Language of document : ECLI:EU:T:2018:75

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

8 février 2018 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) no 1049/2001 – Documents concernant la demande d’enregistrement d’une dénomination en application du règlement (UE) no 1151/2012 – Documents émanant de la Commission – Documents émanant d’un État membre – Article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 – Refus d’accès – Obligation de motivation – Exception relative à la protection du processus décisionnel – Exception relative à la protection des procédures juridictionnelles – Étendue du contrôle effectué par l’institution et le juge de l’Union sur les motifs d’opposition invoqués par l’État membre »

Dans l’affaire T‑74/16,

Pagkyprios organismos ageladotrofon (POA) Dimosia Ltd, établie à Latsia (Chypre), représentée par Me N. Korogiannakis, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. J. Baquero Cruz et Mme F. Clotuche-Duvieusart, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision Ares(2015) 5632670du secrétaire général de la Commission, du 7 décembre 2015, rejetant la demande confirmative introduite par lettre du 15 septembre 2015 dans laquelle la requérante sollicitait, en application du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), l’accès à des documents relatifs, d’une part, à la demande d’enregistrement CY/PDO/0005/01243 de « Halloumi » en tant qu’appellation d’origine protégée (AOP), conformément au règlement (UE) no 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 21 novembre 2012, relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires (JO 2012, L 343, p. 1), et, d’autre part, à la demande d’enregistrement antérieure CY/PDO/0005/00766 de « Halloumi » en tant qu’AOP,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, L. Madise (rapporteur) et R. da Silva Passos, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Pagkyprios organismos ageladotrofon (POA) Dimosia Ltd, est une organisation d’éleveurs de bovins qui produisent du lait de vache et de la viande. Il s’agit du principal producteur chypriote de lait de vache utilisé dans la fabrication du halloumi, un fromage d’origine chypriote.

2        Le 3 juillet 2015, la requérante a demandé, conformément au règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), l’accès à :

-      toute question ou toute série de questions posées par la Commission européenne après le dépôt de la demande initiale d’enregistrement de « Halloumi » en tant qu’appellation d’origine protégée (AOP), à l’organisation de producteurs et/ou à la République de Chypre, dans le cadre des demandes d’enregistrement CY/PDO/0005/01243 ainsi que CY/PDO/0005/00766, cette dernière ayant été retirée par la suite ;

-      toute réponse ou toute série de réponses fournies par l’organisation de producteurs ayant demandé l’enregistrement de l’appellation de « Halloumi » en tant qu’AOP ou par la République de Chypre dans le cadre des deux demandes d’enregistrement mentionnées ci-dessus ;

-      toute correspondance pertinente entre la Commission et l’organisation de producteurs ayant demandé l’enregistrement de l’appellation de « Halloumi » en tant qu’AOP ou la République de Chypre ;

-      tout document concernant les observations ou les objections formulées par les tiers, dans le cadre des deux demandes d’enregistrement mentionnées ci-dessus, communiqué par les autorités chypriotes à la Commission.

3        Par courrier du 26 août 2015, le directeur général adjoint de la direction générale (DG) « Agriculture et développement rural » de la Commission (ci-après la « DG “Agriculture” ») a indiqué qu’il avait identifié 27 documents liés à la demande, dont 15 émanant de la Commission et 12 des autorités chypriotes. S’agissant des documents émanant de la Commission, il a indiqué que certaines parties de ces documents – à savoir les documents 6, 7, 14 et 21 – avaient été « noircies », parce qu’elles se rapportaient à une décision qui n’avait pas encore été prise par la Commission, au sens de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, et que certains documents contenaient des données personnelles, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 1049/2001, de telle sorte que la nécessité de les divulguer n’était pas établie. S’agissant des 12 documents émanant des autorités chypriotes, le directeur général adjoint de la DG « Agriculture » a fait savoir qu’il avait consulté lesdites autorités et que celles-ci s’opposaient à leur divulgation sur le fondement des exceptions posées par l’article 4 du règlement no 1049/2001. Il a indiqué, notamment, en substance, que les autorités chypriotes considéraient que les documents demandés contenaient des informations commerciales sensibles, se rapportaient à des procédures juridictionnelles et à une décision qui n’avait pas encore été prise par la Commission, se fondant, respectivement, sur les exceptions prévues par l’article 4, paragraphe 2, premier et deuxième tirets, et paragraphe 3, du règlement no 1049/2001. Ainsi, le directeur général adjoint de la DG « Agriculture » a accordé un accès partiel à 15 documents – à savoir les documents 1, 5 à 7, 9, 11, 13, 14, 16, 19 à 21, 23, 25 et 27.

4        Le 15 septembre 2015, conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, la requérante a adressé à la Commission une demande confirmative tendant à la révision de la position adoptée dans le courrier du 26 août 2015.

5        Le 7 décembre 2015, le secrétaire général de la Commission a rendu la décision Ares(2015) 5632670 (ci-après la « décision attaquée »).

6        S’agissant des documents émanant des autorités chypriotes,le secrétaire général de la Commission a indiqué que, conformément à l’article 4, paragraphes 4 et 5, du règlement no 1049/2001, la Commission avait demandé aux autorités chypriotes de reconsidérer leur position, à la suite de la demande confirmative de la requérante, et que celles-ci avaient accepté d’accorder un plein accès aux documents 3, 8, 12 et 15 et un accès partiel aux documents 2, 17, 18 et 22, mais qu’elles refusaient d’accorder l’accès aux documents 4, 10, 24 et 26. Le secrétaire général de la Commission a exposé les raisons fournies par les autorités chypriotes au soutien de leur refus. Il a constaté que les autorités chypriotes, à la suite de leur consultation par la Commission sur la base de l’article 4, paragraphes 4 et 5, du règlement no 1049/2001, avaient fondé leur opposition à la divulgation de documents ou de parties de documents sur les exceptions figurant à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement no 1049/2001, notamment celles relatives à la protection des procédures juridictionnelles et des processus décisionnels en cours, et qu’elles avaient donné des raisons appropriées pour défendre leur position. Ce faisant, le secrétaire général de la Commission a indiqué que ces motifs justifiaient, prima facie, l’application des exceptions de l’article 4 du règlement no 1049/2001 telles qu’elles étaient invoquées par les autorités chypriotes et que, par conséquent, les documents susvisés ne devaient pas être divulgués.

7        S’agissant des documents émanant de la Commission, son secrétaire général a indiqué que certaines parties occultées des documents 1, 5, 6 (lettre de couverture), 7 (lettre de couverture), 9, 11, 13, 19, 20 (courriel de couverture), 23 (courriel de couverture), 25 et 27 couvraient seulement des données personnelles dont le retrait n’était pas contesté par la requérante dans la demande confirmative. En ce qui concerne les autres documents et données occultées, le secrétaire général de la Commission a informé la requérante qu’un accès partiel étendu était accordé pour les documents 6, 7 et 14 et qu’un accès complet était accordé pour les documents 25 et 27. S’agissant des documents 14, 20 (annexe), 21 et 23 (annexe), le secrétaire général de la Commission a confirmé que les parties occultées étaient entièrement couvertes par les exceptions prévues par l’article 4, paragraphe 1, sous b), paragraphe 2, premier tiret, et paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001. À cet égard, il a détaillé les raisons pour lesquelles la divulgation de ces documents comportait des risques, au regard de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, et paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001. Il a indiqué, notamment, que, tant que le processus décisionnel de la Commission ne serait pas finalisé, la divulgation au public de questions, de commentaires et d’opinions préliminaires de la Commission, s’agissant d’une procédure en cours, comportait un risque prévisible et spécifique de mettre ce processus décisionnel sous pression extérieure, de diminuer la marge de manœuvre de la Commission et d’affaiblir ainsi sérieusement la qualité de la décision à intervenir. Le secrétaire général de la Commission a constaté, enfin, que la requérante ne faisait état d’aucun intérêt public supérieur capable de prévaloir sur l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, et paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 et de justifier la divulgation des documents demandés. Il a donc conclu qu’aucun accès supplémentaire aux documents 14, 20 (annexe), 21 et 23 (annexe) ne pouvait être accordé.

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 février 2016, la requérante a introduit le présent recours.

9        Par acte du 24 mai 2016, la Commission a déposé un mémoire en défense.

10      Par acte du 18 juillet 2016, la requérante a déposé une réplique.

11      Par lettre du 5 septembre 2016, la Commission a renoncé au dépôt d’une duplique.

12      Le Tribunal (neuvième chambre) a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure.

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

14      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      La requérante, pour contester le refus d’accès aux documents opposé par la Commission, soulève cinq moyens, tirés, en substance, premièrement, d’une violation de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 en l’absence de processus décisionnel en cours au sens dudit article, deuxièmement, d’une violation de l’obligation de motivation dans l’application de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, troisièmement, d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001, quatrièmement, d’une violation du droit à un recours effectif et, cinquièmement, d’une violation de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, dans la mesure où un État membre ne pourrait invoquer cette disposition « si la décision à laquelle il est porté atteinte est celle d’une institution européenne ».

16      À titre liminaire, il ressort de la requête que les deux premiers moyens tendent, en substance, à contester l’accès seulement partiel accordé aux documents 14, 17, 18, 20 (annexe), 21, 22 et 23 (annexe) et le refus d’accès aux documents 4, 10, 24 et 26. Les troisième et cinquième moyens tendent, pour leur part, à contester l’accès partiel accordé aux documents 17, 18 et 22 et le refus d’accès aux documents 4, 10, 24 et 26, tout comme, s’agissant de ces derniers documents, le quatrième moyen.

17      Il convient de traiter : en premier lieu, le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, en l’absence de processus décisionnel en cours au sens dudit article ; en deuxième lieu, le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, dans la mesure où un État membre ne pourrait pas invoquer cette disposition ; en troisième lieu, les deuxième et quatrième moyens, tirés, respectivement, d’une violation de l’obligation de motivation dans l’application de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 et d’une violation du droit à un recours effectif ; en quatrième et dernier lieu, le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation commise dans l’application de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, en justifiant le refus d’accès aux documents par un « processus décisionnel en cours »

18      La requérante s’oppose à l’exception invoquée par la Commission et les autorités chypriotes tirée de l’existence d’un processus décisionnel en cours lié à la procédure d’enregistrement de « Halloumi » en tant qu’AOP, conformément à l’article 52 du règlement (UE) no 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 21 novembre 2012, relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires (JO 2012, L 343, p. 1). La requérante fait valoir qu’il découle de l’article 50 du règlement no 1151/2012 qu’une décision est adoptée par la Commission une fois que celle-ci a réalisé son examen approfondi d’une demande d’enregistrement en tant qu’AOP. En l’espèce, cet examen est attesté par la publication au Journal officiel de l’Union européenne du 28 juillet 2015, laquelle a des effets obligatoires. Ces effets seraient indépendants des effets procéduraux parallèles qui consistent en l’ouverture de la procédure d’opposition à l’échelle de l’Union européenne prévue par l’article 51 du règlement no 1151/2012. Ainsi, la publication au Journal officiel de l’Union européenne du 28 juillet 2015 de la demande CY/PDO/0005/01243, concernant l’enregistrement de « Halloumi » en tant qu’AOP, loin de constituer un « acte intermédiaire », constituerait une « décision » au sens de l’article 263 TFUE, dans la mesure où cette publication ferait naître des droits et des obligations à l’égard des tiers, conformément à la jurisprudence.

19      La Commission considère que le moyen est manifestement non fondé.

20      Aux termes de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, l’accès à un document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui a trait à une question sur laquelle celle-ci n’a pas encore pris de décision est refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

21      En l’espèce, premièrement, il ressort de la décision attaquée que le processus décisionnel dont la protection est invoquée par la Commission concerne la deuxième phase de la procédure d’enregistrement, à savoir la « procédure d’opposition » prévue par l’article 51 du règlement no 1151/2012, et non la première phase de ladite procédure, à savoir la procédure d’« examen par la Commission et [de] publication aux fins d’opposition » prévue par l’article 50 du règlement no 1151/2012, visée par la requérante dans ses écritures.

22      Deuxièmement, force est de constater que la requérante ne conteste pas que la procédure d’opposition prévue par l’article 51 du règlement no 1151/2012 fût toujours en cours au moment de l’adoption de la décision attaquée, ni n’explique pourquoi cette procédure ne peut être considérée, en l’espèce, comme un « processus décisionnel » au sens de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa du règlement no 1049/2001.

23      Troisièmement, aux termes de l’article 50, paragraphe 2, du règlement no 1151/2012, la décision de « publication aux fins d’opposition » visée par cet article a pour objet, comme l’indique son intitulé, d’ouvrir la procédure d’opposition prévue par l’article 51 du règlement no 1151/2012 et, ainsi, de préparer la « décision concernant l’enregistrement » visée par l’article 52 dudit règlement, qui demeure la décision finale. À cet égard, il y a lieu de rappeler que le Tribunal a déjà jugé que la décision de « publication aux fins d’opposition » visée par l’article 50, paragraphe 2, du règlement no 1151/2012 présentait un caractère préparatoire eu égard à la « décision concernant l’enregistrement », de telle sorte que seule cette dernière décision était susceptible de produire des effets juridiques de nature à affecter les intérêts de la partie requérante et, partant, de faire l’objet d’un recours en annulation en vertu de l’article 263 TFUE (voir ordonnance du 14 septembre 2016, POA/Commission, T‑584/15, EU:T:2016:510, points 34 et 35 et jurisprudence citée).

24      Dès lors, les arguments de la requérante, selon lesquels, en substance, la phase d’examen par la Commission et de publication aux fins d’opposition qui précède l’enregistrement, prévue par l’article 50 du règlement no 1151/2012, a été clôturée par une décision qui a des effets obligatoires et indépendants de l’ouverture de la procédure d’opposition, ne sont pas de nature à démontrer que le processus décisionnel en cause a été clôturé et donc à infirmer l’existence d’un processus décisionnel en cours s’agissant des oppositions formées à l’encontre de la demande d’enregistrement.

25      Par ailleurs, la requérante n’a pas allégué que, en l’espèce, un intérêt public supérieur justifiait la divulgation des documents en cause.

26      Dans ces conditions, il convient d’écarter les arguments de la requérante et de rejeter le premier moyen.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une erreur de droit en ce qu’un État membre ne pourrait pas invoquer l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 si la « décision » à laquelle il pourrait être porté atteinte est celle d’une institution de l’Union

27      La requérante affirme, à l’appui du cinquième moyen, que la Commission a omis de traiter un point important dans son examen, en l’occurrence la question de savoir si les autorités chypriotes pouvaient invoquer l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 pour refuser partiellement ou totalement l’accès à des documents, alors que le processus décisionnel allégué auquel il aurait été porté atteinte émane d’une institution de l’Union.

28      La requérante observe, à cet égard, que, si la Commission avait considéré qu’il était clair qu’un refus d’accès devait être opposé sur le fondement des exceptions prévues par l’article 4 du règlement no 1049/2001, et plus particulièrement par l’article 4, paragraphe 3, dudit règlement, conformément à l’arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission (C‑64/05 P, EU:C:2007:802, points 46 et 68), elle aurait refusé l’accès à la requérante sans même devoir consulter les autorités chypriotes. Or, en l’espèce, la Commission ayant identifié douze documents émanant des autorités chypriotes sans s’être opposée à leur divulgation, les autorités chypriotes ne pourraient donc pas s’opposer à la divulgation de ces documents sur la base de l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 en raison de l’atteinte à un processus décisionnel d’une autorité tierce, à savoir celui de la Commission.

29      La Commission soutient que ce moyen est manifestement non fondé.

30      Aux termes de l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001, « [u]n État membre peut demander à une institution de ne pas divulguer un document émanant de cet État sans l’accord préalable de celui-ci ».

31      En premier lieu, à titre liminaire, il convient de répondre à l’argument de la requérante selon lequel les autorités chypriotes ne seraient pas fondées à s’opposer à la divulgation des documents en cause, dans la mesure où « aucun des documents […] n’indiquerait que [la République de] Chypre aurait invoqué l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 ».

32      À cet égard, il convient de remarquer que la circonstance, même à la supposer avérée, qu’aucun des documents communiqués à la requérante n’indique que la République de Chypre aurait invoqué l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 est, contrairement à ce que soutient la requérante, sans incidence.

33      En effet,il ne résulte ni de l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 ni même de la jurisprudence que, afin de pouvoir former une opposition, il est nécessaire que l’État membre, auteur du document en cause, fasse au préalable une demande formelle spécifique.

34      Au contraire, rien n’indique dans l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001, qui, comme il ressort des arrêts du 18 décembre 2007, Suède/Commission (C‑64/05 P, EU:C:2007:802, points 78 et 81), et du 21 juin 2012, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission (C‑135/11 P, EU:C:2012:376, point 53), est une disposition de caractère procédural consacrée au processus d’adoption d’une décision de l’Union, que l’État membre doit présenter une demande formelle, sans laquelle l’opposition exprimée par celui-ci ne saurait être prise en considération dans l’adoption de ladite décision.

35      Par conséquent, l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001, est bel et bien applicable en l’espèce.

36      En deuxième lieu, pour autant que la requérante soutient, au principal, qu’un État membre ne peut pas invoquer l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 si le processus auquel il est porté atteinte est celui d’une institution de l’Union, d’une part, il convient de rappeler que l’exercice du pouvoir dont l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 investit l’État membre concerné se trouve encadré par les exceptions matérielles qu’énumèrent les paragraphes 1 à 3 de ce même article. L’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 prévoit ainsi que l’État membre concerné s’en tient aux exceptions matérielles prévues par l’article 4, paragraphes 1 à 3, de ce même règlement (voir, en ce sens, arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, EU:C:2007:802, points 76 et 83). Or, parmi ces exceptions matérielles figure celle prévue par l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, dudit règlement, qui vise, sans que la requérante ne le conteste, un processus décisionnel en cours d’une institution de l’Union. D’autre part, il ne ressort ni des termes de l’article 4 du règlement no 1049/2001 ni de la jurisprudence de la Cour que la possibilité pour les États membres d’invoquer lesdites exceptions serait limitée à certaines des exceptions qu’énumèrent les paragraphes 1 à 3 de ce même article. Au contraire, il convient de constater que l’article 4 du règlement no 1049/2001 ne pose aucune distinction entre les exceptions énumérées s’agissant de leur invocabilité par les États membres.

37      À cet égard, la Cour a admis qu’un État membre pouvait invoquer l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 (arrêts du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, EU:C:2007:802, points 76, 81, 83 et 93, et du 21 juin 2012, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission, C‑135/11 P, EU:C:2012:376, points 62 à 66).

38      Ainsi, rien n’empêchait, en l’espèce, les autorités chypriotes d’invoquer l’existence d’un processus décisionnel en cours, au sein de la Commission, conformément à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001.

39      En troisième lieu, cette conclusion n’est pas infirmée par l’argument de la requérante selon lequel, conformément à l’arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission (C‑64/05 P, EU:C:2007:802), le secrétaire général de la Commission aurait refusé la communication des documents émanant de la République de Chypre sans même devoir consulter les autorités chypriotes s’il avait considéré que ceux-ci étaient de façon évidente couverts par l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001.

40      En effet, comme cela ressort du point 68 de l’arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission (C‑64/05 P, EU:C:2007:802), la faculté de refuser la communication d’un document sans même consulter l’État membre dont celui-ci émane n’est ouverte à l’institution compétente de l’Union que sur la base de l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001, qui prévoit que, « [d]ans le cas de documents de tiers, l’institution consulte le tiers afin de déterminer si une exception prévue au paragraphe 1 ou 2 est d’application, à moins qu’il ne soit clair que le document doit ou ne doit pas être divulgué ».

41      Or, l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 1049/2001 ne vise que les exceptions prévues par l’article 4, paragraphes 1 et 2, dudit règlement, et non celle prévue par le premier alinéa du paragraphe 3. En effet, comme le fait valoir la Commission, les institutions ne sauraient être tenues de consulter des tiers pour apprécier si leurs propres processus décisionnels sont affectés par la divulgation d’un document. En revanche, rien n’empêche un État membre d’invoquer l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, dudit règlement pour s’opposer à la divulgation d’un document dont ledit État est à l’origine.

42      Il en va d’autant plus ainsi dans une situation, comme en l’espèce, où l’État membre est l’auteur du dépôt du dossier de demande d’enregistrement et où, partant, l’atteinte au processus décisionnel de la Commission est de nature à avoir un effet direct sur l’issue de sa demande.

43      Il s’ensuit que le cinquième moyen doit être écarté.

 Sur les deuxième et quatrième moyens, tirés, respectivement, d’une violation de l’obligation de motivation dans l’application de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 et d’une violation du droit à un recours effectif

44      Il y a lieu d’examiner ensemble les deuxième et quatrième moyens, dans la mesure où, par ceux-ci, la requérante reproche, en substance, à la Commission de ne pas avoir présenté suffisamment d’éléments d’information pour motiver la décision attaquée.

45      D’une part, au soutien du deuxième moyen, la requérante affirme que, même à supposer que, comme l’affirme la Commission, un « processus décisionnel » fût en cours, au sens de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, la Commission n’a pas expliqué, à suffisance de droit, dans quelle mesure il serait « gravement porté » atteinte à celui-ci, au sens dudit article, en cas de divulgation des documents demandés.

46      La requérante soutient, à cet égard, que la motivation de la Commission, en raison de son caractère général, ne permet pas de démontrer comment la divulgation des documents demandés porterait gravement atteinte au processus décisionnel, au sens de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001. En particulier, elle fait observer que, conformément à l’arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission (C‑64/05 P, EU:C:2007:802, point 66), toute exception au principe de transparence doit être interprétée strictement et que l’application dudit principe nécessite un examen du contenu du document spécifiquement concerné. Ainsi, la Commission ne pourrait justifier son appréciation par un raisonnement abstrait, mais devrait spécifiquement mentionner le contenu des documents faisant l’objet de la demande d’accès. Conformément à une jurisprudence bien établie, pour justifier le refus d’accès à un document, il ne suffirait pas de démontrer que le document concerné relève d’une activité mentionnée à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001.

47      À cet égard, la requérante fait valoir que, même si la Cour a reconnu qu’il était loisible à l’institution de l’Union concernée de se fonder sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents, aucun des cas dans lesquels la Cour a accepté des présomptions générales ne correspond au cas d’espèce. La Commission n’aurait donc pas pu, au moyen d’une motivation générale, refuser d’accorder l’accès aux documents demandés.

48      La requérante excipe, notamment, du fait que le document 18, dont les autorités chypriotes ont refusé la divulgation, avait déjà été communiqué par la requérante dans l’affaire T‑584/15, portant sur l’enregistrement de « Halloumi » en tant qu’AOP, sans que la Commission s’y opposât. Or, un examen approfondi de ce document révélerait qu’il ne contient aucune information pouvant porter gravement atteinte à un processus décisionnel en cours.

49      En conclusion, le fait que la Commission n’a pas communiqué à la requérante les raisons pour lesquelles la divulgation « porterait gravement atteinte » au processus décisionnel spécifiquement allégué en mentionnant l’objet de chaque document constituerait une violation d’une jurisprudence bien établie.

50      D’autre part, au soutien du quatrième moyen, la requérante affirme que l’absence de référence à l’objet des documents 4, 10, 24 et 26 dont l’accès a été refusé en totalité par les autorités chypriotes la prive de son droit à un recours effectif. De simples références à des « courriers électroniques », « lettres » et « annexes » constituerait un obstacle à l’identification pour sa défense de l’importance de chaque document et la priverait de la possibilité d’exercer ledit droit.

51      En effet, pour garantir le respect de l’exigence du droit à un recours effectif, qui est un droit fondamental reconnu par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’autorité en question doit s’acquitter de son obligation de motivation en fournissant une motivation adéquate à toute personne demandant à accéder à des documents et se voyant totalement refuser cet accès.

52      La Commission considère que le deuxième moyen est non fondé et que le quatrième moyen est manifestement non fondé.

53      Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences dudit article doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 24 mai 2011, NLG/Commission, T‑109/05 et T‑444/05, EU:T:2011:235, point 81 et jurisprudence citée).

54      En l’espèce, il convient d’examiner la motivation de la décision attaquée s’agissant, d’une part, des documents émanant de la République de Chypre et, d’autre part, des documents émanant de la Commission. S’agissant des documents émanant de la République de Chypre, il convient également d’examiner si, comme l’affirme la requérante au soutien de son quatrième moyen, la prétendue absence de référence à l’objet des documents 4, 10, 24 et 26, à l’accès desquels les autorités chypriotes se sont opposées, prive la requérante de son droit à un recours effectif.

 Sur les documents émanant de la République de Chypre

55      Il ressort de la jurisprudence rendue dans le cadre de l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 que, avant de refuser l’accès à un document émanant d’un État membre, il incombe à l’institution concernée d’examiner si ce dernier a fondé son opposition sur les exceptions matérielles prévues par l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement no 1049/2001 et s’il a dûment motivé sa position à cet égard. Dès lors, dans le cadre du processus d’adoption d’une décision de refus d’accès, ladite institution doit s’assurer de l’existence d’une telle motivation et en faire état dans la décision adoptée par elle au terme de la procédure (arrêts du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, EU:C:2007:802, point 99 ; du 21 juin 2012, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission, C‑135/11 P, EU:C:2012:376, point 62, et du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑669/11, EU:T:2014:814, point 53).

56      Ainsi qu’il ressort notamment des articles 7 et 8 du règlement no 1049/2001, l’institution est elle-même tenue de motiver la décision de refus qu’elle oppose à l’auteur de la demande d’accès. Une telle obligation implique que l’institution fasse état, dans sa décision, non seulement de l’opposition manifestée par l’État membre concerné à la divulgation du document demandé, mais également des raisons invoquées par cet État membre aux fins de conclure à l’application de l’une des exceptions au droit d’accès prévues par l’article 4, paragraphes 1 à 3, du même règlement. De telles indications sont en effet de nature à permettre au demandeur de comprendre l’origine et les raisons du refus qui lui est opposé et à la juridiction compétente d’exercer, le cas échéant, le contrôle qui lui est dévolu (arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, EU:C:2007:802, point 89, et ordonnance du 27 mars 2014, Ecologistas en Acción/Commission, T‑603/11, non publiée, EU:T:2014:182, point 42).

57      En revanche, selon la jurisprudence rendue dans le cadre de l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001, il n’appartient pas à l’institution saisie d’une demande d’accès à un document de procéder à une appréciation exhaustive de la décision d’opposition de l’État membre concerné en effectuant un contrôle qui irait au-delà de la vérification de la simple existence d’une motivation faisant référence aux exceptions visées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement no 1049/2001 (arrêt du 21 juin 2012, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission, C‑135/11 P, EU:C:2012:376, point 63 ; ordonnance du 27 mars 2014, Ecologistas en Acción/Commission, T‑603/11, non publiée, EU:T:2014:182, point 44, et arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑669/11, EU:T:2014:814, point 54). L’institution saisie doit, cependant, vérifier si les explications données par l’État membre lui paraissent prima facie fondées (arrêt du 5 avril 2017, France/Commission, T‑344/15, EU:T:2017:250, point 54).

58      Exiger une telle appréciation exhaustive pourrait aboutir à ce que, celle-ci une fois effectuée, l’institution saisie d’une demande d’accès à un document procède à tort à la communication au demandeur du document en cause nonobstant l’opposition, dûment motivée au sens du point 55ci-dessus, de l’État membre dont émane ce document (arrêt du 21 juin 2012, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission, C‑135/11 P, EU:C:2012:376, point 64 ; ordonnance du 27 mars 2014, Ecologistas en Acción/Commission, T‑603/11, non publiée, EU:T:2014:182, point 45, et arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑669/11, EU:T:2014:814, point 55).

59      C’est à la lumière de cette jurisprudence qu’il y a lieu d’examiner la motivation de la décision attaquée s’agissant des documents émanant des autorités chypriotes.

60      Tout d’abord, pour autant que la requérante met en cause l’absence d’analyse individuelle de chacun des documents concernés par le secrétaire général de la Commission pour conclure à l’application de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, il y a lieu de constater que, contrairement à ce qu’affirme la requérante, le secrétaire général de la Commission n’était pas tenu de procéder à un examen concret et individuel des documents dont l’accès a été refusé par les autorités chypriotes.

61      En effet, l’obligation d’examen concret et individuel qui découle du principe de transparence n’est pas d’application lorsque la demande d’accès concerne un document émanant d’un État membre au titre de l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 (arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑669/11, EU:T:2014:814, point 81).

62      Ensuite, pour autant que la requérante met en cause le caractère exhaustif de la motivation, il convient de rappeler, ainsi que cela est indiqué aux points 55 et 61 ci-dessus, que, dans le cadre du processus d’adoption d’une décision de refus d’accès, la Commission doit simplement s’assurer de l’existence d’une motivation conforme aux critères rappelés auxdits points et en faire état dans la décision adoptée par elle au terme de la procédure.

63      À cet égard, la Cour a précisé, en réponse à des arguments semblables à ceux avancés par la requérante dans la présente espèce, qu’il n’appartenait pas à l’institution saisie d’une demande d’accès à un document de procéder à une appréciation exhaustive de la décision d’opposition de l’État membre concerné en effectuant un contrôle qui irait au-delà de la vérification de la simple existence d’une motivation faisant référence aux exceptions visées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement no 1049/2001 (arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑669/11, EU:T:2014:814, point 83).

64      Or, en l’espèce, d’une part, s’agissant des documents pour lesquels les autorités chypriotes ont accepté une divulgation partielle, le secrétaire général de la Commission, au point 2.1.1.b) de la décision attaquée, a cité la justification donnée par les autorités chypriotes, sur la base de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, selon laquelle : « [L]es parties de documents [pour lesquelles] elles se sont opposées à la divulgation continuent à être pertinentes et importantes pour la demande en cours CY/PDO/[0]005/012[43], qui est le prolongement de la demande retirée CY/PDO/[0]005/[…]007[66]. Les deux demandes sont étroitement liées, contiennent des éléments largement similaires et se réfèrent au même produit (Halloumi) […] [L]a divulgation publique de [tout ou partie] des documents étroitement liés à la demande retirée affaiblirait sérieusement le processus décisionnel en cours relatif à la demande actuellement pendante CY/PDO/[0]005/01234 […] »

65      D’autre part, le secrétaire général de la Commission a, audit point, spécifié, pour chacun des documents 17, 18 et 22, que, selon les autorités chypriotes, ces documents s’inscrivaient dans le cadre d’un processus décisionnel en cours, au sens de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, et a fait de même s’agissant des documents pour lesquels un refus total avait été opposé par les autorités chypriotes, à savoir les documents 4, 10, 24 et 26, en indiquant que la divulgation de ces derniers documents affecterait sérieusement le processus décisionnel en cours de la Commission.

66      Dans ces conditions, conformément à la jurisprudence citée aux points 55 à 58 ci-dessus, le secrétaire général de la Commission a examiné si la République de Chypre avait fondé son opposition sur les exceptions matérielles prévues par l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement no 1049/2001 et si elle avait dûment motivé sa position à cet égard, ce dont la Commission a fait état dans la décision adoptée par elle au terme de la procédure en concluant que les explications fournies par la République de Chypre « justifiaient prima facie l’application des exceptions de l’article 4 du règlement no 1049/2001 […] »

67      Il s’ensuit que la Commission a satisfait à son obligation d’examen diligent en respectant pour procéder à celui-ci le niveau d’intensité requis par la Cour dans sa jurisprudence dans le cadre de l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 et à son obligation de motivation (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑669/11, EU:T:2014:814, point 85).

68      Enfin, pour autant que la requérante affirme, au soutien du quatrième moyen, que l’absence de référence précise à l’objet des documents 4, 10, 24 et 26, pour lesquels les autorités chypriotes se sont opposées à tout accès, la prive de son droit à un recours effectif, d’une part, il y a lieu de constater que, comme le fait valoir la Commission, celle-ci a produit deux listes de documents dans sa réponse initiale du 26 août 2015, auxquelles la requérante ne fait aucune mention dans la requête.

69      Ces listes désignent, notamment, les documents 4, 10, 24 et 26, en mentionnant la date, le numéro d’enregistrement, la nature et l’objet de chacun de ces documents.

70      D’autre part, comme cela a été constaté au point 67 ci-dessus, le secrétaire général de la Commission a motivé à suffisance de droit sa décision s’agissant du refus de divulgation des documents émanant des autorités chypriotes.

71      Il s’ensuit que, comme le soutient la Commission, les informations données étaient suffisantes pour que la requérante exerce son droit à une protection juridictionnelle effective. En effet, il convient de rappeler qu’il peut être impossible d’indiquer les raisons justifiant la confidentialité à l’égard de chaque document sans en divulguer le contenu et, partant, priver l’exception de sa finalité essentielle (voir arrêt du 24 mai 2011, NLG/Commission, T‑109/05 et T‑444/05, EU:T:2011:235, point 82 et jurisprudence citée).

72      À cet égard, contrairement à ce qu’affirme la requérante, dans le cas où, comme en l’espèce, l’État membre refuse de manière dûment motivée d’autoriser l’accès aux documents en cause et où, partant, l’institution concernée rejette la demande d’accès, l’auteur de celle-ci jouit d’une protection juridictionnelle.

73      En effet, il relève de la compétence du juge de l’Union de contrôler, à la demande de l’intéressé auquel a été opposé un refus d’accès par l’institution sollicitée, si ce refus a pu être valablement fondé sur lesdites exceptions, et ce, que ce refus procède de l’appréciation de celles-ci par l’institution elle-même ou par l’État membre concerné (voir arrêt du 21 juin 2012, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission, C‑135/11 P, EU:C:2012:376, point 72 et jurisprudence citée).

74      Dans ces conditions, la requérante ne peut, en l’espèce, valablement faire valoir l’existence d’une violation de son droit à un recours effectif.

 Sur les documents émanant de la Commission

75      S’agissant d’une demande d’accès à des documents émanant d’une institution de l’Union, il incombe à cette institution, en principe, d’expliquer de quelle manière l’accès à ces documents pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par une exception prévue par l’article 4 du règlement no 1049/2001. En outre, le risque d’une telle atteinte doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique [voir arrêt du 26 avril 2016, Strack/Commission, T‑221/08, EU:T:2016:242, point 90 (non publié) et jurisprudence citée]. Cet examen concret doit, par ailleurs, être réalisé pour chaque document visé dans la demande (arrêt du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, EU:T:2005:125, point 70).

76      Lorsque l’institution en cause refuse l’accès aux documents, elle doit démontrer dans chaque cas d’espèce, sur la base des informations dont elle dispose, que les documents auxquels l’accès est sollicité relèvent effectivement des exceptions énumérées dans le règlement no 1049/2001. Toutefois, comme cela a été indiqué au point 71 ci-dessus, il peut être impossible d’indiquer les raisons justifiant la confidentialité à l’égard de chaque document sans en divulguer le contenu et, partant, priver l’exception de sa finalité essentielle (voir arrêt du 24 mai 2011, NLG/Commission, T‑109/05 et T‑444/05, EU:T:2011:235, point 82 et jurisprudence citée).

77      Dans le cadre de cette jurisprudence, il appartient donc à l’institution ayant refusé l’accès à un document de fournir une motivation permettant de comprendre et de vérifier, d’une part, si le document demandé est effectivement concerné par le domaine visé par l’exception invoquée et, d’autre part, si le besoin de protection relatif à cette exception est réel (arrêt du 24 mai 2011, NLG/Commission, T‑109/05 et T‑444/05, EU:T:2011:235, point 83).

78      La motivation d’une décision refusant l’accès à des documents doit ainsi contenir, à tout le moins pour chaque catégorie de documents concernée, les raisons spécifiques pour lesquelles l’institution en cause considère que la divulgation des documents demandés tombe sous le coup d’une des exceptions prévues par le règlement no 1049/2001 (arrêt du 24 mai 2011, NLG/Commission, T‑109/05 et T‑444/05, EU:T:2011:235, point 84).

79      En premier lieu, il convient de constater que, après avoir fait part de ses conclusions, dans la section 2 de la décision attaquée, s’agissant des documents litigieux, et, notamment, des documents 14, 20 (annexe), 21 et 23 (annexe) dont certaines parties ont été occultées, le secrétaire général de la Commission a justifié en détail, à ladite section, l’application de l’exception posée par l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001.

80      Premièrement, le secrétaire général de la Commission a rappelé le déroulement de la procédure d’enregistrement. Il a indiqué que la Commission avait reçu des oppositions à l’encontre de la demande d’enregistrement, qu’il lui appartenait, après avoir décidé de leur recevabilité, de procéder aux consultations appropriées, sur la base de l’article 51, paragraphe 3, du règlement no 1151/2012, puis, une fois ces consultations effectuées, de prendre une décision concernant l’enregistrement, conformément à l’article 52 dudit règlement, soit en enregistrant la dénomination si un accord avait été trouvé, soit en adoptant des actes d’exécution, en l’absence d’un tel accord. Le secrétaire général de la Commission a ainsi rappelé que la décision de la Commission de faire droit ou non à la demande d’enregistrement était toujours pendante et que, partant, le processus décisionnel de la Commission était toujours en cours.

81      Deuxièmement, le secrétaire général de la Commission a expliqué que, bien que les documents 14, 20 (annexe), 21 et 23 (annexe) aient été rédigés dans le cadre de la demande retirée CY/PDO/0005/00766, les parties occultées concernaient des questions sous examen par la Commission, dans le cadre de la demande en cours CY/PDO/0005/01243. Dès lors, leur divulgation publique porterait atteinte au processus décisionnel de la Commission.

82      Troisièmement, le secrétaire général de la Commission a observé que les questions et les commentaires adressés par la Commission dans le cadre de l’examen de la demande retirée restaient tout à fait pertinents pour la demande en cours CY/PDO/0005/01243.

83      Quatrièmement, le secrétaire général de la Commission a rappelé que le règlement no 1151/2012 ne prévoyait pas la divulgation des questions ou des commentaires de la Commission pendant la procédure d’examen et que, au contraire, il appartenait aux personnes disposant d’intérêts légitimes de faire valoir leurs droits en notifiant leur opposition à l’encontre de la demande d’enregistrement publiée au Journal Officiel de l’Union européenne. Le secrétaire général de la Commission a également indiqué que : « Tant que le processus décisionnel de la Commission n’a pas été finalisé, la divulgation au public des questions, commentaires et opinions préliminaires du personnel de la Commission en lien avec la demande en cours comporterait un risque raisonnablement prévisible et spécifique de soumettre le processus décisionnel de la Commission à des pressions externes par des intérêts organisés […] Cela compromettrait également le déroulement équitable de la procédure confiée à la Commission en ce que les opposants bénéficieraient ainsi d’arguments à utiliser pour appuyer leur opposition contre la personne à l’origine de la demande. »

84      En l’espèce, le secrétaire général de la Commission a donc indiqué que l’exception sur laquelle il fondait son refus était pertinente s’agissant des parties occultées des documents 14, 20 (annexe), 21 et 23 (annexe), car les parties occultées, qui contenaient des questions et des commentaires adressés par la Commission, concernaient des sujets sous examen par la Commission, dans le cadre de la demande en cours CY/PDO/0005/01243, et reflétaient étroitement les documents ou les parties de documents à la divulgation publique desquels les autorités chypriotes s’étaient opposées. Il a également fourni l’explication, figurant au point 83 ci-dessus, relative au besoin de protection invoqué, en concluant que « la divulgation demandée serait préjudiciable à la confidentialité de l’examen en cours de la demande et porterait ainsi gravement atteinte au processus décisionnel protégé par l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 ».

85      Le secrétaire général de la Commission a donc motivé à suffisance de droit la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2013, Besselink/Conseil, T‑331/11, non publié, EU:T:2013:419, point 105).

86      En second lieu, pour autant que la requérante affirme que, en ne procédant pas à une analyse du contenu de chacun des documents concernés et en n’expliquant pas comment chacun de ces documents pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé, le secrétaire général de la Commission a violé le principe de transparence, tel qu’il est interprété par la jurisprudence, d’une part, il convient d’observer que, à la page 7 de la décision attaquée, le secrétaire général de la Commission a indiqué que, « après avoir examiné les […] documents [14, 20 (annexe), 21 et 23 (annexe)] [il] confirm[ait] que les parties non divulguées [étaient] pleinement couvertes par les exceptions [prévues par le règlement] no 1049/2001 ». D’autre part, à la page 8 de la décision attaquée, le secrétaire général de la Commission a décrit le contenu des parties qui avaient été expurgées de chacun desdits documents, à savoir les questions et les commentaires de la Commission s’agissant des documents 14 et 21 et les réponses auxdits commentaires et auxdites questions s’agissant des documents 20 (annexe) et 23 (annexe). Partant, il ne saurait être soutenu que le secrétaire général de la Commission n’a pas procédé à un examen concret et individuel des documents sollicités (voir, en ce sens, arrêt du 20 mars 2014, Reagens/Commission, T‑181/10, non publié, EU:T:2014:139, points 72 et 73).

87      En troisième lieu, pour autant que la requérante fait valoir, pour « illustrer » l’argument tiré d’une absence d’analyse concrète et effective des documents litigieux, qu’elle a déjà déposé le document 18 en tant qu’annexe 5 dans le cadre d’une procédure en cours devant le Tribunal dans l’affaire T‑584/15, sans que la Commission trouve à s’y opposer, il suffit de constater que, d’une part, la production d’un document devant une juridiction de l’Union ne saurait être assimilée à une divulgation au public au sens du règlement no 1049/2001 et, d’autre part, l’accès que la requérante a eu à ce document n’a pas été obtenu au titre dudit règlement. En outre, le secrétaire général de la Commission a rappelé, s’agissant de ce document, les raisons justifiant, selon les autorités chypriotes, l’application de l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001, motivant ainsi à suffisance de droit le refus d’accès opposé à la requérante.

88      Partant, il convient de considérer que la décision est suffisamment motivée s’agissant des documents émanant de la Commission.

89      Dans ces conditions, les deuxième et quatrième moyens doivent être écartés.

90      À cet égard, étant donné que, d’une part, comme il ressort de ce qui précède, l’application de l’exception matérielle visée à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001 n’est pas entachée d’illégalité s’agissant des documents émanant de la République de Chypre et, d’autre part, l’invocation d’une seule exception suffit pour justifier un refus d’accès (voir, en ce sens, arrêts du 7 octobre 2015, Jurašinović/Conseil, T‑658/14, non publié, EU:T:2015:766, point 38 et jurisprudence citée, et du 15 septembre 2016, Philip Morris/Commission, T‑800/14, non publié, EU:T:2016:486, point 75), le troisième moyen, tiré d’une erreur de droit dans le recours de la part des autorités chypriotes, peut être écarté comme inopérant.

91      Toutefois, le Tribunal examine, à titre surabondant, ledit moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001

92      La requérante fait valoir que les raisons fournies par les autorités chypriotes pour refuser la divulgation partielle ou totale des documents 4, 10, 17, 18, 22, 24 et 26, sur la base de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001, sont insuffisantes. Elle rappelle, à cet égard, que l’exception tirée de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001 n’a pas été invoquée par la Commission.

93      La requérante souligne que, conformément à l’arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission (C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 72), lorsque la Commission décide de refuser l’accès à un document dont la divulgation lui a été demandée, il lui incombe, en principe, d’expliquer comment l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé. En outre, selon la requérante, conformément à l’arrêt du 3 octobre 2012, Jurašinović/Conseil (T‑63/10, EU:T:2012:516, points 66 et 67), les termes « procédure juridictionnelle » sont à interpréter en ce sens que la protection de l’intérêt public s’oppose à la divulgation du contenu des « documents rédigés aux seuls fins d’une procédure juridictionnelle particulière ». Elle ajoute qu’il a été jugé, dans un arrêt concernant la Commission (arrêt du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission, T‑391/03 et T‑70/04, EU:T:2006:190, point 90), que, par cette expression, il fallait comprendre, notamment, les mémoires ou les actes déposés et les documents internes concernant l’instruction de l’affaire en cours.Or, la République de Chypre évoquerait simplement une affaire pendante, dans une procédure d’opposition nationale, devant l’Anotato Dikastirio Kyprou (Cour suprême de Chypre) sans expliquer en quoi cette procédure nationale et la procédure d’enregistrement devant la Commission sont si étroitement liées que la divulgation des documents demandés affecterait la procédure juridictionnelle nationale.

94      La requérante fait une nouvelle fois référence, à cet égard, au document 18. Elle fait valoir que ce document fournit une analyse scientifique approfondie faisant référence à des articles scientifiques publiés, facilement accessibles, et ne révèle aucune correspondance entre les autorités chypriotes et la Commission qui aurait été établie, conformément à la jurisprudence, « aux seules fins d’une procédure juridictionnelle particulière ».

95      La Commission s’oppose à cette argumentation.

96      Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001, « les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection […] des procédures juridictionnelles ».

97      En premier lieu, pour autant que l’argumentation de la requérante peut être interprétée comme une contestation de la motivation de la décision attaquée, d’une part, il convient de constater que le secrétaire général de la Commission a relevé, s’agissant des documents 17, 18 et 22, que les autorités chypriotes avaient indiqué que leur divulgation en tout ou partie « porterait […] atteinte à la protection de procédures juridictionnelles nationales pendantes liées à la demande CY/DPO/[0]005/[0]1243 [dans la mesure où] dans le cadre de la procédure nationale d’opposition, en vertu de l’article 49 du règlement no 1151/2012, plusieurs oppositions reçues de personnes physiques ou de personnes morales [étaient] pendantes devant [l’Anotato Dikastirio Kyprou (Cour suprême de Chypre)] ».

98      D’autre part, le secrétaire général de la Commission a spécifié pour chacun des documents 17, 18 et 22 (pour lesquels un accès partiel a été accordé) et pour les documents 4, 10, 24 et 26 (pour lesquels l’accès a été refusé) que, selon les autorités chypriotes, ces documents ou ces parties de documents « étaient étroitement liés à des questions sous examen dans des procédures juridictionnelles en cours au niveau national » et que leur divulgation porterait gravement atteinte aux procédures nationales pendantes devant l’Anotato Dikastirio Kyprou (Cour suprême de Chypre).

99      Il s’ensuit que la décision attaquée, s’agissant de l’exception tirée de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001, est, conformément à la jurisprudence exposée aux points 55 à 58 ci-dessus, suffisamment motivée.

100    Cette conclusion n’est pas infirmée par l’arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission (C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 72), invoqué par la requérante, selon lequel la Commission avait été tenue de « fournir des explications quant aux questions de savoir comment l’accès [au document en cause] pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé ». En effet, comme cela a déjà été indiqué au point 61 ci-dessus, l’obligation d’examen concret et individuel qui découle du principe de transparence n’est pas d’application lorsque la demande d’accès concerne un document émanant d’un État membre au titre de l’article 4, paragraphe 5, du règlement no 1049/2001 (arrêt du 25 septembre 2014, Spirlea/Commission, T‑669/11, EU:T:2014:814, point 81).

101    En deuxième lieu, pour autant que l’argumentation de la requérante peut être interprétée comme une contestation du bien-fondé de la décision attaquée s’agissant de l’application de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001, il convient de rappeler que l’institution doit procéder à un contrôle prima facie du bien-fondé des motifs du refus de divulgation opposé par l’État membre concerné (arrêt du 5 avril 2017, France/Commission, T‑344/15, EU:T:2017:250, point 58).

102    Or, la requérante ne remet pas en cause la matérialité des motifs avancés par les autorités chypriotes tels qu’ils ressortent des points 97 et 98 ci-dessus, lesquels font état d’un lien entre, d’une part, la demande d’enregistrement de « Halloumi » en tant qu’AOP à l’échelle de l’Union et, d’autre part, la procédure juridictionnelle en cours devant l’Anotato Dikastirio Kyprou (Cour suprême de Chypre) (voir, en ce sens, ordonnance du 27 mars 2014, Ecologistas en Acción/Commission, T‑603/11, non publiée, EU:T:2014:182, point 60).

103    À cet égard, les motifs d’invocation de l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001 avancés par la République de Chypre ne sauraient être considérés comme non défendables par l’institution en cause (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 14 février 2012, Allemagne/Commission, T‑59/09, EU:T:2012:75, points 54 et 55).

104    Il s’ensuit que c’est à bon droit que le secrétaire général de la Commission a considéré que les arguments fournis par les autorités chypriotes justifiaient, prima facie, l’application de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001.

105    En troisième lieu, cette conclusion ne peut être infirmée par l’argument de la requérante selon lequel, en substance, conformément aux arrêts du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission (T‑391/03 et T‑70/04, EU:T:2006:190), et du 3 octobre 2012, Jurašinović/Conseil (T‑63/10, EU:T:2012:516, points 66 et 67), l’expression « procédure juridictionnelle » devrait être interprétée de telle sorte qu’elle exclurait de son champ d’application les documents visés au point 98 ci-dessus.

106    En effet, d’une part, les arrêts auxquels se réfère la requérante concernent des situations où étaient en cause des documents de la Commission et non d’un État membre. Or, s’agissant de documents émanant d’États membres, comme cela a été rappelé au point 101 ci-dessus, la Commission n’est tenue que d’exercer un contrôle prima facie du bien-fondé des motifs du refus de divulgation par l’État membre concerné.

107    D’autre part, il convient de constater que, en tout état de cause, les arrêts cités par la requérante ne permettent pas d’écarter les documents concernés du champ d’application de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001. En effet, dans l’arrêt du 3 octobre 2012, Jurašinović/Conseil (T‑63/10, EU:T:2012:516, point 76), le Tribunal s’est limité à écarter de la protection des procédures juridictionnelles visée par l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001 des rapports rédigés plus de dix ans avant le début du procès, en ce que le Conseil de l’Union européenne n’avait pas expliqué à suffisance de droit au vu de quels critères ou de quelles conditions ces documents pourraient être protégés par l’exception prévue par l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement no 1049/2001. De même, dans l’arrêt du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission (T‑391/03 et T‑70/04, EU:T:2006:190), le Tribunal a constaté, aux points 96 et 97, qu’il se pouvait que la communication de différents documents par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) aux autorités nationales, en vertu de l’article 10, paragraphes 1 et 2, du règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, relatif aux enquêtes effectuées par l’OLAF (JO 1999, L 136, p. 1), ou à une institution, en vertu de l’article 10, paragraphe 3, du même règlement, ne conduise pas à l’ouverture d’une procédure judiciaire, de telle sorte qu’il ne pouvait être retenu que les différents documents communiqués par l’OLAF avaient été rédigés à la seule fin d’une procédure juridictionnelle.

108    Il s’ensuit que le troisième moyen de la requérante doit être écarté et le recours, dans son ensemble, rejeté, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’argument de la Commission selon lequel quatre des cinq moyens devraient être rejetés comme manifestement non fondés, dans la mesure où la requérante ne conteste pas l’application aux documents visés par lesdits moyens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, relatif à la protection des intérêts commerciaux, ni d’examiner la motivation de la décision attaquée à cet égard.

 Sur les dépens

109    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

110    En l’espèce, la requérante ayant succombé, elle demande, néanmoins, au Tribunal de condamner la Commission à payer ses frais de justice même en cas de rejet du recours. En substance, la requérante affirme que, en l’absence d’argumentation solide et bien fondée de la décision de refuser l’accès aux documents demandés, la Commission ne lui a pas laissé d’autre choix que de saisir le Tribunal.

111    Aux termes de l’article 135, paragraphe 2, du règlement de procédure, le Tribunal peut condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l’autre partie les frais qu’elle lui a fait exposer en raison de son attitude, en particulier lorsque ces frais sont jugés frustratoires ou vexatoires.

112    Selon la jurisprudence, il y a lieu de faire application de cette disposition lorsqu’une institution de l’Union a favorisé, par son comportement, la naissance du litige [voir arrêt du 8 juillet 2015, European Dynamics Luxembourg e.a./Commission, T‑536/11, EU:T:2015:476, point 391 (non publié) et jurisprudence citée].

113    En l’espèce, l’analyse du comportement adopté à l’égard de la requérante par la Commission ne justifie pas que cette dernière soit condamnée à supporter les dépens, en vertu de l’article 135, paragraphe 2, du règlement de procédure.

114    En effet, aucun des manquements invoqués par la requérante, tant sur le plan de la légalité interne que sur le plan de la légalité externe, n’a été retenu par le Tribunal. En outre, aucun élément dans le comportement de la Commission ne permet de considérer qu’elle a favorisé la naissance du litige.

115    Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le comportement de la Commission n’a pas favorisé l’introduction du présent recours par la requérante [voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 2015, European Dynamics Luxembourg e.a./Commission, T‑536/11, EU:T:2015:476, point 394 (non publié) et jurisprudence citée].

116    Par conséquent, il convient, en vertu de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, de condamner la requérante aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Pagkyprios organismos ageladotrofon (POA) Dimosia Ltd supportera, outre ses propres dépens, les dépens exposés par la Commission européenne.

Gervasoni

Madise

Da Silva Passos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 février 2018.

 

Signatures      

 

*      Langue de procédure : l’anglais.