Language of document : ECLI:EU:F:2007:208

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (première chambre)

27 novembre 2007 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Sécurité sociale – Régime commun d’assurance maladie – Partenariat – Article 72 du statut – Article 1er de l’annexe VII du statut – Article 12 de la réglementation relative à la couverture des risques de maladie »

Dans l’affaire F‑122/06,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Anton Pieter Roodhuijzen, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Luxembourg, représenté par Me É. Boigelot, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. J. Currall et D. Martin, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. H. Kreppel, président, H. Tagaras (rapporteur) et S. Gervasoni, juges,

greffier : M. S. Boni, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 12 juin 2007,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 octobre 2006, M. Roodhuijzen, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demande au Tribunal d’annuler la décision de la Commission du 28 février 2006, confirmée le 20 mars 2006, refusant de reconnaître son partenariat avec Mme Maria Helena Astrid Hart et, par voie de conséquence, refusant à celle-ci le bénéfice du régime commun d’assurance maladie des Communautés européennes (ci-après le « RCAM »), ainsi que la décision de rejet de la réclamation, arrêtée par l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») le 12 juillet 2006.

 Cadre juridique

2        L’article 72, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») énonce :

« Dans la limite de 80 % des frais exposés, et sur la base d’une réglementation établie d’un commun accord par les institutions des Communautés après avis du comité du statut, le fonctionnaire, son conjoint, lorsque celui-ci ne peut pas bénéficier de prestations de même nature et de même niveau en application de toutes autres dispositions légales ou réglementaires, ses enfants et les autres personnes à sa charge au sens de l’article 2 de l’annexe VII, sont couverts contre les risques de maladie. Ce taux est relevé à 85 % pour les prestations suivantes : consultations et visites, interventions chirurgicales, hospitalisation, produits pharmaceutiques, radiologie, analyses, examen de laboratoire et prothèses sur prescription médicale à l’exception des prothèses dentaires. Il est porté à 100 % en cas de tuberculose, poliomyélite, cancer, maladie mentale et autres maladies reconnues de gravité comparable par l’[AIPN], ainsi que pour les examens de dépistage et en cas d’accouchement. Toutefois, les remboursements prévus à 100 % ne s’appliquent pas en cas de maladie professionnelle ou d’accident ayant entraîné l’application de l’article 73.

Le partenaire non marié d’un fonctionnaire est considéré comme son conjoint au titre du régime d’assurance maladie si les trois premières conditions prévues à l’article 1er, paragraphe 2, [sous] c), de l’annexe VII sont remplies.

[…] »

3        L’article 1er, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut dispose :

« A droit à l’allocation de foyer :

a)      le fonctionnaire marié ;

b)      le fonctionnaire veuf, divorcé, séparé légalement ou célibataire, ayant un ou plusieurs enfants à charge au sens de l’article 2, paragraphes 2 et 3 ;

c)      le fonctionnaire enregistré comme partenaire stable non matrimonial, à condition que :

i)      le couple fournisse un document officiel reconnu comme tel par un État membre ou par toute autorité compétente d’un État membre, attestant leur statut de partenaires non matrimoniaux,

ii)      aucun des partenaires ne soit marié ni ne soit engagé dans un autre partenariat non matrimonial,

iii)      les partenaires n’aient pas l’un des liens de parenté suivants : parents, parents et enfants, grands-parents et petits-enfants, frères et sœurs, tantes, oncles, neveux, nièces, gendres et belles-filles,

iv)      le couple n’ait pas accès au mariage civil dans un État membre ; un couple est considéré comme ayant accès au mariage civil aux fins du présent point uniquement dans les cas où les membres du couple remplissent l’ensemble des conditions fixées par la législation d’un État membre autorisant le mariage d’un tel couple ;

[…] »

4        L’article 12 de la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après la « réglementation commune ») est rédigé comme suit :

« Sont assurés du chef de l’affilié, suivant les conditions fixées aux articles 13 et 14 :

–        le conjoint de l’affilié, pour autant qu’il ne soit pas lui-même affilié au présent régime,

–        le partenaire reconnu de l’affilié même si la condition prévue à l’article 1er, paragraphe 2, [sous] c), dernier tiret, de l’annexe VII du [s]tatut n’est pas remplie,

–        le conjoint ou le partenaire reconnu, en situation de congé de convenance personnelle telle que prévue au [s]tatut. »

5        Aux Pays-Bas, ainsi qu’il ressort de la brochure que la Commission a annexée à son mémoire en défense et qui, selon elle, provient de l’administration néerlandaise, le droit national prévoit, à côté du mariage traditionnel, deux formes d’union, qui sont le partenariat enregistré (« geregistreerd partnerschap ») et la convention de vie commune (« samenlevingsovereenkomst »). Si le premier entraîne des conséquences légales, patrimoniales et extrapatrimoniales, similaires, dans une large mesure, à celles créées par les liens du mariage, la seconde forme d’union, au contraire, résulte de l’autonomie de la volonté des parties et n’engendre entre ces dernières, principalement, que les conséquences découlant des droits et obligations prévus par elles dans la convention.

 Faits à l’origine du litige

6        Le requérant, de nationalité néerlandaise, est fonctionnaire à Eurostat depuis le 15 février 2006. Le 20 février suivant, il a demandé à ce que son partenariat avec Mme Maria Helena Astrid Hart, régi par une convention de vie commune (« samenlevingsovereenkomst ») établie aux Pays-Bas devant notaire, le 29 décembre 2005, soit reconnu par la Commission afin de faire bénéficier sa partenaire du RCAM.

7        Par note du 28 février 2006, l’Office de gestion et de liquidation des droits individuels (PMO) a rejeté sa demande au motif que la convention de vie commune, contractée par le requérant et sa partenaire, ne peut être considérée comme un partenariat reconnu par la législation néerlandaise (loi sur le « geregistreerd partnerschap », entrée en vigueur le 1er janvier 1998), tel que cela serait requis par l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut.

8        Le 13 mars 2006, le requérant a contesté le rejet de sa demande et a fourni un certificat de l’ambassade des Pays-Bas au Luxembourg, aux termes duquel le « samenlevingsovereenkomst » signé en présence d’un notaire entre le requérant et sa partenaire était reconnu par les Pays-Bas et confirmait par conséquent leur statut de partenaires non matrimoniaux.

9        Cependant, par note du 20 mars 2006, la Commission a confirmé sa décision du 28 février 2006. Elle a considéré que si la convention de vie commune constituait une confirmation formelle du statut de partenaires non matrimoniaux du requérant et de sa compagne, il n’en demeurait pas moins qu’elle ne créait pas de droits et obligations autres que ceux que les partenaires avaient établis par écrit. Le fait que la convention eût été signée devant notaire n’altérait pas le fait qu’il s’agissait simplement d’un contrat privé, n’ayant pas de conséquences légales pour les tiers et n’étant pas soumis à l’obligation d’enregistrement. Or, l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut soumettrait les partenariats non matrimoniaux à une telle obligation, l’enregistrement créant des droits et obligations comparables aux conséquences légales du mariage.

10      Le requérant a introduit une réclamation le 31 mars 2006, dans laquelle il a contesté l’interprétation trop stricte, selon lui, retenue par la Commission, des dispositions de l’article 1er, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut. Il soutenait, dans cette réclamation, que l’enregistrement de la convention devant notaire était une condition suffisante et faisait état de certaines circonstances de nature à prouver qu’il existerait peu de différences entre son partenariat et l’institution du mariage. Il soulignait, en particulier, que la relation avec sa partenaire durait depuis plus de deux ans, qu’ils avaient ensemble un enfant qu’il avait reconnu officiellement et qu’ils en attendaient un deuxième. Le requérant ajoutait que lui et sa partenaire avaient rédigé mutuellement des testaments et qu’il avait souscrit une assurance vie au profit de sa partenaire.

11      Par avis du 1er juin 2006, le comité de gestion du RCAM (ci-après le « comité de gestion ») a considéré, en se fondant sur les documents fournis par le requérant, notamment sa convention de vie commune établie devant notaire ainsi que le certificat établi par l’ambassade des Pays-Bas au Luxembourg, que le partenariat en cause devait être reconnu comme remplissant les conditions fixées à l’article 12 de la réglementation commune, particulièrement la condition prévue à l’article 1er, paragraphe 2, sous c), i), de l’annexe VII du statut.

12      Malgré cet avis positif du comité de gestion, l’AIPN, par décision du 12 juillet 2006, a rejeté la réclamation du requérant. Elle a considéré que les dispositions du statut avaient pour objectif de limiter le bénéfice du RCAM aux partenaires qui s’étaient engagés dans une relation similaire au mariage, comportant des droits et obligations réciproques, tels que définis par la loi. Elle a relevé que la convention de vie commune ne constituait qu’un contrat privé, qui pouvait être conclu par plus de deux personnes et dont les parties pouvaient décider du contenu, et que, bien qu’enregistré devant notaire, ce partenariat de fait n’avait aucune conséquence légale et ne pouvait donc être considéré comme un partenariat non matrimonial, tel que prévu par l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut.

13      La décision de l’AIPN a été notifiée au requérant le 13 juillet 2006.

 Conclusions des parties

14      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision du 28 février 2006, confirmée le 20 mars 2006, de ne pas reconnaître son partenariat avec Mme Maria Helena Astrid Hart comme partenariat non matrimonial au titre du RCAM ;

–        annuler la décision de rejet de sa réclamation, introduite le 27 mars 2006, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, datant du 12 juillet 2006 et notifiée le 13 juillet suivant ;

–        en tout état de cause, condamner la Commission aux entiers dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance.

15      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours non fondé ;

–        statuer sur les dépens comme de droit.

 Sur l’objet du litige

16      Le requérant demande l’annulation de la décision du 28 février 2006, confirmée le 20 mars 2006, refusant de reconnaître son partenariat avec sa compagne et, par voie de conséquence, refusant à celle-ci le bénéfice du RCAM, ainsi que l’annulation de la décision de rejet de la réclamation, arrêtée par l’AIPN le 12 juillet 2006. À cet égard, il convient de relever que, dans de telles circonstances, le Tribunal est en réalité saisi, selon une jurisprudence constante, des seuls actes faisant griefs contre lesquels la réclamation a été introduite (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. 23, point 8 ; arrêt du Tribunal du 14 novembre 2006, Chatziioannidou/Commission, F‑100/05, RecFP p. I‑A‑1‑129 et II‑A‑1‑487, point 24). Par conséquent, les conclusions du requérant doivent être comprises comme tendant à l’annulation de la décision du 28 février 2006, telle que confirmée le 20 mars 2006.

 En droit

17      À l’appui de ses conclusions, le requérant invoque la violation de l’article 72 du statut, de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), i), de l’annexe VII du statut, ainsi que de l’article 12 de la réglementation commune, une erreur manifeste d’appréciation, la violation de l’obligation de motivation ainsi que la méconnaissance de principes généraux de droit, tels le principe d’égalité de traitement entre fonctionnaires, le principe de bonne administration et le devoir de sollicitude, ainsi que des principes qui imposent à l’AIPN de n’arrêter une décision que sur la base de motifs légalement admissibles, c’est-à-dire pertinents et non entachés d’erreur manifeste d’appréciation, de fait ou de droit.

18      Le Tribunal considère opportun d’examiner en premier lieu les moyens tirés de la violation de l’article 72 du statut, de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), i), de l’annexe VII du statut, ainsi que de l’article 12 de la réglementation commune.

 Arguments des parties

19      D’une part, le requérant considère qu’il découle de l’article 72 du statut, de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), i), de l’annexe VII du statut et de l’article 12 de la réglementation commune, qui doivent être lus ensemble et de manière cohérente, que, en vertu de l’article 72 du statut et de l’article 12 de la réglementation commune, le partenaire non marié d’un fonctionnaire doit, pour bénéficier du RCAM, simplement remplir les trois premières conditions prévues à l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut, à savoir les conditions prévues sous i), ii) et iii). Au cours de l’audience, le requérant a également souligné qu’une interprétation littérale des dispositions en question confirmait cette analyse. Par voie de conséquence, contrairement à ce que soutient le PMO dans sa décision de rejet de la demande de reconnaissance du partenariat du requérant, puis l’AIPN dans sa décision de rejet de la réclamation, les partenariats non matrimoniaux pourraient être acceptés au titre du RCAM sans forcément être enregistrés autrement que par acte notarié ; la Commission ne pourrait ainsi ajouter aux articles précités des conditions qui ne s’y trouvent pas. Partant, les partenaires non mariés, reconnus comme tels par un État membre, ce qui serait à l’évidence le cas du partenariat entre le requérant et sa compagne, devraient être en mesure de bénéficier des avantages statutairement fixés.

20      Le requérant soutient à cet égard que, outre les conditions prévues sous ii) et iii), lesquelles ne posent pas de difficultés dans son cas, il remplit également la condition prévue à l’article 1er, paragraphe 2, sous c), i), de l’annexe VII du statut. En effet, il aurait transmis un document officiel reconnu comme tel par un État membre, en l’occurrence la convention de vie commune, passée sous forme notariée, qui attesterait de la reconnaissance de son statut de partenaire non matrimonial ; en outre, à côté de ce document officiel, suffisant en soi selon lui, on trouverait au dossier une attestation de l’ambassade des Pays-Bas au Luxembourg, confirmant la reconnaissance du partenariat. La Commission serait, en tout état de cause, tenue de prendre en compte la convention de vie commune transmise au dossier et ne pourrait pas refuser d’attacher à la situation du requérant les effets découlant du statut de partenaire reconnu, ni se poser en jurisconsulte de la législation interne des Pays-Bas.

21      Le requérant fait également remarquer que la Commission a elle‑même reconnu, dans sa note du 20 mars 2006, que la convention de vie commune entre lui et sa partenaire était une confirmation formelle de leur statut de partenaires non matrimoniaux. Dès lors, il serait surprenant qu’elle s’obstine à refuser au requérant et à sa partenaire le droit acquis qui découle de ce constat. Dans la mesure où les dispositions statutaires renvoient à la reconnaissance par un État membre d’un document et d’une situation, la Commission ne pourrait pas se retrancher derrière le principe d’interprétation autonome du droit communautaire afin de refuser de prendre en considération les documents fournis et la situation qu’ils attestent. De plus, la convention qu’il a contractée avec sa compagne est un acte notarié, c’est-à-dire un acte dressé par une personne détenant une parcelle de l’autorité publique et à même de dresser des actes authentiques exécutoires.

22      En outre, le requérant fait remarquer que l’article 1er, paragraphe 2, sous c), iv), de l’annexe VII du statut, qui concerne la condition tenant à l’impossibilité pour les partenaires d’accéder au mariage civil dans un État membre, est expressément exclu par l’article 72 du statut et l’article 12 de la réglementation commune, ce qui démontrerait clairement que la question du mariage n’est pas essentielle pour reconnaître le partenariat aux fins de l’extension du bénéfice du RCAM au partenaire d’un fonctionnaire, contrairement à ce que lui a opposé la Commission. Qu’il y ait possibilité ou non de mariage, les personnes seraient libres de choisir ou de préférer le partenariat, les deux institutions n’étant pas identiques et leurs ressemblances s’arrêtant à la déclaration publique et à la reconnaissance qui s’en suit.

23      Enfin, en se référant à l’arrêt de la Cour du 17 avril 1986, Reed (59/85, Rec. p. 1283, point 15), le requérant considère que l’évolution sociale des mœurs, dans nombre d’États membres, justifie encore plus une interprétation extensive de la notion de « conjoint » et de « partenaire non marié », afin d’y inclure les partenaires de sexes opposés, engagés dans une relation stable reconnue.

24      La Commission répond que, contrairement à ce que soutient le requérant, le législateur n’a pas souhaité étendre le bénéfice du RCAM à tous les partenaires stables de fonctionnaires dès lors que leur partenariat serait « reconnu », mais seulement à ceux dont le partenariat est très largement assimilé à un « mariage » dans l’État membre dans lequel il a été conclu.

25      Tout d’abord, la Commission rappelle qu’il découle d’une jurisprudence constante que pour l’interprétation d’une disposition de droit communautaire, il importe de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie. D’une part, la Commission considère qu’il n’est guère contestable que l’objectif, tant de l’article 72 du statut que de l’article 1er de l’annexe VII du statut, est de viser les personnes qui sont « assimilables » aux « conjoints » des fonctionnaires. Selon la Commission, cet objectif transparaît d’ailleurs dans les dispositions de l’article 72 du statut, lequel se réfère au partenaire non marié d’un fonctionnaire qui peut être « considéré » comme son conjoint. D’autre part, la Commission soutient que le libellé « neutre » de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), i) de l’annexe VII du statut s’explique concrètement par la grande diversité des législations nationales relatives aux « partenariats assimilables à un mariage » existant dans les États membres et, en conséquence, par l’impossibilité pour le législateur d’adopter une formulation plus explicite qui, en raison de sa trop grande précision, risquerait d’omettre les partenariats mis en oeuvre à cet effet dans certains États membres.

26      Aussi, si le législateur communautaire avait voulu étendre le bénéfice du RCAM à d’autres catégories de partenaires stables, il l’aurait indiqué expressément. À cet égard, la Commission observe qu’il n’existe aux Pays-Bas qu’un seul type de « partenariat enregistré » assimilé au mariage. La convention de vie commune, conclue par le requérant, ne constituerait pas juridiquement un tel partenariat enregistré, mais bien un contrat ou « accord de cohabitation » qui pourrait être conclu par deux personnes ou plus, cette dernière possibilité étant à l’inverse interdite dans le cadre d’un « partenariat enregistré ». La Commission souligne également que l’enregistrement par notaire d’une convention de vie commune n’est pas obligatoire, sauf pour l’octroi de certains avantages. D’ailleurs, si le véritable « partenariat enregistré » trouve son origine dans la loi, la convention de vie commune résulte de la seule autonomie de la volonté des parties. De même, s’il découle du premier des droits et des obligations légales comme pour le mariage, au contraire, la seconde n’entraîne que des conséquences patrimoniales.

27      Selon la Commission, le fait que la convention de vie commune ait été enregistrée par un notaire et que les Pays-Bas reconnaissent cet accord de cohabitation est dénué de pertinence. Une telle reconnaissance n’a pas de conséquences juridiques sur la question de savoir si cet « accord de cohabitation » peut s’imposer à un employeur communautaire aux fins de l’extension du bénéfice du RCAM au partenaire d’un fonctionnaire.

28      Enfin, pour répondre à l’argument du requérant tiré de l’arrêt Reed, précité, la Commission rappelle que, dans l’arrêt du 31 mai 2001, D et Suède/Conseil (C‑122/99 P et C‑125/99 P, Rec. p. I‑4319, points 37 et 38), la Cour a expressément relevé qu’il n’appartenait pas au juge communautaire de faire une interprétation extensive des notions de « mariage » ou de « partenariat enregistré », mais qu’il incombait, au contraire, au seul législateur de modifier le statut afin d’assimiler certaines formes de partenariat enregistré au mariage. La Commission ajoute qu’il ressort par ailleurs explicitement de cet arrêt que le législateur a voulu faire bénéficier du RCAM les seules personnes engagées dans un partenariat non matrimonial stable, dont les effets sont équivalents au mariage.

 Appréciation du Tribunal

29      Il découle du texte même de l’article 72 du statut que, pour définir la notion de « partenaire non marié d’un fonctionnaire », cet article renvoie directement aux trois premières conditions de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut, la question de l’enregistrement du partenariat, visée dans la phrase introductive de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut, ne pouvant être considérée comme une condition préalable. Si le législateur avait voulu en disposer autrement, l’article 72 du statut et l’article 12 de la réglementation commune ne se seraient pas référés respectivement au partenaire « non marié » et « reconnu » du fonctionnaire, mais à son partenaire « enregistré », terme utilisé dans l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut ; il est en outre à observer que le considérant 8 du règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO L 124, p. 1), considérant relatif à l’extension des avantages des couples mariés à des formes d’union autres que le mariage, vise les « fonctionnaires engagés dans une relation non matrimoniale reconnue par un État membre comme un partenariat stable », sans aucunement mentionner des conditions relatives à l’enregistrement de la relation concernée. Dans ce même contexte, le Tribunal tient à préciser que, en substance, il n’existe pas de différence entre la notion de partenaire non marié d’un fonctionnaire, énoncée à l’article 72 du statut et celle de partenaire reconnu d’un fonctionnaire, au sens de l’article 12 de la réglementation commune.

30      Ainsi, il appartient au juge communautaire, pour décider de l’extension du bénéfice du RCAM au partenaire non marié d’un fonctionnaire, de contrôler le respect des seules trois premières conditions de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut.

31      S’agissant des trois premières conditions énoncées à l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut, il n’est pas contesté par les parties que les deux dernières parmi celles‑ci, tenant respectivement à l’absence d’engagement des partenaires dans un autre partenariat non matrimonial et à l’absence de liens de parenté entre eux, soient remplies en l’espèce.

32      En outre, la première condition, sur laquelle porte en réalité la différence d’interprétation des parties (ci-après la « condition litigieuse »), énonce que le couple doit fournir un document officiel, reconnu comme tel par un État membre ou par toute autorité compétente d’un État membre, attestant leur statut de partenaires non matrimoniaux. Cette condition comporte trois branches :

–        la première branche concerne la production d’un document « officiel » relatif à l’état des personnes ;

–        la deuxième branche pose l’obligation que ledit document officiel soit « reconnu » comme tel par un État membre ;

–        enfin, par la troisième branche, il est exigé que ce document officiel, relatif à l’état des personnes, atteste du statut de « partenaires non matrimoniaux » des personnes concernées.

33      En l’espèce, la condition litigieuse est satisfaite en ses deux premières branches. En effet, le requérant a produit une convention de vie commune contractée avec sa partenaire, établie devant notaire aux Pays-Bas, ainsi qu’une attestation de l’ambassade des Pays-Bas au Luxembourg, dans laquelle il est certifié que ce document, lequel fait état du statut de partenaires non matrimoniaux du requérant et de sa partenaire, est reconnu aux Pays-Bas. De son côté, la Commission n’a nié ni le caractère « officiel » de cette convention de vie commune, ni sa « reconnaissance » par un État membre.

34      Concernant la troisième branche, le requérant considère que, dans la mesure où le certificat de l’ambassade des Pays-Bas au Luxembourg indique expressément que le « samenlevingsovereenkomst » lui reconnaît, avec sa compagne, le statut de « partenaires non matrimoniaux, ce document est suffisant pour constater que la condition litigieuse est également remplie en sa troisième branche.

35      Le Tribunal ne peut suivre cette argumentation. La question de savoir si deux personnes se trouvent dans la situation de « partenaires non matrimoniaux », au sens du statut, ne saurait relever de la seule appréciation des autorités nationales d’un État membre. Ainsi, s’agissant en particulier du « samenlevingsovereenkomst », il ne peut être satisfait à l’exigence d’un statut de « partenaires non matrimoniaux » par le seul fait qu’un document officiel, reconnu comme tel par un État membre, affirme l’existence d’un tel statut. En effet, la convention de vie commune de droit néerlandais n’est qu’un contrat librement organisé entre les parties, sous réserve du respect des règles liées à l’ordre public et aux bonnes mœurs. Elle peut être contractée par deux personnes ou plus et il n’existe aucune obligation légale d’y inclure certains engagements ou déclarations, en particulier concernant l’obligation d’un ménage commun. Par ailleurs, elle n’engage en principe les parties que pour les droits et obligations prévus par elles et ses effets juridiques à l’égard des tiers, en toute hypothèse limités, nécessitent des déclarations et procédures particulières.

36      En revanche, il y a lieu d’admettre, en suivant en cela, jusqu’à un certain point, la position de la Commission, lorsqu’elle retient que l’article 72 du statut et l’article 12 de la réglementation commune visent les partenariats « assimilables » au mariage, que, pour relever desdites dispositions, un partenariat doit présenter certaines ressemblances avec le mariage.

37      C’est à la lumière de ce paramètre que le Tribunal considère que la troisième branche de la condition litigieuse doit être entendue comme regroupant trois sous-conditions cumulatives.

38      Tout d’abord, cette troisième branche de la condition litigieuse suppose, et le terme même utilisé dans la disposition statutaire applicable confirme cette interprétation, que les partenaires doivent former un « couple », c’est-à-dire une union de deux personnes, par opposition aux autres unions de personnes susceptibles d’être parties à la convention de vie commune de droit néerlandais. Force est de constater, et les parties s’entendent sur ce point, que tel est le cas en l’espèce.

39      Ensuite, l’utilisation du vocable « statut » démontre que la relation des partenaires doit présenter des éléments de publicité et de formalisme. Liée en partie à la première branche de la condition litigieuse (voir point 32 du présent arrêt), cette deuxième sous‑condition de la troisième branche va cependant au-delà de la simple exigence d’un document « officiel ». Il n’en reste pas moins qu’elle est remplie en l’espèce. D’une part, dressée devant notaire, sans qu’il existe une obligation en ce sens, la convention qui organise la vie commune du requérant et de sa partenaire bénéficie de l’authenticité que lui confère sa conclusion par acte notarié ; d’autre part, elle règle la vie commune des partenaires de manière structurée et détaillée, en suivant le mode de rédaction des textes juridiques.

40      Enfin, la notion de « partenaires non matrimoniaux » doit être comprise comme représentant une situation dans laquelle les partenaires partagent une communauté de vie, caractérisée par une certaine stabilité, et sont liés, dans le cadre de cette communauté de vie, par des droits et obligations réciproques, relatifs à leur vie commune.

41      Tel est le cas en l’espèce.

42      Tout d’abord, dans le préambule du « samenlevingsovereenkomst » conclu entre le requérant et sa compagne, ces derniers déclarent expressément vivre ensemble et mener un ménage commun, depuis le 1er juillet 2004. Au surplus, ainsi que le requérant l’a fait relever lors de l’audience, l’article 7 de la convention de vie commune impose au couple l’obligation d’avoir une résidence commune.

43      Il convient ensuite de constater que la convention de vie commune du requérant et de sa compagne comporte une réglementation étendue des droits et obligations relatifs à leur vie commune en tant que couple. Notamment, en vertu de l’article 3 de la convention, les partenaires se sont accordés procuration mutuelle pour les actes juridiques passés au profit du ménage quotidien. L’article 4 de la convention, quant à lui, énonce que tous les biens servant au ménage quotidien seront propriété commune, sauf si ces biens sont repris dans l’annexe de la convention ou si les parties se sont autrement mises d’accord par écrit. Ces biens communs au ménage sont énumérés à l’article 4, paragraphe 2, de la convention. Les partenaires s’obligent également, à l’article 5 de la convention, à contribuer mensuellement au prorata des revenus nets du travail, dans une caisse commune, pour que les frais du ménage quotidien puissent être pris en charge. En outre, l’article 8 de la convention dispose que, dans tous les cas où il existe un litige concernant la propriété d’un bien, le bien est considéré comme appartenant aux deux, chacun possédant la moitié indivise. Il importe, enfin, de signaler l’article 9 de la convention, selon lequel chacun des partenaires a désigné réciproquement l’autre comme bénéficiaire de la « pension de partenaire » dans le cas où leurs règlements de retraite respectifs connaîtraient une telle pension.

44      Concernant les enfants, si rien n’apparaît sur ce point dans la convention de vie commune, il résulte de la brochure, annexée au mémoire en défense et mentionnée au point 5 du présent arrêt, que le droit néerlandais, dans le cas où les parents sont de simples partenaires, permet au père de l’enfant, par la reconnaissance de l’enfant, mais aussi par le biais de certaines procédures, d’acquérir les mêmes droits sur l’enfant que s’il avait été marié avec la mère de celui-ci. Notamment, il acquiert la responsabilité parentale conjointe avec la mère ; de plus, l’enfant peut prendre, le cas échéant, le nom du père. En l’espèce, le requérant, sans être contredit par la Commission, a déclaré avoir reconnu son premier enfant à sa naissance, ce qui lui confère des droits étendus en tant que père.

45      Par ailleurs, si la conclusion d’une convention de vie commune ne lie en principe que les partenaires (voir point 35 du présent arrêt), il convient de relever que la brochure susmentionnée, après avoir indiqué que les tribunaux néerlandais commencent à traiter les couples ayant contracté une convention de vie commune de la même manière que ceux ayant conclu un partenariat enregistré ou un mariage (« courts are starting to put couples with a cohabitation agreement on the same footing as married and registered couples »), admet expressément qu’il peut être reconnu aux couples ayant contracté une convention de vie commune des effets à l’égard des tiers, en ce qui concerne, en particulier, les pensions de retraite ; or, précisément, ainsi qu’il a été relevé au point 43 in fine du présent arrêt, les partenaires, dans le présent litige, se sont réciproquement désignés comme bénéficiaires de la « pension de partenaire » dans le cas où leurs règlements de retraite respectifs connaîtraient une telle pension.

46      Tous ces éléments mettent en évidence que, même si les conséquences découlant de la convention de vie commune contractée entre le requérant et sa partenaire ne sont pas aussi étendues que celles existant au sein d’un mariage ou même d’un « geregistreerd partnerschap », elles peuvent être similaires en de nombreux points si, comme c’est le cas en l’espèce, les partenaires l’organisent contractuellement.

47      Au vu des considérations qui précèdent (points 42 à 46 du présent arrêt), on ne peut que constater que la troisième sous-condition de la troisième branche de la condition litigieuse, à savoir celle relative à la notion de « partenaires non matrimoniaux », telle que définie au point 40 du présent arrêt, est remplie et que, par voie de conséquence, l’est également la troisième branche de la condition litigieuse.

48      Il résulte de tout ce qui précède que, dans la présente affaire, les trois premières conditions énoncées à l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut et visées par l’article 72 du statut sont remplies.

49      Une telle interprétation se trouve au surplus en conformité avec l’évolution sociale des mœurs, dont la pertinence pour l’interprétation du statut a été mise en exergue dans l’arrêt Reed, précité, invoqué par le requérant dans ses écritures. À cet égard, il y a lieu de relever que l’extension du bénéfice du RCAM au partenaire du fonctionnaire vaut également pour le partenaire de même sexe, les rédacteurs du statut ayant ainsi admis que des droits nouveaux puissent être reconnus aux personnes n’étant pas unies par le mariage. En outre, et contrairement à ce que la Commission soutient, l’interprétation retenue ci-dessus par le Tribunal – interprétation qui, par ailleurs, porte en particulier sur le concept de « partenariat » – ne va pas à l’encontre de la jurisprudence selon laquelle le juge communautaire ne peut effectuer une interprétation extensive de la notion de « mariage » (voir arrêt D et Suède/Conseil, précité, points 37 à 39). Dans le présent contexte, il convient, au demeurant, de relever que l’extension du bénéfice du RCAM au partenaire stable du fonctionnaire poursuit des objectifs de solidarité et de cohésion sociale, qui diffèrent des objectifs poursuivis par les dispositions conférant aux fonctionnaires des avantages purement pécuniaires, sous forme de supplément de salaire, comme par exemple l’allocation de foyer au partenaire du fonctionnaire, prévue par l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut ; il n’est ainsi pas déraisonnable que ces derniers avantages soient soumis à des conditions plus strictes, en ce qui concerne la relation entre le fonctionnaire et son partenaire non marié, que l’avantage consistant dans l’extension à ce dernier du bénéfice du RCAM.

50      Par conséquent, le Tribunal considère que la partenaire du requérant peut, en application de l’article 72 du statut et de l’article 12 de la réglementation commune, bénéficier du RCAM réservé au « partenaire non marié d’un fonctionnaire » et « au partenaire reconnu de l’affilié ».

51      Les arguments contraires invoqués par la Commission ne sont pas de nature à tenir en échec cette constatation.

52      Il en est en particulier ainsi de l’argument suivant lequel le bénéfice du RCAM serait réservé aux seuls partenariats « assimilables » au mariage, argument que la Commission puise dans une interprétation des règles applicables qui ne tiendrait pas seulement compte des termes de celles-ci, mais également de leur contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elles font partie. Tout en acceptant qu’un tel mode d’interprétation devrait l’emporter sur une interprétation purement littérale, le Tribunal ne voit pas pourquoi elle aurait comme effet d’exclure le partenaire du requérant du bénéfice du RCAM. Au contraire, c’est en suivant précisément la méthode d’interprétation suggérée par la Commission, laquelle fait l’objet d’une jurisprudence constante (voir arrêt de la Cour du 17 novembre 1983, Merck, 292/82, Rec. p. 3781, point 12 ; arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, André/Commission, F‑10/06, RecFP p. I‑A‑1‑183 et II‑A‑1‑755, point 35), que le Tribunal, loin de se contenter de l’affirmation contenue dans le certificat de l’ambassade des Pays-Bas au Luxembourg, a choisi d’examiner, aux points 42 à 46 du présent arrêt, la substance même du partenariat litigieux et en a conclu qu’il présentait des ressemblances avec le mariage, permettant de faire bénéficier la partenaire du requérant de l’article 72 du statut, en dépit du fait que, dans l’ordre juridique national concerné, il existait un autre type de partenariat enregistré, plus proche encore du mariage, et qui relèverait d’office dudit article. En revanche, dans la mesure où l’argument de l’assimilabilité entre partenariat et mariage allait au-delà de l’exigence des éléments de ressemblance admis en l’espèce (voir point 36 et, pour chacun de ces éléments, points 38, 39 et 40 à 47 du présent arrêt), faire droit à cet argument aurait conduit à ajouter une condition supplémentaire qui n’existe pas aux termes de l’article 72 du statut.

53      Dans le même contexte, est à rejeter l’argument que la Commission tire de l’utilisation de l’expression « considéré comme son conjoint », énoncée à l’article 72 du statut, lorsqu’elle fait valoir que le terme « considéré » doit être entendu comme visant les partenaires « assimilables » en substance aux conjoints et constitue ainsi une condition pour que le partenaire non marié d’un fonctionnaire puisse bénéficier du RCAM. Cette interprétation ne peut être suivie. En effet, et par analogie à ce qui est retenu pour l’application d’autres dispositions statutaires (comme par exemple l’article 2, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, qui permet d’« assimiler » aux enfants à charge toute autre personne envers laquelle le fonctionnaire a des obligations alimentaires légales et dont l’entretien lui impose de lourdes charges), l’expression « considéré comme son conjoint », utilisée à l’article 72 du statut, doit simplement être comprise en ce sens que, au titre du RCAM, le même traitement doit être réservé au partenaire non marié et au conjoint d’un fonctionnaire dès lors que les trois conditions de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut sont remplies.

54      S’agissant, en outre, de la position de la Commission suivant laquelle le renvoi de l’article 72 du statut à l’article 1er, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut ne se limite pas aux seules conditions sous i) à iii) de cette dernière disposition, mais s’étend à sa phrase introductive qui se réfère à une exigence d’enregistrement, force est de constater que, à supposer même fondée une telle interprétation du renvoi fait par l’article 72 du statut, les moyens du requérant devraient tout de même être accueillis. En effet, en l’espèce, et le requérant l’a rappelé au cours de l’audience, la convention de vie commune a fait l’objet d’un enregistrement devant notaire, soit devant un officier public investi d’une parcelle de l’autorité publique. De par cet enregistrement devant notaire, ce document a acquis une certaine « officialisation », bénéficiant de ce fait de certaines caractéristiques connues des droits nationaux et attachées aux actes authentiques, telles que la certitude tant du consentement et de la signature des parties, que du contenu de la convention. Ces caractéristiques ne sont pas seulement de nature à faciliter le respect et l’exécution de la convention de vie commune entre les partenaires, mais elles permettent également d’étendre les effets de la convention de vie commune à l’égard des tiers ; en effet, comme il résulte de la brochure susmentionnée de l’administration néerlandaise (voir point 45 du présent arrêt), des tiers, comme les fonds de pension, peuvent soumettre la reconnaissance d’une convention de vie commune à la condition qu’une telle convention soit conclue devant notaire. Ainsi, même à supposer que la condition de l’enregistrement soit nécessaire, cette condition, contrairement à ce que soutient la Commission, n’exige pas la conclusion d’un « geregistreerd partnerschap », un enregistrement devant notaire correspondant aux exigences du texte.

55      En l’espèce, le requérant n’était donc pas tenu de démontrer l’existence d’un « geregistreerd partnerschap » entre lui et sa compagne pour que celle-ci puisse bénéficier du RCAM.

56      À titre surabondant, le Tribunal observe que la position de la Commission sur l’exigence d’une convention du type d’un « geregistreerd partnerschap » de droit néerlandais pourrait conduire à des inégalités de traitement. En effet, étant donné que de nombreux pays ne connaissent pas de formes d’union comparables à celle du « geregistreerd partnerschap », exiger, comme le fait la Commission, un partenariat « enregistré » de ce type, aurait comme conséquence, pour les couples non mariés qui, en raison, notamment, tant de leur lieu de résidence que de la nationalité des partenaires, sont le plus étroitement liés avec ces pays, de priver définitivement le partenaire du fonctionnaire du bénéfice du RCAM en dehors du mariage. Inversement, à supposer que la Commission accepte les partenariats conclus sous forme de conventions de vie commune pour ces couples, son refus de reconnaître les « simples » conventions de vie commune pour les couples qui sont le plus étroitement liés, dans le sens exposé ci-dessus, avec les pays connaissant des formes d’union autres que le mariage ou le partenariat « enregistré », emporterait un traitement inégal de ces derniers couples ; en effet, pour ces mêmes couples, l’extension du bénéfice du RCAM au partenaire serait refusée, tandis qu’elle serait autorisée pour les couples qui présentent les liens de rattachement susmentionnés avec les pays ne connaissant pas de partenariats « enregistrés ». De telles inégalités seraient encore plus difficiles à justifier en présence de partenariats qui ne seraient pas « enregistrés » dans le sens préconisé par la Commission, mais qui présenteraient cependant avec le mariage des ressemblances plus fortes que le « geregistreerd partnerschap » du droit néerlandais. En outre, s’il est vrai que, selon la jurisprudence, en interdisant à chaque État membre d’appliquer son droit différemment en raison de la nationalité, les articles 12 CE, 39 CE, 43 CE et 49 CE ne visent pas les éventuelles disparités de traitement qui peuvent résulter, d’un État membre à l’autre, des divergences existant entre les législations des différents États membres du moment que celles-ci affectent toutes personnes tombant sous leur application, selon des critères objectifs et sans égard à leur nationalité (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 28 juin 1978, Kenny, 1/78, Rec. p. 1489, point 18 ; du 7 mai 1992, Wood et Cowie, C‑251/90 et C‑252/90, Rec. p. I‑2873, point 19 ; du 3 juillet 1979, Van Dam en Zonen e.a., 185/78 à 204/78, Rec. p. 2345, point 10, et du 1er février 1996, Perfili, C‑177/94, Rec. p. 161, point 17), les inégalités du type de celles dont il est fait état dans le présent point ne relèvent pas de cette jurisprudence ; en effet, d’une part, et contrairement à la prémisse sur laquelle se fonde la jurisprudence en question, les inégalités de traitement relevées dans le présent point auraient leur origine dans la nationalité des intéressés, ainsi que dans leur lieu de résidence, critère qui recouvre souvent celui de la nationalité, d’autre part, dans les affaires ayant donné lieu à la jurisprudence susmentionnée, la question de l’égalité de traitement se posait au regard des règles de la libre circulation, tandis que, en l’espèce il s’agit de garantir le principe de l’égalité de traitement en tant que principe du droit de la fonction publique communautaire.

57      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de faire droit aux moyens du requérant tirés de la violation de l’article 72 du statut, de l’article 1er, paragraphe 2, sous c), i) de l’annexe VII du statut et de l’article 12 de la réglementation commune et d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur ses autres moyens, invoqués d’ailleurs, ainsi que la Commission le relève à juste titre, de manière désordonnée dans la requête, certains moyens ne faisant au demeurant l’objet d’aucun développement.

58      Il est vrai que l’interprétation retenue par le Tribunal pour l’article 72 du statut, lu en commun avec l’article 1er, paragraphe 2, sous c), i) de l’annexe VII du statut et l’article 12 de la réglementation commune, pourrait, dans certains cas, conduire les services saisis des demandes d’extension du bénéfice du RCAM au partenaire non marié d’un fonctionnaire à effectuer des recherches et vérifications, alors que le législateur communautaire, avec le règlement n° 723/2004, a souhaité simplifier la gestion administrative des institutions. Cependant, cet objectif est atteint, dans une large mesure, par les nouvelles règles en matière d’indemnités et d’allocations, seuls domaines auxquels le règlement n° 723/2004, dans son considérant 26, se réfère pour la simplification, domaines d’ailleurs non seulement distincts de celui de l’extension du bénéfice du RCAM mais également moins sensibles que ce dernier d’un point de vue social (voir, en ce sens, point 49 du présent arrêt). En outre, l’objectif de simplification doit, en toute hypothèse, être concilié avec les principes supérieurs de droit et les règles statutaires ; or, les contraintes pouvant résulter, pour les administrations, de l’interprétation retenue en l’espèce ne sont que la conséquence de l’application par le Tribunal de ces principes et règles afin de délimiter le sens exact de la notion de « partenaire non marié » de l’article 72 du statut.

 Sur les dépens

59      En vertu de l’article 122 du règlement de procédure du Tribunal, publié au Journal officiel de l’Union européenne du 29 août 2007 (JO L 225, p. 1), les dispositions dudit règlement relatives aux dépens et frais de justice ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement de procédure, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer, mutatis mutandis, aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

60      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé en ses moyens dans la présente instance, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la Commission des Communautés européennes du 28 février 2006, confirmée le 20 mars 2006, de ne pas reconnaître le partenariat de M. Anton Pieter Roodhuijzen avec Mme Maria Helena Astrid Hart comme partenariat non matrimonial, au titre du régime commun d’assurance maladie des Communautés européennes, est annulée.

2)      La Commission des Communautés européennes est condamnée aux dépens.

Kreppel

Tagaras

Gervasoni

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 novembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       H. Kreppel


* Langue de procédure : le français.