Language of document : ECLI:EU:T:2005:427

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA GRANDE CHAMBRE DU TRIBUNAL

28 novembre 2005 (1)

« Intervention – Article 116, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal – Rejet – Association n’ayant pas pour objet la protection des intérêts de ses membres – Sociétés ne justifiant pas d’un intérêt à la solution du litige »

Dans l’affaire T-201/04,

Microsoft Corp., établie à Redmond, Washington (États-Unis), représentée par Me J.-F. Bellis, avocat, et M. I. S. Forrester, QC,

partie requérante,

soutenue par

Association for Competitive Technology, Inc., établie à Washington, DC (États-Unis), représentée par Me L. Ruessmann, avocat,

DMDsecure.com BV, établie à Amsterdam (Pays-Bas),

MPS Broadband AB, établie à Stockholm (Suède),

Pace Micro Technology plc, établie à Shipley (Royaume-Uni),

Quantel Ltd, établie à Newbury (Royaume-Uni),

Tandberg Television Ltd, établie à Southampton (Royaume-Uni),

représentées par Me J. Bourgeois, avocat,

Exor AB, établie à Uppsala (Suède), représentée par Mes S. Martínez Lage, H. Brokelmann et R. Allendesalazar Corcho, avocats,

Mamut ASA, établie à Oslo (Norvège),

TeamSystem SpA, établie à Pesaro (Italie),

représentées par Me G. Berrisch, avocat,

The Computing Technology Industry Association, Inc., établie à Oakbrook Terrace, Illinois (États-Unis), représentée par Mes G. van Gerven et T. Franchoo, avocats, et M. B. Kilpatrick, solicitor,

parties intervenantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. R. B. Wainwright, F. Castillo de la Torre, P. Hellström et A. Whelan, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

soutenue par

Audiobanner.com, agissant sous le nom commercial « VideoBanner », établie à Los Angeles, Californie (États-Unis), représentée par Me L. Alvizar, avocat,

European Committee for Interoperable Systems (ECIS), établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Mes D. Paemen et N. Dodoo, avocats,

Free Software Foundation Europe eV, établie à Hambourg (Allemagne), représentée par Me C. Piana, avocat,

RealNetworks, Inc., établie à Seattle, Washington (États-Unis), représentée par Mes A. Winckler, M. Dolmans et T. Graf, avocats,

Software & Information Industry Association (SIIA), établie à Washington, DC, représentée par M. C. Simpson, solicitor, et Mes D. Paemen et N. Dodoo, avocats,

parties intervenantes,

ayant pour objet, une demande d’annulation de la décision C(2004) 900 final de la Commission, du 24 mars 2004, relative à une procédure d’application de l’article 82 CE (Affaire COMP/C-3/37.792 – Microsoft) ou, à titre subsidiaire, une demande d’annulation ou de réduction de l’amende infligée dans cette décision à la requérante,

LE PRÉSIDENT DE LA GRANDE CHAMBRE DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES


rend la présente

Ordonnance

 Faits et procédure

1       Microsoft Corp. (ci-après « Microsoft » ou la « requérante »), une société établie à Redmond, Washington (États-Unis), conçoit, développe et commercialise une vaste gamme de produits logiciels destinés à différents types d’équipements informatiques. Ces produits logiciels comprennent des systèmes d’exploitation pour ordinateurs personnels (ci-après « PC ») clients, dénommés Windows, des systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail, dénommés Windows Server, et des lecteurs multimédias à réception continue, dénommés Windows Media Player. Microsoft fournit également des services d’assistance technique pour ses produits logiciels.

2       Le 10 décembre 1998, Sun Microsystems, Inc., une société établie à Palo Alto, Californie (États-Unis) qui fournit notamment des systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail, a déposé une plainte auprès de la Commission.

3       Dans sa plainte, Sun Microsystems dénonçait le refus que Microsoft lui aurait opposé de lui communiquer les informations et la technologie nécessaires pour permettre l’interopérabilité de ses systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail avec Windows.

4       Le 2 août 2000, la Commission a adressé à Microsoft une première communication des griefs. Celle-ci portait, essentiellement, sur des questions concernant l’interopérabilité entre, d’une part, les systèmes d’exploitation Windows pour PC clients et, d’autre part, les systèmes d’exploitation pour serveurs d’autres fournisseurs ( l’« interopérabilité client-à-serveur »).

5       En février 2000, la Commission a lancé une enquête d’office sur la génération « Windows 2000 » de Microsoft de systèmes d’exploitation pour PC et pour serveurs de groupe de travail et sur l’intégration, par Microsoft, de son logiciel « Windows Media Player » à ses systèmes d’exploitation pour PC.

6       Cette enquête a abouti à l’envoi, le 29 août 2001, d’une deuxième communication des griefs à Microsoft. Dans cette communication des griefs, la Commission a réitéré ses griefs antérieurs au sujet de l’interopérabilité client-à-serveur. La Commission a, en outre, abordé certaines questions relatives à l’interopérabilité entre serveurs de groupe de travail (l’« interopérabilité serveur-à-serveur »). Enfin, la Commission a évoqué certaines questions relatives à l’intégration du logiciel Windows Media Player à ses systèmes d’exploitation pour PC.

7       Le 6 août 2003, la Commission a adressé à Microsoft une troisième communication des griefs, destinée à compléter les deux précédentes et à donner des indications sur les mesures correctives qu’elle envisageait d’ordonner.

8       Le 24 mars 2004, la Commission a adopté la décision C(2004) 900 final relative à une procédure d’application de l’article 82 CE (Affaire COMP/C-3/37.792 – Microsoft) (ci-après la « décision attaquée »).

9       Pour apprécier le comportement de Microsoft, la Commission a, premièrement, identifié trois marchés de produits en cause distincts, regroupant, respectivement, les systèmes d’exploitation pour PC clients, les systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail et les lecteurs multimédias assurant une réception en continu.

10     Deuxièmement, elle a considéré que chacun de ces marchés avait une dimension mondiale.

11     Troisièmement, la Commission a constaté que Microsoft détenait une position dominante sur le marché des systèmes d’exploitation pour PC clients et sur le marché des systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail.

12     Quatrièmement, elle a estimé que, par son comportement sur ces deux marchés, Microsoft enfreignait l’article 82 CE. D’une part, elle a considéré que cette dernière abusait de sa position dominante en refusant de fournir les informations relatives à l’interopérabilité et d’en autoriser l’usage pour le développement et la distribution de produits concurrents aux siens sur le marché des systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail, pendant la période allant du mois d’octobre 1998 à la date de notification de la décision attaquée [article 2, sous a), de la décision attaquée]. D’autre part, elle a considéré que Microsoft abusait également de sa position dominante en subordonnant la fourniture du système d’exploitation Windows pour PC clients à l’acquisition simultanée de Windows Media Player, pendant la période allant du mois de mai 1999 à la date de notification de la décision attaquée [article 2, sous b), de la décision attaquée].

13     Cinquièmement, la Commission a infligé une amende de 497 196 304 euros à Microsoft (article 3 de la décision attaquée).

14     Sixièmement, elle a imposé à Microsoft de mettre fin aux infractions susvisées, de s’abstenir de tout comportement qui pourrait avoir un objet ou un effet identique ou analogue à celui desdites infractions, et de se conformer à plusieurs mesures correctives dans certains délais (articles 4 à 8 de la décision attaquée).

15     Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 juin 2004, Microsoft a introduit un recours ayant pour objet, une demande d’annulation de la décision attaquée ou, à titre subsidiaire, une demande d’annulation ou de réduction de l’amende.

16     Par demande déposée au greffe le 6 juin 2005, The International Association of Microsoft Certified Partners, Inc. (ci-après « IAMCP »), établie à Markham, Ontario (Canada), représentée par M. D. Beard, barrister, et MM. W. Allan et N. Seay, solicitors, a demandé à intervenir au litige au soutien des conclusions de la requérante.

17     Par demande déposée au greffe le 12 août 2005, International Intellectual Property Institute (ci-après « IIPI »), établi à Washington, DC (États-Unis), Institute for Policy Innovation (ci-après « IPI »), établi à Lewisville, Texas (États-Unis), et Progress & Freedom Foundation (ci-après « PFF »), établie à Washington, DC, représentés par Me A. Pérez Ocón, avocat, ont demandé à intervenir au litige au soutien des conclusions de la requérante.

18     Les demandes d’intervention ont été signifiées aux parties, conformément à l’article 116, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal.

19     Les parties suivantes ont présenté leurs observations écrites sur la demande d’intervention introduite par IAMCP :

–       la requérante, par acte déposé au greffe le 20 juin 2005 ;

–       la partie intervenante Free Software Foundation Europe eV, par acte déposé au greffe le 28 juin 2005 ;

–       la partie intervenante Software & Information Industry Association, par acte déposé au greffe le 30 juin 2005 ; et

–       la Commission, par acte déposé au greffe le 30 juin 2005.

20     Les parties suivantes ont présenté leurs observations écrites sur la demande d’intervention introduite par IIPI, IPI et PFF :

–       les parties intervenantes DMDsecure.com BV, MPS Broadband AB, Pace Micro Technology plc, Quantel Ltd, et Tandberg Television Ltd, par acte déposé au greffe le 19 septembre 2005 ;

–       la partie intervenante Software & Information Industry Association, par acte déposé au greffe le 22 septembre 2005 ; et

–       la Commission, par acte déposé au greffe le 22 septembre 2005.

 Sur la demande d’intervention de IAMCP

 Arguments de IAMCP et des parties ayant présenté des observations

21     IAMCP fait valoir qu’elle remplit les conditions auxquelles est soumis le droit d’intervention reconnu aux associations représentatives et qu’elle doit, dès lors, être admise à intervenir au litige au soutien des conclusions de la requérante.

22     En premier lieu, elle prétend représenter un nombre important d’opérateurs actifs dans le secteur concerné. Elle indique qu’elle est une société sans but lucratif, immatriculée dans l’État du Delaware (États-Unis), comptant plus de 1 500 membres dans le monde (dont plus de 400 sont situés dans l’Union européenne), regroupés en sections locales. Tous ses membres seraient actifs dans les secteurs de la technologie de l’information ou des logiciels et seraient des « Partenaires Microsoft Accrédités » ou des « membres Microsoft Inscrits », spécialisés dans l’utilisation des, ou le travail avec les, systèmes d’exploitation Windows. IAMCP précise que son rôle représentatif concerne exclusivement les intérêts de ses membres en rapport avec les systèmes et la technologie de Microsoft.

23     En deuxième lieu, IAMCP avance qu’elle a notamment pour objet la protection des intérêts de ses membres. Elle indique que, en sa qualité de société immatriculée dans l’État du Delaware, et conformément à son objet social tel que décrit dans son certificat de constitution, elle dispose du pouvoir normal de poser tout acte et d’exercer toutes activités licites autorisés par la loi sur les sociétés de l’État du Delaware et, en particulier, du pouvoir prévu par la loi générale sur les sociétés d’agir ou d’être citée en justice et de participer en qualité de partie ou autre à toute procédure judiciaire. Par ailleurs, elle énonce les objectifs que, conformément à ses statuts, elle est appelée à poursuivre.

24     En troisième lieu, IAMCP soutient que l’affaire soulève des questions de principe affectant le fonctionnement du secteur concerné.

25     En quatrième lieu, IAMCP prétend que les intérêts de ses membres seront affectés dans une mesure importante par l’arrêt à intervenir. S’agissant de la question de l’interopérabilité, elle estime que si la décision attaquée devait être confirmée par le Tribunal, cela serait de nature à décourager Microsoft d’innover, ce qui aurait des conséquences négatives sur les activités de ses membres. S’agissant de la question des ventes liées, IAMCP fait valoir que l’intégration permanente de nouvelles fonctionnalités dans Windows revêt une importance particulière pour ses membres et entraîne une réduction des coûts tant pour ceux-ci que pour leurs clients.

26     En dernier lieu, IAMCP avance, d’une part, qu’elle est particulièrement bien placée pour donner son avis sur la question de l’interopérabilité et, d’autre part, qu’aucune autre partie admise à intervenir au présent litige ne se préoccupe suffisamment des intérêts des opérateurs de petite ou moyenne taille.

27     La requérante considère que IAMCP peut être admise à intervenir au litige.

28     La Commission et la partie intervenante Software & Information Industry Association concluent au rejet de la demande d’intervention de IAMCP et à la condamnation de cette dernière aux dépens. Elles font valoir que IAMCP n’a pas pour objet de protéger ou de représenter les intérêts de ses membres, mais qu’elle ne constitue qu’un forum de discussion et de coopération pour ceux-ci. La Commission précise que IAMCP n’a pas participé à la procédure administrative ayant mené à l’adoption de la décision attaquée, ni, à sa connaissance, aux procédures pour violation du droit antitrust américain. La Commission et la partie intervenante Software & Information Industry Association indiquent également que les arguments que IAMCP fait valoir au soutien de sa thèse selon laquelle l’arrêt à intervenir est susceptible d’affecter dans une mesure importante les intérêts de ses membres sont vagues, abstraits et non étayés.

29     Quant à la partie intervenante Free Software Foundation Europe eV, sans conclure formellement au rejet de la demande d’intervention présentée par IAMCP, elle souligne que cette dernière n’a pas le pouvoir de défendre les intérêts de ses membres.

 Appréciation du Tribunal

30     L’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, dudit statut, prévoit que toute personne justifiant d’un intérêt à la solution d’un litige autre qu’un litige entre États membres, entre institutions de la Communauté, ou entre États membres et institutions de la Communauté, est en droit d’intervenir à ce litige.

31     Selon une jurisprudence constante, est admise l’intervention d’associations représentatives qui ont pour objet la protection de leurs membres dans des affaires soulevant des questions de principe de nature à affecter ces derniers [ordonnances du président de la Cour du 17 juin 1997, National Power et Power Gen, C‑151/97 P(I) et C-157/97 P(I), Rec. p. I-3491, point 66, et du 28 septembre 1998, Pharos/Commission, C-151/98 P-I, Rec. p. I-5441, point 6 ; ordonnance du président du Tribunal du 26 juillet 2004, Microsoft/Commission, T-201/04 R, non encore publiée au Recueil, point 37]. Plus particulièrement, une association peut être admise à intervenir dans une affaire si elle est représentative d’un nombre important d’entreprises actives dans le secteur concerné, si son objet comprend la protection des intérêts de ses membres, si l’affaire peut soulever des questions de principe affectant le fonctionnement du secteur concerné et, donc, si les intérêts de ses membres peuvent être affectés dans une mesure importante par l’arrêt à intervenir (ordonnances du Tribunal du 8 décembre 1993, Kruidvat/Commission, T-87/92, Rec. p. II-1363, point 14, et du 28 mai 2004, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission, T-253/03, non encore publiée au Recueil, rejetant la demande d’intervention de la Section on Business Law of the International Bar Association, point 18 ; ordonnance Microsoft/Commission, précitée, point 37).

32     En l’espèce, l’article 1, Section 2, des statuts de IAMCP prévoit que les objets de cette dernière sont de :

« 2.1 Coopérer avec Microsoft Corporation et d’autres entités commerciales et groupes organisés dans le domaine du développement des logiciels, de la consultance en technologies de l’information, des systèmes d’intégration et de la formation en technologies de l’information ; de développer et de diriger des programmes d’éducation.

2.2 Assister les membres en facilitant la diffusion d’informations techniques, l’assistance marketing et le développement professionnel.

 2.3 Fournir un forum pour la discussion de questions commerciales et techniques concernant l’industrie des logiciels ; permettre la mise en réseau et la conclusion de partenariats entre les uns et les autres et faciliter les communications entre Microsoft Corporation et d’autres entités commerciales apparentées et des groupes organisés.

2.4 Organiser des réunions, des séminaires, des conférences, des cours, des congrès et agir de toute autre manière en vue de permettre la réalisation des objectifs prévus par la Section 2.

2.5 Promouvoir la conclusion de partenariats entre ses membres.

2.6 Établir un code de déontologie professionnelle et des règles de pratique professionnelle auxquels les membres devraient adhérer. »

33     Force est de constater que, contrairement à ce que prétend IAMCP, ses objets n’incluent pas celui de la protection des intérêts de ses membres ou la représentation de ceux-ci. En réalité, cette association a essentiellement pour objectif de promouvoir, parmi ses membres, un échange d’informations et de discussions sur des questions commerciales et techniques les intéressant ainsi que la conclusion de partenariats, d’aider ses membres à coopérer avec Microsoft et d’autres entités actives dans le secteur des logiciels et des technologies de l’information et d’organiser des réunions et des conférences.

34     Cette appréciation n’est pas remise en cause par l’argument que IAMCP tire du fait que, en sa qualité de société immatriculée dans l’État du Delaware, et conformément à son objet social tel que décrit dans son certificat de constitution, elle dispose du pouvoir normal de poser tout acte et d’exercer toutes activités licites autorisés par la loi sur les sociétés de cet État, en ce compris le pouvoir d’agir en justice. En effet, le fait qu’elle ait le pouvoir d’agir en justice, en tant que partie demanderesse, défenderesse ou autre, est simplement la conséquence du fait qu’elle possède la personnalité juridique selon le droit de l’État du Delaware, mais ne démontre nullement qu’elle a pour objet de veiller à la protection des intérêts de ses membres. Le certificat de constitution de IAMCP prouve uniquement son existence juridique, selon le droit de l’État du Delaware, aux fins de l’application de l’article 44, paragraphe 5, sous a), du règlement de procédure. Or, cette preuve de son existence juridique, bien que nécessaire (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 28 mai 2004, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission, T-253/03, non encore publiée au Recueil, rejetant la demande d’intervention du European Council on Legal Affairs, points 18 et 19), n’est pas suffisante en tant que telle pour justifier l’admission de sa demande d’intervention (voir, en ce sens, ordonnance Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission, précitée au point 31 supra).

35     Il convient de relever, au surplus, que IAMCP n’a pas participé à la procédure administrative ayant mené à l’adoption de la décision attaquée (voir, en ce sens, ordonnance Kruidvat/Commission, précitée au point 31 supra).

36     La demande d’intervention présentée par IAMCP doit donc être rejetée.

 Sur la demande d’intervention de IIPI, IPI et PFF

 Arguments de IIPI, IPI et PFF ainsi que des parties ayant présenté des observations

37     IIPI, IPI et PFF expliquent qu’ils sont des sociétés sans but lucratif, des « laboratoires d’idées » qui ont pour mission la promotion, partout dans le monde, de droits de propriété intellectuelle forts dans le secteur technologique, en ce compris les logiciels et les technologies de l’information, comme moyen d’encourager l’innovation et le développement économique.

38     Ils prétendent avoir un intérêt direct et actuel à la solution du litige en ce que la décision attaquée créée un sérieux obstacle au « succès » de leur mission. Cette décision affecterait les droits d’auteur dans le domaine des technologies de l’information et définirait spécifiquement un nouveau critère pour la concession de licences obligatoires de droits d’auteur qui est censé favoriser l’innovation dans ce domaine. Or, « la protection adéquate des œuvres protégées par le droit d’auteur pour promouvoir l’innovation [serait] un objectif particulier et important de chacun [de ces demandeurs en intervention] ».

39     IIPI, IPI et PFF ajoutent que la décision attaquée, en ordonnant la concession de licences obligatoire pour les informations de Microsoft relatives à l’interopérabilité, protégées par les droits d’auteur, viole le principe de l’efficacité de droits de propriété intellectuelle forts partout dans le monde, tel que défini dans la convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 1886 (acte de Paris de 1971), l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, administré par l’Organisation mondiale du commerce, et le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur.

40     Les parties intervenantes DMDsecure.com BV, MPS Broadband AB, Pace Micro Technology plc, Quantel Ltd, et Tandberg Television Ltd indiquent ne pas avoir d’objections à l’égard de la demande présentée par IIPI, IPI et PFF.

41     La Commission et la partie intervenante Software & Information Industry Association concluent au rejet de la demande d’intervention de IIPI, IPI et PFF et à la condamnation de ces derniers aux dépens.

42     La Commission fait tout d’abord observer que IIPI, IPI et PFF ne constituent pas des associations représentatives mais des sociétés, ne comportant aucun membre, qui poursuivent leurs propres objectifs individuels. Elle avance ensuite que IIPI, IPI et PFF n’ont pas démontré l’existence d’un intérêt à la solution du litige. Ces sociétés ne seraient, en effet, actives sur aucun marché relevant du secteur concerné ni sur aucun marché connexe.

43     La partie intervenante Software & Information Industry Association soutient que IIPI, IPI et PFF ne justifient pas d’un intérêt direct, actuel et spécifique à la solution du litige. Elle ajoute que ces sociétés ne démontrent pas qu’elles possèdent la capacité à agir.

 Appréciation du Tribunal

44     Il résulte d’une jurisprudence constante que la notion d’intérêt à la solution du litige, au sens de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour, doit se définir au regard de l’objet même du litige et s’entendre comme un intérêt direct et actuel au sort réservé aux conclusions elles-mêmes, et non comme un intérêt par rapport aux moyens ou aux arguments soulevés. En effet, par « solution » du litige, il faut entendre la décision finale demandée au juge saisi, telle qu’elle serait consacrée dans le dispositif de l’arrêt. Il convient, notamment, de vérifier que l’intervenant est touché directement par l’acte attaqué et que son intérêt à la solution du litige est certain (ordonnance de la Cour du 12 avril 1978, Amylum e.a./Conseil et Commission, 116/77, 124/77 et 143/77, Rec. p. 893, points 7 et 9 ; ordonnance National Power et Power Gen, précitée, points 51 à 53; ordonnance du Tribunal du 25 février 2003, BASF/Commission, T-15/02, Rec. p. II-213, point 26).

45     Force est de constater que IIPI, IPI et PFF ne justifient pas d’un intérêt à la solution du litige au sens de la jurisprudence précitée.

46     À cet égard, il doit être relevé que ces trois sociétés ne sont actives dans aucun des marchés concernés par la décision attaquée ni n’exercent d’activités commerciales sur un marché se situant en amont ou en aval de l’un de ces marchés. Ainsi qu’elles se définissent elles-mêmes, elles ne sont, en réalité, que de simples « laboratoires d’idées » dont l’objet comprend notamment la promotion de droits de propriété intellectuelle forts dans le domaine des technologies de l’information. À cette fin, elles publient des articles, des ouvrages et des bulletins d’information, effectuent des travaux de recherche et organisent des réunions, des séminaires de formation et des conférences.

47     Or, il est difficile de comprendre en quoi la solution que le Tribunal donnera au litige serait susceptible d’affecter, d’une quelconque manière, la position juridique de IIPI, IPI et PFF et, en particulier, la bonne poursuite de leur mission ou de leurs activités, telles que décrites ci-dessus. Que le Tribunal confirme le bien-fondé de la décision attaquée ou qu’il annule celle-ci en tout ou en partie, ces trois sociétés pourront pleinement continuer à promouvoir leur thèse selon laquelle l’existence de droits de propriété intellectuelle forts dans le domaine des technologies de l’information encourage l’innovation et le développement économique.

48     L’intérêt que IIPI, IPI et PFF font valoir n’est, en fait, qu’un intérêt indirect, purement abstrait et académique. Tout au plus pourrait-il être considéré qu’ils justifient d’un intérêt par rapport à certaines thèses ou à certains arguments défendus par Microsoft. Un tel intérêt ne saurait, toutefois, constituer un intérêt suffisant à la solution du litige aux fins de l’application de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour.

49     Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la demande d’intervention présentée par IIPI, IPI et PFF.

 Sur les dépens

50     En vertu de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, il est statué sur les dépens dans l’arrêt ou l’ordonnance qui met fin à l’instance. La présente ordonnance mettant fin à l’instance à l’égard des demandeurs en intervention, il convient de statuer sur les dépens afférents à leur demande d’intervention.

51     Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

52     IAMCP ayant succombé en son action, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission et de la partie intervenante Software & Information Industry Association afférents à sa demande d’intervention, conformément aux conclusions de ces dernières. La requérante et la partie intervenante Free Software Foundation Europe eV n’ayant pas formulé de conclusions à cet égard, elles supporteront leurs propres dépens.

53     IIPI, IPI et PFF ayant succombé en leur action, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux de la Commission et de la partie intervenante Software & Information Industry Association afférents à leur demande d’intervention, conformément aux conclusions de ces dernières. DMDsecure.com BV, MPS Broadband AB, Pace Micro Technology plc, Quantel Ltd, et Tandberg Television Ltd n’ayant pas formulé de conclusions à cet égard, ils supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande d’intervention de The International Association of Microsoft Certified Partners, Inc. est rejetée.

2)      The International Association of Microsoft Certified Partners, Inc. est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission et de Software & Information Industry Association afférents à sa demande d’intervention.

3)      La requérante et Free Software Foundation Europe eV supporteront leurs propres dépens afférents à la demande d’intervention de The International Association of Microsoft Certified Partners, Inc.

4)      La demande d’intervention de International Intellectual Property Institute, Institute for Policy Innovation et Progress & Freedom Foundation est rejetée.

5)      International Intellectual Property Institute, Institute for Policy Innovation et Progress & Freedom Foundation sont condamnés à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux de la Commission et de Software & Information Industry Association afférents à leur demande d’intervention.

6)      DMDsecure.com BV, MPS Broadband AB, Pace Micro Technology plc, Quantel Ltd, et Tandberg Television Ltd supporteront leurs propres dépens afférents à la demande d’intervention de International Intellectual Property Institute, Institute for Policy Innovation et Progress & Freedom Foundation.

Fait à Luxembourg, le 28 novembre 2005.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       B. Vesterdorf


1 Langue de procédure : l'anglais.