Language of document : ECLI:EU:C:2000:148

ARRÊT DE LA COUR

21 mars 2000 (1)

«Directive 90/220/CEE - Biotechnologie - Organismes génétiquement modifiés - Décision 97/98/CE - Semences de maïs»

Dans l'affaire C-6/99,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Conseil d'État (France) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Association Greenpeace France e.a.

et

Ministère de l'Agriculture et de la Pêche e.a.,

en présence de:

Novartis Seeds SA,

Monsanto Europe SA,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 13, paragraphes 2 et 4, de la directive 90/220/CEE du Conseil, du 23 avril 1990, relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement (JO L 117, p. 15), telle que modifiée par la directive 97/35/CE dela Commission, du 18 juin 1997, portant deuxième adaptation au progrès technique de la directive 90/220 (JO L 169, p. 72),

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, J. C. Moitinho de Almeida, L. Sevón et R. Schintgen, présidents de chambre, P. J. G. Kapteyn (rapporteur), C. Gulmann, J.-P. Puissochet, G. Hirsch, M. Wathelet, V. Skouris et

Mme F. Macken, juges,

avocat général: M. J. Mischo,


greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,

considérant les observations écrites présentées:

-    pour l'Association Greenpeace France, par Me A. Faro, avocat au barreau de Paris,

-    pour la Confédération paysanne, par Mes M.-C. Etelin, avocat au barreau de Toulouse, et M. Caussanel-Haji, avocat au barreau de Paris,

-    pour l'Association Ecoropa France et Étienne Vernet, par Me C. Lepage, avocat au barreau de Paris,

-    pour Novartis Seeds SA, par Mes E. Baraduc-Bénabent, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, et E. Morgan de Rivery, avocat au barreau de Paris,

-    pour Monsanto Europe SA, par Mes A. Lyon-Caen, F. Fabiani et F. Thiriez, avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation,

-    pour le gouvernement italien, par M. le professeur U. Leanza, chef du service du contentieux diplomatique du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, assisté de M. O. Fiumara, avvocato dello Stato,

-    pour le gouvernement autrichien, par Mme C. Pesendorfer, Oberrätin à la Chancellerie, en qualité d'agent,

-    pour la Commission des Communautés européennes, par MM. G. zur Hausen, conseiller juridique, et O. Couvert-Castéra, fonctionnaire national mis à la disposition du service juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de l'Association Greenpeace France, représentée par Me A. Faro, de la Confédération paysanne, représentée par

Me M.-C. Etelin, de l'Association Ecoropa France et Étienne Vernet, représentés par Me C. Lepage, de Novartis Seeds SA, représentée par Mes E. Baraduc-Bénabent et E. Morgan de Rivery, de Monsanto Europe SA, représentée par Me A. Lyon-Caen, du gouvernement français, représenté par M. R. Abraham, directeur des affaires juridiques au ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, du gouvernement italien, représenté par M. O. Fiumara, et de la Commission, représentée par MM. G. zur Hausen et O. Couvert-Castéra, à l'audience du 9 novembre 1999,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 25 novembre 1999,

rend le présent

Arrêt

1.
    Par décision du 11 décembre 1998, parvenue à la Cour le 13 janvier 1999, le Conseil d'État a, en vertu de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), posé deux questions préjudicielles sur l'interprétation de la directive 90/220/CEE du Conseil, du 23 avril 1990, relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement (JO L 117, p. 15), telle que modifiée par la directive 97/35/CE de la Commission, du 18 juin 1997, portant deuxième adaptation au progrès technique de la directive 90/220 (JO L 169, p. 72, ci-après la «directive 90/220»).

2.
    Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un recours introduit par l'Association Greenpeace France (ci-après «Greenpeace») en vue d'obtenir l'annulation de l'arrêté du 5 février 1998 du ministre de l'Agriculture et de la Pêche, portant modification du catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées en France, pour y faire figurer une espèce de maïs génétiquement modifiée produit par Ciba-Geigy Ltd, devenue depuis lors Novartis Seeds SA.

Le droit communautaire

La directive 90/220

3.
    La directive 90/220 vise, selon son article 1er, paragraphe 1, à rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres et à protéger la santé humaine et l'environnement en ce qui concerne, d'une part, la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés (ci-après les«OGM») dans l'environnement et, d'autre part, la mise sur le marché de produits consistant en OGM ou en contenant, destinés ensuite à une dissémination volontaire dans l'environnement.

4.
    L'article 4 de la directive 90/220 fait obligation aux États membres de prendre toutes les mesures appropriées afin d'éviter les effets négatifs pour la santé humaine et l'environnement qui pourraient résulter de la dissémination volontaire ou de la mise sur le marché d'OGM.

5.
    La partie C de la directive 90/220 (articles 10 à 18) contient les dispositions spécifiques concernant la mise sur le marché de produits contenant des OGM. Selon l'article 11, paragraphe 5, de cette directive, lu en combinaison avec son paragraphe 1, aucun produit contenant des OGM ne peut être disséminé dans l'environnement avant que l'autorité compétente de l'État membre dans lequel le produit sera mis sur le marché pour la première fois ait donné son consentement écrit à la suite de la notification qui lui aura été présentée par le fabricant ou l'importateur dans la Communauté. L'article 11, paragraphes 1 à 3, de cette directive spécifie le contenu obligatoire de cette notification, qui doit permettre notamment à l'autorité nationale de procéder à l'évaluation des risques imposée par l'article 10, paragraphe 1. Cette évaluation des risques doit précéder tout consentement.

6.
    L'article 12 de la directive 90/220 prévoit:

«1.    Après avoir reçu la notification visée à l'article 11 et en avoir accusé réception, l'autorité compétente examine si cette notification est conforme aux exigences de la présente directive, en accordant une attention particulière à l'évaluation des risques pour l'environnement et aux précautions recommandées pour une utilisation sûre du produit.

2.    Au plus tard quatre-vingt-dix jours après réception de la notification, l'autorité compétente:

a)    soit transmet le dossier à la Commission avec avis favorable;

b)    soit informe le notifiant que la dissémination envisagée ne remplit pas les conditions énoncées dans la présente directive et qu'en conséquence elle est rejetée.

3.    Dans le cas visé au paragraphe 2 point a), le dossier transmis à la Commission comporte un résumé de la notification ainsi qu'un exposé des conditions dans lesquelles l'autorité compétente envisage de donner son consentement pour la mise sur le marché du produit.

La structure de ce résumé sera fixée par la Commission selon la procédure prévue à l'article 21.

En particulier, lorsque l'autorité compétente a accédé à la demande faite par le notifiant, en vertu de l'article 11 paragraphe 1 dernier alinéa, de ne pas se conformer à certaines exigences de l'annexe III point B, elle en informe en même temps la Commission.

4.    Si l'autorité compétente reçoit des informations complémentaires en application de l'article 11 paragraphe 6, elle en informe immédiatement la Commission et les autres États membres.

5.    Pour le calcul du délai de quatre-vingt-dix jours visé au paragraphe 2, les périodes durant lesquelles l'autorité compétente attend des informations complémentaires demandées au notifiant ne sont pas prises en compte.»

7.
    L'article 13 de la directive 90/220 dispose:

«1.    Dès réception du dossier visé à l'article 12 paragraphe 3, la Commission le transmet immédiatement aux autorités compétentes de tous les États membres, accompagné des autres informations qu'elle a recueillies en application de la présente directive et elle communique à l'autorité compétente responsable de la transmission du document la date de sa diffusion.

2.    Si elle n'a pas reçu d'indication contraire de la part d'un autre État membre dans les soixante jours qui suivent la date de diffusion visée au paragraphe 1, l'autorité compétente donne son consentement par écrit à la notification de manière à permettre la mise sur le marché du produit et elle en informe les autres États membres et la Commission.

3.    Dans les cas où l'autorité compétente d'un autre État membre émet une objection, qui doit être motivée, et si les autorités compétentes concernées ne parviennent pas à un accord dans le délai indiqué au paragraphe 2, la Commission prend une décision selon la procédure prévue à l'article 21.

4.    Lorsque la Commission a pris une décision favorable, l'autorité compétente qui a reçu la notification initiale donne son consentement par écrit à la notification de manière à permettre la mise sur le marché du produit et elle en informe les autres États membres et la Commission.

5.    Dès lors qu'un produit a fait l'objet d'un consentement écrit, il peut être utilisé sans autre notification sur tout le territoire de la Communauté pour autant que les conditions spécifiques d'emploi et les environnements et/ou les zones géographiques précises dans ces conditions sont strictement respectés.

6.    Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour garantir que les utilisateurs respectent les conditions d'emploi spécifiées dans le consentement écrit.»

8.
    L'article 11, paragraphe 6, de la directive 90/220 précise que le notifiant doit porter à la connaissance de l'autorité compétente tout nouvel élément d'information qui serait devenu disponible au sujet des risques que présente le produit pour la santé humaine ou l'environnement, que ce soit avant ou après l'obtention du consentement écrit. Selon l'article 12, paragraphe 4, de la directive 90/220, les informations ainsi reçues par l'autorité compétente doivent être immédiatement communiquées par elle à la Commission et aux autres États membres.

9.
    Aux termes de l'article 16 de la directive 90/220:

«1.    Lorsqu'un État membre a des raisons valables de considérer qu'un produit qui a fait l'objet d'une notification en bonne et due forme et d'un consentement écrit conformément à la présente directive présente un risque pour la santé humaine ou l'environnement, il peut en limiter ou en interdire, à titre provisoire, l'utilisation et/ou la vente sur son territoire. Il en informe immédiatement la Commission et les autres États membres et indique les motifs de sa décision.

2.    Dans un délai de trois mois, une décision est prise en la matière selon la procédure prévue à l'article 21.»

La décision 97/98

10.
    Le 23 janvier 1997, la Commission a adopté la décision 97/98/CE, concernant la mise sur le marché de maïs génétiquement modifié (Zea mays L.) ayant subi la modification combinée lui assurant les propriétés insecticides conférées par le gène Bt-endotoxine et une meilleure tolérance à l'herbicide glufosinate-ammonium, en application de la directive 90/220 (JO L 31, p. 69).

11.
    Cette décision est libellée ainsi:

«vu le traité instituant la Communauté européenne,

vu la directive 90/220/CEE du Conseil, du 23 avril 1990, relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement, modifiée par la directive 94/15/CE de la Commission, et notamment son article 13,

considérant que les articles 10 à 18 de la directive 90/220/CEE instituent une procédure communautaire qui habilite l'autorité compétente d'un État membre à autoriser la mise sur le marché de produits constitués d'organismes génétiquement modifiés;

considérant qu'une notification relative à la mise sur le marché d'un tel produit a été présentée à l'autorité compétente d'un État membre (France);

considérant que l'autorité compétente de la France a ultérieurement transmis le dossier à la Commission avec avis favorable; que les autorités compétentes d'autres États membres ont émis des objections à l'égard de ce dossier;

considérant, par conséquent, qu'en application de l'article 13 paragraphe 3 de la directive 90/220/CEE, la Commission doit prendre une décision selon la procédure prévue à l'article 21 de ladite directive;

considérant que la Commission, après avoir examiné chacune des objections soulevées à la lumière des dispositions de la directive 90/220/CEE et analysé les informations fournies dans le dossier, est parvenue aux conclusions suivantes:

-    le demandeur a fourni des informations sur tous les nouveaux gènes introduits, et pas uniquement sur les gènes exprimés,

-    l'évaluation des risques a pris en considération tous les gènes introduits, qu'ils soient ou non exprimés. Dans le cas du produit examiné, une évaluation des risques dus à la présence du gène non exprimé de la â-lactamase contrôlé par un promoteur bactérien a également été effectuée,

-    pour les produits destinés à l'alimentation humaine ou animale, l'évaluation des risques selon la directive 90/220/CEE détermine si la modification génétique est susceptible d'entraîner des effets toxiques ou autres effets nocifs pour la santé humaine et pour l'environnement,

-    il n'y a pas de raison de penser que l'introduction dans le maïs des gènes concernés aura une incidence négative quelconque sur la santé humaine et sur l'environnement,

-    l'apparition éventuelle d'une résistance à la protéine CryIA(b) tronquée chez les insectes ne peut pas être considérée comme un effet néfaste pour l'environnement, puisque les moyens agricoles actuels de lutte contre ces espèces d'insectes résistants seront toujours disponibles,

-    rien, sur le plan de la sécurité, ne justifie l'indication, sur l'étiquette, que le produit a été obtenu grâce à des techniques de modification génétique,

-    l'étiquette doit préciser que les plantes présentent une tolérance accrue à l'herbicide glufosinate-ammonium;

considérant que l'autorisation des herbicides chimiques et l'évaluation des conséquences de leur utilisation sur la santé humaine et sur l'environnement sont régies par la directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, modifiée en dernier lieu par la directive 96/68/CE de la Commission, et non par la directive 90/220/CEE;

considérant que le produit examiné a été notifié pour une utilisation sans restriction, notamment pour l'alimentation humaine et animale;

considérant que la présente décision n'exclut pas l'application, conformément aux dispositions de la législation communautaire, des dispositions adoptées par les États membres en matière de sécurité des denrées alimentaires et des aliments pour animaux si elles ne portent pas spécifiquement sur la modification génétique du produit concerné ou de ses composants;

considérant que l'article 11 paragraphe 6 et l'article 16 paragraphe 1 de la directive 90/220/CEE prévoient des garanties supplémentaires au cas où de nouvelles informations relatives aux risques présentés par le produit seraient obtenues;

considérant que le comité institué par l'article 21 de la directive 90/220/CEE et consulté par procédure écrite le 8 mars 1996 n'a pas émis d'avis sur les mesures prévues dans un projet de décision de la Commission;

considérant que le Conseil n'a pas statué sur la proposition de la Commission dans le délai prévu à l'article 21 paragraphe 5 de la directive 90/220/CEE; qu'il incombe dès lors à la Commission d'adopter les mesures proposées;

considérant que l'avis du comité scientifique sur l'alimentation animale institué par la décision 76/791/CEE de la Commission, celui du comité scientifique sur l'alimentation humaine institué par la décision 95/273/CE de la Commission et celui du comité scientifique sur les pesticides institué par la décision 78/436/CEE de la Commission, requis par la Commission afin de confirmer si possible qu'il n'y a aucune raison de penser que l'introduction des gènes concernés dans le maïs ait une incidence négative quelconque sur la santé humaine ou sur l'environnement, n'ont pas fait ressortir de nouveaux éléments justifiant une décision différente,

a arrêté la présente décision:

Article premier

1.    Sans préjudice des autres mesures législatives communautaires et sous réserve des paragraphes 2 et 3, les autorités françaises autorisent la mise sur le marché du produit ci-après, notifié par Ciba-Geigy Limited (réf. C/F/94/11-03) conformément à l'article 13 de la directive 90/220/CEE.

Le produit consiste en lignées pures et en hybrides d'une lignée de maïs (Zea mays L.) (CG 00256-176) transformée à l'aide de plasmides contenant:

i)    une copie du gène bar de Streptomyces hygroscopicus (codant pour une phosphinothricine acétyltransférase), contrôlée par le promoteur 35S et le terminateur 35S du virus de la mosaïque du chou-fleur (CaMV);

ii)    deux copies d'un gène de synthèse tronqué codant pour une protéine de lutte contre les insectes représentant la portion active de la ä-endotoxine CryIA(b), provenant de la souche HD1-9 de Bacillus thuringiensis subsp. kurstaki et contenant l'intron n° 9 du gène codant pour la phosphoénolpyruvate carboxylase du maïs;

    la première copie est contrôlée par un promoteur du gène de la phosphoénolpyruvate carboxylase du maïs et par le terminateur S35 du CaMV, et la seconde copie par un promoteur dérivé d'un gène codant pour une protéine-kinase calcium-dépendante du maïs et par le terminateur S35 du CaMV;

iii)    le gène de procaryote bla (codant pour une â-lactamase conférant la résistance à l'ampicilline), contrôlé par un promoteur de procaryotes.

2.    L'autorisation vise toute la descendance issue de croisements du produit avec une variété quelconque de maïs traditionnel.

3.    Sans préjudice des autres exigences en matière d'étiquetage requises par la législation communautaire, l'étiquette de chaque emballage de semences doit préciser que le produit:

-    présente une autoprotection contre la pyrale du maïs,

-    présente une tolérance accrue à l'herbicide glufosinate- ammonium.

Article 2

Les États membres sont destinataires de la présente décision.»

Le droit français

12.
    La loi n° 92-654, du 13 juillet 1992, relative au contrôle de l'utilisation et de la dissémination des organismes génétiquement modifiés et modifiant la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, prévoit, en ses articles 15 et 16, la procédure qui doit être suivie afin d'obtenir une autorisation de mise sur le marché d'un produit composé en tout ou en partie d'OGM. La mise sur le marché doit faire l'objet d'une autorisation préalable, laquelle doit être délivrée par l'autorité administrative après évaluation des risques pour la santé publique ou pour l'environnement (article 15). Les autorisations délivrées par les autres États membres valent autorisation au sens de cette loi (article 16, premier alinéa). Toutefois, lorsqu'il existe des raisons valables de considérer qu'un produit autorisé par un autre État membre présente des risques pour la santé publique ou pour l'environnement, l'autorité administrativepeut en limiter ou en interdire, à titre provisoire, l'utilisation ou la mise sur le marché (article 16, second alinéa).

13.
    Le décret n° 81-605, du 18 mai 1981, pris pour l'application de la loi du 1er août 1905 sur la répression des fraudes en ce qui concerne le commerce des semences et plantes, modifié par le décret n° 93-1177, du 18 octobre 1993, pris pour l'application, s'agissant de plantes, semences et plants, du titre III de la loi n° 92-654 du 13 juillet 1992 (ci-après le «décret n° 81-605»), définit le régime applicable en matière d'autorisation de mise sur le marché des plantes, semences et plants.

14.
    Selon l'article 4-1 du décret n° 81-605, le ministre chargé de l'agriculture délivre, après avis du ministre chargé de l'environnement, les autorisations requises pour toute dissémination destinée à produire des semences ou les plants qui seront mis sur le marché. Le dernier alinéa de cette disposition prévoit que, lorsque la semence ou le plant ont fait l'objet d'une inscription à un catalogue ou à un registre annexe, c'est l'arrêté d'inscription qui constitue l'autorisation. En revanche, selon l'article 15-1 du décret n° 81-605, lorsque la semence ou le plant génétiquement modifiés n'ont pas fait l'objet d'une telle inscription, l'autorisation requise est délivrée par arrêté du ministre chargé de l'environnement.

15.
    Selon l'article 6-1, point II, du décret n° 81-605, l'instruction du dossier de demande d'autorisation par l'autorité administrative compétente débouche dans les 90 jours soit sur une décision de rejet, soit sur la transmission du dossier à la Commission avec avis favorable. L'article 6-1, point III, du décret n° 81-605 prévoit que, lorsqu'une objection formulée par un autre État membre n'a pas été levée à l'issue du délai de 60 jours suivant la date de la diffusion du dossier par la Commission, l'autorisation ne peut être donnée qu'après décision de l'autorité communautaire compétente.

16.
    L'article 7-1 du décret n° 81-605 permet à l'autorité administrative de réexaminer l'autorisation accordée et de prendre certaines mesures si une nouvelle évaluation des risques pour la santé humaine ou l'environnement le justifie. Selon l'article 8-1 du décret n° 81-605, le demandeur d'une autorisation doit communiquer au ministre chargé de l'agriculture tout élément nouveau relatif aux risques présentés par le ou les OGM pour la santé humaine ou l'environnement connu soit avant, soit après l'obtention de l'autorisation, et doit prendre lui-même, le cas échéant, des mesures de protection.

Faits et questions préjudicielles

17.
    À la suite de la décision 97/98, le ministre de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation français a adopté, le 4 février 1997, un arrêté portant autorisation de mise sur le marché de lignées de maïs (ZEA mays L.) génétiquement modifiées protégées contre la pyrale et présentant une tolérance accrue aux herbicides de la famille du glufosinate-ammonium (ci-après l'«arrêté du 4 février 1997»), quiconstitue le «consentement par écrit» prévu à l'article 13 de la directive 90/220. Le 5 février 1998, ce même ministre a adopté un arrêté portant modification du catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées en France (semences de maïs) (ci-après l'«arrêté du 5 février 1998»). Cet arrêté a pour objet d'autoriser la commercialisation de semences issues de certaines variétés de maïs génétiquement modifiées.

18.
    L'arrêté du 5 février 1998 a fait l'objet d'une demande de sursis à exécution et d'un recours en annulation auprès du Conseil d'État présentés par Greenpeace.

19.
    La demande de sursis à exécution a fait l'objet d'une décision du Conseil d'État, du 25 septembre 1998, par laquelle a été ordonné le sursis à l'exécution de l'arrêté du 5 février 1998, au motif, d'une part, qu'un moyen invoqué par Greenpeace paraissait sérieux et de nature à justifier l'annulation dudit arrêté et, d'autre part, que l'exécution de ce dernier pourrait entraîner des conséquences de nature à justifier qu'il y soit sursis. Le moyen avancé par Greenpeace, et reconnu comme sérieux au stade du sursis à exécution par le Conseil d'État, est tiré de ce que l'arrêté du 5 février 1998 aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière et de ce qu'il violerait le principe de précaution.

20.
    Le Conseil d'État a, en particulier, relevé, dans sa décision du 25 septembre 1998, que Greenpeace soutient «que l'avis de la Commission d'étude de la dissémination des produits issus du génie biomoléculaire aurait été rendu au vu d'un dossier incomplet en ce qu'il ne comportait pas d'éléments permettant d'évaluer l'impact sur la santé publique du gène de résistance à l'ampicilline contenu dans les variétés de maïs transgénique faisant l'objet de la demande d'autorisation».

21.
    Le recours en annulation présenté par Greenpeace contre l'arrêté du 5 février 1998 a été joint par le Conseil d'État à quatre autres requêtes, tendant également à l'annulation de cet arrêté, présentées par trois autres associations ainsi que, pour la dernière, par trois particuliers.

22.
    De nombreux moyens relatifs à la légalité externe et à la légalité interne de l'arrêté du 5 février 1998 ont été invoqués par les requérants au principal. En particulier, ceux-ci ont fait valoir que l'arrêté du 5 février 1998 serait illégal en raison de l'illégalité, invoquée par la voie de l'exception, de l'arrêté du 4 février 1997 à la suite duquel il a été pris. Il est soutenu, notamment, que l'arrêté du 4 février 1997 portant autorisation de mise sur le marché des lignées de maïs en cause au principal serait illégal au motif que la procédure administrative suivie par les autorités françaises avant la transmission du dossier à la Commission serait entachée d'irrégularités.

23.
    C'est dans ces circonstances que le Conseil d'État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)    Les dispositions de la directive 90/220/CEE du Conseil doivent-elles être interprétées en ce sens que, si, après transmission à la Commission des Communautés européennes d'une demande de mise sur le marché d'un organisme génétiquement modifié, aucun État membre n'a émis d'objection comme il est prévu au paragraphe 2 de l'article 13 de la directive 90/220, ou si la Commission des Communautés européennes a pris une 'décision favorable‘ en application du paragraphe 4 de cet article, l'autorité compétente qui a transmis la demande, avec avis favorable, à la Commission est tenue de délivrer le 'consentement écrit‘ permettant la mise sur le marché du produit, ou cette autorité conserve-t-elle un pouvoir d'appréciation lui permettant de ne pas donner un tel consentement?

2)    La décision du 23 janvier 1997 de la Commission des Communautés européennes, aux termes de laquelle 'les autorités françaises autorisent la mise sur le marché du produit ... notifié par Ciba-Geigy Limited‘, doit-elle être interprétée comme obligeant le gouvernement français à délivrer son 'consentement écrit‘?»

Sur la première question

24.
    Par sa première question, la juridiction nationale interroge la Cour sur le point de savoir si l'État membre qui a reçu une notification relative à la mise sur le marché d'un OGM et qui a transmis le dossier à la Commission avec avis favorable dispose, lorsque soit aucun autre État membre n'a émis d'objection, soit la Commission a pris une décision favorable, d'un pouvoir d'appréciation lui permettant de ne pas donner son consentement.

25.
    Il convient de rappeler d'abord que, selon l'article 13, paragraphe 4, de la directive 90/220, «Lorsque la Commission a pris une décision favorable, l'autorité compétente qui a reçu la notification initiale donne son consentement par écrit à la notification de manière à permettre la mise sur le marché du produit» et que, selon le paragraphe 2 de cette disposition, la même obligation s'impose si cette autorité n'a pas reçu d'indication contraire d'un autre État membre dans les 60 jours qui suivent la date de diffusion du dossier par la Commission.

26.
    À cet égard, Greenpeace a fait valoir que, bien que l'article 13, paragraphe 4, de la directive 90/220 puisse laisser croire que l'autorité compétente est tenue de donner son consentement, une telle lecture n'est pas compatible avec les considérants et l'économie générale de ladite directive. En outre, la définition du terme «consentement» supposerait, dans tous les cas, l'expression d'une volonté libre de contraintes.

27.
    Selon Ecoropa, une interprétation de l'article 13, paragraphe 4, de la directive 90/220 selon laquelle l'État membre serait obligé de donner son consentement par écrit de manière à permettre la mise sur le marché du produit lorsque laCommission a pris une décision favorable serait exclue par les termes de cette disposition. À cet égard, Ecoropa a fait notamment valoir que, dans l'hypothèse d'une compétence liée, la rédaction de cette disposition eût été différente.

28.
    Il y a lieu de constater, d'abord, que, si une autre rédaction aurait pu faire ressortir plus explicitement l'existence d'une compétence liée des États membres, il n'en demeure pas moins que tant l'utilisation, dans la version française de l'article 13, paragraphes 2 et 4, de la directive 90/220, du présent de l'indicatif que la construction des phrases de cette disposition indiquent d'une manière claire et non équivoque que l'État membre concerné a l'obligation de donner son consentement.

29.
    Il convient d'ailleurs de relever que le sens et le contenu de cette disposition se retrouvent dans d'autres versions linguistiques de la directive 90/220, et notamment dans la version anglaise («The competent authority ... shall give its consent in writing»).

30.
    Il s'ensuit que, eu égard aux termes de l'article 13, paragraphes 2 et 4, de la directive 90/220, cette disposition impose, dans les cas y visés, l'obligation à l'État membre concerné de délivrer son consentement par écrit.

31.
    Ensuite, il convient d'examiner si, comme le prétendent les requérants au principal, le contexte procédural dans lequel s'insère l'article 13, paragraphes 2 et 4, s'oppose à une telle interprétation.

32.
    À cet égard, Greenpeace et la Confédération paysanne ont fait valoir que, puisqu'il ressort de l'article 13, paragraphes 2 et 4, de la directive 90/220 que l'autorisation de mettre le produit sur le marché est fondée sur le consentement par écrit de l'autorité nationale compétente, une interprétation telle qu'énoncée au point 30 du présent arrêt aboutirait à ce que la décision favorable de la Commission et non celle de l'autorité nationale compétente vaille autorisation de mise sur le marché, privant ainsi les États membres de tout pouvoir d'appréciation avant de délivrer leur consentement.

33.
    Il convient sur ce point de relever que, pour mettre en oeuvre une procédure communautaire d'autorisation de mise sur le marché de produits contenant des OGM, le législateur communautaire a instauré, aux articles 10 à 18 de la directive 90/220, une coopération étroite entre la Commission et l'autorité compétente de l'État membre dans lequel ce produit sera mis sur le marché pour la première fois.

34.
    En effet, selon les articles 12 et 13 de cette directive, la procédure d'autorisation de mise sur le marché de produits contenant des OGM s'articule en deux phases.

35.
    En ce qui concerne, en premier lieu, l'autorité nationale compétente, il ressort de l'article 12, paragraphe 1, de la directive 90/220 que cette autorité, après avoir reçu la notification du fabricant ou de l'importateur concerné, visée à l'article 11, doitexaminer si cette notification est conforme aux exigences de ladite directive, en accordant une attention particulière à l'évaluation des risques pour l'environnement et aux précautions recommandées pour une utilisation sûre du produit. Selon l'article 12, paragraphe 2, au plus tard 90 jours après réception de la notification, l'autorité compétente soit transmet le dossier à la Commission avec avis favorable, soit informe le notifiant que la dissémination envisagée ne remplit pas les conditions énoncées dans la directive 90/220 et qu'en conséquence elle est rejetée.

36.
    L'article 12, paragraphe 3, de la directive 90/220 dispose que le dossier transmis à la Commission doit être accompagné d'un résumé de la notification ainsi que d'un exposé des conditions dans lesquelles l'autorité compétente «envisage de donner son consentement pour la mise sur le marché du produit».

37.
    Ainsi, la phase nationale de la procédure en vue de la mise sur le marché de produits contenant des OGM a pour but, conformément au dix-septième considérant de la directive 90/220, de mettre l'autorité compétente en mesure de ne donner son avis favorable suivi, le cas échéant, par son consentement par écrit qu'après s'être assurée que la dissémination sera sans risque pour la santé humaine et l'environnement.

38.
    En ce qui concerne, en second lieu, la Commission, l'article 13, paragraphe 1, de la directive 90/220 prévoit qu'elle transmet le dossier aux autorités compétentes de tous les États membres, accompagné des autres informations qu'elle a recueillies en application de ladite directive. L'autorité nationale compétente donne son consentement soit en l'absence d'indication contraire de la part d'un État membre, ainsi qu'il est prévu au paragraphe 2 de cette disposition, soit, dans le cas visé au paragraphe 4, lorsque la Commission a pris une décision favorable selon la procédure visée à l'article 21 de la directive 90/220 auquel se réfère l'article 13, paragraphe 3, de ladite directive.

39.
    Il s'ensuit que la procédure d'autorisation de mise sur le marché d'un produit contenant des OGM, visée à la directive 90/220, n'intervient qu'après la clôture d'une procédure au cours de laquelle les autorités nationales ont adopté un avis favorable sur la base de l'examen prévu à l'article 12, paragraphe 1, de cette directive et ont ainsi eu l'occasion d'exercer pleinement leur propre pouvoir d'appréciation pour évaluer les risques que la dissémination de produits contenant des OGM fait courir à la santé humaine et à l'environnement.

40.
    Les requérants au principal ont, enfin, fait valoir que l'interprétation de l'article 13, paragraphes 2 et 4, de la directive 90/220 dans le sens d'une compétence liée se heurte au principe de précaution.

41.
    Il convient de relever à cet égard que, selon le huitième considérant de la directive 90/220, celle-ci instaure des «procédures et des critères harmonisés pour l'évaluation cas par cas des risques potentiels liés à la dissémination volontaired'OGM dans l'environnement». En vertu du neuvième considérant, une telle évaluation cas par cas doit toujours être effectuée avant toute dissémination.

42.
    Ainsi qu'il ressort du point 39 du présent arrêt, c'est à cette fin que les autorités compétentes nationales disposent d'un pouvoir d'appréciation pour s'assurer que la notification visée à l'article 11 de la directive est conforme aux exigences de celle-ci, en accordant une attention particulière à l'évaluation des risques découlant de la mise sur le marché de produits contenant des OGM pour l'environnement et la santé humaine, ainsi qu'il est prévu à l'article 12, paragraphe 1, de la directive 90/220 et mentionné au troisième considérant.

43.
    En ce qui concerne les autorités compétentes des autres États membres, l'article 13, paragraphes 2 et 3, de la directive 90/220 prévoit que celles-ci ont la faculté d'émettre des objections avant que l'autorité compétente concernée donne son consentement à la notification.

44.
    Ensuite, le respect du principe de précaution trouve son expression, d'une part, dans l'obligation du notifiant, prévue à l'article 11, paragraphe 6, de la directive 90/220, d'informer immédiatement l'autorité compétente de nouveaux éléments d'information au sujet des risques que présente le produit pour la santé humaine ou l'environnement ainsi que dans l'obligation de l'autorité compétente, prévue à l'article 12, paragraphe 4, d'en informer immédiatement la Commission et les autres États membres et, d'autre part, dans la faculté de tout État membre, prévue à l'article 16 de cette directive, de limiter ou d'interdire, à titre provisoire, l'utilisation et/ou la vente sur son territoire d'un produit qui a fait l'objet d'un consentement dont il a des raisons valables de considérer qu'il présente un risque pour la santé humaine ou l'environnement.

45.
    Il y a lieu d'ajouter que le système de protection mis en oeuvre par la directive 90/220, et notamment ses articles 4, 12, paragraphe 4, et 16, implique nécessairement que l'État membre concerné ne saurait être tenu de donner son consentement par écrit s'il dispose entre-temps de nouveaux éléments d'information qui l'amènent à considérer que le produit qui a fait l'objet de la notification peut présenter un risque pour la santé humaine et l'environnement.

46.
    Dans un tel cas, il est tenu d'en informer immédiatement la Commission et les autres États membres pour que, dans le délai prescrit à l'article 16, paragraphe 2, de la directive 90/220, une décision soit prise en la matière selon la procédure prévue à l'article 21 de ladite directive.

47.
    Il résulte de ce qui précède que la directive 90/220 doit être interprétée en ce sens que, si, après transmission à la Commission d'une demande de mise sur le marché d'un OGM, aucun État membre n'a émis d'objection, conformément à l'article 13, paragraphe 2, de ladite directive, ou si la Commission a pris une «décision favorable» en application du paragraphe 4 de cette disposition, l'autoritécompétente qui a transmis la demande, avec avis favorable, à la Commission est tenue de délivrer le «consentement écrit» permettant la mise sur le marché du produit. Toutefois, si l'État membre concerné dispose entre-temps de nouveaux éléments d'information qui l'amènent à considérer que le produit qui a fait l'objet de la notification peut présenter un risque pour la santé humaine et l'environnement, il ne sera pas tenu de donner son consentement, à condition qu'il en informe immédiatement la Commission et les autres États membres pour que, dans le délai prescrit à l'article 16, paragraphe 2, de la directive 90/220, une décision soit prise en la matière selon la procédure prévue à l'article 21 de ladite directive.

Sur la seconde question

48.
    Il ressort du dossier au principal que, par sa seconde question, la juridiction nationale demande, en substance, si la «décision favorable» de la Commission fait obligation à l'autorité nationale compétente de donner son «consentement par écrit», nonobstant d'éventuelles irrégularités qui pourraient être constatées par une juridiction dans le déroulement de l'examen de la notification par cette autorité et qui sont de nature à mettre en cause la légalité de la décision de transmettre le dossier avec avis favorable à la Commission.

49.
    Ainsi qu'il a été relevé au point 47 du présent arrêt, lorsque la Commission a pris une «décision favorable» en vertu de l'article 13, paragraphe 4, de la directive 90/220, l'autorité compétente qui a transmis la demande avec avis favorable à la Commission est tenue, sauf dans les circonstances mentionnées à la fin de ce point, de délivrer le «consentement par écrit» permettant la mise sur le marché du produit.

50.
    Une telle obligation suppose que l'autorité nationale compétente ait transmis, en vertu de l'article 12, paragraphe 2, sous a), de la directive 90/220, le dossier à la Commission avec avis favorable et ait, ainsi, déclenché la phase communautaire de la procédure d'autorisation de mise sur le marché du produit concerné.

51.
    Ainsi, cette décision de l'autorité compétente conditionne la procédure communautaire et peut même, en l'absence d'indication contraire de la part d'un autre État membre dans le délai prévu à l'article 13, paragraphe 2, de la directive, en déterminer l'issue.

52.
    Étant donné que l'avis favorable de l'autorité nationale compétente est fondé sur les résultats de l'examen de la notification prévu à l'article 12, paragraphe 1, de la directive 90/220, il y a lieu d'examiner l'incidence sur la validité de la décision favorable de la Commission d'éventuelles irrégularités dans le déroulement de cet examen de nature à mettre en cause la légalité de la décision de transmettre le dossier avec avis favorable à la Commission.

53.
    S'agissant d'un acte pris par une autorité nationale, il appartient aux juridictions nationales de statuer sur la régularité de l'examen de la notification prévu à l'article 12, paragraphe 1, de la directive 90/220 ainsi que sur les conséquences que d'éventuelles irrégularités dans le déroulement de cet examen pourraient avoir sur la légalité de la décision prise par l'autorité compétente de transmettre, en vertu de l'article 12, paragraphe 2, sous a), de cette directive, le dossier à la Commission avec avis favorable.

54.
    Il y a lieu de rappeler en outre que, lorsque la mise en oeuvre administrative d'une décision communautaire incombe aux autorités nationales, la protection juridictionnelle garantie par le droit communautaire comporte le droit pour les justiciables de contester, de façon incidente, la légalité de cette décision devant la juridiction nationale et de demander à celle-ci de saisir la Cour de questions préjudicielles en appréciation de validité de ladite décision. Dans un tel cas, la Cour est seule compétente pour constater l'invalidité d'un acte communautaire (voir arrêt du 22 octobre 1987, Foto-Frost, 314/85, Rec. p. 4199, point 20).

55.
    Il s'ensuit que, lorsque le juge national constate que, en raison d'irrégularités dans le déroulement de l'examen de la notification par l'autorité nationale compétente prévu à l'article 12, paragraphe 1, de la directive 90/220, celle-ci n'a pas pu valablement transmettre le dossier avec avis favorable à la Commission au sens du paragraphe 2 de cette disposition, il est tenu de saisir la Cour à titre préjudiciel s'il estime que ces irrégularités sont de nature à affecter la validité de la décision favorable de la Commission, en exposant les motifs d'invalidité qui lui paraissent devoir être retenus et, le cas échéant, en ordonnant le sursis à l'exécution des mesures d'application de ladite décision jusqu'à ce que la Cour ait statué sur la question d'appréciation de validité (voir, en ce sens, arrêt du 21 février 1991, Zuckerfabrik Süderdithmarschen et Zuckerfabrik Soest, C-143/88 et C-92/89, Rec. p. I-415, point 24).

56.
    Dans l'hypothèse où la Cour constaterait l'illégalité de la décision favorable de la Commission, les conditions pour la délivrance du consentement par écrit par l'autorité compétente prévues à l'article 13, paragraphes 2 et 4, de la directive 90/220 ne seraient pas réunies, et il en résulterait soit que le consentement par écrit n'a pas été valablement donné, soit que celui-ci ne saurait valablement l'être.

57.
    Il résulte de ce qui précède que, lorsque la juridiction nationale constate que, en raison d'irrégularités dans le déroulement de l'examen de la notification par l'autorité nationale compétente prévu à l'article 12, paragraphe 1, de la directive 90/220, celle-ci n'a pas pu valablement transmettre le dossier avec avis favorable à la Commission au sens du paragraphe 2 de cette disposition, cette juridiction est tenue de saisir la Cour à titre préjudiciel si elle estime que ces irrégularités sont de nature à affecter la validité de la décision favorable de la Commission, en ordonnant, le cas échéant, le sursis à l'exécution des mesures d'application de ladite décision jusqu'à ce que la Cour ait statué sur la question d'appréciation de validité.

Sur les dépens

58.
    Les frais exposés par les gouvernements français, italien et autrichien, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR

statuant sur les questions à elle soumises par le Conseil d'État, par décision du 11 décembre 1998, dit pour droit:

1)    La directive 90/220/CEE du Conseil, du 23 avril 1990, relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement, telle que modifiée par la directive 97/35/CE de la Commission, du 18 juin 1997, portant deuxième adaptation au progrès technique de la directive 90/220, doit être interprétée en ce sens que, si, après transmission à la Commission d'une demande de mise sur le marché d'un organisme génétiquement modifié, aucun État membre n'a émis d'objection, conformément à l'article 13, paragraphe 2, de ladite directive, ou si la Commission a pris une «décision favorable» en application du paragraphe 4 de cette disposition, l'autorité compétente qui a transmis la demande, avec avis favorable, à la Commission est tenue de délivrer le «consentement écrit» permettant la mise sur le marché du produit. Toutefois, si l'État membre concerné dispose entre-temps de nouveaux éléments d'information qui l'amènent à considérer que le produit qui a fait l'objet de la notification peut présenter un risque pour la santé humaine et l'environnement, il ne sera pas tenu de donner son consentement, à condition qu'il en informe immédiatement la Commission et les autres États membres pour que, dans le délai prescrit à l'article 16, paragraphe 2, de la directive 90/220, une décision soit prise en la matière selon la procédure prévue à l'article 21 de ladite directive.

2)    Lorsque la juridiction nationale constate que, en raison d'irrégularités dans le déroulement de l'examen de la notification par l'autorité nationale compétente prévu à l'article 12, paragraphe 1, de la directive 90/220, celle-ci n'a pas pu valablement transmettre le dossier avec avis favorable à la Commission au sens du paragraphe 2 de cette disposition, cette juridiction est tenue de saisir la Cour à titre préjudiciel si elle estime que ces irrégularités sont de nature à affecter la validité de la décision favorable de la Commission, en ordonnant, le cas échéant, le sursis à l'exécution desmesures d'application de ladite décision jusqu'à ce que la Cour ait statué sur la question d'appréciation de validité.

Rodríguez Iglesias Moitinho de Almeida Sevón

Schintgen Kapteyn Gulmann Puissochet

Hirsch Wathelet Skouris Macken

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 mars 2000.

Le greffier

Le président

R. Grass

G. C. Rodríguez Iglesias


1: Langue de procédure: le français.