Language of document : ECLI:EU:C:2019:101

ORDONNANCE DE LA COUR (première chambre)

6 février 2019 (*)

« Renvoi préjudiciel – Environnement – Système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans l’Union européenne – Directive 2003/87/CE – Plan de surveillance – Règlement (UE) n° 601/2012 – Article 49, paragraphe 1, second alinéa – Point 20 de l’annexe IV – Calcul des émissions de l’installation – Déduction du CO2 transféré –Exclusion du CO2 utilisé dans la production de carbonate de calcium précipité – Appréciation de la validité de l’exclusion »

Dans l’affaire C‑561/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne), par décision du 27 août 2018, parvenue à la Cour le 4 septembre 2018, dans la procédure

Solvay Chemicals GmbH

contre

Bundesrepublik Deutschland,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot (rapporteur), président de la première chambre, Mme C. Toader, MM. A. Rosas, L. Bay Larsen et M. Safjan, juges,

avocat général : Mme E. Sharpston,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur la validité de l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, et du point 20 de l’annexe IV du règlement (UE) n° 601/2012 de la Commission, du 21 juin 2012, relatif à la surveillance et à la déclaration des émissions de gaz à effet de serre au titre de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil (JO 2012, L 181, p. 30).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Solvay Chemicals GmbH à la Bundesrepublik Deutschland (République fédérale d’Allemagne) au sujet de la comptabilisation, en tant qu’émissions au sens de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 octobre 2003, établissant un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil (JO 2003, L 275, p. 32), telle que modifiée par la directive 2009/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2009 (JO 2009, L 140, p. 63) (ci-après la « directive 2003/87 »), du dioxyde de carbone (ci-après le « CO2 ») généré dans une installation de production de soude et transféré à une installation de production de carbonate de calcium précipité (ci-après le « CCP »).

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive 2003/87

3        La directive 2003/87 s’applique, conformément à son article 2, paragraphe 1, « aux émissions résultant des activités indiquées à l’annexe I et aux gaz à effet de serre énumérés à l’annexe II. »

4        L’article 3, sous b), de cette directive définit la notion d’« émissions » comme étant « le rejet dans l’atmosphère de gaz à effet de serre, à partir de sources situées dans une installation, ou le rejet, à partir d’un aéronef effectuant une activité aérienne visée à l’annexe I, de gaz spécifiés en rapport avec cette activité ».

5        Aux termes de l’article 12, paragraphes 3 et 3bis, de ladite directive :

« 3.      Les États membres s’assurent que, le 30 avril de chaque année au plus tard, tout exploitant d’une installation restitue un nombre de quotas, autres que des quotas délivrés en vertu du chapitre II, correspondant aux émissions totales de cette installation au cours de l’année civile écoulée, telles qu’elles ont été vérifiées conformément à l’article 15, et que ces quotas soient ensuite annulés.

3bis.      Une obligation de restituer des quotas ne doit pas se produire dans le cas d’émissions vérifiées en tant que faisant l’objet d’un captage et d’un transport en vue d’un stockage permanent vers une installation pour laquelle un permis est en vigueur conformément à la directive 2009/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 [relative au stockage géologique du dioxyde de carbone et modifiant la directive 85/337/CEE du Conseil, les directives 2000/60/CE, 2001/80/CE, 2004/35/CE, 2006/12/CE et 2008/1/CE et le règlement (CE) no 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil (JO 2009, L 140, p. 114)]. »

6        L’article 14 de la directive 2003/87, intitulé « Surveillance et déclaration des émissions », énonce, à son paragraphe 1 :

« Le 31 décembre 2011 au plus tard, la Commission arrête un règlement relatif à la surveillance et à la déclaration des émissions et, le cas échéant, des données d’activité, relatives aux activités énumérées à l’annexe I, pour la surveillance et la déclaration des données tonne-kilomètre en vue de la demande visée à l’article 3 sexies ou à l’article 3 septies ; ce règlement est fondé sur les principes régissant la surveillance et la déclaration énoncés à l’annexe IV et précise le potentiel de réchauffement planétaire des différents gaz à effet de serre dans les exigences relatives à la surveillance et à la déclaration de ces gaz.

Cette mesure, qui vise à modifier des éléments non essentiels de la présente directive en la complétant, est arrêtée en conformité avec la procédure de réglementation avec contrôle visée à l’article 23, paragraphe 3. »

 Le règlement n° 601/2012

7        L’article 5, premier alinéa, du règlement n° 601/2012 dispose :

« La surveillance et la déclaration sont exhaustives et couvrent toutes les émissions de procédé et de combustion provenant de l’ensemble des sources d’émission et des flux liés aux activités énumérées à l’annexe I de la directive 2003/87/CE et aux autres activités incluses en application de l’article 24 de cette directive, ainsi que les émissions de tous les gaz à effet de serre indiqués en rapport avec ces activités, tout en évitant une double comptabilisation. »

8        Aux termes de l’article 11, paragraphe 1, de ce règlement :

« Chaque exploitant ou exploitant d’aéronef surveille ses émissions de gaz à effet de serre sur la base d’un plan de surveillance approuvé par l’autorité compétente conformément à l’article 12, qui tient compte de la nature et du fonctionnement de l’installation ou de l’activité aérienne à laquelle il s’applique.

[...] »

9        Il ressort de l’article 20, paragraphe 2, dudit règlement que, « [l]orsqu’il définit le processus de surveillance et de déclaration, l’exploitant tient compte des exigences sectorielles énoncées à l’annexe IV. »

10      L’article 49 du règlement n° 601/2012, intitulé « CO2 transféré », prévoit, à son paragraphe 1 :

« L’exploitant déduit des émissions de l’installation toute quantité de CO2 provenant du carbone fossile utilisé dans le cadre d’activités visées à l’annexe I de la directive 2003/87/CE qui n’est pas émise par l’installation, mais qui est transférée par celle-ci vers l’une des entités suivantes :

a)      une installation de captage aux fins du transport et du stockage géologique à long terme dans un site de stockage autorisé en vertu de la directive 2009/31/CE;

b)      un réseau de transport aux fins du stockage géologique à long terme dans un site de stockage autorisé en vertu de la directive 2009/31/CE;

c)      un site de stockage autorisé en vertu de la directive 2009/31/CE aux fins du stockage géologique à long terme.

Pour tous les autres types de transfert de CO2, les émissions de l’installation ne peuvent faire l’objet d’aucune déduction de CO2. »

11      L’annexe IV de ce règlement, intitulée « Méthodes de surveillance spécifiques par activité pour les installations (article 20, paragraphe 2) » comporte un point 20 consacré à la « [p]roduction de soude et de bicarbonate de sodium visée à l’annexe I de la directive 2003/87/CE ». Sous son titre B, relatif aux « règles de surveillance spécifiques », ce point prévoit notamment :

« Lorsque le CO2 issu de la production de soude est utilisé pour produire du bicarbonate de sodium, la quantité de CO2 concernée est considérée comme ayant été émise par l’installation qui produit le CO2. »

 Le droit allemand

12      Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, du Gesetz über den Handel mit Berechtigungen zur Emission von Treibhausgasen (loi relative aux échanges de droits d’émission de gaz à effet de serre), du 21 juillet 2011 (BGBl. 2011 I, p. 1475), tel que modifié :

« L’exploitant est tenu de déterminer, conformément à l’annexe 2, partie 2, le montant des émissions générées par son activité au cours d’une année civile et de déclarer ce montant à l’autorité compétente avant le 31 mars de l’année suivante. »

13      L’article 6, paragraphe 1, de cette loi, telle que modifiée, énonce :

« L’exploitant est tenu de soumettre à l’autorité compétente, pour chaque période d’échange de quotas, un plan de surveillance concernant la détermination et la déclaration des émissions, conformément à l’article 5, paragraphe 1. [...] »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

14      Solvay Chemicals exploite à Rheinberg (Allemagne) une installation de production de soude dont l’activité est soumise au système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Il est constant qu’une partie du CO2 généré par cette installation est transférée vers une autre installation en vue de la production de CCP, ce CO2 n’étant ainsi pas rejeté dans l’atmosphère.

15      Par son arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk (C‑460/15, EU:C:2017:29), la Cour a jugé que les dispositions de l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 601/2012 et du point 10, B, de l’annexe IV de ce règlement sont invalides, dans la mesure où elles incluent systématiquement dans les émissions de l’installation de combustion de chaux le CO2 transféré vers une autre installation en vue de la production de carbonate de calcium, que ce CO2 soit rejeté ou non dans l’atmosphère.

16      À la suite de cette décision, Solvay Chemicals a, dans le cadre de la procédure d’autorisation du plan modifié de surveillance de son installation, sollicité par courrier, le 25 septembre 2017, auprès de la Deutsche Emissionshandelsstelle (service allemand d’échanges de quotas d’émission, ci-après la « DEHSt »), l’autorisation de se dispenser d’un rapport sur le CO2 transféré en vue de la production de CCP au motif que, chimiquement lié dans le CCP, le CO2 n’était pas rejeté dans l’atmosphère et, partant, ne correspondrait pas aux « émissions » visées à l’article 3, sous b), de la directive 2003/87.

17      Par décision du 21 décembre 2017, la DEHSt a rejeté ce plan de surveillance modifié. Cette décision a été confirmée sur réclamation le 4 mai 2018. La DEHSt a en effet considéré que la Cour, par son arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk (C‑460/15, EU:C:2017:29), avait explicitement limité sa déclaration d’invalidité à la règle du règlement n° 601/2012 concernant l’impossibilité de déduire le CO2 produit par des installations de combustion de chaux et transféré en vue de la production de CCP. Elle a par ailleurs considéré que, s’il était probable que la disposition similaire du règlement n° 601/2012 régissant la production de soude, à savoir le point 20 de l’annexe IV de ce règlement, soit également invalide, elle n’avait pas le pouvoir, en tant qu’autorité administrative, de laisser une règle de droit de l’Union inappliquée.

18      Par son recours présenté le 17 mai 2018 devant le Verwaltungsgericht Berlin (tribunal administratif de Berlin, Allemagne), Solvay Chemicals a contesté la décision de la DEHSt.

19      Éprouvant des doutes quant à la validité de ces dispositions du règlement n° 601/2012, cette juridiction a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Le règlement [n° 601/2012] est-il invalide et méconnaît-il les objectifs de la directive 2003/87 dans la mesure où il dispose, à son article 49, paragraphe 1, second alinéa, que le dioxyde de carbone (CO2) qui n’est pas transféré au sens de l’article 49, paragraphe 1, premier alinéa, dudit règlement est considéré comme ayant été émis par l’installation qui l’a produit, qu’il ait été rejeté dans l’atmosphère ou non ?

2)      Le règlement [n° 601/2012] est-il invalide et méconnaît-il les objectifs de la directive 2003/87 dans la mesure où il dispose, à son article 49, paragraphe 1, second alinéa, appliqué conjointement avec l’annexe IV, point 20, dudit règlement, que le CO2 qui est transféré d’une installation de production de soude vers une autre installation en vue de la production de [CCP] doit systématiquement être inclus dans les émissions de cette installation ? »

 Sur les questions préjudicielles

20      Il y a lieu de préciser à titre liminaire que, en application de l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 601/2012 et du point 20 de l’annexe IV de celui-ci, le CO2 produit par une installation de production de soude et transféré, comme dans l’affaire au principal, vers une autre installation en vue de la production de CCP est considéré comme ayant été émis par la première installation.

21      Par ses questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, à la Cour de se prononcer sur la validité de ces dispositions dans la mesure où, en incluant systématiquement dans les émissions de l’installation de production de soude le CO2 transféré en vue de la production de CCP, que ce CO2 soit rejeté ou non dans l’atmosphère, elles iraient au-delà de la définition des émissions telle que retenue à l’article 3, sous b), de la directive 2003/87.

22      En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une question posée à titre préjudiciel est identique à une question sur laquelle la Cour a déjà statué, lorsque la réponse à une telle question peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à la question posée à titre préjudiciel ne laisse place à aucun doute raisonnable, la Cour peut à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

23      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le présent renvoi préjudiciel.

24      Il importe de relever que le règlement n° 601/2012 a été adopté en application de l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2003/87, selon lequel la Commission arrête un règlement relatif notamment à la surveillance et à la déclaration des émissions, cette mesure visant à modifier des éléments non essentiels de ladite directive en la complétant. En conséquence, l’appréciation, en l’espèce, de la validité des dispositions en cause de ce règlement conduit à vérifier que la Commission, en adoptant ces dispositions, n’a pas excédé les limites ainsi fixées par la directive 2003/87 (arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, point 27).

25      Selon l’article 3, sous b), de la directive 2003/87, les « émissions », aux fins de celle-ci, sont entendues comme étant le rejet dans l’atmosphère de gaz à effet de serre, à partir de sources situées dans une installation. Ainsi, il résulte de la lettre même de cette disposition que l’émission au sens de celle-ci suppose le rejet d’un gaz à effet de serre dans l’atmosphère (arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, point 32).

26      À cet égard, il y a lieu de relever qu’il est vrai que l’article 12, paragraphe 3bis, de la directive 2003/87 prévoit que ne sont pas soumises aux obligations de restitution des quotas, à certaines conditions, les émissions qui font l’objet d’un captage et d’un transport pour leur stockage géologique permanent vers une installation pour laquelle un permis est en vigueur conformément à la directive 2009/31. Toutefois, cela ne signifie pas que le législateur de l’Union a considéré que les exploitants ne sont exemptés de l’obligation de restitution que dans le seul cas du stockage géologique permanent (arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, points 33 et 34).

27      En effet, à la différence du second alinéa de l’article 49, paragraphe 1, du règlement n° 601/2012, qui prévoit que, pour tous les autres types de transfert de CO2, les émissions de l’installation ne peuvent faire l’objet d’aucune déduction de CO2,l’article 12, paragraphe 3bis, de la directive 2003/87 ne contient pas de règle analogue (arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, point 35).

28      Cette dernière disposition, qui ne vise en effet qu’une situation spécifique et a pour but de favoriser le stockage des gaz à effet de serre, n’a eu ni pour objet ni pour effet de modifier la définition des « émissions », au sens de l’article 3 de la directive 2003/87, ni, par voie de conséquence, le champ d’application de cette directive tel que fixé à son article 2, paragraphe 1 (arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, point 36).

29      Dès lors, aux fins de déterminer si le CO2 résultant de l’activité de production de soude, par une installation telle que celle en cause au principal, entre dans le champ d’application de la directive 2003/87, conformément à l’article 2, paragraphe 1, et aux annexes I et II de celle‑ci, il y a lieu de vérifier si une telle production conduit à un rejet de ce CO2 dans l’atmosphère (voir, en ce sens, arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, point 37).

30      Il ressort des éléments d’information dont dispose la Cour que le CO2 utilisé pour la production de CCP est chimiquement lié à ce produit stable. Les activités de production de CCP ne sont d’ailleurs pas au nombre de celles qui, en vertu des dispositions combinées de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2003/87 et de l’annexe I de celle-ci, relèvent du champ d’application de cette directive.

31      Ainsi qu’il ressort du point 39 de l’arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk (C‑460/15, EU:C:2017:29), dans une situation dans laquelle le CO2 produit par une installation de production de chaux est transféré vers une installation de production de CCP, il apparaît que, en application de l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 601/2012 et du point 10, B, de l’annexe IV de celui-ci, l’intégralité du CO2 transféré, qu’une partie de celui-ci soit ou non rejetée dans l’atmosphère, durant son transport, ou en raison de fuites, voire du processus de production lui-même, est considérée comme ayant été émise par l’installation de production de chaux dans laquelle ce CO2 a été produit, alors même que ce transfert pourrait ne provoquer aucun rejet de CO2 dans l’atmosphère. Ces dispositions créent ainsi une présomption irréfragable de rejet dans l’atmosphère de l’intégralité du CO2 transféré.

32      De même, dans une situation où le CO2 produit par une installation de production de soude est transféré vers une installation de production de CCP, l’application de l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 601/2012 et du point 20, B, de l’annexe IV de celui-ci, crée une présomption irréfragable de rejet dans l’atmosphère de l’intégralité du CO2 transféré.

33      Ces dispositions aboutissent ainsi à considérer le CO2 transféré dans de telles circonstances comme relevant de la notion d’« émissions », au sens de l’article 3, sous b), de la directive 2003/87, alors pourtant qu’il ne serait pas, dans tous les cas, rejeté dans l’atmosphère. En adoptant l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 601/2012 et le point 20, B, de l’annexe IV de celui-ci, la Commission a, dès lors, étendu le champ d’application de cette notion (voir, en ce sens, arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, point 40).

34      En conséquence de cette présomption, les exploitants concernés ne peuvent déduire en aucun cas des émissions totales de leur installation de production de soude la quantité de CO2 transférée en vue de la production de CCP, alors que ce CO2 ne serait pas, dans tous les cas, rejeté dans l’atmosphère. Une telle impossibilité implique que les quotas doivent être restitués pour l’intégralité du CO2 transféré en vue de la production de CCP et ne peuvent plus être vendus comme un excédent, remettant en cause le système d’échange de quotas, dans une situation répondant pourtant à l’objectif final de la directive 2003/87 qui vise à protéger l’environnement par une réduction des émissions de gaz à effet de serre (voir, en ce sens, arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, point 41).

35      Il résulte de tout ce qui précède que la Commission, ayant modifié un élément essentiel de la directive 2003/87 en adoptant les dispositions de l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 601/2012 et du point 20, B, de l’annexe IV de celui-ci, a excédé les limites fixées par l’article 14, paragraphe 1, de cette directive (voir, par analogie, arrêt du 19 janvier 2017, Schaefer Kalk, C‑460/15, EU:C:2017:29, point 48).

36      En conséquence, il y a lieu de répondre aux questions posées que les dispositions de l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 601/2012 et du point 20, B, de l’annexe IV de ce règlement, dans la mesure où elles incluent systématiquement dans les émissions de l’installation de production de soude le CO2 transféré vers une autre installation en vue de la production de CCP, que ce CO2 soit rejeté ou non dans l’atmosphère, sont invalides.

 Sur les dépens

37      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) ordonne :

Les dispositions de l’article 49, paragraphe 1, second alinéa, du règlement (UE) n° 601/2012 de la Commission, du 21 juin 2012, relatif à la surveillance et à la déclaration des émissions de gaz à effet de serre au titre de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil, et du point 20, B, de l’annexe IV de ce règlement, dans la mesure où elles incluent systématiquement dans les émissions de l’installation de production de soude le dioxyde de carbone (CO2) transféré vers une autre installation en vue de la production de carbonate de calcium précipité, que ce dioxyde de carbone soit rejeté ou non dans l’atmosphère, sont invalides.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.