Language of document : ECLI:EU:C:2019:373

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

8 mai 2019 (*)

« Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Interdiction de toute discrimination fondée sur l’âge – Directive 2000/78/CE – Exclusion de l’expérience professionnelle acquise avant l’âge de 18 ans – Nouveau régime de rémunération et d’avancement – Maintien de la différence de traitement – Libre circulation des travailleurs – Article 45 TFUE – Règlement (UE) no 492/2011 – Article 7, paragraphe 1 – Réglementation nationale prévoyant une prise en compte partielle des périodes d’activité antérieures  »

Dans l’affaire C‑24/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche), par décision du 19 décembre 2016, parvenue à la Cour le 18 janvier 2017, dans la procédure

Österreichischer Gewerkschaftsbund, Gewerkschaft Öffentlicher Dienst

contre

Republik Österreich,

LA COUR (première chambre),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, vice-présidente de la Cour, faisant fonction de président de la première chambre, MM. A. Arabadjiev (rapporteur), E. Regan, C. G. Fernlund et S. Rodin, juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 12 septembre 2018,

considérant les observations présentées :

–        pour l’Österreichischer Gewerkschaftsbund, Gewerkschaft Öffentlicher Dienst, par Mes M. Riedl et V. Treber-Müller, Rechtsanwälte,

–        pour le gouvernement autrichien, par M. G. Hesse et Mme J. Schmoll, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par MM. B.-R. Killmann et D. Martin, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 décembre 2018,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 45 TFUE, des articles 21 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), de l’article 7, paragraphe 1, du règlement (UE) no 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union (JO 2011, L 141, p. 1), ainsi que des articles 1er, 2, 6 et 17 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail (JO 2000, L 303, p. 16).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Österreichischer Gewerkschaftsbund, Gewerkschaft Öffentlicher Dienst (Confédération autrichienne des syndicats, syndicat de la fonction publique, ci-après le « Gewerkschaftsbund ») à la Republik Österreich (République d’Autriche) au sujet de la licéité du régime fédéral de rémunération et d’avancement des agents contractuels de la fonction publique adopté par le législateur autrichien en vue de mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 Le règlement no 492/2011

3        Le chapitre I du règlement no 492/2011, intitulé « De l’emploi, de l’égalité de traitement et de la famille des travailleurs », comprend la section 2 de celui-ci, relative à l’exercice de l’emploi et à l’égalité de traitement. À cette section, figure l’article 7 de ce règlement, qui prévoit, à son paragraphe 1 :

« Le travailleur ressortissant d’un État membre ne peut, sur le territoire des autres États membres, être, en raison de sa nationalité, traité différemment des travailleurs nationaux, pour toutes conditions d’emploi et de travail, notamment en matière de rémunération, de licenciement et de réintégration professionnelle ou de réemploi s’il est tombé au chômage. »

 La directive 2000/78

4        Aux termes de son article 1er, la directive 2000/78 « a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, [le] handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement. »

5        L’article 2 de cette directive prévoit :

« 1.      Aux fins de la présente directive, on entend par “principe de l’égalité de traitement” l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er.

2.      Aux fins du paragraphe 1 :

a)      une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er ;

b)      une discrimination indirecte se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une religion ou de convictions, d’un handicap, d’un âge ou d’une orientation sexuelle donnés, par rapport à d’autres personnes, à moins que :

i)      cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif ne soient appropriés et nécessaires,

[...] »

6        L’article 6 de ladite directive dispose :

« 1.      Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.

Ces différences de traitement peuvent notamment comprendre :

a)      la mise en place de conditions spéciales d’accès à l’emploi et à la formation professionnelle, d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération, pour les jeunes, les travailleurs âgés et ceux ayant des personnes à charge, en vue de favoriser leur insertion professionnelle ou d’assurer leur protection ;

b)      la fixation de conditions minimales d’âge, d’expérience professionnelle ou d’ancienneté dans l’emploi, pour l’accès à l’emploi ou à certains avantages liés à l’emploi ;

c)      la fixation d’un âge maximum pour le recrutement, fondée sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d’une période d’emploi raisonnable avant la retraite.

2.      Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que ne constitue pas une discrimination fondée sur l’âge la fixation, pour les régimes professionnels de sécurité sociale, d’âges d’adhésion ou d’admissibilité aux prestations de retraite ou d’invalidité, y compris la fixation, pour ces régimes, d’âges différents pour des travailleurs ou des groupes ou catégories de travailleurs et l’utilisation, dans le cadre de ces régimes, de critères d’âge dans les calculs actuariels, à condition que cela ne se traduise pas par des discriminations fondées sur le sexe. »

7        L’article 17 de cette même directive énonce :

« Les États membres déterminent le régime des sanctions applicables aux violations des dispositions nationales adoptées en application de la présente directive et prennent toute mesure nécessaire pour assurer la mise en œuvre de celles-ci. Les sanctions ainsi prévues qui peuvent comprendre le versement d’indemnité à la victime, doivent être effectives, proportionnées et dissuasives. Les États membres notifient ces dispositions à la Commission au plus tard le 2 décembre 2003 et toute modification ultérieure les concernant dans les meilleurs délais. »

 Le droit autrichien

8        La juridiction de renvoi expose que la législation nationale en matière de rémunération et d’avancement des agents contractuels de l’État a, en raison de la contrariété de certaines dispositions avec le droit de l’Union, été modifiée à de nombreuses reprises. Le nouveau régime de rémunération et d’avancement de ces agents, issu des modifications législatives promulguées au cours des années 2015 et 2016, tendrait à mettre fin notamment à une discrimination fondée sur l’âge qui résultait du régime de rémunération et d’avancement antérieurement en vigueur.

 La loi portant statut des agents contractuels

9        L’article 19 du Vertragsbedienstetengesetz 1948 (loi portant statut des agents contractuels de 1948), telle que modifiée par la loi fédérale, du 30 août 2010 (BGBl. I, 82/2010) (ci-après la « loi portant statut des agents contractuels »), prévoyait, à son paragraphe 1 :

« L’avancement est déterminé en fonction d’une date de référence. Sauf disposition contraire dans le présent article, la période nécessaire à un avancement au deuxième échelon de chaque catégorie d’emploi est de cinq ans et de deux ans pour les autres échelons. »

10      L’article 26, paragraphe 1, de la loi portant statut des agents contractuels disposait :

« Sous réserve des restrictions énoncées aux paragraphes 4 à 8, la date de référence à prendre en considération aux fins de l’avancement d’échelon se calcule en remontant dans le temps à partir du jour de l’engagement à raison de périodes postérieures au 30 juin de l’année durant laquelle neuf années scolaires ont été accomplies ou auraient été accomplies après admission dans le premier degré d’enseignement :

1.      les périodes énumérées au paragraphe 2 sont prises en considération dans leur intégralité ;

2.      les autres périodes [...] »

 La loi portant statut des agents contractuels modifiée

11      Dans le but de remédier à la discrimination fondée sur l’âge constatée dans les arrêts de la Cour du 18 juin 2009, Hütter (C‑88/08, EU:C:2009:381), et du 11 novembre 2014, Schmitzer (C‑530/13, EU:C:2014:2359), la loi portant statut des agents contractuels a été modifiée avec effet rétroactif par la Bundesbesoldungsreform 2015 (loi fédérale de réforme des salaires de 2015, BGBl. I, 32/2015) et par le Besoldungsrechtsanpassungsgesetz (loi portant réforme des salaires), du 6 décembre 2016 (BGBl. I, 104/2016) (ci-après la « loi portant statut des agents contractuels modifiée »).

12      Sous l’intitulé « Classement et avancement », l’article 19 de la loi portant statut des agents contractuels modifiée prévoit, à son paragraphe 1 :

« [...] Le classement et l’avancement ultérieur sont déterminés en fonction de l’ancienneté dans le barème de rémunération. »

13      Aux termes de l’article 26 de la loi portant statut des agents contractuels modifiée, intitulé « Ancienneté dans le barème de rémunération » :

« 1.      L’ancienneté dans le barème de rémunération comprend la durée des périodes d’activité utiles pour l’avancement, augmentée de la durée des périodes d’activité antérieures devant être prises en compte.

2.      L’ancienneté dans le barème de rémunération doit prendre en compte, en tant que périodes d’activité antérieures, les périodes accomplies

1)      dans le cadre d’une relation de travail avec une collectivité territoriale ou une commune d’un État membre de l’Espace économique européen, de la République de Turquie ou de la Confédération suisse ;

2)      dans le cadre d’une relation de travail avec un organe de l’Union européenne ou une organisation intergouvernementale dont la République d’Autriche est membre ;

3)      les périodes pendant lesquelles l’agent contractuel avait droit à une pension d’invalidité au titre du Heeresversorgungsgesetz (loi sur la protection des forces armées) [...], ainsi que

4)      les périodes accomplies :

a)      en service militaire [...]

b)      en service de formation militaire [...]

c)      en service civil [...]

d)      en service militaire obligatoire, en service de formation militaire comparable ou en service civil de substitution dans un État membre de l’Espace économique européen, de la République de Turquie ou de la Confédération suisse.

[...]

3.      Outre les périodes mentionnées au paragraphe 2, peuvent être prises en compte, en tant que périodes d’activité antérieures, les périodes d’exercice d’une activité professionnelle ou d’un stage auprès d’une administration pertinents, jusqu’à concurrence de dix ans au total. [...] »

14      L’article 94 bis de la loi portant statut des agents contractuels modifiée prévoit que, lors du transfert des agents contractuels en service dans le nouveau régime de rémunération et d’avancement, il convient d’appliquer les articles 169 quater, 169 quinquies et 169 sexies du Gehaltsgesetz 1956 (loi sur les salaires de 1956, BGBl. 54/1956), telle que modifiée par la loi fédérale de réforme des salaires de 2015 et par la loi portant réforme des salaires de 2016 (ci-après la « loi relative à la rémunération modifiée »), lesquels concernent le reclassement des fonctionnaires déjà en service dans ce nouveau régime.

15      En application de l’article 100, paragraphe 70, point 3, de la loi portant statut des agents contractuels modifiée, les articles 19 et 26 de cette loi, y compris leurs intitulés, entrent en vigueur dans la version de la loi fédérale de réforme des salaires de 2015, publiée au BGBl. I, 32/2015, « le 1er juillet 1948 ; toutes les versions de ces dispositions publiées avant le 11 février 2015 ne peuvent plus être appliquées dans les procédures en cours ou futures ».

 La loi relative à la rémunération modifiée

16      Aux termes de l’article 169 quater de la loi relative à la rémunération modifiée : 

« (1)      Tous les fonctionnaires des catégories de rémunération et d’emploi visés à l’article 169 quinquies, qui sont en service au 11 février 2015, seront reclassés, conformément aux dispositions suivantes et sur la seule base de leur rémunération antérieure, dans le nouveau régime de rémunération créé par la présente loi fédérale. Lors d’une première étape, les fonctionnaires seront classés, en raison de leur rémunération antérieure, à un échelon du nouveau régime de rémunération dans lequel la rémunération antérieure est maintenue. [...]

(2)      Le transfert du fonctionnaire dans le nouveau régime de rémunération s’effectue par le biais d’une fixation globale de son ancienneté dans le barème de rémunération. Le montant de transfert est déterminant pour la fixation globale. Le montant de transfert correspond à l’intégralité du traitement sans éventuel avancement exceptionnel, tel qu’il a servi à calculer la rémunération du fonctionnaire pour le mois de février 2015 (mois du transfert). [...]

(2 bis)      Le montant à retenir en tant que montant de transfert est celui de l’échelon de salaire qui était effectivement déterminant pour la rémunération versée pour le mois du transfert (classement conformément au bulletin de salaire). Un examen de la régularité de la rémunération est exclu, tant en ce qui concerne son fondement que son montant. Une rectification ultérieure des rémunérations versées n’est à prendre en compte pour le calcul du montant de transfert que pour autant que

1.      cette rectification a pour objet des erreurs factuelles qui se sont produites à l’occasion de l’encodage des données dans un système automatique de traitement de l’information, et

2.      les données introduites par erreur divergent manifestement des données qui devaient être encodées, ainsi que le prouvent les documents déjà existants au moment de l’introduction.

(2 ter)      Lorsque, du point de vue du montant, le classement effectif conformément au bulletin de salaire est inférieur au classement garanti par la loi, il est retenu pour le calcul du montant de transfert, à la demande du fonctionnaire, le classement garanti par la loi, s’il n’est pas possible de procéder selon l’article 169 quinquies, paragraphe 5, en raison de l’existence d’un simple classement provisoire. Le classement garanti par la loi est celui qui correspond à l’échelon de traitement à la date de référence. La date de référence est celle du jour qui résulte de la prise en compte, en remontant dans le temps avant le premier jour du mois de transfert, des périodes suivantes. Il y a lieu de prendre en compte par antéposition :

1.      les périodes comptabilisées définitivement comme périodes d’activité jusqu’à la date du début du mois de transfert, dans la mesure où elles sont postérieures à l’âge de 18 ans et sont devenues utiles pour l’avancement ainsi que

2.      les périodes postérieures au jour de l’engagement, dans la mesure où elles sont devenues utiles pour l’avancement.

La prise en compte d’autres périodes par antéposition est exclue. Pour deux années écoulées depuis la date de référence, il est appliqué comme classement garanti par la loi l’échelon de traitement correspondant immédiatement supérieur. Un échelon de traitement est considéré comme atteint au 1er janvier ou au 1er juillet suivant la fin de la période de deux ans, dans la mesure où l’avancement n’a pas été reporté ou bloqué ce jour-là. Le délai de deux ans est considéré comme expiré respectivement le 1er janvier ou le 1er juillet lorsqu’il prend fin avant l’expiration respectivement du 31 mars ou du 30 septembre suivant.

(2 quater)      Les paragraphes 2 bis et 2 ter transposent en droit autrichien, dans le domaine du statut des employés fédéraux et du personnel enseignant des Länder, les articles 2 et 6 de la [directive 2000/78] tels qu’ils ont été interprétés par la Cour de justice de l’Union européenne dans l’arrêt du 19 juin 2014, Specht e.a. (C‑501/12 à C‑506/12, C‑540/12 et C‑541/12, EU:C:2014:2005). Les modalités de transfert des fonctionnaires nommés avant l’entrée en vigueur de la réforme fédérale des rémunérations de 2015 ont donc été fixées dans le nouveau régime de rémunération et prévoient que, d’une part, l’échelon de traitement auquel ils sont désormais rattachés est déterminé uniquement sur la base du traitement acquis sous l’ancien régime de rémunération, bien que ce régime reposait sur une discrimination en raison de l’âge du fonctionnaire et que, d’autre part, l’avancement ultérieur à un échelon de traitement supérieur est désormais calculé uniquement en fonction de l’expérience professionnelle acquise depuis l’entrée en vigueur de la réforme des rémunérations de 2015.

(3)      L’ancienneté dans le barème de rémunération du fonctionnaire reclassé est fixée sur la base de la période nécessaire pour avancer du premier échelon de salaire (à partir du premier jour) à l’échelon de traitement de la même catégorie d’emploi pour lequel est prévu le traitement inférieur le plus proche du montant de transfert dans la version en vigueur le 12 février 2015. Si le montant de transfert correspond au montant le plus bas d’un échelon de traitement dans la même catégorie d’emploi, cet échelon est alors retenu. Tous les montants à comparer doivent être arrondis à l’unité en euros la plus proche.

(4)      L’ancienneté dans le barème de rémunération fixée au paragraphe 3 est majorée de la durée comprise entre la date du dernier passage à un traitement supérieur et l’expiration du mois de transfert dans la mesure où cette durée est utile pour l’avancement.

[...]

(6)      [...] Si le nouveau traitement du fonctionnaire est inférieur au montant de transfert, une prime de maintien à hauteur de la différence de montant, prise en considération pour le calcul de la pension de retraite, lui est versée en tant que prime complémentaire [...], jusqu’à ce qu’il atteigne un échelon de traitement supérieur au montant de transfert. La comparaison des montants inclut les éventuelles primes d’ancienneté ou les avancements exceptionnels.

[...]

(9)      Afin de préserver les attentes liées au prochain avancement, à l’avancement exceptionnel ou à la prime d’ancienneté dans l’ancien régime de rémunération, une prime de maintien, prise en considération pour le calcul de la pension de retraite, est due au fonctionnaire en tant que prime complémentaire [...], dès qu’il atteint l’échelon transitoire [...]

[...] »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

17      Le litige au principal oppose le Gewerkschaftsbund, syndicat représentant, notamment, les agents contractuels de la fonction publique, à la République d’Autriche, en sa qualité d’employeur.

18      Le Gewerkschaftsbund a formé un recours devant l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême, Autriche), au titre de l’article 54, paragraphe 2, de l’Arbeits- und Sozialgerichtsgesetz (loi sur les juridictions de droit du travail et de droit social), tendant à faire constater que le nouveau régime de rémunération et d’avancement des agents contractuels est contraire au droit de l’Union.

19      À l’appui de son recours, le Gewerkschaftsbund a fait valoir que la discrimination fondée sur l’âge résultant de l’ancien régime de rémunération et d’avancement était maintenue par le nouveau régime, au motif que la rémunération due pour le mois de février 2015 est prise comme point de référence par le nouveau régime pour procéder au reclassement salarial des agents contractuels concernés. Il a ajouté que la suppression rétroactive de la « date de référence aux fins de l’avancement », qui était jusqu’alors applicable à ces agents, privait ces derniers de la faculté de faire contrôler la légalité de ladite rémunération.

20      L’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) se demande, d’une part, si les modalités du transfert des agents contractuels de l’ancien régime de rémunération et d’avancement vers le nouveau régime, notamment en ce qu’il ne prévoit aucune compensation financière pour les agents contractuels défavorisés et que le nouveau régime empêche les agents contractuels reclassés d’obtenir un réexamen de leur date de référence selon les règles de l’ancien régime de rémunération et d’avancement, sont compatibles avec le droit de l’Union.

21      D’autre part, la juridiction de renvoi s’interroge sur la compatibilité avec le droit de l’Union des règles du nouveau régime de rémunération et d’avancement selon lesquelles l’expérience professionnelle antérieure est prise en compte selon des modalités qui diffèrent selon l’employeur auprès duquel elle a été acquise.

22      Cette juridiction fait observer que la loi relative à la rémunération modifiée vise à éviter des baisses importantes du niveau de rémunération des agents contractuels transférés. Ladite juridiction ajoute que cette réforme répond également à un objectif de neutralité en termes de coûts. Par ailleurs, en raison du très grand nombre d’agents contractuels concernés, il n’aurait pas été possible de procéder, dans un bref délai, à un examen individuel de la situation de chacun de ces agents préalable à leur reclassement.

23      L’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) estime qu’une différence importante existe entre la réforme issue de la loi relative à la rémunération modifiée et les régimes de rémunérations que la Cour a examinés dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 19 juin 2014, Specht e.a. (C‑501/12 à C‑506/12, C‑540/12 et C‑541/12, EU:C:2014:2005), ainsi que du 9 septembre 2015, Unland (C‑20/13, EU:C:2015:561). Plus particulièrement, selon cette juridiction, le régime de rémunération et d’avancement en cause dans ces affaires était discriminatoire en raison de l’âge, dès lors que l’âge des employés était pris en compte comme critère de référence. Aucune catégorie d’employés n’aurait été ainsi favorisée. De ce fait, tous les employés en service, ou à tout le moins une grande partie d’entre eux, auraient été affectés par l’ancien régime discriminatoire. En revanche, dans l’affaire au principal, sous l’empire de l’ancien régime de rémunération et d’avancement, une catégorie d’agents contractuels a été défavorisée, à savoir la catégorie des agents contractuels qui ont acquis une expérience avant l’âge de 18 ans.

24      Dans le cadre du nouveau régime de rémunération et d’avancement, ces agents contractuels ne pourraient obtenir un réexamen de la date de référence telle qu’elle résulte de l’application des règles de l’ancien régime de rémunération et d’avancement. Toutefois, ce nouveau régime de rémunération et d’avancement ne les priverait pas du droit d’introduire devant un tribunal un recours effectif aux fins de contrôler la validité d’une norme de ce régime au regard du droit de l’Union et du droit constitutionnel autrichien.

25      C’est dans ces conditions que l’Oberster Gerichtshof (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      a)      Le droit de l’Union, notamment les articles 1er, 2 et 6 de la [directive 2000/78], lus en combinaison avec l’article 21 de la [Charte], doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale qui (en ce qui concerne la prise en compte des périodes d’activité accomplies avant l’âge de 18 ans) remplace un système de rémunération discriminatoire en raison de l’âge par un nouveau système de rémunération, mais qui prévoit le transfert des employés existants dans le nouveau système de rémunération en fixant rétroactivement l’entrée en vigueur du nouveau système de rémunération à la date de l’entrée en vigueur de la loi initiale, tout en déterminant le premier classement dans le nouveau système de rémunération en fonction du salaire effectivement versé, conformément à l’ancien système de rémunération, pour un mois de transfert déterminé (février 2015), de sorte que la discrimination fondée sur l’âge est maintenue dans ses effets financiers ?

b)      En cas de réponse affirmative à la première question, [sous a)] :

Le droit de l’Union, notamment l’article 17 de la [directive 2000/78], doit‑il être interprété en ce sens que les employés existants qui ont été discriminés dans l’ancien système de rémunération en ce qui concerne la prise en compte des périodes d’activité accomplies avant d’avoir atteint l’âge de 18 ans doivent obtenir une compensation financière si cette discrimination sur le fondement de l’âge est maintenue dans ses effets financiers même après le transfert dans le nouveau système de rémunération ?

c)      En cas de réponse négative à la première question, [sous a)] :

Le droit de l’Union, notamment l’article 47 de la [Charte], doit-il être interprété en ce sens que le droit fondamental à un recours effectif qui y est visé s’oppose à une réglementation nationale qui prévoit que l’ancien système de rémunération discriminatoire ne peut plus être appliqué dans les procédures en cours ou futures et que le reclassement salarial des employés existants dans le nouveau régime de rémunération est déterminé uniquement sur la base du salaire devant être calculé et versé pour le mois du transfert ?

2)      Le droit de l’Union, notamment [l’article] 45 TFUE, [l’article] 7, paragraphe 1, du règlement [no 492/2011] et les articles 20 et suivant de la [Charte], doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation qui prévoit que les périodes d’activité accomplies antérieurement par un agent contractuel sont à prendre en compte

–        dans leur intégralité lorsqu’elles ont été effectuées dans le cadre d’une relation de travail avec une collectivité territoriale ou une commune d’un État membre de l’Espace économique européen, de la République de Turquie ou de la Confédération suisse, un organe de l’Union européenne ou une organisation intergouvernementale dont la République d’Autriche est membre, ou avec d’autres entités similaires,

–        à concurrence de dix ans maximum au total lorsqu’elles ont été effectuées dans le cadre d’une relation de travail avec un autre employeur, uniquement lorsque l’activité professionnelle ou le stage auprès d’une administration sont pertinents ? »

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question, sous a)

26      Par sa première question, sous a), la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, entrant en vigueur de manière rétroactive, qui, en vue de mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge, prévoit un transfert des agents contractuels en service vers un nouveau régime de rémunération et d’avancement dans le cadre duquel le premier classement de ces agents contractuels est déterminé en fonction de leur dernière rémunération perçue au titre du régime antérieur.

27      Il convient, dans un premier temps, de rechercher si la réglementation nationale considérée institue une différence de traitement au sens de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

28      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de cette disposition, le « principe de l’égalité de traitement » est entendu comme étant l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur l’un des motifs visés à l’article 1er de cette directive. L’article 2, paragraphe 2, sous a), de celle-ci précise que, aux fins de son paragraphe 1, une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er de ladite directive.

29      Dans l’affaire au principal, les catégories de personnes pertinentes aux fins de cette comparaison sont, d’une part, les agents contractuels en service au moment du transfert dont l’expérience professionnelle a été, ne serait-ce qu’en partie, acquise avant l’âge de 18 ans (ci-après les « agents contractuels défavorisés par l’ancien régime ») et, d’autre part, ceux qui ont obtenu, après avoir atteint cet âge, une expérience de même nature et d’une durée comparable (ci-après les « agents contractuels favorisés par l’ancien régime »).

30      Il ressort du dossier dont dispose la Cour que le législateur autrichien a, par l’adoption de l’article 169 quater de la loi relative à la rémunération modifiée, introduit un mécanisme de reclassement effectué en fonction d’un « montant de transfert » calculé selon les règles du régime antérieur. Plus particulièrement, ce « montant de transfert », qui, aux termes de l’article 169 quater, paragraphe 2, de cette loi, est déterminant pour la fixation globale de l’ancienneté des agents contractuels transférés dans le barème de rémunération, est calculé sur la base de la rémunération versée à ces agents le mois précédant leur transfert dans le nouveau régime.

31      Or, il ressort du dossier dont la Cour dispose que l’ancien régime de rémunération et d’avancement présente des caractéristiques analogues à celles du régime en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 11 novembre 2014, Schmitzer (C‑530/13, EU:C:2014:2359).

32      À cet égard, la Cour a dit pour droit, dans cet arrêt, qu’une réglementation nationale qui, pour mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge à l’égard des fonctionnaires, prend en compte des périodes de formation et de service accomplies antérieurement à l’âge de 18 ans, mais qui, simultanément, introduit à l’égard des seuls fonctionnaires victimes de cette discrimination, un allongement de trois ans de la durée nécessaire pour pouvoir passer du premier au deuxième échelon de chaque catégorie d’emploi et de chaque catégorie salariale maintient une discrimination directe fondée sur l’âge, au sens de l’article 2, paragraphe 1, et paragraphe 2, sous a), et de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

33      Par ailleurs, il convient de relever qu’il ressort des termes mêmes employés à l’article 169 quater, paragraphe 2 quater, de la loi relative à la rémunération modifiée que l’ancien régime de rémunération et d’avancement reposait sur une discrimination fondée sur l’âge des agents contractuels.

34      Dans ces conditions, un mécanisme de reclassement tel que celui instauré par la loi relative à la rémunération modifiée, exposé au point 30 du présent arrêt, est susceptible de maintenir les effets produits par l’ancien régime de rémunération et d’avancement, en raison du lien qu’il établit entre le dernier salaire perçu en application de ce régime et le classement dans le nouveau régime de rémunération et d’avancement.

35      Il convient, dès lors, de considérer que l’article 169 quater de la loi relative à la rémunération modifiée maintient une différence de traitement entre les agents contractuels défavorisés par l’ancien régime et les agents contractuels favorisés par ce régime, dès lors que le montant de la rémunération qui sera perçu par les premiers sera inférieur à celui qui sera versé aux seconds uniquement en raison de l’âge qu’ils avaient à la date de leur recrutement, alors qu’ils se trouvent dans des situations comparables (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2015, Unland, C‑20/13, EU:C:2015:561, point 40).

36      Il y a lieu, dans un second temps, d’examiner si cette différence de traitement fondée sur l’âge est susceptible d’être justifiée au regard de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78.

37      L’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 2000/78 précise que les États membres peuvent prévoir que les différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par des objectifs légitimes, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens destinés à atteindre ces objectifs sont appropriés et nécessaires.

38      La Cour a itérativement jugé que les États membres disposent d’une large marge d’appréciation dans le choix non seulement de la poursuite d’un objectif déterminé parmi d’autres en matière de politique sociale et de l’emploi, mais également dans la définition des mesures susceptibles de le réaliser (arrêt du 28 janvier 2015, Starjakob, C‑417/13, EU:C:2015:38, point 34 et jurisprudence citée).

39      Dans ce contexte, la juridiction de renvoi fait observer que la réglementation en cause au principal est, avant tout, destinée à établir un régime de rémunération et d’avancement non discriminatoire. Cette juridiction précise que ladite réglementation poursuit des objectifs de neutralité financière, d’économie administrative, de respect des droits acquis et de protection de la confiance légitime.

40      En ce qui concerne, d’une part, l’objectif de neutralité financière de la réglementation nationale en cause au principal, il convient de rappeler que le droit de l’Union ne s’oppose pas à ce que les États membres tiennent compte de considérations budgétaires parallèlement à des considérations d’ordre politique, social ou démographique, pour autant que, ce faisant, ils respectent, en particulier, le principe général de l’interdiction des discriminations fondées sur l’âge. À cet égard, si des considérations d’ordre budgétaire peuvent être à la base des choix de politique sociale d’un État membre et influencer la nature ou l’étendue des mesures qu’il souhaite adopter, de telles considérations ne peuvent constituer à elles seules un objectif légitime, au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78. Il en va de même en ce qui concerne les considérations d’ordre administratif mentionnées par la juridiction de renvoi et le gouvernement autrichien (voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 2015, Starjakob, C‑417/13, EU:C:2015:38, point 36).

41      S’agissant, d’autre part, du respect des droits acquis et de la protection de la confiance légitime des agents contractuels favorisés par l’ancien régime en ce qui concerne leur rémunération, il y a lieu de relever qu’ils constituent des objectifs légitimes de politique de l’emploi et du marché du travail pouvant justifier, pendant une période transitoire, le maintien des rémunérations antérieures et, par voie de conséquence, celui d’une différence de traitement fondée sur l’âge (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 2014, Schmitzer C‑530/13, EU:C:2014:2359, point 42).

42      Ces objectifs ne sauraient toutefois justifier une mesure qui maintient définitivement, ne serait-ce qu’à l’égard de certaines personnes, la différence de traitement fondée sur l’âge que la réforme dans laquelle cette mesure s’insère vise à éliminer. Une telle mesure n’est pas apte à établir un régime non discriminatoire pour la catégorie des personnes défavorisées (voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 2015, Starjakob, C‑417/13, EU:C:2015:38, point 39 et jurisprudence citée).

43      En l’occurrence, l’article 169 quater de la loi relative à la rémunération modifiée prévoit différents mécanismes afin d’éviter une diminution significative de la rémunération des agents contractuels reclassés. Figure au nombre de ces mécanismes le versement d’une prime de maintien à hauteur de la différence entre le montant du nouveau salaire perçu par l’agent contractuel transféré et le montant de transfert. Cette prime de maintien est octroyée en raison du fait que, à la suite de son transfert, l’agent contractuel est rattaché à un échelon salarial du nouveau régime de rémunération et d’avancement auquel correspond un niveau de salaire immédiatement inférieur à celui qu’il percevait en dernier lieu en application de l’ancien régime. Figure également au nombre desdits mécanismes la majoration de 6 à 18 mois de l’ancienneté dans le barème de rémunération de l’agent contractuel transféré.

44      Or, ainsi que l’a précisé le gouvernement autrichien lors de l’audience, tous ces mécanismes s’appliquent, sans distinction, à l’ensemble des agents contractuels qui ont été transférés de façon globale vers le nouveau régime de rémunération et d’avancement, que ceux-ci aient été défavorisés ou non par l’ancien régime de rémunération et d’avancement.

45      Dans ces conditions, il convient de considérer que, à la différence des affaires ayant donné lieu aux arrêts du 19 juin 2014, Specht e.a. (C‑501/12 à C‑506/12, C‑540/12 et C‑541/12, EU:C:2014:2005), ainsi que du 9 septembre 2015, Unland (C‑20/13, EU:C:2015:561), dans lesquelles l’écart de rémunération entre les deux catégories d’agents en cause dans ces affaires s’est atténué, voire, dans certains cas, a progressivement disparu, il ne ressort pas du dossier soumis à la Cour dans la présente affaire que les mécanismes prévus par la réglementation en cause au principal permettent une convergence progressive du traitement réservé aux agents contractuels défavorisés par l’ancien régime vers le traitement accordé aux agents contractuels favorisés, de telle sorte que les premiers bénéficieraient à moyen terme, voire à court terme, d’un rattrapage des avantages octroyés aux seconds. Lesdits mécanismes n’ont, par conséquent, pas pour effet d’atténuer, à l’issue d’une période déterminée, l’écart de rémunération qui existe entre les agents contractuels favorisés et les agents contractuels défavorisés.

46      Ainsi, la réglementation en cause au principal n’est pas apte à établir un régime non discriminatoire pour les agents contractuels défavorisés par l’ancien régime de rémunération et d’avancement. Au contraire, elle maintient à leur égard la discrimination fondée sur l’âge résultant du régime antérieur.

47      Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient de répondre à la première question, sous a), que les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78, lus en combinaison avec l’article 21 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, entrant en vigueur de manière rétroactive, qui, en vue de mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge, prévoit un transfert des agents contractuels en service vers un nouveau régime de rémunération et d’avancement dans le cadre duquel le premier classement de ces agents contractuels est déterminé en fonction de leur dernière rémunération perçue au titre du régime antérieur.

 Sur la première question, sous b)

48      La première question, sous b), de la juridiction de renvoi vise l’article 17 de la directive 2000/78.

49      Il importe de rappeler que, aux termes de l’article 17 de la directive 2000/78, les États membres déterminent le régime des sanctions applicables aux violations des dispositions nationales adoptées en application de cette directive et prennent toute mesure nécessaire pour assurer la mise en œuvre de celles-ci. Les sanctions ainsi prévues, qui peuvent comprendre le versement d’indemnités à la victime, doivent être effectives, proportionnées et dissuasives.

50      Il ressort de la jurisprudence de la Cour que cet article a pour objet d’imposer aux États membres de prévoir un régime de sanctions pour toutes violations des dispositions nationales adoptées aux fins de la transposition de cette directive (voir, en ce sens, arrêt du 25 avril 2013, Asociația Accept, C‑81/12, EU:C:2013:275, point 61).

51      Or, dans l’affaire au principal, il ne ressort pas du dossier dont dispose la Cour que sont en cause des violations des dispositions nationales adoptées aux fins de la transposition de ladite directive.

52      L’interprétation de l’article 17 de la directive 2000/78 n’est donc pas nécessaire aux fins de la solution du litige au principal.

53      Conformément à la faculté reconnue par une jurisprudence constante de la Cour, et notamment par l’arrêt du 21 septembre 2017, Beshkov (C‑171/16, EU:C:2017:710, point 33 et jurisprudence citée), il convient de reformuler la première question, sous b), comme visant en substance à savoir si le droit de l’Union doit être interprété en ce sens que, dès lors qu’une discrimination, contraire au droit de l’Union, a été constatée et aussi longtemps que des mesures rétablissant l’égalité de traitement n’ont pas été adoptées, le rétablissement de l’égalité de traitement, dans un cas tel que celui en cause au principal, implique l’octroi aux agents contractuels défavorisés par l’ancien régime de rémunération et d’avancement des mêmes avantages que ceux dont ont pu bénéficier les agents contractuels favorisés par ce régime, en ce qui concerne tant la prise en compte de périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans que l’avancement dans l’échelle des rémunérations et, par voie de conséquence, l’octroi d’une compensation financière aux agents contractuels discriminés.

54      À cet égard, il y a lieu de relever que, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, il appartient aux juridictions nationales, en tenant compte de l’ensemble des règles du droit national et en application des méthodes d’interprétation reconnues par celui-ci, de décider si et dans quelle mesure une disposition nationale est susceptible d’être interprétée en conformité avec la directive 2000/78 sans procéder à une interprétation contra legem de cette disposition nationale (arrêt du 22 janvier 2019, Cresco Investigation, C‑193/17, EU:C:2019:43, point 74).

55      À défaut de pouvoir procéder à une interprétation et à une application de la réglementation nationale conforme aux exigences de cette directive, il convient de rappeler que, en vertu du principe de primauté du droit de l’Union, dont bénéficie également le principe de non-discrimination en fonction de l’âge, une réglementation nationale contraire qui entre dans le champ d’application du droit de l’Union doit être laissée inappliquée (arrêt du 19 juin 2014, Specht e.a., C‑501/12 à C‑506/12, C‑540/12 et C‑541/12, EU:C:2014:2005, point 89).

56      Il est également de jurisprudence constante de la Cour que, dès lors qu’une discrimination, contraire au droit de l’Union, a été constatée et aussi longtemps que des mesures rétablissant l’égalité de traitement n’ont pas été adoptées, le respect du principe d’égalité ne saurait être assuré que par l’octroi aux personnes de la catégorie défavorisée des mêmes avantages que ceux dont bénéficient les personnes de la catégorie privilégiée. Les personnes défavorisées doivent ainsi être placées dans la même situation que les personnes bénéficiant de l’avantage concerné (voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2019, Cresco Investigation, C‑193/17, EU:C:2019:43, point 79 et jurisprudence citée).

57      Dans cette hypothèse, le juge national est tenu d’écarter toute disposition nationale discriminatoire, sans qu’il ait à demander ou à attendre l’élimination préalable de celle-ci par le législateur, et d’appliquer à la catégorie des personnes qui sont défavorisées le même régime que celui dont bénéficient les personnes de l’autre catégorie. Cette obligation lui incombe indépendamment de l’existence, en droit interne, de dispositions lui conférant la compétence pour le faire (arrêt du 22 janvier 2019, Cresco Investigation, C‑193/17, EU:C:2019:43, point 80 et jurisprudence citée).

58      Toutefois, une telle solution n’a vocation à s’appliquer qu’en présence d’un système de référence valable (arrêt du 22 janvier 2019, Cresco Investigation, C‑193/17, EU:C:2019:43, point 81 et jurisprudence citée).

59      En l’occurrence, d’une part, ainsi qu’il ressort de la réponse à la première question, sous a), et plus particulièrement des points 32 et 33 du présent arrêt, les règles de l’ancien régime de rémunération et d’avancement instauraient une discrimination directe fondée sur l’âge, au sens de la directive 2000/78.

60      D’autre part, les règles de rémunération et d’avancement applicables aux agents contractuels favorisés sont celles qui permettraient aux agents contractuels défavorisés d’avancer dans les échelons sans aucune discrimination.

61      Dès lors, aussi longtemps que des mesures rétablissant l’égalité de traitement n’ont pas été adoptées, le rétablissement de celle-ci, dans un cas tel que celui en cause au principal, implique l’octroi aux agents contractuels défavorisés par l’ancien régime de rémunération et d’avancement des mêmes avantages que ceux dont ont pu bénéficier les agents contractuels favorisés par ce régime, en ce qui concerne tant la prise en compte de périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans que l’avancement dans l’échelle des rémunérations (voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 2015, Starjakob, C‑417/13, EU:C:2015:38, point 48).

62      Il s’ensuit également qu’un agent contractuel défavorisé par l’ancien régime de rémunération et d’avancement est en droit d’obtenir le versement, par son employeur, d’une compensation à hauteur de la différence entre le montant de la rémunération que l’agent contractuel concerné aurait dû percevoir s’il n’avait pas été traité de manière discriminatoire et la rémunération qu’il a effectivement perçue.

63      Il importe de rappeler que les considérations figurant aux points 61 et 62 du présent arrêt ne valent qu’aussi longtemps que des mesures rétablissant l’égalité de traitement n’ont pas été adoptées par le législateur national (voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2019, Cresco Investigation, C‑193/17, EU:C:2019:43, point 87).

64      En effet, il y a lieu de considérer que, si les États membres, conformément à l’article 16 de la directive 2000/78, ont l’obligation de supprimer les dispositions législatives, réglementaires et administratives contraires au principe d’égalité de traitement, cet article ne leur impose toutefois pas d’adopter des mesures déterminées en cas de violation de l’interdiction de discrimination, mais leur laisse la liberté de choisir, parmi les différentes solutions propres à réaliser l’objectif qu’il vise, celle qui leur paraît la mieux adaptée à cet effet, en fonction des situations qui peuvent se présenter (arrêt du 22 janvier 2019, Cresco Investigation, C‑193/17, EU:C:2019:43, point 88).

65      Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question, sous b), que, dans l’hypothèse où des dispositions nationales ne peuvent être interprétées d’une manière qui soit conforme à la directive 2000/78, la juridiction nationale est tenue d’assurer, dans le cadre de ses compétences, la protection juridique découlant pour les justiciables de cette directive et de garantir le plein effet de celle-ci, en laissant au besoin inappliquée toute disposition nationale contraire. Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens que, dès lors qu’une discrimination, contraire au droit de l’Union, a été constatée et aussi longtemps que des mesures rétablissant l’égalité de traitement n’ont pas été adoptées, le rétablissement de l’égalité de traitement, dans un cas tel que celui en cause au principal, implique l’octroi aux agents contractuels défavorisés par l’ancien régime de rémunération et d’avancement des mêmes avantages que ceux dont ont pu bénéficier les agents contractuels favorisés par ce régime, en ce qui concerne tant la prise en compte de périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans que l’avancement dans l’échelle des rémunérations et, par voie de conséquence, l’octroi d’une compensation financière aux agents contractuels discriminés à hauteur de la différence entre le montant de la rémunération que l’agent contractuel concerné aurait dû percevoir s’il n’avait pas été traité de manière discriminatoire et le montant de la rémunération qu’il a effectivement perçue.

 Sur la première question, sous c)

66      Compte tenu de la réponse apportée à la première question, sous a), il n’y a pas lieu de répondre à la première question, sous c).

 Sur la seconde question

67      Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 45 TFUE et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 492/2011 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, pour déterminer l’ancienneté d’un agent contractuel dans le barème de rémunération, sont prises en compte dans leur intégralité les périodes d’activité antérieures accomplies dans le cadre d’une relation de travail avec une collectivité territoriale ou une commune d’un État membre de l’Espace économique européen, de la République de Turquie ou de la Confédération suisse, un organe de l’Union ou encore avec une organisation intergouvernementale dont la République d’Autriche est membre, ou avec d’autres entités similaires, tandis que toute autre période d’activité antérieure n’est prise en compte qu’à concurrence de dix ans et dans la mesure où elle est pertinente.

68      À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 45, paragraphe 2, TFUE prévoit que la libre circulation des travailleurs implique l’abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l’emploi, la rémunération et les autres conditions de travail.

69      La Cour a jugé que l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 492/2011 ne constitue que l’expression particulière du principe de non‑discrimination consacré à l’article 45, paragraphe 2, TFUE dans le domaine spécifique des conditions d’emploi ainsi que de travail, et doit, dès lors, être interprété de la même façon que ce dernier article (arrêt du 5 décembre 2013, Zentralbetriebsrat der gemeinnützigen Salzburger Landeskliniken, C‑514/12, EU:C:2013:799, point 23).

70      Dans ce contexte, il convient de souligner que le principe d’égalité de traitement inscrit tant à l’article 45 TFUE qu’à l’article 7 du règlement no 492/2011 prohibe non seulement les discriminations directes, fondées sur la nationalité, mais encore toutes formes indirectes de discrimination qui, par l’application d’autres critères de distinction, aboutissent en fait au même résultat (arrêt du 2 mars 2017, Eschenbrenner, C‑496/15, EU:C:2017:152, point 35).

71      Ainsi, une disposition de droit national, bien qu’indistinctement applicable selon la nationalité, doit être considérée comme indirectement discriminatoire dès lors qu’elle est susceptible, par sa nature même, d’affecter davantage les travailleurs migrants que les travailleurs nationaux et qu’elle risque, par conséquent, de défavoriser plus particulièrement les premiers, à moins qu’elle ne soit objectivement justifiée et proportionnée à l’objectif poursuivi (arrêt du 2 mars 2017, Eschenbrenner, C‑496/15, EU:C:2017:152, point 36).

72      En l’occurrence, d’une part, il est manifeste que la réglementation en cause au principal s’applique aux agents contractuels sans distinction fondée sur leur nationalité.

73      Partant, il n’apparaît pas qu’une réglementation telle que celle en cause au principal instaure de différence de traitement directement fondée sur la nationalité, au sens de l’article 45 TFUE et de l’article 7 du règlement no 492/2011.

74      D’autre part, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 91 de ses conclusions, le critère sur le fondement duquel s’opère la différence de traitement est celui de savoir si l’agent contractuel concerné a exercé les activités dont il demande la prise en compte, auprès des employeurs énumérés à l’article 26, paragraphe 2, de la loi portant statut des agents contractuels modifiée ou auprès de ceux visés au paragraphe 3 de cet article, quel que soit l’État membre sur le territoire duquel il les a exercées.

75      Or, un tel critère n’apparaît pas susceptible d’affecter davantage les travailleurs d’autres États membres que les travailleurs autrichiens.

76      Toutefois, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, des dispositions nationales qui empêchent ou dissuadent un travailleur ressortissant d’un État membre de quitter son État d’origine pour exercer son droit à la libre circulation constituent des entraves à cette liberté, même si elles s’appliquent indépendamment de la nationalité des travailleurs concernés (arrêt du 5 décembre 2013, Zentralbetriebsrat der gemeinnützigen Salzburger Landeskliniken, C‑514/12, EU:C:2013:799, point 30).

77      Il convient d’ajouter à cet égard que l’ensemble des dispositions du traité FUE relatives à la libre circulation des personnes, ainsi que celles du règlement no 492/2011 visent à faciliter, pour les ressortissants des États membres, l’exercice d’activités professionnelles de toute nature sur le territoire de l’Union et s’opposent aux mesures qui pourraient défavoriser ces ressortissants lorsqu’ils souhaitent exercer une activité salariée sur le territoire d’un autre État membre (arrêt du 5 décembre 2013, Zentralbetriebsrat der gemeinnützigen Salzburger Landeskliniken, C‑514/12, EU:C:2013:799, point 32).

78      Dans l’affaire au principal, la prise en compte des périodes d’activité pertinentes antérieures accomplies auprès d’employeurs autres que ceux énumérés à l’article 26, paragraphe 2, de la loi portant statut des agents contractuels modifiée est limitée à dix ans.

79      Ainsi, les personnes qui ont une expérience professionnelle de plus de dix ans auprès de ces autres employeurs seront dissuadées de postuler à un poste d’agent contractuel autrichien en raison de l’échelon salarial inférieur dans lequel elles seront classées, dès lors que les périodes d’activité pertinentes qu’elles ont acquises auprès de tels employeurs ne seront pas entièrement prises en compte lors de la détermination de leur ancienneté dans le barème de rémunération.

80      En effet, un travailleur migrant qui aurait acquis une expérience professionnelle pertinente de plus de dix ans auprès d’un employeur autre que ceux énumérés à l’article 26, paragraphe 2, de la loi portant statut des agents contractuels modifiée sera classé au même échelon de rémunération que celui dans lequel sera classé un travailleur qui aura acquis une expérience de même nature, mais d’une durée inférieure ou égale à dix ans.

81      De plus, un travailleur migrant qui a une expérience professionnelle de dix ans qui peut être prise en compte au sens de l’article 26, paragraphe 3, de la loi portant statut des agents contractuels modifiée peut se voir contraint de chercher un emploi auprès des employeurs énumérés à l’article 26, paragraphe 2, de cette loi afin d’acquérir une expérience professionnelle pertinente qui lui permettrait de ne pas perdre la possibilité de commencer à travailler en tant qu’agent contractuel autrichien.

82      Il s’ensuit que, en excluant la prise en compte de l’intégralité des périodes d’activité pertinentes accomplies par un travailleur migrant auprès d’un employeur autre que ceux énumérés à l’article 26, paragraphe 2, de la loi portant statut des agents contractuels modifiée, la réglementation nationale en cause au principal est susceptible de dissuader les travailleurs migrants qui ont acquis ou sont en train d’acquérir une expérience professionnelle pertinente auprès d’autres employeurs d’exercer leur droit à la libre circulation.

83      Une réglementation nationale telle que celle en cause au principal est, par conséquent, susceptible de rendre moins attrayante la libre circulation des travailleurs, en violation de l’article 45 TFUE et de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 492/2011.

84      Une telle mesure ne peut être admise que si elle poursuit l’un des objectifs légitimes énoncés dans le traité FUE ou est justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général. Encore faut-il, en pareil cas, que son application soit propre à garantir la réalisation de l’objectif en cause et n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif (voir en ce sens, notamment, arrêt du 5 décembre 2013, Zentralbetriebsrat der gemeinnützigen Salzburger Landeskliniken, C‑514/12, EU:C:2013:799, point 36).

85      À cet égard, le gouvernement autrichien fait observer que, d’une part, la Cour a déjà admis que le fait de récompenser l’expérience acquise dans le domaine concerné, laquelle met le travailleur en mesure de mieux s’acquitter des tâches qui lui sont confiées, constitue un but légitime de politique salariale, les employeurs pouvant, par voie de conséquence, tenir compte uniquement de cette expérience acquise lorsqu’ils fixent une rémunération. D’autre part, la réglementation en cause au principal viserait à récompenser la fidélité des agents contractuels.

86      S’agissant du premier motif avancé à titre de justification par le gouvernement autrichien, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, le fait de récompenser l’expérience acquise dans le domaine concerné, qui met le travailleur en mesure de mieux s’acquitter des tâches qui lui sont confiées, constitue un but légitime de politique salariale (arrêt du 14 mars 2018, Stollwitzer, C‑482/16, EU:C:2018:180, point 39).

87      Or, une telle expérience doit être prise en compte pour le classement et le calcul de la rémunération d’un agent contractuel dans son intégralité.

88      Ainsi, une mesure nationale, telle que celle en cause au principal, qui prend en compte de manière limitée l’expérience pertinente ne saurait être considérée comme visant à valoriser entièrement cette expérience et, par conséquent, n’est pas apte à garantir la réalisation de cet objectif.

89      En ce qui concerne le second motif avancé à titre de justification par le gouvernement autrichien, il convient de relever que, à supposer même que la réglementation en cause au principal poursuive effectivement l’objectif de fidélisation des travailleurs envers leurs employeurs, si un tel objectif peut constituer une raison impérieuse d’intérêt général (arrêt du 5 décembre 2013, Zentralbetriebsrat der gemeinnützigen Salzburger Landeskliniken, C‑514/12, EU:C:2013:799, point 38), il convient de constater que, eu égard aux caractéristiques de ladite réglementation, l’entrave qu’elle comporte n’apparaît pas apte à garantir la réalisation de cet objectif.

90      En effet, il y a lieu de considérer que, compte tenu de la multiplicité d’employeurs visés par l’article 26, paragraphe 2, de la loi portant statut des agents contractuels modifiée, le nouveau régime de rémunération et d’avancement est destiné à permettre une mobilité maximale au sein d’un groupe d’employeurs juridiquement distincts et non pas à récompenser la fidélité d’un salarié envers un employeur déterminé (voir, par analogie, arrêt du 30 novembre 2000, Österreichischer Gewerkschaftsbund, C‑195/98, EU:C:2000:655, point 49).

91      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que cette limitation temporelle n’est pas justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général telles que celles rappelées aux points 86 et 89 du présent arrêt.

92      Eu égard à ces considérations, il y a lieu de répondre à la seconde question que l’article 45 TFUE et l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 492/2011 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, pour déterminer l’ancienneté d’un agent contractuel dans le barème de rémunération, sont prises en compte dans leur intégralité les périodes d’activité antérieures accomplies dans le cadre d’une relation de travail avec une collectivité territoriale ou une commune d’un État membre de l’Espace économique européen, de la République de Turquie ou de la Confédération suisse, un organe de l’Union ou encore avec une organisation intergouvernementale dont la République d’Autriche est membre, ou avec d’autres entités similaires, tandis que toute autre période d’activité antérieure n’est prise en compte qu’à concurrence de dix ans et dans la mesure où elle est pertinente.

 Sur les dépens

93      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

1)      Les articles 1er, 2 et 6 de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, lus en combinaison avec l’article 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, entrant en vigueur de manière rétroactive, qui, en vue de mettre fin à une discrimination fondée sur l’âge, prévoit un transfert des agents contractuels en service vers un nouveau régime de rémunération et d’avancement dans le cadre duquel le premier classement de ces agents contractuels est déterminé en fonction de leur dernière rémunération perçue au titre du régime antérieur.

2)      Dans l’hypothèse où des dispositions nationales ne peuvent être interprétées d’une manière qui soit conforme à la directive 2000/78, la juridiction nationale est tenue d’assurer, dans le cadre de ses compétences, la protection juridique découlant pour les justiciables de cette directive et de garantir le plein effet de celle-ci, en laissant au besoin inappliquée toute disposition nationale contraire. Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens que, dès lors qu’une discrimination, contraire au droit de l’Union, a été constatée et aussi longtemps que des mesures rétablissant l’égalité de traitement n’ont pas été adoptées, le rétablissement de l’égalité de traitement, dans un cas tel que celui en cause au principal, implique l’octroi aux agents contractuels défavorisés par l’ancien régime de rémunération et d’avancement des mêmes avantages que ceux dont ont pu bénéficier les agents contractuels favorisés par ce régime, en ce qui concerne tant la prise en compte de périodes de service accomplies avant l’âge de 18 ans que l’avancement dans l’échelle des rémunérations et, par voie de conséquence, l’octroi d’une compensation financière aux agents contractuels discriminés à hauteur de la différence entre le montant de la rémunération que l’agent contractuel concerné aurait dû percevoir s’il n’avait pas été traité de manière discriminatoire et le montant de la rémunération qu’il a effectivement perçue.

3)      L’article 45 TFUE et l’article 7, paragraphe 1, du règlement (UE) no 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, pour déterminer l’ancienneté d’un agent contractuel dans le barème de rémunération, sont prises en compte dans leur intégralité les périodes d’activité antérieures accomplies dans le cadre d’une relation de travail avec une collectivité territoriale ou une commune d’un État membre de l’Espace économique européen, de la République de Turquie ou de la Confédération suisse, un organe de l’Union européenne ou encore avec une organisation intergouvernementale dont la République d’Autriche est membre, ou avec d’autres entités similaires, tandis que toute autre période d’activité antérieure n’est prise en compte qu’à concurrence de dix ans et dans la mesure où elle est pertinente.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.