Language of document : ECLI:EU:F:2007:162

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

19 septembre 2007 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Évaluation – Rapport d’évolution de carrière – Exercice d’évaluation pour l’année 2004 – Droits de la défense – Obligation de motivation du rapport – Enquête administrative »

Dans l’affaire F‑43/06,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Tuomo Talvela, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Oslo (Norvège), représenté par Me É. Boigelot, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. G. Berscheid et Mme M. Velardo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. P. Mahoney, président, H. Kanninen (rapporteur) et S. Gervasoni, juges,

greffier : M. S. Boni, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 31 janvier 2007,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 21 avril 2006, M. Talvela demande, d’une part, l’annulation de son rapport d’évolution de carrière établi pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2004, de la décision implicite rejetant sa demande d’ouverture d’une enquête administrative, de tout acte consécutif et/ou relatif à cette dernière décision, de la décision rejetant sa réclamation précontentieuse et, d’autre part, l’octroi d’une indemnité.

 Cadre juridique

2        L’article 26, premier et deuxième alinéas, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») dispose :

« Le dossier individuel du fonctionnaire doit contenir :

a)      toutes pièces intéressant sa situation administrative et tous rapports concernant sa compétence, son rendement ou son comportement ;

b)      les observations formulées par le fonctionnaire à l’égard desdites pièces.

Toute pièce doit être enregistrée, numérotée et classée sans discontinuité ; l’institution ne peut opposer à un fonctionnaire ni alléguer contre lui des pièces visées [sous] a), si elles ne lui ont pas été communiquées avant classement. »

3        L’article 43 du statut dispose :

« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire, font l’objet d’un rapport périodique établi au moins tous les deux ans, dans les conditions fixées par chaque institution, conformément à l’article 110. […]

Ce rapport est communiqué au fonctionnaire. Celui-ci a la faculté d’y joindre toutes observations qu’il juge utiles. »

4        L’article premier, paragraphes 1 et 2, des dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut, adoptées par la Commission des Communautés européennes le 23 décembre 2004 (ci-après les « DGE 43 »), dispose :

« 1. Conformément à l’article 43 du statut […], un exercice d’évaluation est organisé au début de chaque année. La période de référence pour l’évaluation s’étend du 1er janvier au 31 décembre de l’année précédente.

À cette fin, un rapport annuel couvrant la période de référence, appelé rapport d’évolution de carrière, est établi pour chaque fonctionnaire au sens de l’article [1er] du statut […], qui a été dans une position d’activité ou de détachement dans l’intérêt du service, pendant au moins un mois continu au cours de la période de référence. […]

2. L’exercice d’évaluation a notamment pour objet d’évaluer le rendement, les compétences et la conduite dans le service du titulaire de poste. Une note de mérite est attribuée sur la base des appréciations relatives à chacun de ces trois volets […] »

5        L’article 2 des DGE 43 prévoit :

« 1. Le titulaire de poste est le fonctionnaire ou agent temporaire tel que défini à l’article [1er], qui fait l’objet de l’évaluation.

2. L’évaluateur est chargé de réaliser l’évaluation. Après le dialogue mené conformément à l’article 8, paragraphe 5, il rédige un projet de rapport. Il signe les rapports qui relèvent de sa compétence.

3. Le validateur est chargé de veiller, pour l’ensemble des rapports d’évolution de carrière qui relèvent de sa compétence à l’application cohérente des normes d’évaluation définies en application de l’article 8, paragraphe 3. Avant de contresigner les rapports d’évolution de carrière relevant de sa compétence, il procède à la comparaison des mérites et [à] l’harmonisation des notes de mérite proposées par les évaluateurs. En cas de désaccord avec l’évaluateur, la responsabilité finale du rapport revient au validateur.

4. L’évaluateur d’appel décide du suivi à donner à l’avis émis par le comité paritaire d’évaluation […] »

6        L’article 7, paragraphe 1, des DGE 43 dispose :

« La direction générale ‘Personnel et administration’ publie un guide pour l’évaluation qui indique de quelle manière fixer les objectifs, évaluer le rendement, les compétences et la conduite dans le service et définir les plans de formation. Les titulaires de poste, les évaluateurs et les validateurs veillent à respecter les orientations figurant dans ce guide. »

7        L’article 8 des DGE 43 dispose :

« 1. L’exercice annuel d’évaluation débute au plus tard le 15 janvier.

[…]

4. Le titulaire de poste établit, dans les huit jours ouvrables suivant la demande de l’évaluateur, une autoévaluation qui est intégrée dans le rapport d’évolution de carrière.

5. Dix jours ouvrables au plus tard après communication de l’autoévaluation par le titulaire du poste, l’évaluateur et le titulaire de poste tiennent un dialogue formel. Ce dialogue constitue une tâche d’encadrement fondamentale de l’évaluateur.

[…]

Le dialogue porte sur trois éléments : en prenant en considération l’autoévaluation visée au paragraphe 4, l’évaluation des prestations du titulaire de poste pendant la période de référence, la fixation des objectifs pour l’année qui suit la période de référence et la définition d’une carte de formation :

a) En tenant compte de l’autoévaluation, l’évaluateur examine avec le titulaire de poste, son rendement, les compétences qu’il a démontrées et sa conduite dans le service, pendant la période de référence. […]

6. Immédiatement après la tenue du dialogue formel, l’évaluateur rédige un projet de rapport d’évolution de carrière. Ce projet comporte notamment les appréciations relatives au rendement, aux compétences et à la conduite dans le service et une proposition de note de mérite cohérente avec les indications données lors du dialogue formel.

7. Lorsque pour un grade donné, au moins deux tiers des projets de rapport d’évolution de carrière relevant de la compétence d’un validateur ont été rédigés, ce dernier vérifie avec les évaluateurs, l’application cohérente des normes d’évaluation définies en application de l’article 8, paragraphe 3, et procède à la comparaison des mérites et à l’harmonisation des notes de mérite proposées, en se basant sur les indications données par les évaluateurs lors du dialogue formel.

Avant la finalisation des rapports, le directeur général se concerte avec les validateurs. Cette concertation a pour objet de veiller au niveau de la direction générale et grade par grade, à la cohérence de l’évaluation des mérites des titulaires de poste concernés.

8. Lorsque la concertation mentionnée au paragraphe 7 a eu lieu, l’évaluateur et le validateur finalisent le rapport d’évolution de carrière et le communiquent au titulaire de poste.

[…]

9. Le titulaire de poste dispose de cinq jours ouvrables pour accepter le rapport sans formuler d’observations, accepter le rapport tout en ajoutant des commentaires dans la partie réservée à cette fin, ou refuser le rapport en motivant la demande de révision dans la partie réservée à cette fin.

En cas d’acceptation par le titulaire de poste, le rapport d’évolution de carrière est clôturé. Une absence de réaction du titulaire de poste dans le délai prévu ci-dessus vaut acceptation du rapport.

10. En cas de refus par le titulaire de poste, le validateur tient un dialogue avec le titulaire de poste, dans un délai de dix jours ouvrables. Si le titulaire de poste, l’évaluateur ou le validateur en fait la demande, l’évaluateur participe également au dialogue.

[…]

Au plus tard cinq jours ouvrables après la tenue de ce dialogue, le validateur confirme le rapport ou le modifie. Il communique le rapport au titulaire de poste.

Ce dernier dispose d’un délai de dix jours ouvrables, pour accepter le rapport sans formuler d’observations, accepter le rapport tout en ajoutant des commentaires dans la partie réservée à cette fin, ou refuser le rapport en motivant le refus dans la partie réservée à cette fin. En cas d’acceptation par le titulaire de poste, le rapport d’évolution de carrière est clôturé. Une absence de réaction du titulaire de poste dans le délai prévu ci-dessus vaut acceptation du rapport.

11. Le refus motivé du rapport par le titulaire de poste vaut alors saisine du comité paritaire d’évaluation […] »

8        L’article 10 des DGE 43 dispose :

« Sans préjudice des présentes dispositions générales d’exécution, la Commission établit des règles particulières pour le personnel affecté au service extérieur, notamment en ce qui concerne la désignation de l’évaluateur, du validateur et de l’évaluateur d’appel. »

9        La Commission a, par décision du 6 avril 2005, adopté les dispositions relatives aux modalités d’évaluation et de promotion du personnel affecté au service extérieur de la Commission (ci-après les « DGE service extérieur »).

10      L’article 3 des DGE service extérieur énonce :

« 1. L’évaluation des fonctionnaires du personnel A, y compris les chefs de délégation adjoints, est effectuée par le chef de délégation en liaison avec le directeur responsable de la zone géographique dans laquelle la délégation est située ou, le cas échéant, avec le directeur fonctionnel de l’évalué. Le chef de délégation et directeur responsable de la zone géographique ou, le cas échéant, le directeur fonctionnel (soit le directeur dont les responsabilités comportent le lien thématique le plus proche avec les tâches principalement exercées par le fonctionnaire) assument conjointement la fonction d’évaluateur, au sens de l’article 2, paragraphe 2, des [DGE 43]. Le chef de délégation est désigné, ci-après, comme ‘premier évaluateur’ et le directeur responsable de la zone géographique ou, le cas échéant, le directeur fonctionnel comme ‘deuxième évaluateur’.

L’autoévaluation visée à l’article 8, paragraphe 4, des [DGE 43] est transmise par le premier évaluateur au deuxième évaluateur. Le dialogue formel visé à l’article 8, paragraphe 5, des [DGE 43] est organisé par le premier évaluateur. Le projet de rapport visé à l’article 8, paragraphe 6, des [DGE 43] est rédigé par le premier évaluateur et transmis au deuxième évaluateur.

Par dérogation aux dispositions de l’article 8, paragraphe 7, des [DGE 43], lorsque pour un grade donné, au moins deux tiers des projets de rapport d’évolution de carrière ont été rédigés et transmis, les deuxièmes évaluateurs vérifient avec les premiers évaluateurs, l’application cohérente des normes d’évaluation et procèdent à la comparaison des mérites et à l’harmonisation des notes de mérite, en se basant sur les indications données par les premiers évaluateurs lors du dialogue formel.

Suite à cette concertation, le deuxième évaluateur complète le projet de rapport en y apportant ses éléments d’appréciation.

Avant la finalisation des rapports, le directeur général de la direction générale ‘Relations extérieures’ se concerte avec le validateur. Cette concertation a pour objet, sur la base des projets de rapport rédigés par le premier et le deuxième évaluateur, de veiller au niveau du ?service extérieur? et grade par grade, à la cohérence de l’évaluation des mérites des titulaires de poste concernés, en tenant compte des normes d’évaluation arrêtées par le ?service extérieur?, conformément à l’article 8, paragraphe 3, des [DGE 43].

Par dérogation aux dispositions de l’article 8, paragraphe 8, des [DGE 43], lorsque la concertation mentionnée ci-dessus a eu lieu, le deuxième évaluateur et le validateur finalisent le rapport d’évolution de carrière et le communiquent au titulaire de poste. Le rapport communiqué au titulaire de poste comprend les appréciations portées par le premier évaluateur ainsi que celles portées par le [deuxième] évaluateur et le validateur.

2. Le premier évaluateur et le [deuxième] évaluateur de l’évalué sont identifiés au début de la période d’évaluation. Leur identité est communiquée à l’évalué ainsi qu’aux membres du comité de gestion du ?service extérieur?.

3. Le validateur est le directeur du ?service extérieur?. La décision finale lui revient en cas de désaccord entre le premier et le [deuxième] évaluateur.

4. L’évaluateur d’appel est le directeur général de la [d]irection générale ‘Relations extérieures’, qui peut habiliter son adjoint à agir en son nom. L’identité de l’évaluateur d’appel est communiqué[e] à l’évalué. »

11      Selon l’article 86, paragraphes 1 et 2, du statut :

« 1. Tout manquement aux obligations auxquelles le fonctionnaire ou l’ancien fonctionnaire est tenu, au titre du présent statut, commis volontairement ou par négligence, l’expose à une sanction disciplinaire.

2. L’ autorité investie du pouvoir de nomination ou l’Office européen de lutte antifraude peuvent ouvrir une enquête administrative, en vue de vérifier l’existence d’un manquement au sens du paragraphe 1, lorsque des éléments de preuve laissant présumer l’existence d’un manquement ont été portés à leur connaissance. »

12      Aux termes de l’article 2, paragraphes 1 et 2, des dispositions générales d’exécution concernant la conduite des enquêtes administratives et des procédures disciplinaires, publiées aux Informations administratives n° 86-2004 du 30 juin 2004 (ci-après les « DGE enquêtes administratives ») :

« 1. L’[Office d’investigation et de discipline (IDOC)] effectue les enquêtes administratives. Au sens des présentes dispositions, on entend par ‘enquêtes administratives’ toutes les actions menées par le fonctionnaire mandaté qui visent à établir les faits et, le cas échéant, à déterminer s’il y a un manquement aux obligations auxquelles les fonctionnaires de la Commission sont soumis.

?…?

2. L’IDOC peut être chargé d’autres enquêtes qui visent à vérifier certains faits et cela notamment dans le cadre des articles 24, 73 et 90 du statut. »

13      Selon l’article 4, paragraphe 1, des DGE enquêtes administratives :

« L’enquête administrative est ouverte soit d’initiative, soit à la demande d’un directeur général et d’un chef de service, par le [d]irecteur général du personnel et de l’administration en accord avec le [s]ecrétaire général. »

 Faits à l’origine du litige

14      Le requérant est fonctionnaire de grade A*10 à la direction générale (DG) « Relations extérieures » de la Commission. À compter de septembre 2003, il a travaillé, en tant que chef de section, au sein de la délégation de la Commission en Norvège et en Islande. Durant la période du 16 janvier au 2 mai 2004, le requérant a assuré les fonctions de chef de délégation par intérim.

 Établissement du rapport d’évolution de carrière

15      En vue de l’établissement de son rapport d’évolution de carrière (ci-après le « REC ») pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2004 (ci-après le « REC 2004 »), le requérant a eu, le 22 février 2005, un entretien avec son premier évaluateur, M. A, chef de délégation. Le jour suivant, ce dernier a établi un projet de REC 2004. Ce projet aboutissait à un nombre total de 12,5 points sur 20, à savoir 6,5 points sur 10 pour la rubrique « Rendement », 4 points sur 6 pour la rubrique « Aptitudes (compétences) » et 2 points sur 4 pour la rubrique « Conduite dans le service ».

16      Le 25 avril 2005, M. B a, en sa qualité de deuxième évaluateur, signé le projet de REC 2004 sans y apporter de modification.

17      Le 15 juin 2005, M. C, directeur du service extérieur de la DG « Relations extérieures », a, en sa qualité de validateur, approuvé le REC 2004.

18      Le 21 juin 2005, le requérant a demandé la révision de son évaluation.

19      Suite à cette demande de révision, un dialogue entre le requérant et le validateur s’est tenu le 6 juillet 2005.

20      Le validateur a, par décision du 22 juillet 2005, augmenté d’un demi-point la note figurant sous la rubrique 6.3 « Conduite dans le service », portant ainsi la note globale à 13 points au lieu de 12,5. Le validateur a notamment ajouté le commentaire suivant :

« Étant donné que l’élément de critique concernant les relations de travail soulevé par l’évaluateur dans la rubrique 6.1 est repris également dans la rubrique 6.3, j’estime que, pour ne pas faire valoir cet élément deux fois et puisque cet élément ne peut pas être attribué entièrement [au requérant], le rapport est plus cohérent avec une note finale de 13 points de mérite. L’augmentation d’un demi-point se fera à la section 6.3 du rapport. »

21      Le 3 août 2005, le requérant, toujours en désaccord avec sa notation, a saisi le comité paritaire d’évaluation (ci-après le « CPE »).

22      Dans son avis du 25 août 2005, le CPE a considéré que les motifs d’appel avancés par le requérant n’étaient pas fondés et que le REC 2004 était cohérent.

23      L’évaluateur d’appel, M. D, directeur général de la DG « Relations extérieures », a suivi l’avis du CPE et a confirmé le REC 2004, qui est devenu définitif le 31 août 2005.

24      Le requérant a introduit, le 23 septembre 2005, une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision de M. D de confirmer et d’approuver définitivement le REC 2004.

25      Par décision datée du 11 janvier 2006, notifiée le 13 janvier suivant au requérant, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a rejeté la réclamation pour ce qui concerne le REC 2004.

 Demande d’ouverture d’une enquête administrative

26      Le 21 janvier 2005, une réunion a eu lieu avec les représentants du personnel de la délégation de la Commission en Norvège et en Islande afin de discuter de l’ambiance de travail au sein de ladite délégation. Cette réunion se serait tenue à la demande du requérant et de M. A en raison de certaines critiques qui auraient été adressées au requérant.

27      Le 22 février 2005, M. A a envoyé une note au requérant au sujet des relations de celui-ci avec le personnel de la délégation. Dans cette note, M. A faisait état de problèmes qui auraient existé dans ces relations, notamment en ce qui concerne les rapports entre le requérant et Mme E. M. A concluait sa note en observant que les relations du requérant avec certains membres du personnel s’étaient à tel point détériorées qu’elles n’auraient plus pu être rétablies.

28      Dans une note datée du 25 février 2005, adressée à M. A, le requérant a contesté les allégations faites à son encontre dans la note du 22 février 2005 susmentionnée et a demandé l’ouverture d’une enquête administrative.

29      Par note du 7 avril 2005, deux représentants du personnel de la délégation ont fait parvenir à M. A, à la demande de celui-ci, un résumé de différents entretiens qu’ils avaient eus avec le personnel de la délégation au sujet du comportement du requérant.

30      Par note du 8 avril 2005, M. A a informé M. C de la situation concernant les rapports du requérant avec le personnel de la délégation. Cette note faisait également référence à la demande d’ouverture d’une enquête administrative présentée par le requérant. À cet égard, M. A faisait état de ses doutes relatifs à la notion d’enquête administrative mais soulignait qu’il était ouvert à toute suggestion de la part de M. C. La note de M. A se concluait ainsi :

« À mon avis, étant donné les circonstances, une rotation anticipée [du requérant] serait probablement la meilleure solution » (« As I see it, early rotation for [the applicant] would probably be the best solution under the circumstances »).

31      N’ayant reçu aucune réponse à sa demande d’ouverture d’une enquête administrative, le requérant a informé M. C, par une note du 8 juillet 2005, faisant référence à une discussion qui s’était tenue entre eux le 6 juillet précédent, que le silence de l’administration devait être considéré comme valant rejet implicite de sa demande.

32      Dans sa réclamation introduite le 23 septembre 2005 contre le REC 2004, le requérant a également demandé, d’une part, l’annulation de la décision implicite de rejet de sa demande, du 25 février 2005, d’ouverture d’une enquête administrative et de tout acte consécutif et/ou relatif à cette décision et, d’autre part, l’octroi d’une indemnité pour préjudice moral et matériel ainsi que pour atteinte à sa carrière, évaluée ex aequo et bono à 4 000 euros, sous réserve de modification en cours de procédure.

33      Par la décision susmentionnée du 11 janvier 2006, l’AIPN a rejeté la réclamation quant à ces demandes.

 Conclusions des parties

34      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision du 31 août 2005 de M. D, en sa qualité d’évaluateur d’appel, faisant grief en ce qu’elle confirme et approuve définitivement le REC 2004 ;

–        annuler le REC 2004 ;

–        annuler la décision implicite de rejet de sa demande, du 25 février 2005, d’ouverture d’une enquête administrative ainsi que tout acte consécutif et/ou relatif à cette décision ;

–        annuler la décision de l’AIPN, du 11 janvier 2006, portant rejet de sa réclamation ;

–        lui octroyer une indemnité pour préjudice moral et matériel ainsi que pour atteinte à sa carrière, évaluée ex aequo et bono à 4 000 euros, sous réserve de modification en cours de procédure ;

–        condamner la Commission aux dépens.

35      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

 Sur les demandes en annulation

 Observations préliminaires

36      Dans sa requête, le requérant demande l’annulation de la décision de rejet de sa réclamation, outre l’annulation de la décision du 31 août 2005, rendant le REC 2004 définitif, et de la décision rejetant implicitement sa demande d’ouverture d’une enquête administrative formulée le 25 février 2005. À cet égard, il convient de rappeler, en premier lieu, qu’il est de jurisprudence constante que les conclusions en annulation formellement dirigées contre le rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée et sont, comme telles, dépourvues de contenu autonome (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. 23, point 8 ; arrêt du Tribunal de première instance du 10 décembre 1992, Williams/Cour des comptes, T‑33/91, Rec. p. II‑2499, point 23 ; arrêt du Tribunal du 1er mars 2007, Neirinck/Commission, F‑84/05, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 64).

37      En deuxième lieu, il y a lieu de constater que les conclusions visant séparément l’annulation de la décision du 31 août 2005 et l’annulation du REC 2004 ne concernent en réalité qu’un seul et même acte, à savoir le REC 2004.

38      Quant à la demande d’annulation de tout acte consécutif et/ou relatif à la décision rejetant implicitement la demande d’ouverture d’une enquête administrative formulée le 25 février 2005, il convient de rappeler que le requérant est tenu d’indiquer l’objet du litige dans sa requête, en application de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance des Communautés européennes, applicable mutatis mutandis au Tribunal, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier. Cela implique que l’objet du litige soit défini avec suffisamment de précision pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de comprendre l’objet des demandes du requérant (arrêt du Tribunal de première instance du 11 juillet 1996, Bernardi/Parlement, T‑146/95, Rec. p. II‑769, point 25). Eu égard à cette disposition du règlement de procédure, telle qu’interprétée par la jurisprudence, il y a lieu de considérer qu’une demande ayant pour objet l’annulation de tous les actes consécutifs et/ou relatifs à la décision attaquée, sans que ces derniers soient identifiés, ne présente pas un degré de précision suffisant (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 29 novembre 1993, Koelman/Commission, T‑56/92, Rec. p. II‑1267, point 19 ; Bernardi/Parlement, précité, point 26 ; du 14 juillet 1998, Lebedef/Commission,T‑192/96, RecFP p. I‑A‑363 et II‑1047, points 33 et 34, et du 23 novembre 2004, Cantina sociale di Dolianova e.a./Commission, T‑166/98, Rec. p. II‑3991, point 79). Ces conclusions doivent dès lors être rejetées comme irrecevables.

39      Il résulte des considérations qui précèdent que le recours en annulation est dirigé contre le REC 2004 et la décision implicite de rejet de la demande du requérant du 25 février 2005.

40      Au soutien de sa demande en annulation de son REC 2004, le requérant soulève, en premier lieu, les moyens tirés d’une violation de l’article 26 du statut, d’une violation des droits de la défense, du non-respect du principe de transparence et d’une violation du principe du contradictoire. En deuxième lieu, il invoque les moyens tirés de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation, d’erreurs de fait, d’un vice de procédure et d’un abus de pouvoir dans l’établissement dudit REC 2004. En troisième lieu, le requérant soulève le moyen tiré d’une violation de l’obligation de motivation.

41      Contre la décision implicite par laquelle la Commission a rejeté sa demande d’ouverture d’une enquête administrative, le requérant avance les moyens tirés d’une violation du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration.

 Sur les conclusions dirigées contre le REC 2004

 Sur les moyens tirés d’une violation de l’article 26 du statut, d’une violation des droits de la défense, du non-respect du principe de transparence et d’une violation du principe du contradictoire

–       Arguments du requérant

42      En s’appuyant, notamment, sur l’arrêt du Tribunal de première instance du 12 juillet 2005, De Bry/Commission (T‑157/04, RecFP p. I‑A‑199 et II‑901), le requérant soutient que la Commission a violé l’article 26 du statut dans la mesure où le REC 2004 contient des appréciations non fondées en fait, qui y ont été illégalement insérées, en violation des droits de la défense.

43      À cet égard, le requérant souligne qu’aucune remarque formelle ne lui a été adressée au cours de la période d’évaluation au sujet de ses relations de travail avec certains membres du personnel et que, à aucun moment il n’a été fait mention de prétendus incidents. De telles difficultés relationnelles n’auraient pas non plus figuré dans son REC établi pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2003 (ci-après le « REC 2003 ») et ces difficultés n’auraient été évoquées ni pendant l’exercice de ses fonctions de chef de délégation par intérim ni plus tard, pendant l’année 2004, mais pour la première fois dans la note de M. A du 22 février 2005. Ces prétendues difficultés auraient dû donner lieu, au moment où elles se sont produites, à des rappels à l’ordre formels dirigés à son endroit lui permettant de faire valoir son point de vue. Le requérant ajoute que les pièces correspondant aux faits qui lui sont reprochés n’étaient pas classées dans son dossier individuel à la date de la décision portant établissement du REC 2004.

44      En se référant à l’arrêt du Tribunal de première instance du 13 décembre 2005, Cwik/Commission (T‑155/03, T‑157/03 et T‑331/03, RecFP p. I‑A‑411 et II‑1865), le requérant fait observer que, suite à la note de M. A du 22 février 2005, il a, par sa note du 25 février suivant, d’une part, contesté le bien-fondé de toutes les allégations faites à son encontre, qui étaient rapportées dans ladite note du 22 février et, d’autre part, requis l’ouverture d’une enquête administrative. Aucune suite administrative n’aurait été donnée par la Commission aux allégations de M. A. Ainsi, le requérant aurait légitimement pu croire que ces allégations n’avaient pas été considérées comme des éléments factuels de nature à être pris en compte et susceptibles de mettre en cause sa conduite dans le service au titre de l’exercice d’évaluation 2004.

45      Le requérant fait ensuite valoir que la Commission ne saurait se défendre en affirmant que la réaction de M. A aurait correspondu aux orientations données aux chefs de délégation dans des situations similaires. Par ailleurs, cette argumentation de la Commission serait contredite par le guide intitulé « système d’évaluation du personnel centré sur l’évolution de carrière » (ci-après le « guide d’évaluation ») que la Commission s’est imposé à elle-même en tant que règle de conduite.

46      En outre, le requérant conteste qu’il y ait eu plusieurs « occasions », à l’automne 2004, au cours desquelles M. A aurait abordé avec lui la question de la nécessité d’améliorer ses relations avec ses collègues de la délégation. Selon le requérant, M. A l’aurait simplement, à une seule occasion, encouragé à être plus positif, transparent et constructif dans le cadre de la révision salariale avec le personnel, fait auquel M. A aurait d’ailleurs semblé partiellement faire référence dans ses commentaires, sous la rubrique « Conduite dans le service » du REC 2004. En ce qui concerne les autres reproches liés à des incidents prétendument précis, le requérant ne serait toujours pas en mesure de comprendre à partir de quand, avec qui et comment ces prétendus problèmes se seraient produits.

47      Le requérant considère que ses prétendues mauvaises relations avec le personnel de la délégation ont eu une incidence décisive sur le contenu de son REC 2004 dans la mesure où elles sont non seulement visées par le commentaire figurant dans la rubrique « Conduite dans le service », mais également mentionnées dans la rubrique « Rendement ».

48      Interrogé par le Tribunal lors de l’audience, le requérant a fait valoir que l’arrêt de la Cour du 9 novembre 2006, Commission/De Bry (C‑344/05 P, Rec. p. I‑10915), qui a annulé partiellement l’arrêt De Bry/Commission, précité, n’avait aucune incidence sur la présente affaire. Selon le requérant, dans le contexte de l’espèce, les éléments de fait sur lesquels se fonde le REC 2004 auraient dû être portés à sa connaissance préalablement à l’approbation dudit REC 2004. Pour étayer cette thèse, le requérant s’appuie, notamment, sur les conclusions de l’avocat général M. Poiares Maduro sous l’arrêt Commission/De Bry, précité (Rec. p. I‑10917), ainsi que sur les arrêts du Tribunal de première instance du 5 décembre 1990, Marcato/Commission (T‑82/89, Rec. p. II‑735), et du 10 octobre 2006, Van der Spree/Commission (T‑182/04, RecFP p. I‑A‑2‑205 et II‑A‑2‑1049).

–       Arguments de la Commission

49      Selon la Commission, les jugements exprimés par les évaluateurs ne sembleraient pas se fonder sur des éléments factuels, de sorte que l’on ne saurait exiger que ces éléments aient fait l’objet d’un débat avec le requérant préalablement à l’établissement du REC 2004, ce pendant la période du 1er janvier au 31 décembre 2004 (ci-après la « période de référence 2004 »). Il semblerait que ces jugements appartiennent plutôt à la catégorie des jugements de valeur proprement dits, pour lesquels l’arrêt Cwik/Commission, précité, estime qu’il est suffisant que le débat ait eu lieu pendant la procédure de notation.

50      La Commission ajoute que, pour le cas où le Tribunal considérerait que les évaluations concernant les relations du requérant avec le personnel reposent sur des éléments factuels, deux affirmations figurant dans le REC 2004 prouveraient que l’intéressé avait été informé, du moins oralement et pendant la période de référence 2004, à ce sujet.

51      En particulier, sous la rubrique « Réalisation des objectifs » du REC 2004, le requérant a écrit que « [a]près son arrivée, le chef de délégation a commencé à prévoir un aplanissement de la hiérarchie au sein de la délégation [; c]e processus était exigeant également parce que le nombre des chefs de section était réduit dans la proposition [; d]ans le cadre de ce processus, [il a] appris qu’[il] devrai[t] à l’avenir faire tout particulièrement attention à la manière dont [il] ferai[t] part de questions problématiques aux personnes sensibles » (« [a]fter his arrival, the Head of Delegation started to plan a flattening of the hierarchy at the Delegation [; t]his process was demanding as well, because the number of Heads of Section was cut in the proposal [; i]n this process, [he] learned that [he would] have to pay specific attention in the future to the way [he] communicate[d] difficult issues to sensitive people »). Cette affirmation du requérant trouverait une correspondance dans le REC 2004, sous la rubrique « Conduite dans le service », dans laquelle l’évaluateur a affirmé avoir essayé de pousser l’intéressé à adopter une attitude plus positive vis-à-vis du personnel.

52      En outre, dans sa note du 22 février 2005, M. A aurait reconnu avoir discuté avec le requérant, à plusieurs reprises à l’automne 2004, des problèmes concernant les relations de ce dernier avec le personnel. Les affirmations contenues dans cette note seraient corroborées par celles figurant dans une note de M. A à l’attention de M. C, datée du 8 avril 2005.

53      Par ailleurs, les aspects concernant la conduite du requérant, bien que déjà communiqués à celui-ci pendant la période de référence 2004, auraient également fait l’objet de discussions pendant la procédure aboutissant à l’adoption du REC 2004.

54      La Commission réfute la thèse du requérant selon laquelle celui-ci aurait dû être informé par un avertissement écrit de ses problèmes de relation avec le personnel. Selon la Commission, un avertissement verbal suffit pour protéger les droits de la défense. À l’appui de cette affirmation, elle se réfère à l’arrêt Cwik/Commission, précité.

55      À l’audience, la Commission a fait valoir que l’arrêt Commission/De Bry, précité, confortait sa thèse selon laquelle le requérant n’aurait pu exiger, au nom du respect des droits de la défense, avoir été averti pendant la période de référence 2004 de tout élément qui aurait été susceptible d’être retenu à sa charge dans le REC 2004.

56      S’agissant du « retour d’informations », prévu par le guide d’évaluation, la Commission avance qu’il faut le distinguer des droits de la défense. L’exercice du droit d’être entendu serait prévu et deviendrait effectif dès l’ouverture de la procédure d’établissement du REC. En revanche, le « retour d’informations » n’en ferait pas partie. Ce que le guide d’évaluation prévoirait, c’est l’instauration d’un dialogue entre le fonctionnaire et ses supérieurs afin d’améliorer les performances de ce fonctionnaire. En l’espèce, un tel « retour d’informations » pendant la période de référence 2004 aurait effectivement eu lieu.

–       Appréciation du Tribunal

57      Ainsi que l’a jugé la Cour dans l’arrêt Commission/De Bry (précité, point 39), le principe fondamental du respect des droits de la défense ne saurait être interprété, dans le domaine de l’évaluation du personnel des Communautés européennes, comme imposant, antérieurement à la procédure aboutissant à une telle évaluation, une obligation d’avertissement préalable.

58      Cette constatation n’est pas affectée par l’article 26, premier et deuxième alinéas, du statut, en tant qu’il subordonne l’opposabilité à un fonctionnaire de tous rapports concernant sa compétence, son rendement ou son comportement à leur communication à l’intéressé avant classement à son dossier personnel (arrêt Commission/De Bry, précité, point 40).

59      En effet, les dispositions de l’article 26, premier et deuxième alinéas, du statut, dont le but est d’assurer le respect des droits de la défense du fonctionnaire, concernent les pièces déjà existantes. Elles font obstacle à ce que, au cours de la procédure d’évaluation, de telles pièces soient retenues contre le fonctionnaire noté, si elles ne lui ont pas été communiquées avant classement à son dossier personnel. Ces dispositions n’imposent pas la confection préalable de pièces formalisant toute allégation de faits reprochés à l’intéressé (arrêt Commission/De Bry, précité, point 41, et la jurisprudence citée).

60      Enfin, le « retour d’informations » prévu par le guide d’évaluation n’impose pas l’établissement systématique d’un avertissement écrit pour chaque fait susceptible de faire l’objet d’un reproche (arrêt Commission/De Bry, précité, point 47). En effet, si le chapitre 3 du guide d’évaluation préconise un « retour d’informations constructif […] donné régulièrement et en temps voulu », par référence « à des éléments précis du comportement », « aussi rapidement que possible après un travail », et s’il invite les évaluateurs « à collecter des exemples de travaux […], à en conserver des copies ou à rédiger des notes », il énonce également que le retour d’informations est donné « au moyen, par exemple, d’évaluations formelles et informelles et d’un dialogue individuel ».

61      Par conséquent, l’établissement du REC 2004 n’a pas méconnu le principe du respect des droits de la défense, ni l’article 26 du statut, en retenant à l’encontre du requérant une critique concernant ses relations de travail avec le personnel, ce sans que l’intéressé ait été averti formellement par écrit sur ce point au cours de l’année 2004 et sans qu’aucune pièce ne fasse état de cette critique. Le requérant n’ayant pas présenté d’argumentation distincte pour ce qui concerne la violation des principes de transparence et du contradictoire, invoquée par lui, le REC 2004 ne saurait pas davantage être considéré comme illégal sur le fondement de cette branche du moyen.

62      Cette conclusion ne saurait être infirmée par les observations du requérant tirées des conclusions de l’avocat général M. Poiares Maduro sous l’arrêt Commission/De Bry, précitées, ni des arrêts Marcato/Commission et Van der Spree/Commission, précités.

63      En effet, l’arrêt Marcato/Commission, précité, auquel font référence les conclusions de l’avocat général M. Poiares Maduro sous l’arrêt Commission/De Bry, précitées, concerne une situation qui n’est pas comparable à l’établissement d’un REC. Ainsi que souligné dans lesdites conclusions, dans les circonstances de l’arrêt Marcato/Commission, précité, le fonctionnaire concerné n’avait pas la possibilité de faire prévaloir ses droits de la défense dans une phase ultérieure telle que la procédure d’évaluation.

64      Quant à l’arrêt Van der Spree/Commission, précité, il importe de relever qu’il a été rendu avant l’arrêt Commission/De Bry, précité. Les considérations de cet arrêt relatives au respect des droits de la défense dans le cadre de l’établissement d’un REC doivent donc être appréciées à la lumière de l’arrêt Commission/De Bry, précité. Or, aucun élément dudit arrêt Van der Spree/Commission, précité, n’est de nature à justifier, dans la présente affaire, une appréciation différente de celle retenue dans l’arrêt Commission/De Bry, précité.

65      Il découle de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur les moyens tirés de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation, d’erreurs de fait, d’un vice de procédure et d’un abus de pouvoir dans l’établissement du REC 2004

–       Arguments des parties

66      Le requérant considère que le REC 2004 est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que des notes négatives et dommageables lui ont été attribuées parce que les appréciations de son évaluateur, M. A, étaient fondées sur des faits erronés, dénaturés et appartenant à d’autres périodes d’évaluation.

67      Le REC 2004 ne devrait concerner que la période de référence 2004. Or, la rubrique « Conduite dans le service » dudit REC 2004, qui serait la plus préjudiciable au requérant, mentionnerait deux périodes, distinctes de la période de référence 2004, qui n’auraient pas dû être prises en compte pour l’établissement du REC 2004.

68      Parmi les éléments factuels auxquels le REC 2004 ferait référence figureraient ceux relatifs, d’une part, à la démission de Mme E, le 18 janvier 2005, qui serait intervenue suite à un prétendu incident survenu entre elle et le requérant le 12 janvier 2005 et, d’autre part, à d’autres incidents qui ne seraient toujours pas identifiables par le requérant. Ceci ressortirait de la décision de rejet de la réclamation du requérant prise par l’AIPN et des deux notes de M. A, datées des 22 février et 8 avril 2005. Ces faits, même à les supposer établis, ne devraient pas être retenus pour l’exercice d’évaluation de l’année 2004 et, par conséquent, tous les développements que M. A leur aurait réservés dans le REC 2004 seraient dépourvus de justification.

69      La Commission soutient qu’il n’y a eu aucune erreur dans l’appréciation des faits. En outre, les événements à la base de l’évaluation se seraient tous déroulés en 2004. La référence à la période d’arrivée du requérant à la délégation aurait été insérée dans le REC 2004 en tant que fait historique. La mention de la période postérieure à la période de référence 2004 aurait été portée dans la réponse de l’AIPN à la réclamation et non dans les commentaires de l’évaluateur. L’AIPN aurait examiné certains faits ayant eu lieu en 2005 (lesquels constituaient un développement de la situation survenue en 2004) dans le seul but de faciliter la compréhension de ceux qui se sont déroulés en 2004.

–       Appréciation du Tribunal

70      Il importe, tout d’abord, de rappeler qu’il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation à celle des personnes chargées d’évaluer le travail de la personne notée. En effet, les institutions communautaires disposent d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer le travail de leurs fonctionnaires. Les jugements de valeur portés sur les fonctionnaires dans les REC sont exclus du contrôle juridictionnel, lequel ne s’exerce que sur les éventuelles irrégularités de forme, les erreurs de fait manifestes entachant les appréciations portées par l’administration ainsi que sur un éventuel détournement de pouvoir (voir, notamment, arrêt du Tribunal de première instance du 13 juillet 2006, Andrieu/Commission, T‑285/04, RecFP p. I‑A‑2‑161 et II‑A‑2‑775, point 99).

71      Dans la présente affaire, le requérant invoque, en substance, le grief tiré de ce que le REC 2004 tiendrait compte de faits qui se seraient passés en dehors de la période de référence 2004.

72      Il ressort des DGE 43, notamment de leur article 1er, paragraphe 1, et de leur article 8, paragraphe 5, sous a), que lors de l’établissement du REC, sont évalués le rendement, la compétence et la conduite du fonctionnaire dans le service pendant la période de référence. Ainsi, l’évaluation doit porter sur des faits se rapportant à cette période (voir, en ce sens, arrêts Williams/Cour des comptes, précité, points 70 et 71 ; du Tribunal de première instance du 9 mars 1999, Hubert/Commission, T‑212/97, RecFP p. I‑A‑41 et II‑185, point 95 ; du 12 juin 2002, Mellone/Commission, T‑187/01, RecFP p. I‑A‑81 et II‑389, point 49 ; du 16 mai 2006, Magone/Commission, T‑73/05, RecFP p. I‑A‑2‑107 et II‑A‑2‑485, point 26, et Van der Spree/Commission, précité, point 83).

73      En l’espèce, il convient de relever, en premier lieu, que, sous la rubrique « Conduite dans le service » du REC 2004, l’évaluateur évoque les problèmes relationnels du requérant « depuis son arrivée ». Étant donné que le requérant a commencé son travail à la délégation de la Commission en Norvège et en Islande en septembre 2003, cette mention renvoie effectivement à une période qui a, en partie, précédé la période de référence 2004.

74      Néanmoins, cette seule indication de l’apparition dans le temps des problèmes relationnels du requérant ne saurait démontrer à elle seule que l’évaluation aurait été faite sur la base d’événements antérieurs à la période de référence 2004.

75      En effet, il faut tenir compte du fait que, selon l’évaluateur, lesdits problèmes reprochés au requérant ont persisté au-delà de la date de leur apparition en septembre 2003. Ainsi, en présence d’une situation continue, un simple rappel de ce qui est reproché au fonctionnaire, et qui existait déjà antérieurement à la période de référence 2004, ne démontre pas que l’évaluation n’ait pas été effectuée sur le fondement de l’appréciation des relations de travail du requérant pendant ladite période de référence 2004. Les commentaires de l’évaluateur dans le REC 2003, sous la rubrique « Conduite dans le service », ne sont d’ailleurs pas contradictoires avec ce rappel dès lors qu’ils constatent que le requérant « doit encore s’adapter aux nouvelles circonstances propres à un environnement diplomatique, dans un pays sensible aux relations avec l’Union européenne et à un poste de quasi-direction vis-à-vis du personnel » (« has still to adapt to the new circumstances of a diplomatic environment, in a EU-sensitive location and a semi-management position via staff »).

76      En outre, même si l’établissement du REC repose sur une évaluation du fonctionnaire pendant la période de référence, il n’apparaît pas inapproprié que les commentaires dudit REC puissent faire un renvoi à la période précédente si cela est utile pour apprécier l’évolution du rendement, de la compétence ou de la conduite dans le service du fonctionnaire pendant la période de référence par rapport à ladite période précédente. Sur ce point, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence, une attention particulière doit être accordée à la motivation d’une notation comportant des appréciations moins favorables que celles figurant dans un rapport de notation précédent (voir, notamment, arrêt du Tribunal de première instance, du 30 septembre 2004, Ferrer de Moncada/Commission, T‑16/03, RecFP p. I‑A‑261 et II‑1163, point 53).

77      En deuxième lieu, quant aux notes de M. A, des 22 février et 8 avril 2005, il en ressort qu’elles concernent l’évolution en 2005 des problèmes relationnels du requérant avec le personnel de la délégation. Le contenu de ces notes ne se réfère pourtant pas à l’établissement du REC 2004. Les commentaires des évaluateurs et du validateur dudit REC 2004 ne font, pour leur part, aucune mention de ces notes ni des événements survenus en 2005.

78      La circonstance que le supérieur du fonctionnaire, qui est également son évaluateur, ait rédigé, après la fin de la période de référence 2004, des notes sur un problème concernant le lieu de travail, lequel problème a persisté après ladite période, n’est pas un indice suffisant pour conclure que l’évaluateur en question ait pris en considération, dans l’établissement du REC 2004, des éléments survenus après la période de référence 2004.

79      Les notes des 22 février et 8 avril 2005 ainsi que certains événements, intervenus en 2005, sont également évoqués dans la décision de rejet de la réclamation. Toutefois, la circonstance que l’AIPN les mentionne dans sa décision du 11 janvier 2006, prise en réponse à la réclamation du requérant dirigée non seulement contre le REC 2004 mais également contre la décision implicite rejetant sa demande d’ouverture d’une enquête administrative, ne permet pas non plus de considérer que des événements postérieurs à la période de référence 2004 aient été pris en considération par les personnes chargées de l’évaluation dudit requérant.

80      Par conséquent, il n’est pas établi que la prise en considération des problèmes relationnels du requérant se soit faite sur la base d’une appréciation de sa situation en dehors de la période de référence 2004. Il s’ensuit que le grief tiré de ce que le REC 2004 aurait été établi sur la base de faits se rapportant à une autre période de référence n’est pas fondé.

 Sur le moyen tiré d’une violation de l’obligation de motivation

–       Arguments des parties

81      Le requérant considère que le REC 2004 contient des commentaires d’ordre général qui ne satisfont pas à l’obligation de motivation telle que prévue par la jurisprudence. Une obligation de motivation se serait d’autant plus imposée que, dans le REC 2004, le requérant aurait subi une régression de sa notation. En outre, l’intéressé souligne l’incohérence de la motivation et les contradictions entre les points attribués et les commentaires descriptifs.

82      Selon le requérant, la note globale de 13 points obtenue dans le cadre du REC 2004, représente une régression injustifiée par rapport au REC 2003 et constitue une « fracture » importante dans sa carrière. Le requérant souligne que, sous la rubrique « Rendement », il avait obtenu, dans son REC 2003, une note de 8 sur 10, avec l’appréciation « Très bien », alors qu’il n’a obtenu plus qu’une note de 6,5 sur 10, avec l’appréciation « Bien » dans le REC 2004, sans que cela ne soit davantage motivé. Le seul commentaire négatif relatif à cette rubrique est l’élément de critique concernant ses prétendues difficiles relations de travail avec le personnel. Or, le requérant considère qu’un tel commentaire, figurant déjà sous la rubrique « Conduite dans le service », n’a pas sa place une deuxième fois sous la rubrique « Rendement ».

83      Le requérant fait observer que les résultats positifs qu’il a obtenus lors de la période pendant laquelle il a assuré la fonctions de chef de délégation par intérim n’ont nullement été valorisés dans son REC 2004. Selon lui, il a assuré, brillamment et sans préparation, cette fonction bien qu’elle n’ait pas figuré dans ses objectifs pour 2004.

84      Enfin, le requérant fait remarquer qu’il n’y a pas de cohérence entre l’appréciation « Bien » figurant sous la rubrique « Conduite dans le service » et les commentaires critiques l’accompagnant.

85      La Commission rappelle, en s’appuyant sur la jurisprudence, qu’il n’est pas exigé que la motivation d’un acte spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation de cet acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée.

86      La Commission souligne qu’il ressort clairement du libellé de la motivation du REC 2004 que l’une des raisons pour lesquelles il y a eu un abaissement de la note du requérant par rapport à celle attribuée dans le cadre du REC 2003 était la relation difficile entretenue par ce dernier avec le personnel. À cet égard, le REC 2004 ferait état de réserves, sous la rubrique « Synthèse ».

87      Dans l’hypothèse où le Tribunal estimerait cette motivation trop succincte, la Commission fait remarquer que le requérant pouvait aussi déduire la motivation de l’abaissement de sa note du contexte dans lequel le REC 2004 a été établi. En effet, pendant la période de référence 2004, il y aurait eu des discussions sur le problème des relations de travail de l’intéressé avec le personnel. Ces échanges auraient dû lui permettre de comprendre que des améliorations étaient possibles dans ce domaine.

88      Quant à la référence à l’autoévaluation, il ressortirait de la jurisprudence (arrêt du Tribunal de première instance du 18 octobre 2005, T‑51/04, Leite Mateus/Commission, non publié au Recueil, point 40) que la fonction de l’autoévaluation consiste simplement à préparer le dialogue formel entre le fonctionnaire noté et l’évaluateur. Il serait donc erroné de prétendre que toute appréciation de l’évaluateur s’écartant de l’autoévaluation aurait à être spécialement motivée.

89      La Commission souligne ensuite qu’une violation de l’obligation de motivation ne saurait se fonder sur la circonstance que, parmi les objectifs du requérant, ne figurait pas l’accomplissement de la fonction de chef de délégation par intérim. D’après les Informations administratives n° 2-2005, du 12 janvier 2005, relatives à l’exercice d’évaluation du personnel pour l’année 2004, même en l’absence d’objectifs fixés pour ladite année 2004, l’évaluation du rendement pouvait s’effectuer sur la base d’éléments dont avait connaissance le titulaire du poste (description du poste, planning, effectif).

90      Enfin, la Commission réfute la thèse selon laquelle il y aurait une incohérence entre les commentaires descriptifs et la mention « Bien » obtenue sous la rubrique « Conduite dans le service ». L’arrêt Cwik/Commission, précité, mentionné par le requérant, ne serait pas pertinent en l’espèce.

–       Appréciation du Tribunal

91      Il ressort de la jurisprudence que l’administration a l’obligation de motiver le REC de façon suffisante et circonstanciée et de mettre l’intéressé en mesure de formuler des observations sur cette motivation, le respect de ces exigences étant d’autant plus important lorsque la notation connaît une régression par rapport à la notation antérieure (arrêt Magone/Commission, précité, point 48). Une attention particulière doit également être accordée à la motivation lorsque le rapport comporte des appréciations moins favorables que celles figurant dans un rapport précédent (arrêt Ferrer de Moncada/Commission, précité, point 53).

92      Les commentaires descriptifs figurant dans un rapport de notation ont pour objet de justifier les appréciations analytiques. Ces commentaires servent d’assise à l’établissement de la notation et permettent au fonctionnaire de comprendre la notation obtenue. Par conséquent, eu égard à leur rôle prédominant dans l’établissement du REC, les commentaires doivent être cohérents avec les notes allouées, à tel point que la notation doit être considérée comme une transcription chiffrée ou analytique des commentaires (arrêt De Bry/Commission, précité, point 67).

93      En l’espèce, tandis que la note globale du requérant était de 14 sur 20 dans le cadre du REC 2003 (dont 8 points pour le rendement, 4 points pour les compétences et 2 points pour la conduite dans le service), sa note globale a connu une baisse d’un point, passant à 13 sur 20 dans le cadre du REC 2004 (dont 6,5 points pour le rendement, 4 points pour les compétences et 2,5 points pour la conduite dans le service).

94      La baisse de la note globale du requérant est donc due à une diminution de la note relative au rendement. En outre, il convient de relever que l’intéressé avait obtenu, dans le cadre du REC 2003, sous la rubrique « Rendement », l’appréciation « Très bien », alors que dans le REC 2004, cette même rubrique porte l’appréciation « Bien ». Pour ce qui concerne la rubrique « Conduite dans le service », le REC 2003 était accompagné de l’appréciation « Suffisant » alors que le REC 2004 contient l’appréciation « Bien ».

95      La motivation de la baisse de la note obtenue par le requérant et des appréciations ressort de façon suffisamment circonstanciée des rubriques 6.1 et 6.4 du REC 2004. En effet, alors que les commentaires assez brefs de la rubrique « Rendement » du REC 2003 faisaient état des bons résultats du requérant, la rubrique « Rendement » du REC 2004 contient de plus amples développements, assez critiques sur les relations du requérant avec le personnel de la délégation. Il ressort d’ailleurs assez nettement de cette rubrique que la baisse de la note et de l’appréciation a été justifiée par ces mauvaises relations.

96      Les commentaires de la rubrique 6.4, intitulée « Synthèse », confirment que les problèmes relationnels du requérant ont pesé sur son évaluation. On peut y lire en effet que l’intéressé « a sans aucun doute tenté de gérer au mieux une situation difficile, étant donné qu’il a dû assumer les fonctions de [chef de délégation] pendant quatre mois peu de temps après son arrivée, ce sans être doté d’expérience de direction préalable [; i]l possède également de nombreuses qualités en tant que fonctionnaire, ainsi qu’il a été mentionné ci-dessus [; c]ependant, les difficultés qu’il a rencontrées pour établir de bonnes relations avec un grand nombre des membres du personnel de la délégation ont peu à peu entamé sa position » (« has no doubt tried to make the best possible out of a difficult situation, as he had to act as [Head of Delegation] during four months shortly after his arrival without any previous experience in management [; h]e also has many good qualities as an official, as indicated above [; b]ut his difficulties in establishing good relations with many of the staff at the delegation have gradually undermined his position »).

97      Le requérant soutient toutefois aussi, d’une part, qu’il y a une incohérence entre l’appréciation « Bien » et les commentaires portés à la rubrique « Conduite dans le service » et, d’autre part, qu’il n’est pas logique que la critique concernant ses relations de travail soit indiquée deux fois, à savoir dans les commentaires des rubriques « Rendement » et « Conduite dans le service ».

98      Sur ce dernier aspect qui, au demeurant, relève plutôt de l’appréciation des faits que de la motivation, il importe de relever qu’il n’est pas exclu que les problèmes de relations de travail puissent avoir un impact tant sur le rendement du requérant que sur sa conduite dans le service.

99      En l’espèce, le validateur a, en tout état de cause, atténué ce double impact en augmentant d’un demi-point la note attribuée par le premier évaluateur sous la rubrique « Conduite dans le service ». Le validateur explique, au point 8.2 du REC 2004, que « [é]tant donné que l’élément de critique concernant les relations de travail soulevé par l’évaluateur dans la [rubrique] 6.1 est repris également dans la [rubrique] 6.3, [il] estime que, pour ne pas faire valoir cet élément deux fois et puisque cet élément ne peut pas être attribué entièrement [au requérant], le rapport est plus cohérent avec une note finale de 13 points de mérite [, l]’augmentation d’un demi-point se [faisant] à la [rubrique] 6.3 du rapport ».

100    S’il est vrai que le validateur pouvait retirer certains commentaires relatifs aux relations de travail dans l’une et/ou l’autre rubrique « Rendement » et « Conduite dans le service », le fait qu’il ait seulement changé la note sous la rubrique « Conduite dans le service », l’augmentant d’un demi-point, sans retirer les commentaires du premier évaluateur, n’est pas à lui seul constitutif d’une incohérence. En effet, la question pertinente est de savoir s’il existe une incohérence manifeste sous ladite rubrique, entre la note obtenue et les commentaires. Or, la lecture combinée des commentaires du premier évaluateur et du validateur permet une compréhension cohérente de la modification apportée à la seule note sans que ne soit supprimée la critique dans les commentaires de la rubrique 6.3 « Conduite dans le service ». En effet, sous cette rubrique, le validateur a inséré un renvoi à ses commentaires du point 8.2, de sorte que la rubrique 6.3 devait être lue à la lumière des commentaires de la rubrique 8.2 du REC 2004. En outre, il convient d’ajouter que la note de 2,5 sur 4 et l’appréciation « Bien » ne paraissent pas manifestement sans rapport avec de tels commentaires.

101    En dernier lieu, le requérant reproche à l’administration de ne pas avoir tenu suffisamment compte de la période pendant laquelle il a exercé la fonction de chef de délégation par intérim.

102    La rubrique 6.4 « Synthèse » mentionne toutefois de manière substantielle cette fonction et comporte également certaines considérations plutôt positives. Par ailleurs, il convient d’ajouter qu’il n’est pas nécessaire que le rapport contienne des explications détaillées afin de permettre au noté l’ouverture d’un véritable dialogue écrit sur la valeur des différents travaux qu’il a accomplis durant la période de référence. Un tel débat dépasserait manifestement le cadre de la procédure de notation (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 7 mai 2003, Den Hamer/Commission, T‑278/01, RecFP p. I‑A‑139 et II‑665, point 71).

103    Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré d’une violation de l’obligation de motivation doit être rejeté.

 Sur les conclusions dirigées contre la décision de rejet de la demande d’ouverture d’une enquête administrative

 Sur le moyen tiré de la violation du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration

–       Arguments des parties

104    Le requérant estime que l’AIPN aurait dû sérieusement prendre en considération sa demande d’ouverture d’une enquête administrative afin d’éclaircir les allégations faites à son encontre. Par son silence, l’administration aurait manqué à ses devoirs de sollicitude, de bonne administration et de saine gestion. En effet, au vu des DGE enquêtes administratives, l’AIPN aurait dû réclamer l’ouverture d’une enquête administrative en vue de vérifier la réalité des faits qui étaient reprochés au requérant.

105    Selon le requérant, par la note du 8 avril 2005, M. A a simplement informé M. C de l’ensemble de la situation et attendu les suggestions de celui-ci sans aucunement demander qu’il soit donné suite à sa demande d’ouverture d’une enquête administrative. Dans cette note, le supérieur hiérarchique du requérant aurait uniquement envisagé une solution de mutation comme étant « la meilleure solution » à sa demande d’ouverture d’une enquête administrative, au lieu de prendre celle-ci au sérieux.

106    Ce n’est que les 5 et 6 octobre 2005 que M. F se serait rendu à Oslo pour effectuer une « mission d’écoute ». Or, il ne se serait aucunement agi d’une enquête administrative telle que prévue par l’article 2 des DGE enquêtes administratives. Cette mission devrait être considérée comme une mission visant à écouter les personnes concernées et à éventuellement identifier les possibilités d’une amélioration de la situation. Il en serait de même de l’inspection dont il est question dans la décision de rejet de la réclamation.

107    À l’audience, le requérant a de nouveau soutenu que la décision implicite de la Commission de rejeter sa demande d’ouverture d’une enquête administrative était illégale en ce que l’administration n’a pas ouvert une telle enquête au sens de la décision de la Commission, du 28 avril 2004, arrêtant les DGE enquêtes administratives.

108    La Commission souligne qu’il n’existe aucun droit à l’ouverture d’une enquête administrative. Par ailleurs, dans sa note du 25 février 2005 visant à obtenir l’ouverture d’une enquête, le requérant n’aurait pas précisé les raisons fondant sa demande. Dans ces circonstances, à supposer que ce moyen remplisse les conditions de précision requises par l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, on ne saurait valablement affirmer qu’il y a eu une violation du devoir de sollicitude.

–       Appréciation du Tribunal

109    Aux termes de l’article 86, paragraphe 2, du statut, l’AIPN peut ouvrir une enquête administrative, en vue de vérifier l’existence d’un manquement aux obligations auxquelles le fonctionnaire est tenu au titre dudit statut.

110    Selon l’article 4, paragraphe 1, des DGE enquêtes administratives, « ?l?’enquête administrative est ouverte soit d’initiative, soit à la demande d’un directeur général et d’un chef de service, par le [d]irecteur général du personnel et de l’administration en accord avec le [s]ecrétaire général ». L’étendue de l’obligation de l’administration quant à l’ouverture d’une telle enquête n’est pas davantage précisée par les DGE enquêtes administratives.

111    Il résulte toutefois d’une jurisprudence constante que, en vertu de l’obligation d’assistance, l’administration doit, en présence d’un incident incompatible avec l’ordre et la sérénité du service, intervenir avec toute l’énergie nécessaire et répondre avec la rapidité et la sollicitude requises par les circonstances de l’espèce en vue d’établir les faits et d’en tirer, en connaissance de cause, les conséquences appropriées. Néanmoins, il faut que le fonctionnaire qui réclame la protection de son institution apporte un commencement de preuve de la réalité des attaques dont il affirme être l’objet. En présence de tels éléments, il appartient alors à l’institution en cause de prendre les mesures appropriées, notamment en faisant procéder à une enquête, afin d’établir les faits à l’origine de la plainte, en collaboration avec l’auteur de celle-ci (arrêt de la Cour du 26 janvier 1989, Koutchoumoff/Commission, 224/87, Rec. p. 99, points 15 et 16 ; arrêts du Tribunal de première instance du 21 avril 1993, Tallarico/Parlement, T‑5/92, Rec. p. II‑477, point 31, et du 5 décembre 2000, Campogrande/Commission, T‑136/98, RecFP p. I‑A‑267 et II‑1225, point 42).

112    En l’espèce, le requérant se borne à critiquer l’absence d’ouverture d’une enquête administrative. Il n’apporte aucun élément de nature à présumer qu’il a fait l’objet d’attaques malveillantes ou infondées. Surtout, dans sa note du 25 février 2005, dans laquelle il requiert l’ouverture d’une enquête administrative, le requérant n’indique pas les raisons qui l’ont conduit à formuler cette demande.

113    Enfin, il convient de situer la demande du requérant dans son contexte. En effet, l’intéressé ne saurait reprocher à la Commission de ne pas avoir procédé à l’ouverture d’une enquête formelle au sens des DGE enquêtes administratives, alors que ses supérieurs ont engagé des démarches pour élucider les problèmes de relations de travail au sein de la délégation. L’existence, au début de l’année 2005, de discussions plus soutenues au sujet desdits problèmes suffit à le démontrer.

114    Le moyen tiré d’une violation du devoir de sollicitude et du principe de bonne administration doit donc être rejeté comme non fondé.

115    De tout ce qui précède, il résulte que le recours en annulation contre le REC 2004 et la décision implicite de la Commission de rejeter la demande d’ouverture d’une enquête administrative doit être rejeté.

 Sur la demande en indemnité

 Arguments des parties

116    Le requérant réclame une indemnité pour préjudices moral et matériel que le REC 2004, ainsi que les comportements de sa hiérarchie, lui auraient causé en termes d’atteinte à sa réputation et à sa carrière.

117    Selon le requérant, l’administration n’a pas pris en compte sa situation au moment où elle a agi. L’AIPN ferait supporter ses propres fautes et négligences au requérant. En effet, non seulement la hiérarchie du requérant ne serait pas intervenue pour remédier à une situation professionnelle et relationnelle prétendument dégradée mais elle aurait, au contraire, adopté une attitude qui ne pouvait que l’aggraver. Le REC 2004 serait la manifestation concrète d’un cas évident de mauvaise administration, qui aurait placé le requérant dans un état d’incertitude et d’inquiétude du fait des irrégularités qui auraient vicié son rapport.

118    La Commission répond que la demande d’indemnisation n’est pas fondée car, en l’espèce, feraient défaut, d’une part, l’illégalité du comportement reproché à l’institution et, d’autre part, la réalité du dommage ainsi que l’existence d’un lien de causalité. La Commission rappelle que, selon la jurisprudence, le rejet des conclusions au fond implique l’irrecevabilité des conclusions en indemnité.

 Appréciation du Tribunal

119    Il résulte de la jurisprudence que les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice en matière de fonction publique doivent être rejetées dans la mesure où elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont elles-mêmes été rejetées comme non fondées (arrêts du Tribunal de première instance du 10 juin 2004, Liakoura/Conseil, T‑330/03, RecFP p. I‑A‑191 et II‑859, point 69, et du 13 juillet 2005, Scano/Commission, T‑5/04, RecFP p. I‑A‑205 et II‑931, point 77).

120    En l’espèce, il existe un lien étroit entre les conclusions en indemnité et les conclusions en annulation, puisque le requérant demande à être indemnisé pour des raisons qui l’ont conduit à demander l’annulation du REC 2004 et de la décision de rejet de sa demande d’ouverture d’une enquête administrative. L’examen des griefs présentés à l’appui des conclusions en annulation n’ayant révélé aucune illégalité et, donc, aucune faute de nature à engager la responsabilité de la Commission, les conclusions en indemnité doivent également être rejetées.

121    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

122    Ainsi que le Tribunal l’a jugé dans son arrêt du 26 avril 2006, Falcione/Commission (F‑16/05, RecFP p. I‑A‑1‑3 et II‑A‑1‑7, points 77 à 86), aussi longtemps que le règlement de procédure du Tribunal et, notamment, les dispositions particulières relatives aux dépens ne sont pas entrés en vigueur, il y a lieu, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice et afin de garantir aux justiciables une prévisibilité suffisante quant aux règles relatives aux frais de l’instance, de faire seulement application du règlement de procédure du Tribunal de première instance.

123    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure de ce dernier Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé en son recours, il y a lieu de décider que chaque partie supporte ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supporte ses propres dépens.

Mahoney

Kanninen

Gervasoni

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 septembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       P. Mahoney


* Langue de procédure : le français.