Language of document : ECLI:EU:F:2013:111

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

2 juillet 2013 (*)

« Fonction publique – Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire F‑64/12 DEP,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens récupérables au titre de l’article 92 du règlement de procédure,

Guillermo Martinez Erades, fonctionnaire du Service européen pour l’action extérieure, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me M. Casado García-Hirschfeld, avocat,

partie requérante,

contre

Service européen pour l’action extérieure (SEAE), représenté par Mme R. Metsola et M. S. Marquardt, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre),

composé de MM. S. Van Raepenbusch, président, R. Barents et K. Bradley (rapporteur), juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1        Par acte parvenu au greffe du Tribunal le 30 novembre 2012, M. Martinez Erades a saisi le Tribunal de la présente demande de taxation des dépens au titre de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure.

 Faits à l’origine du litige

2        Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 21 juin 2012 et enregistrée sous la référence F‑64/12, le requérant a demandé l’annulation de la décision du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) du 15 novembre 2011 de ne pas l’inclure sur la liste des fonctionnaires promus au grade AD 6 au titre de l’exercice de promotion 2011, ainsi que la condamnation du SEAE à lui verser la somme de 6 000 euros en réparation du préjudice moral et professionnel subi.

3        Par courrier parvenu au greffe du Tribunal le 4 octobre 2012, le requérant a informé le Tribunal qu’il renonçait à l’instance en raison d’un accord intervenu entre les parties et portant également sur la charge des dépens.

4        Par courrier électronique du 10 octobre 2012, le conseil du requérant a demandé au SEAE de lui rembourser la somme forfaitaire de 7 500 euros. Il ressort de cette lettre que le montant réclamé reflète un accord entre le requérant et son conseil pour les services prestés par ce dernier « jusqu’au dépôt/réception du mémoire en défense ». Ce montant forfaitaire inclut « les prestations d’analyse et [la] préparation du dossier ; la recherche et [la] préparation de la requête ; [le] dépôt de la requête et [les] éventuelles communications avec le Tribunal suite au dépôt de la requête ». Le montant indiqué était majoré de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la « TVA ») au taux de 21 %, pour un total de 9 075 euros.

5        Par lettre du 16 octobre 2012, le SEAE a répondu au conseil du requérant qu’il estimait que le montant des frais remboursables ne devait pas dépasser 4 000 euros, TVA comprise, correspondant à 20 heures de travail rémunérées au taux de 180 euros par heure et à 400 euros pour les frais généraux.

6        L’acte de désistement du requérant a été communiqué au SEAE, lequel, par lettre du 22 octobre 2012, d’une part, a confirmé l’existence de l’accord dans les termes exposés par le requérant et, d’autre part, a indiqué au Tribunal que les parties n’étaient pas parvenues à s’entendre sur le montant des dépens et a demandé au Tribunal de statuer sur les dépens en application de l’article 69, paragraphe 3, du règlement de procédure.

7        Par ordonnance du 14 novembre 2012, le Tribunal a radié l’affaire F‑64/12 du registre du Tribunal en application de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure.

8        En outre, le Tribunal a constaté que les parties étaient parvenues à un accord sur la charge des dépens, sans toutefois en préciser le montant. Par conséquent, le Tribunal a décidé que « les parties supportent les dépens selon les termes de l’accord intervenu entre elles ».

9        Par lettre du 16 novembre 2012, le conseil du requérant a rappelé au SEAE qu’un accord quant au partage des dépens avait été conclu. Il ressort du dossier que, aux termes de cet accord, le SEAE s’engageait à prendre « en charge l’ensemble des frais juridiques du requérant jusqu’au [1er octobre 2012] ».

10      Par lettre du 21 novembre 2012, le SEAE a répondu que le total des dépens réclamé de 9 075 euros était excessif et a invité le requérant à introduire une demande de taxation des dépens.

 Conclusions des parties

11      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        fixer à 7 500 euros (hors TVA) le montant des dépens dû par le SEAE au titre de l’affaire F‑64/12 ;

–        fixer à 900 euros le montant des dépens dû par le SEAE au titre de la présente procédure de taxation des dépens.

12      Le SEAE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        fixer à 4 000 euros (hors TVA) le montant des dépens dans l’affaire F‑64/12.

 En droit

 Arguments des parties

13      Le requérant demande pour les honoraires de son conseil la somme forfaitaire de 7 500 euros (hors TVA) majorée de 1 575 euros au titre de la TVA au taux de 21 %. Cette somme résulterait d’un accord entre le requérant et son conseil sur un tarif forfaitaire correspondant à 40 heures de travail avec un tarif horaire de 180 euros, et comprenant des frais évalués forfaitairement à 300 euros.

14      Le requérant estime que le litige au principal soulevait des questions juridiques importantes, concernant un dossier de promotion dans un nouveau service qui suit « des dispositions générales d’exécution internes assez complexes, disperses et tout à fait nouvelles », et que le travail d’étude de ces dispositions ainsi que celui de la reconstitution de sa carrière auraient été « laborieux », s’agissant de sa première promotion.

15      Le SEAE conteste ces arguments en soulignant que la facture présentée par le requérant n’était pas détaillée et que le litige ne présentait pas de difficultés particulières. Toutefois, le SEAE précise que, contrairement à ce qu’il avait indiqué avant l’introduction de la présente demande, le montant de 4 000 euros qu’il est disposé à verser au requérant doit être compris « [hors] TVA ».

 Appréciation du Tribunal

 Observations préliminaires

16      En premier lieu, aux termes de l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme des dépens récupérables « les frais exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération du représentant, s’ils sont indispensables ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui étaient indispensables à ces fins (ordonnance du Tribunal du 8 novembre 2011, U/Parlement, F‑92/09 DEP, point 37, et la jurisprudence citée).

17      En deuxième lieu, il ressort d’une jurisprudence constante que le juge de l’Union n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces rémunérations peuvent être récupérées auprès de la partie qui doit supporter les dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le juge de l’Union n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (ordonnance U/Parlement, précitée, point 38, et la jurisprudence citée).

18      En troisième lieu, il est également de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions de nature tarifaire dans le droit de l’Union, le juge doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu nécessiter de la part des agents ou conseils qui sont intervenus et des intérêts économiques que le litige a représentés pour les parties (ordonnance U/Parlement, précitée, point 39, et la jurisprudence citée).

19      C’est en fonction de ces considérations qu’il convient d’évaluer le montant des dépens récupérables en l’espèce.

 Sur les dépens récupérables

20      Le Tribunal rappelle d’emblée qu’il appartient au requérant de produire des justificatifs de nature à établir la réalité des frais dont il demande le remboursement (ordonnances du Tribunal du 10 novembre 2009, X/Parlement, F‑14/08 DEP, point 21, et U/Parlement, précitée, point 37). Il est constant que, dans le cas d’espèce, le requérant ne s’est pas conformé à cette exigence.

21      Toutefois, il peut être déduit de ce que l’avocat du requérant a introduit la requête et déposé un acte de désistement suite à un accord intervenu entre les parties que cet avocat a bien effectué des actes et prestations nécessaires aux fins de la procédure devant le Tribunal (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 22 mars 2012, Brune/Commission, F‑5/08 DEP, point 19). Dans ces circonstances, le Tribunal peut déterminer à concurrence de quel montant les frais dont le paiement est réclamé par l’avocat d’une partie peuvent être récupérés auprès de la partie qui supporte les dépens.

22      En l’espèce, s’agissant des conditions tenant à la nature et à l’objet du litige et aux difficultés de la cause, il doit être relevé que l’affaire apparaissait de par sa nature et son objet comme une affaire de fonction publique sans difficulté particulière, en ce que le requérant demandait l’annulation de la décision de ne pas le promouvoir au grade AD 6 pour l’année 2011 en raison, en substance, d’une erreur manifeste d’appréciation de l’autorité investie du pouvoir de nomination dans la prise en compte des éléments indiqués à l’article 45 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne. Le fait que l’affaire au principal concernait un nouveau service ne saurait remettre en cause cette appréciation, compte tenu du fait qu’il ressort du dossier que l’exercice de promotion 2011 s’est déroulé, pour les agents du Conseil de l’Union européenne qui, comme le requérant, avaient été transférés au SEAE le 1er janvier 2011, selon les mêmes critères que ceux appliqués par le secrétariat général du Conseil. En outre, le requérant n’a pas démontré en quoi le fait qu’il s’agissait dans son cas d’une première promotion aurait constitué une difficulté particulière s’agissant de la reconstruction de sa carrière.

23      En ce qui concerne l’intérêt économique du litige pour le requérant, il y a lieu de constater que la décision contestée refusant de le promouvoir au titre de l’exercice de promotion 2011 a eu des conséquences financières relativement limitées, dans la mesure où la conséquence qui en a découlé est un retard d’une année dans sa première promotion (ordonnance du Tribunal du 26 avril 2010, Schönberger/Parlement, F‑7/08 DEP, point 31).

24      Pour ce qui est de l’ampleur du travail nécessité par la procédure devant le Tribunal, il appartient au juge de tenir compte du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de cette procédure (ordonnance Schönberger/Parlement, précitée, point 29).

25      En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que la procédure a comporté l’analyse et la préparation du dossier, ainsi que la rédaction de la requête.

26      Ainsi, dans les circonstances de l’espèce, eu égard à la difficulté de la cause et à l’ampleur du travail nécessité par la procédure, il sera fait une juste appréciation du nombre d’heures de travail objectivement indispensables aux fins de la procédure en le fixant à 30 heures.

27      En ce qui concerne, en dernier lieu, le tarif horaire de 180 euros, ce dernier ne semble pas déraisonnable eu égard au tarif horaire moyen pratiqué dans d’autres affaires du même type que l’affaire au principal.

28      En outre, c’est à bon droit que le requérant fait valoir que, au titre des dépens récupérables, il aurait droit au paiement des honoraires, TVA comprise, que le Tribunal considère comme exposés aux fins de la procédure, pour autant que la TVA soit due sur les services de son avocat. En effet, le requérant n’étant pas assujetti à cette taxe, il ne dispose pas de la possibilité de récupérer la TVA éventuellement payée sur les services facturés par son avocat (ordonnance du Tribunal de première instance du 8 juillet 2004, De Nicola/BEI, T‑7/98 DEP, T‑208/98 DEP et T‑109/99 DEP, point 37 ; ordonnance du Tribunal du 25 octobre 2012, Missir Mamachi di Lusignano/Commission, F‑50/09 DEP, point 31). Ainsi, la TVA éventuellement payée sur les honoraires jugés indispensables représente pour le requérant des frais exposés aux fins de la procédure au sens de l’article 91, sous b), du règlement de procédure.

29      Par conséquent, au vu de ce qui précède, il convient de fixer le montant des dépens que le SEAE devra rembourser au requérant au titre des honoraires d’avocat à 5 400 euros, à majorer de la TVA éventuellement due sur cette somme (ordonnances du Tribunal de première instance du 25 février 1992, Tagaras/Cour de justice, T‑18/89 DEP et T‑24/89 DEP, point 14, et du 5 juillet 1993, Meskens/Parlement, T‑84/91 DEP, point 14).

 Sur les autres frais liés à la procédure principale

30      Le requérant demande le remboursement d’un montant forfaitaire de 300 euros au titre des frais généraux. À cet égard, il y a lieu de relever que, si le requérant ne produit pas les factures afférentes à ces frais, ces derniers n’apparaissent pas excessifs, dès lors que leur montant, ajouté à celui des frais pour travaux de bureau, ne dépasse pas 5 % des honoraires récupérables (ordonnance Brune/Commission, précitée, point 38, et la jurisprudence citée).

31      Il y a donc lieu de fixer le montant total des frais généraux exposés par l’avocat du requérant aux fins de la procédure au principal à 300 euros, à majorer de la TVA éventuellement due sur cette somme.

32      Il résulte de ce qui précède que le montant total des dépens récupérables par le requérant s’élève à 5 700 euros, à majorer de la TVA éventuellement due sur cette somme.

 Sur les frais engagés au titre de la procédure de taxation des dépens

33      L’article 92 du règlement de procédure relatif à la procédure de contestation sur les dépens ne prévoit pas, à la différence de l’article 86 dudit règlement, qu’il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance. En effet, si, en vertu de l’article 92 du règlement de procédure, le Tribunal statuait sur la contestation des dépens d’une instance principale et, séparément, sur les nouveaux dépens exposés dans le cadre de cette dernière contestation, il pourrait, le cas échéant, être saisi ultérieurement d’une nouvelle contestation des nouveaux dépens.

34      Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer séparément sur les frais et honoraires exposés aux fins de la présente procédure (ordonnance du Tribunal du 12 décembre 2012, Kerstens/Commission, F‑12/10 DEP, point 49).

35      Néanmoins, il appartient au Tribunal, lorsqu’il fixe les dépens récupérables, de tenir compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’au moment de l’adoption de l’ordonnance de taxation des dépens (ordonnance U/Parlement, précitée, point 65).

36      En l’espèce, les parties ont conclu un accord à l’amiable portant sur le partage de la charge des dépens sans préciser une limite maximale du montant remboursable des dépens. C’est l’absence de cet accord qui explique au premier chef le déclenchement de la procédure de taxation des dépens.

37      En outre, il y a lieu de constater que la demande initiale de remboursement des dépens présentée par le requérant était excessive et qu’elle l’est demeurée. Toutefois, le SEAE n’a pas demandé de taxer les dépens dus par le requérant au titre de la présente procédure.

38      Dans ces conditions, il convient de décider que chaque partie supportera ses propres dépens au titre de la présente procédure de taxation des dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre)

ordonne :

1)      Le montant des dépens récupérables par M. Martinez Erades auprès du Service européen pour l’action extérieure au titre de l’affaire F‑64/12 s’élève à 5 700 euros, à majorer de la TVA éventuellement due sur cette somme.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens engagés au titre de la présente procédure de taxation des dépens.

Fait à Luxembourg, le 2 juillet 2013.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       S. Van Raepenbusch


* Langue de procédure : le français.