Language of document : ECLI:EU:C:2018:626

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MELCHIOR WATHELET

présentées le 25 juillet 2018 (1)

Affaire C416/17

Commission européenne

contre

République française

« Manquement d’État – Articles 49, 63 et 267, troisième alinéa, TFUE – Imposition en chaîne – Différence de traitement en fonction de l’État de résidence de la sous-filiale – Exigences relatives aux preuves fondant un droit à restitution du précompte mobilier – Plafonnement du droit à restitution – Arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581) – Juridiction nationale statuant en dernier ressort – Jurisprudence nationale non conforme à l’arrêt de la Cour – Obligation de renvoi préjudiciel »






I.      Introduction

1.        Par son recours, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la République française a maintenu un traitement discriminatoire et disproportionné entre les sociétés mères françaises qui reçoivent des dividendes de filiales françaises et celles qui reçoivent des dividendes de filiales étrangères en violation du droit de l’Union, tel qu’interprété par la Cour dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581).

2.        Comme elle le résume elle-même dans sa requête, la Commission reproche à la République française d’avoir refusé de donner plein effet à l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), à travers la jurisprudence de sa plus haute juridiction administrative, à savoir le Conseil d’État (France). En effet, selon la Commission, les arrêts rendus par le Conseil d’État à la suite de l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), constituent la jurisprudence en vertu de laquelle seront analysées toutes les demandes de remboursement du précompte illégalement perçu qui ont été introduites par des parties se trouvant dans une situation semblable à celle d’Accor SA.

3.        Le recours de la Commission implique donc que la Cour se prononce sur deux problèmes distincts : d’une part, la compatibilité avec le droit de l’Union, tel qu’interprété par l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), des modalités de remboursement du précompte acquitté en raison de la perception de dividendes versés par des filiales non-résidentes et, d’autre part – et pour la première fois dans le cadre d’un recours en manquement –, la violation de l’obligation de renvoi préjudiciel par une juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours (2).

II.    Le cadre juridique

A.      Le droit français

4.        Aux termes de l’article 158 bis, I, du code général des impôts (ci‑après le « CGI »), dans sa rédaction en vigueur pendant les années d’imposition en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581) :

« Les personnes qui perçoivent des dividendes distribués par des sociétés françaises disposent à ce titre d’un revenu constitué :

a)      par les sommes qu’elles reçoivent de la société ;

b)      par un avoir fiscal représenté par un crédit ouvert sur le Trésor.

Ce crédit d’impôt est égal à la moitié des sommes effectivement versées par la société.

[...] »

5.        L’article 146, paragraphe 2, du CGI prévoyait, dans sa rédaction en vigueur pendant les années d’imposition en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581) :

« Lorsque les distributions auxquelles procède une société mère donnent lieu à l’application du précompte prévu à l’article 223 sexies, ce précompte est diminué, le cas échéant, du montant des crédits d’impôt qui sont attachés aux produits des participations [...], encaissés au cours des exercices clos depuis cinq ans au plus. »

6.        Dans sa version issue de la loi nº 98-1266, du 30 décembre 1998, de finances pour 1999 (3), applicable aux distributions mises en paiement à compter du 1er janvier 1999, l’article 223 sexies, paragraphe 1, premier alinéa, du CGI prévoyait :

« Sous réserve des dispositions des articles 209 quinquies et 223 H, lorsque les produits distribués par une société sont prélevés sur des sommes à raison desquelles elle n’a pas été soumise à l’impôt sur les sociétés au taux normal prévu au deuxième alinéa du I de l’article 219, cette société est tenue d’acquitter un précompte égal au crédit d’impôt calculé dans les conditions prévues au I de l’article 158 bis ».

B.      L’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C310/09, EU:C:2011:581)

7.        Par une réclamation du 21 décembre 2001, Accor avait sollicité de l’administration fiscale française le remboursement du précompte mobilier acquitté à l’occasion de la réception de dividendes versés par ses filiales établies dans d’autres États membres au cours des années 1998 à 2000. Ce type de remboursement n’étant accordé par la législation en vigueur que pour la réception de dividendes issus d’une filiale sise sur le territoire français, la demande fut rejetée.

8.        Accor forma un recours juridictionnel à la suite de ce refus devant le tribunal administratif de Versailles (France), lequel fit intégralement droit à sa demande. Le recours introduit par le ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique contre ce jugement ayant été rejeté par un arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles (France), ledit ministre se pourvut en cassation devant le Conseil d’État. Par un arrêt du 3 juillet 2009, celui-ci saisit alors la Cour d’une demande de décision préjudicielle.

9.        Dans son arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), la Cour a constaté que, à la différence des dividendes provenant de filiales résidentes, la législation française ne permettait pas de tenir compte de l’imposition intervenue au niveau de la filiale distributrice non-résidente, alors que les dividendes perçus tant des filiales résidentes que des filiales non-résidentes étaient, lors de leur redistribution, soumis à précompte (4). Or, selon la Cour, compte tenu du traitement désavantageux réservé aux dividendes perçus d’une filiale établie dans un autre État membre par rapport à celui auquel étaient soumis les dividendes perçus d’une filiale résidente, une société mère pouvait être dissuadée d’exercer ses activités par l’intermédiaire de filiales établies dans d’autres États membres (5).

10.      La Cour rappela ensuite sa jurisprudence selon laquelle lorsque les bénéfices sous-jacents aux dividendes d’origine étrangère sont soumis, dans l’État de la société distributrice, à un impôt inférieur à l’impôt prélevé par l’État membre de la société bénéficiaire, ce dernier doit accorder un crédit d’impôt total correspondant à l’impôt acquitté par la société distributrice dans son État d’établissement, tandis que lorsque ces bénéfices sont soumis, dans l’État de la société distributrice, à un impôt supérieur à l’impôt prélevé par l’État membre de la société bénéficiaire, ce dernier n’est contraint d’accorder un crédit d’impôt que dans la limite du montant de l’impôt sur les sociétés dû par la société bénéficiaire (6).

11.      La Cour en a déduit que, s’agissant d’un régime tel que le régime français litigieux, si un État membre devait attribuer aux bénéficiaires de dividendes provenant d’une société établie dans un autre État membre un avoir fiscal qui représenterait invariablement la moitié du montant de ces dividendes, cela reviendrait à accorder à ces dividendes un traitement plus favorable que celui dont bénéficient les dividendes provenant du premier État membre, lorsque le taux d’imposition auquel la société distributrice de ces dividendes est assujettie dans son État d’établissement est inférieur au taux d’imposition appliqué dans le premier État membre (7).

12.      Elle a considéré qu’un État membre devait, par conséquent, être en mesure de déterminer le montant de l’impôt sur les sociétés acquitté dans l’État membre d’établissement de la société distributrice et devant faire l’objet de l’avoir fiscal accordé à la société mère ; dans ces conditions, elle a jugé qu’il n’était pas suffisant d’apporter la preuve que la société distributrice avait été imposée, dans son État d’établissement, sur les bénéfices sous-jacents aux dividendes distribués, sans fournir les informations relatives à la nature et au taux de l’impôt ayant effectivement frappé lesdits bénéfices (8).

13.      À cette fin, la Cour a ajouté que les justificatifs requis devaient permettre aux autorités fiscales de l’État membre d’imposition de vérifier, de façon claire et précise, si les conditions d’obtention d’un avantage fiscal étaient réunies. Elle a toutefois précisé que les justificatifs ne devaient pas revêtir une forme particulière, l’appréciation ne devant pas être effectuée de manière trop formaliste, et que la demande de production de ces éléments devait intervenir pendant la période de conservation légale des documents administratifs et comptables prévue par le droit de l’État membre d’établissement de la filiale (9), étant entendu qu’il ne pourrait être réclamé au contribuable de fournir des documents « qui couvrent une période excédant de manière conséquente la durée de l’obligation légale de conservation des documents administratifs et comptables » (10).

14.      C’est ainsi que la Cour a dit pour droit que :

« 1)      Les articles 49 TFUE et 63 TFUE s’opposent à une législation d’un État membre ayant pour objet d’éliminer la double imposition économique des dividendes telle que celle en cause au principal, qui permet à une société mère d’imputer sur le précompte, dont elle est redevable lors de la redistribution à ses actionnaires des dividendes versés par ses filiales, l’avoir fiscal attaché à la distribution de ces dividendes s’ils proviennent d’une filiale établie dans cet État membre, mais n’offre pas cette faculté si ces dividendes proviennent d’une filiale établie dans un autre État membre, dès lors que cette législation n’ouvre pas droit, dans cette dernière hypothèse, à l’octroi d’un avoir fiscal attaché à la distribution de ces dividendes par cette filiale.

[…]

3)      Les principes d’équivalence et d’effectivité ne font pas obstacle à ce que la restitution à une société mère des sommes de nature à garantir l’application d’un même régime fiscal aux dividendes distribués par les filiales de celle-ci établies en France et à ceux distribués par les filiales de cette société établies dans d’autres États membres, donnant lieu à redistribution par ladite société mère, soit subordonnée à la condition que le redevable apporte les éléments qu’il est le seul à détenir et relatifs, pour chaque dividende en litige, notamment au taux d’imposition effectivement appliqué et au montant de l’impôt effectivement acquitté à raison des bénéfices réalisés par les filiales installées dans les autres États membres, alors même que, à l’égard des filiales installées en France, ces mêmes éléments, connus de l’administration, ne sont pas exigés. La production de ces éléments ne peut cependant être requise que sous réserve qu’il ne s’avère pas pratiquement impossible ou excessivement difficile d’apporter la preuve du paiement de l’impôt par les filiales établies dans les autres États membres, eu égard notamment aux dispositions de la législation desdits États membres se rapportant à la prévention de la double imposition et à l’enregistrement de l’impôt sur les sociétés devant être acquitté ainsi qu’à la conservation des documents administratifs. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si ces conditions sont satisfaites dans l’affaire au principal. »

C.      Les arrêts du Conseil d’État du 10 décembre 2012

15.      À la suite de la réception de l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), le Conseil d’État a rendu deux arrêts dans lesquels il a édicté une série de conditions en vertu desquelles les précomptes mobiliers perçus en violation du droit de l’Union pouvaient faire l’objet d’une restitution. Il s’agit des arrêts du 10 décembre 2012, Rhodia (11) et Accor (12) (ci-après les « arrêts du Conseil d’État »).

16.      S’agissant, en premier lieu, de l’étendue du remboursement des précomptes mobiliers, les arrêts du Conseil d’État prévoient que :

–        dans le cas où le dividende redistribué à une société mère française par l’une de ses filiales établie dans un autre État membre n’a pas été imposé au niveau de cette dernière société, l’impôt acquitté par une sous-filiale n’a pas à être pris en compte pour la détermination du précompte à restituer à la société mère (13), et

–        lorsqu’une société distributrice a supporté dans son État membre un impôt effectif à un taux supérieur au taux normal de l’impôt français, soit 33,33 %, le montant du crédit d’impôt auquel elle peut prétendre doit être limité au tiers des dividendes qu’elle a reçus et redistribués (14).

17.      S’agissant, en second lieu, des preuves au soutien des demandes de remboursement, lesdits arrêts reconnaissent :

–        l’opposabilité des déclarations de précompte en vue de la détermination du montant des dividendes perçus des filiales établies en dehors de la France (15) ;

–        la nécessité de disposer de tous les éléments de nature à justifier le bien-fondé de sa demande pendant toute la durée de la procédure sans que l’expiration du délai légal de conservation la dispense de cette obligation (16).

III. La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour

18.      À la suite des arrêts du Conseil d’État, la Commission a reçu plusieurs plaintes relatives aux conditions de remboursement du précompte mobilier. Ces plaintes ont fait l’objet d’un échange d’informations entre les services de la Commission et les autorités compétentes de la République française dans le cadre de la procédure EU Pilot 5511/13 TAXU.

19.      Ces échanges n’ayant pas abouti à un résultat satisfaisant pour la Commission, celle-ci a décidé d’entamer la procédure en manquement prévue à l’article 258 TFUE. C’est ainsi que la Commission a envoyé à la République française une lettre de mise en demeure, le 27 novembre 2014, dans laquelle elle identifiait les exigences résultant des arrêts du Conseil d’État qui étaient susceptibles de constituer des violations au droit de l’Union.

20.      Dans une réponse du 26 janvier 2015, la République française a contesté les griefs qui lui étaient reprochés. Estimant que les réponses apportées n’étaient pas satisfaisantes, la Commission a notifié à la République française, le 29 avril 2016, un avis motivé ; elle lui enjoignait de prendre les mesures pour se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de sa réception.

21.      Face au maintien de la position de la République française, la Commission a décidé d’introduire le présent recours en manquement sur le fondement de l’article 258 TFUE.

22.      Dans le cadre de la procédure écrite, la République française a déposé un mémoire en défense auquel la Commission a répondu par le dépôt d’un mémoire en réplique. La République française a également déposé un mémoire en duplique. Elles ont, en outre, eu l’occasion de présenter leurs observations orales lors d’une audience qui s’est tenue le 20 juin 2018.

IV.    Sur les manquements reprochés à la République française

23.      La Commission fonde son recours sur quatre griefs. Les trois premiers se rapportent aux restrictions qui résulteraient des arrêts du Conseil d’État et qui seraient contraires au droit de l’Union tel qu’interprété par la Cour dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581). Le quatrième grief concerne l’obligation qui aurait incombé au Conseil d’État, en tant que juridiction statuant en dernier ressort, d’introduire une demande préjudicielle en interprétation du droit de l’Union.

A.      Sur le premier grief tiré d’une restriction au droit au remboursement du précompte mobilier du fait de la non-prise en compte de l’imposition subie par les sous-filiales établies dans un État membre autre que la France

1.      Argumentation des parties

24.      Selon la Commission, il résulte des arrêts du Conseil d’État que les autorités françaises refusent de prendre en compte, aux fins du remboursement du précompte mobilier, l’imposition subie par les sous-filiales non-résidentes. Or, dans une chaîne de participation purement interne à la République française, les dividendes versés par une sous-filiale à la société intermédiaire donnaient droit à un avoir fiscal destiné à compenser l’intégralité du précompte mobilier à l’occasion de la redistribution de ces mêmes revenus. Lorsque la société intermédiaire distribuait ces dividendes à sa société mère, cette nouvelle distribution donnait encore lieu à un avoir fiscal attaché aux dividendes et destiné à compenser de la même façon le précompte dû à l’occasion de la redistribution par la société mère. La double imposition économique était donc totalement neutralisée.

25.      Il en résulterait une différence de traitement selon le siège de la sous-filiale distributrice, dès lors qu’il y aurait neutralisation complète de la double imposition économique dans le seul cas où la sous-filiale est établie sur le territoire français. Or, selon la Commission, il n’y aurait aucune raison objective qui justifierait que la République française ne neutralise pas l’intervention de la société intermédiaire au motif que les dividendes ont leur source en dehors de la France.

26.      Le gouvernement français ne conteste pas que, aux termes des arrêts du Conseil d’État, le système de remboursement du précompte mobilier ne permet pas de neutraliser l’imposition des dividendes distribués par une sous-filiale à une filiale non-résidente. Toutefois, il fait valoir que le système national d’élimination des doubles impositions n’assure une telle prévention qu’au niveau de chaque société distributrice. Or, chaque État membre serait libre d’organiser son système d’imposition dès lors qu’il n’engendre pas de discriminations. Ce faisant, les États membres n’auraient pas l’obligation d’adapter leur propre système fiscal à ceux des autres États membres.

27.      En l’occurrence, la réglementation fiscale française ne permettrait pas d’imputer sur l’imposition due par une société mère les impôts acquittés par ses sous-filiales résidentes. En effet, l’avoir fiscal n’est attribué à la société mère qu’à raison de l’imposition ayant pesé sur les bénéfices de la filiale distributrice. Dès lors, il n’existerait pas d’obligation pour la République française d’assurer une prise en compte, dans le calcul du remboursement du précompte mobilier indûment perçu, de l’imposition subie par les sous-filiales non-résidentes distributrices des dividendes. La circonstance que la distribution des dividendes d’une sous-filiale à une filiale a fait l’objet d’une imposition serait la conséquence de l’application d’une réglementation fiscale étrangère à la République française, qu’il ne lui appartiendrait pas de corriger.

28.      Par ailleurs, le système français visant à l’élimination de la double imposition ne raisonnant pas en termes de sous-filiale, l’imputation de l’impôt perçu en cas de distribution de dividendes n’est possible qu’à l’égard de la société qui reçoit lesdits dividendes. Le système français devrait ainsi être distingué du système britannique de l’impôt anticipé sur les sociétés (advance corporation tax) en cause dans les affaires à l’origine des arrêts du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑446/04, EU:C:2006:774), et du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11, EU:C:2012:707). En effet, contrairement au système britannique en cause dans les affaires ayant donné lieu à ces arrêts, le dispositif français litigieux ne tient pas compte de l’imposition pesant sur les sous-filiales qu’elles soient résidentes ou non ; le dispositif repose sur une logique qui consiste à pallier l’imposition à chaque niveau et non sur une logique d’imposition de groupe.

2.      Appréciation

29.      En réponse à la première question préjudicielle qui lui avait été posée par le Conseil d’État dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), la Cour a jugé que « les articles 49 TFUE et 63 TFUE s’opposent à une législation d’un État membre ayant pour objet d’éliminer la double imposition économique des dividendes [...], qui permet à une société mère d’imputer sur le précompte, dont elle est redevable lors de la redistribution à ses actionnaires des dividendes versés par ses filiales, l’avoir fiscal attaché à la distribution de ces dividendes s’ils proviennent d’une filiale établie dans cet État membre, mais n’offre pas cette faculté si ces dividendes proviennent d’une filiale établie dans un autre État membre, dès lors que cette législation n’ouvre pas droit, dans cette dernière hypothèse, à l’octroi d’un avoir fiscal attaché à la distribution de ces dividendes par cette filiale ».

30.      S’appuyant sur le fait que le droit de l’Union, dans son état actuel, ne prescrit pas de critères généraux pour la répartition des compétences entre les États membres s’agissant de l’élimination de la double imposition à l’intérieur de l’Union européenne (17), la République française propose une application formaliste, restrictive et, à mon sens, erronée de la réponse apportée à la première question dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581).

31.      Certes, un État membre n’a pas l’obligation d’adapter son propre système fiscal aux différents systèmes de taxation des autres États membres en vue, notamment, d’éliminer les doubles impositions, pour autant que sa réglementation ne soit pas discriminatoire (18). Toutefois, en l’espèce, dans une situation purement nationale, l’absence de double imposition dans le chef de la société mère ne s’explique qu’en raison de l’octroi successif, à tous les « échelons » de la chaîne de participation des sociétés établies en France, d’un avoir fiscal destiné à compenser l’intégralité du précompte mobilier dû à l’occasion de la redistribution de mêmes revenus.

32.      Par conséquent, s’il est exact qu’il n’est pas non plus permis d’imputer directement les impositions acquittées par des sous-filiales établies en France sur l’impôt sur les sociétés acquitté par une société mère, une telle imputation se révèle néanmoins inutile au regard de l’ensemble du système fiscal applicable.

33.      L’absence de discrimination invoquée par la République française résulte donc bel et bien d’une lecture artificielle, ou à tout le moins formaliste – car exclusivement concentrée sur le dernier échelon de la chaîne d’imposition – du système fiscal dénoncé par la Cour dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581).

34.      En outre, il ressort clairement de la jurisprudence de la Cour qu’un État membre n’est pas obligé de compenser la charge fiscale résultant de l’exercice des compétences fiscales d’un autre État membre ou d’un État tiers à condition qu’il n’exerce pas de compétence fiscale sur les dividendes entrants, ni en les imposant ni en les prenant en compte de manière différente, dans le chef de la société bénéficiaire. En revanche, lorsque ce même État membre choisit d’imposer lesdits dividendes, il doit prendre en compte, dans les limites de sa propre imposition, la charge fiscale résultant de l’exercice des compétences fiscales de l’autre État membre (19).

35.      La République française ne peut être suivie à cet égard lorsqu’elle affirme que la Cour se serait limitée, à l’occasion de l’arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11, EU:C:2012:707), de constater l’existence d’une discrimination dans la législation britannique sans consacrer l’exigence d’une prise en compte, dans tout mécanisme d’élimination de la double imposition, de l’imposition subie par les sous-filiales.

36.      En effet, comme la République française le précise elle-même, cet arrêt fait suite à un premier arrêt de la Cour dans lequel celle-ci avait rappelé, de façon générale et abstraite, sans référence à la législation britannique en cause, que, « quel que soit le mécanisme adopté pour prévenir ou atténuer l’imposition en chaîne ou la double imposition économique, les libertés de circulation garanties par le traité s’opposent à ce qu’un État membre traite de manière moins avantageuse les dividendes d’origine étrangère que les dividendes d’origine nationale, à moins que cette différence de traitement ne concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou qu’elle soit justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général » (20).

37.      Le fait que le système fiscal britannique en cause dans ces affaires prévoyait un système d’exonération pour les dividendes versés par des sociétés résidentes et un système d’imputation pour les dividendes versés par des sociétés non-résidentes alors que le régime français prévoit un système d’imputation quelle que soit l’origine des dividendes distribués et l’imposition intégrale des dividendes distribués, assortie d’un crédit d’impôt, à chaque distribution et à chaque redistribution de dividendes, est sans incidence.

38.      En effet, le principe rappelé dans l’arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑446/04, EU:C:2006:774), et encore confirmé depuis lors, est bel et bien l’obligation de traiter de manière équivalente les dividendes versés à des résidents par des sociétés non-résidentes dès lors que l’État membre connaît un système de prévention ou d’atténuation de l’imposition en chaîne oude la double imposition économique dans le cas de dividendes versés à des résidents par des sociétés résidentes (21).

39.      Dans ces conditions, la Cour a jugé que « les articles [49 TFUE et 63 TFUE] s’opposent à une législation d’un État membre qui permet à une société résidente percevant des dividendes d’une autre société résidente de déduire du montant dont la première société est redevable au titre de l’impôt sur les sociétés par anticipation, le montant dudit impôt payé par anticipation par la seconde société, alors que, dans le cas d’une société résidente percevant des dividendes d’une société non-résidente, une telle déduction n’est pas permise en ce qui concerne l’impôt correspondant aux bénéfices distribués acquitté par cette dernière société dans son État de résidence » (22).

40.      La Cour a été particulièrement claire dans la motivation et la réponse apportée aux deuxième et quatrième questions posées à l’occasion de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11, EU:C:2012:707) : les articles 49 TFUE et 63 TFUE s’opposent à une législation d’un État membre qui, pour ce qui concerne les seuls dividendes d’origine étrangère, ne tient pas compte de l’impôt sur les bénéfices distribués (23). À cet égard, l’important est bien l’imposition desdits bénéfices et non le fait que la société non-résidente qui verse les dividendes à sa société mère est elle-même assujettie à l’impôt sur les sociétés (24).

3.      Conclusion sur le premier grief

41.      Il résulte de ce qui précède que, en refusant de prendre en compte l’imposition subie par les sous-filiales établies dans un État membre autre que la France alors que le mécanisme applicable aux sous-filiales établies en France permettait à celles-ci de verser à la société intermédiaire bénéficiaire des dividendes exemptés du coût de l’impôt qui les frappaient, la République française perpétue la discrimination constatée par la Cour dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581).

B.      Sur le deuxième grief tiré du caractère disproportionné des exigences prescrites en matière de preuve pour fonder le droit au remboursement du précompte mobilier illégalement perçu

1.      Argumentation des parties

42.      La Commission décompose son deuxième grief en trois branches.

43.      Dans la première branche, la Commission estime que les arrêts du Conseil d’État exigent une correspondance entre, d’une part, les documents comptables relatifs aux dividendes distribués et, d’autre part, les procès-verbaux d’assemblée générale des filiales constatant les bénéfices dégagés sous forme de dividendes distribuables. Or, pour la plupart des filiales non établies en France, le procès-verbal d’assemblée générale constate la mise en distribution d’un « bénéfice distribuable » provenant d’un agrégat comptable qui englobe tous les reports à nouveau précédents non distribués ainsi que le résultat de l’exercice précédent. Dans ces conditions, il serait très difficile, voire impossible, de déterminer si le dividende distribué provient d’un résultat comptable particulier.

44.      Dans la deuxième branche, la Commission reproche aux arrêts du Conseil d’État de subordonner le droit au remboursement du précompte mobilier au dépôt d’une déclaration préalable de précompte dans laquelle seraient identifiés les montants de précompte acquittés au titre des redistributions de dividendes. Or, puisque les sociétés résidentes ne pouvaient pas bénéficier d’un avoir fiscal au titre du précompte dû en raison de la distribution de dividendes provenant d’une filiale non-résidente, il ne pourrait être exigé de ces sociétés d’avoir fait état de ces dividendes dans leur déclaration de précompte. En se fondant sur les choix faits par une société mère lors de la liquidation du précompte, les arrêts du Conseil d’État ne respecteraient pas les obligations découlant des principes d’équivalence et d’effectivité qui régissent les modalités nationales en matière de restitution de taxes nationales perçues en violation du droit de l’Union.

45.      Dans la troisième branche, la Commission conteste la limitation fondée sur l’exigence de production de pièces justificatives au-delà du délai légal de conservation. En ayant indiqué que l’expiration du délai légal de conservation des documents ne dispensait pas la société réclamant le remboursement du précompte mobilier illégalement perçu de son obligation de produire tous les éléments de nature à justifier le bien-fondé de sa demande, les arrêts du Conseil d’État seraient en contradiction avec le principe d’effectivité.

46.      À titre liminaire, le gouvernement français souligne que l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), a expressément précisé que les restitutions de précompte étaient conditionnées à ce que les sociétés requérantes apportent la preuve, par tous moyens, des impositions acquittées par leurs filiales dans leur État membre d’établissement. Dans ce contexte, les arrêts du Conseil d’État se distingueraient par une approche particulièrement ouverte, dès lors qu’ils ont accepté toute forme de documents permettant aux sociétés de démontrer le taux d’imposition supporté par leurs filiales non-résidentes.

47.      En ce qui concerne la première branche du deuxième grief, ce gouvernement rappelle que les arrêts du Conseil d’État n’ont pas exigé la preuve de ce que l’imposition dont l’imputation était réclamée avait grevé des dividendes correspondant à un exercice comptable particulier. Serait ainsi considérée l’imposition acquittée à raison des dividendes pris globalement, sans égard aux exercices comptables dont ils seraient issus.

48.      En outre, la circonstance que, dans les espèces ayant abouti à l’adoption des arrêts du Conseil d’État, celui-ci se soit appuyé sur les procès-verbaux d’assemblée générale des filiales non-résidentes résulterait de ce que de tels documents ont été présentés par les sociétés concernées pour prouver le taux d’imposition ayant grevé les dividendes distribués.

49.      En ce qui concerne la deuxième branche du deuxième grief, le gouvernement français souligne que l’intégralité des distributions de dividendes, qu’elles portent sur des dividendes de filiales françaises ou de filiales non-résidentes, devait figurer dans les déclarations de précompte. En outre, le paiement du précompte mobilier n’étant dû qu’en cas de redistribution, les dividendes pour lesquels la preuve du montant d’imposition est requise sont nécessairement ceux qui ont fait l’objet d’une telle redistribution.

50.      En ce qui concerne la troisième branche du deuxième grief, les arrêts du Conseil d’État n’auraient pas exigé la production de justificatifs au-delà de leur durée légale de conservation. Le Conseil d’État aurait fondé son appréciation sur le fondement des documents présentés par les sociétés concernées, parmi lesquels figuraient de tels justificatifs.

51.      En tout état de cause, il appartiendrait à un contribuable ayant introduit une réclamation fiscale de conserver les documents nécessaires à prouver le bien-fondé de sa demande jusqu’au dénouement de la procédure administrative et contentieuse, indépendamment de leur durée légale de conservation.

2.      Appréciation

a)      Sur l’utilisation des procès-verbaux des assemblées générales des filiales distributrices

52.      Selon la Commission, les arrêts du Conseil d’État exigeraient une correspondance entre, d’une part, les documents comptables relatifs aux dividendes distribués et, d’autre part, les procès-verbaux d’assemblée générale des filiales constatant les bénéfices dégagés sous forme de dividendes distribuables.

53.      Je ne partage pas cette interprétation des arrêts en question. En effet, s’il est vrai que le Conseil d’État fait référence à l’impossibilité de se prévaloir d’impositions qui ne seraient pas rattachables aux sommes figurant sur les procès-verbaux d’assemblée générale des filiales distributrices, c’est pour indiquer la position défendue par le ministre (25). Il ne ressort pas non plus des arrêts du Conseil d’État que la présentation de tels documents soit la conséquence d’une demande contraignante de cette juridiction.

54.      En tout état de cause, si les procès-verbaux d’assemblée générale ont été utilisés par le Conseil d’État, il semble que ce soit parmi un ensemble d’éléments (26). Les décisions des juridictions administratives citées à titre d’exemples par la République française dans son mémoire en duplique confortent cette interprétation des arrêts du Conseil d’État. La première branche du deuxième grief ne me paraît donc pas fondée.

b)      Sur l’exigence de déclaration de précompte préalable

55.      La Commission estime qu’en opposant les choix faits par une société mère lors de la liquidation du précompte à l’occasion de la déclaration afférente à cette liquidation, les arrêts du Conseil d’État ne respecteraient pas les obligations découlant des principes d’équivalence et d’effectivité.

56.      Il n’est pas contesté que les sociétés mères établies en France n’étaient pas admises à bénéficier d’un avoir fiscal à raison des dividendes perçus de leurs filiales non-résidentes. En revanche, il ressort non seulement de la réponse de la République française à la mise en demeure du 26 novembre 2014, mais également des conclusions du rapporteur public sous les arrêts du Conseil d’État, que les sociétés mères établies en France devaient bel et bien indiquer dans leur déclaration de précompte les dividendes provenant de leurs filiales non-résidentes. Selon les conclusions du rapporteur public, s’il y avait une incertitude juridique, celle-ci ne concernait pas l’obligation de déclaration, mais uniquement le régime juridique des dividendes distribués.

57.      Or, il ne saurait y avoir de restitution qu’à la condition qu’un précompte ait été versé à l’occasion d’une distribution de dividendes. Dans ces circonstances, puisque tout dividende distribué devait nécessairement être déclaré, le Conseil d’État n’est pas allé à l’encontre des principes d’équivalence et d’effectivité lorsqu’il a jugé que les sociétés mères n’étaient pas fondées à soutenir que les déclarations de précompte qu’elles avaient souscrites ne leur seraient pas opposables.

58.      La deuxième branche du deuxième grief ne me paraît, dès lors, pas fondée. L’arrêt du 8 mars 2001, Metallgesellschaft e.a. (C‑397/98 et C‑410/98, EU:C:2001:134) invoqué par la Commission n’est pas de nature à modifier ce constat puisque les demandes à l’origine de cet arrêt étaient des demandes indemnitaires auxquelles étaient opposés l’inaction des contribuables et leur manque de diligence.

c)      Sur l’incidence de l’expiration du délai légal de conservation des pièces justificatives

59.      La Commission reproche enfin à la République française de limiter les restitutions de précompte en exigeant la production de pièces justificatives au-delà de leur délai légal de conservation.

60.      Dans les arrêts du Conseil d’État, il a été considéré qu’« il appartient à une société ayant présenté une réclamation tendant à la restitution du précompte de disposer de tous les éléments de nature à justifier le bien-fondé de sa demande pendant toute la durée de la procédure [et] que l’expiration du délai légal de conservation de tels documents ne peut la dispenser de cette obligation » (27).

61.      Cette approche ne me semble pas entrer en contradiction avec les limites fixées par la Cour dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581).

62.      En effet, dans cet arrêt, la Cour a admis que le contribuable devait fournir les informations relatives à la nature et au taux de l’impôt ayant effectivement frappé les bénéfices sous-jacents aux dividendes distribués (28). À cet égard, elle a précisé que « [l]a demande de production [des justificatifs requis devait] intervenir pendant la période de conservation légale des documents administratifs ou comptables, telle que prévue par le droit de l’État membre d’établissement de la filiale » (29). La Cour ajoutait encore, au même point, qu’il ne pourrait être demandé au contribuable, « afin de bénéficier de l’avoir fiscal, de fournir des documents qui couvrent une période excédant de manière conséquente la durée de l’obligation légale de conservation des documents administratifs et comptables ».

63.      Or, comme le relève pertinemment la République française dans son mémoire en défense, ces précisions s’inscrivent dans le cadre de l’examen par la Cour du principe d’effectivité qui concerne, au premier chef, les autorités administratives de l’État membre d’imposition. Selon la Cour, « les justificatifs requis devraient permettre aux autorités fiscales de l’État membre d’imposition de vérifier, de façon claire et précise, si les conditions d’obtention d’un avantage fiscal sont réunies » (30).

64.      En cas de procédure administrative de contestation, je suis donc d’avis que l’expiration du délai légal de conservation des documents pertinents s’apprécie à la date de l’introduction de cette procédure précontentieuse et non à la date d’une éventuelle demande relative à ces documents par le juge saisi ultérieurement. C’est d’ailleurs la seule façon de comprendre la seconde précision apportée par la Cour à propos de l’expiration du délai légal de conservation des documents administratifs et comptables selon laquelle il ne pourrait être demandé à un contribuable « de fournir des documents qui couvrent une période excédant de manière conséquente la durée de l’obligation légale de conservation des documents administratifs et comptables » (31). En effet, si la durée de conservation légale était un délai strict qui s’imposait également aux juridictions, comment pourrait-il être envisagé d’avoir égard à des documents qui couvrent une période qui excède, serait-ce de manière non conséquente, la durée de l’obligation légale de conservation ?

65.      En outre, j’observe également qu’il est expressément rappelé dans les arrêts du Conseil d’État que « lorsque le redevable produit des éléments ou se prévaut de l’impossibilité matérielle de les produire, il appartient à l’administration d’apporter des éléments en sens contraire [et que dans ce cas] il revient alors au juge de l’impôt de se déterminer au vu de l’instruction et d’apprécier, compte tenu de l’argumentation des parties si, pour le dividende en litige, le redevable justifie de sa demande en restitution » (32).

66.      Pas plus que les deux premières branches, la troisième branche du deuxième grief ne me paraît fondée.

3.      Conclusion sur le deuxième grief

67.      Dans ces circonstances, j’estime que la Commission ne démontre pas que la République française aurait subordonné la restitution à une société mère des sommes de nature à garantir l’application d’un même régime fiscal aux dividendes distribués par les filiales de celles-ci établies en France et à ceux distribués par les filiales de cette société établies dans d’autres États membres à des modalités probatoires contraires aux principes d’équivalence et d’effectivité.

C.      Sur le troisième grief tiré d’un plafonnement du montant remboursable au titre du précompte mobilier illégalement perçu à un tiers du montant des dividendes

1.      Argumentation des parties

68.      Selon la Commission, il résulte explicitement des arrêts du Conseil d’État que le montant du crédit d’impôt à restituer aux sociétés mères françaises ayant reçu des dividendes de leurs filiales non-résidentes est strictement limité à un tiers du montant des dividendes perçus et distribués. En revanche, le montant de l’avoir fiscal pour des dividendes distribués par une filiale résidente est fixé forfaitairement à la moitié du montant desdits dividendes.

69.      En limitant au tiers des dividendes versés par une filiale non-résidente le remboursement du précompte mobilier payé sur ces dividendes, les arrêts du Conseil d’État placeraient donc les sociétés recevant de tels dividendes dans une situation moins favorable que celle des sociétés les recevant d’une filiale résidente, ce qui conduirait à la persistance de la discrimination constatée par la Cour dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581).

70.      Le gouvernement français soutient que la limitation du remboursement du précompte à un tiers des dividendes reçus correspond au montant de précompte effectivement acquitté. L’égalité de traitement des dividendes perçus par des filiales résidentes et non-résidentes serait ainsi parfaitement garantie.

71.      En outre, un tel plafonnement du remboursement du précompte permettrait de prendre en considération de manière égale l’imposition pesant sur les dividendes distribués dont l’État membre d’établissement de la filiale est à l’origine et celle qui pèse sur les dividendes distribués par une filiale résidente. À ce titre, cette limitation peut, en pratique, aboutir à une restitution du précompte mobilier inférieure à l’imposition effectivement acquittée par la filiale distributrice dans son État membre d’établissement, mais ce remboursement correspond exactement au montant de précompte effectivement acquitté par la société résidente. Cela permet d’éviter que les dividendes d’origine étrangère bénéficient d’un traitement plus favorable que les dividendes en provenance de l’État membre de la société mère.

2.      Appréciation

72.      En substance, selon les dispositions du CGI applicables, les sociétés mères établies en France qui percevaient des dividendes distribués par des sociétés résidentes disposaient d’un avoir fiscal égal à la moitié des sommes effectivement versées. Ces sociétés mères étaient tenues d’acquitter un précompte égal à ce crédit d’impôt.

73.      Aux termes des arrêts du Conseil d’État, « lorsqu’une société distributrice a supporté dans l’État membre un impôt effectif à un taux supérieur au taux normal de l’impôt français, soit 33,33 %, le montant du crédit d’impôt auquel elle peut prétendre doit être limité au tiers des dividendes qu’elle a reçus et redistribués » (33). Cette limitation permettrait la mise en œuvre de la réserve de la Cour selon laquelle lorsque les bénéfices d’une société sont soumis, dans l’État de la société distributrice, à un impôt supérieur à l’impôt prélevé par l’État membre de la société bénéficiaire, ce dernier n’est pas contraint d’accorder un crédit d’impôt supérieur au montant de l’impôt sur les sociétés dû par la société bénéficiaire (34).

74.      La démonstration de la République française me paraît, à cet égard, convaincante. En effet, lorsqu’une filiale résidente en France fait un bénéfice de 300, le dividende disponible pour la société mère est, après paiement par la société filiale de l’impôt sur les sociétés au taux normal de 33,33 %, de 200. La société mère établie en France perçoit donc un dividende de 200 exonéré de l’impôt sur les sociétés et touche, à cette occasion, un avoir fiscal équivalent à la moitié de ce montant, soit 100. Ce montant étant identique au précompte qu’elle doit verser lorsqu’elle distribue le dividende, le solde disponible au profit de l’actionnaire est toujours de 200. Or, lorsqu’un dividende d’un montant équivalent a été versé à la société mère par une filiale non-résidente, le précompte exigible correspond au tiers du revenu distribuable sans qu’un avoir fiscal puisse être utilisé en compensation. Le solde disponible est donc, dans cette situation, de 133. En limitant la somme à rembourser au tiers du dividende reçu de la filiale non-résidente – lui-même équivalent à l’avoir fiscal perçu par l’actionnaire au titre de cette distribution –, la société distributrice se voit restituer le montant du précompte qu’elle avait acquitté. L’équilibre est ainsi rétabli puisqu’un solde disponible de 200 est reconstitué (35). La République française illustre sa démonstration par le schéma suivant :

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75.      En revanche, si la République française devait rembourser un précompte équivalent à l’intégralité de l’impôt payé par la société filiale distributrice dans son État de résidence – c’est-à-dire, dans l’hypothèse chiffrée utilisée au point précédent, un montant de 100, soit un montant supérieur à l’impôt payé par la société mère en raison de la perception du dividende –, le montant perçu par les actionnaires serait supérieur à celui perçu par un actionnaire dans la situation purement interne (36).

76.      Le plafonnement du précompte remboursé à un tiers du montant des dividendes faisant l’objet de la redistribution (avant impôt) n’est donc pas équivalent à l’impôt effectivement payé par la filiale dans son État de résidence. Cependant, le montant remboursé – non soumis à précompte et donc intégralement redistribuable – correspond au précompte effectivement acquitté par la société mère distributrice et dont elle sollicite le remboursement ; la discrimination dénoncée est donc corrigée.

77.      Dans son mémoire en réplique, la Commission admet qu’elle n’avait pas pris en compte le fait que les remboursements opérés à la suite de l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), n’entraînaient pas d’imposition ni l’octroi d’un avoir fiscal. Néanmoins, la Commission estime qu’il existerait toujours un « risque » que le plafonnement du remboursement ne supprime pas totalement la discrimination induite par le régime fiscal jugé incompatible avec le droit de l’Union. Tel serait encore le cas lorsque le montant de l’impôt sur le bénéfice des sociétés dû au final est supérieur à celui du précompte prélevé en amont ou lorsque l’imposition à laquelle est soumis l’actionnaire excède le montant du précompte mobilier initialement prélevé. Cette nouvelle approche vise donc une différence de traitement entre les actionnaires finals. Or, cette hypothèse n’est pas celle traitée par les affaires ayant donné lieu à l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581) (37), ni celle en litige devant le juge de l’impôt saisi d’une demande de restitution de précompte par la société mère distributrice des dividendes.

78.      En outre, cette nouvelle approche de la Commission n’est que l’expression d’une analyse théorique. Elle n’est assortie d’aucun exemple concret de nature à en démontrer la réalité. Or, « dans le cadre d’une procédure en manquement en vertu de l’article 258 TFUE, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué. Elle doit apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification par celle-ci de l’existence de ce manquement, sans pouvoir se fonder sur une présomption quelconque » (38).

3.      Conclusion sur le troisième grief

79.      Au vu des considérations qui précèdent, j’estime que la Commission ne démontre pas que la République française perpétuerait la discrimination constatée par la Cour dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), en limitant au tiers des dividendes versés par une filiale non-résidente le remboursement du précompte mobilier payé sur ces dividendes.

D.      Sur le quatrième grief tiré du défaut d’avoir interrogé la Cour pour déterminer la compatibilité avec le droit de l’Union des restrictions au droit au remboursement du précompte mobilier illégalement perçu

1.      Argumentation des parties

80.      Selon la Commission, le Conseil d’État aurait dû procéder à un renvoi préjudiciel avant de fixer les modalités de remboursement du précompte mobilier dont la perception a été jugée incompatible avec le droit de l’Union aux termes de l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581). En effet, en tant que juridiction statuant en dernière instance au sens de l’article 267, paragraphe 3, TFUE, le Conseil d’État était tenu d’interroger la Cour au vu des difficultés à tirer les conséquences de cet arrêt.

81.      D’une part, les doutes sur la compatibilité avec le droit de l’Union d’éventuelles restrictions au droit à remboursement du précompte auraient été mis en avant par les conclusions du rapporteur public et par le souhait des parties que le Conseil d’État présente une nouvelle demande de décision préjudicielle.

82.      D’autre part, le risque d’une divergence de jurisprudence au sein de l’Union ne pouvait être exclu au vu de l’arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11, EU:C:2012:707).

83.      Le gouvernement français rappelle, tout d’abord, la jurisprudence de la Cour selon laquelle les juridictions nationales ne sont pas tenues d’introduire une demande de décision préjudicielle en interprétation au seul motif qu’une partie à l’instance le souhaite.

84.      Il soutient, ensuite, que la Commission est restée en défaut de préciser les difficultés auxquelles le Conseil d’État aurait été confronté dans les espèces qui ont abouti aux arrêts concernés et qui auraient justifié un renvoi préjudiciel au titre de l’article 267, troisième alinéa, TFUE. De plus, cette juridiction aurait eu à faire face à des difficultés factuelles et non d’interprétation du droit de l’Union.

85.      En tout état de cause, le Conseil d’État aurait été fondé à considérer que les réponses aux questions auxquelles il était confronté s’imposaient avec une évidence suffisante pour qu’il n’en résulte pas d’obligation de poser à la Cour une nouvelle question préjudicielle.

2.      Appréciation

a)      Sur le principe de violation de l’article 267, troisième alinéa, TFUE

86.      Le quatrième grief ne peut s’envisager que dans l’hypothèse où l’un (ou plusieurs) des autres griefs est fondé. Comme la Commission le précise elle-même, ce dernier grief est limité au fait que le Conseil d’État a manqué à son obligation « dans les circonstances de l’espèce » (39), c’est-à-dire les suites de l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581). Il ne vise donc pas un manquement structurel à l’obligation de renvoi préjudiciel qui pèse sur le Conseil d’État en vertu de l’article 267, troisième alinéa, TFUE.

87.      En tout état de cause, comme je l’ai indiqué dans le cadre de l’introduction aux présentes conclusions, c’est la première fois que la Cour est amenée à se prononcer sur un grief de cette nature dans le cadre d’un recours en manquement. Cependant, la possibilité théorique d’un manquement étatique fondé sur une violation de l’article 267, troisième alinéa, TFUE m’apparaît certaine.

88.      D’une part, il est constant que « la responsabilité d’un État membre au regard de l’article [258 TFUE] est engagée, quel que soit l’organe de l’État dont l’action ou l’inaction est à l’origine du manquement, même s’il s’agit d’une institution constitutionnellement indépendante » (40). D’autre part, la Cour a rejeté l’argument selon lequel il serait difficile de remédier à un manquement au motif qu’il trouverait son origine dans un arrêt d’une juridiction suprême (41).

89.      Cette possibilité est non seulement cohérente avec le but poursuivi par l’obligation de saisine prévue à l’article 267, troisième alinéa, TFUE, mais également avec les conditions du régime de responsabilité des États membres en cas de violation du droit de l’Union.

90.      En effet, l’obligation de saisine prévue à l’article 267, troisième alinéa, TFUE a notamment pour but de prévenir que s’établisse, dans un État membre, une jurisprudence nationale qui ne concorde pas avec les règles du droit de l’Union (42). Comme l’a souligné l’avocat général Bot, le non-respect par les juridictions nationales dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne de leur obligation de renvoi conduit à priver la Cour de la mission fondamentale qui lui est assignée à l’article 19, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, qui est d’assurer « le respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités » (43).

91.      En outre, il ressort d’une jurisprudence constante que l’inexécution de l’obligation de renvoi préjudiciel imposée à l’article 267, troisième alinéa, TFUE est un des éléments qui doit être pris en compte dans l’examen de la responsabilité d’un État membre en raison d’une décision d’une juridiction nationale statuant en dernier ressort (44).

92.      La possibilité de reconnaître un manquement dans le chef d’un État membre en raison d’une violation de l’obligation de renvoi préjudiciel est d’autant plus justifiée lorsque celle-ci fait suite à un premier arrêt de la Cour. En effet, selon la Cour, l’obligation qui pèse sur un État membre aux termes de l’article 260, paragraphe 1, TFUE signifie que « tous les organes de l’État membre concerné ont l’obligation d’assurer, dans les domaines de leurs pouvoirs respectifs, l’exécution de l’arrêt de la Cour. [C’est ainsi que l]es juridictions de l’État membre concerné ont de leur côté l’obligation d’assurer le respect de l’arrêt dans l’exercice de leur mission » (45). Affirmée à propos de l’exécution d’un arrêt en constatation de manquement, la même conclusion s’impose à l’égard des juridictions ayant interrogé la Cour à titre préjudiciel puisque les arrêts en interprétation de la Cour ont un effet « généralisé » dans l’ordre juridique de l’Union (46) : une fois qu’une disposition de droit de l’Union a été interprétée par la Cour de justice, cette interprétation s’impose à toutes les juridictions (47). Cette interprétation précise la signification et la portée de la règle du droit de l’Union en cause telle qu’elle doit ou aurait dû être comprise et appliquée depuis le moment de sa mise en vigueur (48).

93.      Par conséquent, si la juridiction à l’origine de la question préjudicielle éprouve encore des doutes sur le sens de la règle et qu’elle est une juridiction de dernier ressort, elle a alors l’obligation de réinterroger la Cour. En effet, dans ces circonstances, la réponse de la Cour apparaît nécessaire pour la solution du litige de telle sorte que, conformément à l’arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335) (49), l’obligation de renvoi est « constituée » (50).

94.      En effet, s’agissant de la portée de cette obligation, la Cour a confirmé qu’il résultait désormais « d’une jurisprudence consolidée depuis le prononcé de l’arrêt Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335) qu’une juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’un recours juridictionnel de droit interne est tenue, lorsqu’une question du droit de l’Union se pose devant elle, de déférer à son obligation de saisine, à moins qu’elle n’ait constaté que la question soulevée n’est pas pertinente [– c’est-à-dire “dans les cas où la réponse à cette question, quelle qu’elle soit, ne pourrait avoir aucune influence sur la solution du litige” (51) –] ou que la disposition du droit de l’Union concernée a déjà fait l’objet d’une interprétation de la part de la Cour ou que l’application correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable » (52).

b)      Sur l’application du principe au cas d’espèce

95.      Au terme de mon analyse des deuxième et troisième griefs, je suis arrivé à la conclusion que le Conseil d’État ne s’était pas mépris sur le sens et la portée de l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), en ce qui concerne le régime probatoire autorisé et l’évaluation du montant de précompte à rembourser. Aucun manquement à l’obligation de renvoi préjudiciel ne peut lui être reproché à ce propos. En effet, il peut être admis que les points de droit en cause avaient été résolus, au sens de l’arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335, point 14), par l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581).

96.      En revanche, la solution retenue dans les arrêts du Conseil d’État à propos de l’impôt acquitté par les sous-filiales est plus problématique dès lors qu’il n’est pas contestable que le recours au droit de l’Union apparaissait nécessaire en vue d’aboutir à la solution des litiges dont il était saisi.

97.      Certes, il appartient à la seule juridiction nationale d’apprécier si l’application correcte du droit de l’Union s’impose avec une telle évidence qu’elle ne laisse place à aucun doute raisonnable et, en conséquence, de décider de s’abstenir de soumettre à la Cour une question d’interprétation du droit de l’Union qui a été soulevée devant elle (53). En d’autres termes, « il appartient aux seules juridictions nationales dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne d’apprécier, sous leur propre responsabilité et de manière indépendante, si elles sont en présence d’un acte clair » (54).

98.      Toutefois, il est constant depuis l’arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335) que pour conclure à l’existence d’une telle situation, « la juridiction nationale statuant en dernière instance doit être convaincue que la même évidence s’imposerait également aux juridictions des autres États membres et à la Cour » (55). Comme la Cour a pris soin de le préciser, « [c]e n’est que si ces conditions sont remplies que cette juridiction nationale pourra s’abstenir de soumettre cette question à la Cour et la résoudre sous sa propre responsabilité » (56).

99.      En l’espèce, il n’est pas contesté que la question de la prise en compte de l’impôt acquitté par les sous-filiales de la société mère n’avait pas été abordée par la Cour dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), alors qu’elle faisait l’objet de l’arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11, EU:C:2012:707). Par conséquent, en choisissant de s’écarter de cet arrêt au seul motif que le régime britannique était différent du régime français de l’avoir fiscal et du précompte, le Conseil d’État ne pouvait être certain que son raisonnement s’imposerait avec la même évidence à la Cour. La divergence des solutions proposées par les sociétés requérantes et le rapporteur public démontrait d’ailleurs l’absence de certitude sur la solution à retenir.

100. En tout état de cause, en n’interrogeant pas la Cour, le Conseil d’État a créé un risque de divergences de jurisprudence au sein de l’Union incompatible avec l’obligation de renvoi préjudiciel qui pesait sur lui, en tant que juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles de recours, au titre de l’article 267, troisième alinéa, TFUE.

101. La République française ne peut pas non plus être suivie lorsqu’elle soutient que la nécessité de tenir compte des sous-filiales ne nécessitait aucune interprétation de droit mais seulement des appréciations factuelles. En effet, afin de calculer le montant à rembourser – ce qui est une appréciation factuelle –, la question de savoir s’il faut prendre en compte l’impôt acquitté par les sous-filiales est une question qui devait nécessairement être résolue au préalable et dont la réponse est fonction de la règle juridique applicable (57).

3.      Conclusion sur le quatrième grief

102. Au vu des considérations qui précèdent, j’estime que la République française a manqué à l’obligation qui pesait sur le Conseil d’État au titre de l’article 267, troisième alinéa, TFUE.

103. En effet, alors qu’il était certain, au vu de l’arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11, EU:C:2012:707) que la prise en compte de l’impôt acquitté par les sous-filiales non-résidentes était une question du droit de l’Union susceptible d’avoir une influence sur la solution des litiges dont le Conseil d’État était saisi et alors que l’application correcte du droit de l’Union ne s’imposait pas avec une évidence telle qu’elle ne laissait place à aucun doute raisonnable, le Conseil d’État a choisi de ne pas interroger la Cour à titre préjudiciel sur cette question.

V.      Sur les dépens

104. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

105. En l’espèce, la Commission et la République française ont conclu respectivement à la condamnation de l’autre partie à l’instance aux dépens.

106. L’article 138, paragraphe 3, du règlement de procédure de la Cour prévoit que, si cela paraît justifié au vu des circonstances de l’espèce, la Cour peut décider que, outre ses propres dépens, une partie supporte une fraction des dépens de l’autre partie. En l’occurrence, comme je propose que le recours de la Commission ne soit accueilli qu’en ce qu’il concerne les premier et quatrième griefs, j’estime qu’il y aurait lieu, en application de cette disposition, de condamner la République française à supporter, outre ses propres dépens, la moitié des dépens de la Commission.

VI.    Conclusion

107. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit :

1)      En refusant de prendre en compte l’imposition subie par les sous-filiales établies dans un État membre autre que la France alors que le mécanisme applicable aux sous-filiales établies en France permettait à celles-ci de verser à la société intermédiaire bénéficiaire des dividendes exemptés du coût de l’impôt qui les frappaient, la jurisprudence du Conseil d’État (France) a perpétué la discrimination constatée par la Cour à l’occasion de l’arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581), et, ce faisant, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 49 et 63 TFUE.

2)      Le Conseil d’État n’ayant pas interrogé la Cour alors que la prise en compte de l’impôt acquitté par les sous-filiales non-résidentes était une question du droit de l’Union susceptible d’avoir une influence sur la solution des litiges dont il était saisi, et ce alors que l’application correcte du droit de l’Union ne s’imposait pas avec une évidence telle qu’elle ne laissait place à aucun doute raisonnable, la République française a manqué à l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 267, troisième alinéa, TFUE.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      La République française est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, la moitié des dépens de la Commission européenne qui supporte la moitié de ses propres dépens.


1      Langue originale : le français.


2      Si la Commission avait entamé une procédure en manquement contre le Royaume de Suède au motif que le Högsta domstolen (Cour suprême, Suède) manquait systématiquement à son obligation de renvoi préjudiciel (voir avis motivé 2003/2161 de la Commission du 12 octobre 2004 [C(2004)3899]) – ce qui, comme le relève à juste titre la République française dans son mémoire en défense, n’est pas le cas du Conseil d’État –, elle n’avait pas enclenché la phase contentieuse de la procédure. Par ailleurs, si dans le recours ayant donné lieu à l’arrêt du 9 décembre 2003, Commission/Italie (C‑129/00, EU:C:2003:656), la Commission visait à faire constater qu’en maintenant un article de loi « tel qu’interprété et appliqué par l’administration et les juridictions italiennes », la République italienne avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu du traité, aucun grief fondé spécifiquement sur l’article 267 TFUE n’avait été invoqué. Enfin, si dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 12 novembre 2009, Commission/Espagne (C‑154/08, non publié, EU:C:2009:695), la question de savoir si le recours de la Commission visait une violation de l’article 267 TFUE s’était posée, la Commission avait expressément indiqué à la Cour que tel n’était pas le cas (point 65 de cet arrêt).


3      JORF du 31 décembre 1998, p. 20050.


4      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 49).


5      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 51).


6      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, points 89 et 90, ainsi que jurisprudence citée).


7      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 91).


8      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 92).


9      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, points 99 et 101).


10      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 101).


11      FR:XX:2012:317074.20121210.


12      FR:CESSR:2012:317075.20121210.


13      Voir arrêts du Conseil d’État du 10 décembre 2012, Rhodia (FR:XX:2012:317074.20121210, point 29), et Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, point 24).


14      Voir arrêts du Conseil d’État du 10 décembre 2012, Rhodia (FR:XX:2012:317074.20121210, point 44), et Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, point 40).


15      Voir arrêts du Conseil d’État du 10 décembre 2012, Rhodia (FR:XX:2012:317074.20121210, points 24 et 25), et Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, points 19 et 20).


16      Voir arrêts du Conseil d’État du 10 décembre 2012, Rhodia (FR:XX:2012:317074.20121210, point 35), et Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, point 31).


17      Voir, notamment, arrêt du 11 septembre 2014, Kronos International (C‑47/12, EU:C:2014:2200, point 68).


18      Voir, en ce sens, arrêts du 8 décembre 2011, Banco Bilbao Vizcaya ArgentariaBanco Bilbao Vizcaya ArgentariaBanco Bilbao Vizcaya ArgentariaBanco Bilbao Vizcaya Argentaria (C‑157/10, EU:C:2011:813, point 39), et du 26 mai 2016, NN (L) International (C‑48/15, EU:C:2016:356, point 47).


19      Voir, en ce sens, notamment, arrêt du 11 septembre 2014, Kronos International (C‑47/12, EU:C:2014:2200, points 85 et 86).


20      Arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group Litigation (C‑446/04, EU:C:2006:774, point 46).


21      Voir, en ce sens, arrêts du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group Litigation (C‑446/04, EU:C:2006:774, point 72) ; du 30 juin 2011, Meilicke e.a.Meilicke e.a.Meilicke e.a.Meilicke e.a. (C‑262/09, EU:C:2011:438, point 29), ainsi que du 11 septembre 2014, Kronos International (C‑47/12, EU:C:2014:2200, point 65).


22      Arrêt du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group Litigation (C‑446/04, EU:C:2006:774, point 2 du dispositif).


23      Voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11, EU:C:2012:707, point 71).


24      Voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2012, Test Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group Litigation (C‑35/11, EU:C:2012:707, point 73). La Cour en a conclu que « [l]es réponses aux deuxième et quatrième questions posées dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt [du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group LitigationTest Claimants in the FII Group Litigation (C‑446/04, EU:C:2006:774)], ne sont donc pas affectées par une constatation selon laquelle l’impôt sur les sociétés étranger que les bénéfices sous-jacents aux dividendes distribués ont subi n’a pas été ou n’a pas été entièrement acquitté par la société non résidente versant lesdits dividendes à la société résidente, mais l’a été par une société résidant dans un État membre, filiale directe ou indirecte de la première société » (point 74).


25      Voir, notamment, arrêts du 10 décembre 2012, Rhodia, (FR:XX:2012:317074.20121210, point 47), et du 10 décembre 2012, Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, point 41).


26      Voir, notamment, arrêts du 10 décembre 2012, Rhodia, (FR:XX:2012:317074.20121210, point 49), et Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, points 43 et 50). Il n’est d’ailleurs fait référence à aucun procès-verbal précis dans l’arrêt Accor. En outre, si le Conseil d’État s’est fondé sur certains procès-verbaux d’assemblée générale dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Accor, c’est tant pour rejeter une partie du rattachement invoqué par la requérante que pour réfuter une allégation du ministre (voir arrêt du 10 décembre 2012, Accor, FR:CESSR:2012:317075.20121210, points 43, 50 et 56).


27      Arrêts du 10 décembre 2012, Rhodia, (FR:XX:2012:317074.20121210, point 35), et Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, point 31).


28      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 92).


29      Arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 101).


30      Arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 99) ; c’est moi qui souligne.


31      Arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 101).


32      Arrêts du 10 décembre 2012, Rhodia, (FR:XX:2012:317074.20121210, point 37), et Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, point 33).


33      Arrêts du 10 décembre 2012, Rhodia, (FR:XX:2012:317074.20121210, point 44), et Accor (FR:CESSR:2012:317075.20121210, point 40).


34      Voir arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 90).


35      Il se pourrait que la société mère ait puisé dans ses réserves afin de « compenser » le précompte payé et verser à son actionnaire un dividende non imputé de l’impôt. Toutefois, l’éventuel problème de trésorerie qui en résulterait ne fait pas l’objet des recours ayant donné lieu aux arrêts du Conseil d’État ni de la présente procédure en manquement, laquelle ne concerne que les modalités de remboursement du précompte.


36      En effet, le montant perçu in fine serait de 133 (dividende reçu de la société filiale moins le précompte payé par la société mère) + 100 (somme remboursée) = 233.


37      En réponse à la deuxième question qui lui était posée, la Cour a d’ailleurs expressément distingué la situation de la société mère et celle de ses actionnaires. Selon la Cour, « le régime en cause au principal, concernant d’ailleurs un précompte payé par une société mère à l’occasion de la distribution des dividendes et non pas une taxe perçue lors de la vente de produits, ne se traduit pas par une répercussion dudit précompte sur les tiers » (arrêt du 15 septembre 2011, Accor (C‑310/09, EU:C:2011:581, point 75).


38      Arrêt du 26 avril 2018, Commission/Bulgarie (C‑97/17, EU:C:2018:285, point 69). Voir, également, arrêt du 16 juillet 2015, Commission/Slovénie (C‑140/14, non publié, EU:C:2015:501, point 38).


39      Voir point 118 de la requête de la Commission.


40      Arrêt du 5 mai 1970, Commission/Belgique (77/69, EU:C:1970:34, point 15). Pour des confirmations du principe en rapport avec une jurisprudence nationale, voir arrêts du 9 décembre 2003, Commission/Italie (C‑129/00, EU:C:2003:656, point 29), et du 12 novembre 2009, Commission/Espagne (C‑154/08, non publié, EU:C:2009:695, point 125).


41      Voir, en ce sens, arrêt du 12 novembre 2009, Commission/Espagne (C‑154/08, non publié, EU:C:2009:695, points 124 à 127). À cette occasion, la Cour a d’ailleurs tenu à rappeler que, « si des décisions de justice isolées ou fortement minoritaires dans un contexte jurisprudentiel marqué par une autre orientation, ou encore une interprétation démentie par la juridiction suprême nationale, ne sauraient être prises en compte, il n’en est pas de même d’une interprétation jurisprudentielle significative non démentie par ladite juridiction suprême voire confirmée par celle-ci » (point 126, la Cour renvoyant au point 32 de l’arrêt du 9 décembre 2003, Commission/Italie, C‑129/00, EU:C:2003:656).


42      Voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2017, Aquino (C‑3/16, EU:C:2017:209, point 33).


43      Voir conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a. (C‑160/14, EU:C:2015:390, point 102).


44      Voir, en ce sens, arrêts du 30 septembre 2003, Köbler (C‑224/01, EU:C:2003:513, point 55) ; du 13 juin 2006, Traghetti del MediterraneoTraghetti del MediterraneoTraghetti del Mediterraneo (C‑173/03, EU:C:2006:391, point 32), ainsi que du 28 juillet 2016, Tomášová (C‑168/15, EU:C:2016:602, point  25).


45      Arrêt du 14 décembre 1982, Waterkeyn e.a.Waterkeyn e.a.Waterkeyn e.a.Waterkeyn e.a. (314/81 à 316/81 et 83/82, EU:C:1982:430, point 14).


46      Voir, en ce sens, Wildemeersch, J., « Une loi inconstitutionnelle et contraire au droit de l’Union : et alors ? Une déférence erronée vis-à-vis du législateur », Journal des tribunaux, 2018, p. 256 et 257, spéc. p. 257. L’auteur renvoie lui‑même à Lenaerts, K., « Form and Substance of the Preliminary Ruling Procedure », in Curtin, D. et Heukels, T., (dir.), Institutional Dynamics of European Integration, Essays in Honor of Henry G. Schermers, vol. II, Kluwer Academic Publishers, 1994, p. 355-380, spéc. p. 376.


47      Voir, en ce sens, Soulard, S, Rigaux, A., et Munoz, R., Contentieux de l’Union européenne/3 – Renvoi préjudiciel – Recours en manquement, coll. Axe Droit, Paris, Lamy, 2011, nº 59.


48      Voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 1980, Meridionale Industria Salumi e.a.Meridionale Industria Salumi e.a.Meridionale Industria Salumi e.a.Meridionale Industria Salumi e.a.Meridionale Industria Salumi e.a.Meridionale Industria Salumi e.a.Meridionale Industria Salumi e.a.Meridionale Industria Salumi e.a. (66/79, 127/79 et 128/79, EU:C:1980:101, point 9).


49      Point 11 de cet arrêt.


50      L’expression est empruntée à Lekkou, E., commentaire nº 24, inKarpenschif, M. et Nourissat, C. (dir.), Les grands arrêts de la jurisprudence de l’Union européenne, 3e éd., PUF, 2016, p. 131 à 136, spéc. nº 24-4. Voir, en ce sens, arrêt du 28 juillet 2016, Association France Nature Environnement (C‑379/15, EU:C:2016:603, point 47).


51      Arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a.Cilfit e.a.Cilfit e.a.Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335, point 10) ; c’est moi qui souligne. Voir, également, arrêts du 18 juillet 2013, Consiglio Nazionale dei GeologiConsiglio Nazionale dei GeologiConsiglio Nazionale dei Geologi (C‑136/12, EU:C:2013:489, point 26), et du 15 mars 2017, Aquino (C‑3/16, EU:C:2017:209, point 42).


52      Arrêt du 9 septembre 2015, Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a. (C‑160/14, EU:C:2015:565, point 38). Voir, également, en ce sens, arrêts du 15 septembre 2005, Intermodal Transports (C‑495/03, EU:C:2005:552, point 33) ; du 9 septembre 2015, X et van DijkX et van Dijk (C‑72/14 et C‑197/14, EU:C:2015:564, point 55), ainsi que du 1er octobre 2015, Doc GenericiDoc Generici (C‑452/14, EU:C:2015:644, point 43).


53      Voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2015, Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a.Ferreira da Silva e Brito e.a. (C‑160/14, EU:C:2015:565, point 40).


54      Arrêt du 9 septembre 2015, X et van DijkX et van Dijk (C‑72/14 et C‑197/14, EU:C:2015:564, point 59).


55      Arrêt du 28 juillet 2016, Association France Nature Environnement (C‑379/15, EU:C:2016:603, point 48) ; c’est moi qui souligne. Voir, également, en ce sens, arrêts du 6 octobre 1982, Cilfit e.a.Cilfit e.a.Cilfit e.a.Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335, point 16), et du 15 septembre 2005, Intermodal Transports (C‑495/03, EU:C:2005:552, point 39).


56      Arrêt du 28 juillet 2016, Association France Nature Environnement (C‑379/15, EU:C:2016:603, point 48). Voir, également, arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a.Cilfit e.a.Cilfit e.a.Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335, point 16).


57      J’observe à cet égard qu’Olivier Fouquet, président de section du Conseil d’État, termine son commentaire consacré aux arrêts du Conseil d’État en précisant que « [l]e litige posait d’autres questions intéressantes, telles que la prise en compte des dividendes versés par les sous-filiales. Mais il s’agit de questions de pur droit et non de technique juridictionnelle » (Fouquet, O., « Conseil d’État, précompte et fléchage : “non possumus” », Revue de droit fiscal, nº 1, janvier 2013, p. 1 et 2, spéc. p. 2 ; c’est moi qui souligne).