Language of document : ECLI:EU:T:2018:877

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

5 décembre 2018 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Rapport d’évaluation d’un organisme notifié au sens de la législation en matière de déclaration de conformité CE de dispositifs médicaux – Refus d’accès – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux – Obligation de procéder à un examen concret et individuel – Intérêt public supérieur – Refus d’accès partiel »

Dans l’affaire T‑875/16,

Falcon Technologies International LLC, établie à Ras Al Khaimah (Émirats arabes unis), représentée par Mes R. Sciaudone et G. Arpea, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. J. Baquero Cruz et D. Nardi, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision C(2016) 6722 final de la Commission, du 14 octobre 2016, refusant d’accorder à la requérante l’accès au document DG (Santé) 2015‑7552,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. A. M. Collins, président, Mme M. Kancheva et M. J. Passer (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 30 mai 2018,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Falcon Technologies International LLC, opère dans le secteur du matériel informatique et produit des supports optiques d’archivage de données destinés, notamment, à être commercialisés dans le secteur du diagnostic médical.

2        En 2009, la requérante a demandé au ministère de la Santé italien si les supports d’enregistrement tels que les CD‑ROM et les DVD‑ROM non réinscriptibles, spécifiquement réalisés par le fabricant dans le but précis d’enregistrer et d’archiver des images de radiodiagnostic pouvaient figurer dans la classe IIa des dispositifs médicaux portant le marquage CE visés par la directive 93/42/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, relative aux dispositifs médicaux (JO 1993, L 169, p. 1). Le ministère lui a répondu positivement, dès lors que les supports d’enregistrement (CD‑ROM et DVD‑ROM) étaient destinés expressément par le fabricant à l’enregistrement d’images de radiodiagnostic.

3        La requérante s’est adressée à ICIM SpA, l’organisme désigné par la République italienne pour effectuer les tâches se rapportant notamment aux procédures visées à l’article 11 de la directive 93/42 (ci-après l’« organisme notifié »), qui a délivré les certificats nos 2482 et 0425-MED-007815-00 déclarant la conformité CE du système de qualité des supports optiques d’enregistrement d’images de radiodiagnostic (CD‑ROM, DVD‑ROM et BD‑ROM) de la requérante.

4        Cependant, par décision du 12 novembre 2015, le ministère de la Santé italien a nié l’appartenance des supports d’enregistrement tels que les CD‑ROM et les DVD‑ROM non réinscriptibles à la classe IIa des dispositifs médicaux prévus par la directive 93/42. Par ailleurs, l’organisme notifié a communiqué à la requérante, le 6 avril 2016, une décision du ministère de la Santé italien interdisant l’apposition du marquage CE sur tous les dispositifs optiques destinés au diagnostic par imagerie. Par conséquent, l’organisme notifié a révoqué les certificats délivrés antérieurement à la requérante.

5        Le 6 juin 2016, la requérante a introduit un recours devant le Tribunale amministrativo regionale del Lazio (tribunal administratif régional du Latium, Italie) tendant à l’annulation des décisions adoptées par le ministère de la Santé italien des 12 novembre 2015 et 6 avril 2016, mentionnées au point 4 ci-dessus, ainsi que de la note par laquelle l’organisme notifié avait révoqué le certificat attestant de la conformité CE de ses CD‑ROM et DVD‑ROM.

6        En vue de l’audience sur les mesures provisoires demandées par la requérante, le ministère de la Santé italien a déposé un rapport technique, évoquant un rapport intitulé « Final report of an assessment of ICIM (NB 0425), carried out in the framework of the joint assessment process for notified bodies [DG (Santé) 2015‑7552] » (ci-après le « rapport final »), émis par des inspecteurs de la Commission européenne aux termes d’une inspection effectuée conjointement avec des inspecteurs du ministère de la Santé et d’autres autorités compétentes auprès de l’organisme notifié du 5 au 9 octobre 2015. Selon ce rapport, « [l]’équipe d’évaluation conjointe a constaté que de toute évidence ces produits ne relèvent pas de la [directive 93/42] au regard des [lignes directrices de la Commission intitulées “Medical Devices : Guidance document – Classification of medical devices” de 2010] ».

7        Le 12 juillet 2016, le ministère de la Santé italien a demandé l’autorisation à la Commission de pouvoir communiquer la partie du rapport final ayant trait aux CD-ROM et aux DVD-ROM en tant que dispositifs médicaux, à savoir l’« observation no 3 » contenue dans le rapport, à une requérante non identifiée dans le cadre d’un litige. La Commission ne s’est pas opposée à cette communication.

8        Le 21 juillet 2016, la requérante a présenté à la Commission une demande au titre de l’article 6 du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), afin d’accéder au rapport final. Le 5 septembre 2016, la Commission a transmis à la requérante une première décision lui refusant l’accès au rapport final, affirmant que l’article 4 du règlement susmentionné faisait obstacle au droit d’accès au document en question, et excluant la possibilité d’un accès partiel en raison d’un intérêt commercial pour l’organisme notifié. De plus, la Commission a rejeté l’existence d’un intérêt public supérieur dans la divulgation.

9        Le 12 septembre 2016, la requérante a présenté une demande confirmative, dans laquelle elle a soulevé l’insuffisance de la motivation de la décision du 5 septembre 2016.

10      Avec l’adoption de la décision C(2016) 6722 final, du 14 octobre 2016 (ci-après la « décision attaquée »), la Commission a confirmé, en la développant, sa décision initiale de refus.

11      La Commission note dans la décision attaquée que le rapport final comporte des constatations effectuées par une équipe composée de représentants des autorités de désignation de deux États membres et d’un représentant de la Commission à l’issue d’une procédure administrative très détaillée sur le respect, par l’organisme notifié, de la réglementation applicable aux organismes notifiés.

12      Dans la mesure où le rapport final se concentre exclusivement sur les manquements de l’organisme notifié au regard du règlement d’exécution (UE) no 920/2013 de la Commission, du 24 septembre 2013, relatif à la désignation et au contrôle des organismes notifiés au titre de la directive 90/385/CEE du Conseil concernant les dispositifs médicaux implantables actifs et de la directive 93/42 (JO 2013, L 253, p. 8), la Commission en déduit que la divulgation du rapport d’évaluation conjointe porterait atteinte à la réputation de l’organisme notifié et, partant, à ses intérêts commerciaux.

13      En effet, selon la Commission, cette divulgation pourrait affaiblir l’organisme notifié dans ses transactions avec d’autres opérateurs économiques, en particulier dans ses négociations contractuelles. La divulgation du rapport final engendrerait une méfiance entre les parties et affaiblirait la confiance placée dans l’organisme notifié, ce qui aurait des répercussions sur ses activités commerciales, ses clients, à savoir les fabricants de dispositifs médicaux, pouvant être amenés à ne plus utiliser les services de cet organisme et les clients potentiels pouvant être dissuadés de retenir les services de l’organisme notifié à l’avenir.

14      Enfin, la Commission considère que le marché des services fournis par les organismes notifiés dans le domaine des dispositifs médicaux est caractérisé par un nombre limité d’opérateurs et un niveau élevé de concurrence. Les concurrents de l’organisme notifié auraient un avantage injustifié sur ce dernier, dans la mesure où leurs rapports d’évaluation ne seraient pas publics. Le risque d’atteinte aux intérêts commerciaux est donc raisonnablement prévisible et non purement hypothétique pour la Commission.

15      En ce qui concerne l’existence d’un intérêt public supérieur, la Commission considère, d’une part, que l’intérêt public supérieur invoqué par la requérante, à savoir son droit à la défense, concerne un intérêt privé et non public et, d’autre part, que la requérante n’a pas identifié d’autres intérêts publics supérieurs dans la divulgation.

16      Enfin, la Commission rejette la demande d’accès partiel, en soutenant qu’un accès partiel significatif ne peut être accordé sans mettre en péril les intérêts commerciaux de l’organisme notifié.

 Procédure et conclusions des parties

17      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 décembre 2016, la requérante a introduit le présent recours.

18      Par ordonnance du 26 octobre 2017, le Tribunal a ordonné à la Commission de produire le rapport final, au titre d’une mesure d’instruction au sens de l’article 91, sous c), du règlement de procédure du Tribunal.

19      Le rapport final, qui n’a pas été communiqué à la requérante, a été déposé par la Commission le 3 novembre 2017.

20      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

21      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 30 mai 2018.

22      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

23      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

24      À l’appui du recours, la requérante invoque trois moyens, tirés, en premier lieu, de la violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, en deuxième lieu, de la violation de l’article 4, paragraphe 2, dernière phrase, de ce règlement et, en troisième lieu, de la violation de l’article 4, paragraphe 6, dudit règlement. Le premier moyen est divisé en deux branches, à savoir, d’une part, l’interprétation et l’application erronées de la notion d’intérêt commercial et, d’autre part, l’insuffisance de la motivation avancée par la Commission à l’appui du préjudice concret et spécifique pour les intérêts commerciaux de l’organisme notifié. Enfin, la requérante soulève formellement un quatrième moyen dans la réplique, tiré d’une prétendue contradiction des motifs, qui sera examiné dans le cadre du premier moyen.

25      Il convient d’examiner, à titre liminaire, l’argument invoqué par la Commission relatif à l’absence d’intérêt à agir de la requérante.

 Sur l’absence d’intérêt à agir de la requérante

26      Sans soulever formellement une exception d’irrecevabilité, la Commission semble soulever des doutes quant à l’intérêt à agir de la requérante. En particulier, la Commission indique que le rapport final ne porte sur la question de la classification des CD-ROM et des DVD-ROM en tant que dispositifs médicaux que dans la partie dont la requérante a déjà connaissance, à la suite de la communication par le ministère de la Santé italien de l’observation no 3 contenue dans ledit rapport. Par conséquent, elle soutient que l’accès au rapport final dans son intégralité n’est pas pertinent pour les motifs de défense invoqués par la requérante, ce qui a une incidence sur l’intérêt de cette dernière à introduire le recours en annulation objet de la présente affaire.

27      À l’instar des arguments développés par la requérante lors de l’audience, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1049/2001, le demandeur d’accès n’est pas tenu de justifier sa demande.

28      Selon une jurisprudence constante, toute demande d’accès aux documents au sens du règlement no 1049/2001 ne doit pas être motivée par des intérêts spécifiques (arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, EU:C:2007:75, points 43 à 48).

29      En effet, toute personne peut demander à avoir accès à n’importe quel document des institutions, sans qu’une justification particulière à l’accès aux documents soit demandée. Par conséquent, une personne qui s’est vu refuser l’accès à un document ou à une partie d’un document a déjà, de ce seul fait, un intérêt à l’annulation de la décision de refus (voir arrêt du 9 septembre 2014, MasterCard e.a/Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, point 40 et jurisprudence citée).

30      Dès lors, l’argument invoqué par la Commission quant à l’absence d’intérêt à agir de la requérante doit être rejeté.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001

31      Par ce moyen, divisé en deux branches, la requérante soutient que la décision attaquée enfreint les dispositions de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, dans la mesure où elle est fondée sur une interprétation erronée de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux se traduisant par une application erronée de cette exception (première branche) et où la Commission n’aurait pas suffisamment expliqué dans quelle mesure la divulgation du document demandé aurait porté atteinte de manière concrète et spécifique à l’intérêt commercial protégé (seconde branche). De plus, il y a lieu d’examiner dans ce contexte les arguments avancés par la requérante relatifs à une prétendue contradiction des motifs.

 Sur la première branche, concernant l’interprétation et l’application de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux

32      La requérante critique l’application que fait la Commission de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 au rapport final en partant du postulat que la divulgation au public du rapport de l’équipe d’évaluation conjointe, axé sur les carences et les manquements de l’organisme notifié, porterait atteinte à la réputation de cet organisme. Selon la Commission, toute atteinte à la réputation et au crédit de l’organisme notifié pourrait à son tour porter préjudice aux intérêts commerciaux de ce dernier.

33      Selon la requérante, les carences et les manquements figurant dans le rapport d’évaluation conjointe d’un organisme notifié ne relèvent pas de la catégorie des intérêts commerciaux protégés. Au soutien de son argumentation, elle invoque notamment plusieurs arrêts du Tribunal (arrêts du 22 mai 2012, Sviluppo Globale/Commission, T‑6/10, non publié, EU:T:2012:245, points 66 et 67, et du 21 septembre 2016, Secolux/Commission, T‑363/14, EU:T:2016:521, point 53) qui qualifieraient d’intérêts commerciaux exclusivement des éléments qui seraient liés à des aspects économiques et commerciaux de l’activité de l’entreprise.En substance, la protection contre l’atteinte à la réputation ne s’élèverait pas, en tant que telle, au rang d’intérêt commercial au sens du règlement no 1049/2001.

34      À titre surabondant, la requérante note que les manquements de l’organisme notifié en question, répertoriés dans le rapport, devraient plutôt être assimilés à ceux qui apparaissent à l’issue des procédures ouvertes pour violation des règles de la concurrence, voire être comparés aux appréciations négatives sur lesquelles se fonde le rejet d’une offre dans le cadre d’une procédure de passation de marché public de l’Union européenne. La requérante relève que, dans ces deux cas, la jurisprudence limite l’accès aux informations commerciales, mais pas à la décision qui contient le résultat final, de telle sorte que les considérations de la Commission seraient dénuées de pertinence.

35      La Commission rejette ces arguments.

36      À titre liminaire, il importe de rappeler que, en vertu de l’article 15, paragraphe 3, TFUE, tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre a un droit d’accès aux documents des institutions, organes et organismes de l’Union sous réserve des principes et des conditions qui sont fixés conformément à la procédure législative ordinaire. Par ailleurs, ce même droit est reconnu à l’article 42 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (arrêt du 23 janvier 2017, Justice & Environment/Commission, T‑727/15, non publié, EU:T:2017:18, point 39).

37      Le règlement no 1049/2001 vise, comme l’indiquent le considérant 4 et l’article 1er de celui-ci, à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions qui soit le plus large possible (arrêts du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 111, et du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, point 53 ; voir également, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 40).

38      En tout état de cause, il convient d’interpréter et d’appliquer le règlement no 1049/2001 à la lumière de l’article 15, paragraphe 3, TFUE et de l’article 42 de la charte des droits fondamentaux.

39      Le principe de l’accès le plus large possible du public aux documents n’en est pas moins soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé. En effet, le règlement no 1049/2001, notamment en son considérant 11 et en son article 4, prévoit un régime d’exceptions imposant aux institutions et aux organismes de ne pas divulguer des documents dans le cas où la divulgation porterait atteinte à l’un de ces intérêts (voir, en ce sens, arrêts du 28 juin 2012, Commission/Éditions Odile Jacob, C‑404/10 P, EU:C:2012:393, point 111 ; du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, point 53, et du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 40).

40      Dès lors que les exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 dérogent au principe général de l’accès du public aux documents le plus large possible (conclusions de l’avocat général Sharpston dans l’affaire Suède/Commission, C‑562/14 P, EU:C:2016:885, point 36), elles doivent être interprétées et appliquées strictement (voir arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 75 et jurisprudence citée).

41      Conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, l’accès à un document est refusé par les institutions dès lors que sa divulgation porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

42      Il ressort de la jurisprudence que toute information relative à une société et à ses relations d’affaires ne saurait être considérée comme relevant de la protection qui doit être garantie aux intérêts commerciaux conformément à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, sauf à tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions (voir arrêt du 26 avril 2016, Strack/Commission, T‑221/08, non publié, EU:T:2016:242, point 204 et jurisprudence citée).

43      En revanche, cette exception s’applique lorsque les documents demandés contiennent des informations commerciales sensibles relatives, notamment, aux stratégies commerciales des entreprises concernées ou à leurs relations commerciales ou lorsque ceux-ci contiennent des données propres à l’entreprise qui mettent en avant son expertise (voir arrêt du 9 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, T‑516/11, non publié, EU:T:2014:759, points 82 à 84 et jurisprudence citée).

44      En l’espèce, la Commission n’a pas appliqué de présomption générale de confidentialité au rapport final, mais a invoqué la protection qui doit être garantie aux intérêts commerciaux de l’organisme notifié. Dans le cadre de l’exception invoquée, la Commission a essentiellement avancé un risque d’atteinte à la réputation de l’organisme notifié.

45      En premier lieu, il convient d’examiner si un organisme notifié peut bénéficier de la protection tirée de l’atteinte à ses intérêts commerciaux.

46      Tout d’abord, en ce qui concerne les arrêts invoqués par la requérante au point 33 ci-dessus, qui qualifieraient d’intérêts commerciaux exclusivement des éléments qui seraient liés à des aspects économiques et commerciaux de l’activité de l’entreprise, il convient de constater, à l’instar de la Commission, qu’ils constituent des exemples de situations particulières dans lesquelles des intérêts commerciaux sont en jeu.

47      Ensuite, il convient de rappeler que, bien que les organismes notifiés contribuent à la réalisation de tâches d’intérêt public en fournissant des services de certification relatifs à la conformité avec la législation applicable et à l’apposition du marquage CE, notamment sur les dispositifs médicaux, ils restent des entités privées exerçant une activité économique en situation de concurrence sur le marché des services en cause.

48      Enfin, il ressort notamment du point 108 de l’arrêt du 27 février 2018, CEE Bankwatch Network/Commission (T‑307/16, EU:T:2018:97), que rien ne s’oppose à ce qu’une entreprise étatique soit réputée détenir des intérêts commerciaux au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. En effet, la seule circonstance que le capital d’une entreprise soit détenu par des pouvoirs publics n’est pas de nature, en tant que telle, à priver ladite entreprise d’intérêts commerciaux susceptibles d’être protégés au même titre que ceux d’une entreprise privée.

49      Bien que, en l’espèce, il ne s’agisse nullement d’une entreprise détenue par les pouvoirs publics, mais d’une entreprise privée qui contribue à la réalisation de tâches d’intérêt public, il convient de constater que, si une entreprise à capitaux publics peut détenir des intérêts commerciaux, il doit a fortiori en aller de même pour une entreprise privée, quand bien même celle-ci contribue à la réalisation de tâches d’intérêt public.

50      Il résulte de l’ensemble de ces considérations que rien ne s’oppose à ce que l’organisme notifié soit réputé détenir des intérêts commerciaux.

51      En second lieu, il y a lieu de relever qu’une atteinte à la réputation d’un organisme notifié constitue clairement une atteinte à ses intérêts commerciaux dans la mesure où la réputation de tout opérateur actif sur un marché est essentielle pour la réalisation de ses activités économiques sur le marché.

52      Dès lors, il convient de constater que la divulgation du rapport final contenant des détails sur l’analyse des éventuelles non‑conformités de l’organisme notifié avec les prescriptions du règlement d’exécution no 920/2013 est susceptible de porter atteinte à sa réputation. Par ailleurs, il est utile de relever que toute non‑conformité ne conduit pas nécessairement au retrait de la désignation de l’organisme notifié et que, en tout état de cause, le maintien ou le retrait de ladite désignation est public.

53      Il s’en suit que l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux peut être invoquée par la Commission en raison de l’atteinte à la réputation de l’organisme notifié que constituerait l’accès au rapport final.

54      À l’instar de la Commission, force est de constater que les arguments invoqués par la requérante sur les prétendues analogies entre la présente affaire et les appréciations négatives concernant les soumissionnaires qui ont perdu des appels d’offres, d’une part, et les procédures ouvertes pour violation des règles de la concurrence, d’autre part, ne sauraient prospérer. En effet, l’accès aux offres des soumissionnaires par les autres soumissionnaires bénéficie, selon la jurisprudence, d’une présomption générale de confidentialité (arrêt du 29 janvier 2013, Cosepuri/EFSA, T‑339/10 et T‑532/10, EU:T:2013:38, point 101). En ce qui concerne les règles de la concurrence, il ressort, certes, de la jurisprudence que, lorsqu’une entreprise a commis une infraction à ces règles, son intérêt à ce que les détails du comportement infractionnel qui lui est reproché ne soient pas divulgués au public ne mérite aucune protection particulière (voir arrêt du 13 septembre 2013, Pays-Bas/Commission, T‑380/08, EU:T:2013:480, point 51 et jurisprudence citée). Or, en l’espèce, le rapport final n’a pas pour objet de constater une violation par l’organisme notifié des règles de la concurrence ou une violation d’une nature et d’une gravité similaires. En effet, le rapport final vise seulement à permettre l’adoption par l’autorité compétente d’une décision sur le maintien de la désignation en tant qu’organisme notifié.

55      Dès lors, le premier moyen doit être rejeté en sa première branche comme non fondé.

 Sur la seconde branche, concernant la motivation relative à l’existence d’un préjudice concret et spécifique porté aux intérêts commerciaux de l’organisme notifié

56      La requérante soulève un argument tiré, en substance, de ce que la Commission aurait dû expliquer, dans la décision attaquée, de quelle manière l’accès au rapport d’évaluation conjointe aurait porté concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé et de quelle manière le risque d’une telle atteinte serait raisonnablement prévisible et non purement hypothétique, plutôt que d’énoncer des affirmations vagues et de simples conjectures.

57      La Commission conteste ces arguments.

58      Selon la jurisprudence, la seule circonstance qu’un document concerne un intérêt protégé par une exception au droit d’accès prévue à l’article 4 du règlement no 1049/2001 ne saurait suffire à justifier l’application de cette dernière (arrêts du 3 juillet 2014, Conseil/in’t Veld, C‑350/12 P, EU:C:2014:2039, point 51, et du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, EU:T:2005:125, point 69).

59      En effet, lorsque l’institution concernée décide de refuser l’accès à un document dont la communication lui a été demandée, il lui incombe, en principe, de fournir des explications quant à la question de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par l’exception prévue à l’article 4 du règlement no 1049/2001 qu’elle invoque (voir arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission, C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 72 et jurisprudence citée).

60      En outre, le risque d’une telle atteinte doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (voir arrêt du 21 juillet 2011, Suède/MyTravel et Commission, C‑506/08 P, EU:C:2011:496, point 76 et jurisprudence citée).

61      Par conséquent, l’examen auquel doit, en principe, procéder l’institution afin d’appliquer une exception doit être effectué de façon concrète et doit ressortir des motifs de la décision (voir, en ce sens, arrêts du 6 avril 2000, Kuijer/Conseil, T‑188/98, EU:T:2000:101, point 38, et du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, EU:T:2005:125, points 69 et 74).

62      Enfin, comme cela a été décrit au point 40 ci-dessus, il ressort d’une jurisprudence constante que, dès lors qu’elles dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, les exceptions au droit d’accès, figurant à l’article 4 du règlement no 1049/2001, doivent être interprétées et appliquées strictement.

63      C’est au regard des considérations qui précèdent qu’il convient de se prononcer en l’espèce.

64      Il est constant entre les parties qu’aucune présomption générale de confidentialité n’est appliquée au rapport final dans la décision attaquée.

65      Dans la décision attaquée, la Commission relève que, compte tenu de la nature du rapport final, qui comporte par définition une liste des manquements de l’organisme notifié, sa divulgation porte atteinte à la réputation dudit organisme et, partant, à ses intérêts commerciaux. La Commission considère que la logique rigoureuse qui sous-tend la décision attaquée ne nécessite pas d’analyses complexeset qu’il ne saurait être sérieusement prétendu qu’un tel risque pour les intérêts commerciaux soit « hypothétique ».

66      Il ressort des motifs de la décision attaquée, partiellement reproduits aux points 12 et 13 ci-dessus, que la Commission a procédé à une appréciation concrète et individuelle du contenu du document visé dans la demande d’accès. Après avoir constaté que le document visait essentiellement les manquements de l’organisme notifié au règlement d’exécution no 920/2013, la Commission en a déduit que la divulgation du document porterait atteinte aux intérêts commerciaux de l’organisme en ce qu’il affaiblirait la position concurrentielle de ce dernier sur le marché des organismes notifiés dans le domaine des dispositifs médicaux.

67      L’absence de détails sur les non-conformités spécifiques identifiées dans ledit rapport final ne saurait être interprétée comme une absence d’examen concret par la Commission du rapport final dans la décision attaquée. En effet, la communication de ces éléments aurait risqué de porter atteinte à l’intérêt protégé. Par ailleurs, la nature spécifique des non-conformités identifiées était sans pertinence pour comprendre le raisonnement de la décision attaquée.

68      Comme l’invoque la Commission, la motivation d’un acte doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. S’agissant d’une demande d’accès aux documents, lorsque l’institution en cause refuse un tel accès, elle doit démontrer dans chaque cas d’espèce, sur la base des informations dont elle dispose, que les documents auxquels l’accès est sollicité relèvent effectivement des exceptions énumérées dans le règlement no 1049/2001. Toutefois, il peut être impossible d’indiquer les raisons justifiant la confidentialité à l’égard de chaque document, sans divulguer le contenu de ce dernier et, partant, priver l’exception de sa finalité essentielle (voir arrêt du 19 janvier 2010, Co-Frutta/Commission, T‑355/04 et T‑446/04, EU:T:2010:15, points 100 et 101 et jurisprudence citée).

69      Dès lors que la décision attaquée fait ressortir clairement le raisonnement suivi par la Commission, il serait excessif d’exiger une motivation spécifique pour chacune des appréciations sur lesquelles s’appuie ce raisonnement. D’ailleurs, il importe d’observer que certaines données ne peuvent être communiquées sans remettre en cause la protection effective des intérêts commerciaux des autres opérateurs (voir arrêt du 19 janvier 2010, Co-Frutta/Commission, T‑355/04 et T‑446/04, EU:T:2010:15, point 105 et jurisprudence citée).

70      Il convient de conclure que la Commission a satisfait à l’obligation de procéder à un examen concret et, partant, de rejeter le premier moyen en sa seconde branche comme non fondé.

 Sur la prétendue contradiction des motifs résultant des échanges de courriels entre la Commission et les autorités italiennes

71      Dans la réplique, la requérante soutient que l’annexe B.1 du mémoire en défense, dans lequel figurent certains courriels échangés entre le ministère de la Santé italien et les services de la Commission au sujet de la communication d’une partie du rapport final à la requérante, contient des éléments nouveaux, dont elle n’avait pas connaissance, qui révèlent le caractère contradictoire des motifs de la décision attaquée.

72      Selon la requérante, la contradiction serait manifeste entre les indications données par la Commission aux autorités italiennes en juillet 2016, selon lesquelles il n’y aurait aucun obstacle à la communication du rapport final, et le refus opposé peu de temps après à la requérante.Dès lors, il n’y aurait aucun préjudice causé à l’organisme notifié si le rapport final était divulgué par les autorités italiennes, alors qu’il serait hautement préjudiciable aux intérêts commerciaux de l’organisme notifié s’il était divulgué par la Commission.

73      À supposer que ce moyen soit jugé recevable, la Commission conteste les arguments de la requérante.

74      Il y a lieu de constater que la requérante indique dans la réplique qu’elle entend soulever un moyen nouveau, tiré d’une prétendue contradiction des motifs. Or, il ressort de l’examen des arguments avancés par la requérante au soutien de cette thèse que, en réalité, elle ne soutient pas que la décision attaquée est entachée d’une motivation contradictoire ou insuffisante. À cet égard, il convient de relever que la décision attaquée soutient de manière claire et non équivoque que la divulgation du rapport final visant essentiellement des non-conformités avec le règlement d’exécution no 920/2013 porterait atteinte à l’intérêt protégé, à savoir la protection des intérêts commerciaux de l’organisme notifié.

75      En réalité, il ressort de la réplique que la requérante considère que les courriels en cause remettent en question non l’existence d’une motivation adéquate, mais le bien-fondé de la décision attaquée, dans la mesure où celle-ci invoque la protection des intérêts commerciaux pour opérer le refus d’accès au rapport final. En effet, la requérante considère que le fait que la Commission ait prétendument autorisé la communication du rapport final par les autorités italiennes implique qu’elle ne saurait refuser valablement l’accès dans le cadre d’une demande fondée sur le règlement no 1049/2001. Il en résulte que les arguments relatifs aux échanges des courriels sont recevables dans la mesure où ils sont avancés à l’appui de la première branche du premier moyen soulevé par la requérante et qu’ils doivent être examinés dans ce contexte.

76      À cet égard, il convient de rappeler que le considérant 15 du règlement no 1049/2001 souligne que celui-ci n’a pas pour objet, ni pour effet, de modifier les législations nationales en matière d’accès aux documents. Dès lors, le considérant 15, lu conjointement avec l’article 5, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, vise à rappeler que les demandes d’accès aux documents détenus par les autorités nationales demeurent, y compris lorsque de tels documents émanent des institutions de l’Union, régies par les règles nationales applicables auxdites autorités, sans que les dispositions du règlement no 1049/2001 viennent s’y substituer, sous réserve des obligations posées par ledit article 5 et dictées par l’obligation de coopération loyale (arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, EU:C:2007:802, point 70).

77      Eu égard à ces principes, c’est sans commettre d’erreur que les services de la Commission ont indiqué dans les courriels en cause qu’il appartenait aux autorités nationales de prendre une décision sur les suites à donner à la demande formulée par la requérante auprès de ces autorités, qui devait être appréciée à la lumière de la législation nationale applicable.

78      Au regard de ce qui précède, il y a lieu de rejeter comme non fondés les arguments de la requérante concernant les échanges de courriels entre les services de la Commission et les autorités italiennes.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 2, dernière phrase, du règlement no 1049/2001

79      Selon la requérante, la décision attaquée doit être annulée en ce que la Commission a, d’une part, considéré que le droit fondamental de défense de la requérante constituerait un intérêt privé et non un intérêt public supérieur justifiant la divulgation et, d’autre part, exclu l’existence d’autres intérêts publics supérieurs aux intérêts protégés par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

80      En particulier, la requérante note que, bien que la Commission ait pris acte du caractère essentiel du rapport final pour l’action de la requérante devant la juridiction nationale, elle a cependant omis, en violation de la jurisprudence de la Cour dans son arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW (C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 107), d’apprécier cet aspect pour en tirer les conséquences qui s’imposaient quant à l’existence d’un intérêt public à la divulgation.En effet, dans cet arrêt, la Cour aurait jugé que l’intérêt à accéder à un document spécifique, dont la connaissance serait indispensable pour exercer efficacement les droits de la défense, constituerait un intérêt public supérieur.

81      Par ailleurs, la requérante considère que la Commission a commis une erreur d’appréciation en ne prenant pas en compte le fait que les caractéristiques de l’espèce entraîneraient un préjudice direct aux producteurs de CD-ROM et de DVD-ROM et un préjudice indirect à la concurrence en tant que telle sur l’ensemble du marché des dispositifs médicaux, dont la protection constituerait un intérêt public supérieur aux intérêts commerciaux et particuliers de l’organisme notifié.

82      Enfin la Commission aurait commis une erreur en s’abstenant de tenir compte du fait que la nécessité de protéger la santé publique constituerait un autre intérêt public supérieur qui sous-tendrait la demande légitime de divulgation du rapport final.

83      La Commission conteste ces arguments. En particulier, elle remet en cause la recevabilité des arguments relatifs aux prétendus intérêts publics supérieurs de protection de la concurrence et de la santé publique mentionnés pour la première fois dans la requête.

84      Selon une jurisprudence constante, il incombe au demandeur d’invoquer de manière concrète des circonstances fondant un intérêt public supérieur justifiant la divulgation des documents (arrêts du 29 juin 2010, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑139/07 P, EU:C:2010:376, point 62 ; du 28 juin 2012, Commission/Agrofert Holding, C‑477/10 P, EU:C:2012:394, point 68, et du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, points 92 à 94).

85      L’exposé de considérations d’ordre purement général ne saurait suffire aux fins d’établir qu’un intérêt public supérieur prime les raisons justifiant le refus de divulgation des documents en cause (voir, en ce sens, arrêts du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 93 ; du 27 février 2014, Commission/EnBW, C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 105, et du 2 octobre 2014, Strack/Commission, C‑127/13 P, EU:C:2014:2250, point 131).

86      En l’espèce, il n’est pas contesté que le principal intérêt public supérieur que fait valoir la requérante réside dans les droits de la défense.

87      Il est certes vrai que l’existence des droits de la défense présente en soi un intérêt général.

88      Toutefois, le fait que ces droits se manifestent en l’espèce par l’intérêt subjectif de la requérante de se défendre implique que l’intérêt dont se prévaut la requérante n’est pas un intérêt général mais un intérêt privé (arrêt du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission, T‑391/03 et T‑70/04, EU:T:2006:190, point 138).

89      En effet, pour autant que la requérante évoque le caractère essentiel du rapport final pour exercer efficacement ses droits de la défense devant la juridiction nationale dans le cadre d’un litige la concernant, il y a lieu de constater que cette circonstance ne démontre pas l’existence d’un intérêt public mais d’un intérêt privé (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2016, Herbert Smith Freehills/Commission, T‑755/14, non publié, EU:T:2016:482, point 75).

90      Quant à la jurisprudence invoquée par la requérante, à savoir l’arrêt du 27 février 2014, Commission/EnBW (C‑365/12 P, EU:C:2014:112, point 107), il convient de relever, à l’instar de la Commission, que la Cour ne se prononce pas expressément sur la question de savoir si les droits de la défense constituent un intérêt public supérieur.

91      Outre l’intérêt public supérieur des droits de la défense, la requérante soutient, à titre surabondant, que la décision attaquée est également contraire aux intérêts publics supérieurs de la protection de la concurrence, d’une part, et de la santé publique, d’autre part.

92      À cet égard, il convient de constater, à l’instar de la Commission, que la requérante n’a pas prouvé, de manière suffisante, que la protection de la concurrence sur le marché des dispositifs médicaux ou la protection de la santé publique constituaient, en l’espèce, des intérêts publics supérieurs justifiant la divulgation du document demandé. Dès lors, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la question de la recevabilité de cet argument, il convient de le rejeter.

93      Il ressort de l’ensemble de ces éléments que ce moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001

94      La requérante estime que la Commission n’a pas apprécié correctement la possibilité d’accorder un accès partiel au rapport final en vertu de l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001.En particulier, la requérante considère que la Commission aurait pu établir une version non confidentielle du rapport masquant les éventuelles données sensibles relatives à l’organisme notifié.Enfin, la requérante rappelle les indications données par la Commission aux autorités italiennes en juillet 2016, selon lesquelles il n’y aurait aucun obstacle à la communication du rapport, qui sont, selon la requérante, contradictoires avec le refus de la Commission d’accorder un accès partiel au rapport final.

95      Selon la Commission, ce moyen est dénué de fondement et doit être rejeté.À la suite de l’examen concret du document et compte tenu de sa nature, la dissimulation des parties considérées comme protégées par l’exception pour la préservation des intérêts commerciaux aurait privé l’intégralité du document de son contenu, rendant un accès partiel inutile.Enfin, l’accès donné à cette partie du document par les autorités nationales, sans que la Commission s’y oppose, ne serait pas un accès au sens du règlement no 1049/2001, mais bien un accès accordé conformément au droit italien.

96      Selon l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001, si une partie seulement du document demandé est concernée par une ou plusieurs des exceptions, les autres parties du document sont divulguées. À cet égard, il ressort de la jurisprudence que la seule circonstance qu’un document concerne un intérêt protégé par une exception ne dispense pas l’institution d’effectuer une appréciation concrète du document et des conditions de l’octroi d’un accès partiel (voir, en ce sens, arrêt du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, EU:T:2005:125, points 69 à 73 et jurisprudence citée).

97      En effet, il appartient à l’institution d’examiner si le besoin de protection s’applique à l’ensemble du document (arrêt du 30 janvier 2008, Terezakis/Commission, T‑380/04, non publié, EU:T:2008:19, point 88).

98      En outre, l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001, tout comme le règlement dans son ensemble, n’exige pas que le demandeur de documents démontre que le document demandé lui soit « utile ». En toute hypothèse, la détermination de ce qui est utile ou non pour le demandeur ne saurait appartenir à l’institution qui doit répondre à sa demande. Par ailleurs, la disposition ici en cause ne saurait être interprétée de telle manière qu’elle revienne à dispenser l’institution concernée d’une obligation, la divulgation des parties du document non visées par les exceptions prévues par le règlement no 1049/2001, qui y est expressément envisagée. Or, il ressort du règlement no 1049/2001 que le plus grand accès possible aux documents doit être reconnu au public et que les exceptions à son droit d’accès doivent être interprétées strictement (arrêt du 6 décembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑167/10, non publié, EU:T:2012:651, point 78).

99      En l’espèce, la Commission a considéré que l’intégralité du document était couverte par le besoin de protection et qu’un accès partiel significatif (« meaningful » en anglais) ne pouvait être accordé sans mettre en péril les intérêts commerciaux de l’organisme notifié.

100    Cependant, s’il est vrai, comme le relève la Commission, que le rapport final se concentre sur des manquements constatés à l’issue d’une procédure administrative très détaillée concernant le respect, par l’organisme notifié, de la réglementation applicable aux organismes notifiés, notamment du règlement d’exécution no 920/2013, il ressort de l’examen du rapport final par le Tribunal que certaines parties dudit document ne semblent pas porter à première vue sur les manquements en cause. À cet égard, il y a lieu de relever, par exemple, la partie introductive, certains développements figurant dans le corps du document et les annexes.

101    Dès lors, la Commission a commis une erreur en considérant que l’intégralité du rapport final était couverte par l’exception.

102    En ce qui concerne l’argument avancé par la Commission selon lequel l’accès partiel éventuellement accordé ne serait pas utile à la requérante, il y a lieu de rappeler qu’il n’appartient pas à la Commission de déterminer ce qui est utile ou non pour la requérante (arrêt du 6 décembre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑167/10, non publié, EU:T:2012:651, point 78), comme il a été indiqué au point 98 ci-dessus.

103    Par ailleurs, la Commission ne saurait invoquer à l’appui de sa position les arrêts du 12 juillet 2001, Mattila/Conseil et Commission (T‑204/99, EU:T:2001:190, points 69 et 70), et du 20 mars 2014, Reagens/Commission (T‑181/10, non publié, EU:T:2014:139, points 172 à 175), mentionnés à l’audience, selon lesquels elle peut refuser d’accorder un accès partiel lorsque ledit accès partiel serait dénué de tout sens, car les parties des documents contiennent si peu d’informations qu’elles seraient dénuées de tout intérêt. La Commission a indiqué à l’audience que tel pourrait être le cas, en particulier, lorsque le document auquel on pourrait accorder un accès partiel contiendrait seulement des informations marginales comme la date, l’en-tête ou le titre.

104    Or, en l’espèce et en tout état de cause, contrairement à ce que la Commission a tenté de soutenir, le rapport final visé par la demande d’accès n’est pas un document dont l’accès partiel contiendrait si peu d’informations qu’il aurait été vidé de la quasi-intégralité de son contenu, ainsi qu’il ressort du point 100 ci-dessus. Dès lors, cet argument doit être rejeté.

105    S’agissant de la prétendue contradiction entre les indications données par la Commission aux autorités nationales italiennes et le refus d’accès partiel, il convient de renvoyer à l’analyse effectuée aux points 74 à 78 ci-dessus et de rappeler que ces deux procédures sont soumises à des règles différentes.

106    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision attaquée a violé l’article 4, paragraphe 6, du règlement no 1049/2001 en refusant d’accorder un accès partiel au rapport final.

107    Le troisième moyen doit donc être déclaré fondé et mener à l’annulation de la décision attaquée en ce que celle-ci a refusé à la requérante un accès partiel au rapport final.

 Sur les dépens

108    Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs.

109    Au regard des circonstances de l’espèce, il y a lieu de décider que chacune des parties supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision C(2016) 6722 final de la Commission, du 14 octobre 2016, est annulée, en ce qu’elle a refusé un accès partiel au document DG (Santé) 20157552.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Falcon Technologies International LLC et la Commission européenne supporteront chacune leurs propres dépens.

Collins

Kancheva

Passer

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 décembre 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.