Language of document : ECLI:EU:C:2018:694

ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

 6 septembre 2018 (*)

« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Fiscalité directe – Article 18 TFUE – Principe de non-discrimination – Articles 63, 64 et 65 TFUE – Libre circulation des capitaux – Charge fiscale plus élevée sur les plus-values immobilières réalisées par des non-résidents – Restrictions aux mouvements de capitaux à destination ou en provenance de pays tiers »

Dans l’affaire C‑184/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Central Administrativo Sul (tribunal administratif central Sud, Portugal), par décision du 19 septembre 2017, parvenue à la Cour le 12 mars 2018, dans la procédure

Fazenda Pública

contre

Carlos Manuel Patrício Teixeira,

Maria Madalena da Silva Moreira Patrício Teixeira,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. A. Rosas (rapporteur), président de chambre, Mme C. Toader et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général : M. P. Mengozzi,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 18, 63, 64 et 65 TFUE.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Carlos Manuel Patrício Teixeira et Mme Maria Madalena da Silva Moreira Patrício Teixeira à la Fazenda Pública (Trésor public, Portugal) au sujet de l’imposition de leurs revenus pour l’année 2007.

 Le cadre juridique

3        Aux termes de l’article 10, paragraphe 1, sous a), du Código do Imposto sobre o Rendimento das Pessoas Singulares (code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques), approuvé par le décret-loi no 442-A/88, du 30 novembre 1988 (Diário da República I, série I, 1er supplément, n° 277, du 30 novembre 1988, ci-après le « CIRS »), dans sa version résultant de la loi no 109-B/2001, du 27 décembre 2001 (Diário da República I, série I-A, 2ème supplément, n° 298, du 27 décembre 2001), applicable au litige au principal :

« 1 – Constituent des plus-values les gains obtenus qui, sans être considérés comme des revenus d’entreprise et professionnels, de capitaux ou immobiliers, résultent de :

a)      la cession à titre onéreux de droits réels sur des biens immeubles et l’affectation de tout bien du patrimoine privé à l’activité entrepreneuriale et professionnelle exercée à titre individuel par leur propriétaire ;

[...] »

4        L’article 43, paragraphes 1 et 2, du CIRS, dans sa version résultant de la loi no 109-B/2001, dispose :

« 1 – Le montant des recettes qualifiées de plus-values correspond au solde résultant de la différence entre les plus-values et les moins-values réalisées la même année déterminées conformément aux articles suivants.

2 – Le solde visé au paragraphe précédent, concernant les transmissions effectuées par des résidents, prévues par l’article 10, paragraphe 1, sous a), c) et d), qu’il soit positif ou négatif, est pris en considération à hauteur de 50 % de son montant seulement. »

5        L’article 41, paragraphes 1 et 2, du CIRS, dans sa version initiale, prévoyait :

« 1 – La valeur des revenus de la catégorie G correspond au solde résultant de la différence entre les plus-values et les moins-values réalisées la même année déterminées conformément aux articles suivants.

2 – Les plus-values prévues par l’article 10, paragraphe 1, sous a), c) et d), sont prises en considération à hauteur de 50 % de son montant. »

 Le litige au principal et la question préjudicielle

6        Au cours de l’année 2007, les défendeurs au principal, de nationalité portugaise mais résidents en Angola, ont cédé un bien immeuble situé dans la commune d’Oeiras (Portugal), générant une plus-value imposable au titre de l’impôt sur le revenu.

7        L’administration fiscale, estimant, au motif qu’ils résidaient dans un État tiers, que les défendeurs au principal ne pouvaient pas se prévaloir des dispositions favorables de l’article 43, paragraphe 2, du CIRS, qui limite l’assiette de la taxe à 50 % des plus-values pour les cessions de biens immeubles effectuées par des contribuables résidents, a pris en considération, dans l’avis d’imposition pour l’année 2007, la totalité de la plus-value réalisée par les défendeurs au principal afin de déterminer le revenu net imposable de ceux-ci.

8        Les défendeurs au principal ont contesté cet avis d’imposition devant le Tribunal Administrativo e Fiscal de Sintra (tribunal administratif et fiscal de Sintra, Portugal). Leur recours ayant été accueilli, le Trésor public a fait appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi, le Tribunal Central Administrativo Sul (tribunal administratif central Sud, Portugal).

9        Cette juridiction rappelle que, dans l’arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann (C‑443/06, EU:C:2007:600), la Cour a considéré que l’article 63 TFUE s’oppose à une réglementation qui soumet les plus-values résultant de la cession, par un résident d’un État membre, d’un bien immeuble situé dans un autre État membre à une charge fiscale supérieure à celle qui serait appliquée pour ce même type d’opération aux plus-values réalisées par un résident de l’État dans lequel est situé ce bien immeuble.

10      Toutefois, la juridiction de renvoi souligne que, d’une part, dans le cadre du litige dont elle est saisie, la cession a été effectuée par un résident d’un pays tiers et, d’autre part, dès lors que la disposition de droit national applicable à ce litige est, en substance, demeurée identique à celle qui lui correspondait à la date du 31 décembre 1993, il y aurait lieu de faire application de l’article 64, paragraphe 1, TFUE.

11      Dans ces conditions, le Tribunal Central Administrativo Sul (tribunal administratif central Sud) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Les dispositions combinées des [articles 18, 63, 64 et 65 TFUE] doivent-elles être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à une législation nationale, telle que celle en cause dans l’affaire au principal [article 43, paragraphe 2, du CIRS], qui soumet les plus-values résultant de la cession d’un bien immeuble situé dans un État membre (Portugal), lorsque cette cession est effectuée par un ressortissant de cet État membre ayant sa résidence dans un pays tiers (Angola), à une charge fiscale supérieure à celle qui serait appliquée pour ce même type d’opérations aux plus-values réalisées par un résident de l’État dans lequel est situé ce bien immeuble ? »

 Sur la question préjudicielle

12      Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui soumet les plus-values résultant de la cession, par un résident d’un État tiers, d’un bien immeuble situé dans cet État membre à une charge fiscale supérieure à celle qui serait appliquée pour ce même type d’opération aux plus-values réalisées par un résident dudit État membre constitue une restriction à la libre circulation des capitaux. Dans l’affirmative, la juridiction de renvoi demande si, s’agissant d’une disposition de droit national qui, en substance, est demeurée identique à la disposition correspondante qui existait au 31 décembre 1993, elle rentre dans le champ d’application de l’exception prévue à l’article 64 TFUE ou pourrait être justifiée sur la base de l’article 65, paragraphe 1, TFUE.

13      En vertu de l’article 99 de son règlement de procédure, la Cour peut, notamment lorsqu’une réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence ou lorsque la réponse à la question posée ne laisse place à aucun doute raisonnable, décider à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée.

14      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre de la présente affaire.

 Sur les principes et libertés applicables

15      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’article 18 TFUE n’a vocation à s’appliquer de façon autonome que dans des situations régies par le droit de l’Union pour lesquelles le traité ne prévoit pas de règles spécifiques de non-discrimination (arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann, C‑443/06, EU:C:2007:600, point 28 et jurisprudence citée).

16      Or, le traité prévoit notamment à l’article 63 TFUE une règle spécifique de non-discrimination dans le domaine relevant de la liberté de circulation des capitaux (arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann, C‑443/06, EU:C:2007:600, point 29 et jurisprudence citée).

17      À cet égard, il résulte de la jurisprudence de la Cour qu’une opération concernant la liquidation d’un investissement immobilier, comme celle en cause dans l’affaire au principal, constitue un mouvement de capitaux (arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann, C‑443/06, EU:C:2007:600, point 31 et jurisprudence citée).

18      Il en découle que la cession d’un bien immobilier situé dans un État membre réalisée à titre onéreux par des personnes physiques non-résidentes relève du champ d’application de l’article 63 TFUE.

 Sur la libre circulation des capitaux

19      En ce qui concerne l’affaire au principal, il résulte de la demande de décision préjudicielle que les dispositions du CIRS prévoient, en cas de plus-values réalisées lors de la cession à titre onéreux d’un bien immeuble sis au Portugal, des règles d’imposition différentes selon que les assujettis à l’impôt sur le revenu résident ou non dans cet État membre.

20      En particulier, aux termes de l’article 43, paragraphe 2, du CIRS, les plus-values réalisées par des résidents lors de la cession de biens immeubles sis au Portugal sont prises en considération à hauteur de 50 % seulement de leur montant. En revanche, pour les non-résidents, le CIRS prévoit que l’imposition de ces mêmes plus-values porte sur la totalité de leur montant.

21      Il s’ensuit que l’assiette d’imposition de ce type de plus-values n’est pas la même pour les résidents et les non-résidents. Ainsi, pour la vente d’un même bien immeuble sis au Portugal, en cas de réalisation de plus-values, les non-résidents sont soumis à une charge fiscale supérieure à celle appliquée aux résidents et, partant, se trouvent dans une situation moins favorable que ces derniers (arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann, C‑443/06, EU:C:2007:600, point 37).

22      Ainsi que l’a rappelé la juridiction de renvoi, la Cour a déjà eu l’occasion de se prononcer sur la conformité d’une disposition de droit national, telle que l’article 43, paragraphe 2, du CIRS, à l’article 63 TFUE dans son arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann (C‑443/06, EU:C:2007:600), et a jugé, au point 40 de cet arrêt, qu’une telle disposition, en ce qu’elle prévoit que seules les plus-values réalisées par des résidents ne seront prises en considération qu’à concurrence de 50 % de leur montant pour le calcul de l’impôt, constitue une restriction aux mouvements de capitaux prohibée par l’article 63 TFUE (arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann, C‑443/06, EU:C:2007:600, point 40).

23      La juridiction de renvoi relève néanmoins que l’affaire au principal se différencie de celle ayant donné lieu à l’arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann (C‑443/06, EU:C:2007:600), dès lors que les assujettis à l’impôt sur les plus-values en cause au principal ne résident pas dans un autre État membre mais dans un État tiers.

24      Toutefois, il convient de constater que, ainsi que son libellé l’indique, l’article 63 TFUE met en œuvre la libre circulation des capitaux non seulement entre les États membres, mais également entre les États membres et les États tiers (voir, en ce sens, arrêt du 18 janvier 2018, Jahin, C‑45/17, EU:C:2018:18, point 19).

25      À cet effet, l’article 63 TFUE interdit de façon générale les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres ainsi qu’entre les États membres et les États tiers.

26      Dans ces conditions, il y a lieu de constater qu’une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui soumet les plus-values résultant de la cession, par un résident d’un État tiers, d’un bien immeuble situé dans cet État membre à une charge fiscale supérieure à celle qui serait appliquée pour ce même type d’opération aux plus-values réalisées par un résident dudit État membre constitue une restriction aux mouvements de capitaux interdite par l’article 63, paragraphe 1, TFUE.

27      Dès lors, il convient de vérifier, d’une part, si une telle restriction entre dans le champ d’application de l’exception prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE et, d’autre part, si elle peut être considérée comme objectivement justifiée, au sens de l’article 65, paragraphes 1 et 3, TFUE.

 Sur l’application de l’exception prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE

28      Conformément à l’article 64, paragraphe 1, TFUE, l’interdiction des restrictions à la libre circulation des capitaux, au sens de l’article 63 TFUE, ne porte pas atteinte à l’application, aux pays tiers, des restrictions existant le 31 décembre 1993 en vertu du droit national ou du droit de l’Union, en ce qui concerne les mouvements de capitaux à destination ou en provenance de tels pays lorsqu’ils impliquent des investissements directs, y compris, entre autres, les investissements immobiliers (arrêt du 11 février 2010, Fokus Invest, C‑541/08, EU:C:2010:74, point 40 et jurisprudence citée).

29      Toutefois, afin de bénéficier de ce régime dérogatoire, la réglementation fiscale nationale doit satisfaire aux critères temporel et matériel prévus par cette disposition.

30      S’agissant du critère temporel établi par l’article 64, paragraphe 1, TFUE, il résulte d’une jurisprudence de la Cour bien établie que, s’il appartient, en principe, au juge national de déterminer le contenu de la législation existante à une date fixée par un acte de l’Union, il appartient à la Cour de fournir les éléments d’interprétation de la notion du droit de l’Union qui constitue la référence pour l’application d’un régime dérogatoire, prévu par ce droit, à une législation nationale « existante » à une date fixée (arrêt du 10 avril 2014, Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company, C‑190/12, EU:C:2014:249, point 47 et jurisprudence citée).

31      Dans ce contexte, la Cour a déjà jugé que toute mesure nationale adoptée postérieurement au 31 décembre 1993 n’est pas, de ce seul fait, automatiquement exclue du régime dérogatoire instauré par l’acte de l’Union en cause. En effet, une disposition qui est, dans sa substance, identique à la législation antérieure ou qui se borne à réduire ou à supprimer un obstacle à l’exercice des droits et des libertés établis par le droit de l’Union figurant dans la législation antérieure bénéficie de la dérogation. En revanche, une législation qui repose sur une logique différente de celle du droit antérieur et met en place des procédures nouvelles ne peut être assimilée à la législation existante à la date retenue par l’acte de l’Union en cause (arrêt du 10 avril 2014, Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company, C‑190/12, EU:C:2014:249, point 48 et jurisprudence citée).

32      En l’occurrence, selon la juridiction de renvoi, la disposition applicable au litige au principal, à savoir l’article 43, paragraphe 2, du CIRS, dans sa version résultant de la loi n° 109-B/2001, existait déjà, en substance, dans la version d’origine de ce code, en vigueur depuis le 1er janvier 1989.

33      Toutefois, il convient de relever que, dans la version d’origine du CIRS, citée par la juridiction de renvoi, l’article 41, paragraphe 2, de ce code, qui correspond actuellement à l’article 43, paragraphe 2, de celui-ci, ne faisait pas de distinction entre les résidents et non-résidents en ce qui concerne la limitation à 50 % de leur montant des plus-values en vue du calcul de l’impôt. En revanche, dans la version du CIRS en vigueur à la date des faits au principal, résultant de la loi n° 109-B/2001, les non-résidents sont exclus du bénéfice de cette limitation.

34      Sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, il apparaît ainsi que, à la suite de cette modification législative, la disposition du CIRS applicable au litige au principal repose sur une logique différente de celle qui sous-tendait la disposition correspondante qui existait au 31 décembre 1993. Partant, cette première disposition de droit national ne saurait être considérée comme « existante » à cette date, aux fins de l’application de l’article 64, paragraphe 1, TFUE.

35      Dès lors que le critère temporel n’est pas rempli et que les deux critères, temporel et matériel, prévus à l’article 64, paragraphe 1, TFUE doivent être remplis cumulativement, ce dernier article n’est pas applicable à l’affaire au principal, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si le critère matériel est satisfait (arrêt du 10 avril 2014, Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company, C‑190/12, EU:C:2014:249, point 53).

 Sur l’existence d’une justification à la restriction à la libre circulation des capitaux au titre de l’article 65, paragraphes 1 et 3, TFUE

36      Il résulte de l’article 65, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec le paragraphe 3 de ce même article, que les États membres peuvent établir, dans leur réglementation nationale, une distinction entre les contribuables résidents et les contribuables non-résidents pour autant que cette distinction ne constitue pas un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux.

37      Il y a donc lieu de distinguer les traitements inégaux autorisés au titre de l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE des discriminations arbitraires interdites par le paragraphe 3 de ce même article. Or, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, pour qu’une réglementation fiscale nationale, telle que celle en cause au principal, puisse être considérée comme compatible avec les dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux, il faut que la différence de traitement concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou soit justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général (voir, en ce sens, arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann, C‑443/06, EU:C:2007:600, points 44 et 45 ainsi que jurisprudence citée).

38      En ce qui concerne, en premier lieu, la comparabilité des situations, il convient de rappeler que, ainsi que la Cour l’a déjà précisé au point 50 de l’arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann (C‑443/06, EU:C:2007:600), premièrement, l’imposition des plus-values résultant de la cession d’un bien immeuble porte, aux termes de l’article 43, paragraphe 2, du CIRS, dans sa version résultant de la loi n° 109-B/2001, sur une seule catégorie de revenus des contribuables, qu’ils soient résidents ou non-résidents, deuxièmement, cette imposition concerne ces deux catégories de contribuables et, troisièmement, l’État membre qui est à la source du revenu imposable est toujours la République portugaise. Par ailleurs, il ne ressort pas du libellé de cette disposition que celle-ci établit une distinction entre les contribuables non-résidents en fonction de leur lieu de résidence.

39      Il résulte de ce qui précède qu’il n’existe aucune différence objective de situation entre les deux catégories de contribuables en cause au principal de nature à justifier une inégalité de traitement fiscal entre eux en ce qui concerne l’imposition de la plus-value qu’ils réalisent à la suite de la cession d’un bien immobilier sis au Portugal. Partant, la situation dans laquelle se trouve un contribuable non-résident, tel que les défendeurs au principal, est comparable à celle d’un contribuable résident.

40      En ce qui concerne, en second lieu, l’existence de justifications tirées de raisons impérieuses d’intérêt général, il ressort du point 57 de l’arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann (C‑443/06, EU:C:2007:600), que, afin de justifier la conformité de l’article 43, paragraphe 2, du CIRS, dans sa version résultant de la loi n° 109-B/2001, aux dispositions du traité relatives à la libre circulation des capitaux, le gouvernement portugais avait fait valoir que ce régime fiscal avait pour but d’éviter de pénaliser les contribuables résidents, dans le cadre de l’imposition des plus-values, du fait de l’application d’un taux progressif à leur égard et que, en substance, il existait un lien direct, pour ces contribuables, entre l’avantage fiscal résultant d’une imposition des plus-values immobilières calculée sur une assiette réduite de moitié et le taux d’imposition progressif applicable à l’ensemble de leurs revenus. La Cour a toutefois considéré, en substance, aux points 58 à 60 de cet arrêt, qu’un tel lien direct n’était pas établi et que, par conséquent, la restriction résultant de cette disposition de droit national ne saurait être justifiée par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal.

41      Or, ainsi que rappelé au point 38 de la présente ordonnance, il y a lieu de constater qu’il ne ressort pas du libellé de l’article 43, paragraphe 2, du CIRS, dans sa version résultant de la loi n° 109-B/2001, que celui-ci établit une distinction entre les contribuables non-résidents en fonction de leur lieu de résidence. De surcroît, il n’est pas fait état, dans la décision de renvoi, d’autres objectifs qui présupposeraient qu’une telle distinction soit liée, notamment, à la circonstance que les défendeurs au principal résident dans un État tiers . Partant, la conclusion à laquelle est parvenue la Cour dans l’arrêt du 11 octobre 2007, Hollmann (C‑443/06, EU:C:2007:600), est pleinement transposable à la présente affaire.

42      Par conséquent, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, il y a lieu de considérer que la restriction résultant de la réglementation fiscale en cause au principal ne saurait être justifiée par les raisons visées à l’article 65, paragraphe 1, TFUE.

43      Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée qu’une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui soumet les plus-values résultant de la cession, par un résident d’un État tiers, d’un bien immeuble situé dans cet État membre à une charge fiscale supérieure à celle qui serait appliquée pour ce même type d’opération aux plus-values réalisées par un résident dudit État membre constitue une restriction à la libre circulation des capitaux qui, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, ne relève pas de l’exception prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE et ne saurait être justifiée par les raisons visées à l’article 65, paragraphe 1, TFUE.

 Sur les dépens

44      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit :

Une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, qui soumet les plus-values résultant de la cession,par un résident d’un État tiers, d’un bien immeuble situé dans cet État membre à une charge fiscale supérieure à celle qui serait appliquée pour ce même type d’opération aux plus-values réalisées par un résident dudit État membre constitue une restriction à la libre circulation des capitaux qui, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, ne relève pas de l’exception prévue à l’article 64, paragraphe 1, TFUE et ne saurait être justifiée par les raisons visées à l’article 65, paragraphe 1, TFUE.

Signatures


*      Langue de procédure : le portugais.