Language of document : ECLI:EU:T:2010:306

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

9 juillet 2010 (*)

« Référé – Aides d’État –Tarifs préférentiels de fourniture d’électricité – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché commun et ordonnant sa récupération – Demande de sursis à exécution – Défaut d’urgence »

Dans l’affaire T‑177/10 R,

Alcoa Trasformazioni Srl, établie à Portoscuso (Italie), représentée par Mes M. Siragusa, T. Müller-Ibold et F. Salerno, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. V. Di Bucci et É. Gippini Fournier, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de sursis à l’exécution de la décision C (2009) 8112 final de la Commission, du 19 novembre 2009, relative aux aides d’État C 38/A/2004 (ex NN 58/2004) et C 36/B/2006 (ex NN 38/2006), mises à exécution par la République italienne en faveur d’Alcoa Trasformazioni,


LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        La requérante, Alcoa Trasformazioni Srl, est une société de droit italien qui appartient au groupe américain Alcoa. Elle est entièrement contrôlée par une autre société italienne, Alcoa Servizi Srl. Alcoa Inversiones España, SL détient l’ensemble des actions d’Alcoa Servizi. Alcoa Inversiones, à son tour, est entièrement contrôlée par Alcoa Luxembourg Sàrl, qui détient 100 % de ses actions. La société mère d’Alcoa Luxembourg est Alcoa International Holdings Co., société de droit du Delaware (États-Unis), elle-même entièrement contrôlée par Alcoa Inc.

2        La requérante est propriétaire de deux usines produisant de l’aluminium primaire, implantées à Portovesme, en Sardaigne, et à Fusina, en Vénétie, cette dernière ayant été fermée en mai 2010. Ces usines avaient été cédées à la requérante par Alumix SpA dans le cadre de la privatisation de cette dernière.

3        Dans la décision 96/C 288/04 notifiée à la République italienne et publiée le 1er octobre 1996 (ci-après la « décision Alumix »), la Commission des Communautés européennes, après avoir examiné différentes mesures octroyées à Alumix lors de sa privatisation, dont l’octroi d’un tarif d’électricité préférentiel consenti par l’Entente nazionale per l’energia elettrica (ENEL), alors un organisme producteur d’électricité public, aux usines acquises par la requérante, a conclu, s’agissant dudit tarif, qui était applicable jusqu’au 31 décembre 2005, qu’il ne constituait pas une aide d’État, puisque, en facturant un tarif pour la production d’aluminium primaire qui couvre les coûts variables et qui contribue aux coûts fixes (ci-après le « tarif Alumix »), l’ENEL « se comport[ait] [en opérateur agissant dans des conditions normales de marché] dès lors que ces tarifs permett[ai]ent de fournir de l’électricité à ses clients industriels les plus importants dans des régions où il exist[ait] une surcapacité importante en termes de production électrique ».

4        Au cours des années qui ont immédiatement suivi l’adoption de la décision Alumix, le système électrique italien a été restructuré dans la perspective de la libéralisation progressive du marché communautaire de l’électricité.

5        Tout d’abord, après sa privatisation, l’ENEL facturait à la requérante le prix plein ordinairement pratiqué à l’égard des grands clients industriels, tandis que les autres consommateurs d’électricité devaient fournir les fonds nécessaires pour que la requérante puisse continuer à bénéficier du tarif Alumix. En pratique, la requérante se voyait appliquer le prix plein, mais bénéficiait d’une remise directe à la facturation. L’ENEL finançait cette remise à l’aide des recettes tirées d’une nouvelle taxe parafiscale.

6        Ensuite, la requérante acquittait le prix fixé par contrat avec l’ENEL et recevait a posteriori de la Cassa conguaglio per il settore elettrico (Caisse de péréquation pour le secteur électrique, ci-après la « Caisse de péréquation »), un organisme public, une indemnité compensatoire qui lui permettait, en fait, de continuer à payer le tarif Alumix. Pour la requérante, ce nouveau mécanisme était entré en vigueur en septembre 2004.

7        C’est plus particulièrement par un décret du 6 février 2004 que les pouvoirs publics italiens ont prorogé, jusqu’au 30 juin 2007, le tarif d’électricité préférentiel applicable à la requérante. D’un point de vue économique, le résultat produit par le nouveau système était identique à celui du régime antérieur. C’est ensuite par une loi de 2005 que les autorités italiennes ont prorogé jusqu’en 2010 le tarif préférentiel consenti à la requérante, en introduisant un mécanisme d’indexation. Cette dernière prorogation a fait l’objet de la procédure formelle d’examen C 36/2006, que la Commission a ouverte en 2006 au regard des usines de la requérante sises en Vénétie et en Sardaigne.

8        Dans le cadre de cette procédure formelle, la Commission a envoyé aux autorités italiennes, le 19 janvier 2007, une lettre indiquant sa volonté de trouver une solution permettant de clore le dossier, au moyen de l’introduction en Italie d’un programme de cession de capacité virtuelle (Virtual Power Plant, ci-après le « programme VPP ») en Sardaigne. Ce programme VPP, qui devrait faire baisser les prix pour les consommateurs finaux jusqu’à un niveau proche des coûts variables, est entré en fonction en Sardaigne le 22 octobre 2009.

9        La procédure formelle a abouti à l’adoption, en date du 19 novembre 2009, de la décision C (2009) 8112 final de la Commission, relative aux aides d’État C 38/A/2004 (ex NN 58/2004) et C 36/B/2006 (ex NN 38/2006), mises à exécution par la République italienne en faveur d’Alcoa Trasformazioni (ci-après la « décision attaquée »), dont l’article 1er déclare incompatible avec le marché commun l’aide d’État que la République italienne a illégalement accordée à la requérante à partir du 1er janvier 2006.

10      La Commission considère, dans la décision attaquée, comme dépourvus de pertinence tant l’analyse développée dans la décision Alumix que les calculs fournis par les autorités italiennes et par la requérante afin de démontrer que le tarif préférentiel consenti à celle-ci reste conforme aux critères de la décision Alumix. Selon la Commission, le montant à récupérer correspond à la somme de toutes les indemnités compensatoires versées à la requérante par la Caisse de péréquation.

11      Pour l’usine sise en Vénétie, la décision attaquée prévoit, en son article 2, que la récupération porte sur la période comprise entre le 1er janvier 2006 et la date de son adoption, soit le 19 novembre 2009. Pour l’usine sise en Sardaigne, la Commission ne prévoit qu’un recouvrement partiel, la récupération à effectuer portant sur la période comprise entre le 1er janvier 2006 et le 18 janvier 2007. Sans préciser le montant exact de l’aide à recouvrer, la décision attaquée indique la méthode selon laquelle ce montant doit être calculé.

 Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 avril 2010, la requérante a introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée, qui aurait été portée à sa connaissance le 12 février 2010, dans la mesure où elle concerne l’aide d’État C 36/B/2006 (ex NN 38/2006) que la République italienne lui aurait accordée.

13      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 22 mai 2010, la requérante a introduit la présente demande en référé, dans laquelle elle conclut, en substance, à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        surseoir à l’exécution de la décision attaquée, dans la mesure où elle concerne la prétendue aide d’État C 36/B/2006 (ex NN 38/2006) ;

–        condamner la Commission aux dépens.

14      Dans ses observations écrites déposées au greffe du Tribunal le 9 juin 2010, la Commission conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        rejeter la demande de sursis à exécution ;

–        condamner la requérante aux dépens.

15      Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 8 juillet 2010, la République italienne a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la requérante.

 En droit

16      Il ressort d’une lecture combinée des articles 278 TFUE et 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires.

17      L’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal dispose que les demandes en référé doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence, ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts du requérant, qu’ils soient édictés et produisent leurs effets dès avant la décision sur le recours principal. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30]. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence (ordonnance du président de la Cour du 23 février 2001, Autriche/Conseil, C‑445/00 R, Rec. p. I‑1461, point 73).

18      En outre, dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [ordonnances du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C‑149/95 P(R), Rec. p. I‑2165, point 23, et du 3 avril 2007, Vischim/Commission, C‑459/06 P(R), non publiée au Recueil, point 25].

19      Enfin, il importe de souligner que l’article 278 TFUE pose le principe du caractère non suspensif des recours, les actes adoptés par les institutions, les organes et les organismes de l’Union européenne bénéficiant d’une présomption de légalité. Ce n’est donc qu’à titre exceptionnel que le juge des référés peut ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire des mesures provisoires (voir, en ce sens, ordonnance du président du Tribunal du 17 décembre 2009, Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht/Commission, T‑396/09 R, non publiée au Recueil, point 31, et la jurisprudence citée).

20      Eu égard aux éléments du dossier, le juge des référés estime qu’il dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande en référé, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

 Arguments des parties

 Sur le fumus boni juris

21      La requérante soutient que la décision attaquée est entachée de multiples vices qui justifient son annulation en totalité. Elle dénonce, notamment, une violation des articles 107 TFUE et 108 TFUE, en ce que, premièrement, la Commission considère comme une aide d’État le tarif d’électricité dont elle bénéficie pour ses deux fonderies d’aluminium primaire, sises en Sardaigne et en Vénétie, alors que ce tarif ne lui procure aucun avantage, deuxièmement, le montant de l’aide d’État n’a pas été correctement déterminé, troisièmement, la Commission a considéré erronément que ledit tarif d’électricité constituait une aide au fonctionnement, incompatible avec les lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale (JO 1998, C 74, p. 9), quatrièmement, la Commission a radicalement modifié son appréciation en cours de procédure quant à l’impact de l’introduction en Sardaigne du mécanisme de marché qu’elle avait proposé, sans aucune explication ni préavis, et à l’issue d’un examen présentant des carences, et, cinquièmement, la mesure est qualifiée d’aide nouvelle et non d’aide existante.

22      La Commission s’abstient de prendre position sur le fumus boni juris.

 Sur l’urgence et sur la mise en balance des intérêts

23      La requérante fait valoir que le sursis à l’exécution de la décision attaquée est urgent, dès lors que l’exécution de l’ordre de recouvrement lui causerait inévitablement un préjudice grave et irréparable en mettant en péril son existence même.

24      La requérante chiffre à environ 295 millions d’euros le montant que les autorités italiennes seront tenues de récupérer auprès d’elle pour l’aide d’État versée au regard de ses usines sises en Sardaigne et en Vénétie. Or, elle ne serait pas en mesure de payer un tel montant, car elle ne disposerait pas des liquidités nécessaires. En cas d’exécution de l’ordre de recouvrement, elle serait contrainte de solliciter l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité ou de chercher des voies de droit alternatives pour liquider ses activités, ce qui mettrait un terme à ses activités en Italie.

25      La requérante explique sa situation de surendettement l’empêchant de faire face à l’ordre de recouvrement. Elle rappelle avoir mis en réserve, en 2009, une somme de 158 millions d’euros, en prévision d’une éventuelle décision négative de la Commission en matière d’aides d’État. En déduisant du montant à restituer (295 millions d’euros) le montant déjà mis en réserve (158 millions d’euros), l’obligation de remboursement s’élèverait à 137 millions d’euros, ce qui aurait pour conséquence que le capital de la requérante deviendrait négatif. Conformément à la législation italienne en matière de capital minimal, ses administrateurs seraient alors obligés de la dissoudre, avant même que le Tribunal ait statué sur le fond dans l’affaire principale.

26      Rappelant que le groupe Alcoa a décidé de fermer sa fonderie de Fusina, la requérante ajoute que, si elle était contrainte d’interrompre la production de la fonderie de Portovesme en raison de ses difficultés financières, toutes les usines italiennes seraient définitivement fermées. Pour des raisons d’ordre technique dues à la nature du procédé de production de l’aluminium, une extinction complète, même temporaire, de la fonderie compromettrait la fonctionnalité d’équipements coûteux, de sorte que sa remise en service entraînerait des coûts élevés, de loin supérieurs aux coûts de remise en service typiques d’autres industries.

27      La requérante admet que l’appréciation de l’urgence impose de prendre en considération les caractéristiques du groupe dont elle fait partie, pour déterminer si ce groupe pourrait la soutenir financièrement. Elle souligne, néanmoins, que le groupe Alcoa, auquel elle appartient, n’a aucun intérêt à soutenir financièrement les activités italiennes au-delà du soutien qu’elle leur a déjà fourni jusqu’à présent, notamment en cas d’exécution du recouvrement contesté.

28      La requérante précise que le groupe Alcoa n’a aucun intérêt à préserver les activités italiennes, à moins que l’électricité ne lui soit offerte à des prix compétitifs, ce qui ne serait pas le cas actuellement. Le prix payé pour l’électricité serait un des éléments déterminants de la compétitivité globale d’un site de production d’aluminium, en ce sens que le prix de l’électricité déterminerait quels sites de production peuvent continuer à opérer et quels sont ceux qui, en revanche, doivent fermer. Toutefois, la requérante aurait décidé de poursuivre son activité en Italie et son groupe aurait soutenu ce choix, comme le montrerait la décision d’Alcoa Inversiones, sa société mère au deuxième degré, de fournir des garanties pour que le tarif d’électricité préférentiel puisse encore être accordé en 2009.

29      Pour ce qui est plus particulièrement de son usine à Portovesme, la requérante allègue que des changements réglementaires récents visant à garantir la sécurité de l’approvisionnement en électricité dans les îles majeures (y compris la Sardaigne) – à savoir l’adoption du décret-loi n° 3, du 25 janvier 2010 (GURI n° 20, du 26 janvier 2010), modifié par la loi n° 41, du 22 mars 2010 (GURI n° 72, du 27 mars 2010) – pourraient permettre la poursuite des activités de cette usine, même si ce n’est que pour une période de trois ans. Ces changements devraient toutefois encore être évalués par la Commission au regard des règles relatives au contrôle des aides d’État.

30      En tout état de cause, le groupe Alcoa ne serait nullement obligé de venir en aide aux usines italiennes dans l’hypothèse où l’ordre de recouvrement serait mis à exécution. Cela ne serait pas contredit par le fait que, en 2009, Alcoa Servizi, la société mère contrôlant directement la requérante, a recapitalisé cette dernière en injectant 180 millions d’euros. Cette opération devrait être considérée comme purement « italienne » et destinée principalement à permettre le maintien temporaire des activités de la requérante dans l’attente de l’issue de la présente procédure de référé. En aucun cas Alcoa Servizi n’aurait les moyens de fournir à la requérante le capital nécessaire en cas d’exécution de la décision attaquée.

31      S’agissant des garanties fournies en 2009 par Alcoa Inversiones pour les payements qui étaient dus à l’époque à la Caisse de péréquation à hauteur d’environ 700 millions d’euros (voir point 28 ci-dessus), elles ne feraient naître aucune obligation de recapitalisation de la requérante au sens du droit civil italien. Ces garanties exigées par la Caisse de péréquation concerneraient la restitution des sommes reçues par la requérante au titre de la composante compensatoire du tarif d’électricité préférentiel applicable. La requérante, Alcoa Servizi et Alcoa Inversiones auraient toutefois attaqué cette demande de garanties devant les juridictions administratives italiennes, l’affaire étant actuellement pendante devant le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie). Bien que persuadée de son illégalité, Alcoa Inversiones aurait décidé d’accéder à cette demande afin d’éviter que les usines ne soient contraintes de fermer.

32      En ce qui concerne la mise en balance des intérêts en cause, la requérante estime qu’elle penche en faveur du sursis à l’exécution de la décision attaquée. En effet, alors que l’exécution immédiate de cette dernière aurait des retombées très modestes sur les intérêts généraux de l’Union, son impact pour la requérante serait désastreux, et surtout irréversible, puisque l’arrêt au fond serait rendu après sa liquidation ou sa faillite, c’est-à-dire après sa sortie du marché.

33      D’une part, les autorités italiennes auraient abrogé le tarif d’électricité préférentiel litigieux à dater du 31 décembre 2009, son exécution ayant de facto été interrompue dès la mise en service du programme VPP en octobre 2009 (voir point 8 ci-dessus), ce qui démontrerait la nature transitoire dudit tarif. En effet, un électroduc aurait été mis en service à l’automne 2009 et devrait être opérationnel à la fin de 2010, faisant bénéficier la Sardaigne d’améliorations infrastructurelles significatives. De plus, une loi de 2009 aurait introduit un mécanisme visant à permettre l’acquisition de l’électricité auprès de fournisseurs actifs dans des pays limitrophes, ce qui devrait avoir un impact immédiat sur le prix de l’électricité pratiqué en Italie. L’intérêt général protégé par l’article 108, paragraphe 2, TFUE serait donc déjà garanti, indépendamment de l’exécution de la décision attaquée.

34      En outre, le groupe Alcoa aurait déjà décidé de fermer la fonderie de Fusina, de sorte que tout impact éventuel de celle-ci sur la concurrence serait appelé à disparaître. Quant à la fonderie de Portovesme, le recouvrement se limiterait à l’avantage présumé obtenu en 2006. Or, après quatre années, cet avantage, à supposer qu’il ait existé, n’aurait plus qu’une incidence très modeste sur le marché. Enfin, l’aluminium primaire s’échangerait au niveau mondial et la production italienne ne représenterait que 0,3 % du volume total des échanges. Cette production italienne d’aluminium primaire minime ne pourrait donc avoir aucun impact sur le prix mondial de l’aluminium. Quant au marché de l’aluminium européen, et notamment italien, il connaîtrait un déficit de production chronique, ayant pour corollaire une dépendance coûteuse à l’égard des importations en provenance de pays tiers. Cette dépendance démontrerait que, même si la requérante avait tiré un avantage du tarif d’électricité préférentiel, cet avantage n’aurait servi qu’à soutenir la capacité de production dans l’Union, avec pour seul effet de réduire la dépendance à l’égard des importations en provenance de pays tiers.

35      D’autre part, s’il n’était pas sursis à l’exécution de la décision attaquée, la requérante serait contrainte de se retirer définitivement du marché, avec pour conséquence que bon nombre de ses moyens de production devraient être liquidés, que plus de 2 500 personnes seraient privées de leurs moyens de subsistance et, indirectement, que plusieurs milliers d’autres en souffriraient. Par ailleurs, il serait prévisible que la fermeture de l’usine en Sardaigne s’accompagne de graves tensions sociales, comme le montreraient les événements qui se sont produits au lendemain de la décision attaquée et qui ont même amené le souverain pontife à intervenir pendant l’angélus dominical du 31 janvier 2010, afin de désamorcer les tensions.

36      La Commission conteste l’ensemble des arguments avancés par la requérante pour établir l’urgence. Elle rappelle tout d’abord que le groupe Alcoa a déjà accordé des garanties pour la restitution à la Caisse de péréquation des sommes reçues par la requérante à titre de compensation, ces garanties pouvant couvrir facilement le montant dû au titre de récupération de l’aide, ce qui exclurait tout risque pour l’existence de la requérante. Ensuite, à la lumière de la situation financière du groupe Alcoa, il ne pourrait être question d’une quelconque urgence qui imposerait le sursis à exécution sollicité. Enfin, l’accord conclu le 17 mai 2010 entre Alcoa, le gouvernement italien et les syndicats éliminerait tout risque de cessation d’activités de la requérante. Dans ces circonstances, il ne serait même pas nécessaire de procéder à la mise en balance des intérêts. En tout état de cause, cette mise en balance plaiderait contre le sursis à exécution demandé.

 Appréciation du juge des référés

37      Dans les circonstances du cas d’espèce, il convient d’examiner d’abord si la condition relative à l’urgence est remplie.

38      Selon une jurisprudence constante, le caractère urgent d’une demande en référé doit s’apprécier par rapport à la nécessité qu’il y a de statuer provisoirement afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite les mesures provisoires. C’est à cette dernière partie qu’il appartient d’établir qu’elle ne saurait attendre l’issue de la procédure principale sans avoir à subir un préjudice de cette nature (voir ordonnance du président du Tribunal du 20 janvier 2010, Agriconsulting Europe/Commission, T‑443/09 R, non publiée au Recueil, point 25, et la jurisprudence citée).

39      Pour pouvoir apprécier si le préjudice qu’invoque la partie qui sollicite les mesures provisoires présente un caractère grave et irréparable et justifie, par conséquent, la suspension, à titre exceptionnel, de l’exécution d’une décision, le juge des référés doit disposer d’indications concrètes permettant d’apprécier les conséquences précises qui résulteraient, vraisemblablement, de l’absence des mesures demandées. Il n’est toutefois pas nécessaire que l’imminence du préjudice allégué soit établie avec une certitude absolue, mais il suffit que la réalisation du préjudice soit prévisible avec un degré de probabilité suffisant (voir ordonnance du président du Tribunal du 20 novembre 2008, SIAE/Commission, T‑433/08 R, non publiée au Recueil, point 35, et la jurisprudence citée).

40      En l’espèce, il convient donc d’examiner si la requérante a démontré avec un degré de probabilité suffisant qu’elle subirait un préjudice grave et irréparable si les mesures provisoires qu’elle sollicite nétaient pas ordonnées.

41      À cet égard, il y a lieu de déterminer au préalable l’objet précis de la présente demande en référé et le préjudice allégué.

42      Bien qu’il ressorte du texte de la demande en référé que la requérante sollicite plusieurs fois la suspension de la décision attaquée dans son intégralité, l’ensemble de ses arguments tendant à démontrer l’urgence vise le sursis à l’exécution du seul ordre de recouvrement imposé par l’article 2, paragraphes 1 à 3, de cette décision. En effet, elle soutient, en substance, que c’est à défaut de disposer des liquidités nécessaires pour payer le montant à rembourser qu’elle serait exposée au risque d’insolvabilité, de liquidation et de disparition du marché italien. En revanche, s’agissant de la qualification d’aide d’État du tarif d’électricité préférentiel applicable à la requérante (article 1er de la décision attaquée) et de l’obligation imposée à la République italienne d’annuler les versements futurs de cette aide (article 2, paragraphe 4, de la décision attaquée), la requérante allègue elle-même que le tarif d’électricité en cause a effectivement été abrogé le 31 décembre 2009 par les autorités italiennes et que son exécution avait déjà été interrompue avant l’adoption de la décision attaquée (voir point 33 ci-dessus). Ledit tarif d’électricité n’étant plus applicable, il n’y a aucune urgence pour la requérante à obtenir le sursis à l’exécution de la décision attaquée s’agissant de cette qualification et de cette obligation.

43      En ce qui concerne l’imminence du préjudice allégué, la requérante indique que le groupe Alcoa a déjà décidé de fermer la fonderie de Fusina. Si elle fait valoir que l’exécution de l’ordre de recouvrement imposé par la décision attaquée l’obligerait à abandonner ses activités économiques en Italie, cet argument ne saurait donc viser ses activités à Fusina dans la mesure où le préjudice redouté se serait déjà réalisé par la fermeture de l’usine qui y est sise. En effet, selon une jurisprudence bien établie, la finalité de la procédure de référé n’est pas d’assurer la réparation d’un préjudice déjà subi (ordonnances du président du Tribunal du 27 août 2008, Melli Bank/Conseil, T‑246/08 R, non publiée au Recueil, point 53, et du 8 juin 2009, Dover/Parlement, T‑149/09 R, non publiée au Recueil, point 37).

44      Par conséquent, le préjudice que la requérante craint de subir en cas d’exécution de l’ordre de recouvrement ne peut consister qu’en la fermeture de son usine de Portovesme.

45      S’agissant de la portée de l’ordre de recouvrement litigieux, la requérante précise que son obligation de remboursement s’élève – après déduction du montant mis en réserve (158 millions d’euros) du montant à restituer (295 millions d’euros) – à la somme de 137 millions d’euros, majorée d’éventuels intérêts de retard à calculer conformément à l’article 2, paragraphes 2 et 3, de la décision attaquée.

46      Force est donc de constater que le préjudice immédiat invoqué par la requérante en l’espèce a un caractère purement financier, en ce qu’il consiste en une somme d’argent qu’elle devrait rembourser à la République italienne, les conséquences entraînées par la prétendue fermeture de l’usine de Portovesme étant sans incidence sur cette qualification.

47      Or, il est de jurisprudence constante qu’un préjudice d’ordre purement financier ne peut, sauf circonstances exceptionnelles, être regardé comme irréparable ou même difficilement réparable, dès lors qu’il peut normalement faire l’objet d’une compensation financière ultérieure [ordonnance du président de la Cour du 11 avril 2001, Commission/Cambridge Healthcare Supplies, C‑471/00 P(R), Rec. p. I‑2865, point 113, et ordonnance du président du Tribunal du 15 juin 2001, Bactria/Commission, T‑339/00 R, Rec. p. II‑1721, point 94].

48      En présence d’un risque de préjudice purement financier, la mesure provisoire sollicitée ne se justifie que s’il apparaît que, en l’absence d’une telle mesure, le requérant se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril son existence avant l’intervention de l’arrêt mettant fin à la procédure principale (ordonnance du président du Tribunal du 3 décembre 2002, Neue Erba Lautex/Commission, T‑181/02 R, Rec. p. II‑5081, point 84).

49      Il a cependant été jugé que même l’insolvabilité éventuelle d’une société n’impliquait pas nécessairement que la condition relative à l’urgence soit remplie. En effet, l’appréciation de la situation matérielle d’une société doit prendre en considération, notamment, les caractéristiques du groupe auquel elle se rattache par son actionnariat (ordonnance du président du Tribunal du 2 mai 2007, IPK International – World Tourism Marketing Consultants/Commission, T‑297/05 R, non publiée au Recueil, point 59 ; voir également, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 7 mars 1995, Transacciones Marítimas e.a./Commission, C‑12/95 P, Rec. p. I‑467, point 12), ce qui peut amener le juge des référés à estimer que la condition de l’urgence n’est pas remplie malgré l’état d’insolvabilité prévisible de la société [voir ordonnance du président de la Cour du 18 octobre 2002, Commission/Technische Glaswerke Ilmenau, C‑232/02 P(R), Rec. p. I‑8977, point 56, et la jurisprudence citée].

50      Dans ce contexte, il s’agit d’apprécier si le préjudice allégué peut être qualifié de grave et irréparable au regard, notamment, de la taille et du chiffre d’affaires de la requérante ainsi que des caractéristiques du groupe auquel elle appartient [voir, en ce sens, ordonnances du président de la Cour du 23 mai 1990, Comos-Tank e.a./Commission, C‑51/90 R et C‑59/90 R, Rec. p. I‑2167, point 26, et du 15 avril 1998, Camar/Commission et Conseil, C‑43/98 P(R), Rec. p. I‑1815, point 36, et la jurisprudence citée ; ordonnances Transacciones Marítimas e.a./Commission, précitée, point 12, et IPK International – World Tourism Marketing Consultants/Commission, précitée, point 59].

51      Cette prise en considération du chiffre d’affaires du groupe auquel appartient la société concernée repose sur l’idée que les intérêts objectifs de cette dernière ne présentent pas un caractère autonome par rapport à ceux des personnes, physiques ou morales, qui la contrôlent ou sont membres du même groupe. Le caractère grave et irréparable du dommage allégué doit donc être apprécié au niveau du groupe que ces personnes composent. Cette confusion des intérêts justifie que l’intérêt de la société concernée à poursuivre son activité ne soit pas apprécié indépendamment de l’intérêt que ceux qui la contrôlent ou sont membres du même groupe portent à sa pérennité [voir ordonnance du président de la Cour du 30 avril 2010, Ziegler/Commission, C‑113/09 P(R), non publiée au Recueil, point 46, et la jurisprudence citée].

52      En l’espèce, la requérante admet expressément que l’exécution de l’ordre de recouvrement à hauteur de 137 millions d’euros, majorés d’intérêts de retard, ne menace pas l’existence du groupe Alcoa, auquel elle appartient, et qu’Alcoa Inc., sa société mère au dernier degré (voir point 1 ci-dessus), serait théoriquement en mesure de financer la restitution de l’aide. Cette allégation de la requérante est d’ailleurs confirmée par les données publiquement accessibles concernant le groupe Alcoa. En effet, ce dernier se présente sur son site Internet comme étant le leader à l’échelle mondiale de la production d’aluminium de première fusion, d’aluminium fabriqué et d’alumine, en précisant qu’il emploie près de 59 000 personnes réparties dans 31 pays à travers le monde et que ses revenus se sont élevés à 18,4 milliards de dollars des États-Unis (USD) en 2009.

53      Le juge des référés ne peut donc que constater que, compte tenu de la capacité financière du groupe Alcoa, et notamment de la société mère Alcoa Inc., soulignée par la requérante elle-même, le préjudice allégué ne peut être qualifié ni de grave ni d’irréparable.

54      Dans la mesure où la requérante s’oppose à cette conclusion en faisant valoir que les capacités financières du groupe auquel elle appartient sont dénuées de pertinence pour l’appréciation de son préjudice personnel étant donné qu’aucune des sociétés faisant partie de ce groupe n’est obligée de, ni d’ailleurs disposée à, lui accorder le moindre soutien financier, il y a lieu de rappeler que même un refus unilatéral d’assistance de la part du groupe Alcoa ne suffirait pas, en principe, à exclure la prise en compte de la situation financière de ce groupe. L’étendue du préjudice allégué ne saurait en effet dépendre de la volonté unilatérale de la société mère du groupe auquel appartient une société qui sollicite le sursis à exécution, dans une situation – telle que celle de la requérante, intégrée à 100 % au groupe Alcoa par une chaîne de plusieurs sociétés mères conduisant jusqu’à Alcoa Inc. (voir point 1 ci-dessus) – où les intérêts desdites sociétés appartenant à un même groupe se confondent objectivement [voir, en ce sens et par analogie, ordonnances du président de la Cour du 14 décembre 1999, DSR-Senator Lines/Commission, C‑364/99 P(R), Rec. p. I‑8733, points 50 et 54, et du 23 mars 2001, FEG/Commission, C‑7/01 P(R), Rec. p. I‑2559, point 46].

55      Il ne pourrait en être autrement que si la requérante établissait que sa société mère ou d’autres sociétés appartenant au groupe Alcoa étaient juridiquement dans l’incapacité de lui apporter leur soutien financier (voir, en ce sens, ordonnance DSR-Senator Lines/Commission, précitée, point 52). Cependant, la requérante s’est abstenue de fournir cette preuve.

56      Tout au contraire, la requérante a fourni des éléments qui indiquent que le groupe Alcoa, loin d’envisager la fermeture immédiate de la fonderie de Portovesme, est plutôt disposé à lui apporter son soutien financier. Ainsi, elle a souligné que sa volonté de poursuivre son activité en Italie avait été soutenue par son groupe, Alcoa Inversiones ayant fourni en 2009 des garanties à hauteur de 700 millions d’euros (voir points 28 et 31 ci-dessus), alors même qu’il ne peut être exclu que cette somme puisse être utilisée, ne serait-ce que provisoirement, pour exécuter l’ordre de recouvrement litigieux. La requérante fait état d’un autre apport financier de la part de son groupe, Alcoa Servizi l’ayant recapitalisée en 2009 par l’injection d’un montant de 180 millions d’euros (voir point 30 ci-dessus). En outre, la requérante s’est référée à une réglementation italienne datant du début de 2010 et portant sur l’approvisionnement en électricité, en alléguant que ce régime récent pourrait, sous réserve de l’approbation de la Commission, permettre la poursuite des activités de l’usine de Portovesme au moins pour une période de trois ans. Or, la Commission a indiqué, dans ses observations, qu’elle avait approuvé, par décision du 26 mai 2010, le régime en cause pour une durée de trois ans, en estimant qu’il n’impliquait aucune aide d’État.

57      Il convient d’ajouter que, la présente demande en référé portant sur la récupération par les autorités italiennes d’une aide d’État, la requérante devait démontrer que les voies de recours internes que lui offre le droit national pour s’opposer à la récupération de cette aide ne lui permettent pas d’éviter de subir un préjudice grave et irréparable (voir ordonnance du président du Tribunal du 14 mars 2008, Huta Buczek/Commission, T‑440/07 R, non publiée au Recueil, points 67 et 68, et la jurisprudence citée). Elle est cependant restée silencieuse sur le point de savoir si les voies de recours internes que lui offre le droit italien pour s’opposer à l’ordre de recouvrement ne lui permettraient pas, en invoquant sa situation financière individuelle, d’éviter de subir un préjudice grave et irréparable. Elle n’a même pas estimé nécessaire d’informer le juge des référés de la situation administrative au niveau national en indiquant si les autorités italiennes lui avaient déjà adressé des demandes de recouvrement, voire même des titres exécutoires.

58      Enfin, s’agissant plus particulièrement du caractère irréparable du préjudice allégué, la requérante n’a pas démontré qu’elle serait dans l’impossibilité d’en obtenir une compensation financière ultérieure par la voie d’un recours en indemnité. En effet, dans la mesure où ce préjudice ne serait pas réparé par la seule annulation de la décision attaquée dans le cadre de l’affaire principale, il serait susceptible d’être réparé dans le cadre des voies de recours prévues par les articles 268 TFUE et 340 TFUE, étant entendu que la seule possibilité de former un recours en indemnité suffit à attester du caractère en principe réparable d’un tel préjudice (voir, en ce sens, ordonnance Agriconsulting Europe/Commission, précitée, point 35, et la jurisprudence citée).

59      Il résulte de tout ce qui précède que la requérante n’est pas parvenue à démontrer qu’elle subirait un préjudice grave et irréparable si le sursis à exécution demandé n’était pas octroyé. Par conséquent, la condition relative à l’urgence n’est pas satisfaite.

60      Le rejet de la demande en référé résultant du défaut d’urgence est d’ailleurs corroboré par la mise en balance des différents intérêts en présence.

61      À cet égard, il convient de rappeler que l’article 88, paragraphe 2, premier alinéa, CE prévoit que, si la Commission constate qu’une aide d’État n’est pas compatible avec le marché commun, elle décide que l’État intéressé doit la supprimer ou la modifier dans le délai qu’elle détermine. Il s’ensuit que l’intérêt général au nom duquel la Commission exerce les fonctions qui lui sont confiées par l’article 88, paragraphe 2, CE et par l’article 7 du règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88 CE] (JO L 83, p. 1), afin de garantir que le fonctionnement du marché commun ne soit pas faussé par des aides d’État nuisibles à la concurrence, est d’une importance particulière. En effet, l’obligation pour l’État membre concerné de supprimer une aide incompatible avec le marché commun vise au rétablissement de la situation antérieure (voir, en ce sens, ordonnances du président du Tribunal du 4 avril 2002, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, T‑198/01 R, Rec. p. II‑2153, point 113, et la jurisprudence citée, et du 23 janvier 2009, Pannon Hőerőmű/Commission, T‑352/08 R, non publiée au Recueil, point 58).

62      Par conséquent, il a été jugé que, dans le cadre d’une demande de sursis à l’exécution de l’obligation imposée par la Commission de rembourser une aide illégalement versée déclarée incompatible avec le marché intérieur, l’intérêt de l’Union doit normalement, sinon presque toujours, primer celui du bénéficiaire de l’aide d’éviter l’exécution de l’obligation de la rembourser avant le prononcé de l’arrêt devant intervenir au principal (ordonnance Pannon Hőerőmű/Commission, précitée, point 59).

63      Ce n’est qu’en présence de circonstances exceptionnelles et dans l’hypothèse où, notamment, la condition relative à l’urgence est remplie que le bénéficiaire d’une telle aide peut obtenir l’octroi de mesures provisoires (voir ordonnance Pannon Hőerőmű/Commission, précitée, point 60, et la jurisprudence citée).

64      Or, en l’espèce, la requérante ne remplit pas la condition relative à l’urgence et n’établit en tout état de cause pas qu’elle est confrontée à des circonstances exceptionnelles qui pourraient justifier une pondération des intérêts en cause en faveur de l’octroi de mesures provisoires.

65      En conséquence, la demande en référé doit être rejetée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si la condition relative au fumus boni juris est remplie. Dans ces circonstances, il n’est pas nécessaire de statuer sur la demande en intervention de la République italienne.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 9 juillet 2010.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’italien.