent, en principe, être considérées comme des éléments de preuve particulièrement fiables (voir arrêt du 27 juin 2012, Coats Holdings/Commission, T‑439/07, EU:T:2012:320, point 48 et jurisprudence citée).

120    Par ailleurs, la Cour a déjà eu l’occasion de souligner qu’une déclaration faite par une société reconnaissant l’existence d’une infraction commise par celle-ci induit des risques juridiques et économiques considérables, parmi lesquels, notamment, celui d’actions en dommages et intérêts devant des juridictions nationales dans le cadre desquelles l’établissement, par la Commission, de l’infraction dans le chef d’une société est susceptible d’être invoqué (voir arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission, C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, points 140 et 141 et jurisprudence citée).

121    Néanmoins, les déclarations faites par des entreprises concernées dans le cadre de demandes tendant au bénéfice de la communication sur la coopération doivent être appréciées avec prudence et, en général, ne sauraient être considérées comme des éléments de preuve particulièrement fiables si elles n’ont pas été corroborées par d’autres éléments (arrêt du 27 juin 2012, Coats Holdings/Commission, T‑439/07, EU:T:2012:320, point 49).

122    En effet, selon une jurisprudence constante, la déclaration d’une entreprise à laquelle il est reproché d’avoir participé à une entente, dont l’exactitude est contestée par plusieurs autres entreprises inculpées, ne peut être considérée comme constituant une preuve suffisante de l’existence d’une infraction commise par ces dernières sans être étayée par d’autres éléments de preuve (voir arrêt du 27 juin 2012, Coats Holdings/Commission, T‑439/07, EU:T:2012:320, point 50 et jurisprudence citée), étant entendu que le degré de corroboration requis peut être moindre, du fait de la fiabilité des déclarations en cause (arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission, C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, point 135).

123    C’est à la lumière de ces observations qu’il convient d’examiner les arguments et griefs avancés par Campine.

b)      Sur la première branche du deuxième moyen, tirée d’une appréciation erronée des éléments de preuve

1)      Arguments des parties

124    Campine affirme qu’il n’existe aucune preuve directe de l’existence d’un accord illicite sur les prix d’achat entre elle-même et l’un des autres destinataires de la décision attaquée. En particulier, aucun des six contacts retenus à son endroit par la Commission ne saurait être qualifié d’anticoncurrentiel ni établir qu’elle avait participé à l’entente en cause. En substance, Campine soutient s’être limitée à entretenir des contacts avec son principal client, JCI, avec lequel elle avait conclu des contrats de travail à façon. Or, la Commission aurait expressément reconnu, dans la décision attaquée, que les contacts se rapportant à ces contrats n’étaient pas anticoncurrentiels. Par ailleurs, Campine prétend que les déclarations faites par les demandeurs d’immunité ou de clémence sont vagues et contradictoires, et qu’elles comportent des incohérences ainsi que des erreurs. En outre, certains de ces demandeurs auraient eu tendance à « trop avouer » ou à exagérer, et ce afin de bénéficier de la clémence. Enfin, Campine soutient que la Commission a interprété d’une manière totalement erronée les rares éléments de preuve documentaires existants, les a considérés en dehors de leur contexte, a « généralisé leur libellé secret, imprécis et fragmentaire » et n’a pas tenu compte des déclarations à décharge qu’elle avait fournies.

125    Plus particulièrement, en premier lieu, Campine prétend qu’il n’existe aucune preuve que la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009 avait un quelconque objectif anticoncurrentiel et estime qu’il est incorrect de la présenter comme étant la première réunion de l’entente au cours de laquelle les participants ont conclu un accord global concernant leur comportement futur sur le marché, ont décidé des moyens et des modèles de communication et ont développé un langage codé.

126    À cet égard, premièrement, Campine reproche à la Commission de ne pas avoir tenu compte du fait que cette réunion avait été organisée à l’initiative de JCI en vue de discuter des exigences réglementaires posées par le règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) no 793/93 du Conseil et le règlement (CE) no 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission (JO 2006, L 396, p. 1, et rectificatif JO 2007, L 136, p. 3), tel que modifié par le règlement (CE) no 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008 (JO 2008, L 353, p. 1) (ci-après le « règlement REACH »). Le représentant de Campine à cette réunion, à savoir M. C., aurait cru que celle-ci se limiterait à des discussions au sujet du règlement REACH, et rien dans le dossier de la Commission n’établirait qu’il savait qu’elle avait un quelconque objet anticoncurrentiel ou qu’il existait déjà des accords anticoncurrentiels entre les autres participants.

127    Deuxièmement, Campine fait grief à la Commission d’avoir dénaturé les déclarations effectuées par les demandeurs d’immunité ou de clémence au sujet de la réunion de Windhagen. Elle affirme que ces derniers n’ont pas reconnu qu’une quelconque entente globale portant sur les prix d’achat aurait été conclue lors de cette réunion ou du dîner ayant suivi. Ces déclarations ne prouveraient pas que les participants auraient discuté en détail des prix d’achat de déchets de batteries ou seraient convenus de ces prix d’achat. En réalité, ils se seraient limités à une discussion générale de très haut niveau sur le prix élevé des déchets de batteries. Enfin, aucun desdits demandeurs n’aurait déclaré que Campine était impliquée dans un accord sur les prix d’achat.

128    Troisièmement, Campine prétend que le seul élément de preuve documentaire sur lequel la Commission s’est fondée pour établir l’objet anticoncurrentiel de la réunion de Windhagen consiste en une feuille de papier contenant des notes manuscrites rédigées par M. G. (Campine) (ci-après les « notes manuscrites »), qui n’était pas présent à cette réunion, durant une conversation qu’il avait eue en interne avec M. C. (Campine) quelques jours après ladite réunion. Après avoir relevé que les notes manuscrites devaient être interprétées avec la plus grande prudence, Campine fait valoir qu’elles ne reflètent nullement ce qui a été discuté lors de la réunion de Windhagen, mais ne contiennent que des réflexions, spéculations et estimations de MM. G. et C. au sujet du marché allemand. Elle précise que, à cette époque, elle avait perdu son principal fournisseur en Allemagne à la suite de l’acquisition de celui-ci par Eco-Bat et que MM. G. et C. réfléchissaient donc ensemble à l’opportunité d’établir un nouveau partenariat sur le marché allemand. Elle souligne que M. C. avait rencontré M. M. (JCI) le 24 septembre 2009 pour discuter de la négociation annuelle du contrat de travail à façon et que les notes manuscrites se rapportent également, et surtout, à cette dernière rencontre. Ces notes ne prouveraient donc pas qu’une réunion multilatérale anticoncurrentielle s’était tenue à Windhagen.

129    Quatrièmement, Campine fait valoir que, à la suite de la réunion de Windhagen, elle n’a été impliquée dans aucune discussion sur les prix avec les autres participants à l’entente.

130    En deuxième lieu, Campine conteste l’interprétation que la Commission donne du courriel du 10 février 2010. Elle rejette l’affirmation de la Commission selon laquelle les différents participants tentaient de dissimuler le caractère illicite de leurs contacts en utilisant dans leurs communications un langage codé faisant référence à des conditions météorologiques. Eco-Bat aurait d’ailleurs expressément déclaré qu’il n’y avait pas eu d’accord sur l’utilisation d’un tel langage codé. Par ailleurs, le fait d’avoir recours à une terminologie se rapportant aux conditions météorologiques n’aurait rien de surprenant dans le secteur du recyclage des batteries, dès lors que les ventes de batteries neuves dépendraient largement desdites conditions, des hivers froids entraînant une augmentation de la demande et des hivers doux une baisse de celle-ci. Le courriel en cause pourrait ainsi se comprendre comme faisant référence à des températures basses, des hivers froids étant profitables aux activités de JCI et de Campine. Une autre explication plausible aux références aux conditions météorologiques dans le courriel serait que M. C. entendait conclure celui-ci, qui se rapporterait au contrat de travail à façon conclu entre Campine et JCI, d’une manière positive en recourant à l’humour ou à l’ironie compte tenu de la personnalité « particulière » de M. M. Ce serait d’ailleurs à la Commission qu’il appartiendrait de prouver que le courriel du 10 février 2010 n’a aucun rapport avec ce contrat.

131    Campine ajoute que, si les participants avaient réellement tenté de dissimuler des communications illicites secrètes, ils n’auraient pas utilisé un tel langage codé, qui serait si aisé à déchiffrer et attirerait encore plus l’attention. Lors de l’audience, elle a affirmé qu’il ressortait clairement de la version intégrale du courriel du 10 février 2010, auquel elle avait finalement eu accès au cours de la procédure devant le Tribunal (voir point 73 ci-dessus), qu’il concernait exclusivement la relation de travail à façon qu’elle avait avec JCI et des négociations relatives à la rémunération de ce travail.

132    Enfin, Campine relève qu’aucune réponse à ce courriel n’a été trouvée lors de l’enquête ni produite par JCI.

133    En troisième lieu, Campine soutient qu’il n’existe aucune preuve de sa participation à l’accord sur les prix d’achat maximaux qui aurait été conclu lors de la réunion qui s’est tenue à Cologne le 4 avril 2011. Elle affirme que la raison officielle de cette réunion était de discuter des exigences posées par le règlement REACH et que M. C. (Campine) s’est retrouvé dans une situation délicate lorsque des discussions relatives au marché ont débuté, ne pouvant s’en distancier publiquement, car elles étaient menées et coordonnées par JCI, qui était son client le plus important. En tout état de cause, le fait que, par la suite et jusqu’au mois de mars 2012 au moins, elle n’ait pas été invitée à participer à un quelconque contact anticoncurrentiel concernant l’entente indiquerait qu’elle s’était distanciée de celle-ci. Par ailleurs, elle prétend que JCI, Eco‑Bat et Recylex ont donné des indications incohérentes au sujet de cette réunion dans leurs demandes d’immunité ou de clémence et dans leurs déclarations subséquentes. En outre, les déclarations faites par ces entreprises au sujet des discussions intervenues lors de ladite réunion ne seraient corroborées par aucun élément de preuve. En particulier, la Commission n’aurait trouvé aucune note prise durant la réunion du 4 avril 2011. Enfin, M. C. n’aurait absolument pas participé aux échanges intervenus entre les autres participants à la réunion postérieurement à celle-ci.

134    En quatrième lieu, Campine considère que l’existence d’un quelconque contact anticoncurrentiel entre elle-même et JCI ne saurait être déduite du SMS que M. M. (JCI) a envoyé à M. C. (Campine) le 7 mars 2012. Premièrement, Campine fait valoir que ce SMS était très vague et qu’il lui a vraisemblablement été adressé par erreur, JCI ayant d’ailleurs reconnu qu’elle n’était pas intéressée par les prix sur le marché allemand. Deuxièmement, Campine souligne que l’auteur du SMS lui-même a déclaré qu’il ne se rappelait pas du contexte dans lequel celui-ci avait été envoyé et n’a pas confirmé la nature anticoncurrentielle de ce contact. Troisièmement, Campine affirme qu’il n’est pas prouvé que M. C. a reçu le SMS, qu’il y a répondu ou qu’il y a réservé un quelconque autre suivi. Quatrièmement, Campine prétend que les trois destinataires du SMS en ont chacun donné une interprétation différente.

135    En cinquième lieu, Campine conteste la position de la Commission selon laquelle il ressort de certains contacts intervenus au cours du mois de mai 2012 qu’elle avait discuté avec JCI des prix relatifs aux Pays-Bas. À cet égard, premièrement, elle fait valoir que l’allégation selon laquelle M. M. (JCI) a informé son collègue, M. Co. (JCI), responsable « Open Market », qu’il appellerait M. C. (Campine) au plus tard le 16 mai 2012 afin d’aligner le nouveau niveau de prix pour les Pays-Bas n’est corroborée par aucun élément de preuve, à l’exception d’une déclaration orale de JCI. Deuxièmement, elle prétend qu’il ne saurait être déduit des SMS des 29 et 31 mai 2012 qu’elle a eu un comportement anticoncurrentiel. Au contraire, ces SMS démontreraient qu’elle ne souhaitait pas jouer le jeu des trois autres entreprises concernées et qu’elle fixait ses prix de manière autonome. Par ailleurs, M. M. aurait probablement fait croire qu’il avait M. C. sous son contrôle, alors même que cela n’était pas forcément le cas. Enfin, les messages échangés en mai 2012 concerneraient tous des prix passés.

136    En sixième lieu, s’agissant du contact qu’elle aurait eu avec JCI à la fin du mois de juin 2012, tout d’abord, Campine invoque une violation de ses droits de la défense, en ce que la Commission, d’une part, n’aurait pas indiqué dans la communication des griefs que les courriels internes échangés entre MM. C. (Campine) et G. (Campine) les 27 juin et 2 juillet 2012 constituaient des éléments de preuve d’un comportement anticoncurrentiel et, d’autre part, se serait fondée sur deux réponses de JCI à des demandes de renseignements auxquelles Campine n’aurait pas eu accès pour conclure que cette dernière avait commis un acte anticoncurrentiel le 27 juin 2012. S’agissant de ce dernier point, Campine relève que, dans sa communication des griefs, la Commission a déclaré que le dernier contact anticoncurrentiel pour lequel elle avait des éléments de preuve la concernant avait eu lieu le 31 mai 2012. Ensuite, Campine conteste avoir eu un contact anticoncurrentiel avec JCI le 27 juin 2012. Elle prétend que le courriel interne de cette même date de M. C. à M. G. doit se comprendre comme signifiant que M. C. discutait avec JCI, en tant que partie au contrat de travail à façon, le prix d’achat des déchets de batteries que Campine avait « empruntés » à partir du stock de déchets de JCI qu’elle détenait dans le cadre dudit contrat. Elle ajoute qu’elle n’a pas pris part aux accords sur les prix conclus entre les participants à l’entente durant la semaine du 21 au 27 juin 2012. Le courriel interne du 2 juillet 2012 de M. G. ne prouverait pas l’existence d’un quelconque contact illicite ou accord sur les prix ; elle aurait simplement pu recevoir certains signaux du marché et s’être adaptée au niveau général des prix du marché.

137    La Commission rejette les arguments invoqués par Campine au sujet des six contacts anticoncurrentiels retenus à son endroit, tout en critiquant l’approche de cette dernière consistant à contester sa participation à l’entente en examinant chacun de ces contacts séparément.

2)      Appréciation du Tribunal

i)      Sur la réunion organisée à Windhagen le 23 septembre 2009

138    Aux considérants 65 à 71 de la décision attaquée, la Commission a examiné la teneur des discussions intervenues lors d’une réunion organisée à Windhagen le 23 septembre 2009, à laquelle, ainsi qu’il ressort du dossier et qu’il est constant entre les parties, était présent chacun des destinataires de cette décision, en l’occurrence Campine (en la personne de M. C.), Eco-Bat (en la personne de M. H.), JCI (en la personne de M. M.) et Recylex (en la personne de M. D.). Il ressort également du dossier que la réunion avait été organisée à l’initiative de JCI, par l’intermédiaire de M. M., et qu’elle avait officiellement pour but de discuter des exigences réglementaires posées par le règlement REACH.

139    En premier lieu, il convient de souligner que, contrairement à ce que prétend Campine, la Commission n’a pas considéré la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009 comme étant la première réunion de l’entente au cours de laquelle les participants à celle-ci ont conclu un « accord global » concernant leur comportement futur sur le marché, ont décidé des moyens et des modèles de communication et ont développé un langage codé. Ainsi qu’il ressort notamment du considérant 244 de la décision attaquée, la Commission s’est fondée sur cette réunion pour déterminer la date du début de l’infraction, ladite réunion étant la première qui avait rassemblé les quatre entreprises concernées et au sujet de laquelle elle disposait d’éléments de preuve clairs et convaincants. En outre, comme cela résulte du considérant 64 de la décision attaquée, c’est à partir de la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009 que les contacts entre lesdites entreprises sont devenus plus concrets.

140    Si, pour les motifs qui seront examinés ci-après, la Commission a considéré que la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009 était de nature anticoncurrentielle, toutefois, à aucun endroit de la décision attaquée, elle n’a prétendu que les participants y avaient conclu un quelconque « accord global » concernant leur comportement futur sur le marché. En revanche, aux fins de qualifier les différents agissements reprochés aux entreprises concernées d’infraction unique et continue, la Commission a vérifié s’ils présentaient un lien de complémentarité, en ce sens que chacun d’entre eux était destiné à faire face à une ou à plusieurs conséquences du jeu normal de la concurrence, et contribuaient, par le biais d’une interaction, à la réalisation de l’ensemble des effets anticoncurrentiels voulus par leurs auteurs, dans le cadre d’un plan d’ensemble visant un objectif unique (voir considérants 197 à 208 de la décision attaquée). C’est sur la base d’une appréciation globale de la totalité des éléments de preuve dont elle disposait, et pas seulement de ceux relatifs aux discussions intervenues lors de la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009, que la Commission a conclu, au considérant 209 de la décision attaquée, que « chaque participant a[vait] contribué intentionnellement au plan d’ensemble qui visait à fausser l’évolution normale des prix sur le marché des déchets de batteries automobiles plomb-acide ».

141    La Commission n’a pas davantage conclu, à un quelconque endroit de la décision attaquée, que, lors de la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009, les participants s’étaient mis d’accord sur les « moyens et modèles de communication » et avaient mis au point un « langage codé ». Bien au contraire, au considérant 56 de cette décision, elle a relevé qu’« il n’existait aucune règle spécifique quant à la manière dont les parties devaient communiquer entre elles ». S’agissant plus particulièrement du langage codé, elle a constaté, au considérant 208 de la décision attaquée, que « [c]ertaines des personnes impliquées utilisaient un [tel] langage […] dans certaines de leurs communications, en faisant par exemple référence à des conditions météorologiques ». Pour autant, elle n’a pas prétendu que ce langage codé, utilisé occasionnellement par certaines des personnes concernées, avait été explicitement conçu ou développé, que ce soit lors de la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009 ou à un autre moment, en tant qu’élément essentiel au fonctionnement de l’entente. En outre, aucun des éléments de preuve auxquels elle renvoie à l’appui de la constatation susmentionnée ne se rapporte à cette dernière réunion.

142    En deuxième lieu, il convient de considérer que, contrairement à ce que prétend Campine, la Commission a démontré à suffisance de droit la nature anticoncurrentielle de la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009.

143    À cet égard, force est de constater que, dans leurs déclarations orales, JCI, Eco-Bat et Recylex ont reconnu sans équivoque le caractère anticoncurrentiel des échanges qui avaient eu lieu lors de cette réunion.

144    Ainsi, notamment, JCI a indiqué, dans sa déclaration orale du 5 mai 2014, que les personnes mentionnées au point 138 ci-dessus, dont M. C. (Campine), avaient « discuté des prix d’achat maximaux pour les déchets de batteries et s’étaient mis[es] d’accord [sur ceux-ci] ». Dans le même sens, Eco-Bat, dans sa déclaration orale du 26 novembre 2012, a affirmé que « la réunion avait pour objet des discussions au sujet du règlement REACH », mais que, « pour autant que M. [H. (Eco-Bat)] se souvienne, il utilisait (comme pour le dîner de Cologne […]) la référence à REACH comme une couverture pour des discussions concernant les prix d’achat de déchets de batteries ». Quant à Recylex, elle a notamment exposé, dans sa déclaration orale du 23 octobre 2012, qu’une réunion intitulée « REACH-Infoveranstaltung » avait été organisée dans un hôtel à Windhagen « afin de discuter des prix des déchets de batteries » et, dans sa déclaration orale du 17 décembre 2012, après avoir souligné que M. C. y était présent, que « [le] but de la réunion multilatérale était de coordonner d’autres prix pour les déchets de batteries en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas », que « M. [D. (Recylex)] s’[était] senti agressé parce que, selon les autres participants, Recylex proposait des prix trop élevés à ses fournisseurs ». Dans cette dernière déclaration, Recylex a également indiqué que, « [e]n 2009, les prix des déchets de batteries étaient si élevés par rapport aux cours du plomb du LME qu’il était devenu très difficile pour toutes les entreprises recyclant des déchets de batteries de gagner leur vie » et que, « [d]ans ce contexte, la réunion d’information REACH visait à rassembler les acteurs du marché […] et à trouver un accord pour faire baisser les prix proposés pour les déchets de batteries ».

145    L’allégation de Campine selon laquelle Recylex a indiqué, dans sa déclaration orale du 23 octobre 2012, que les parties « ne s’entendaient généralement pas sur les prix lors des réunions » est inexacte. En effet, ce qu’a déclaré Recylex, c’est que les contacts anticoncurrentiels n’avaient généralement pas lieu lors de réunions annuelles d’associations ou d’événements professionnels auxquels tous les concurrents et fournisseurs étaient présents. Bien au contraire, dans la même déclaration, Recylex a exposé que, lors des réunions bilatérales et multilatérales, les participants échangeaient des informations sur les prix qu’ils proposaient pour les déchets de batteries et sur ceux qu’ils entendaient proposer dans un avenir proche, et que l’objet de ces réunions était de parvenir à un « accord commun » visant à maintenir les prix proposés aux fournisseurs à un certain niveau, à réduire ces prix à un certain niveau ou à concurrence d’un certain montant et à protéger des « territoires naturels/réservés » de la concurrence.

146    Par ailleurs, contrairement à ce que laisse entendre Campine, la crédibilité des déclarations orales effectuées par JCI, Eco-Bat et Recylex ne saurait être mise en doute. À cet égard, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence mentionnée aux points 117 à 120 ci-dessus, les déclarations allant à l’encontre du déclarant doivent, en principe, être considérées comme des éléments de preuve particulièrement fiables.

147    Les indications relatives à la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009 figurant dans les déclarations orales de JCI, d’Eco‑Bat et de Recylex sont d’autant plus fiables qu’elles sont corroborées par les notes manuscrites, lesquelles rendent compte du contenu des discussions intervenues lors de cette réunion.

148    À cet égard, tout d’abord, il convient d’écarter l’allégation de Campine selon laquelle ces notes ne se rapportent pas à la réunion multilatérale de Windhagen du 23 septembre 2009, mais principalement à une réunion organisée le lendemain entre elle-même, en la personne de M. C., et JCI, en la personne de M. M., dans les locaux de cette dernière, situés à proximité de Windhagen, et ayant pour objet la négociation annuelle du contrat de travail à façon, et contiennent des réflexions, des spéculations et des estimations de MM. G. (Campine) et C. au sujet du marché allemand.

149    Certes, il est constant entre les parties qu’une réunion bilatérale, distincte de la réunion multilatérale du 23 septembre 2009, a eu lieu entre Campine et JCI le 24 septembre 2009. Ainsi, dans sa déclaration orale du 5 mai 2014, JCI a indiqué que « [MM. C. (Campine) et M. (JCI)] s’étaient également rencontrés durant une “petite heure” le matin du 24 septembre 2009 pour “discuter un peu affaires ensemble” ». Certes également, la partie supérieure des notes manuscrites contient la mention « réunion REACH du [jeudi] 24/09/2009 ». Toutefois, plusieurs éléments contredisent l’allégation de Campine selon laquelle ces notes concernent avant tout la réunion bilatérale du 24 septembre 2009. À cet égard, premièrement, il y a lieu de relever qu’elles font mention du prénom de l’ensemble des représentants de Campine, de JCI, d’Eco-Bat et de Recylex qui avaient précisément participé à la réunion du 23 septembre 2009. Deuxièmement, il doit être constaté qu’il ressort d’une comparaison des notes prises à l’occasion de la réunion bilatérale du 24 septembre 2009, saisies par la Commission lors de son inspection dans les locaux de Campine, et des notes manuscrites qu’elles ont un contenu clairement différent, de sorte que ces dernières ne reflètent manifestement pas la teneur des discussions intervenues lors de ladite réunion. Troisièmement, ainsi qu’il sera exposé plus en détail au point 150 ci-après, les notes manuscrites font état d’informations commerciales sensibles, relatives notamment à d’autres entreprises concernées que Campine ou JCI, qui ne constituent pas de simples réflexions ou spéculations au sujet du marché allemand ou se rapportent à une négociation concernant le renouvellement d’un contrat de travail à façon entre ces deux dernières entreprises.

150    Ensuite, force est de constater que les notes manuscrites contiennent différentes informations établissant qu’il s’agit d’un compte rendu de discussions anticoncurrentielles qui ont eu lieu lors de la réunion multilatérale du 23 septembre 2009. Y apparaissent notamment des indications sur les prix et marges d’Eco-Bat, sur les parts de marché, en volume, de JCI, d’Eco-Bat et de Recylex en Allemagne ainsi que sur les prix « départ usine » de Recylex et les prix « DDP [rendus droits acquittés] » des autres entreprises présentes sur le marché. Par ailleurs, il est fait état dans les notes manuscrites de ce que la stratégie poursuivie par Recylex sur le marché allemand est « agressive » – en ce sens, selon les explications données par cette dernière dans sa déclaration orale du 17 décembre 2012, que, aux yeux de ses concurrents, elle y achète les déchets de batteries à des prix trop élevés – et que, dès lors, elle enverrait un « signal » aux marchés belge et néerlandais. Figurent également dans cette note des indications sur les intentions en matière de prix pour la semaine suivante, à savoir une révision à la baisse afin de maintenir un « statu quo » en Allemagne s’agissant des parts de marché, ainsi qu’une référence au fait que JCI entend développer ses activités sur le marché français.

151    Par ailleurs, il convient de rejeter les explications de Campine au sujet du contenu des notes manuscrites. Outre ce qui est constaté au point 150 ci-dessus, il y a lieu de relever que cette dernière n’apporte aucun élément de preuve au soutien de son allégation selon laquelle les chiffres identifiés audit point comme se rapportant aux prix et aux marges d’Eco-Bat étaient fondés sur des informations publiques ni au soutien de celle selon laquelle les informations relatives aux prix « départ usine » de Recylex et aux prix « DDP » des autres entreprises présentes sur le marché ont été obtenues dans le cadre de contacts légitimes avec des fournisseurs. S’agissant des chiffres relatifs aux parts de marché de JCI, d’Eco-Bat et de Recylex en Allemagne, ils ne se déduisent pas du communiqué de presse de Recylex concernant ses résultats semestriels 2009, invoqué à cet égard par Campine.

152    Enfin, il y a lieu d’ajouter que c’est en vain que Campine affirme que les notes manuscrites sont le seul élément de preuve que la Commission ait pu trouver pour corroborer les déclarations orales, s’agissant du caractère anticoncurrentiel de la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009. Cette affirmation repose sur l’approche fondamentalement erronée de Campine consistant à examiner séparément les six contacts spécifiquement retenus à son endroit, en faisant abstraction des dizaines d’autres contacts anticoncurrentiels identifiés dans la décision attaquée ainsi que de l’ensemble des éléments factuels et des éléments de preuve s’y rapportant (voir point 104 ci-dessus). Or, de très nombreux contacts anticoncurrentiels décrits par la Commission à la section 4 de la décision attaquée, que Campine ne remet nullement en cause (voir point 105 ci-dessus), établissent que, à la suite de la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009, les participants à l’entente ont effectivement mis en œuvre l’objectif de coordination de leur politique en matière de prix d’achat de déchets de batteries automobiles qui y avait été convenu. Si, certes, la participation de Campine à ces autres contacts anticoncurrentiels a été très limitée, il n’en demeure pas moins qu’ils constituent des éléments de preuve pertinents supplémentaires de la nature des discussions intervenues lors de ladite réunion.

153    En troisième lieu, quant à l’allégation de Campine selon laquelle M. C. (Campine) pensait que la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009 se limiterait à une discussion sur la réglementation REACH et n’avait connaissance ni de son objet anticoncurrentiel ni d’éventuels accords ou pratiques concertées anticoncurrentiels préexistants entre les trois autres participants, force est de constater qu’elle ne saurait prospérer. En effet, même si ces circonstances étaient avérées, il aurait appartenu à Campine de se distancier publiquement du contenu de la réunion dès qu’elle avait eu connaissance de sa nature anticoncurrentielle, ce qu’elle n’a pas fait en l’espèce. À cet égard, il importe de relever que, conformément à la jurisprudence de la Cour, la distanciation publique est requise afin qu’une entreprise qui a participé à des réunions collusoires puisse établir que sa participation était dépourvue de tout esprit anticoncurrentiel. À cette fin, l’entreprise en cause doit démontrer qu’elle avait indiqué à ses concurrents qu’elle participait à ces réunions dans une optique différente de la leur (voir, en ce sens, arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, points 81 et 82 et jurisprudence citée). La Cour a également jugé que la participation d’une entreprise à une réunion anticoncurrentielle crée une présomption du caractère illicite de cette participation, présomption que cette entreprise doit renverser par la preuve d’une distanciation publique, laquelle doit être perçue comme telle par les autres participants à l’entente (voir, en ce sens, arrêt du 3 mai 2012, Comap/Commission, C‑290/11 P, non publié, EU:C:2012:271, points 74 à 76 et jurisprudence citée).

154    Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que la Commission a démontré à suffisance de droit que la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009, à laquelle Campine avait participé, avait un objet anticoncurrentiel.

ii)    Sur le courriel du 10 février 2010

155    Aux considérants 73 à 76 de la décision attaquée, la Commission a examiné la teneur du courriel du 10 février 2010, dont le dernier alinéa se lit comme suit :

« En Belgique et aux Pays-Bas, la baisse de température se poursuit. De l’air chaud continue toutefois de provenir d’Allemagne, ce qui contribue à un réchauffement général de la planète. Vous pourriez peut-être essayer de souffler de l’air frais de votre côté afin de protéger également l’environnement. »

156    Selon la Commission, par ces indications rédigées dans un langage codé, Campine signalait à JCI que les prix d’achat étaient en baisse en Belgique et aux Pays-Bas, mais qu’il n’y avait aucun signe de baisse en Allemagne, et invitait cette dernière à réduire les prix qu’elle était disposée à payer dans ce dernier pays.

157    L’interprétation ainsi donnée par la Commission de ce passage du courriel du 10 février 2010 est convaincante et démontre la participation de Campine à un contact anticoncurrentiel.

158    À cet égard, tout d’abord, force est de constater que cette interprétation est confirmée par JCI elle-même qui, dans sa déclaration orale du 13 novembre 2012, a indiqué que, « en cohérence avec l’utilisation d’analogies météorologiques dans d’autres cas, il s’agissait d’une invitation faite à M. [M. (JCI)] de baisser les prix d’achat dans la continuité des efforts entrepris par Campine ou d’autres fonderies ».

159    Ensuite, il convient de considérer que l’utilisation d’un langage codé faisant référence à des conditions météorologiques démontre que Campine et JCI avaient pleinement conscience de la nature anticoncurrentielle de leur échange. L’explication de Campine selon laquelle l’utilisation d’une terminologie se rapportant aux conditions météorologiques n’a rien de surprenant dans le secteur du recyclage des batteries, en ce que les ventes de batteries neuves dépendent dans une large mesure desdites conditions, n’est tout simplement pas crédible. N’est pas davantage crédible son explication alternative selon laquelle M. C. (Campine) entendait de la sorte conclure son courriel, qui se rapportait prétendument au contrat de travail à façon qui liait Campine à JCI, avec humour ou ironie. En effet, comme le relève à juste titre la Commission, rien dans le contexte du courriel ou dans le langage utilisé dans le passage incriminé de celui-ci ne permet de comprendre ledit passage en ce sens.

160    Les explications de Campine sont d’autant moins convaincantes que, dans d’autres communications anticoncurrentielles entre des participants à l’entente autres qu’elle-même, il a également été fait usage d’un tel langage codé pour dissimuler des informations portant sur des coordinations de prix. Il en va ainsi, notamment, des échanges de courriels intervenus entre Eco-Bat et JCI les 27 avril, 5 août et 26 septembre 2011, dont des passages sont reproduits aux considérants 96, 97, 114 et 128 de la décision attaquée. Dans le même sens, il doit être relevé que, dans sa déclaration orale du 24 juillet 2014, JCI a indiqué que les participants essayaient de garder secrètes leurs discussions en matière de prix d’achat, notamment en utilisant un « langage camouflage » dans leurs courriels.

161    Le fait, invoqué par Campine, que les participants à l’entente n’étaient pas formellement convenus d’utiliser, dans leurs communications, un langage codé faisant référence à des conditions météorologiques est dénué de pertinence dès lors qu’il ne fait aucun doute que le passage incriminé du courriel du 10 février 2010 a un contenu anticoncurrentiel. Ainsi que l’avance à juste titre la Commission, un message destiné à inciter un concurrent à modifier sa politique en matière de prix est anticoncurrentiel, qu’il soit rédigé à l’aide d’un langage codé ou non. En outre, il convient de rappeler que la Commission n’a jamais prétendu que l’utilisation d’un langage codé était une caractéristique essentielle du modèle de contacts anticoncurrentiels (voir point 141 ci-dessus).

162    Enfin, l’allégation de Campine selon laquelle l’intégralité du courriel du 10 février 2010, à savoir même s’agissant du passage incriminé de celui-ci, s’inscrit exclusivement dans le contexte légitime des relations en matière de contrat de travail à façon qu’elle entretenait avec JCI ne saurait être accueillie. En effet, ainsi que cela a déjà été relevé au point 100 ci-dessus, si, certes, les passages occultés de ce courriel concernent des discussions apparemment légitimes relatives à un contrat de travail à façon entre JCI et Campine, ils se distinguent toutefois manifestement tant sur la forme que sur le fond du passage du même courriel retenu à l’endroit de cette dernière dans la décision attaquée. Ce dernier passage est donc étranger à un éventuel contrat de travail à façon entre Campine et JCI.

163    Il résulte des considérations qui précèdent que la Commission a démontré à suffisance de droit la nature anticoncurrentielle du passage incriminé du courriel du 10 février 2010.

iii) Sur la réunion organisée à Cologne le 4 avril 2011

164    Aux considérants 90 à 92 de la décision attaquée, la Commission a examiné la teneur des discussions intervenues lors d’une réunion multilatérale qui a eu lieu à Cologne le 4 avril 2011 dans le cadre d’un dîner. Elle a relevé, en substance, que la finalité réelle de cette réunion était d’avoir des échanges sur les prix des déchets de batteries aux Pays-Bas et de dresser une liste des fournisseurs de chaque participant. M. M. (JCI) aurait coordonné les contacts ultérieurs entre les participants, contacts qui auraient principalement eu lieu par SMS.

165    En premier lieu, il doit être relevé qu’il ressort du dossier et qu’il est constant entre les parties que, lors de cette réunion, étaient présents des représentants de chacun des destinataires de la décision attaquée, en l’occurrence Campine (en la personne de M. C.), Eco-Bat (en la personne de M. H.), JCI (en la personne de M. M.) et Recylex (en la personne de M. R.).

166    En deuxième lieu, il convient de considérer que la Commission a démontré à suffisance de droit que ladite réunion, si elle avait pour objet officiel de discuter des exigences réglementaires posées par le règlement REACH, avait toutefois un contenu anticoncurrentiel.

167    À cet égard, force est de constater que, dans leurs déclarations orales, JCI, Eco-Bat et Recylex ont chacune reconnu la nature anticoncurrentielle des échanges intervenus lors de la réunion organisée à Cologne le 4 avril 2011. Ainsi, dans sa déclaration orale du 13 novembre 2012, JCI a indiqué que cette réunion avait pour objet de « discuter de la coordination des prix » et que « les participants avaient discuté des niveaux de prix actuels dans les régions respectives ainsi que des prix d’achat maximaux pour les déchets de batteries ». Dans sa déclaration orale du 20 décembre 2013, elle a confirmé que l’objet de cette réunion multilatérale était de « discuter des prix ». Dans sa déclaration orale du 8 octobre 2012, Eco-Bat a indiqué que les personnes mentionnées au point 165 ci-dessus « s’étaient réunies à l’occasion d’un dîner à Cologne […] pour discuter collectivement du problème des prix d’achat élevés et croissants des batteries au plomb », qu’elles « s’étaient mises d’accord pour fixer un prix d’achat maximal qui serait un montant spécifique en euros inférieur au prix du marché applicable à l’époque pour les achats en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique ». Dans sa déclaration orale du 19 octobre 2012, Eco-Bat a ajouté que, « [d]urant le dîner, le secteur des batteries usagées en Allemagne et aux Pays-Bas avait fait l’objet d’un longue discussion », que « [M. C. (Campine)] avait également évoqué le marché belge » et que « [l]a discussion avait également porté sur la poursuite d’une approche commune visant à faire baisser les prix des batteries usagées ». Quant à Recylex, dans sa déclaration orale du 17 décembre 2012, elle a précisé que « [l]’objectif de la réunion était de contrôler le prix du marché pour les déchets de batteries aux Pays-Bas et de dresser une liste des fournisseurs respectifs », que « [l]a réunion avait également porté sur les marchés belge et allemand », que, « [d]urant la réunion, les parties avaient discuté des prix d’achat des déchets de batteries » et que, « [a]près la réunion, les échanges entre les parties s’étaient effectués principalement par SMS (environ 2 à 6 par mois) ».

168    Contrairement à ce que fait valoir Campine, les indications données par JCI, Eco-Bat et Recylex au sujet de la réunion organisée à Cologne le 4 avril 2011 dans leurs déclarations orales sont cohérentes et attestent sans ambiguïté de la nature anticoncurrentielle des discussions intervenues lors de cette réunion. S’il est vrai que lesdites indications comportent quelques divergences, celles-ci ne sont toutefois que mineures et ne portent que sur des points de détail relatifs à l’organisation pratique de la réunion.

169    En outre, il y a lieu de constater que la nature anticoncurrentielle de la réunion du 4 avril 2011 est corroborée par les échanges de SMS et de courriels intervenus à la suite de celle-ci entre certaines des entreprises concernées, décrits aux considérants 93 et suivants de la décision attaquée et auxquels Recylex fait référence dans sa déclaration orale du 17 décembre 2012 (voir point 167 ci-dessus). Il ressort clairement de ces échanges, à l’égard desquels Campine n’avance aucun argument, qu’ils visaient à mettre en œuvre l’entente sur les prix d’achat discutée lors de cette réunion. Ainsi, notamment, comme cela est exposé au considérant 93 de la décision attaquée, le 8 avril 2011, M. H. (Eco-Bat) a envoyé à M. M. (JCI) le SMS suivant :

« [M.], beaucoup trichent […] Toujours au-dessus de 700. Nous allons avoir des problèmes si vous ne mettez pas la pression. Pour les autres tricheurs, je vous raconterai quand vous m’appellerez demain. »

170    Le fait que M. C. (Campine) n’ait pas pris part à ces échanges postérieurs à la réunion du 4 avril 2011 est dénué de pertinence, ceux-ci étant invoqués pour appuyer le constat de la Commission relatif à la nature anticoncurrentielle de cette réunion, à laquelle Campine reconnaît avoir été présente et du contenu de laquelle elle ne s’est pas publiquement distanciée (voir point 172 ci-après).

171    Quant au fait que la Commission n’ait pas trouvé de notes prises durant la réunion du 4 avril 2011, il ne saurait, eu égard aux principes posés par la jurisprudence rappelée au point 112 ci-dessus, suffire pour remettre en cause le constat relatif à son caractère anticoncurrentiel, qui repose sur des déclarations orales cohérentes et fiables des trois autres participants à l’entente et sur des échanges ultérieurs de SMS et de courriels.

172    En troisième lieu, il convient de rejeter l’argument de Campine tiré de ce qu’il n’existe aucune preuve de la participation active de M. C. (Campine) aux discussions intervenues lors de la réunion de Cologne du 4 avril 2011. En effet, d’une part, il y a lieu de rappeler que les accords et les pratiques concertées visés à l’article 101, paragraphe 1, TFUE résultent nécessairement du concours de plusieurs entreprises, qui sont toutes coauteurs de l’infraction, mais dont la participation peut revêtir des formes différentes, en fonction notamment des caractéristiques du marché concerné et de la position de chaque entreprise sur ce marché, des buts poursuivis et des modalités d’exécution choisies ou envisagées. Par conséquent, la simple circonstance que chaque entreprise participe à l’infraction dans des formes qui lui sont propres ne suffit pas pour exclure sa responsabilité pour l’ensemble de l’infraction, y compris pour les comportements qui sont matériellement mis en œuvre par d’autres entreprises participantes, mais qui partagent le même objet ou le même effet anticoncurrentiel (arrêts du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, EU:C:1999:356, points 79 et 80, et du 6 mars 2012, UPM-Kymmene/Commission, T‑53/06, non publié, EU:T:2012:101, point 53). D’autre part, Campine, dont la participation à la réunion en cause n’est pas contestée, ne s’est, de son propre aveu (voir point 133 ci-dessus), pas distanciée publiquement du contenu de cette réunion. Or, ainsi que cela a déjà été indiqué au point 153 ci-dessus, selon la jurisprudence, la participation d’une entreprise à une réunion anticoncurrentielle crée une présomption du caractère illicite de cette participation, présomption que cette entreprise doit renverser par la preuve d’une distanciation publique, laquelle doit être perçue comme telle par les autres participants à l’entente.

173    Il résulte de ce qui précède que la Commission a démontré à suffisance de droit la nature anticoncurrentielle de la réunion multilatérale à laquelle Campine a participé à Cologne le 4 avril 2011.

iv)    Sur les SMS de M. M. (JCI) du 7 mars 2012

174    Aux considérants 150 à 153 de la décision attaquée, la Commission a examiné le contenu de SMS envoyés le 7 mars 2012 par M. M. (JCI) à MM. C. (Campine), R. (Recylex) et H. (Eco-Bat). Elle a relevé que, ce jour-là, à 15 h 36, M. M. avait envoyé séparément à MM. C. et R. un SMS qui se lisait comme suit : « Je vous appelle lundi, la direction à suivre est la même que celle discutée la dernière fois – bon weekend MM ». Elle a également relevé que, le même jour, à 16 h 29, M. M. avait envoyé un SMS à M. H. qui indiquait ce qui suit : « Le marché est sur la bonne voie, prochaine étape la semaine prochaine – puis-je appeler début de la semaine prochaine ? ».

175    Il convient de considérer que la Commission était fondée à déduire de ces éléments la participation de Campine à un échange anticoncurrentiel visant à coordonner les prix d’achat de déchets de batteries.

176    En effet, en premier lieu, il doit être relevé que ces SMS ont été envoyés presque simultanément par le représentant de JCI aux représentants des trois autres entreprises destinataires de la décision attaquée et qu’ils ont, en substance, le même contenu.

177    En deuxième lieu, force est de constater, eu égard au contexte général de l’infraction et à la manière dont l’entente était organisée (voir considérants 49 à 58 de la décision attaquée), que ces SMS révèlent que JCI donnait aux trois autres participants à l’entente des instructions sur la « direction » (ou la « voie ») à suivre en ce qui concerne le prix d’achat des déchets de batteries et que le respect de ces instructions était contrôlé. Il ressort également de ces SMS qu’ils inscrivaient dans un dispositif de coordination de ces prix qui était en cours entre les participants à l’entente (« la même que celle discutée la dernière fois » et « prochaine étape la semaine prochaine – puis-je appeler début de la semaine prochaine ? »).

178    En troisième lieu, il convient de relever que la nature anticoncurrentielle de ce contact a été confirmée par Recylex, qui, dans sa déclaration orale du 5 mai 2014, a notamment indiqué ce qui suit concernant le SMS que M. R. (Recylex) avait reçu de M. M. (JCI) :

« Le 7 mars 2012, il y a eu un échange de SMS entre M. [R.] et M. [M.], à la suite d’une baisse des prix du plomb au LME. M. [M.] avait pris l’initiative de ce contact, probablement en accord avec M. [H. (Eco-Bat)]. Le but de cet échange de SMS était de fixer un nouveau prix indicatif pour les déchets de batteries pour le marché allemand. D’après le souvenir de M [R.], l’échange de SMS a probablement été suivi d’un appel téléphonique le 21 mars 2012 entre MM. [R., M. et H.] pour discuter d’une baisse des prix. À la suite de l’appel du 21 mars 2012, M. [R.] a envoyé un courriel, le 22 mars 2012, aux directeurs des achats du groupe Recylex pour les informer de la baisse de prix à proposer aux fournisseurs néerlandais et allemands de déchets de batteries. »

179    La nature anticoncurrentielle du contact en cause a également été confirmée par JCI qui, dans sa déclaration orale du 5 mai 2014, a notamment indiqué ce qui suit :

« Le message […] a été envoyé aux trois entreprises intéressées par le marché des déchets aux Pays-Bas puisque chacune de ces trois entreprises achète des déchets de batteries aux Pays-Bas auprès des collecteurs de ferraille et des ferrailleurs. Par les mots “la direction à suivre est la même que celle discutée la dernière fois”, M. [M. (JCI)] a indiqué qu’il respecterait les prix bas alors que le LME augmentait et que cela conduisait généralement à une augmentation des prix d’achat. Bien que M. [M.] ne parvienne pas à se souvenir du contexte de cet échange précis de SMS, il a admis de façon générale qu’il avait des contacts réguliers avec [notamment MM. C. (Campine) et R. (Recylex)]. Un tel échange de SMS était généralement suivi d’une conférence téléphonique entre les personnes [concernées] ou [de contacts bilatéraux] entre [chacune de celles-ci] et M. [M.]. »

180    Certes, dans sa déclaration orale, Recylex fait référence tant au marché allemand qu’au marché néerlandais, tandis que, dans la sienne, JCI ne fait référence qu’à ce dernier marché. Toutefois, cette divergence n’affecte en rien la conclusion selon laquelle il ressort des SMS en cause que Campine a pris part à un contact anticoncurrentiel visant à coordonner les prix d’achat de déchets de batteries.

181    En quatrième lieu, il convient de constater qu’aucun des arguments invoqués par Campine ne saurait conduire à une conclusion différente.

182    Ainsi, premièrement, eu égard aux considérations exposées aux points 176 et 177 ci-dessus, il ne saurait être affirmé que les SMS du 7 avril 2012 étaient très vagues.

183    Deuxièmement, rien ne permet de croire que le SMS de M. M. (JCI) ait été envoyé par erreur à M. C. (Campine). À cet égard, il est inexact de prétendre que JCI a reconnu que Campine n’était pas intéressée par les prix sur le marché allemand. Ce que JCI a indiqué dans sa déclaration orale du 13 novembre 2012, à laquelle Campine renvoie, c’est que « [l]e niveau d’implication des participants [à l’entente] variait quelque peu en fonction de la région dont ils discutaient » et que « [s]i les prix d’achat aux Pays-Bas présentaient un intérêt équivalent et constituaient un sujet de discussion pour les cinq entreprises, les prix allemands présentaient un intérêt primordial pour JCI, Eco-Bat et Recylex ». Le fait que les prix sur le marché allemand étaient d’un intérêt de premier ordre pour ces trois dernières entreprises n’implique pas pour autant qu’ils étaient dépourvus d’intérêt pour Campine. Au contraire, comme le relève à juste titre la Commission dans ses écritures, il ressort d’autres éléments de preuve (voir, plus particulièrement, l’examen du courriel du 10 février 2010 aux points 155 à 163 ci-dessus) que Campine était intéressée par les prix sur le marché allemand et consciente de l’influence qu’ils avaient sur d’autres marchés.

184    Troisièmement, il est inexact de prétendre que l’expéditeur des SMS, à savoir JCI, n’a pas confirmé la nature anticoncurrentielle de ce contact (voir point 179 ci-dessus).

185    Quatrièmement, n’est pas déterminant le fait que la Commission n’ait pas trouvé d’éléments de preuve démontrant que M. C. (Campine) avait bien reçu le SMS envoyé par M. M. (JCI). En effet, comme il ressort de la jurisprudence rappelée au point 112 ci-dessus, compte tenu de la nature clandestine des ententes, les preuves explicites d’un comportement collusoire peuvent n’être que fragmentaires et éparses, de sorte que la Commission est en droit d’inférer l’existence d’une pratique anticoncurrentielle de coïncidences et d’indices. En l’espèce, eu égard au fait qu’il est établi qu’un SMS a été envoyé par M. M. à, notamment, M. C., aux explications données par JCI et Recylex dans leurs déclarations orales et à la manière dont l’entente était organisée, il n’était pas nécessaire que la Commission découvre, en outre, le SMS correspondant sur l’appareil de M. C.

186    Il n’était pas davantage nécessaire que la Commission prouve que M. C. (Campine) avait répondu au SMS de M. M. (JCI) ou qu’il y avait réservé une quelconque suite concrète. En effet, la simple réception, par une entreprise, d’informations sur les prix, y compris sur les intentions en matière de fixation de prix, émanant d’un concurrent est susceptible d’éliminer, ou à tout le moins de réduire, l’incertitude stratégique concernant le comportement futur sur le marché en cause.

187    Il résulte de ce qui précède que la Commission a démontré à suffisance de droit la nature anticoncurrentielle du contact intervenu par SMS entre JCI et Campine le 7 mars 2012.

v)      Sur certains contacts intervenus au cours du mois de mai 2012

188    Aux considérants 159 à 169 de la décision attaquée, la Commission a analysé plusieurs courriels, SMS et autres contacts impliquant les quatre participants à l’entente. Elle a notamment conclu de ces différents contacts que Campine avait discuté avec JCI des prix d’achat aux Pays-Bas (considérant 163 de la décision attaquée) et avait participé à un accord sur les futurs prix d’achat dans ce pays (considérant 169 de la décision attaquée).

189    L’analyse de la Commission comporte deux volets : le premier figure aux considérants 159 à 163 de la décision attaquée et le second aux considérants 164 à 169 de cette décision.

190    Ainsi, en premier lieu, la Commission, se fondant sur des indications données par JCI dans sa déclaration orale du 24 juillet 2014, a notamment constaté que, dans un courriel interne de cette dernière du 15 mai 2012, M. M. avait informé son collègue M. Co. qu’il s’était mis d’accord avec Eco-Bat et Recylex pour réduire les niveaux de prix en Allemagne de 640 euros environ à 550 euros à partir du 21 mai 2012 et qu’il appellerait M. C. (Campine) au plus tard le lendemain afin d’aligner le nouveau niveau de prix pour les Pays-Bas (considérant 159 de la décision attaquée). Il ressort de courriels internes d’Eco-Bat et de JCI en date des 16 et 18 mai 2012, dont le contenu est reproduit aux considérants 160 et 161 de la décision attaquée, que ces deux entreprises ont appliqué la réduction de prix convenue.

191    En second lieu, la Commission a fait état d’un courriel interne de Recylex, envoyé le 24 mai 2012 à 10 h 41, dans lequel un représentant de cette entreprise indiquait ce qui suit à, notamment, M. R. (Recylex) : « En ce moment, les prix payés en [Belgique et aux Pays-Bas] sont de 580 euros PDU [prix départ usine]. Campine continue à payer 600 euros livré et à faire la nouvelle publicité partout en Wallonie. Regelink est à 640 euros PDU [aux Pays-Bas] » (considérant 164 de la décision attaquée). La Commission a relevé que, le même jour à 10 h 52, M. R. avait envoyé le SMS suivant à M. M. (JCI) : « [M.], du succès avec 550 euros PDU [aux Pays-Bas] ? » (considérant 165 de la décision attaquée).

192    La Commission a également fait état du SMS suivant, envoyé le 29 mai 2012 par M. R. (Recylex) à M. M. (JCI) : « Merci d’appeler [Campine], qui fixe le prix à 600 euros PDU [aux Pays-Bas] » (considérant 166 de la décision attaquée). Elle a relevé que, le 31 mai 2012, à 13 h 59, M. M. avait envoyé un SMS à M. C. (Campine) dans lequel il indiquait ce qui suit : « [C.], es-tu dans la fourchette discutée hier ? » (considérant 167 de la décision attaquée). Elle a ajouté que, à 16 h 18 le même jour, M. M. avait adressé le SMS suivant à M. R. : « J’ai vérifié auprès de lui – jamais au niveau que vous mentionnez ». Enfin, elle a relevé que, à 17 h 16, toujours le même jour, M. C. avait répondu par SMS en ces termes à M. M. : « Oui, certainement. Depuis la semaine dernière, rien ne dépasse le niveau normal. J’en suis certain » (considérant 168 de la décision attaquée).

193    Il y a lieu de faire remarquer que Campine ne remet pas en cause les éléments de preuve mentionnés aux points 190 à 192 ci-dessus. En revanche, elle conteste l’interprétation qu’en donne la Commission.

194    Or, force est de constater qu’il ressort d’une appréciation de ces éléments de preuve dans leur ensemble que, premièrement, les autres participants à l’entente considéraient que Campine prenait part à une collusion visant à réduire les prix d’achat des déchets de batteries, deuxièmement, JCI et Campine discutaient de la coordination des prix d’achat sur le marché néerlandais et, troisièmement, Campine respectait les niveaux de prix convenus ou, à tout le moins, voulait en donner l’impression aux autres entreprises concernées.

195    L’allégation de Campine selon laquelle les échanges en cause concernaient des niveaux antérieurs de prix ne saurait être accueillie. En effet, ces échanges révèlent clairement un accord concernant les niveaux futurs des prix d’achat de déchets de batteries. Plus particulièrement, ils démontrent que les participants à l’entente cherchaient à réduire les prix d’achat aux Pays-Bas à 550 euros, prix départ usine.

196    Il convient également de rejeter l’allégation de Campine selon laquelle il ressort desdits échanges que cette dernière ne « jouait pas le jeu » des trois autres participants à l’entente et déterminait ses prix de manière autonome. À cet égard, il suffit de rappeler qu’il ressort de l’échange de SMS du 31 mai 2012 mentionné au point 192 ci-dessus que Campine a confirmé auprès de JCI, en réponse à une question en ce sens de cette dernière, qu’elle respectait le niveau de prix discuté la veille. En tout état de cause, comme le fait valoir à juste titre la Commission dans ses écritures, en indiquant – même éventuellement de manière trompeuse – à JCI qu’elle respectait les niveaux de prix convenus, Campine a contribué au bon fonctionnement de l’entente en donnant l’impression aux autres participants à celle-ci qu’elle mettait activement en œuvre l’accord relatif aux niveaux des prix d’achat de déchets de batteries. En outre, il convient de faire remarquer que, comme il résulte de la jurisprudence, même à supposer établi le fait que certains participants à l’entente parvenaient à tromper d’autres participants en transmettant des informations incorrectes et à utiliser l’entente à leur profit en ne la respectant pas, l’infraction commise n’est pas éliminée par ce simple fait (voir arrêt du 13 septembre 2013, Total Raffinage Marketing/Commission, T‑566/08, EU:T:2013:423, point 184 et jurisprudence citée).

197    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de considérer que la Commission a démontré à suffisance de droit la participation de Campine à des contacts anticoncurrentiels intervenus durant la seconde moitié du mois de mai 2012.

vi)    Sur certains contacts intervenus au cours du mois de juin 2012

198    Aux considérants 174 à 180 de la décision attaquée, la Commission a analysé certains échanges intervenus entre les participants à l’entente à la fin du mois de juin 2012. Elle a considéré qu’il résultait de ces échanges que ces derniers, y compris Campine, s’étaient mis d’accord pour réduire les prix d’achat des déchets de batteries.

199    Ainsi, tout d’abord, la Commission a constaté que, le 21 juin 2012, M. R. (Recylex) avait envoyé le SMS suivant à M. M. (JCI) : « [S]uite à la nouvelle baisse au LME, on suggère de descendre à 500 euros PDU la semaine prochaine. Merci de confirmer » (considérant 174 de la décision attaquée). Il ressort de la déclaration orale de JCI du 13 novembre 2012 que ce message indiquait les niveaux de prix indicatifs que les participants à l’entente cherchaient à atteindre.

200    Ensuite, la Commission a fait état d’un courriel interne de Recylex du 26 juin 2012 envoyé par M. B. à deux autres représentants de cette entreprise, avec M. R. (Recylex) en copie, rédigé comme suit : « [À] la suite de notre conférence téléphonique d’hier et compte tenu de la situation [au LME], je donne de nouveaux prix à nos fournisseurs : livré à HMG 540 signifie 500 PDU. Espérons que ce signal incitera nos concurrents à suivre » (considérant 175 de la décision attaquée). Elle a relevé que, par un courriel interne du même jour, M. R. avait répondu à M. B. et aux deux autres représentants de Recylex en donnant un nouveau prix indicatif dans les termes suivants : « En raison de la nouvelle baisse [au LME], j’escompte que nous descendrons sous les 500 livré (donc 470 PDU) » (considérant 176 de la décision attaquée).

201    Par ailleurs, la Commission a relevé que, le 27 juin 2012, à 11 h 43, M. M. (JCI) avait adressé le SMS suivant à M. R. (Recylex) : « Bonjour [M. H. (Eco-Bat)] et moi avons discuté de la deuxième étape à venir la semaine prochaine, ton niveau proposé la semaine dernière doit être le bon – s’il te plaît, appelle-moi » (considérant 177 de la décision attaquée). Elle a également relevé que, le même jour, à 22 h 04, M. C. (Campine) avait envoyé un courriel à M. G. (Campine), ayant pour objet « nouveaux prix à partir de lundi », dans lequel il indiquait ce qui suit : « [G.], j’ai eu [M. M.] en ligne : convenus de descendre à 500 euros à partir de lundi de la semaine prochaine pour suivre la baisse récente du LME. L’objectif est – si le LME reste ainsi – de diminuer encore de 50 euros dans 1 ou 2 semaines max. Merci de transmettre le message » (considérant 178 de la décision attaquée).

202    Enfin, la Commission a fait état d’un courriel interne du 2 juillet 2012 de M. G. (Campine) à son équipe commerciale ainsi qu’à M. C. (Campine), dans lequel il donnait instruction de baisser les prix proposés de 550 euros par tonne, prix départ usine, à 500 euros par tonne, prix départ usine, en précisant que, « si le LME rest[ait] bas, l’intention [était] de diminuer encore les prix à concurrence de 50 euros par tonne dans maximum une semaine ou deux » (considérant 179 de la décision attaquée).

203    Il y a lieu de relever que Campine remet en cause non les éléments de preuve mentionnés aux points 199 à 202 ci-dessus, mais l’interprétation qu’en donne la Commission.

204    Or, force est de constater que, comme le relève à juste titre la Commission au considérant 179 de la décision attaquée, les niveaux de prix indiqués dans le courriel interne de Campine du 2 juillet 2012 correspondent précisément à ceux qui avaient été discutés et convenus par les participants à l’entente entre les 21 et 27 juin 2012, ce qui démontre que cette entreprise avait exécuté l’accord de coordination des prix d’achat passé par ces derniers. Il convient de constater également que le courriel de M. C. (Campine) du 27 juin 2012 est manifestement lié, tant sur le fond que chronologiquement, aux contacts antérieurs du 21 juin 2012 entre Recylex et JCI et à ceux du 27 juin 2012 entre JCI et Eco-Bat et qu’il résulte de ce courriel que la décision de Campine d’appliquer lesdits niveaux de prix fait suite à un entretien téléphonique anticoncurrentiel intervenu entre MM. C. et M. (JCI) à la même date ou à une date très rapprochée.

205    Aucun des arguments avancés par Campine pour tenter de remettre en cause la nature anticoncurrentielle de ce dernier contact entre elle-même et JCI ne saurait prospérer.

206    Ainsi, rien dans le libellé du courriel de M. C. (Campine) du 27 juin 2012 ne permet de l’interpréter en ce sens qu’il portait sur une discussion avec JCI au sujet du prix d’achat à payer pour des déchets de batteries que Campine aurait « empruntés » à cette dernière à partir d’un stock de déchets qu’elle détenait dans le cadre d’un contrat de travail à façon qui les liait. Bien au contraire, il fait clairement référence à une coordination des prix d’achat. En outre, il doit être constaté que l’interprétation que Campine donne ainsi de son courriel interne n’est étayée par aucun élément de preuve crédible.

207    Par ailleurs, l’allégation de Campine selon laquelle elle a simplement pu recevoir certains signaux du marché et s’adapter aux niveaux de prix généraux applicables sur celui-ci est purement spéculative et contredite par des éléments de preuve, en particulier ses courriels internes des 27 juin et 2 juillet 2012.

208    Ne saurait davantage être accueilli le grief tiré par Campine de la violation de ses droits de la défense.

209    Ainsi, d’une part, c’est en vain que Campine soutient que, dans la communication des griefs, à la différence de la décision attaquée, la Commission, en violation de ses droits de la défense, n’avait pas retenu à son endroit le contact qu’elle aurait eu avec JCI le 27 juin 2012, ayant même déclaré, au point 308 de la communication des griefs, que « le dernier contact pour lequel il exist[ait] des éléments de preuve concernant Campine a[vait] eu lieu le 31 mai 2012 ». En effet, aux points 227 à 235 de la communication des griefs, il est expressément fait référence à ce contact ainsi qu’à ceux l’ayant précédé dans le même contexte. Aux points 108 à 117 de sa réponse à la communication des griefs, Campine se prononce d’ailleurs explicitement sur ces différents contacts. Il ne saurait donc être question d’une violation de ses droits de la défense.

210    D’autre part, Campine ne saurait reprocher à la Commission d’avoir, dans la décision attaquée, corroboré ses constatations relatives à la nature anticoncurrentielle du contact du 27 juin 2012 en s’appuyant sur deux réponses de JCI à des demandes de renseignements auxquelles elle n’aurait eu accès que le jour précédant le dépôt de sa requête dans la présente affaire. S’il est exact que ces deux réponses ont été ajoutées au dossier de la Commission après la notification de la communication des griefs, il n’en demeure pas moins qu’elles ne comportaient pas de nouveaux éléments à charge ou à décharge, de sorte que cette dernière n’était pas obligée d’y donner accès à Campine (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2011, Heineken Nederland et Heineken/Commission, T‑240/07, EU:T:2011:284, point 242). En effet, ainsi qu’il ressort du considérant 180 de la décision attaquée, la Commission n’a fait référence aux deux réponses en cause que pour réfuter l’allégation de Campine selon laquelle il existait une explication alternative au contact du 27 juin 2012, et non pour étayer son grief relatif à l’existence d’une infraction (voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2012, Telefónica et Telefónica de España/Commission, T‑336/07, EU:T:2012:172, point 78).

211    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la Commission a prouvé à suffisance de droit la nature anticoncurrentielle des six contacts collusoires retenus à l’endroit de Campine.

212    Partant, la première branche du deuxième moyen doit être rejetée comme non fondée.

c)      Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée de ce que les éléments de preuve fournis ne permettent pas d’étayer la constatation d’une infraction

1)      Arguments des parties

213    En premier lieu, Campine prétend que la Commission n’est pas parvenue à prouver qu’elle avait participé à l’accord global décrit dans la décision attaquée. Tout d’abord, aucun des six contacts anticoncurrentiels retenus à son endroit ne saurait raisonnablement être interprété comme démontrant qu’elle a pris part à des pratiques de fixation des prix d’achat. Ensuite, elle ne se serait jamais plainte d’un non-respect des prix convenus et n’aurait jamais demandé des mesures correctrices. Enfin, s’agissant des quatre contacts bilatéraux qu’elle a eus avec JCI, il ne serait nullement établi qu’elle avait la moindre raison de croire que les informations fournies à cette dernière seraient ensuite transmises à Recylex ou à Eco-Bat.

214    En deuxième lieu, Campine conteste que le comportement qui lui est imputé relève d’une infraction unique et continue.

215    À cet égard, premièrement, Campine affirme que la Commission n’a pas prouvé à suffisance de droit qu’elle avait pris part à un accord global avec les trois autres participants à l’entente poursuivant l’objectif commun de restreindre la concurrence sur le marché de l’achat des déchets de batteries automobiles plomb-acide dans quatre États membres. Tout d’abord, Campine n’aurait eu aucun intérêt à participer à un accord anticoncurrentiel couvrant ces quatre États membres dès lors que, d’une part, dans deux d’entre eux (l’Allemagne et la France), elle n’exerçait quasiment aucune activité durant la période infractionnelle et, d’autre part, sur le marché néerlandais, elle était liée par un contrat d’approvisionnement à long terme assorti d’un mécanisme de tarification fixe, avec une entreprise néerlandaise, qui représentait jusqu’à 78 % de ses achats sur ce marché. Ensuite, aucune des preuves documentaires ou des déclarations orales des entreprises concernées ne contiendrait d’indications selon lesquelles un plan d’ensemble aurait été discuté ou même mentionné lors de la réunion de Windhagen du 23 septembre 2009, laquelle date ne saurait donc être considérée comme étant le moment auquel Campine aurait adhéré à un tel plan. De même, il n’existerait aucune preuve qu’un accord global aurait été discuté lors de la réunion de Cologne du 4 avril 2011. En outre, Campine n’aurait pris part à aucun contact pendant les onze mois qui ont suivi cette dernière réunion. S’agissant des quatre autres contacts, purement bilatéraux, retenus à l’endroit de Campine, ils se seraient échelonnés sur presque deux ans et demi et rien dans le dossier ou dans la décision attaquée n’indiquerait qu’il ait jamais été fait référence, dans le cadre de ces contacts, à un accord global ou à une entente entre JCI, Eco‑Bat et Recylex. Enfin, Campine fait valoir que des contacts réguliers auraient été nécessaires pour la poursuite d’un plan d’ensemble visant à coordonner les politiques tarifaires. Sa participation, sur une période de plus de trois ans, à six contacts prétendument anticoncurrentiels ne saurait prouver qu’elle a pris part à un tel plan d’ensemble.

216    Dans la réplique, Campine, invoquant l’arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission (C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, point 245), ajoute que la Commission ne saurait fonder l’existence d’un plan d’ensemble sur la constatation « générique » d’un objectif commun consistant à fausser l’évolution normale des prix sur le marché des déchets de batteries.

217    Deuxièmement, Campine prétend que la Commission n’a pas prouvé qu’elle avait intentionnellement contribué au plan d’ensemble allégué. En particulier, ne constituerait pas un élément de preuve suffisant à cet égard le passage invoqué par la Commission du courriel du 10 février 2010. En tout état de cause, ce passage ne concernerait qu’une considération finale d’un courriel traitant d’autres questions légitimes. Enfin, elle n’aurait pris aucune initiative ni joué aucun rôle actif au sein de l’entente.

218    Troisièmement, Campine soutient que les éléments de preuve retenus à son endroit ne démontrent pas qu’elle avait connaissance de l’accord global impliquant les trois autres participants à l’entente. Plus précisément, il ne serait pas démontré qu’elle avait connaissance de la portée générale et des caractéristiques essentielles de l’entente globale. Elle affirme que la plupart des contacts la concernant se rapportaient à une seule partie, en l’occurrence JCI, son principal client. Les deux seuls contacts qu’elle avait eus avec d’autres parties auraient été des réunions ayant un objet légitime, qui avaient été organisées par JCI et auxquelles cette dernière l’avait invitée. En outre, elle n’aurait participé à aucun des nombreux contacts illicites intervenus après les réunions de Windhagen (23 septembre 2009) et de Cologne (4 avril 2011). Quant à l’utilisation, dans un seul courriel de M. C. (Campine) à M. M. (JCI), d’un langage codé, elle ne saurait prouver la connaissance du plan d’ensemble. Ce ne serait qu’à partir du moment où la Commission a procédé aux inspections inopinées que Campine aurait eu connaissance de l’étendue de l’accord entre les membres de l’entente.

219    Quatrièmement, Campine affirme que les six contacts retenus à son endroit par la Commission ne démontrent pas qu’elle a participé à une infraction continue sur une période de plus de trois ans. Eu égard au fait que ces contacts étaient très peu nombreux, sporadiques et isolés et que de longs intervalles de temps s’étaient écoulés entre eux, ils permettraient tout au plus d’établir qu’elle a commis une infraction unique et répétée. Au soutien de cette allégation, elle relève que les prix des déchets de batteries peuvent varier d’une semaine à l’autre, voire d’un jour à l’autre, que les prix fixés au LME changent continuellement, qu’il ressort des preuves documentaires que les contacts entre les trois autres participants à l’entente ne concernaient généralement des prix que pour une semaine spécifique, et que les prix différaient dans les quatre États membres concernés. Enfin, elle prétend s’être distanciée « diplomatiquement » des discussions intervenues lors des réunions multilatérales et n’avoir participé à aucun contact de suivi. Le simple fait qu’elle ne se soit pas distanciée publiquement de l’infraction serait, en tout état de cause, insuffisant pour considérer qu’elle a continué à participer à celle-ci.

220    En troisième lieu, Campine soutient que la Commission n’a pas établi que le comportement qui lui était imputé avait un objet ou un effet anticoncurrentiel. Ainsi, premièrement, elle estime qu’il ne saurait être déduit des faits de l’espèce qu’un accord horizontal de fixation des prix d’achat ayant pour objet de restreindre la concurrence a été conclu entre elle-même et les trois autres participants à l’entente. Les contacts sporadiques et isolés qu’elle a eus avec ceux-ci constitueraient tout au plus un échange indépendant d’informations vagues sur le marché en général. Deuxièmement, elle affirme qu’il ne saurait certainement être considéré qu’un tel échange d’informations a pu avoir des effets anticoncurrentiels, en particulier sur un marché où les prix changent si fréquemment et diffèrent d’un pays à un autre. En outre, l’infraction en cause n’aurait eu aucun effet sur les marges réalisées par Campine ni sur les prix qu’elle a pratiqués durant la période infractionnelle. Dans la réplique, Campine fait également valoir que, dans son analyse, la Commission aurait dû accorder une importance beaucoup plus importante au contexte de l’affaire.

221    La Commission rejette les arguments invoqués par Campine. Elle soutient que les éléments de preuve qu’elle a invoqués, considérés dans leur ensemble, établissent à suffisance de droit que Campine a pris part à une infraction unique et continue entre le 23 septembre 2009 et le 26 septembre 2012. Par ailleurs, elle avance que le comportement reproché aux participants à l’entente, y compris à Campine, était constitutif d’une restriction de concurrence par objet au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE.

2)      Appréciation du Tribunal

222    La seconde branche du deuxième moyen se subdivise en trois sous-branches. Ainsi, Campine prétend que la Commission n’a pas démontré à suffisance de droit, en premier lieu, qu’elle avait participé à l’entente décrite dans la décision attaquée, en deuxième lieu, que les six contacts retenus à son endroit relevaient d’une infraction unique et continue et, en troisième lieu, que le comportement qui lui était reproché avait un objet ou un effet anticoncurrentiel.

i)      Sur la question de savoir s’il est démontré que Campine a participé à l’entente

223    Il y a lieu de relever que, dans le cadre de la première sous-branche de la seconde branche du deuxième moyen, Campine remet en cause, en substance, trois appréciations faites par la Commission au considérant 190 de la décision attaquée, lequel concerne les contacts portant sur les prix et figure parmi une série d’appréciations visant à établir que le comportement anticoncurrentiel reproché aux entreprises concernées présente toutes les caractéristiques d’un accord et/ou d’une pratique concertée au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE (considérants 185 à 196 de la décision attaquée).

224    Ledit considérant se lit comme suit :

« En ce qui concerne les prix, les parties ont conclu des accords visant à réduire les prix proposés aux fournisseurs ou à les maintenir à un certain niveau, ou encore à réduire les prix proposés aux fournisseurs d’un certain montant, parfois par des réductions échelonnées sur une période de temps définie […] À d’autres moments, les parties se plaignaient que les prix convenus n’avaient pas été respectés et demandaient des mesures correctrices ou que l’instruction soit réitérée […] À d’autres moments encore, des instructions en matière de prix ou des indications temporelles étaient données ou demandées […] En tout état de cause, il existait un arrangement entre les parties en vertu duquel le contenu des communications bilatérales concernant le comportement décrit au considérant 189 serait transmis aux autres parties […] »

225    Il convient de relever également que, par les arguments qu’elle invoque au soutien de cette première sous-branche, Campine ne conteste pas que les différentes pratiques anticoncurrentielles identifiées au point 224 ci-dessus ont été qualifiées à bon droit par la Commission d’« accords » ou de « pratiques concertées » ni qu’elles constituaient certains aspects d’une entente en matière d’achat. Elle se borne à faire valoir qu’il ne saurait être déduit d’aucun des six contacts retenus à son endroit qu’elle a pris part à ces pratiques anticoncurrentielles ni, partant, à l’entente. Force est de constater que, outre le fait qu’une telle approche sélective ne saurait être acceptée (voir point 104 ci-dessus), lesdits arguments sont, en substance, identiques à certains de ceux qu’elle a avancés au soutien de la première branche du présent moyen et qui ont déjà été rejetés comme non fondés dans le cadre de l’examen de celle-ci.

226    Ainsi, tout d’abord, l’allégation de Campine selon laquelle il n’est pas démontré qu’elle a pris part à des pratiques de fixation des prix d’achat est clairement démentie par sa participation à la réunion de Windhagen le 23 septembre 2009 (voir points 138 à 154 ci-dessus) ainsi qu’à celle de Cologne le 4 avril 2011 (voir points 164 à 173 ci-dessus), par les contacts intervenus au cours du mois de mai 2012 (voir points 188 à 197 ci-dessus) et par son courriel interne du 27 juin 2012 (voir points 198 à 210 ci-dessus).

227    Ensuite, c’est en vain que Campine prétend ne pas être concernée par la constatation de la Commission selon laquelle il arrivait que les participants à l’entente se plaignent du non-respect des prix convenus. Il suffit, à cet égard, de renvoyer aux contacts examinés aux points 191 et 192 ci-dessus.

228    Enfin, il ressort notamment de l’examen des contacts intervenus au cours du mois de mai 2012 (voir points 188 à 197 ci-dessus) que Campine ne saurait raisonnablement prétendre qu’elle n’avait pas la moindre raison de croire que les informations qu’elle fournissait à JCI seraient transmises à Recylex ou à Eco-Bat. Plus généralement, le constat de la Commission selon lequel il existait un arrangement en vertu duquel le contenu des contacts intervenant entre deux participants était ensuite transmis aux autres participants est confirmé par Recylex dans sa déclaration orale du 23 octobre 2012, dans laquelle elle décrit le schéma de communication habituel au sein de l’entente.

229    Pour le surplus, il doit être constaté que les arguments invoqués par Campine au soutien de la présente sous-branche concernent davantage la question de savoir si la Commission a établi à suffisance de droit que le comportement qui lui est imputé s’inscrivait dans un plan d’ensemble ayant un objectif unique, laquelle question fait l’objet de la deuxième sous-branche examinée ci-après.

230    Partant, il convient de conclure que Campine n’a pas démontré que la Commission avait commis une erreur de droit ou d’appréciation en considérant qu’elle avait participé à l’entente en cause.

ii)    Sur la question de savoir si Campine a pris part à une infraction unique et continue

–       Observations liminaires

231    Comme cela a déjà été indiqué au point 45 ci-dessus, la Commission a constaté, aux considérants 197 à 230 de la décision attaquée, que chacun des aspects du comportement reproché aux entreprises concernées avait pour objet de restreindre le jeu de la concurrence et, partant, constituait une violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE. Elle a considéré qu’il pouvait toutefois être conclu que ces différentes violations individuelles de cette disposition constituaient ensemble une infraction unique et continue dont tous les participants à l’entente pouvaient être tenus pour responsables dès lors que, premièrement, le comportement de chacun de ceux-ci s’inscrivait dans un plan d’ensemble ayant un objectif anticoncurrentiel commun, deuxièmement, chacun de ces participants entendait contribuer à ce plan d’ensemble et, troisièmement, chacun desdits participants avait connaissance des comportements infractionnels des autres participants ou pouvait raisonnablement le prévoir et était prêt à en accepter le risque.

232    À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une violation de l’article 101, paragraphe 1, TFUE peut résulter non seulement d’un acte isolé, mais également d’une série d’actes ou bien encore d’un comportement continu, quand bien même un ou plusieurs éléments de cette série d’actes ou de ce comportement continu pourraient également constituer, en eux-mêmes et pris isolément, une violation de cette disposition. Ainsi, lorsque les différentes actions s’inscrivent dans un plan d’ensemble, en raison de leur objet identique faussant le jeu de la concurrence dans le marché intérieur, la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de ces actions en fonction de la participation à l’infraction considérée dans son ensemble (voir arrêt du 24 juin 2015, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce, C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416, point 156 et jurisprudence citée).

233    Une entreprise ayant participé à une telle infraction unique et complexe par des comportements qui lui étaient propres, qui relevaient des notions d’accord ou de pratique concertée ayant un objet anticoncurrentiel au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE et qui visaient à contribuer à la réalisation de l’infraction dans son ensemble peut ainsi être également responsable des comportements mis en œuvre par d’autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction. Tel est le cas lorsqu’il est établi que ladite entreprise entendait contribuer par son propre comportement aux objectifs communs poursuivis par l’ensemble des participants et qu’elle avait eu connaissance des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par d’autres entreprises dans la poursuite des mêmes objectifs, ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque (voir arrêt du 24 juin 2015, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce, C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416, point 157 et jurisprudence citée).

234    Ainsi, une entreprise peut avoir directement participé à l’ensemble des comportements anticoncurrentiels composant l’infraction unique et continue, auquel cas la Commission est en droit de lui imputer la responsabilité de l’ensemble de ces comportements et, partant, de cette infraction dans son ensemble. Une entreprise peut également n’avoir directement participé qu’à une partie des comportements anticoncurrentiels composant l’infraction unique et continue, mais avoir eu connaissance de l’ensemble des autres comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par les autres participants à l’entente dans la poursuite des mêmes objectifs, ou avoir pu raisonnablement les prévoir et avoir été prête à en accepter le risque. Dans un tel cas, la Commission est également en droit d’imputer à cette entreprise la responsabilité de l’ensemble des comportements anticoncurrentiels composant une telle infraction et, par la suite, de celle‑ci dans son ensemble (voir arrêt du 24 juin 2015, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce, C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416, point 158 et jurisprudence citée).

235    En revanche, si une entreprise a directement pris part à un ou à plusieurs des comportements anticoncurrentiels composant une infraction unique et continue, mais qu’il n’est pas établi que, par son propre comportement, elle entendait contribuer à l’ensemble des objectifs communs poursuivis par les autres participants à l’entente et qu’elle avait connaissance de l’ensemble des autres comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par ces participants dans la poursuite des mêmes objectifs ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque, la Commission n’est en droit de lui imputer la responsabilité que des seuls comportements auxquels elle a directement participé et des comportements envisagés ou mis en œuvre par les autres participants dans la poursuite des mêmes objectifs que ceux qu’elle poursuivait et dont il est prouvé qu’elle avait connaissance ou pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque (voir arrêt du 24 juin 2015, Fresh Del Monte Produce/Commission et Commission/Fresh Del Monte Produce, C‑293/13 P et C‑294/13 P, EU:C:2015:416, point 159 et jurisprudence citée).

236    En l’espèce, Campine ne remet pas en cause la qualification proprement dite d’infraction unique et continue de l’entente retenue aux considérants 197 à 230 de la décision attaquée. En revanche, elle conteste avoir pris part à une telle infraction, en faisant valoir que la Commission n’a pas démontré que les trois conditions mentionnées au point 231 ci-dessus étaient remplies dans son cas. Elle ajoute que les six contacts collusoires retenus à son endroit ne sont intervenus que sur une base ad hoc et que, partant, seule une infraction unique et répétée pourrait tout au plus lui être imputée.

–       Sur la participation de Campine à un plan d’ensemble poursuivant un objectif commun

237    Dans la décision attaquée, la Commission a conclu que les différents contacts bilatéraux et multilatéraux intervenus entre les quatre participants à l’entente, qu’elle avait précédemment examinés et qualifiés d’accords et/ou de pratiques concertées au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, s’inscrivaient dans un plan d’ensemble visant un objectif commun, à savoir fausser l’évolution normale des prix sur le marché des déchets de batteries automobiles plomb-acide (considérants 203 à 208 de la décision attaquée).

238    Plusieurs critères ont été identifiés par la jurisprudence comme étant pertinents pour apprécier le caractère unique d’une infraction, à savoir l’identité des objectifs des pratiques en cause, l’identité des produits et des services concernés, l’identité des entreprises qui y ont pris part et l’identité des modalités de sa mise en œuvre (voir arrêt du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, EU:T:2013:259, point 60 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission, C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, point 243). En outre, l’identité des personnes physiques impliquées pour le compte des entreprises et l’identité du champ d’application géographique des pratiques en cause sont des éléments susceptibles d’être pris en considération aux fins de cet examen (arrêt du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, EU:T:2013:259, point 60).

239    Force est de constater que ces différentes circonstances sont présentes en l’espèce, y compris en ce qui concerne Campine.

240    Ainsi, en premier lieu, il convient de valider le constat de la Commission dans la décision attaquée selon lequel les différents contacts collusoires participaient d’un même objectif commun de coordination des prix d’achat des déchets de batteries automobiles plomb-acide. La réalité de cet objectif est corroborée par les nombreux éléments de preuve contenus dans le dossier de la Commission, qui démontrent que les participants à l’entente l’ont mis en œuvre au moyen, notamment, de discussions et d’accords sur les prix indicatifs, les prix maximaux et les réductions de prix ainsi que d’échanges d’informations sur le comportement futur sur le marché et les négociations de prix avec les fournisseurs. En outre, comme cela est constaté au considérant 203 de la décision attaquée, dans leurs déclarations orales, les participants à l’entente autres que Campine ont confirmé cet objectif commun. Ainsi, notamment, Recylex a indiqué, dans sa déclaration orale du 23 octobre 2012, que l’« objectif ultime » des contacts collusoires était d’« obtenir une réduction des prix du marché pour l’achat de déchets de batteries ».

241    Il ressort clairement de l’examen des six contacts collusoires retenus à l’endroit de Campine (voir points 138 à 212 ci-dessus) que ceux-ci participaient de cet objectif commun. Ainsi, outre sa présence aux réunions multilatérales du 23 septembre 2009 à Windhagen et du 4 avril 2011 à Cologne, au cours desquelles les quatre membres de l’entente ont discuté et sont convenus des prix d’achat maximaux des déchets de batteries (voir points 138 à 154 et 164 à 173 ci-dessus), Campine, en février 2010, a activement cherché à influencer les prix d’achat offerts par l’un de ces membres (voir points 155 à 163 ci-dessus) et, en mars 2012, a pris part à un échange avec lesdits membres visant à coordonner les prix d’achat (voir points 174 à 187 ci-dessus). En mai 2012, elle a également discuté avec l’un des membres de l’entente de la coordination des prix d’achat sur le marché néerlandais, a participé à un arrangement sur les niveaux futurs de prix d’achat sur ce marché et a confirmé, auprès de ce même membre, qu’elle fixait ses prix dans la fourchette convenue (voir points 188 à 197 ci-dessus). Enfin, en juin 2012, elle a appliqué les prix d’achat convenus par les membres de l’entente (voir points 198 à 210 ci-dessus).

242    En deuxième lieu, les contacts collusoires en cause, y compris ceux retenus à l’endroit de Campine, concernaient les mêmes produits, à savoir les déchets de batteries automobiles plomb-acide.

243    En troisième lieu, lesdits contacts concernaient le même secteur géographique, à savoir la Belgique, l’Allemagne, la France et les Pays-Bas, même si le degré d’implication des participants à l’entente variait en fonction du territoire concerné.

244    En quatrième lieu, tout au long de la période infractionnelle, les contacts collusoires impliquaient non seulement les mêmes entreprises, mais aussi les mêmes personnes physiques agissant pour le compte de celles-ci, à savoir MM. M. (JCI), C. (Campine), D., B. et R. (Recylex) et H. (Eco-Bat).

245    En cinquième lieu, les contacts collusoires suivaient un même schéma. Ainsi, les réunions multilatérales de Windhagen du 23 septembre 2009 et de Cologne du 4 avril 2011, auxquelles Campine était présente, ont été organisées sous le prétexte de discussions concernant les exigences posées par la réglementation REACH. La plupart des autres contacts, dont ceux retenus à l’endroit de Campine, intervenaient sur une base bilatérale, au moyen d’appels téléphoniques, de courriels ou de SMS, et se déroulaient généralement comme suit : le représentant d’une des entreprises concernées contactait le représentant d’une autre de ces entreprises afin de convenir d’un prix indicatif maximal, et l’une de ces deux personnes contactait ensuite le représentant d’une troisième desdites entreprises afin de lui indiquer le prix convenu, ce dernier contactant éventuellement, à son tour, le représentant de la dernière des entreprises concernées. Il y a lieu de rappeler, en outre, que les participants à l’entente, et notamment Campine, utilisaient parfois un langage codé dans leurs communications (voir points 141 et 155 à 161 ci-dessus).

246    En sixième lieu, les contacts collusoires, qui intervenaient parfois simultanément, étaient liés entre eux et complémentaires. Ainsi, par exemple, s’agissant plus particulièrement de Campine, il a déjà été relevé au point 174 ci-dessus que, le 7 mars 2012, M. M. (JCI) a envoyé, à 15 h 36, des SMS identiques séparément à MM. C. (Campine) et R. (Recylex) et, à 16 h 29, un SMS ayant un contenu similaire à M. H. (Eco-Bat). De même, le courriel interne de Campine du 27 juin 2012, qui démontre que cette dernière appliquait les niveaux de prix d’achat convenus par les participants à l’entente, est lié tant sur le fond que chronologiquement aux contacts antérieurs du 21 juin 2012 entre Recylex et JCI et à ceux du 27 juin 2012 entre JCI et Eco-Bat (voir points 198 à 210 ci-dessus).

247    Partant, c’est à bon droit que la Commission a considéré que le comportement reproché à Campine s’inscrivait dans un plan d’ensemble visant un objectif commun.

248    Les arguments en sens contraire avancés par Campine ne sauraient convaincre.

249    Tout d’abord, c’est en vain que Campine objecte que la Cour, au point 245 de son arrêt du 19 décembre 2013, Siemens e.a./Commission (C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866), a déclaré que la notion d’objectif unique ne saurait être déterminée par une référence générale à la distorsion de la concurrence sur le marché concerné par l’infraction, dès lors que l’affectation de la concurrence constitue, en tant qu’objet ou effet, un élément inhérent à tout comportement relevant du champ d’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE. En l’espèce, en effet, ainsi qu’il ressort des points 237 et 240 ci-dessus, la notion d’objectif unique n’a pas été déterminée par une telle référence générale, mais par une référence spécifique à l’objectif de fausser l’évolution normale des prix sur le marché des déchets de batteries automobiles plomb-acide. En outre, les conclusions de la Commission relatives à l’existence d’un plan d’ensemble poursuivant un objectif unique se fondent sur les différents éléments objectifs mentionnés aux points 240 à 246 ci-dessus.

250    Ensuite, il y a lieu de considérer que le fait que les éléments de preuve recueillis par la Commission, en particulier ceux relatifs aux réunions multilatérales de Windhagen le 23 septembre 2009 et de Cologne le 4 avril 2011, ne fassent pas expressément référence à l’existence d’un plan d’ensemble n’est pas déterminant, celle-ci pouvant se déduire d’un ensemble de circonstances. En outre, l’argument de Campine procède d’une confusion, déjà relevée aux points 139 et 140 ci-dessus, entre la prétendue conclusion, par les participants à l’entente, d’un accord global concernant leur comportement futur sur le marché et la question de l’existence d’un plan d’ensemble poursuivant un objectif commun en tant que condition pour établir l’existence d’une infraction unique et continue.

251    Par ailleurs, le fait que les six contacts collusoires retenus à l’endroit de Campine soient intervenus sporadiquement sur la période infractionnelle et traduisent un degré de participation limité à l’entente n’exclut pas en soi qu’ils aient pu s’inscrire dans le même plan d’ensemble poursuivant un objectif commun que celui dans lequel s’inséraient les dizaines d’autres contacts collusoires identifiés aux considérants 59 à 182 de la décision attaquée.

252    Enfin, Campine ne saurait utilement tirer argument de ce qu’elle n’aurait eu aucun intérêt à participer à un accord anticoncurrentiel qui couvrait notamment les marchés allemand, français et néerlandais, soit trois des quatre marchés géographiques concernés. En effet, comme le fait valoir à juste titre la Commission dans ses écritures, cet argument n’a aucun rapport avec le critère objectif visant à savoir si les différents contacts collusoires relevaient d’un même plan d’ensemble, mais concerne plutôt le rôle subjectif spécifique de Campine dans l’infraction. En outre, selon la jurisprudence, il est indifférent, en ce qui concerne l’existence d’une infraction, que la commission de celle-ci ait été ou non dans l’intérêt commercial de l’entreprise concernée (voir, en ce sens, arrêt du 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission, C‑403/04 P et C‑405/04 P, EU:C:2007:52, points 44 à 46). En tout état de cause, les éléments de preuve démontrent que Campine a pris part à des contacts collusoires concernant, à tout le moins, les marchés allemand (voir, notamment, points 144, 150, 155 à 157 ci-dessus) et néerlandais (voir, notamment, points 144, 150, 155 à 157, 164 à 168 et 188 à 197 ci-dessus).

–       Sur la contribution intentionnelle de Campine au plan d’ensemble

253    Dans la décision attaquée, la Commission a conclu que chacun des participants à l’entente, en prenant part à des réunions multilatérales et à d’autres contacts anticoncurrentiels, avait contribué intentionnellement au plan d’ensemble visant à fausser l’évolution normale des prix sur le marché des déchets de batteries automobiles plomb-acide (considérants 209 à 214 de la décision attaquée). À cet égard, s’agissant plus particulièrement de Campine, la Commission a relevé, au considérant 214 de cette décision, que M. C., qui était directeur général au sein de cette entreprise, avait directement entretenu des contacts anticoncurrentiels avec tous les autres participants à l’entente en étant présent aux réunions multilatérales de Windhagen le 23 septembre 2009 et de Cologne le 4 avril 2011, que Campine avait aussi pris part à certains contacts anticoncurrentiels bilatéraux et que cette dernière avait, à certaines occasions, pris l’initiative de contacter d’autres participants.

254    Il ressort clairement de l’examen des six contacts collusoires retenus à l’endroit de Campine (voir points 138 à 212 ci-dessus) ainsi que des considérations exposées au point 241 ci-dessus que, par ces contacts, à tout le moins pour la période de sa propre participation à l’infraction, cette dernière entendait s’associer aux objectifs poursuivis par l’ensemble des membres de l’entente.

255    L’allégation de Campine selon laquelle elle n’a pris aucune initiative et n’a joué aucun rôle actif dans l’entente est non seulement dénuée de pertinence mais inexacte. En effet, d’une part, l’initiative d’un contact anticoncurrentiel n’est pas exigée pour établir l’intention de contribuer à un plan d’ensemble. D’autre part, Campine était à l’origine du contact collusoire matérialisé par le courriel du 10 février 2010 (voir points 155 à 163 ci-dessus), par lequel elle cherchait activement à influencer les décisions de l’un de ses concurrents en matière de fixation des prix d’achat. De plus, il ressort d’un courriel de M. G. (Campine) à M. C. (Campine) du 10 janvier 2011, dont un passage est reproduit au considérant 84 de la décision attaquée, que Campine vérifiait que les autres participants à l’entente respectaient bien les prix convenus au sein de celle-ci. Ce passage se lit comme suit : « Pour information. En ce moment, STCM [Eco-Bat] ne suit pas le prix (devrait être au [minimum] à 850) ».

–       Sur la connaissance par Campine de l’ensemble des comportements infractionnels

256    Dans la décision attaquée, la Commission a conclu que tous les participants à l’entente avaient connaissance des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par les autres participants ou avaient pu raisonnablement les prévoir et avaient été prêts à en accepter le risque, de sorte qu’ils devaient tous être tenus pour responsables de l’ensemble des aspects de l’infraction unique et continue (considérants 215 à 219 de la décision attaquée).

257    À titre liminaire, il convient de relever que l’existence d’une infraction unique et continue ne signifie pas nécessairement qu’une entreprise participant à l’une ou à l’autre de ses activités collusoires puisse être tenue pour responsable de l’ensemble de cette infraction. Encore faut-il que la Commission démontre d’abord que cette entreprise devait connaître l’ensemble des opérations anticoncurrentielles mises en œuvre par les autres entreprises parties à l’entente ou, en tout état de cause, qu’elle pouvait raisonnablement prévoir de tels comportements. Autrement dit, la seule identité d’objet entre un accord auquel a participé une entreprise et une entente globale ne suffit pas pour imputer à cette entreprise la participation à l’entente dans son ensemble. En effet, l’article 101 TFUE ne s’applique que s’il y a une concordance de volontés entre les parties concernées (voir, en ce sens, arrêts du 10 octobre 2014, Soliver/Commission, T‑68/09, EU:T:2014:867, point 62, et du 15 décembre 2016, Philips et Philips France/Commission, T‑762/14, non publié, EU:T:2016:738, point 172).

258    En l’espèce, en premier lieu, il est établi que Campine a pris part aux réunions de Windhagen du 23 septembre 2009 et de Cologne du 4 avril 2011, auxquelles étaient également présents les trois autres membres de l’entente. Partant, elle avait nécessairement connaissance de l’identité des autres entreprises parties à cette entente, du fait qu’elles étaient toutes impliquées dans la pratique de coordination des prix d’achat des déchets de batteries et de l’objectif commun poursuivi par ladite entente.

259    En deuxième lieu, comme la Commission l’a relevé à juste titre au considérant 216 de la décision attaquée, les membres de l’entente ne pouvaient ignorer que les informations échangées entre eux étaient de nature à éliminer l’incertitude relative à leur comportement concurrentiel, en particulier en ce qui concerne les prix proposés pour l’achat de déchets de batteries automobiles. Chaque participant devait savoir que les autres utiliseraient ces informations pour décider de leur propre comportement en matière de prix. Certains éléments de preuve figurant dans le dossier de la Commission démontrent d’ailleurs que les participants, y compris Campine (voir point 255 ci-dessus), vérifiaient que les autres respectaient bien les prix convenus au sein de l’entente.

260    En troisième lieu, Campine avait pleinement conscience de la nature anticoncurrentielle des contacts, puisqu’elle faisait parfois usage, dans ses communications, d’un langage codé faisant référence à des conditions météorologiques (voir points 155 à 163 ci-dessus).

261    En quatrième lieu, il est à relever que d’autres participants à l’entente ont fait référence à Campine dans le cadre d’échanges bilatéraux portant sur la coordination des prix d’achat (voir points 191 et 192 ci-dessus). Or, il ressort de la jurisprudence que le fait d’être perçue par ses partenaires comme une entreprise dont l’opinion devrait être connue afin d’établir une position commune est un élément de nature à prouver la participation d’une entreprise à un accord contraire aux règles de concurrence (voir arrêt du 11 décembre 2003, Marlines/Commission, T‑56/99, EU:T:2003:333, point 59 et jurisprudence citée).

262    Toutefois, il importe de préciser que, ainsi qu’il sera expliqué plus en détail aux points 263 à 284 ci-après, il n’est pas démontré à suffisance de droit que la connaissance que Campine avait ou pouvait avoir des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par les autres membres de l’entente s’étendait aux deux longues périodes de onze mois pour lesquelles aucune preuve directe de sa participation à l’infraction n’a pu être rapportée par la Commission.

–       Sur le caractère continu de la participation de Campine à l’infraction

263    Dans la décision attaquée, la Commission a tenu Campine pour responsable de l’ensemble des comportements anticoncurrentiels composant l’infraction unique et continue et, par conséquent, de celle‑ci dans son ensemble (considérant 229 de la décision attaquée). Elle a estimé que le fait que Campine avait pris part « moins fréquemment à certains des contacts anticoncurrentiels » n’était pas de nature à modifier cette conclusion (considérant 230 de la décision attaquée).

264    La Commission a relevé que, à l’exception d’une période de onze mois entre le courriel du 10 février 2010 et le courriel interne de Campine du 10 janvier 2011 (voir point 255 ci-dessus) et d’une période de dix mois entre la participation de cette dernière à la conférence mondiale du plomb à Bruxelles (Belgique) du 6 au 8 avril 2011 et le contact collusoire du 7 mars 2012 (voir point 174 ci-dessus), il n’y avait eu aucun intervalle de temps supérieur à quatre mois entre chacun des autres contacts collusoires ou « autre événement pertinent s’y rapportant » auxquels Campine avait pris part (considérant 249 de la décision attaquée). Elle en a déduit que les contacts collusoires retenus à l’endroit de Campine étaient suffisamment rapprochés dans le temps pour considérer que cette dernière avait participé à l’infraction sans interruption du 23 septembre 2009 au 26 septembre 2012 (considérant 249 de la décision attaquée).

265    S’agissant des intervalles de temps de onze et dix mois relevés dans la décision attaquée, la Commission a exposé que, conformément à la jurisprudence, le fait qu’il n’ait pas été apporté de preuve directe de la participation d’une entreprise à une entente durant une période déterminée ne faisait pas obstacle, dans le cas d’une infraction s’étendant sur plusieurs années, à ce que la participation à cette entente soit regardée comme constituée également durant cette dernière période, dès lors qu’une telle constatation repose sur des indices objectifs et concordants (considérant 250 de la décision attaquée).

266    La Commission a estimé qu’il ne pouvait être considéré que Campine avait temporairement cessé, interrompu ou suspendu sa participation à l’infraction durant lesdits intervalles de temps, et ce en faisant état des appréciations suivantes (considérants 251 et 252 de la décision attaquée) :

–        Campine avait participé à l’infraction et avait connaissance des comportements collusoires et des intentions des autres participants à l’entente, ainsi que des objectifs poursuivis par ceux-ci, et ne s’est pas distanciée publiquement de ces comportements ;

–        les contacts collusoires entre les participants à l’entente n’avaient pas lieu de manière régulière à des périodes fixes ou prédéterminées, mais sur une base ad hoc lorsque ces derniers en ressentaient la nécessité ;

–        eu égard à la stabilité globale relative des prix du plomb au LME entre juin 2010 et avril 2011, il y avait eu moins de contacts collusoires durant l’intervalle de temps de onze mois ;

–        le degré différent de participation de Campine à l’infraction peut aussi s’expliquer par le fait qu’elle disposait d’autres sources d’information à d’autres niveaux du marché concernant les prix d’achat appliqués par ses concurrents ;

–        il ne saurait être considéré que, durant les deux intervalles de temps en cause, les autres participants à l’entente n’avaient aucune idée précise du comportement de Campine sur le marché, dès lors qu’ils s’échangeaient des informations sur les prix d’achat offerts par les autres acheteurs de déchets de batteries durant ces périodes.

267    Par l’argumentation qu’elle fait valoir au soutien du présent grief, Campine conteste le bien-fondé du caractère continu de sa participation à l’infraction en cause qu’a retenu la Commission. Elle considère que seule une infraction unique et répétée pourrait tout au plus lui être imputée. Dans ses écritures, la Commission reprend, en substance, les arguments reproduits au point 266 ci-dessus.

268    À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon les circonstances, une infraction unique peut être continue ou répétée.

269    En effet, si la notion d’infraction unique vise une situation dans laquelle plusieurs entreprises ont participé à une infraction constituée d’un comportement continu poursuivant un seul but économique visant à fausser la concurrence ou bien encore d’infractions individuelles liées entre elles par une identité d’objet et de sujets, les modalités selon lesquelles l’infraction a été commise permettent de qualifier l’infraction unique soit de continue, soit de répétée (voir, en ce sens, arrêts du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, EU:T:2013:259, points 85 et 86, et du 16 juin 2015, FSL e.a./Commission, T‑655/11, EU:T:2015:383, point 484).

270    À l’égard d’une infraction continue, la notion de plan d’ensemble permet à la Commission de présumer que la réalisation d’une infraction n’a pas été interrompue même si, pour une certaine période, elle ne dispose pas de preuve de la participation de l’entreprise concernée à cette infraction, pour autant que celle-ci a participé à l’infraction avant et après cette période et pour autant qu’il n’existe pas de preuves ou d’indices pouvant laisser penser que l’infraction s’était interrompue en ce qui la concerne. En ce cas, elle pourra infliger une amende pour toute la période infractionnelle, y compris la période pour laquelle elle ne dispose pas de preuve de la participation de l’entreprise concernée (voir, en ce sens, arrêts du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, EU:T:2013:259, point 87, et du 16 juin 2015, FSL e.a./Commission, T‑655/11, EU:T:2015:383, point 481).

271    Toutefois, le principe de sécurité juridique impose que, en l’absence d’éléments de preuve susceptibles d’établir directement la durée d’une infraction, la Commission invoque au moins des éléments de preuve qui se rapportent à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon qu’il puisse être raisonnablement admis que cette infraction s’est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises (voir arrêt du 16 juin 2015, FSL e.a./Commission, T‑655/11, EU:T:2015:383, point 482 et jurisprudence citée).

272    Si la période séparant deux manifestations d’un comportement infractionnel est un critère pertinent afin d’établir le caractère continu d’une infraction, il n’en demeure pas moins que la question de savoir si ladite période est ou non suffisamment longue pour constituer une interruption de l’infraction ne saurait être examinée dans l’abstrait. Au contraire, il convient de l’apprécier dans le contexte du fonctionnement de l’entente en question (voir arrêt du 16 juin 2015, FSL e.a./Commission, T‑655/11, EU:T:2015:383, point 483 et jurisprudence citée).

273    Enfin, lorsqu’il peut être considéré que la participation d’une entreprise à l’infraction s’est interrompue et que l’entreprise a participé à l’infraction avant et après cette interruption, cette infraction peut être qualifiée de répétée si – tout comme pour l’infraction continue – il existe un objectif unique poursuivi par elle avant et après l’interruption, ce qui peut être déduit de l’identité des objectifs des pratiques en cause, des produits concernés, des entreprises qui ont pris part à la collusion, des modalités principales de sa mise en œuvre, des personnes physiques impliquées pour le compte des entreprises et, enfin, du champ d’application géographique desdites pratiques. L’infraction est alors unique et répétée et, si la Commission peut infliger une amende pour toute la période infractionnelle, elle ne le peut, en revanche, pour la période pendant laquelle l’infraction a été interrompue (arrêts du 17 mai 2013, Trelleborg Industrie et Trelleborg/Commission, T‑147/09 et T‑148/09, EU:T:2013:259, point 88, et du 16 juin 2015, FSL e.a./Commission, T‑655/11, EU:T:2015:383, point 484).

274    En l’espèce, il ressort du dossier que, au cours de la période infractionnelle d’une durée de trois ans et quatre jours, 62 contacts collusoires sont intervenus au sein de l’entente, ce qui représente environ 20 contacts collusoires par an. L’intervalle de temps le plus long entre les différents contacts collusoires a été de quatre mois et demi (à savoir entre le 23 septembre 2009 et le 10 février 2010).

275    S’agissant de Campine, seuls six contacts collusoires ont été retenus à son endroit par la Commission. Ainsi que cette dernière le reconnaît expressément aux considérants 249, 250 et 252 de la décision attaquée, il n’existe aucune preuve directe de la participation de cette entreprise à un quelconque contact anticoncurrentiel durant, plus particulièrement, deux périodes séparant ces contacts collusoires. Ainsi, un premier intervalle de temps de onze mois s’est écoulé entre le contact collusoire concrétisé par le courriel du 10 février 2010 et le courriel de M. G. (Campine) à M. C. (Campine) du 10 janvier 2011, qui, sans être qualifié de contact collusoire, a été retenu par la Commission pour établir que cette entreprise vérifiait que les autres participants à l’entente respectaient bien les prix convenus (voir point 255 ci-dessus). Un second intervalle de temps de onze mois environ – et non de dix mois comme l’indiquent erronément les considérants précités de la décision attaquée – s’est écoulé entre le contact collusoire concrétisé par la participation de Campine à la réunion organisée à Cologne le 4 avril 2011 et celui concrétisé par le SMS envoyé le 7 mars 2012 par M. M. (JCI) à M. C. (Campine) (voir point 174 ci-dessus). S’agissant de ce dernier point, il y a lieu de faire remarquer que, dans la décision attaquée, la Commission ne retient pas la participation de Campine à un contact anticoncurrentiel qui serait intervenu lors de la conférence mondiale du plomb organisée à Bruxelles du 6 au 8 avril 2011 (voir considérants 58, 94 et 95 de la décision attaquée).

276    Il convient de constater que ces deux périodes pour lesquelles la Commission ne dispose d’aucun élément de preuve direct de la participation de Campine à l’infraction représentent une durée totale de 22 mois, ce qui est une durée significative par rapport à la durée globale de l’entente, à savoir un peu plus de 36 mois.

277    Il y a également lieu de constater que, contrairement à ce que prétend la Commission, ces intervalles de temps de onze mois excèdent sensiblement les intervalles de temps séparant les autres contacts collusoires auxquels Campine a pris part, lesquels étaient environ d’un mois (entre la fin du mois de mai 2012 et le 27 juin 2012), de trois mois (entre le 10 janvier et le 4 avril 2011, entre le 27 juin et le 26 septembre 2012, et entre le 7 mars 2012 et la fin du mois de mai 2012) et de quatre mois et demi (entre le 23 septembre 2009 et le 10 février 2010). Ces intervalles de temps de onze mois sont également largement supérieurs aux intervalles habituels entre les dizaines d’autres contacts collusoires impliquant les trois autres membres de l’entente.

278    Certes, ainsi que le relève la Commission, les contacts collusoires au sein de l’entente n’avaient pas lieu à des périodes fixes ou prédéterminées, mais intervenaient, notamment, en fonction de l’évolution des prix du plomb fixés au LME. Il n’en demeure pas moins que, d’une part, ces prix, qui influencent en grande partie les prix des déchets de batteries (voir considérant 25 de la décision attaquée), varient fréquemment et que, d’autre part, ces derniers prix peuvent évoluer sur une base hebdomadaire, voire quotidienne (voir considérant 19 de la décision attaquée). Il en découle nécessairement que les contacts collusoires, dont l’objectif était de coordonner les prix d’achat des déchets de batteries, devaient se produire avec une certaine régularité et dans des intervalles de temps relativement rapprochés.

279    L’allégation de la Commission selon laquelle la participation moindre de Campine à l’infraction peut s’expliquer par le fait que cette dernière disposait d’autres sources d’information à d’autres niveaux du marché concernant les prix d’achat appliqués par ses concurrents n’est que pure spéculation et ne saurait donc être acceptée.

280    Quant à l’argument que la Commission tire de ce que les autres participants à l’entente, en s’échangeant des informations sur les prix d’achat pratiqués par leurs concurrents, étaient en mesure de connaître le comportement de Campine sur le marché durant les deux intervalles de temps de onze mois, il est totalement dénué de pertinence s’agissant de la question de savoir si cette dernière doit être considérée comme ayant participé sans interruption à l’infraction.

281    Par ailleurs, force est de constater que la Commission n’apporte aucun indice susceptible de corroborer son allégation selon laquelle Campine avait connaissance des contacts entretenus dans le cadre de l’entente par les trois autres membres de celle-ci lors de ces deux intervalles de temps de onze mois ou pouvait raisonnablement prévoir ces contacts.

282    En réalité, pour conclure à la poursuite de la participation de Campine à l’entente durant les deux intervalles de temps de onze mois, la Commission s’est, en substance, fondée sur la seule absence de distanciation publique de cette entreprise de cette entente. À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, même si la distanciation publique n’est pas l’unique moyen dont dispose une société impliquée dans une entente pour prouver la cessation de sa participation à cette entente, il reste néanmoins qu’une telle distanciation constitue un fait important susceptible d’établir la cessation d’un comportement anticoncurrentiel. L’absence de distanciation publique constitue une situation factuelle dont la Commission peut faire état pour prouver la poursuite du comportement anticoncurrentiel d’une société. Toutefois, dans le cas où, au cours d’une période significative, plusieurs réunions collusoires ont eu lieu en l’absence de participation des représentants de la société concernée, la Commission doit également fonder son appréciation sur d’autres éléments de preuve (arrêt du 17 septembre 2015, Total Marketing Services/Commission, C‑634/13 P, EU:C:2015:614, point 28). Ces autres éléments de preuve faisant défaut en l’espèce, il y a lieu de conclure que la participation de Campine à l’infraction a été interrompue entre le 10 février 2010 et le 10 janvier 2011 ainsi qu’entre le 4 avril 2011 et le 7 mars 2012.

283    Eu égard au fait que Campine a repris et répété, après ces deux périodes de onze mois, une infraction dont elle n’établit pas qu’elle est différente de l’entente à laquelle elle avait participé avant les interruptions, l’infraction doit, en ce qui la concerne, être qualifiée d’unique et répétée.

284    Partant, il y a lieu d’accueillir partiellement la deuxième sous-branche de la seconde branche du deuxième moyen en ce que la Commission a commis une erreur en concluant que Campine avait participé à l’infraction sans interruption du 23 septembre 2009 au 26 septembre 2012. Les conséquences de cette conclusion seront examinées dans le cadre de l’appréciation du troisième moyen ci-après.

iii) Sur la question de savoir si le comportement imputé à Campine a un objet ou un effet anticoncurrentiel

285    Aux considérants 231 à 238 de la décision attaquée, la Commission a considéré que les accords et pratiques concertées en cause constituaient des restrictions de la concurrence par objet au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE et que, partant, la démonstration d’effets anticoncurrentiels réels n’était pas requise.

286    Il y a lieu de rappeler que, pour relever de l’interdiction énoncée à l’article 101, paragraphe 1, TFUE, un accord, une décision d’association d’entreprises ou une pratique concertée doit avoir « pour objet ou pour effet » d’empêcher, de restreindre ou de fausser la concurrence dans le marché intérieur.

287    Selon une jurisprudence constante, le caractère alternatif de cette condition, marqué par la conjonction « ou », conduit d’abord à la nécessité de considérer l’objet même de l’accord (voir arrêt du 16 juillet 2015, ING Pensii, C‑172/14, EU:C:2015:484, point 30 et jurisprudence citée).

288    Ainsi, lorsque l’objet anticoncurrentiel d’un accord est établi, il n’y a pas lieu de rechercher ses effets sur la concurrence (voir arrêt du 6 octobre 2009, GlaxoSmithKline Services e.a./Commission e.a., C‑501/06 P, C‑513/06 P, C‑515/06 P et C‑519/06 P, EU:C:2009:610, point 55 et jurisprudence citée). Il en va de même pour les pratiques concertées (voir, en ce sens, arrêt du 4 juin 2009, T-Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, points 28 à 30).

289    Selon la jurisprudence, en effet, certains types de coordination entre entreprises révèlent un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour qu’il puisse être considéré que l’examen de leurs effets n’est pas nécessaire (voir arrêt du 11 septembre 2014, CB/Commission, C‑67/13 P, EU:C:2014:2204, point 49 et jurisprudence citée).

290    Cette jurisprudence tient à la circonstance que certaines formes de coordination entre entreprises peuvent être considérées, par leur nature même, comme nuisibles au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence (voir arrêt du 11 septembre 2014, CB/Commission, C‑67/13 P, EU:C:2014:2204, point 50 et jurisprudence citée).

291    Ainsi, il est acquis que certains comportements collusoires, tels que ceux conduisant à la fixation horizontale des prix par des cartels, peuvent être considérés comme étant tellement susceptibles d’avoir des effets négatifs sur, en particulier, le prix, la quantité ou la qualité des produits et des services qu’il peut être considéré inutile, aux fins de l’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, de démontrer qu’ils ont des effets concrets sur le marché (voir arrêt du 11 septembre 2014, CB/Commission, C‑67/13 P, EU:C:2014:2204, point 51 et jurisprudence citée).

292    Dans l’hypothèse où l’analyse d’un type de coordination entre entreprises ne présenterait pas un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence, il conviendrait, en revanche, d’en examiner les effets et, pour l’interdire, d’exiger la réunion des éléments établissant que le jeu de la concurrence a été en fait soit empêché, soit restreint, soit faussé de façon sensible (voir arrêt du 11 septembre 2014, CB/Commission, C‑67/13 P, EU:C:2014:2204, point 52 et jurisprudence citée).

293    Afin d’apprécier si un type de coordination entre entreprises présente un degré suffisant de nocivité pour être considéré comme une restriction de concurrence « par objet » au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE, il convient de s’attacher notamment aux objectifs qu’il vise à atteindre ainsi qu’au contexte économique et juridique dans lequel il s’insère. Dans le cadre de l’appréciation dudit contexte, il y a lieu également de prendre en considération la nature des biens ou des services affectés ainsi que les conditions réelles du fonctionnement et de la structure du ou des marchés en question (voir arrêt du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 117 et jurisprudence citée).

294    En outre, bien que l’intention des parties ne constitue pas un élément nécessaire pour déterminer le caractère restrictif d’un type de coordination entre entreprises, rien n’interdit aux autorités de la concurrence ou aux juridictions nationales et de l’Union d’en tenir compte (voir arrêt du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 118 et jurisprudence citée).

295    Dans les cas où l’objet anticoncurrentiel est particulièrement manifeste, l’analyse du contexte économique et juridique entourant le comportement peut par essence être limitée à ce qui est strictement nécessaire (arrêt du 20 janvier 2016, Toshiba Corporation/Commission, C‑373/14 P, EU:C:2016:26, point 29). Un tel objet anticoncurrentiel particulièrement manifeste peut être retenu précisément lorsque les concurrents concluent entre eux des accords en matière de fixation des prix (arrêts du 30 janvier 1985, Clair, 123/83, EU:C:1985:33, point 22 ; du 11 septembre 2014, CB/Commission, C‑67/13 P, EU:C:2014:2204, point 51, et du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 115) ou lorsqu’ils échangent des informations sensibles qui sont pertinentes pour la formation des prix (arrêts du 4 juin 2009, T-Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, points 32 à 37, et du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, points 119 à 124).

296    En l’espèce, le volet principal de l’infraction imputée aux entreprises concernées consistait en la coordination de leur politique en matière de prix d’achat de déchets de batteries automobiles plomb-acide par le biais de la fixation de prix indicatifs, de prix maximaux et de réductions forfaitaires des prix, en recourant à cette fin notamment à des échanges d’informations sensibles sur le plan commercial.

297    Une telle coordination des prix d’achat, ayant pour but de réduire ces prix ou d’empêcher leur augmentation et donc, en dernier lieu, d’accroître la marge bénéficiaire des participants à l’entente, révèle un degré de nocivité à l’égard de la concurrence suffisant pour qu’il puisse être considéré que l’examen de ses effets n’est pas nécessaire. En effet, une entente sur les prix peut être considérée, par sa nature même, comme nuisible au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence. À cet égard, il importe de relever que le premier exemple d’entente donné par l’article 101, paragraphe 1, sous a), TFUE, déclaré expressément incompatible avec le marché intérieur, est précisément celui qui consiste à « fixer de façon directe ou indirecte les prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de transaction ». La pratique ayant fait l’objet de l’entente est ainsi expressément interdite par l’article 101, paragraphe 1, TFUE, car elle comporte des restrictions intrinsèques à la concurrence dans le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêt du 14 mars 2013, Fresh Del Monte Produce/Commission, T‑587/08, EU:T:2013:129, point 768).

298    S’agissant des échanges d’informations intervenus en l’espèce entre les participants à l’entente, ils portaient notamment sur les prix d’achat, en cours ou à venir, proposés à leurs fournisseurs, sur les intentions d’achat, sur les prévisions en matière de volumes d’achat, sur les niveaux des stocks et sur les niveaux d’activité.

299    À cet égard, il convient de rappeler que les critères de coordination et de coopération constitutifs d’une pratique concertée doivent être compris à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du traité relatives à la concurrence, selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu’il entend suivre sur le marché intérieur (voir arrêt du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 119 et jurisprudence citée).

300    Si cette exigence d’autonomie n’exclut pas le droit des opérateurs économiques de s’adapter intelligemment au comportement constaté ou attendu de leurs concurrents, elle s’oppose cependant rigoureusement à toute prise de contact direct ou indirect entre de tels opérateurs de nature soit à influencer le comportement sur le marché d’un concurrent actuel ou potentiel, soit à dévoiler à un tel concurrent le comportement qu’il a décidé de tenir sur ce marché ou qu’il a envisagé d’adopter sur celui-ci, lorsque ces contacts ont pour objet ou pour effet d’aboutir à des conditions de concurrence qui ne correspondraient pas aux conditions normales du marché en cause, compte tenu de la nature des produits ou des prestations fournies, du nombre et de l’importance des entreprises et du volume dudit marché (voir arrêt du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 120 et jurisprudence citée).

301    La Cour a ainsi jugé que l’échange d’informations entre concurrents était susceptible d’être contraire aux règles de la concurrence lorsqu’il atténuait ou supprimait le degré d’incertitude sur le fonctionnement du marché en cause avec comme conséquence une restriction de la concurrence entre entreprises (voir arrêt du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 121 et jurisprudence citée).

302    En particulier, il y a lieu de considérer comme ayant un objet anticoncurrentiel un échange d’informations susceptible d’éliminer des incertitudes dans l’esprit des intéressés quant à la date, à l’ampleur et aux modalités de l’adaptation du comportement sur le marché que les entreprises concernées vont mettre en œuvre (voir arrêt du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 122 et jurisprudence citée).

303    Enfin, il convient de rappeler qu’il résulte des termes mêmes de l’article 101, paragraphe 1, TFUE que la notion de pratique concertée implique, outre la concertation entre les entreprises concernées, un comportement sur le marché faisant suite à cette concertation et un lien de cause à effet entre ces deux éléments (voir arrêt du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 126 et jurisprudence citée).

304    À cet égard, la Cour a considéré qu’il y a lieu de présumer, sous réserve de la preuve contraire qu’il incombe aux opérateurs intéressés de rapporter, que les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché. En particulier, la Cour a conclu qu’une telle pratique concertée relève de l’article 101, paragraphe 1, TFUE même en l’absence d’effets anticoncurrentiels sur le marché (voir arrêt du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 127 et jurisprudence citée).

305    Eu égard aux principes jurisprudentiels mentionnés ci-dessus, il convient de considérer que les échanges d’informations pratiqués entre les participants à l’entente ont clairement un objet anticoncurrentiel, en ce qu’ils vont manifestement à l’encontre de l’exigence d’autonomie qui caractérise le comportement des entreprises sur le marché dans un système de concurrence efficace. Par ces échanges d’informations, qui concernaient notamment les prix d’achat en cours et à venir et les prévisions en matière de volumes d’achat, à savoir des informations très sensibles sur le plan commercial, les participants à l’entente communiquaient entre eux le comportement qu’ils entendaient adopter sur le marché en ce qui concerne des facteurs déterminants pour leur politique d’achat d’intrants. Ils visaient non seulement à éliminer ou à réduire les incertitudes quant au comportement envisageable de ces entreprises, mais aussi à permettre à ces dernières de s’accorder sur les prix d’achat des déchets de batteries automobiles plomb-acide et à limiter le pouvoir de négociation de leurs fournisseurs. Ces échanges d’informations présentent donc en eux-mêmes un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence et peuvent être considérés, par leur nature même, comme nuisibles au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence.

306    Il résulte des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que la Commission a qualifié l’infraction en cause de restriction de la concurrence par objet et, partant, a estimé qu’il n’était pas nécessaire d’en examiner les effets concrets.

307    Cette conclusion ne saurait être infirmée par les différents arguments invoqués par Campine.

308    Ainsi, en premier lieu, il ressort de l’examen de la première branche du deuxième moyen et des première et deuxième sous-branches de la seconde branche du même moyen que Campine a pris part à des contacts collusoires visant à la coordination des prix d’achat des déchets de batteries automobiles plomb-acide ainsi qu’à des échanges d’informations sensibles sur le plan commercial. L’allégation de Campine selon laquelle elle n’a été impliquée que dans quelques contacts sporadiques et isolés ne saurait prospérer, dès lors que ce n’est pas la fréquence des contacts, mais leur nature qui est déterminante pour qualifier une infraction de restriction de la concurrence par objet.

309    En deuxième lieu, il a été établi au point 305 ci-dessus que les échanges d’informations pratiqués entre les participants à l’entente avaient clairement un objet anticoncurrentiel, de sorte que la démonstration d’effets anticoncurrentiels réels n’était pas requise. La question de savoir si et dans quelle mesure de tels effets se produisent réellement ne peut avoir d’importance que pour calculer le montant des amendes et évaluer les droits à des dommages et intérêts (voir, en ce sens, arrêt du 4 juin 2009, T-Mobile Netherlands e.a., C‑8/08, EU:C:2009:343, point 31).

310    En troisième lieu, c’est en vain que Campine reproche à la Commission de ne pas avoir accordé suffisamment d’importance au contexte de l’affaire. D’une part, ainsi qu’il a déjà été exposé au point 295 ci-dessus, dans les cas où, comme en l’espèce, l’objet anticoncurrentiel est particulièrement manifeste, l’analyse du contexte économique et juridique entourant le comportement peut par essence être limitée à ce qui est strictement nécessaire. D’autre part, et en tout état de cause, des éléments d’une telle analyse peuvent être trouvés au considérant 233 de la décision attaquée, où la Commission, renvoyant au considérant 20 de cette décision, lequel figure sous le point 2.3 intitulé « Description du secteur », expose notamment que, dans des conditions normales de marché, dans le cas d’un marché où, comme celui des déchets de batteries, la demande excède l’offre et où il est nécessaire pour les entreprises de recyclage de s’assurer de la régularité de l’approvisionnement en intrants, ces entreprises se feraient mutuellement concurrence en tant qu’acheteurs et chercheraient donc généralement à proposer des prix suffisamment élevés afin d’obtenir la fourniture requise de déchets de batteries.

311    Il s’ensuit que la troisième sous-branche de la seconde branche du deuxième moyen doit être rejetée comme non fondée.

312    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le deuxième moyen doit être accueilli pour autant que la décision attaquée a constaté que Campine avait participé de manière ininterrompue à l’infraction entre le 23 septembre 2009 et le 26 septembre 2012 et être rejeté pour le surplus.

2.      Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense ainsi que des principes de bonne administration, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination

313    Dans le cadre du premier moyen, Campine conteste, sous différents aspects, l’application faite en l’espèce par la Commission du paragraphe 37 des lignes directrices afin de majorer de 10 % le montant de l’amende pour tous les destinataires de la décision attaquée. Ce moyen se compose de trois branches, tirées, la première, de la violation de l’obligation de motivation, la deuxième, de la violation des droits de la défense de Campine et du principe de bonne administration et, la troisième, de la violation des principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination.

a)      Sur la première branche du premier moyen, tirée de la violation de l’obligation de motivation

1)      Arguments des parties

314    Campine, se référant à l’arrêt du 13 décembre 2016, Printeos e.a./Commission (T‑95/15, EU:T:2016:722), soutient que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas exposé à suffisance de droit les raisons spécifiques qui l’avaient conduite à majorer de 10 %, sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, le montant de l’amende pour tous les destinataires de la décision attaquée. Elle souligne que, lorsque la Commission décide de s’écarter de la méthodologie générale exposée dans les lignes directrices, par lesquelles elle s’est autolimitée dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation quant à la fixation du montant des amendes, en s’appuyant, comme en l’espèce, sur le paragraphe 37 de ces lignes directrices, les exigences de motivation s’imposent avec d’autant plus de vigueur.

315    À cet égard, en premier lieu, Campine fait grief à la Commission, d’une part, de ne pas avoir expliqué clairement pourquoi la valeur des ventes ne pouvait pas constituer une valeur de remplacement adéquate pour refléter l’importance économique de l’infraction ainsi que le poids relatif de chaque entreprise participant à l’infraction et, d’autre part, de ne pas avoir exposé clairement les éléments de fait et de droit justifiant la nécessité, en l’espèce, d’une majoration de l’amende au titre du paragraphe 37 des lignes directrices.

316    Dans la réplique, Campine avance que les raisons données par la Commission dans la communication des griefs pour expliquer pourquoi elle avait tenu compte de la valeur des achats plutôt que de la valeur des ventes pour déterminer le montant de base des amendes sont en contradiction avec celles données à ce propos dans la décision attaquée. Elle critique également le fait que la Commission ait pris en compte la valeur des achats, plutôt que celle des ventes, pour déterminer le montant de base des amendes, pour ensuite décider de majorer ce montant précisément parce que la première valeur avait été utilisée plutôt que la seconde. Selon elle, une telle approche est contradictoire.

317    Dans la réplique également, Campine prétend que les explications données par la Commission, successivement dans la communication des griefs, dans la lettre du 13 décembre 2016 et dans la décision attaquée, pour justifier la majoration au titre du paragraphe 37 des lignes directrices sont à chaque fois différentes. Par ailleurs, elle avance qu’il est inexact de prétendre, comme le ferait la Commission, que la méthodologie générale pour la fixation d’amendes exposée dans les lignes directrices est conçue pour les ententes en matière de vente. Les lignes directrices s’appliqueraient en effet à tous types d’infraction aux articles 101 et 102 TFUE. Elle ajoute que, contrairement à ce que la Commission aurait affirmé dans le mémoire en défense, à aucun endroit des lignes directrices, il n’est indiqué que la valeur des ventes est considérée comme une valeur de remplacement adéquate au motif qu’il peut être supposé que les infractions à l’origine des amendes sont susceptibles d’augmenter la valeur des ventes. De nombreuses infractions sanctionnées par les lignes directrices n’aboutiraient pas à une augmentation de la valeur des ventes, mais pourraient entraîner, par exemple, un amoindrissement de l’innovation, une baisse des coûts ou une limitation des ventes. Toujours dans la réplique, elle affirme que la Commission n’a prouvé en aucune manière que l’entente en cause avait réussi à atteindre son objectif, avant de souligner que cette dernière ne saurait majorer une amende à sa guise sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices dans le but d’obtenir un effet dissuasif, un montant additionnel de 15 % ayant d’ailleurs déjà été infligé à cet effet.

318    En deuxième lieu, Campine prétend que la Commission n’a expliqué, ni dans la communication des griefs, ni dans la lettre du 13 décembre 2016, ni dans la décision attaquée, pourquoi elle avait fixé à 10 % le pourcentage de majoration.

319    En troisième lieu, Campine reproche à la Commission de ne pas avoir expliqué, dans la décision attaquée, pourquoi elle avait imposé le même pourcentage de majoration à tous les destinataires de cette décision. Dans la réplique, elle ajoute que l’absence de motivation ne saurait être régularisée par le fait que des explications ont été fournies dans le mémoire en défense. En tout état de cause, contrairement à ce que la Commission a avancé dans ce mémoire, il ne saurait être considéré que tous les destinataires de la décision attaquée se trouvaient dans une situation comparable au motif qu’ils avaient tous participé à la même entente en matière d’achats.

320    La Commission considère avoir motivé à suffisance de droit sa décision de majorer de 10 %, sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, le montant de l’amende pour tous les destinataires de la décision attaquée.

2)      Appréciation du Tribunal

321    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation prévue à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. Dans cette perspective, la motivation exigée doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. S’agissant, en particulier, de la motivation des décisions individuelles, l’obligation de motiver de telles décisions a ainsi pour but, outre de permettre un contrôle judiciaire, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est éventuellement entachée d’un vice permettant d’en contester la validité (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, points 146 à 148 et jurisprudence citée ; arrêts du 11 juillet 2013, Ziegler/Commission, C‑439/11 P, EU:C:2013:513, points 114 et 115, et du 13 décembre 2016, Printeos e.a./Commission, T‑95/15, EU:T:2016:722, point 44).

322    Par ailleurs, l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires de l’acte ou d’autres personnes concernées par l’acte au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêts du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 150 ; du 11 juillet 2013, Ziegler/Commission, C‑439/11 P, EU:C:2013:513, point 116, et du 13 décembre 2016, Printeos e.a./Commission, T‑95/15, EU:T:2016:722, point 45).

323    En outre, l’obligation de motivation au titre de l’article 296 TFUE exige que le raisonnement sur lequel est fondée une décision soit clair et non équivoque. Ainsi, la motivation d’un acte doit être logique, ne présentant notamment pas de contradiction interne entravant la bonne compréhension des raisons sous-tendant cet acte (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 151 et jurisprudence citée).

324    Le paragraphe 37 des lignes directrices dispose que, « [b]ien que les[dites] lignes directrices exposent la méthodologie générale pour la fixation d’amendes, les particularités d’une affaire donnée ou la nécessité d’atteindre un niveau dissuasif dans une affaire particulière peuvent justifier que la Commission s’écarte de cette méthodologie ou des limites fixées au paragraphe 21 ».

325    Lorsque la Commission décide de s’écarter de la méthodologie générale exposée dans les lignes directrices, par lesquelles elle s’est autolimitée dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation quant à la fixation du montant des amendes, en s’appuyant, comme en l’espèce, sur le paragraphe 37 de ces lignes directrices, les exigences de motivation s’imposent avec d’autant plus de vigueur. Cette motivation doit être d’autant plus précise que ledit paragraphe se limite à une référence vague aux « particularités d’une affaire donnée » et laisse donc une large marge d’appréciation à la Commission pour procéder à une adaptation exceptionnelle des montants de base des amendes des entreprises concernées. En effet, dans un tel cas, le respect par la Commission des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives, dont l’obligation de motivation, revêt une importance d’autant plus fondamentale (arrêt du 13 décembre 2016, Printeos e.a./Commission, T‑95/15, EU:T:2016:722, point 48).

326    En l’espèce, en premier lieu, il convient de rappeler que, pour déterminer le montant de base des amendes, la Commission a pris en compte la valeur des achats de déchets de batteries automobiles plomb-acide effectués au cours de la totalité de l’exercice social 2011 par chacune des entreprises concernées auprès des collecteurs de ferraille, des ferrailleurs ou des négociants établis en Belgique, en Allemagne, en France et aux Pays-Bas, y compris les achats effectués directement auprès des points de collecte où les batteries usagées étaient déposées.

327    Or, les lignes directrices prévoient, en leur paragraphe 12, que « [l]e montant de base [de l’amende] sera fixé par référence à la valeur des ventes ». En leur paragraphe 13, elles stipulent que, « [e]n vue de déterminer le montant de base de l’amende à infliger, la Commission utilisera la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l’entreprise, en relation directe ou indirecte avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné à l’intérieur du territoire de l’EEE » et que « [l]a Commission utilisera normalement les ventes de l’entreprise durant la dernière année complète de sa participation ».

328    Les motifs pour lesquels, en l’occurrence, la Commission a estimé approprié de s’écarter de la méthodologie générale prévue par les lignes directrices, en tenant compte des chiffres relatifs aux achats plutôt que de ceux relatifs aux ventes, sont exposés au considérant 298 de la décision attaquée, qui se lit comme suit :

« Dans la [communication des griefs], la Commission a exposé son intention d’utiliser la valeur des achats des produits concernés réalisés par chacune des entreprises plutôt que la valeur des ventes, eu égard au fait que l’entente portait sur des prix d’achat et que les produits concernés sont des intrants et non des produits intermédiaires ou en aval pour lesquels la valeur des ventes pourrait être utilisée. Dans ce contexte, la Commission a noté que JCI ne vendait pas de plomb recyclé mais utilisait sa production totale de plomb recyclé pour sa propre production de batteries plomb-acide. Par conséquent, il ne serait pas possible d’utiliser comme valeur de remplacement les ventes de plomb recyclé. »

329    Eu égard à ce qui est ainsi exposé au considérant 298 de la décision attaquée, l’allégation de Campine selon laquelle la Commission n’a pas expliqué clairement pourquoi la valeur des ventes ne pouvait pas constituer une valeur de remplacement adéquate pour refléter l’importance économique de l’infraction ainsi que le poids relatif de chaque entreprise participant à celle-ci ne saurait être accueillie. Certes, le raisonnement de la Commission est court, mais il est clair et non équivoque et permet à Campine de connaître les justifications de l’approche choisie et au Tribunal d’exercer son contrôle.

330    Contrairement à ce que Campine soutient dans la réplique, il n’existe aucune contradiction entre les motifs donnés à cet égard dans la communication des griefs, d’une part, et ceux donnés dans la décision attaquée, d’autre part.

331    En effet, au point 359 de la communication des griefs, la Commission indique ce qui suit :

« Dans la présente affaire, dès lors que l’infraction porte sur des prix d’achat, le montant de base de l’amende devrait être fixé en se référant à la valeur des achats des produits concernés par l’infraction par chacune des entreprises. La Commission considère qu’il est pertinent et approprié d’utiliser les chiffres relatifs à la valeur des achats plutôt qu’à la valeur des ventes en raison de la nature particulière de l’entente (entente sur les prix d’achat) et des caractéristiques du marché concerné, ainsi que du fait que les produits directement concernés par l’infraction sont des déchets de batteries plomb-acide et des déchets de plomb obtenus de ces batteries, et non pas des produits intermédiaires (déchets ou résidus de plomb partiellement transformés) ou des produits en aval (plomb pur de deuxième fusion ou alliages de plomb) pour lesquels la valeur des ventes pourrait être prise en considération. Dans ce contexte, il est pertinent de relever que JCI ne vend pas de plomb pur de deuxième fusion ni d’alliages de plomb sur le marché libre. »

332    Par ailleurs, il ressort clairement de ce même point de la communication des griefs qu’il est inexact de prétendre, comme le fait Campine dans la réplique, que, dans cette communication, la Commission a « simplement fait référence à la nature de l’entente (une entente en matière d’achats) pour affirmer que la valeur des achats constituait une valeur de remplacement appropriée ».

333    En deuxième lieu, dans le cadre des ajustements du montant de base, la Commission a décidé, sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, d’augmenter de 10 % le montant de l’amende à infliger à chacun des destinataires de la décision attaquée, et ce afin de tenir compte des particularités de l’affaire et d’atteindre un niveau dissuasif (considérants 363 à 380 de la décision attaquée).

334    À cet égard, il doit être constaté que, contrairement à ce que soutient Campine, au point 8.3.3.5. de la décision attaquée (voir, en particulier, considérants 363 à 365), la Commission a exposé à suffisance de droit et avec clarté les raisons pour lesquelles elle estimait qu’il y avait lieu d’appliquer une telle majoration.

335     En effet, elle a indiqué ce qui suit :

–        il ressort du paragraphe 5 des lignes directrices que, afin d’atteindre les objectifs d’effet dissuasif spécifique et d’effet dissuasif général, il est approprié de se référer, comme base pour la détermination des amendes, à la valeur des ventes de biens ou services en relation avec l’infraction ;

–        selon le paragraphe 6 des lignes directrices, la combinaison de la valeur des ventes en relation avec l’infraction et de la durée de celle-ci est considérée comme une valeur de remplacement adéquate pour refléter l’importance économique de l’infraction ainsi que le poids relatif de chaque entreprise participant à celle-ci ;

–        l’entente en cause avait pour objectif la coordination des prix d’achat des déchets de batteries plomb-acide ;

–        la fixation du prix d’achat diffère de la fixation du prix de vente dans la mesure où son objectif n’est pas d’obtenir une augmentation du prix (d’achat), mais, au contraire, d’obtenir une réduction de celui-ci ou d’empêcher son augmentation ;

–        le mécanisme prévu par la méthodologie générale pour la fixation du montant des amendes est tel que plus une entente en matière de ventes est mise en œuvre avec succès, plus la valeur des ventes est élevée et, partant, le montant de l’amende ;

–        dans le cas d’une entente en matière d’achats, c’est la situation inverse qui se présente : plus une telle entente est mise en œuvre avec succès, moins le montant de la valeur des achats est élevé et, partant, le montant de l’amende ;

–        les lignes directrices ont été établies par la Commission en ayant à l’esprit les ententes en matière de ventes, sans tenir compte de cette particularité relative aux ententes en matière d’achats ;

–        il est donc inhérent au fait que l’entente en cause est une entente en matière d’achats que la valeur des achats n’est pas en soi susceptible de constituer une valeur de remplacement adéquate pour refléter l’importance économique de l’infraction ;

–        normalement, dans le cas d’une société d’exploitation, les achats sont moins élevés que les ventes en termes de valeur, ce qui entraîne un point de départ systématiquement inférieur pour la détermination du montant de base de l’amende ;

–        dès lors, s’il était fait application de la méthodologie générale prévue par les lignes directrices sans procéder au moindre ajustement, cela ne permettrait pas d’assurer un effet dissuasif suffisant (non seulement spécifique, mais aussi général) ;

–        afin de tenir compte de cette particularité et d’assurer un effet dissuasif suffisant, il est approprié d’appliquer, à toutes les entreprises concernées, une majoration de 10 %.

336    En d’autres termes et en substance, il ressort clairement des considérations qui précèdent, appréciées conjointement avec celles figurant au considérant 298 de la décision attaquée, que la Commission a estimé que, si l’utilisation de la valeur des achats de déchets de batteries constituait un point de départ plus approprié pour déterminer le montant de base des amendes que la valeur des ventes, le recours à un tel point de départ produisait toutefois un certain effet pervers, puisque, dans le cas d’une entente en matière d’achats, la valeur des achats était susceptible de sous-représenter l’importance économique de l’infraction et de ne pas avoir l’effet dissuasif requis. Elle a dès lors décidé d’appliquer une majoration de 10 % au titre du paragraphe 37 des lignes directrices, en considérant que cela permettait d’assurer un équilibre entre le fait de fonder le calcul du montant de l’amende sur le paramètre le plus adéquat pour refléter l’importance économique de l’infraction et le fait d’apporter en même temps les adaptations nécessaires pour garantir un effet dissuasif suffisant, tout en respectant le principe de proportionnalité. Une telle approche ne comporte aucune contradiction.

337    Il n’existe aucune contradiction non plus entre la position exprimée par la Commission au sujet de la nécessité d’une telle majoration, successivement, dans la communication des griefs, dans la lettre du 13 décembre 2016 et dans la décision attaquée.

338    À cet égard, tout d’abord, il convient de relever que, pour les motifs exposés aux points 355 à 357 ci-après, c’est en vain que Campine reproche à la Commission de ne pas avoir fait état, dans la communication des griefs, de son intention de procéder à une majoration du montant de l’amende sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices.

339    Ensuite, il y a lieu de constater que la Commission a fourni des explications au sujet de son intention d’appliquer une telle majoration dans la lettre du 13 décembre 2016, qui se lit comme suit :

« Cette lettre vise à porter à votre attention que, lors de la détermination du montant de l’amende à imposer dans la présente affaire, la Commission a l’intention d’appliquer une majoration spécifique sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices […]. Le paragraphe 37 autorise la Commission à s’écarter de la méthodologie générale prévue par les lignes directrices lorsque les particularités d’une affaire donnée ou la nécessité d’atteindre un niveau dissuasif dans une affaire particulière le justifient.

Dans la [communication des griefs], la Commission a exposé son intention d’utiliser la valeur des achats des produits concernés réalisés par chacune des entreprises pour fixer le montant de base des amendes.

La Commission relève qu’il est inhérent à la nature même de l’infraction (entente en matière d’achats) que plus une telle entente est mise en œuvre avec succès, moins le montant de l’amende de base utilisé pour calculer une amende est élevé.

Afin de tenir compte de cette particularité et d’assurer un effet dissuasif dans la présente affaire, la Commission a l’intention d’appliquer, sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices […], une majoration du montant de l’amende (avant le plafond légal de 10 % du chiffre d’affaires mondial) selon un pourcentage déterminé. Ce pourcentage sera le même pour toutes les entreprises tenues pour responsables de l’infraction.

Veuillez noter que la présente lettre ne contient aucun nouveau grief.

Vous pouvez présenter des observations sur la présente lettre dans un délai de dix jours ouvrables à compter de sa réception […] »

340    Les explications ainsi fournies sont en parfaite adéquation avec celles contenues dans la décision attaquée. Le fait que la Commission ait davantage précisé sa motivation dans cette décision ne signifie nullement qu’elle « a changé à plusieurs reprises l’explication qu’elle donne de la majoration appliquée », ainsi que le soutient Campine dans la réplique.

341    S’agissant des autres arguments et griefs formulés par Campine dans la réplique, il suffit de constater qu’ils concernent le bien-fondé de la décision attaquée et non sa motivation, de sorte qu’ils doivent être rejetés comme dénués de pertinence.

342    En tout état de cause, ces arguments et griefs ne sont pas fondés.

343    Ainsi, premièrement, il est exact que les lignes directrices ne s’appliquent pas uniquement aux ententes en matière de ventes, mais à différents types d’infractions aux articles 101 et 102 TFUE. Il n’en demeure pas moins que, comme le fait valoir très justement la Commission dans la duplique, cela ne signifie pas qu’une application automatique de la méthodologie générale de calcul du montant des amendes exposée dans ces lignes directrices soit appropriée pour toutes les affaires et pour toutes les entreprises concernées. Si tel était le cas, l’exception prévue au paragraphe 37 des lignes directrices n’aurait d’ailleurs aucune raison d’être.

344    Deuxièmement, il convient de relever que Campine ne reproduit pas précisément la position de la Commission lorsqu’elle prétend que celle-ci a affirmé, dans le mémoire en défense, que la valeur des ventes est considérée comme une valeur de remplacement adéquate au motif qu’il peut être supposé que les infractions à l’origine des amendes sont susceptibles d’augmenter la valeur des ventes. Ce que la Commission a indiqué, c’est qu’une entente en matière de ventes a généralement pour objectif d’augmenter ou de maintenir les prix de vente et qu’un tel comportement est donc susceptible d’augmenter la valeur des ventes par rapport à celle qu’elle aurait en l’absence d’une telle infraction et, par voie de conséquence, d’entraîner une amende plus élevée. Il est inhérent à l’application de la méthodologie générale de calcul du montant des amendes prévue par les lignes directrices que, si, comme dans l’une des hypothèses invoquées par Campine, une infraction n’entraîne pas une augmentation de la valeur des ventes, l’amende sera inférieure à ce qu’elle serait si ladite infraction avait un tel effet.

345    Troisièmement, c’est en vain que Campine fait grief à la Commission d’avoir prétendu qu’une entente en matière d’achats avait généralement pour objectif de réduire les prix d’achat ou d’empêcher leur augmentation, tout en étant en défaut d’établir en l’espèce que l’entente avait été mise en œuvre avec succès. En effet, le raisonnement de la Commission ne repose pas sur l’hypothèse que l’entente en cause a été fructueuse, mais sur le constat que, à la différence de ce qui est le cas pour une entente en matière de ventes, la réalisation de l’objectif d’une entente en matière d’achats entraînerait une amende inférieure à celle qu’elle serait en l’absence de l’infraction et qui n’aurait donc pas d’effet dissuasif. En tout état de cause, la majoration du montant de l’amende sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices n’est pas subordonnée à la démonstration préalable d’éventuels effets réels du comportement incriminé sur le marché.

346    Quatrièmement, Campine n’est pas fondée à critiquer le fait que la Commission a déjà inclus dans le montant de base des amendes un montant additionnel correspondant à 15 % de la valeur des achats sur le fondement des dispositions du paragraphe 25 des lignes directrices. En effet, ce montant additionnel, à la différence de la majoration appliquée en vertu du paragraphe 37 des lignes directrices, ne visait pas à compenser le fait que la prise en compte de la valeur des achats en tant que valeur de remplacement la plus adéquate était susceptible d’entraîner une sous-estimation de l’importance économique de l’infraction. À cet égard, il y a lieu de relever que, ainsi que la Commission l’a expliqué dans la duplique et lors de l’audience, les paragraphes 25 et 37 des lignes directrices portent sur des questions différentes. Ainsi, le paragraphe 25 prévoit la possibilité pour la Commission d’appliquer un montant additionnel afin de dissuader les entreprises de participer à des accords horizontaux de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production, ou même à d’autres infractions, et ce indépendamment de la durée de leur participation à l’infraction. Ce mécanisme vise à dissuader les entreprises de violer le droit de la concurrence, ne serait-ce que pendant une brève période. Quant au paragraphe 37, il a pour objet de donner à la Commission une certaine flexibilité pour garantir que le montant global de l’amende est suffisamment élevé pour être dissuasif à la lumière des particularités de l’espèce.

347    En troisième lieu, il convient de constater que Campine n’est pas fondée à reprocher à la Commission de ne pas avoir expliqué pourquoi elle avait fixé à 10 % le pourcentage de la majoration au titre du paragraphe 37 des lignes directrices. Eu égard à la large marge d’appréciation dont dispose la Commission pour choisir le taux de majoration qu’elle entend appliquer, l’explication contenue au considérant 375 de la décision attaquée, selon laquelle le pourcentage de 10 % se justifie par le fait que c’est la première fois qu’elle impose une majoration dans une affaire concernant une entente en matière d’achats, doit être considérée comme suffisante.

348    En quatrième lieu, Campine ne saurait faire grief à la Commission de ne pas avoir expliqué, dans la décision attaquée, pourquoi elle avait imposé le même pourcentage de majoration à tous les destinataires de la décision attaquée. En effet, il est évident que, les raisons ayant conduit à cette majoration s’appliquant de la même manière à tous ces destinataires, il n’y avait pas lieu d’expliquer pourquoi le même pourcentage de majoration s’appliquait à tous les destinataires de la décision attaquée. Les raisons ainsi fournies par la Commission sont compatibles avec le principe d’égalité de traitement, dès lors que les différentes entreprises concernées se trouvaient dans une situation comparable, ayant toutes participé à une même entente en matière de prix d’achat. Le fait, invoqué par Campine, que les entreprises concernées aient participé à des degrés divers à l’entente est un élément non pertinent à ce stade du calcul du montant des amendes, qui a été pris en compte au titre des circonstances atténuantes.

349    Au vu de ce qui précède, il convient de constater que, en ce qui concerne la majoration du montant des amendes sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, la décision attaquée n’est entachée d’aucune insuffisance de motivation. La première branche du premier moyen doit donc être rejetée comme non fondée.

b)      Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de la violation des droits de la défense de Campine ainsi que du principe de bonne administration

1)      Arguments des parties

350    Campine affirme que la Commission a violé ses droits de la défense, son droit d’être entendue et le principe de bonne administration en omettant de faire état de son intention d’appliquer une majoration sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices dans la communication des griefs ou dans une communication des griefs supplémentaire.

351    Campine relève n’avoir été informée de cette intention que par la lettre du 13 décembre 2016, soit un an et demi après l’adoption de la communication des griefs et plus d’un an après l’audition. Cette lettre ne lui aurait pas donné le droit de demander une audition et ne lui aurait même pas permis d’exercer ses droits de la défense par écrit, dès lors qu’elle ne l’aurait pas correctement informée des raisons pour lesquelles la Commission entendait appliquer le paragraphe 37 des lignes directrices.

352    La Commission conteste avoir porté atteinte aux droits de la défense de Campine et avoir méconnu le principe de bonne administration.

2)      Appréciation du Tribunal

353    En premier lieu, en ce qui concerne la prétendue violation des droits de la défense de Campine, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense dans la conduite des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général de droit de l’Union dont le juge de l’Union assure le respect (voir, en ce sens, arrêt du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission, C‑534/07 P, EU:C:2009:505, point 26 et jurisprudence citée). Ce principe exige que l’entreprise intéressée ait été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances allégués ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence d’une infraction au traité (voir arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 66 et jurisprudence citée).

354    L’article 27, paragraphe 1, du règlement no 1/2003 reflète ce principe, dans la mesure où il prévoit l’envoi aux parties d’une communication des griefs qui doit énoncer, de manière claire, tous les éléments essentiels sur lesquels la Commission se fonde à ce stade de la procédure pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés par la Commission et de faire valoir utilement leur défense avant que celle-ci n’adopte une décision définitive. Cette exigence est respectée dès lors que ladite décision ne met pas à la charge des intéressés des infractions différentes de celles visées dans la communication des griefs et ne retient que des faits sur lesquels les intéressés ont eu l’occasion de s’expliquer (voir arrêt du 24 mai 2012, MasterCard e.a./Commission, T‑111/08, EU:T:2012:260, point 266 et jurisprudence citée).

355    S’agissant plus particulièrement de l’exercice des droits de la défense à l’égard de l’imposition d’amendes, il ressort d’une jurisprudence constante que, dès lors que la Commission indique expressément, dans la communication des griefs, qu’elle va examiner s’il convient d’infliger des amendes aux entreprises concernées et qu’elle énonce les principaux éléments de fait et de droit susceptibles d’entraîner une amende, tels que la gravité et la durée de l’infraction supposée et le fait d’avoir commis celle‑ci « de propos délibéré ou par négligence », elle remplit son obligation de respecter le droit des entreprises à être entendues. Ce faisant, elle leur donne les éléments nécessaires pour se défendre non seulement contre une constatation de l’infraction, mais également contre le fait de se voir infliger une amende (voir arrêt du 15 mars 2006, BASF/Commission, T‑15/02, EU:T:2006:74, point 48 et jurisprudence citée).

356    Dans ce contexte, la Commission n’est pas obligée, dès lors qu’elle a indiqué les éléments de fait et de droit sur lesquels elle fondera son calcul du montant des amendes, de préciser la manière dont elle se servira de chacun de ces éléments pour la détermination du montant de l’amende. Donner des indications concernant le montant des amendes envisagées, aussi longtemps que les entreprises n’ont pas été mises en mesure de faire valoir leurs observations sur les griefs retenus contre elles, reviendrait à anticiper de façon inappropriée la décision de la Commission (voir arrêt du 15 mars 2006, BASF/Commission, T‑15/02, EU:T:2006:74, point 62 et jurisprudence citée).

357    En l’espèce, il est constant que, dans la communication des griefs, la Commission a donné des précisions sur les critères impératifs de la gravité et de la durée de l’infraction ainsi que sur le fait que celle-ci avait été commise de propos délibéré (voir points 355, 356 et 364 à 372 de la communication des griefs). L’intention de la Commission de majorer le montant de l’amende sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices afin de tenir compte des particularités de l’affaire et d’atteindre un niveau dissuasif ne constituant pas un « élément de fait et de droit susceptible d’entraîner une amende » au sens de la jurisprudence citée au point 355 ci-dessus, elle n’était pas tenue de mentionner ladite intention dans la communication des griefs ni dans une éventuelle communication des griefs supplémentaire, ou de permettre aux participants à l’entente d’être entendus à ce sujet lors d’une audition, contrairement à ce que prétend Campine.

358    Campine est d’autant moins fondée à invoquer une violation de ses droits de la défense que la Commission a informé les participants à l’entente, par la lettre du 13 décembre 2016, de son intention d’appliquer une telle majoration, en les invitant à lui faire part de leurs observations éventuelles. Campine a d’ailleurs présenté de telles observations.

359    Quant à l’allégation de Campine selon laquelle la lettre du 13 décembre 2016 ne l’a pas correctement informée des raisons pour lesquelles la Commission entendait appliquer le paragraphe 37 des lignes directrices, elle ne saurait davantage prospérer. En effet, outre ce qui a été indiqué ci-dessus, force est de constater que le motif exposé dans cette lettre pour justifier la majoration au titre de ce paragraphe est, en substance, le même que celui exposé dans la décision attaquée (voir points 335 à 340 ci-dessus). Il doit être ajouté que la décision attaquée ne devait nullement être une copie de la lettre du 13 décembre 2016, notamment eu égard au fait que la Commission était en droit de tenir compte, dans cette décision, des observations formulées par les participants à l’entente au sujet de cette lettre.

360    En second lieu, en ce qui concerne la prétendue violation du principe de bonne administration, Campine semble reprocher à la Commission de ne pas avoir indiqué, dès le stade de la communication des griefs, qu’elle appliquerait une majoration sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices alors que, à ce stade, elle connaissait déjà les motifs justifiant, selon elle, une telle majoration. Ce grief ne saurait être accueilli. En effet, comme le relève à juste titre la Commission, au stade de la communication des griefs, cette dernière n’est pas tenue d’avoir pris une décision finale sur le montant exact de l’amende qu’elle entend infliger ou sur la méthode finale de détermination du montant des amendes qu’elle entend appliquer.

361    Il résulte des considérations qui précèdent que la deuxième branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée.

c)      Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de la violation des principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination

1)      Arguments des parties

362    Campine soutient que l’application, sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, de la majoration de 10 % enfreint les principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination.

363    À cet égard, en premier lieu, Campine fait valoir que cette majoration marque une nette rupture par rapport à la pratique décisionnelle antérieure de la Commission, le paragraphe 37 des lignes directrices n’ayant jamais été utilisé aux fins d’augmenter le montant d’une amende dans le cas d’une entente en matière d’achats.

364    En deuxième lieu, Campine soutient que, dans la décision attaquée, la Commission a erronément assimilé aux « particularités d’une affaire donnée », au sens du paragraphe 37 des lignes directrices, le type ou la nature de l’entente en cause. Or, la Commission aurait déjà pris en compte la nature de l’infraction au titre du paragraphe 22 des lignes directrices.

365    En troisième lieu, Campine fait valoir que le fait de majorer le montant de l’amende sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices dans l’hypothèse d’une entente en matière d’achats était inédit et aucunement prévisible. Or, un manque de prévisibilité du montant de l’amende priverait la politique de concurrence d’un effet dissuasif.

366    En quatrième lieu, Campine prétend qu’il ressort de la jurisprudence relative au principe de légalité des délits et des peines (nullum crimen, nulla poena sine lege) que, lorsque la situation est inédite ou que la Commission entend changer sa pratique décisionnelle et adopter une décision visant à dissuader d’autres entreprises de s’engager dans un type spécifique d’infraction, seule une amende d’un montant symbolique est infligée, dès lors que le résultat de sa nouvelle interprétation n’était pas raisonnablement prévisible au moment de la commission de l’infraction.

367    Campine ajoute que la majoration du montant de l’amende sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices ne saurait être justifiée par la nécessité d’assurer un effet dissuasif spécifique en ce qui la concerne. À cet égard, elle fait remarquer que c’est la première fois qu’elle est considérée comme ayant pris part à une violation du droit de la concurrence et qu’elle n’a, tout au plus, joué qu’un rôle mineur et accessoire dans la prétendue entente.

368    La Commission conteste avoir méconnu les principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination en faisant application, en l’espèce, du paragraphe 37 des lignes directrices.

2)      Appréciation du Tribunal

369    Il y a lieu de considérer que, contrairement à ce que fait valoir Campine, l’application faite par la Commission en l’espèce, sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, de la majoration de 10 % n’enfreint nullement les principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination. Aucun des arguments invoqués par Campine au soutien de sa thèse ne saurait prospérer.

370    Ainsi, en premier lieu, il convient de rejeter l’allégation de Campine selon laquelle cette majoration marque une nette rupture par rapport à la pratique décisionnelle antérieure de la Commission. Le fait que cette dernière n’ait jamais, dans le passé, appliqué une majoration au titre du paragraphe 37 des lignes directrices dans le cas d’une entente en matière d’achats ne saurait créer une confiance légitime dans le fait qu’elle ne le ferait pas à l’avenir. À cet égard, il doit être rappelé que, selon la jurisprudence, la Commission n’est pas liée par sa pratique décisionnelle antérieure, cette dernière ne constituant pas, en tout état de cause, un cadre juridique pour le calcul du montant des amendes (arrêts du 20 mars 2002, LR AF 1998/Commission, T‑23/99, EU:T:2002:75, point 234, et du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, EU:T:2005:367, point 153). Les entreprises impliquées dans une procédure administrative pouvant donner lieu à une amende ne sauraient acquérir une confiance légitime dans le fait que la Commission ne dépassera pas le niveau des amendes pratiqué antérieurement ou qu’elle utilisera toujours la même méthode de calcul des amendes (voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 173 et 229).

371    En outre, comme le fait remarquer à juste titre la Commission dans ses écritures, toutes ses décisions antérieures concernant des ententes en matière d’achats ont été adoptées sur la base des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement no 17 et de l’article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3), qui, à la différence des lignes directrices, ne faisaient pas référence à la valeur des ventes pour la détermination du montant de base de l’amende. La présente espèce est la première affaire dans laquelle les lignes directrices ont été appliquées à une telle entente, de sorte qu’il ne saurait être question d’une « nette rupture » comme le prétend Campine.

372    En deuxième lieu, c’est à tort que Campine soutient que, dans la décision attaquée, la Commission a erronément assimilé aux « particularités d’une affaire donnée », au sens du paragraphe 37 des lignes directrices, la nature de l’entente en cause, à savoir une entente en matière d’achats, laquelle nature aurait déjà été prise en compte par la Commission au titre du paragraphe 22 des lignes directrices. En effet, la nature de l’entente que la Commission a prise en considération aux fins de l’application de ce dernier paragraphe est liée à la gravité de l’infraction, à savoir le fait que celle-ci consistait en des comportements collusoires conduisant à la fixation horizontale des prix, soit l’une des restrictions à la concurrence les plus nuisibles (voir considérant 322 de la décision attaquée). En revanche, l’application du paragraphe 37 des lignes directrices était justifiée par la particularité que l’entente était une entente en matière d’achats, pour laquelle l’application de la méthodologie générale de calcul du montant de l’amende n’était pas totalement appropriée.

373    En troisième lieu, il convient de considérer que Campine ne saurait invoquer le principe de sécurité juridique et, plus particulièrement, l’exigence selon laquelle les règles de droit doivent être prévisibles dans leurs effets pour critiquer le fait que la Commission ait décidé, en l’espèce, de procéder à une majoration sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices. À cet égard, tout d’abord, il doit être rappelé qu’il est de jurisprudence constante que les amendes constituent un instrument de la politique de concurrence de la Commission et que celle-ci doit dès lors disposer d’une marge d’appréciation dans la fixation de leur montant, afin d’orienter le comportement des entreprises dans le sens du respect des règles de concurrence (arrêt du 11 décembre 1996, Van Megen Sports/Commission, T‑49/95, EU:T:1996:186, point 53). Ensuite, il y a lieu de relever que le fait qu’une loi confère un pouvoir d’appréciation ne se heurte pas en soi à l’exigence de prévisibilité (arrêt du 13 juillet 2011, Schindler Holding e.a./Commission, T‑138/07, EU:T:2011:362, point 99). Par ailleurs, il a même été considéré par le juge de l’Union que, eu égard à la nécessité d’atteindre un niveau dissuasif, il importait d’éviter que les amendes soient aisément prévisibles par les opérateurs économiques (voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2014, Saint-Gobain Glass France e.a./Commission, T‑56/09 et T‑73/09, EU:T:2014:160, point 151). Enfin, il convient de faire observer que, en l’espèce, la Commission a largement suivi la méthodologie générale de calcul du montant de l’amende prévue par les lignes directrices, ne s’en étant écartée que pour recourir à la valeur de remplacement la plus appropriée et pour pallier le fait que la prise en compte de cette valeur de remplacement était susceptible de donner lieu à une sous-estimation de l’importance économique de l’infraction et de conduire à un effet dissuasif insuffisant. Un tel écart ne saurait être qualifié d’imprévisible, dès lors que le paragraphe 37 des lignes directrices indique expressément que les particularités d’une affaire donnée ou la nécessité d’atteindre un niveau dissuasif dans une affaire particulière peuvent justifier un écart par rapport à ladite méthodologie.

374    Certes, comme le relève Campine dans la réplique, la Cour a jugé, au point 58 de l’arrêt du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522), qu’un opérateur doit pouvoir prévoir de manière suffisamment précise la méthode de calcul et l’ordre de grandeur des amendes qu’il encourt pour un comportement donné. Toutefois, Campine omet de mentionner que, au même point, la Cour a conclu que tel était bien le cas en pratique, dès lors que, si l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 laisse à la Commission une marge d’appréciation, il en limite néanmoins l’exercice en instaurant des critères objectifs auxquels celle-ci doit se tenir, et a déclaré que le fait que cet opérateur ne puisse à l’avance connaître avec précision le niveau des amendes que la Commission infligera dans chaque espèce ne saurait constituer une violation du principe de légalité des peines.

375    En quatrième lieu, est dénué de pertinence, s’agissant de la question de savoir si la Commission était fondée à appliquer en l’espèce une majoration sur la base du paragraphe 37 des lignes directrices, le passage du point 142 de l’arrêt du 8 juillet 2008, AC-Treuhand/Commission (T‑99/04, EU:T:2008:256), cité par Campine. Dans ce passage, le Tribunal a déclaré que, si le principe de légalité des délits et des peines permettait, en principe, la clarification graduelle des règles de la responsabilité pénale par l’interprétation judiciaire, il pouvait s’opposer à l’application rétroactive d’une nouvelle interprétation d’une norme établissant une infraction et qu’il en était particulièrement ainsi si le résultat de cette interprétation n’était pas raisonnablement prévisible au moment de la commission de l’infraction, au vu notamment de l’interprétation retenue à cette époque dans la jurisprudence relative à la disposition légale en cause. Or, l’application, en l’occurrence, du paragraphe 37 des lignes directrices ne conduit en aucune façon à l’application rétroactive d’une nouvelle interprétation de l’article 101 TFUE. Ce paragraphe ne concerne que la question de l’amende à infliger, conformément aux dispositions de l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement no 1/2003 et aux lignes directrices, pour sanctionner l’infraction aux règles de la concurrence. En outre, le fait qu’une entente en matière de prix d’achat puisse constituer une infraction à l’article 101 TFUE n’a absolument rien de nouveau.

376    En cinquième lieu, sont également dépourvues de pertinence les allégations de Campine selon lesquelles c’est la première fois qu’elle a été considérée comme ayant pris part à une violation du droit de la concurrence et elle n’a, tout au plus, joué qu’un rôle mineur et accessoire dans l’entente. Ces circonstances sont étrangères à l’application du paragraphe 37 des lignes directrices et ont été dûment prises en compte à d’autres stades du calcul du montant de l’amende infligée à Campine.

377    En sixième lieu, s’agissant de la prétendue violation du principe d’égalité de traitement, il suffit de constater que Campine n’invoque aucun argument au soutien de ce grief. Il convient donc de le rejeter comme irrecevable, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, dudit statut, et de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure, selon lesquels les moyens invoqués doivent faire l’objet d’un exposé sommaire.

378    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la troisième branche du premier moyen et, partant, ce moyen dans son ensemble doivent être rejetés.

379    En conclusion, il y a lieu d’accueillir de manière partielle la demande d’annulation de la décision attaquée, dans la mesure où la Commission, d’une part, a conclu, à l’article 1er de cette décision, à la participation de Campine à l’infraction entre le 10 février 2010 et le 10 janvier 2011 ainsi qu’entre le 4 avril 2011 et le 7 mars 2012 et, d’autre part, a fixé, à l’article 2 de cette décision, le montant de l’amende infligée à Campine en prenant en compte la durée de l’infraction initialement retenue. Les conséquences de cette annulation partielle de la décision attaquée seront examinées aux points 424 et 425 ci-après.

C.      Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire et visant à la suppression ou à la réduction du montant de l’amende

1.      Observations liminaires

380    Par le second groupe de moyens, Campine présente des griefs et des arguments mettant en cause tant la légalité du calcul du montant de l’amende qui lui a été infligée que le caractère approprié de ladite amende. Ainsi, lesdits griefs et arguments visent, sans séparation claire, l’annulation partielle de l’article 2 de la décision attaquée en ce qu’il concerne Campine et/ou sa réformation dans le cadre de l’exercice par le Tribunal de son pouvoir de pleine juridiction.

381    Selon la jurisprudence, le contrôle de légalité des décisions adoptées par la Commission est complété par la compétence de pleine juridiction, qui est reconnue au juge de l’Union par l’article 31 du règlement no 1/2003, conformément à l’article 261 TFUE. Cette compétence habilite le juge, au-delà du simple contrôle de légalité de la sanction, à substituer son appréciation à celle de la Commission et, en conséquence, à supprimer, à réduire ou à majorer le montant de l’amende ou de l’astreinte infligée (voir arrêt du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 63 et jurisprudence citée). Le contrôle prévu par les traités implique donc que le juge de l’Union exerce un contrôle tant de droit que de fait et qu’il ait le pouvoir d’apprécier les preuves, d’annuler la décision qui est attaquée et de modifier le montant des amendes. Il n’apparaît dès lors pas que le contrôle de légalité prévu à l’article 263 TFUE, complété par la compétence de pleine juridiction quant au montant de l’amende, prévue à l’article 31 du règlement no 1/2003, soit contraire aux exigences du principe de protection juridictionnelle effective figurant à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux (voir arrêt du 8 décembre 2011, Chalkor/Commission, C‑386/10 P, EU:C:2011:815, point 67 et jurisprudence citée).

382    Afin de déterminer le montant de l’amende infligée, il appartient au Tribunal d’apprécier lui-même les circonstances de l’espèce et le type d’infraction en cause. Cet exercice suppose, en application de l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003, de prendre en considération, pour chaque entreprise sanctionnée, la gravité de l’infraction en cause ainsi que la durée de celle-ci, dans le respect des principes, notamment, de motivation, de proportionnalité, d’individualisation des sanctions et d’égalité de traitement, sans que le Tribunal soit lié par les règles indicatives définies par la Commission dans ses lignes directrices (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission, C‑603/13 P, EU:C:2016:38, points 89 et 90).

2.      Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003 et des lignes directrices

a)      Arguments des parties

383    En premier lieu, Campine prétend que la Commission n’a pas correctement apprécié la gravité de l’infraction. Elle fait de nouveau valoir qu’elle n’y a tout au plus participé que marginalement et que son comportement ne pourrait tout au plus être considéré que comme un échange indépendant d’informations imprécises, vagues et sporadiques, sans effet démontré sur le marché. Elle ajoute qu’elle n’est qu’un acteur de petite taille sur celui-ci et qu’elle ne détenait pratiquement aucune part de marché dans deux des États membres concernés, à savoir l’Allemagne et la France.

384    En deuxième lieu, Campine soutient que la Commission n’a pas correctement apprécié la durée de l’infraction. Elle réitère son allégation selon laquelle elle n’a pas participé à une infraction unique et continue, mais tout au plus à une infraction unique et répétée. Elle considère que les éléments de preuve relatifs à six contacts sur une période de plus de trois ans ne sauraient constituer des éléments de preuve se rapportant à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon à ce qu’il puisse être raisonnablement admis que l’infraction s’est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises. Partant, et eu égard à l’évolution des prix sur le marché des déchets de batteries, la durée de l’infraction devrait, en ce qui la concerne, être limitée à une semaine ou tout au plus à deux semaines, suivant chacun des contacts que le Tribunal qualifierait d’illégitime.

385    En troisième lieu, Campine prétend que la Commission n’a pas correctement apprécié les circonstances atténuantes lors du calcul de l’amende qui lui a été infligée.

386    À cet égard, premièrement, Campine critique le fait que la Commission ne lui a accordé qu’une réduction de 5 % du montant de son amende en raison de son rôle secondaire dans l’infraction. La Commission ne saurait justifier ce pourcentage par le fait que la valeur des achats qu’elle avait prise en compte pour Campine reflétait déjà sa position secondaire sur le marché en comparaison avec celle d’Eco‑Bat, de JCI et de Recylex. En effet, la Commission ne serait pas autorisée à tenir compte des chiffres relatifs à la valeur des achats réalisés par Campine dans le cadre de l’appréciation des circonstances atténuantes, étant donné que cette valeur a déjà été prise en compte lors du calcul du montant de base de l’amende à infliger.

387    Selon Campine, la Commission ne saurait davantage justifier le pourcentage ne s’élevant qu’à 5 % en affirmant qu’elle avait participé à toutes les réunions multilatérales et qu’elle ne s’était pas opposée à l’entente ni ne l’avait perturbée. En effet, d’une part, il n’y aurait eu que deux réunions multilatérales sur une période de plus de trois ans et elle se serait sentie « moralement » obligée d’y participer, car elles avaient été organisées par son client le plus important, JCI, afin de discuter de questions relatives au règlement REACH. D’autre part, elle se serait opposée à l’entente dans toute la mesure du possible, n’aurait jamais été à l’initiative d’un quelconque contact collusoire avec les trois membres de l’entente et se serait comportée d’une manière concurrentielle. Campine conclut de ce qui précède, et en invoquant différents facteurs identifiés par la jurisprudence, qui seraient présents en l’espèce, que la Commission aurait dû appliquer une réduction d’au moins 20 % au montant de son amende au titre de la circonstance atténuante tenant à sa participation substantiellement réduite à l’entente.

388    Deuxièmement, Campine affirme que la Commission a commis une erreur en ne lui accordant pas une réduction supplémentaire au titre de sa coopération en dehors du champ d’application de la communication sur la coopération. Elle indique avoir fourni à la Commission, dans sa demande de clémence, toutes les informations dont elle disposait au sujet de l’entente, ce qui n’aurait pas été une tâche aisée, puisque la principale personne impliquée dans l’infraction en cause, M. C. (Campine), avait quitté l’entreprise le 24 août 2012 et puisqu’elle est une société de petite taille ne disposant pas d’un conseiller juridique interne et ne comptant qu’un seul informaticien. Elle prétend que, lorsqu’elle a présenté sa demande de clémence, elle n’avait pas encore trouvé de preuves d’un comportement infractionnel et que, après avoir effectué des recherches supplémentaires, il lui était apparu clairement qu’il n’existait tout simplement pas de preuves de sa participation à l’entente. Les informations qu’elle a fournies dans sa demande de clémence seraient des informations de très grande valeur concernant le fonctionnement du marché, auraient permis à la Commission d’établir l’infraction plus facilement et auraient constitué une confirmation des événements. Enfin, il serait mentionné dans la décision attaquée qu’elle a fourni des informations à la Commission à douze reprises au moins.

389    En quatrième lieu, Campine avance que la Commission a violé le principe de non-discrimination lors du calcul du montant de l’amende dans la mesure où elle n’a pas sanctionné Métal Blanc, alors que cette société était l’un des destinataires de la communication des griefs et qu’il existait dans le dossier des éléments prouvant très clairement l’existence de discussions et d’accords sur les prix entre ladite société et les trois membres de l’entente.

390    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, Campine estime qu’aucune amende ne devrait lui être infligée ou, à tout le moins, que le montant de l’amende devrait être substantiellement réduit.

391    La Commission rejette les arguments invoqués par Campine.

b)      Appréciation du Tribunal

392    En premier lieu, s’agissant de l’appréciation, par la Commission, de la gravité de l’infraction commise par Campine, il convient de rappeler que, selon les lignes directrices, le montant au titre de la gravité de l’infraction est déterminé selon un pourcentage s’élevant de 0 % à 30 % de la valeur des ventes pertinentes de l’entreprise concernée dans la dernière année de sa participation à l’entente.

393    Ainsi que la Commission l’a affirmé à juste titre aux considérants 321 et 322 de la décision attaquée, aux fins de la détermination du coefficient « gravité de l’infraction », il convient de prendre en compte, en particulier, la nature de l’infraction reprochée.

394    Or, comme la Commission l’a relevé, notamment, aux considérants 322 et 324 de la décision attaquée et comme cela a déjà été constaté aux points 295 à 297 ci-dessus, une entente ayant pour objet une coordination de prix constitue par sa nature l’une des plus graves restrictions de la concurrence (voir aussi paragraphe 23 des lignes directrices). Par conséquent, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir commis une erreur de droit en établissant, pour une telle infraction, un taux au titre du coefficient « gravité de l’infraction » de 15 %. Un tel taux, qui correspond au taux le plus faible de l’échelle des sanctions prévue pour de telles infractions en vertu des lignes directrices (arrêt du 26 janvier 2017, Roca/Commission, C‑638/13 P, EU:C:2017:53, point 61), est clairement conforme au principe de proportionnalité.

395    Par ailleurs, pour les motifs exposés dans le cadre de l’examen du deuxième moyen ci-dessus, auquel il est renvoyé, l’allégation de Campine selon laquelle son comportement ne pourrait tout au plus être considéré que comme un échange indépendant d’informations imprécises, vagues et sporadiques, sans effet démontré sur le marché ne saurait être accueillie.

396    S’agissant de l’argument de Campine tiré de ce qu’elle n’a participé que marginalement à l’infraction, il convient de relever que la prise en compte, pour apprécier la gravité d’une infraction, de différences entre les entreprises ayant participé à une même entente ne doit pas nécessairement intervenir lors de la fixation du coefficient « gravité de l’infraction » (ou du montant additionnel), mais peut intervenir à un autre stade du calcul de l’amende, comme lors de l’ajustement du montant de base en fonction de circonstances atténuantes et aggravantes, au titre des paragraphes 28 et 29 des lignes directrices (voir arrêt du 26 janvier 2017, Laufen Austria/Commission, C‑637/13 P, EU:C:2017:51, point 71 et jurisprudence citée). Or, en l’espèce, la Commission a tenu compte du rôle accessoire joué par Campine dans l’entente au titre des circonstances atténuantes en lui accordant une réduction de 5 % du montant de l’amende.

397    Quant à l’argument de Campine tiré de ce qu’elle n’est qu’un acteur de petite taille sur le marché et ne détenait pratiquement aucune part de marché dans deux des quatre États membres concernés, il y a lieu de remarquer que la Cour a reconnu que l’utilisation de la valeur des ventes d’une entreprise (et, par analogie, de la valeur des achats dans le cas d’une entente en matière d’achats) comme point de départ pour le calcul du montant de base des amendes permettait de refléter, pour chaque entreprise participante, l’importance de sa participation à l’infraction en cause (arrêt du 26 janvier 2017, Mamoli Robinetteria/Commission, C‑619/13 P, EU:C:2017:50, point 105). Ce raisonnement peut être appliqué par analogie à l’utilisation de la valeur des achats dans le cas d’une entente en matière d’achats. En l’espèce, le montant de base des amendes a été déterminé, pour chacun des participants à l’entente, sur la base de la valeur des achats qu’il avait effectués pendant la période infractionnelle sur les territoires concernés. Ainsi, un montant de base différent a été établi pour chacun desdits participants, reflétant l’importance de leurs activités respectives sur les territoires concernés.

398    Partant, il doit être conclu que la Commission a correctement apprécié la gravité de l’infraction lors du calcul du montant de l’amende infligée à Campine.

399    En deuxième lieu, il convient de rappeler que, aux fins de déterminer la durée de la participation de chacune des entreprises concernées à l’infraction, la Commission s’est appuyée sur la qualification d’« unique et continue » de celle-ci. Ainsi, elle a considéré que Campine avait pris part à cette infraction unique et continue, et ce sans interruption, du 23 septembre 2009 au 26 septembre 2012, de sorte que le coefficient multiplicateur à appliquer, au titre de la durée de l’infraction, devait être fixé à 3,01.

400    Il ressort de l’examen de la deuxième sous-branche de la seconde branche du deuxième moyen (voir points 263 à 284 ci-dessus) que la Commission a erronément conclu que Campine avait participé à l’infraction de manière continue du 23 septembre 2009 au 26 septembre 2012. En effet, il a été relevé que sa participation à cette infraction avait été interrompue une première fois entre le 10 février 2010 et le 10 janvier 2011 et une seconde fois entre le 4 avril 2011 et le 7 mars 2012, de sorte que la durée de l’infraction unique et répétée imputable à Campine était de quatorze mois.

401    Partant, le coefficient multiplicateur à appliquer, au titre de la durée de l’infraction, doit être fixé à 1,17 pour Campine.

402    En troisième lieu, s’agissant de l’appréciation des circonstances atténuantes, il convient de rappeler que, en application du paragraphe 29 des lignes directrices, la Commission a accordé à Campine une réduction de 5 % du montant de base de son amende, eu égard, en substance, à son rôle mineur et périphérique dans l’entente.

403    Il importe de vérifier si ce niveau de réduction est approprié compte tenu de la nature et de l’ensemble des circonstances pertinentes qui caractérisent la participation de Campine à l’entente.

404    À cet égard, premièrement, il y a lieu de constater qu’il ressort du considérant 355 de la décision attaquée que, pour fixer à 5 % le niveau de réduction à appliquer à l’amende de Campine, d’une part, la Commission a relevé que cette dernière avait pris part à beaucoup moins de contacts anticoncurrentiels que les trois autres membres de l’entente (à savoir 6 contacts pour Campine, contre 61 pour JCI, 28 pour Eco-Bat et 39 pour Recylex), que, pour de longues périodes, il n’existait aucune preuve de sa participation à un quelconque contact anticoncurrentiel et qu’il apparaissait donc qu’elle n’avait joué qu’un rôle mineur ou périphérique dans l’infraction. D’autre part, la Commission a estimé qu’une réduction supérieure à 5 % ne serait pas justifiée, dès lors que « la valeur des achats prise en compte dans le cas de Campine [reflétait] déjà sa position secondaire sur le marché par rapport à celle d’Eco-Bat, de JCI et de Recylex », que Campine « [avait] pris part à toutes les réunions multilatérales et [qu’elle] ne s’[était] pas opposée à l’entente ni n’[avait] perturbé celle-ci ».

405    Campine ne remet pas en cause les constatations formulées par la Commission dans le cadre du premier volet du raisonnement exposé au point 404 ci-dessus et dont l’exactitude matérielle est au demeurant confirmée par les éléments du dossier.

406    Il convient de relever, toutefois, que le fait que Campine n’a pris part à aucun contact anticoncurrentiel dans le cadre de l’entente pendant une période totale de 22 mois environ a déjà été pris en compte par le Tribunal pour réduire le coefficient multiplicateur à appliquer au titre de la durée de l’infraction (voir point 401 ci-dessus).

407    En ce qui concerne les constatations formulées par la Commission dans le cadre du second volet de son raisonnement exposé au point 404 ci-dessus, tout d’abord, il y a lieu de relever qu’il est constant entre les parties que Campine a pris part à toutes les réunions multilatérales de l’entente, lesquelles n’ont toutefois été qu’au nombre de deux pendant toute la durée de l’entente. L’argument de Campine selon lequel elle se sentait « moralement obligée » d’assister à ces réunions au motif qu’elles étaient organisées par son client le plus important, JCI, ne saurait prospérer. En effet, ainsi que cela ressort des considérations formulées aux points 138 à 154 et 164 à 173 ci-dessus, les discussions intervenues lors desdites réunions étaient de nature anticoncurrentielle et Campine ne s’est pas distanciée publiquement de leur contenu. Ensuite, force est de constater qu’aucun élément du dossier ne corrobore l’allégation de Campine selon laquelle elle s’était opposée à l’entente dans toute la mesure du possible. Quant à son allégation selon laquelle elle n’a jamais été à l’initiative du moindre contact collusoire avec les autres membres de l’entente, elle est contredite par le courriel du 10 février 2010, dont il ressort qu’elle avait invité JCI à baisser ses prix d’achat de déchets de batteries sur le marché allemand (voir points 155 à 163 ci-dessus).

408    En revanche, la Commission ne saurait être suivie lorsque, pour limiter le niveau de réduction susceptible d’être accordé à Campine au titre des circonstances atténuantes, elle invoque le fait que la valeur des achats prise en compte dans le cas de cette dernière reflète déjà sa position secondaire sur le marché en comparaison de celle des autres participants à l’entente. En d’autres termes, la Commission tente de tirer argument, pour ne pas accorder à Campine une réduction supérieure à 5 %, du fait que la présence limitée de cette dernière sur le marché a déjà été prise en compte lors de la détermination du montant de base de son amende, qui se fondait sur la valeur des achats réalisés par chacun des participants à l’entente, et que, partant, si une telle réduction était appliquée à son amende, celle-ci n’aurait plus un effet dissuasif suffisant. Une telle approche ne saurait être acceptée, dans la mesure où elle revient à traiter plus sévèrement un acteur de taille modeste qu’un acteur du marché de taille plus importante.

409    Deuxièmement, il ne saurait être considéré que, comme le fait valoir Campine, la Commission a commis une erreur en ne réduisant pas davantage le montant de son amende en raison de sa coopération en dehors du champ d’application de la communication sur la coopération.

410    À cet égard, il convient de rappeler que le paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices prévoit que le montant de base de l’amende peut être réduit au titre des circonstances atténuantes « lorsque l’entreprise concernée coopère effectivement avec la Commission, en dehors du champ d’application de la communication sur la [coopération] et au-delà de ses obligations juridiques de coopérer ».

411    Pour que Campine puisse toutefois revendiquer le bénéfice des dispositions du paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices, il lui appartient d’établir que sa coopération, étant allée au-delà de son obligation légale de coopérer sans toutefois lui donner droit à une réduction du montant de l’amende au titre de la communication sur la coopération, a eu une utilité objective pour la Commission, celle-ci ayant pu se reposer, dans sa décision finale, sur des éléments de preuve qu’elle lui aurait fournis dans le cadre de sa coopération et en l’absence desquels la Commission n’aurait pas été en mesure de sanctionner totalement ou partiellement l’infraction en cause (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2015, Socitrel et Companhia Previdente/Commission, T‑413/10 et T‑414/10, EU:T:2015:500, point 329).

412    Or, force est de constater que tel n’est pas le cas en l’espèce. En effet, ainsi que le relève à juste titre la Commission dans ses écritures, la coopération de Campine n’a consisté qu’à se conformer à son obligation légale de répondre aux demandes de renseignements et à se soumettre aux inspections. Par ailleurs, Campine, loin de reconnaître les faits, n’a eu de cesse de les nier et de contester sa participation à l’entente, même dans le cadre du présent recours. Enfin, ainsi qu’il ressort des considérants 404 à 411 de la décision attaquée, les informations qui ont été fournies par Campine dans le cadre de sa demande de clémence n’avaient que peu, voire pas du tout de valeur ajoutée.

413    Eu égard aux considérations développées aux points 402 à 412 ci-dessus, il y a lieu d’appliquer, en vertu du pouvoir de pleine juridiction conféré au Tribunal par l’article 31 du règlement no 1/2003, une réduction de 8 % au montant de base de l’amende de Campine au titre des circonstances atténuantes.

414    En quatrième lieu, il convient de rejeter le grief de Campine tiré de ce que la Commission a violé le principe de non-discrimination en la déclarant responsable d’avoir participé à l’entente en cause et en lui infligeant une amende pour ce comportement, sans avoir agi de la même manière à l’égard de Métal Blanc, alors qu’il y aurait des preuves évidentes de l’existence de contacts collusoires entre cette dernière et les membres de l’entente.

415    Il y a lieu de rappeler, en effet, que, selon une jurisprudence bien établie, la circonstance qu’un opérateur qui se trouvait dans une situation semblable à celle de la partie requérante n’a fait l’objet d’aucune constatation d’infraction de la part de la Commission ne saurait, en toute hypothèse, permettre d’écarter l’infraction retenue à l’encontre de cette partie requérante, dès lors que celle-ci a été correctement établie (arrêt du 31 mars 1993, Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission, C‑89/85, C‑104/85, C‑114/85, C‑116/85, C‑117/85 et C‑125/85 à C‑129/85, EU:C:1993:120, point 146). Il résulte de cette jurisprudence que la Commission est en droit d’adresser à chaque entreprise pour laquelle une infraction est établie une décision constatant cette infraction et lui infligeant une sanction. Des arguments tirés d’une comparaison de la situation du destinataire d’une telle décision avec la situation d’autres entreprises (qu’elles soient ou non destinataires de la même décision) ne sauraient en aucun cas remettre en question la légalité de la décision en ce qu’elle constate et sanctionne une infraction effectivement établie (arrêt du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, EU:T:2006:396, points 138 et 139). Le grief formulé par Campine doit donc être rejeté comme inopérant.

416    En outre, et en tout état de cause, il est de jurisprudence constante que le principe d’égalité de traitement, principe général du droit de l’Union, n’est violé que lorsque des situations comparables sont traitées de manière différente ou que des situations différentes sont traitées de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (voir arrêt du 13 décembre 2001, Krupp Thyssen Stainless et Acciai speciali Terni/Commission, T‑45/98 et T‑47/98, EU:T:2001:288, point 237 et jurisprudence citée). Or, en l’espèce, Campine n’avance aucun argument ni élément de preuve permettant d’établir qu’elle se trouvait dans une situation comparable à celle de Métal Blanc. À cet égard, l’affirmation faite par la Commission dans le mémoire en défense, selon laquelle, à la différence de ce qui était le cas pour Campine, elle ne disposait pas de suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer que Métal Blanc avait enfreint l’article 101 TFUE et la sanctionner en conséquence, doit être considérée comme crédible.

417    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le troisième moyen doit être accueilli pour autant que la Commission n’a pas correctement apprécié le facteur « durée de l’infraction » lors du calcul du montant de base de l’amende de Campine et qu’elle n’a accordé qu’une réduction de 5 % de ce montant au titre des circonstances atténuantes. Ce moyen doit être rejeté pour le surplus.

3.      Sur le quatrième moyen, visant à la réduction du montant de l’amende, tiré de ce que la majoration de 10 % appliquée sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices devrait être annulée

a)      Arguments des parties

418    Dans une première branche, Campine fait valoir que, si le Tribunal devait considérer que les griefs qu’elle a invoqués dans le cadre du premier moyen ne justifient pas une annulation de la décision attaquée, il devrait à tout le moins annuler la majoration de 10 % du montant de l’amende appliquée sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices.

419    Dans une seconde branche, Campine soutient que, eu égard à sa situation individuelle et à son rôle extrêmement limité et marginal dans l’infraction en cause, si le Tribunal devait conclure que la Commission était en droit d’augmenter le montant de l’amende sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices, cette augmentation devrait être limitée à un montant symbolique ou, à tout le moins, être sensiblement moins élevée que 10 %.

420    La Commission rejette les arguments de Campine.

b)      Appréciation du Tribunal

421    S’agissant de la première branche du quatrième moyen, il suffit de rappeler que les arguments invoqués au soutien de celle-ci ont déjà été rejetés dans le cadre de l’appréciation du premier moyen aux points 321 à 349, 353 à 361 et 369 à 378 ci-dessus.

422    S’agissant de la seconde branche, il suffit également de relever qu’il a déjà été tenu compte du rôle limité de Campine dans l’entente en accordant une réduction du montant de base de son amende au titre des circonstances atténuantes.

423    Partant, le quatrième moyen doit être rejeté comme non fondé.

D.      Sur la détermination du montant final de l’amende

424    Il ressort des considérations développées aux points 399 à 413 ci-dessus qu’il y a lieu de fixer à 1,17 le coefficient multiplicateur à appliquer au titre de la durée de l’infraction et à 8 % la réduction à appliquer au titre des circonstances atténuantes.

425    Le montant final de l’amende infligée à Campine est donc calculé comme suit : tout d’abord, le montant de base de l’amende est déterminé en appliquant, compte tenu de la gravité, un pourcentage de 15 % à la valeur des achats réalisés par Campine, ce qui aboutit à un montant de 1 946 981 euros, et en appliquant à ce dernier montant, au titre de la durée de l’infraction, un coefficient multiplicateur de 1,17, ce qui aboutit à un montant de 2 277 968 euros, auquel il convient d’ajouter un montant additionnel de 1 946 981 euros, pour parvenir à un montant de 4 224 949 euros. Ensuite, sont soustraits 8 % de ce montant (337 996 euros), au titre des circonstances atténuantes, ce qui aboutit à un montant de 3 886 953 euros. Enfin, ce dernier montant doit être augmenté de 10 % sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices (388 695 euros), ce qui aboutit à une amende d’un montant final de 4 275 648 euros.

IV.    Sur les dépens

426    Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. Toutefois, si cela apparaît justifié au vu des circonstances de l’espèce, le Tribunal peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie.

427    Dès lors qu’il est partiellement fait droit au recours des requérantes, il convient de condamner la Commission à supporter, outre ses propres dépens, un tiers de ceux exposés par les requérantes. Les requérantes supporteront deux tiers de leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      L’article 1er de la décision C(2017) 900 final de la Commission, du 8 février 2017, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE (affaire AT.40018 – Recyclage de batteries automobiles), est annulé en ce qu’il vise la période se situant entre le 10 février 2010 et le 10 janvier 2011 et celle se situant entre le 4 avril 2011 et le 7 mars 2012, pour autant qu’il concerne Campine NV et Campine Recycling NV.

2)      L’article 2 de la décision C(2017) 900 final est annulé en ce qu’il fixe le montant de l’amende infligée à Campine et à Campine Recycling à 8 158 000 euros.

3)      Le montant de l’amende infligée à Campine et à Campine Recycling à l’article 2 de la décision C(2017) 900 final est fixé à 4 275 648 euros.

4)      Le recours est rejeté pour le surplus.

5)      Campine et Campine Recycling supporteront deux tiers de leurs propres dépens.

6)      La Commission européenne supportera ses propres dépens et un tiers des dépens de Campine et de Campine Recycling.

Collins

Kancheva

Barents

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 novembre 2019.

Signatures


Table des matières


I. Antécédents du litige

A. Procédure administrative à l’origine de la décision attaquée

B. Décision attaquée

1. Secteur concerné

2. Description de l’infraction

3. Appréciation juridique de l’infraction par la Commission

4. Durée de la participation à l’infraction

5. Responsabilité de l’infraction

6. Calcul du montant des amendes

a) Point de départ pour la détermination du montant de base des amendes

b) Montant de base des amendes

c) Ajustements du montant de base des amendes

d) Application du plafond de 10 % du chiffre d’affaires

e) Application de la communication sur la coopération et montant final des amendes

II. Procédure et conclusions des parties

III. En droit

A. Sur la recevabilité des documents produits par Campine lors de l’audience et sur sa demande de voir retiré du dossier de l’affaire le courriel du 10 février 2010

B. Sur les conclusions présentées à titre principal et visant à l’annulation de la décision attaquée

1. Sur le deuxième moyen, tiré de ce que la Commission n’a pas établi à suffisance de droit que Campine avait commis une infraction à l’article 101, paragraphe 1, TFUE

a) Observations liminaires

b) Sur la première branche du deuxième moyen, tirée d’une appréciation erronée des éléments de preuve

1) Arguments des parties

2) Appréciation du Tribunal

i) Sur la réunion organisée à Windhagen le 23 septembre 2009

ii) Sur le courriel du 10 février 2010

iii) Sur la réunion organisée à Cologne le 4 avril 2011

iv) Sur les SMS de M. M. (JCI) du 7 mars 2012

v) Sur certains contacts intervenus au cours du mois de mai 2012

vi) Sur certains contacts intervenus au cours du mois de juin 2012

c) Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée de ce que les éléments de preuve fournis ne permettent pas d’étayer la constatation d’une infraction

1) Arguments des parties

2) Appréciation du Tribunal

i) Sur la question de savoir s’il est démontré que Campine a participé à l’entente

ii) Sur la question de savoir si Campine a pris part à une infraction unique et continue

– Observations liminaires

– Sur la participation de Campine à un plan d’ensemble poursuivant un objectif commun

– Sur la contribution intentionnelle de Campine au plan d’ensemble

– Sur la connaissance par Campine de l’ensemble des comportements infractionnels

– Sur le caractère continu de la participation de Campine à l’infraction

iii) Sur la question de savoir si le comportement imputé à Campine a un objet ou un effet anticoncurrentiel

2. Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, des droits de la défense ainsi que des principes de bonne administration, de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination

a) Sur la première branche du premier moyen, tirée de la violation de l’obligation de motivation

1) Arguments des parties

2) Appréciation du Tribunal

b) Sur la deuxième branche du premier moyen, tirée de la violation des droits de la défense de Campine ainsi que du principe de bonne administration

1) Arguments des parties

2) Appréciation du Tribunal

c) Sur la troisième branche du premier moyen, tirée de la violation des principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime et de non-discrimination

1) Arguments des parties

2) Appréciation du Tribunal

C. Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire et visant à la suppression ou à la réduction du montant de l’amende

1. Observations liminaires

2. Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003 et des lignes directrices

a) Arguments des parties

b) Appréciation du Tribunal

3. Sur le quatrième moyen, visant à la réduction du montant de l’amende, tiré de ce que la majoration de 10 % appliquée sur le fondement du paragraphe 37 des lignes directrices devrait être annulée

a) Arguments des parties

b) Appréciation du Tribunal

D. Sur la détermination du montant final de l’amende

IV. Sur les dépens


*      Langue de procédure : l’anglais.