Language of document : ECLI:EU:T:2009:49

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

4 mars 2009 (*)

« Aides d’État – Régime d’aides mis en place par les autorités italiennes en faveur de certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières spécialisés dans la détention d’actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché commun – Obligation de motivation – Caractère sélectif de la mesure – Affectation des échanges entre les États membres et distorsion de la concurrence – Article 87, paragraphe 3, sous c), CE »

Dans l’affaire T‑424/05,

République italienne, représentée par MP. Gentili, avvocato dello Stato,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. V. Di Bucci et Mme E. Righini, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet l’annulation de la décision 2006/638/CE de la Commission, du 6 septembre 2005, concernant le régime d’aides que l’Italie envisage de mettre à exécution en faveur de certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières spécialisés dans la détention d’actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne cotées sur des marchés réglementés (JO 2006, L 268, p. 1),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de MM. M. Vilaras, président, F. Dehousse (rapporteur) et D. Šváby, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 20 novembre 2007,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

 Mesure en cause

1        La mesure en cause a été instaurée par l’article 12 du décret-loi italien (Decreto Legge) n° 269, du 30 septembre 2003, concernant des « mesures relatives au développement de l’économie et à la correction des comptes publics » (ci-après le « DL 269/2003 »), converti en loi n° 326, du 24 novembre 2003. Elle est entrée en vigueur le 2 octobre 2003, date de la publication du DL 269/2003 au Journal officiel italien, sans avoir été notifiée à la Commission.

2        L’article 12 du DL 269/2003 modifie le traitement fiscal de certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières spécialisés dans la détention d’actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne cotées sur un marché réglementé de l’Union européenne (ci-après les « structures de placement spécialisées »).

3        Cet article prévoit notamment que, à compter de l’exercice financier au cours duquel certaines exigences spécifiques sont satisfaites, les revenus du capital encaissés par les structures de placement spécialisées sont soumis à un impôt de substitution à l’impôt sur les sociétés au taux de 5 %, en lieu et place du taux normal de 12,5 %.

4        Afin de garantir un même niveau d’imposition effective des structures de placement étrangères et italiennes, l’article 12 du DL 269/2003 prévoit qu’un impôt de substitution d’un taux nominal réduit à 5 % est appliqué aux revenus du capital encaissés par les structures de placement italiennes non spécialisées qui investissent dans des structures de placement italiennes spécialisées, en ce qui concerne la fraction de leurs revenus provenant de ces structures spécialisées, alors que les revenus du capital encaissés par les structures de placement italiennes qui proviennent de structures de placement étrangères sont exonérés à 60 %.

5        Afin d’étendre l’incitation à d’autres structures de placement, l’article 12 du DL 269/2003 dispose que les fonds de pension sont eux aussi soumis à l’impôt effectif de 5 % sur la portion de leurs revenus provenant de structures de placement spécialisées étrangères et que les revenus provenant de structures de placement italiennes bénéficient d’un crédit d’impôt de 6 % correspondant à l’impôt de substitution de 5 % grevant les revenus du capital encaissés par les structures de placement spécialisées dans lesquelles ces fonds de pension ont une participation.

6        Tous les véhicules d’investissement italiens et les structures de placement régis par la directive 85/611/CEE du Conseil, du 20 décembre 1985, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) (JO L 375, p. 3), peuvent bénéficier du taux réduit à 5 %, à condition qu’ils soient spécialisés dans l’investissement en actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne admises à la négociation sur un marché européen réglementé (ci-après les « sociétés à capitalisation faible ou moyenne »). Selon l’article 12 du DL 269/2003, ces sociétés sont celles dont le capital ne dépasse pas 800 millions d’euros, déterminé sur la base du prix de marché moyen des actions de la société le dernier jour de négociation de chaque trimestre.

7        En vertu de l’article 12 du DL 269/2003, les structures de placement sont spécialisées si elles détiennent des actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne pour un montant correspondant à au moins deux tiers de la valeur de leurs actifs détenus pendant l’année civile, durant au moins un sixième du nombre total de jours de fonctionnement du fonds, comme indiqué dans les états financiers périodiques de ces structures. Le régime est applicable uniquement à compter de l’exercice financier au cours duquel une structure de placement investit au moins les deux tiers de ses actifs totaux en actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne, ou à partir du moment où les statuts de la structure de placement prévoient que celle-ci investit principalement dans des actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne.

8        Outre les structures de placement italiennes, tous les autres fonds italiens de type ouvert et de type fermé (les « fonds luxembourgeois historiques »), les sociétés d’investissement à capital variable (ci-après les « SICAV ») et les structures de placement étrangères peuvent bénéficier de l’application du taux d’imposition réduit à 5 %, à condition d’être enregistrés comme structures de placement spécialisées, ou en ce qui concerne la portion de leurs revenus investie dans des structures de placement spécialisées enregistrées.

 Procédure administrative

9        Par lettre du 22 octobre 2003, la Commission a invité les autorités italiennes à lui fournir des informations sur les mesures adoptées dans le DL 269/2003 et leur entrée en vigueur, afin d’apprécier leur éventuel caractère d’aides au sens de l’article 87 CE, tout en rappelant à la République italienne son obligation de notification en vertu de l’article 88, paragraphe 3, CE.

10      Par lettres des 11 et 26 novembre 2003, les autorités italiennes ont communiqué les informations demandées. Le 19 décembre 2003, la Commission a attiré une nouvelle fois leur attention sur les obligations leur incombant en vertu de l’article 88, paragraphe 3, CE et les a invitées à informer les éventuels bénéficiaires des conséquences prévues par le traité et l’article 14 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (JO L 83, p. 1), s’il était établi que la mesure en cause représente une aide mise illégalement à exécution.

11      Par lettre du 11 mai 2004, la Commission a informé la République italienne qu’elle avait décidé, le 7 mai 2004, d’ouvrir la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE concernant les aides fiscales accordées en vertu de l’article 12 du DL 269/2003.

12      Par lettre du 14 juillet 2004, les autorités italiennes ont présenté leurs observations à la Commission.

13      La décision de la Commission d’ouvrir une procédure formelle d’examen (ci-après la « décision d’ouverture ») a été publiée le 9 septembre 2004 au Journal officiel de l’Union européenne (JO C 225, p. 8).

14      L’Associazione italiana del risparmio gestito (ci-après « Assogestioni ») a présenté des observations à la Commission par lettres du 7 octobre 2004 et du 18 février 2005.

 Décision attaquée

15      La décision 2006/638/CE de la Commission, du 6 septembre 2005, concernant le régime d’aides que l’Italie envisage de mettre à exécution en faveur de certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières spécialisés dans la détention d’actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne cotées sur des marchés réglementés (JO 2006, L 268, p. 1) (ci-après la « décision attaquée »), décrit tout d’abord la procédure ayant précédé son adoption (section I), puis la mesure en cause (section II).

16      S’agissant de cette dernière, la Commission commence par retracer le cadre général dans lequel s’inscrit l’article 12 du DL 269/2003. Dans ce contexte, elle définit les structures de placement comme des organismes procédant à des placements collectifs en valeurs mobilières (ou OPCVM) dans l’intérêt collectif d’une pluralité d’investisseurs et ajoute que de telles structures peuvent revêtir la forme soit d’un fonds de placement contractuel sans personnalité juridique, géré par une société de gestion distincte du point de vue du patrimoine (ci-après les « SGE »), soit d’un fonds de placement constitué en société (par exemple, les SICAV), soit d’un fonds de pension. Puis elle précise quelles sont les structures de placement spécialisées au sens de l’article 12 du DL 269/2003, avant de détailler le régime fiscal applicable aux revenus des différentes structures de placement.

17      La décision attaquée expose ensuite les raisons qui ont motivé l’ouverture de la procédure (section III) et l’opinion des autorités italiennes ainsi que des tiers intéressés (section IV).

18      L’appréciation de la Commission (section V) comporte sept sous-sections. La Commission indique de manière liminaire que la mesure en cause répond de façon cumulative aux critères prévus par l’article 87, paragraphe 1, CE. Elle démontre l’existence d’un avantage sélectif en faveur, d’abord, des structures de placement spécialisées, puis des sociétés à capitalisation faible ou moyenne dont les actions sont détenues par lesdites structures de placement spécialisées.

19      Il ressort de la quatrième sous-section de la section V de la décision attaquée, intitulée « Ressources d’État », que les avantages accordés proviennent de l’État sous forme d’une renonciation à des recettes fiscales normalement perçues par le Trésor italien. La sous-section suivante a trait aux effets de la mesure en cause sur la concurrence. La Commission observe à cet égard que les structures de placement spécialisées sont en concurrence avec d’autres entreprises financières et opèrent sur un marché ouvert caractérisé par d’importants échanges communautaires. Elle expose en outre que certaines sociétés à capitalisation réduite bénéficiant de la mesure en cause sont, pour leur part, actives dans des secteurs dans lesquels il y a des échanges entre les États membres.

20      La Commission souligne, dans une sixième sous-section intitulée « Légalité de la mesure », que les autorités italiennes ont mis la mesure en cause à exécution sans notification préalable, de sorte qu’elle constitue une aide illégale.

21      La septième sous-section de l’appréciation de la Commission est consacrée à l’examen de la compatibilité du régime avec le marché commun.

22      Le dispositif de la décision attaquée est le suivant :

« Article premier

Le régime d’aides d’État, accordées sous forme d’incitations fiscales en faveur de [structures de placement spécialisées], visées à l’article 12 du [DL] 299/2003, que l[a République italienne] a mis à exécution en violation de l’article 88, paragraphe 3, [CE], est incompatible avec le marché commun.

Article 2

L[a République italienne] supprime le régime d’aides visé à l’article 1er avec effet à compter de deux mois à partir de la date de notification de la présente décision.

Article 3

1.       Dans les deux mois suivant la date de notification de la présente décision, l[a République italienne] informe tous les intermédiaires financiers, y compris les [structures de placement spécialisées] et toutes les autres personnes concernées par l’application du régime d’aides d’État visé à l’article 1er, de la décision de la Commission de considérer ledit régime comme incompatible avec le marché commun.

2.       La République italienne prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer les aides indiquées à l’article 1er et mises illégalement à la disposition des bénéficiaires par les structures de placement revêtant la forme d’une société ou, selon le cas, par les entreprises qui gèrent les structures de placement revêtant la forme contractuelle, sans préjudice des recours éventuels prévus par le droit national.

Dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la présente décision, la République italienne informe la Commission de l’identité des bénéficiaires, du montant des aides accordées individuellement et des méthodes selon lesquelles ces montants ont été déterminés.

3.       La récupération s’effectue sans délai et conformément aux procédures prévues par le droit national afin de permettre l’exécution immédiate et effective de la présente décision.

4.       Les aides à récupérer comprennent des intérêts qui courent à compter de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition des bénéficiaires jusqu’à celle de leur récupération effective.

Les intérêts sont calculés conformément aux dispositions du chapitre V du règlement (CE) n° 794/2004.

Article 4

L[a République italienne] informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la présente décision, des mesures adoptées et prévues pour s’y conformer. Elle communique ces informations en utilisant le questionnaire joint en annexe à la présente décision. Elle présente dans les mêmes délais tous les documents prouvant que la procédure de récupération des aides illégales auprès des bénéficiaires est en cours.

Article 5

La République italienne est destinataire de la présente décision. »

 Procédure et conclusions des parties

23      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 novembre 2005, la République italienne a introduit le présent recours contre la décision attaquée.

24      La République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée,

–        condamner la Commission aux dépens.

25      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours,

–        condamner la République italienne aux dépens.

 Sur le fond

26      La République italienne avance six moyens. Le premier est pris, en substance, de la violation par la Commission du principe du contradictoire. Le deuxième moyen s’appuie sur un défaut de motivation affectant la qualification d’entreprises des structures de placement spécialisées. Les quatre moyens suivants sont tirés d’une violation de l’article 87 CE, sous différents aspects, et pour les trois derniers également d’un défaut de motivation. Après l’examen du premier moyen, il conviendra de traiter le défaut de motivation en regroupant toute l’argumentation de la République italienne en ce sens, puis la violation de l’article 87 CE.

I –  Sur le premier moyen, pris, en substance, d’une violation du principe du contradictoire

A –  Arguments des parties

27      Par son premier moyen, la République italienne fait grief à la Commission d’avoir engagé la procédure formelle d’examen au sens de l’article 88, paragraphe 2, CE sans l’avoir invitée à fournir d’explications sur la mesure en cause, notamment sur sa qualification, ses effets et ses bénéficiaires.

28      La République italienne invoque à cet égard l’arrêt de la Cour du 10 mai 2005, Italie/Commission (C‑400/99, Rec. p. I‑3657, points 29 à 31), dont il ressortirait que la Commission doit aborder avec l’État membre les mesures en cause préalablement à l’ouverture de la procédure visée à l’article 88, paragraphe 2, CE, afin de permettre à celui-ci de faire valoir que lesdites mesures ne constituent pas des aides ou qu’elles constituent des aides existantes.

29      Or, préalablement à l’adoption de la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, la Commission se serait bornée à formuler une demande générale d’informations portant sur un ensemble de mesures, sans aucune référence à l’article 12 du DL 269/2003. Puis, dans une note, datée du 19 décembre 2003, la Commission aurait indiqué notamment qu’elle « ne dispos[ait] pas d’éléments permettant d’exclure » que les mesures prévues par le DL 269/2003 constituaient des aides d’État incompatibles. Or, du fait même de sa rédaction en termes négatifs, ladite note n’aurait pas permis aux autorités italiennes de comprendre les doutes que nourrissait la Commission au sujet de l’article 12 du DL 269/2003.

30      En toute hypothèse, la République italienne allègue que la mesure en cause ne pouvait pas être suspendue pour des raisons techniques et que la décision d’ouverture ne comportait aucun effet suspensif compte tenu du délai d’application des mesures en cause, tenant à leur objet même. Elle estime qu’il lui était donc loisible de ne pas agir contre cette décision, tout en se réservant la possibilité de se prévaloir des vices éventuels entachant cette décision dans le cadre du recours introduit contre la décision finale.

31      La Commission conteste les arguments de la République italienne.

B –  Appréciation du Tribunal

32      Il convient d’observer que, dans le cadre de l’article 88 CE, doivent être distinguées, d’une part, la phase préliminaire d’examen des aides instituée par le paragraphe 3, qui a seulement pour objet de permettre à la Commission de se former une première opinion tant sur le caractère d’aide d’État de la mesure concernée que sur la compatibilité partielle ou totale de l’aide en cause avec le marché commun, et, d’autre part, la phase formelle d’examen visée par le paragraphe 2. Ce n’est que dans le cadre de cette dernière, qui est destinée à permettre à la Commission d’avoir une information complète sur l’ensemble des données de l’affaire, que le traité CE prévoit l’obligation, pour la Commission, de mettre en demeure les intéressés de présenter leurs observations.

33      Il ressort de l’article 4, paragraphe 4, du règlement n° 659/1999 et de la jurisprudence que la Commission est tenue d’ouvrir la procédure prévue par l’article 88, paragraphe 2, CE si un premier examen ne lui a pas permis de surmonter toutes les difficultés soulevées par la question de savoir si une mesure étatique soumise à son contrôle constitue une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, à tout le moins lorsque, lors de ce premier examen, elle n’a pas été en mesure d’acquérir la conviction que la mesure concernée, à supposer qu’elle constitue une aide, est en tout état de cause compatible avec le marché commun (arrêt du Tribunal du 12 décembre 2006, Asociación de Empresarios de Estaciones de Servicio de la Comunidad Autónoma de Madrid et Federación Catalana de Estaciones de Servicio/Commission, T‑95/03, Rec. p. II-4739, points 133 et 134).

34      Par ailleurs, compte tenu des conséquences juridiques d’une décision d’ouvrir la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE, en qualifiant provisoirement les mesures visées d’aides nouvelles alors que l’État membre concerné est susceptible de ne pas souscrire à cette qualification, la Commission doit aborder au préalable les mesures en cause avec l’État membre concerné, afin que celui‑ci ait l’occasion d’indiquer, le cas échéant, à celle-ci que, selon lui, lesdites mesures ne constituent pas des aides ou qu’elles constituent des aides existantes (arrêt Italie/Commission, point 28 supra, point 29).

35      À cet égard, il convient d’observer que l’examen des échanges intervenus entre les services de la Commission et les autorités italiennes préalablement à la décision d’ouverture ne révèle aucun manquement aux obligations incombant à la Commission, telles qu’elles ont été décrites ci-dessus.

36      Il est constant que la lettre du 22 octobre 2003 constituait une demande d’information générale visant un ensemble de mesures figurant dans le DL 269/2003, dont la mesure en cause. Ce courrier indiquait notamment que certaines mesures fiscales « sembl[ai]ent comporter des allégements d’impôt pour certaines catégories d’entreprises, voire des aides ad hoc pour certaines entreprises, au sens de l’article 87, paragraphe 1, [CE] », et invitait les autorités italiennes à « préciser la nature exacte des avantages fiscaux prévus, l’identité et le nombre estimé des bénéficiaires des avantages, l’impact financier estimé lié à leur octroi, leur éventuelle justification dans le cadre du régime fiscal et tout autre élément jugé utile pour permettre à la Commission de se forger sa propre opinion ».

37      Les autorités italiennes ont répondu à ce courrier par une note du 5 novembre 2003 insistant sur le caractère général de la mesure en cause et comportant un paragraphe intitulé « Justification à la lumière de la nature du régime fiscal général ». Il ressort donc de cette note que les autorités italiennes entendaient réfuter la qualification de la mesure en cause d’aide d’État.

38      Les services de la Commission ont adressé une nouvelle lettre aux autorités italiennes le 19 décembre 2003. Ils y affirmaient ne pas disposer d’éléments « permettant d’exclure [a)] que la réduction d’impôt en question constitue un avantage fiscal limité à certains fonds et que cet avantage entraîne une distorsion de la concurrence sur les marchés financiers communautaires ; […] [b)] que la limitation de l’avantage fiscal au bénéfice exclusif de certains fonds soit justifiable au regard de la nature du système fiscal ; […] [c)] que la mesure favorise certaines sociétés cotées (celles à capitalisation faible ou moyenne) et que cet avantage soit justifiable au regard de la nature du système fiscal ; […] [d)] que les incitations visées à l’article 12 du [DL] 269/2003 constituent une aide au fonctionnement, normalement incompatible avec le marché unique en ce qu’elle ne vise pas des investissements ou des objectifs prévus à l’article 87, paragraphe 3, CE ». La Commission a également invité le gouvernement italien à informer les bénéficiaires potentiels de la mesure en cause de la possibilité de recouvrement de l’aide auprès d’eux, si cette dernière était jugée illégale.

39      Par cette lettre, la Commission a dès lors clairement fait part aux autorités italiennes de son analyse préliminaire afin d’inciter celles-ci à lui fournir des éléments en sens contraire. Or, les autorités italiennes n’y ont pas donné suite.

40      Dans ce contexte, il apparaît que la Commission a bien abordé la mesure en cause avec les autorités italiennes avant d’adopter la décision d’ouverture.

41      Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que le premier moyen doit être rejeté.

II –  Sur le défaut de motivation

42      La République italienne invoque une violation de l’article 253 CE à la fois à titre principal dans son deuxième moyen et, en liaison avec une violation de l’article 87 CE, dans ses quatrième, cinquième et sixième moyens.

A –  Arguments des parties

1.     Sur le défaut de motivation affectant la qualification d’entreprises des structures de placement spécialisées

43      Par son deuxième moyen, la République italienne reproche à la Commission de ne pas avoir motivé à suffisance de droit dans quels cas les structures de placement spécialisées visées par la décision attaquée (considérant 11) doivent être considérées comme des entreprises, de sorte que les éventuels avantages fiscaux qui leur sont accordés peuvent constituer des aides d’État. Elle rappelle que, au cours de la procédure préliminaire, elle-même et Assogestioni avaient contesté cette qualification tant en ce qui concerne les fonds communs de placement dépourvus de la personnalité morale qu’en ce qui concerne les SICAV. Selon son analyse, les structures de placement (dotées ou non de la personnalité morale) ne constitueraient pas des entreprises, mais seulement une propriété collective, divisée en parts et gérée en amont au profit des détenteurs de parts ou des souscripteurs. La Commission l’aurait admis au considérant 37 de la décision attaquée, mais n’en aurait pas moins estimé que « dans certains cas ces organismes d’investissement opèrent sous la forme de sociétés et peuvent bénéficier d’avantages individuels ». Par cette affirmation vague, la Commission se serait abstenue de clarifier, ainsi qu’il lui incombait, dans quels cas il y a lieu de retenir l’existence d’une entreprise. La Commission n’aurait jamais expliqué en quoi une masse patrimoniale constituée d’un nombre potentiellement indéterminé d’investisseurs et gérée en amont constituerait une entreprise.

44      La République italienne fait valoir, en se référant au considérant 39 de la décision attaquée, que la Commission qualifie les SICAV d’entreprises parce qu’elles sont des sociétés, tandis que, dans le cas des fonds dépourvus de la personnalité morale, l’entreprise serait la société qui s’occupe de la gestion du fonds. Ce faisant, la Commission serait revenue sur l’appréciation portée dans la décision d’ouverture, selon laquelle il n’y aurait pas lieu de distinguer entre les organismes de placement dotés de la personnalité morale et ceux qui en seraient dépourvus, dès lors que tous exerceraient une activité ayant un caractère intrinsèquement économique, à savoir le rassemblement de capitaux d’investisseurs et la prise de décisions d’investissement en vue de l’obtention de bénéfices.

45      La République italienne estime inexacte l’affirmation de la Commission selon laquelle la souscription de parts accroît le patrimoine des structures de placement. Il serait erroné de qualifier une structure de placement, quelle que soit sa forme, de titulaire du patrimoine que lui ont confié les souscripteurs.

46      S’agissant de l’arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, BBL (C‑8/03, Rec. p. I‑10157), auquel renvoie le considérant 38 de la décision attaquée, la République italienne fait valoir qu’il ne portait que sur les seules SICAV et que la qualification d’entreprises n’avait été retenue qu’aux seules fins de l’application de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la « TVA »).

47      La Commission conteste l’argumentation de la République italienne.

2.     Sur le défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’existence d’un avantage en faveur des sociétés à capitalisation faible ou moyenne, à l’incidence de la mesure en cause sur les échanges intracommunautaires et la concurrence et à l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun

48      Dans son quatrième moyen, la République italienne invoque la violation de l’article 253 CE en ce que la Commission considère dans la décision attaquée que les sociétés cotées à capitalisation faible ou moyenne bénéficieraient indirectement d’un avantage sélectif. La Commission se serait contentée d’affirmer de façon catégorique que la simple perspective d’un bénéfice fiscal sur un profit de gestion qui reste à démontrer contribuerait à orienter les opérateurs vers ces sociétés.

49      Dans son cinquième moyen, la République italienne fait valoir que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation dans la mesure où la Commission retient une incidence de la mesure en cause sur la concurrence intracommunautaire. La Commission n’aurait pas démontré que la mesure en cause constitue une aide au fonctionnement et elle s’en serait tenue à des affirmations générales et approximatives.

50      Enfin, la République italienne allègue dans son sixième moyen que la Commission s’est bornée à fonder l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun sur la circonstance qu’elle instaurerait des aides au fonctionnement. La Commission n’aurait en toute hypothèse pas motivé à suffisance de droit la thèse de l’incompatibilité.

51      La Commission conteste le défaut de motivation de la décision attaquée sur tous ces points.

B –  Appréciation du Tribunal

52      Il convient de rappeler à titre liminaire que, selon la jurisprudence, le moyen tiré de la violation de l’article 253 CE est un moyen distinct de celui tiré de l’erreur manifeste d’appréciation. En effet, alors que le premier, qui vise un défaut ou une insuffisance de motivation, relève de la violation des formes substantielles, au sens de l’article 230 CE, et constitue un moyen d’ordre public qui doit être soulevé par le juge communautaire, le second, qui porte sur la légalité au fond d’une décision, relève de la violation d’une règle de droit relative à l’application du traité, au sens du même article 230 CE, et ne peut être examiné par le juge communautaire que s’il est invoqué par le requérant. L’obligation de motivation est dès lors une question distincte de celle du bien-fondé de la motivation (arrêts de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 67 ; du 22 mars 2001, France/Commission, C‑17/99, Rec. p. I‑2481, point 35, et du 29 avril 2004, Pays-Bas/Commission, C‑159/01, Rec. p. I‑4461, point 65 ; arrêt du Tribunal du 13 janvier 2004, Thermenhotel Stoiser Franz e.a./Commission, T‑158/99, Rec. p. II‑1, point 97).

53      Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 253 CE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir arrêt du Tribunal du 8 juillet 2004, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, T‑198/01, Rec. p. II‑2717, points 59 et 60, et la jurisprudence citée).

54      Par ailleurs, dans le cas d’un régime d’aides, la Commission peut se borner à étudier les caractéristiques générales du régime en cause, sans être tenue d’examiner chaque cas d’application particulier (arrêts de la Cour du 19 octobre 2000, Italie et Sardegna Lines/Commission, C‑15/98 et C‑105/99, Rec. p. I-8855, point 51, et du 29 avril 2004, Grèce/Commission, C‑278/00, Rec. p. I‑3997, point 24), afin de vérifier si ce régime comporte des éléments d’aide.

55      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner si la décision attaquée est suffisamment motivée sous les différents aspects invoqués.

1.     Sur le défaut de motivation affectant la qualification d’entreprises des structures de placement spécialisées

56      Le défaut de motivation allégué se rapportant à la qualification d’entreprise, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le contexte du droit de la concurrence, la notion d’entreprise comprend toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (voir arrêt de la Cour du 23 mars 2006, Enirisorse, C‑237/04, Rec. p. I‑2843, point 28, et la jurisprudence citée).

57      Ainsi qu’il ressort de la présentation de la décision attaquée aux points 15 à 22 ci-dessus, la Commission expose, dans la description de la mesure en cause, que les structures de placement peuvent revêtir la forme soit d’un fonds de placement contractuel sans personnalité juridique, géré par une SGE, soit d’un fonds de placement constitué en société (par exemple, les SICAV), soit d’un fonds de pension (considérant 13).

58      Lorsqu’elle revient sur les raisons qui ont motivé l’ouverture de la procédure, la Commission précise, au considérant 29 de la décision attaquée, que, en soulevant des doutes concernant l’existence possible d’une aide en faveur des structures de placement spécialisées, elle a considéré que ces dernières constituaient des « entreprises » au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE en ce sens que soit elles revêtent la forme d’une société et elles constituent en elles-mêmes des entreprises, soit elles constituent des patrimoines séparés gérés par des entreprises qui participent à la concurrence sur les marchés de placement.

59      Au considérant 36 de la décision attaquée, la Commission rappelle que, dans certains cas, les structures de placement sont des entreprises au sens de l’article 87 CE et peuvent par conséquent bénéficier de la réduction d’impôt prévue par l’article 12 du DL 269/2003, même si ce n’est qu’indirectement.

60      Dans le considérant 37 de la décision attaquée, la Commission prend note de l’observation des autorités italiennes selon laquelle les structures de placement spécialisées qui appliquent l’impôt réduit conformément à l’article 12 du DL 269/2003 sont simplement des masses patrimoniales et ne peuvent donc en principe être considérées comme des entreprises au sens de l’article 87 CE. Elle observe toutefois que, dans certains cas, ces structures de placement revêtent la forme de sociétés et qu’elles peuvent bénéficier d’avantages à titre individuel. La Commission observe également que d’autres structures de placement, non dotées de la personnalité juridique, sont gérées par des entreprises qui sont en concurrence avec d’autres opérateurs qui gèrent l’épargne et que, par conséquent, ces entreprises peuvent bénéficier d’avantages.

61      La Commission poursuit en affirmant, au considérant 38 de la décision attaquée, qu’elle considère que les structures de placement spécialisées, qu’elles revêtent ou non la forme d’une société, exercent une activité économique et constituent donc des entreprises au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. Elle estime que cela est confirmé par la jurisprudence de la Cour dans le domaine de la TVA, dont il ressortirait que les opérations de SICAV qui consistent dans le placement collectif en valeurs mobilières représentent une activité économique exercée par des assujettis au sens des directives en matière de TVA.

62      Enfin, au considérant 39 de la décision attaquée, la Commission conclut son raisonnement par la considération selon laquelle un avantage fiscal concédé aux investisseurs qui investissent dans les structures de placement spécialisées favorise ces structures elles-mêmes en tant qu’entreprises lorsqu’elles revêtent la forme d’une société, ou les entreprises qui gèrent de telles structures lorsqu’elles revêtent une forme contractuelle.

63      Il ressort de ce qui précède que, outre l’explication fournie dans le considérant 13, la décision attaquée consacre quatre considérants (36 à 39) à la qualification des instruments de placement comme entreprises. Elle explique en quoi, même si c’est selon des modalités différentes en fonction de leur forme juridique, les différentes structures de placement prises en compte peuvent être considérées comme exerçant une activité économique et donc être qualifiées d’entreprises au sens de l’article 87 CE. Elle répond également, dans le considérant 37, aux observations des autorités italiennes sur la qualité d’entreprises de simples masses patrimoniales. Elle distingue dans ce cadre, mais aussi avec constance tout au long de la décision attaquée, les fonds de placement constitués eux-mêmes en société, comme les SICAV, et les fonds de placement contractuels sans personnalité juridique, gérés par une SGE qui est elle-même une entreprise.

64      Enfin, il convient de souligner que, s’agissant d’un régime d’aides, c’est à raison que la Commission affirme qu’elle pouvait, conformément à la jurisprudence citée au point 54 ci-dessus, s’en tenir à un examen des caractéristiques générales de la mesure en cause et n’était pas tenue de rechercher si les structures de placement spécialisées pouvaient dans tous les cas être qualifiées d’entreprises au sens de l’article 87 CE ni donc de motiver sa décision à cet égard. En effet, la Cour a jugé suffisant, aux fins de l’application de l’article 87, paragraphe 1, CE à un régime d’aides, que ce dernier profite à certaines entreprises, sans que cette constatation ne soit remise en cause par la circonstance qu’il profite également à des bénéficiaires qui ne seraient pas des entreprises (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 15 décembre 2005, Italie/Commission, C‑66/02, Rec. p. I‑10901, points 91 et 92).

65      Le deuxième moyen, tiré d’un défaut de motivation de la qualification d’entreprises des structures de placement spécialisées, doit dès lors être rejeté.

66      Aucun des arguments avancés par la République italienne n’est de nature à remettre en cause cette conclusion.

67      Concernant, en premier lieu, la prétendue contradiction existant entre la décision d’ouverture et la décision attaquée, il convient de rappeler qu’une contradiction dans la motivation d’une décision constitue une violation de l’obligation qui découle de l’article 253 CE de nature à affecter la validité de l’acte en cause s’il est établi que, en raison de cette contradiction, le destinataire de l’acte n’est pas en mesure de connaître les motifs réels de la décision, en tout ou en partie, et que, de ce fait, le dispositif de l’acte est, en tout ou en partie, dépourvu de tout support juridique (arrêt du Tribunal du 30 mars 2000, Kish Glass/Commission, T‑65/96, Rec. p. II‑1885, point 85).

68      Tel ne saurait être le cas d’une éventuelle contradiction entre la décision d’ouverture et la décision attaquée. En effet, même à la supposer avérée, une telle divergence ne saurait signifier que la République italienne n’est pas en mesure de connaître les motifs de la décision attaquée, lesquels ressortent de celle-ci.

69      De plus, en application de l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 659/1999, la décision d’ouverture récapitule les éléments pertinents de fait et de droit, inclut une évaluation préliminaire de la Commission et expose les raisons qui incitent à douter de la compatibilité de la mesure avec le marché commun. La procédure formelle d’examen permet, quant à elle, d’approfondir et d’éclaircir les questions soulevées dans la décision d’ouverture. Il résulte de l’article 7 du règlement n° 659/1999 que, à l’issue de cette procédure, l’analyse de la Commission peut avoir évolué, puisqu’elle peut décider finalement que la mesure ne constitue par une aide ou que les doutes sur son incompatibilité ont été levés. Il s’ensuit que la décision finale peut présenter certaines divergences avec la décision d’ouverture, sans que celles-ci vicient pour autant la décision finale.

70      En toute hypothèse, il convient de relever que les situations respectives des structures de placement dotées de la personnalité morale et de celles qui en sont dépourvues avaient été évoquées dans la décision d’ouverture. Dans celle-ci, la Commission avait en effet considéré que les structures de placement sont des entreprises au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. Elle avait ajouté que, bien qu’elles ne produisent pas de biens ou ne fournissent pas de services, et même si elles ne sont parfois pas dotées d’une personnalité juridique distincte, lesdites structures de placement exercent une activité à caractère économique, qui se concrétise par la collecte de capitaux d’investisseurs ou par des décisions d’investissement relatives à leur emploi dans l’optique économique de réaliser un profit. La Commission avait par ailleurs relevé que les réductions d’impôt appliquées aux structures de placement pouvaient aussi avantager les sociétés qui gèrent ces fonds, qui constituent elles aussi des entreprises au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. La décision d’ouverture et la décision attaquée ne présentent donc pas, sur ce point, de divergence de fond.

71      Pour ce qui est, en second lieu, de la contestation de la motivation figurant au considérant 38 de la décision attaquée, force est de constater que la référence à la jurisprudence de la Cour sur le traitement des SICAV, s’agissant de la TVA, s’inscrit dans le cadre de la distinction entre SICAV et SGE et dans la démonstration de la qualité d’entreprises des SICAV. La Commission a manifestement souhaité renforcer son argumentation relative à la qualification d’entreprises des SICAV, compte tenu des observations formulées par les autorités italiennes au cours de la procédure d’examen. Toutefois, quand bien même la démonstration de la Commission pourrait paraître équivoque à certains égards, ce considérant doit être replacé dans son contexte et lu à la lumière de l’ensemble de la décision attaquée et de son dispositif, dont il ne constitue pas, à lui seul, un support essentiel. Ce considérant ne saurait donc être considéré comme remettant en cause la compréhension que les autorités italiennes pouvaient tirer des motifs de la décision attaquée, tels qu’ils résultent notamment de ses considérants 13, 29, 36, 37, 39 et 41.

2.     Sur le défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’existence d’un avantage en faveur des sociétés à capitalisation faible ou moyenne

72      La Commission consacre les considérants 42 et 43 de la décision attaquée à la démonstration de l’existence d’un avantage sélectif en faveur des sociétés à capitalisation faible ou moyenne dont les actions sont détenues par des structures de placement spécialisées. Elle est d’avis que la mesure en cause leur apporte un avantage sélectif indirect sous la forme d’une augmentation de la demande de leurs actions et d’une augmentation de leur liquidité.

73      Dans le considérant 42 de la décision attaquée, la Commission répond à la critique selon laquelle les sociétés à capitalisation faible ou moyenne ne seraient pas avantagées étant donné que les fonds et les investisseurs réaliseraient des placements en vue d’augmenter leurs profits, en expliquant qu’« un traitement fiscal plus favorable rend l’investissement plus attrayant, procurant ainsi une plus grande liquidité aux sociétés à capitalisation faible ou moyenne, même en l’absence de comportement actif de ces sociétés visant à bénéficier d’un tel avantage ».

74      Dans le considérant 43 de la décision attaquée, la Commission réfute ensuite l’argument selon lequel la mesure en cause constituerait une mesure de politique fiscale générale visant à favoriser la capitalisation des sociétés à capitalisation faible ou moyenne en Europe. La Commission relève tout d’abord que l’avantage fiscal concédé ne compense pas les disparités de traitement fiscal importantes entre les placements collectifs dans les sociétés à capitalisation faible ou moyenne, d’une part, et les placements collectifs dans d’autres sociétés ou les placements individuels dans des sociétés non cotées, d’autre part. La Commission exclut de surcroît toute justification de la mesure en cause sur la base de son objectif spécifique, car celle-ci ne serait ni sélective ni proportionnée par rapport à l’objectif de favoriser la capitalisation des sociétés concernées.

75      Il ressort de ce qui précède que la Commission a clairement exposé dans la décision attaquée en quoi les sociétés à capitalisation faible ou moyenne dont les actions sont détenues par des structures de placement spécialisées bénéficient d’un avantage sélectif au titre de la mesure en cause.

76      Il convient d’ajouter que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 53 supra, il n’incombait pas à la Commission de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés.

77      La branche du quatrième moyen tirée d’une violation de l’article 253 CE ne saurait dès lors prospérer.

3.     Sur le défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’incidence de la mesure en cause sur la concurrence et sur les échanges intracommunautaires

78      Il y a lieu de rappeler que, si la Commission est tenue d’évoquer, dans les motifs de sa décision, à tout le moins les circonstances dans lesquelles une aide a été accordée, lorsqu’elles permettent de démontrer que l’aide est de nature à affecter les échanges entre États membres, elle n’est pas tenue de faire la démonstration de l’effet réel d’aides déjà accordées. Si tel était le cas, en effet, cette exigence aboutirait à favoriser les États membres qui versent des aides illégales au détriment de ceux qui notifient les aides à l’état de projet (arrêt Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, point 53 supra , point 215).

79      Au regard de cette jurisprudence, il n’apparaît pas que la Commission ait manqué, en l’occurrence, à l’obligation qui lui incombe de motiver de manière suffisante la décision attaquée.

80      En effet, elle consacre trois considérants de la décision attaquée à l’examen de l’effet de la mesure en cause sur la concurrence, d’une part, en expliquant en quoi, à son avis, la mesure en cause fausse la concurrence et affecte les échanges intracommunautaires et, d’autre part, en répondant à certaines critiques formulées lors de la procédure ayant mené à l’adoption de la décision attaquée.

81      Dans le considérant 45 de la décision attaquée, la Commission expose ainsi que la mesure en cause peut fausser la concurrence entre les entreprises et affecter les échanges entre États membres étant donné que « les sociétés bénéficiaires peuvent opérer sur des marchés internationaux et exercer des activités commerciales et d’autres activités économiques sur des marchés caractérisés par une concurrence intense ». Elle ajoute que les structures de placement spécialisées « sont en concurrence avec d’autres entreprises financières et opèrent sur un marché ouvert caractérisé par d’importants échanges intracommunautaires » et que certaines sociétés à capitalisation faible ou moyenne sont actives dans des secteurs dans lesquels il y a des échanges entre les États membres.

82      Au considérant 46, la Commission rejette l’argument tiré du coût fiscal limité de la mesure en cause et du nombre restreint de structures spécialisées opérationnelles en 2004, l’année concernée par la procédure ouverte par la Commission à l’égard de la mesure en cause. À cet effet, elle rappelle, en premier lieu, la jurisprudence constante selon laquelle même une aide d’un faible montant affecte la concurrence. Elle souligne, en second lieu, que la République italienne n’exclut pas que la mesure en cause puisse avoir à l’avenir un impact économique beaucoup plus important. Elle ajoute que l’impact limité de la mesure en cause peut aussi s’expliquer par l’influence de son action rapide en la matière sur le comportement des opérateurs. Enfin, la Commission souligne que les données présentées par la République italienne ne permettent pas de conclure que les avantages que les bénéficiaires individuels tirent de la mesure en cause restent dans les limites des aides de minimis.

83      La Commission en conclut, au considérant 47 de la décision attaquée, que la mesure en cause « affecte (par le traitement fiscal des investisseurs) la position concurrentielle de certaines entreprises qui exercent des activités commerciales et, dans la mesure où elles opèrent sur des marchés ouverts à la concurrence internationale, fausse la concurrence ».

84      La motivation de la décision attaquée permet donc à la République italienne et au juge communautaire de connaître les raisons pour lesquelles la Commission a considéré que les conditions d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE relatives à l’incidence sur les échanges entre États membres et à la distorsion de la concurrence étaient remplies en l’espèce.

85      La République italienne ne saurait reprocher à la Commission de ne pas avoir examiné de manière plus précise les effets concrets de l’aide litigieuse sur les échanges entre États membres et sur la concurrence. En effet, il n’incombait pas à la Commission de procéder à une analyse économique de la situation réelle du marché concerné, de la part de marché des entreprises bénéficiaires des aides, de la position des entreprises concurrentes et des courants d’échanges des services en cause entre les États membres, dès lors qu’elle avait exposé en quoi les aides litigieuses faussaient la concurrence et affectaient les échanges entre États membres. S’agissant d’une aide n’ayant pas été notifiée, la Commission n’était pas tenue de faire la démonstration de l’effet réel de celle-ci (arrêt du Tribunal du 29 septembre 2000, CETM/Commission, T‑55/99, Rec. p. II‑3207, points 102 et 103).

86      Il y a donc lieu de rejeter la branche du cinquième moyen, tirée d’un défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’incidence de la mesure en cause sur la concurrence et sur les échanges intracommunautaires.

4.     Sur le défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun

87      Dans la décision attaquée, l’examen de la compatibilité de la mesure en cause avec le marché commun fait l’objet de sept considérants.

88      Après avoir exposé, au considérant 49 de la décision attaquée, que cette compatibilité doit être appréciée à la lumière des dérogations prévues à l’article 87, paragraphes 2 et 3, CE, la Commission commence par souligner que les autorités italiennes n’ont pas explicitement contesté le fait qu’aucune de ces dérogations n’était applicable en l’espèce (considérant 50). Elle écarte ensuite, aux considérants 51 à 54, l’application en l’espèce des dérogations prévues par l’article 87, paragraphes 2 et 3, sous a) et b), CE.

89      Le considérant 55 est consacré à l’appréciation de la mesure en cause au regard de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE. La Commission estime que les allégements fiscaux accordés par la mesure en cause ne peuvent pas être considérés comme compatibles avec le marché commun car, d’une part, ils ne sont « ni liés ni proportionnés à des investissements spécifiques, à la création d’emplois ou à des projets spécifiques qui contribueraient à favoriser le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques ». D’autre part, ils ne remplissent pas les critères fixés dans la communication de la Commission intitulée « Aides d’État et capital-investissement » (JO C 235, p. 3), étant donné que les investissements bénéficiant des allégements ont pour objet des sociétés cotées sur un marché européen réglementé et que les autorités italiennes n’ont pas démontré que ces sociétés ne bénéficieraient pas d’un accès aux financements par actions et qu’elles seraient exposées, pour rassembler des capitaux, à des coûts plus élevés que les autres sociétés. La Commission observe par ailleurs que, comme la Cour l’a affirmé à propos d’une autre mesure d’aide qui favorise des investissements spécifiques, il n’est pas exclu que la mesure en cause s’applique à des entreprises en difficulté ou opérant dans des secteurs sensibles pour lesquels il existe des règles spécifiques en matière d’aides. La Commission aboutit à la conclusion que les avantages accordés par la mesure en cause réduisent les charges que les bénéficiaires devraient normalement supporter dans le cours de leurs activités économiques et qu’ils doivent par conséquent être considérés comme des aides d’État au fonctionnement qui, selon la pratique et la jurisprudence, sont incompatibles avec le marché commun. 

90      Force est dès lors de constater que la Commission a motivé à suffisance de droit sa conclusion sur l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun. Il conviendra d’apprécier dans le cadre de l’examen de la branche du sixième moyen tirée de la violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, les arguments de la République italienne qui visent le bien-fondé de la motivation fournie dans la décision attaquée.

91      Il y a dès lors lieu de rejeter la branche du sixième moyen tirée d’un défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun.

III –  Sur la violation de l’article 87 CE

92      La République italienne invoque la violation de l’article 87 CE à différents égards dans ses troisième, quatrième, cinquième et sixième moyens. Dans son troisième moyen, elle conteste l’existence d’un avantage octroyé aux structures de placement spécialisées ainsi que son caractère sélectif, dans le quatrième la qualité de bénéficiaires indirects des sociétés cotées à capitalisation faible ou moyenne, dans le cinquième l’incidence de la mesure en cause sur la concurrence et sur les échanges intracommunautaires et, enfin, dans le sixième moyen, l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun.

A –  Sur la sélectivité de l’avantage octroyé aux structures de placement spécialisées

1.     Arguments des parties

93      Par son troisième moyen, la République italienne avance que la condition de la sélectivité n’est pas remplie à l’égard des structures de placement spécialisées, qui ne constituent pas des entreprises.

94      Premièrement, les structures de placement spécialisées bénéficieraient tout au plus d’un avantage indirect généré par un avantage direct accordé à tous les investisseurs. En effet, les mesures fiscales en cause consisteraient en une taxation moins élevée du résultat de gestion, ce qui profiterait directement aux souscripteurs eux-mêmes, c’est-à-dire à n’importe quelle personne qui aurait investi dans une structure de placement entrant dans le champ d’application desdites mesures fiscales.

95      Deuxièmement, la République italienne soutient que, pour bénéficier d’une aide indirecte, le bénéficiaire direct doit effectuer un investissement dans l’entreprise qui en tire le bénéfice. La Commission aurait reconnu que « les organismes d’investissement spécialisés ne bénéficient pas directement de la réduction d’impôt accordée à leurs souscripteurs », raison pour laquelle elle se serait référée au principe selon lequel « les avantages fiscaux directs accordés à des investisseurs qui ne sont pas des entreprises constituent des aides indirectes aux entreprises dans lesquelles les investisseurs investissent ». Or, en l’espèce, les investisseurs n’investiraient pas dans une entreprise, puisqu’ils n’investissent pas dans la SGE, mais se borneraient à acquérir une part d’une structure de placement. Ce raisonnement vaudrait tant pour les fonds « contractuels » que pour les SICAV.

96      Troisièmement, la République italienne fait valoir que toute structure de placement peut profiter du bénéfice si elle remplit les conditions requises par la mesure, de sorte que cette dernière ne saurait être considérée comme sélective. La République italienne conteste la pertinence du rapprochement effectué avec les aides régionales, dès lors que l’avantage résultant des mesures en question n’impose aux investisseurs, à la différence d’aides régionales, aucun choix onéreux. Enfin, elle nie qu’une structure de placement spécialisée tire avantage de la mesure en cause lorsqu’une structure de placement généraliste se porte acquéreur de ses parts.

97      En tout état de cause, la République italienne allègue que l’hypothèse de l’aide indirecte ne saurait être admise même si l’on suivait le raisonnement de la Commission. Il ne s’agirait pas d’une aide sélective, même en admettant, comme l’affirme – sans le prouver – la Commission au considérant 39 de la décision attaquée, que l’avantage indirect réside « dans l’augmentation de la demande de parts d’organismes de placement spécialisés », laquelle « donne lieu à une augmentation des commissions de gestion et de souscription perçues par les organismes ou par les entreprises qui gèrent lesdits organismes ». N’importe quel gérant pourrait en effet instituer des structures de placement spécialisées ou transformer en structures de placement spécialisées des structures de placement généralistes. Or, un avantage même indirect dont n’importe quel intéressé peut se prévaloir ne saurait être considéré comme sélectif.

98      Dans sa réplique, la République italienne allègue que la Commission n’a pas établi l’existence d’un avantage au profit des structures de placement spécialisées. La Commission n’aurait pas démontré que l’avantage procuré aux souscripteurs serait susceptible d’infléchir leur politique de placement. Le lien entre la masse gérée et le niveau des commissions de gestion resterait hypothétique.

99      La Commission conteste l’argumentation de la République italienne.

2.     Appréciation du Tribunal

100    Par ce troisième moyen, la République italienne invoque l’absence de caractère sélectif de la mesure en cause pour les structures de placement spécialisées. Dans sa réplique, elle conteste également que ces structures de placement tirent un avantage de la mesure en cause. Il y a donc lieu de subdiviser ce moyen en deux branches.

a)      Sur la première branche du troisième moyen, relative à l’existence d’un avantage accordé aux structures de placement spécialisées

101    La Commission considère que cette branche du troisième moyen constitue un moyen nouveau soulevé au stade de la réplique, qui doit donc être déclarée irrecevable.

102    À cet égard, il ressort des dispositions combinées des articles 44, paragraphe 1, sous c), et 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal que la requête introductive d’instance doit contenir, notamment, un exposé sommaire des moyens invoqués et que la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite, à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (voir arrêt du Tribunal du 19 septembre 2000, Dürbeck/Commission, T‑252/97, Rec. p. II‑3031, point 39, et la jurisprudence citée).

103    Or, le troisième moyen de la République italienne porte très clairement sur le caractère sélectif de la mesure en cause à l’égard des structures de placement spécialisées, comme en témoignent expressément les points 24, 25 et 27 de la requête. Certes, il est fait état, au point 27 de cette dernière, d’un avantage indirect qui résiderait, selon le considérant 39 de la décision attaquée, dans l’augmentation de la demande de parts de structures de placement, laquelle donnerait lieu à une augmentation des commissions de gestion et de souscription perçues par ces organismes. La République italienne n’avance cependant aucun argument pour contester l’existence de cet avantage indirect, mais se borne à exposer que, même en l’admettant, la mesure en cause ne serait pas sélective. Selon elle, la mesure en cause profite potentiellement à toute personne (point 24 de la requête). Elle conteste dès lors le caractère sélectif de la mesure en cause, mais pas l’avantage que celle-ci génère.

104    Même dans sa réplique, la République italienne présente ce moyen en affirmant qu’il « porte sur le problème du caractère sélectif ou non de la mesure en cause ».

105    Force est dès lors de constater que, en invoquant pour la première fois au stade de la réplique l’absence d’avantage pour les structures de placement spécialisées, la République italienne introduit un moyen nouveau qui doit, en application de la jurisprudence citée au point 102 ci-dessus, être déclaré irrecevable.

106    À titre surabondant, il y a lieu d’observer que, même à supposer que la première branche du troisième moyen soit implicitement visée par la requête, elle n’en devrait pas moins être rejetée.

107    En effet, au considérant 36 de la décision attaquée, la Commission a estimé que « bien que les structures de placement spécialisées ne bénéficient pas directement de la réduction d’impôt accordée aux souscripteurs, elles en retirent néanmoins un bénéfice économique indirect ». La Commission a ensuite précisé, au considérant 39 de la décision attaquée, que l’avantage octroyé aux structures de placement spécialisées réside « dans l’augmentation de la demande de parts d’organismes de placement spécialisés », laquelle « donne lieu à une augmentation des commissions de gestion et de souscription perçues par les organismes et les entreprises qui gèrent lesdits organismes ».

108    À cet égard, force est de constater que l’article 87 CE interdit les aides accordées par l’État ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit, sans établir de distinction selon que les avantages relatifs aux aides sont octroyés de manière directe ou indirecte. La jurisprudence a ainsi admis qu’un avantage directement accordé à certaines personnes physiques ou morales qui ne sont pas nécessairement des entreprises peut constituer un avantage indirect et, partant, une aide d’État pour d’autres personnes physiques ou morales qui sont des entreprises (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 19 septembre 2000, Allemagne/Commission, C‑156/98, Rec. p. I‑6857, points 22 à 35, et du 13 juin 2002, Pays-Bas/Commission, C‑382/99, Rec. p. I‑5163, points 38 et 60 à 66).

109    Il y a par ailleurs lieu de rappeler que sont notamment considérées comme des aides les interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges grevant normalement le budget d’une entreprise et qui, par là, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques (voir, notamment, arrêts de la Cour du 17 juin 1999, Belgique/Commission, C‑75/97, Rec. p. I‑3671, point 23, et du 15 mars 1994, Banco Exterior de España, C‑387/92, Rec. p. I‑877, point 13).

110    En l’espèce, il convient de constater que l’avantage indirectement accordé aux entreprises visées trouve son origine dans la renonciation par l’État membre aux recettes fiscales qu’il aurait normalement perçues, dans la mesure où c’est cette renonciation qui a donné aux investisseurs la possibilité de prendre des participations dans ces entreprises à des conditions fiscalement plus avantageuses. L’interposition d’une décision autonome de la part des investisseurs n’a pas pour effet de supprimer le lien existant entre l’allégement fiscal et l’avantage dont bénéficient les entreprises concernées, dès lors que, en termes économiques, la modification des conditions de marché qui génère ledit avantage est la résultante de la perte de ressources fiscales à l’égard des pouvoirs publics (voir, en ce sens, arrêt Allemagne/Commission, point 108 supra, points 26 et 27).

111    Dans le même sens, le Tribunal a récemment admis qu’une exonération fiscale accordée aux épargnants était susceptible de constituer une aide d’État en faveur de la banque qui distribuait le produit de l’épargne. Il a déclaré à cet égard qu’il n’est pas nécessaire, pour pouvoir constater l’existence d’une intervention au moyen de ressources d’État en faveur d’une entreprise, que celle-ci en soit le bénéficiaire direct. De même, le fait pour un État membre de renoncer à des recettes fiscales peut impliquer un transfert indirect de ressources étatiques, susceptible d’être qualifié d’aide en faveur d’opérateurs économiques autres que ceux auxquels l’avantage fiscal est accordé directement (arrêt du Tribunal du 18 janvier 2005, Confédération nationale du Crédit mutuel/Commission, T‑93/02, Rec. p. II‑143, point 95).

112    En l’espèce, la mesure en cause vise à promouvoir la capitalisation de marché des sociétés à capitalisation faible ou moyenne (considérant 32 de la décision attaquée). Il ne saurait être contesté qu’elle a pour objet d’orienter l’épargne des souscripteurs vers les structures de placement spécialisées.

113    Or, si, conformément à sa finalité, la mesure en cause pousse les souscripteurs à acquérir des parts de structures de placement spécialisées, ces dernières ou les sociétés qui les gèrent en retireront nécessairement un avantage, par exemple sous forme d’une augmentation des commissions de souscription et/ou de gestion perçues dans ce cadre. En effet, il n’est pas contesté que, même si les modalités peuvent varier, des commissions sont versées proportionnellement aux volumes concernés, lors de la souscription des parts et/ou pour la gestion des fonds.

114    C’est donc à bon droit que la Commission a retenu l’existence d’un avantage indirect accordé aux structures de placement spécialisées ou aux sociétés qui les gèrent.

b)     Sur la seconde branche du troisième moyen, relative à la sélectivité de l’avantage octroyé aux structures de placement spécialisées

115    Ainsi que cela ressort du texte de l’article 87, paragraphe 1, CE, un avantage économique concédé par un État membre ne revêt le caractère d’une aide que si, présentant une certaine sélectivité, il est de nature à favoriser «certaines entreprises ou certaines productions». Aux fins de l’application de cette disposition, il convient uniquement de déterminer si, dans le cadre d’un régime juridique donné, une mesure étatique est de nature à favoriser «certaines entreprises ou certaines productions» au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE par rapport à d’autres entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable au regard de l’objectif poursuivi par la mesure concernée (voir arrêt de la Cour du 8 novembre 2001, Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke, C‑143/99, Rec. p. I‑8365, points 34 et 41, et la jurisprudence citée).

116    Conformément à la jurisprudence de la Cour, ne remplit pas cette condition de sélectivité une mesure qui, quoique constitutive d’un avantage pour son bénéficiaire, se justifie par la nature ou l’économie générale du système dans lequel elle s’inscrit (arrêt Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke, point 115 supra, point 42).

117    C’est à la lumière de ces éléments qu’il convient d’examiner la seconde branche du troisième moyen qui vise l’absence de sélectivité de la mesure en cause à l’égard des structures de placement spécialisées.

118    Il ressort du considérant 35 de la décision attaquée que « la réduction d’impôt en faveur des investisseurs constitue une aide d’État en faveur […] des organismes spécialisés dans les placements en actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne ». Dans le considérant 36 de la décision attaquée, la Commission expose que, « bien que les structures de placement spécialisées ne bénéficient pas directement de la réduction d’impôt accordée à leurs souscripteurs, elles en retirent néanmoins un bénéfice économique indirect ». Elle répète, dans le considérant 39 de la décision attaquée, qu’elle considère qu’un avantage fiscal concédé aux investisseurs qui investissent dans les structures de placement spécialisées favorise ces structures elles-mêmes. Dans le considérant 40 de la décision attaquée, la Commission réfute l’argumentation selon laquelle la mesure en cause ne serait pas sélective, en soulignant que celle-ci « prévoi[t] une réduction d’impôt exceptionnelle et limitée aux [structures de placement spécialisées] et à leurs sociétés de gestion ». Enfin, dans l’article 1er de la décision attaquée, elle déclare incompatible avec le marché commun le régime d’aides d’État, accordées sous forme d’incitations fiscales en faveur de structures de placement.

119    Conformément à la jurisprudence citée aux points 108 à 110 ci-dessus, la Commission ne s’est dès lors pas placée au niveau des souscripteurs ou des investisseurs, mais à celui des structures de placement visées, pour identifier l’avantage et déclarer la mesure en cause incompatible avec le marché commun. Ce n’est donc pas au niveau des investisseurs qu’il y a lieu de vérifier si la condition de sélectivité est remplie, mais à celui desdites structures de placement. L’argumentation de la République italienne visant l’absence de sélectivité de la mesure en cause par rapport aux investisseurs n’est dès lors pas pertinente, notamment en ce qu’elle présente la mesure en cause comme une mesure de politique fiscale générale qui profite directement aux investisseurs.

120    De même, contrairement à ce qu’allègue la République italienne, la preuve du caractère sélectif de l’avantage direct accordé aux investisseurs ne constitue pas un préalable nécessaire à la démonstration de la sélectivité de la mesure en cause en ce qui concerne les structures de placement visées. Il résulte en effet de la jurisprudence que la seule circonstance qu’un avantage présente un caractère indirect ne saurait exclure sa sélectivité [voir, par analogie, arrêts Allemagne/Commission, point 108 supra (points 26 et 27), et Confédération nationale du Crédit mutuel/Commission, point 111 supra (point 95)].

121    S’agissant de l’argumentation avancée par la République italienne en ce qui concerne l’absence de qualité d’entreprises des structures de placement visées, la décision attaquée distingue deux cas de figure. Dans certains cas, ces structures de placement spécialisées revêtent la forme d’une société et peuvent bénéficier elles-mêmes, en tant qu’entreprises, de l’avantage en cause. Dans d’autres cas, lesdites structures ne sont pas dotées de la personnalité juridique, mais elles sont gérées par des entreprises qui sont favorisées au sens de l’article 87 CE.

122    En ce qui concerne, d’abord, les structures de placement spécialisées qui constituent elles-mêmes des sociétés, force est de constater qu’elles constituent des entreprises, de sorte que la mesure en cause favorise des entreprises au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

123    Il reste cependant à vérifier si la mesure en cause favorise certaines entreprises par rapport à d’autres dans une situation factuelle et juridique comparable au regard de l’objectif poursuivi par la mesure concernée, conformément à la jurisprudence citée au point 115 ci-dessus.

124    À cet égard, ainsi qu’il ressort de la description figurant aux considérants 11 à 19 de la décision attaquée et de l’explication fournie dans le considérant 40 de celle-ci (voir point 118 ci-dessus), la mesure en cause prévoit une réduction d’impôt « limitée aux [structures de placement spécialisées] et à leurs sociétés de gestion ». Étant destinée de façon limitative à des structures de placement bien définies et remplissant des conditions particulières « au détriment d’autres entreprises qui offrent des formes alternatives de placement » (considérant 41 de la décision attaquée), elle favorise certaines structures de placement par rapport à d’autres qui sont dans une situation juridique et factuelle comparable au sens de la jurisprudence citée au point 115 ci-dessus. La mesure en cause a donc un caractère sélectif au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

125    À cet égard, l’argument de la République italienne, selon lequel l’avantage résultant de la mesure en cause serait accessible à toute structure de placement remplissant les conditions prévues, de sorte qu’elle constituerait une mesure générale, ne saurait convaincre.

126    En effet, le seul fait que la mesure en cause puisse profiter à toute structure de placement remplissant les conditions prévues, c’est-à-dire détermine son champ d’application sur la base de critères objectifs, n’établit pas en soi le caractère général de ladite mesure et n’interdit pas qu’elle revête un caractère sélectif (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 mars 2002, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T‑92/00 et T‑103/00, Rec. p. II‑1385, point 58).

127    Il en résulte que la mesure en cause confère un avantage sélectif à certaines structures de placement spécialisées. Cette constatation ne saurait être remise en cause par la circonstance que le présent régime d’aides profite également à des bénéficiaires qui ne seraient pas des entreprises (voir point 64 ci-dessus). Ces considérations suffisent dès lors en tout état de cause à motiver le rejet de la seconde branche du troisième moyen.

128    À titre surabondant, il convient d’observer, en ce qui concerne, plus particulièrement, les structures de placements spécialisées qui ne sont pas dotées de la personnalité juridique, que la Commission estime que la mesure en cause favorise les sociétés de gestion, dont la qualité d’entreprise n’est pas contestée, qui les gèrent (voir, notamment, considérants 37 et 39 de la décision attaquée). Or, force est de constater que la condition de la sélectivité est également remplie à leur égard, conformément à la jurisprudence citée au point 115 ci-dessus.

129    Il convient en effet de souligner qu’une aide peut être sélective au regard de l’article 87, paragraphe 1, CE même lorsqu’elle concerne tout un secteur économique (arrêt du 15 décembre 2005, Italie/Commission, point 64 supra, point 95).

130    En l’espèce, la mesure en cause s’applique au secteur financier. Au sein de celui-ci, elle profite uniquement aux entreprises réalisant les opérations visées. Ne s’appliquant pas à tous les opérateurs économiques, elle ne peut être considérée comme une mesure générale de politique fiscale ou économique. Elle déroge, en réalité, au régime fiscal de droit commun. Les sociétés de gestion bénéficiaires profitent indirectement d’avantages non prévus dans le cadre de l’application normale de ce régime et auxquels ne peuvent prétendre des entreprises du secteur financier ne réalisant pas des opérations de gestion de structures de placement spécialisées (voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2005, Italie/Commission, point 64 supra, points 96, 97, 99 et 100). La mesure en cause est dès lors également sélective à l’égard des sociétés de gestion de structures de placement spécialisées.

131    La seconde branche du troisième moyen n’étant pas fondée, celui-ci doit être rejeté dans son intégralité.

B –  Sur l’existence d’un avantage sélectif en faveur des sociétés à capitalisation faible ou moyenne

1.     Arguments des parties

132    Dans son quatrième moyen, la République italienne fait, en premier lieu, valoir que la mesure en cause ne confère pas un avantage sélectif aux sociétés cotées à capitalisation faible ou moyenne. L’avantage résultant de la mesure en cause ne bénéficierait qu’aux seuls souscripteurs d’instruments de placement collectif. Selon la République italienne, la mesure en cause n’est pas susceptible de modifier les choix d’investissement des SGE, dès lors qu’elle est sans incidence sur les débours en cas d’investissement dans des sociétés à capitalisation faible ou moyenne. Les choix d’investissement ne dépendraient que de la capacité des sociétés à générer des profits et non du traitement fiscal du résultat de gestion.

133    En second lieu, la République italienne allègue que la mesure en cause relève de la politique économique générale, en ce qu’elle permet aux sociétés à capitalisation faible ou moyenne, qui connaissent des conditions économiques saines, de susciter davantage l’intérêt du marché. Il conviendrait de comparer la situation des différentes sociétés susceptibles de bénéficier des investissements réalisés par les structures de placement. Or, les sociétés cotées à forte capitalisation et les autres sociétés cotées ne se trouveraient pas dans une situation comparable, de sorte qu’il serait justifié de réserver un traitement fiscal distinct aux investissements réalisés dans les deux types de sociétés.

134    Les deux arguments ainsi développés ne seraient pas contradictoires. En effet, aucun avantage fiscal ne saurait orienter une structure de placement agissant rationnellement vers une société ne présentant pas de perspectives intéressantes de profit.

135    La Commission conteste les arguments de la République italienne.

2.     Appréciation du Tribunal

136    Il ressort du considérant 42 de la décision attaquée que la Commission considère que la mesure en cause apporte un avantage sélectif indirect aux sociétés à capitalisation faible ou moyenne dont les actions sont détenues par des structures de placement spécialisées, sous la forme d’une augmentation de la demande de leurs actions et d’une augmentation de leur liquidité, liées à la plus forte attractivité du placement.

137    Or, si la République italienne admet l’existence d’un avantage pour les investisseurs, elle conteste tout avantage sélectif indirect pour les sociétés à capitalisation faible ou moyenne au motif, en substance, que les choix d’investissement ne dépendent que de la capacité desdites sociétés à générer des profits et non du traitement fiscal du résultat de gestion. Elle dément, dans le cadre de cette argumentation, qu’un traitement fiscal plus favorable puisse rendre le placement plus attrayant.

138    Toutefois, il ressort du considérant 32 de la décision attaquée que, selon la République italienne, la mesure en cause vise à promouvoir la capitalisation de marché des sociétés à capitalisation faible ou moyenne par rapport à celle des autres sociétés cotées en Europe. Par ailleurs, à l’audience, la République italienne a fait valoir que l’idée de départ est que les sociétés à capitalisation faible ou moyenne sont désavantagées par rapport aux autres types de sociétés parce que les investisseurs disposent d’informations moins importantes sur leur compte, ce qui peut se traduire par des coûts de placement supérieurs, par exemple sous forme de commissions plus importantes. La réduction du coût fiscal tendrait donc à compenser ce désavantage et à rééquilibrer les conditions.

139    Il en résulte que, selon les propres affirmations de la République italienne, la mesure en cause a précisément pour objectif d’augmenter l’attractivité des sociétés à capitalisation faible ou moyenne. Dès lors donc que la République italienne affirme, d’une part, que la mesure en cause poursuit cette finalité, elle ne saurait contester, d’autre part, que la mesure en cause est effectivement apte à atteindre cet objectif, c’est-à-dire à rendre plus attrayant que par le passé le placement dans les sociétés à capitalisation faible ou moyenne. Par ailleurs, il convient de relever que, à l’appui de sa thèse, la République italienne n’a en tout état de cause pas démontré que la mesure en cause est précisément proportionnée par rapport à l’objectif de combler le désavantage qui, à le supposer établi, pénaliserait les sociétés à capitalisation faible ou moyenne.

140    C’est par conséquent à raison que la Commission conclut, dans le considérant 42 de la décision attaquée, que, en favorisant la demande, par les investisseurs, d’actions des sociétés à capitalisation faible ou moyenne, la mesure en cause procure un avantage indirect à ces sociétés.

141    Il ressort toutefois de la jurisprudence citée aux points 115 et 116 ci-dessus, d’une part, que la vérification de la sélectivité d’une mesure implique de comparer la situation des entreprises bénéficiaires à celles d’autres entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable au regard de l’objectif poursuivi par la mesure concernée et, d’autre part, qu’une mesure constitutive d’un avantage ne remplit pas la condition de sélectivité lorsqu’elle se justifie par la nature ou l’économie générale du système dans lequel elle s’inscrit.

142    Or, la République italienne allègue que la mesure en cause constitue une mesure de politique fiscale générale, de sorte que la condition de la sélectivité ne serait pas remplie. Elle fait valoir dans ce cadre que la situation des sociétés cotées à capitalisation faible ou moyenne n’est pas comparable à celle de sociétés plus importantes.

143    Il convient d’observer qu’il ressort du considérant 43 de la décision attaquée que la Commission rejette l’argumentation de la République italienne sur ce point. Elle considère que l’avantage fiscal octroyé ne compense pas des disparités de traitement fiscal importantes entre les placements collectifs dans les sociétés à capitalisation faible ou moyenne cotées, d’une part, et les placements collectifs dans d’autres sociétés ou les placements individuels dans des sociétés non cotées, d’autre part. La mesure en cause ne saurait pas non plus être justifiée sur la base de son objectif spécifique, étant donné qu’elle se limite à prévoir une réduction d’impôt dans le cas de placements collectifs spécialisés dans des actions de sociétés à capitalisation faible ou moyenne cotées et que, en tant que telle, elle n’est ni sélective ni proportionnée par rapport à l’objectif de favoriser la capitalisation de ces sociétés, mais qu’elle est plutôt subordonnée à la condition que les placements soient réalisés par l’intermédiaire des structures de placement spécialisées.

144    À cet égard, force est de constater que la République italienne n’a fourni aucun élément de nature à étayer la thèse de l’impossibilité de comparer la situation des placements collectifs dans les sociétés à capitalisation faible ou moyenne avec celle des placements collectifs dans d’autres sociétés, voire avec celle des placements individuels.

145    La République italienne, limitant sa comparaison aux sociétés cotées à forte capitalisation, s’est bornée à affirmer qu’il est notoire que les investisseurs collectifs se tournent de préférence vers elles en raison des bénéfices relativement sûrs attendus. Or, quand bien même cette préférence serait avérée, elle ne constituerait qu’un élément de différenciation n’impliquant pas à lui seul l’impossibilité de comparer la situation de ces dernières à celle des sociétés à capitalisation faible ou moyenne et ne justifiant pas à lui seul l’octroi d’un avantage fiscal limité aux placements collectifs dans celles-ci.

146    La République italienne n’a pas davantage expliqué en quoi la mesure en cause, constitutive d’un avantage pour les sociétés à capitalisation faible ou moyenne, se justifierait par la nature ou l’économie générale du système dans lequel elle s’inscrit.

147    Il doit encore être souligné que les mesures sélectives en faveur des petites et moyennes entreprises n’échappent pas non plus à la qualification d’aide d’État (arrêt Diputación Foral de Álava e.a./Commission, point 126 supra, point 40).

148    Il résulte de ce qui précède que le quatrième moyen doit être rejeté en ce qu’il est tiré d’une violation de l’article 87 CE.

C –  Sur l’incidence de la mesure en cause sur les échanges intracommunautaires et la concurrence

1.     Arguments des parties

149    Par son cinquième moyen, la République italienne fait valoir que la décision attaquée comporte une violation de l’article 87, paragraphe 1, CE, dans la mesure où la Commission retient une incidence de la mesure en cause sur la concurrence intracommunautaire.

150    La Commission n’aurait pas démontré que la mesure en cause constitue une aide au fonctionnement. S’agissant des structures de placement spécialisées, la République italienne exclut une telle qualification. En effet, l’impôt de substitution ne correspondrait pas à un coût de gestion à leur charge puisqu’il est prélevé sous la forme de retenue du résultat de gestion, c’est-à-dire qu’il est nécessairement à la charge des souscripteurs. À l’égard des sociétés à capitalisation faible ou moyenne, la mesure en cause ne constituerait pas une aide à la gestion courante, mais une mesure à portée structurelle. Cette dernière viserait le renforcement patrimonial de cette catégorie de sociétés cotées, en vue d’accroître leur capitalisation.

151    Alors même qu’une analyse économique s’imposait, la Commission se serait contentée d’affirmations générales, sans vérifier notamment s’il existait des bénéficiaires actifs sur des marchés internationaux. Par ailleurs, l’incidence future de la mesure en cause ne pourrait justifier une décision actuelle d’incompatibilité, d’autant plus que les montants concernés seraient dérisoires.

152    La Commission conteste les arguments de la République italienne.

2.     Appréciation du Tribunal

153    Aux fins de la qualification d’une mesure nationale en tant qu’aide d’État, il y a lieu non pas d’établir une incidence réelle de l’aide sur les échanges entre États membres et une distorsion effective de la concurrence, mais seulement d’examiner si l’aide est susceptible d’affecter ces échanges et de fausser la concurrence. En particulier, lorsqu’une aide accordée par un État membre renforce la position d’une entreprise par rapport à d’autres entreprises concurrentes dans les échanges intracommunautaires, ces derniers doivent être considérés comme influencés par l’aide. À cet égard, la circonstance qu’un secteur économique a fait l’objet d’une libéralisation au niveau communautaire est de nature à caractériser une incidence réelle ou potentielle des aides sur la concurrence ainsi que leur effet sur les échanges entre États membres (voir arrêt de la Cour du 10 janvier 2006, Cassa di Risparmio di Firenze e.a., C‑222/04, Rec. p. I‑289, points 140 à 142, et la jurisprudence citée).

154    Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, dès lors qu’une autorité publique favorise une entreprise opérant dans un secteur caractérisé par une intense concurrence en lui accordant un avantage, il existe une distorsion de concurrence ou un risque d’une telle distorsion. Si l’avantage est réduit, la concurrence est faussée de manière réduite, mais elle est néanmoins faussée. Or, l’interdiction visée à l’article 87, paragraphe 1, CE s’applique à toute aide qui fausse ou menace de fausser la concurrence, quel qu’en soit le montant, dans la mesure où elle affecte les échanges entre États membres (arrêt du Tribunal du 30 avril 1998, Vlaamse Gewest/Commission, T-214/95, Rec. p. II‑717, point 46).

155    Même une aide d’une importance relativement faible est de nature à affecter les échanges entre États membres lorsque, comme en l’espèce, le secteur dans lequel opère l’entreprise qui en bénéficie connaît une vive concurrence (arrêt Vlaamse Gewest/Commission, point 154 supra, point 49).

156    Il ressort du considérant 45 de la décision attaquée que la Commission a, conformément à la jurisprudence précitée, examiné si la mesure en cause peut fausser la concurrence et affecter les échanges entre États membres. Pour appuyer sa conclusion en ce sens, elle se fonde sur le fait que les sociétés bénéficiaires peuvent opérer sur des marchés internationaux et exercer des activités commerciales ou économiques sur des marchés caractérisés par une concurrence intense. S’agissant des structures de placement, la Commission avance qu’elles sont en concurrence avec d’autres entreprises financières et opèrent sur un marché ouvert caractérisé par d’importants échanges communautaires. Quant aux sociétés à capitalisation faible ou moyenne, au moins certaines d’entre elles seraient actives dans des secteurs dans lesquels il y a des échanges entre les États membres.

157    Ces constatations suffisent, en application de la jurisprudence citée aux points 153 et 154 ci-dessus, à étayer la conclusion de la Commission sur l’incidence de la mesure en cause sur les échanges intracommunautaires et sur la concurrence.

158    Or, si la République italienne met en avant, du reste à tort ainsi qu’il a déjà été exposé aux points 78 à 86 ci-dessus, le caractère général des affirmations de la Commission en la matière, elle n’apporte aucun élément de nature à remettre en cause le bien-fondé de ces affirmations.

159     Ainsi, elle ne conteste pas que les structures de placement sont en concurrence avec d’autres entreprises financières et opèrent sur un marché ouvert caractérisé par d’importants échanges intracommunautaires.

160    Dans le cas des sociétés à capitalisation faible ou moyenne, la République italienne fait certes valoir que, en admettant que certaines d’entre elles sont actives dans des secteurs connaissant des échanges intracommunautaires, la Commission reconnaît en même temps que d’autres pourraient au contraire n’opérer que sur le marché national. À cet égard, il y a toutefois lieu de renvoyer à la jurisprudence citée au point 54 ci-dessus, dont il résulte que, dans le cas d’un régime d’aides, la Commission peut se borner à étudier les caractéristiques générales du régime en cause, sans être tenue d’examiner chaque cas d’application particulier. Dans le cas d’espèce, la Commission ne devait donc pas démontrer que toutes les sociétés à capitalisation faible ou moyenne étaient actives dans des secteurs connaissant des échanges intracommunautaires.

161    Le cinquième moyen tiré d’une violation de l’article 87 CE en ce qui concerne l’incidence de la mesure en cause sur les échanges intracommunautaires et sur la concurrence doit dès lors être rejeté.

162    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par le coût fiscal limité de la mesure en cause en 2004 ainsi qu’il résulte de la jurisprudence citée aux points 154 et 155 ci-dessus.

163    Il ressort par ailleurs de la jurisprudence citée aux points 153 et 154 que la distinction que la République italienne tente de faire entre aides au fonctionnement et aides de portée structurelle est dépourvue de pertinence aux fins du présent moyen. En effet, tout octroi d’aides à une entreprise qui exerce ses activités sur le marché communautaire est susceptible de causer des distorsions de concurrence et d’affecter les échanges entre États membres (arrêt Diputación Foral de Álava e.a./Commission, point 126 supra, point 72).

D –  Sur l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun

1.     Arguments des parties

164    Selon la République italienne, la Commission s’est bornée à fonder l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun sur sa qualité d’aide au fonctionnement. Une telle motivation serait erronée au regard de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE. Il ne s’agirait pas d’un argument nouveau par rapport à la phase précontentieuse, dès lors que le gouvernement italien aurait toujours soutenu que la mesure en cause était justifiée, compte tenu de sa finalité de politique économique.

165    La République italienne considère, en premier lieu, que, à supposer même que la mesure en cause constitue une aide au fonctionnement, elle ne serait pas, en tant que telle, exclue du champ d’application de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE. Elle se réfère plus particulièrement à la décision n° 2000/410/CE de la Commission, du 22 décembre 1999, concernant le régime d’aide que la France envisageait de mettre à exécution en faveur du secteur portuaire français (JO 2000 L 155, p. 52), et observe que la Commission y avait admis la légalité d’une aide au fonctionnement à la lumière d’un certain nombre de circonstances, dont l’impact économique limité de l’aide, le fait que les bénéficiaires étaient des petites et moyennes entreprises et l’absence d’objections de la part des tiers intéressés. Or, ces circonstances seraient également présentes en l’espèce.

166    En deuxième lieu, la République italienne fait valoir que la mesure en cause constitue en toute hypothèse une aide à l’investissement, puisque la cotation en Bourse comporte des dépenses à effet durable, c’est-à-dire des investissements.

167    En troisième lieu, l’objectif poursuivi par la mesure en cause, à savoir augmenter la capitalisation des sociétés cotées, constituerait un objectif spécifique de politique économique susceptible de relever des dispositions de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE.

168    La Commission conteste les arguments de la République italienne.

2.     Appréciation du Tribunal

a)     Sur la recevabilité du présent moyen

169    S’agissant de déterminer, d’une part, si le bénéficiaire d’une aide peut se prévaloir de faits et de documents qui n’auraient pas été portés à la connaissance de la Commission préalablement à l’adoption de sa décision et, d’autre part, si des moyens fondés sur de tels faits et documents sont recevables, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre d’un recours en annulation introduit en vertu de l’article 230 CE, la légalité d’un acte communautaire doit être appréciée en fonction des éléments d’information existant à la date où l’acte a été adopté. En particulier, les appréciations complexes portées par la Commission ne doivent être examinées qu’en fonction des seuls éléments dont celle-ci disposait au moment où elle les a effectuées. À cet égard, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte d’éventuels éléments d’information qui auraient pu lui être présentés pendant la procédure administrative, mais qui ne l’ont pas été, la Commission n’étant pas dans l’obligation d’examiner d’office et par supputation quels sont les éléments qui auraient pu lui être soumis (voir arrêt du Tribunal du 23 novembre 2006, Ter Lembeek/Commission, T‑217/02, Rec. p. II‑4483, points 82 et 83, et la jurisprudence citée).

170    Le Tribunal en a déduit qu’un requérant, lorsqu’il a participé à la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE, ne saurait être recevable à se prévaloir d’arguments factuels inconnus de la Commission et qu’il n’aurait pas signalés à celle-ci au cours de la procédure formelle d’examen. En revanche, rien n’empêche l’intéressé de développer à l’encontre de la décision finale un moyen juridique non soulevé au stade de la procédure administrative (voir arrêt Ter Lembeek/Commission, point 169 supra, point 84, et la jurisprudence citée).

171    Dès lors, la République italienne ne saurait se prévaloir à ce stade d’éléments factuels inconnus de la Commission lors de l’adoption de sa décision et qu’elle n’a pas signalés à celle-ci au cours de la procédure d’examen. Toutefois, rien ne l’empêche d’invoquer, dans le cadre du présent recours, la violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, même si elle n’avait pas explicitement contesté l’appréciation de la Commission dans la décision d’ouverture d’examen relativement à l’inapplication des dérogations prévues à l’article 87, paragraphes 2 et 3, CE.

172    La République italienne est donc recevable à invoquer la violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE.

b)     Sur le fond du présent moyen

173    Il y a lieu de rappeler que la Commission jouit, pour l’application de l’article 87, paragraphe 3, CE, d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice implique des évaluations complexes d’ordre économique et social qui doivent être effectuées dans un contexte communautaire. Le contrôle juridictionnel appliqué à l’exercice de ce pouvoir d’appréciation se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation ainsi qu’au contrôle de l’exactitude matérielle des faits retenus et de l’absence d’erreur de droit, d’erreur manifeste dans l’appréciation des faits ou de détournement de pouvoir (voir arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑372/97, Rec. p. I‑3679, point 83, et la jurisprudence citée).

174    Par ailleurs, c’est dans le seul cadre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE que doit être appréciée la légalité d’une décision de la Commission constatant qu’une aide nouvelle ne répond pas aux conditions d’application de cette dérogation et non au regard d’une pratique décisionnelle antérieure de la Commission, à supposer celle-ci établie (voir arrêt de la Cour du 30 septembre 2003, Freistaat Sachsen e.a./Commission, C‑57/00 P et C‑61/00 P, Rec. p. I‑9975, points 52 et 53, et arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Regione autonoma della Sardegna/Commission, T‑171/02, Rec. p. II‑2123, point 177).

175    Il ressort du considérant 55 de la décision attaquée que, pour conclure à la qualification de la mesure en cause d’aide au fonctionnement ne relevant pas de la dérogation prévue à l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, et donc incompatible avec le marché commun, la Commission s’est appuyée, en premier lieu, sur le fait que les allégements fiscaux accordés par ladite mesure ne sont ni liés ni proportionnés à des investissements spécifiques, à la création d’emplois ou à des projets spécifiques qui contribueraient à favoriser le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques.

176    Or, une telle constatation ne saurait être considérée comme entachée d’une erreur manifeste d’appréciation. En effet, la mesure en cause ne vise pas à favoriser le développement d’une activité ou d’une région économique, mais de manière générale, sans limite ni lien de proportionnalité particulier, les investissements dans certaines structures de placement.

177    En second lieu, la Commission se réfère à cet égard, toujours dans le considérant 55 de la décision attaquée, à sa communication intitulée « Aides d’État et capital-investissement » (voir point 89 ci-dessus). Elle considère que les investissements bénéficiant des allégements ont pour objet des sociétés cotées sur un marché réglementé et que les autorités italiennes n’ont pas démontré que ces sociétés ne bénéficient pas d’un accès aux financements par actions et qu’elles sont exposées, pour rassembler des capitaux, à des coûts plus élevés que les autres sociétés.

178    Or, s’il est vrai que les autorités italiennes ont fait valoir que la mesure en cause vise à promouvoir la capitalisation de marché des sociétés à capitalisation faible ou moyenne, elles n’ont pas fourni d’éléments propres à démontrer l’existence d’une défaillance du marché à leur égard que la mesure en cause viendrait pallier de façon proportionnée [voir points VI.6 et VIII.3 de la communication « Aides d’État et capital-investissement », (voir point 89 ci-dessus)]. Elles se sont contentées d’affirmer qu’il est notoire que les investisseurs collectifs se tournent de préférence vers des sociétés cotées à forte capitalisation plutôt que vers les sociétés à capitalisation faible ou moyenne, qui offrent une moindre garantie de bénéfices. À l’audience, la République italienne a ajouté que les investisseurs disposent de moins d’informations sur ces dernières, ce qui peut se traduire par des coûts de placement et des commissions de gestion supérieurs. Elle n’a toutefois produit aucun document de nature à étayer ses affirmations. Il convient de rappeler à cet égard que la Commission n’avait pas l’obligation d’examiner d’office et par supputation les éléments qui auraient pu lui être soumis par les autorités italiennes (arrêt du Tribunal du 14 décembre 2005, Regione autonoma della Sardegna/Commission, T‑200/04, non publié au Recueil, point 52).

179    À cet égard, il convient d’ajouter que le seul fait que la mesure en cause vise à augmenter la capitalisation de marché des sociétés à capitalisation faible ou moyenne et soit présentée par les autorités italiennes comme un objectif de politique économique nationale ne saurait suffire à la faire relever de la dérogation prévue à l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE. Ce dernier pose en effet comme double condition à son application que les aides en cause soient destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques et qu’elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun. Or, comme le Tribunal l’a constaté, ces conditions ne sont pas remplies en l’espèce.

180    Dans l’examen de ce second aspect de la mesure en cause, la Commission n’a dès lors pas non plus commis d’erreur manifeste d’appréciation.

181    La Commission pouvait donc, sur la base de ces éléments, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, écarter la qualification de la mesure en cause d’aide à l’investissement relevant de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE.

182    Il reste cependant à examiner la qualification d’aide au fonctionnement de la mesure en cause. En effet, la Commission conclut son examen, au considérant 55 de la décision attaquée, en affirmant que les avantages accordés par la mesure en cause réduisent les charges que les bénéficiaires devraient normalement supporter dans le cours de leurs activités économiques et qu’ils doivent par conséquent être considérés comme des aides d’État au fonctionnement qui, selon la pratique et la jurisprudence, sont incompatibles avec le marché commun.

183    À cet égard, la mesure en cause, en réduisant l’impôt qui frappe certains de leurs placements, réduit incontestablement les charges que devraient normalement supporter les investisseurs concernés.

184    Toutefois, la République italienne conteste la qualification d’aide au fonctionnement à l’égard des structures de placement spécialisées et des sociétés à capitalisation faible ou moyenne, visées par la décision attaquée en leur qualité de bénéficiaires indirects de la mesure en cause.

185    S’agissant des structures de placement spécialisées, elle fait valoir que l’impôt de substitution n’est pas un coût de gestion qui est à leur charge puisqu’il est prélevé sous la forme de retenue du résultat de gestion, c’est-à-dire qu’il est nécessairement à la charge des souscripteurs.

186    Pour ce qui concerne les sociétés à capitalisation faible ou réduite, il ne s’agirait pas d’aides à la gestion courante, mais de mesures de portée structurelle, puisqu’elles visent le renforcement patrimonial de cette catégorie de sociétés.

187    Il ressort cependant de la décision attaquée que tant les structures de placement spécialisées (considérant 36) que les sociétés à capitalisation faible ou moyenne (considérant 42) retirent de la mesure en cause une augmentation de leurs liquidités, sous la forme, pour les premières, d’une augmentation de leurs commissions de gestion et de souscription et, pour les secondes, d’une augmentation de la demande de leurs actions.

188    Le Tribunal constate que la mesure en cause n’implique aucune modification technique ou structurelle des entreprises bénéficiaires et ne favorise aucun développement desdites entreprises autre qu’exclusivement commercial (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 juin 1995, Siemens/Commission, T‑459/93, Rec. p. II‑1675, point 57).

189    Dès lors, s’il est vrai que, comme l’affirment les autorités italiennes, l’impôt de substitution ne constitue pas un coût de gestion qui est à la charge des structures de placement spécialisées ou des sociétés à capitalisation faible ou moyenne, la mesure en cause n’en constitue pas moins, indirectement, une aide au fonctionnement de ces dernières.

190    Or, les aides au fonctionnement ne relèvent en principe pas du champ d’application de l’article 87, paragraphe 3, CE.

191    En effet, selon la jurisprudence, ces aides, en principe, faussent les conditions de concurrence dans les secteurs où elles sont octroyées sans pour autant être capables, par leur nature même, d’atteindre un des buts fixés par les dispositions dérogatoires susmentionnées (voir, en ce sens, arrêt Siemens/Commission, point 188 supra, point 48, et la jurisprudence citée).

192    La Commission n’a donc pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que la mesure en cause constitue une aide au fonctionnement incompatible avec le marché commun. La mesure en cause ne répond pas aux conditions d’application de la dérogation prévue à l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE, sans que cette constatation puisse être remise en cause par la pratique décisionnelle antérieure de la Commission, à supposer celle-ci établie (voir, en ce sens, la jurisprudence citée au point 174 ci-dessus).

193    Il convient par conséquent de rejeter la branche du sixième moyen tirée de la violation de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE.

194    Sur la base de l’ensemble de ces considérations, aucun des moyens invoqués par la République italienne ne pouvant être accueilli, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

195    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République italienne ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La République italienne est condamnée aux dépens.

Vilaras

Dehousse

Šváby

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 4 mars 2009.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Mesure en cause

Procédure administrative

Décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

Sur le fond

I – Sur le premier moyen, pris, en substance, d’une violation du principe du contradictoire

A – Arguments des parties

B – Appréciation du Tribunal

II – Sur le défaut de motivation

A – Arguments des parties

1. Sur le défaut de motivation affectant la qualification d’entreprises des structures de placement spécialisées

2. Sur le défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’existence d’un avantage en faveur des sociétés à capitalisation faible ou moyenne, à l’incidence de la mesure en cause sur les échanges intracommunautaires et la concurrence et à l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun

B – Appréciation du Tribunal

1. Sur le défaut de motivation affectant la qualification d’entreprises des structures de placement spécialisées

2. Sur le défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’existence d’un avantage en faveur des sociétés à capitalisation faible ou moyenne

3. Sur le défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’incidence de la mesure en cause sur la concurrence et sur les échanges intracommunautaires

4. Sur le défaut de motivation de la décision attaquée quant à l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun

III – Sur la violation de l’article 87 CE

A – Sur la sélectivité de l’avantage octroyé aux structures de placement spécialisées

1. Arguments des parties

2. Appréciation du Tribunal

a) Sur la première branche du troisième moyen, relative à l’existence d’un avantage accordé aux structures de placement spécialisées

b) Sur la seconde branche du troisième moyen, relative à la sélectivité de l’avantage octroyé aux structures de placement spécialisées

B – Sur l’existence d’un avantage sélectif en faveur des sociétés à capitalisation faible ou moyenne

1. Arguments des parties

2. Appréciation du Tribunal

C – Sur l’incidence de la mesure en cause sur les échanges intracommunautaires et la concurrence

1. Arguments des parties

2. Appréciation du Tribunal

D – Sur l’incompatibilité de la mesure en cause avec le marché commun

1. Arguments des parties

2. Appréciation du Tribunal

a) Sur la recevabilité du présent moyen

b) Sur le fond du présent moyen

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’italien.