Language of document : ECLI:EU:C:2013:175

Affaires jointes C‑399/10 P et C‑401/10 P

Bouygues SA et Bouygues Télécom SA

contre

Commission européenne e.a.

«Pourvois – Aides d’État – Mesures financières en faveur de France Télécom – Projet d’avance d’actionnaire – Déclarations publiques d’un membre du gouvernement français – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché commun et n’ordonnant pas sa récupération – Notion d’aide d’État – Notion d’avantage économique – Notion d’engagement de ressources d’État»

Sommaire – Arrêt de la Cour (grande chambre) du 19 mars 2013

1.        Aides accordées par les États – Examen par la Commission – Décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE – Fixation de l’objet de la procédure administrative – Plainte portant sur plusieurs mesures – Prise de position de la Commission sur certaines d’entre elles – Rejet des prétentions portant sur les autres mesures – Exclusion

(Art. 108, § 2 et 3, TFUE; règlement du Conseil no 659/1999, art. 4, § 4, 6, § 1, et 13, § 1)

2.        Aides accordées par les États – Notion – Octroi imputable à l’État d’un avantage au moyen de ressources d’État – Avantages entraînant une diminution du budget étatique ou un risque d’une telle diminution – Absence de correspondance ou d’équivalence entre avantage octroyé et diminution du budget – Inclusion – Avantage sous forme de plusieurs interventions consécutives entretenant entre elles des liens indissociables – Appréciation des mesures prises dans leur ensemble

(Art. 107, § 1, TFUE et 108 TFUE)

1.        Aux termes des articles 4, paragraphe 4, 6, paragraphe 1, et 13, paragraphe 1, du règlement no 659/1999, portant modalités d’application de l’article 88 CE, la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen d’une aide d’État et une invitation aux parties intéressées à présenter leurs observations sont requises afin tant de déterminer l’objet de la procédure administrative que d’assurer une information de la Commission aussi complète que possible.

Dès lors si, à la suite d’une plainte dénonçant plusieurs mesures prises par le gouvernement d’un État membre parmi lesquelles figurent des déclarations publiques faites par celui-ci, la Commission n’ouvre la procédure formelle d’examen qu’à l’égard de certaines d’entre elles, l’absence de prise de position quant à la qualification en tant qu’aides d’État des déclarations qui ne sont pas visées par ladite ouverture ne saurait être assimilée en soi à une décision rejetant les prétentions du plaignant. Ainsi, en l’absence d’une décision complémentaire de nature à étendre l’objet de la procédure administrative à la question de savoir si ces déclarations constituent, en elles-mêmes, une aide d’État, la Commission ne donne pas suite, par la décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, à ces éléments de la plainte.

(cf. points 70-72, 77, 78)

2.        Seuls les avantages accordés directement ou indirectement au moyen de ressources d’État ou constituant une charge supplémentaire pour l’État sont à considérer comme des aides au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Ainsi, aux fins de la constatation de l’existence d’une aide d’État au sens de cette disposition, la Commission doit établir un lien suffisamment direct entre, d’une part, l’avantage accordé au bénéficiaire et, d’autre part, une diminution du budget étatique, voire un risque économique suffisamment concret de charges le grevant. En revanche, il n’est pas nécessaire qu’une telle diminution, voire un tel risque, corresponde ou soit équivalent audit avantage, ni que ce dernier ait pour contrepartie une telle diminution ou un tel risque, ni qu’il soit de même nature que l’engagement de ressources d’État dont il découle.

En outre, en cas de pluralité d’interventions, les interventions étatiques prenant des formes diverses et devant être analysées en fonction de leurs effets, il ne saurait être exclu que plusieurs interventions consécutives de l’État doivent, aux fins de l’application dudit article 107, paragraphe 1, être regardées comme une seule intervention. Tel peut notamment être le cas lorsque des interventions consécutives présentent, au regard notamment de leur chronologie, de leur finalité et de la situation de l’entreprise au moment de ces interventions, des liens tellement étroits entre elles qu’il est impossible de les dissocier.

(cf. points 99, 100, 103, 104, 109, 110)