Language of document : ECLI:EU:T:2012:674

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

12 décembre 2012 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché du carbure de calcium et du magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier dans l’EEE, à l’exception de l’Irlande, de l’Espagne, du Portugal et du Royaume‑Uni – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE – Fixation des prix et répartition du marché – Imputabilité du comportement infractionnel – Amendes – Plafond de 10 % du chiffre d’affaires – Chiffre d’affaires pertinent – Droits de la défense – Obligation de motivation – Proportionnalité – Lignes directrices pour le calcul du montant des amendes de 2006 – Capacité contributive »

Dans l’affaire T‑392/09,

1. garantovaná a.s., établie à Bratislava (Slovaquie), représentée initialement par MM. M. Powell, solicitor, A. Sutton et Mme G. Forwood, barristers, puis par M. Powell, Mme Forwood, Mes M. Staroň et P. Hodál, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. J. Bourke, N. von Lingen et A. Tokár, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2009) 5791 final de la Commission, du 22 juillet 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/39.396 − Réactifs à base de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier), en ce qu’elle vise la requérante, ainsi que, à titre subsidiaire, une demande de réduction du montant de l’amende infligée à la requérante par ladite décision,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias (rapporteur), juges,

greffier : M. N. Rosner, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 avril 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par sa décision C (2009) 5791 final, du 22 juillet 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/39.396 − Réactifs à base de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier) (ci-après la « décision attaquée »), la Commission des Communautés européennes a constaté que les principaux fournisseurs de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier avaient enfreint l’article 81, paragraphe 1, CE et l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) en participant, du 7 avril 2004 au 16 janvier 2007, à une infraction unique et continue. Celle-ci se traduisait par un partage de marchés, une fixation de quotas, une répartition des clients, une fixation des prix et un échange d’informations commerciales sensibles concernant les prix, les clients et les volumes de vente dans l’EEE, à l’exception de l’Irlande, de l’Espagne, du Portugal et du Royaume‑Uni.

2        La procédure a été ouverte à la suite d’une demande d’immunité, au sens de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3), déposée par Akzo Nobel NV.

3        Novácke chemické závody, a.s. (ci‑après « NCHZ »), établie à Novaky (Slovaquie), produit, notamment, du carbure de calcium. Durant la période concernée par l’infraction, la requérante, 1. garantovaná a.s., détenait une participation directe ou indirecte de plus de 70 % dans NCHZ.

4        À l’article article 1er, sous e), de la décision attaquée, la Commission a constaté que NCHZ et la requérante avaient participé à l’infraction pendant toute sa durée. En outre, à l’article 2, premier alinéa, sous e), de la même décision, la Commission a infligé à la requérante et à NCHZ, conjointement et solidairement, une amende de 19,6 millions d’euros.

5        Pour les motifs exposés aux considérants 221 à 225 de la décision attaquée, la Commission a considéré que, durant la période infractionnelle, la requérante exerçait une influence déterminante sur la politique commerciale de NCHZ et que, par conséquent, la requérante pouvait être tenue pour responsable du comportement illégal de NCHZ.

6        Aux considérants 333 et 334 de la décision attaquée, la Commission a exposé les motifs pour lesquels elle avait décidé d’utiliser le chiffre d’affaires de la requérante de 2007 au lieu de celui de 2008, pour déterminer le plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1).

7        Enfin, au considérant 376 de la décision attaquée, la Commission a exposé les motifs pour lesquels elle avait décidé de rejeter la demande de la requérante de tenir compte de son absence de capacité contributive, au sens du paragraphe 35 des lignes directrices pour la fixation du montant des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci‑après les « lignes directrices»).

 Procédure et conclusions des parties

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 octobre 2009, la requérante a introduit le présent recours.

9        Par ordonnance du 2 mars 2011, 1. garantovaná/Commission (T‑392/09 R, non publiée au Recueil), le président du Tribunal a, à la suite de la demande de la requérante, sursis à l’obligation pour cette dernière de constituer en faveur de la Commission une garantie bancaire pour éviter le recouvrement immédiat de l’amende qui lui a été infligée par l’article 2 de la décision attaquée.

10      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure a invité, premièrement, la Commission à produire un document et, deuxièmement, la requérante à répondre à deux questions. Les parties ont déféré à ces demandes dans le délai imparti.

11      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 25 avril 2012.

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler, en tout ou en partie, la décision attaquée, dans la mesure où celle‑ci la concerne ;

–        à titre subsidiaire, réduire le montant de l’amende qui lui a été infligée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

13      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

14      À l’appui de son recours, la requérante invoque six moyens tirés, premièrement, d’une erreur de droit et de fait en ce que la participation de NCHZ à l’infraction litigieuse lui est imputée, deuxièmement, d’une erreur de droit en ce que la Commission a utilisé, pour déterminer le plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, son chiffre d’affaires de 2007 au lieu de celui de 2008, troisièmement, d’une violation de son droit d’être entendue s’agissant de la question relative au chiffre d’affaires à prendre en compte pour le calcul du plafond de l’amende, quatrièmement, d’une violation de l’obligation de motivation par rapport à la même question, cinquièmement, d’une violation du principe de proportionnalité compte tenu du caractère disproportionné de l’amende qui lui a été infligée et, sixièmement, d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation ainsi que d’une violation des lignes directrices, en ce que la Commission a refusé de tenir compte de son absence de capacité contributive lors de la fixation du montant de l’amende.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur de droit et de fait dans l’imputation à la requérante de la participation de NCHZ à l’infraction litigieuse

15      À titre liminaire, il convient de relever que, lors de l’audience, la Commission a déclaré renoncer à la contestation de la recevabilité du premier moyen, telle qu’elle figurait dans sa défense et tirée du fait que la requérante n’avait pas, dans sa réponse à la communication des griefs, soulevé la question de sa responsabilité pour l’infraction litigieuse, en tant que société mère de NCHZ. En effet, la circonstance invoquée par la Commission n’entraîne pas l’irrecevabilité du présent moyen (voir, en ce sens, arrêt de la cour du 1er juillet 2010, Knauf Gips/Commission, C‑407/08 P, Rec. p. I‑6371, points 89 à 91).

16      Sur le fond, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, la notion d’entreprise désigne toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (voir arrêt de la Cour du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, C‑90/09 P, Rec. p. I‑1, point 34, et la jurisprudence citée).

17      La Cour a également précisé que la notion d’entreprise, placée dans ce contexte, devait être comprise comme désignant une unité économique, même si, du point de vue juridique, cette unité économique est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 16 supra, point 35, et la jurisprudence citée).

18      Lorsqu’une telle entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 16 supra, point 36, et la jurisprudence citée). Toutefois, ainsi que l’a également précisé la Cour, l’infraction au droit de la concurrence doit être imputée sans équivoque à une personne juridique qui sera susceptible de se voir infliger des amendes et la communication des griefs doit être adressée à cette dernière. Il importe également que la communication des griefs indique en quelle qualité une personne juridique se voit reprocher les faits allégués (arrêt de la Cour du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C‑97/08 P, Rec. p. I‑8237, point 57).

19      S’agissant de la question de savoir dans quelles circonstances une personne juridique qui n’est pas l’auteur de l’infraction peut néanmoins être sanctionnée, il résulte d’une jurisprudence constante que le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 16 supra, point 37, et la jurisprudence citée).

20      En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d’une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 81 CE, la Commission peut adresser une décision imposant des amendes à la société mère sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 16 supra, point 38, et la jurisprudence citée).

21      La Cour a également précisé, à cet égard, que, dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence de l’Union, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une telle influence. Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme tenue solidairement au paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 16 supra, points 39 et 40, et la jurisprudence citée).

22      Dans sa requête, la requérante a, notamment, soutenu que la Commission lui avait appliqué à tort la présomption mentionnée au point précédent, alors qu’elle était seulement l’actionnaire majoritaire de NCHZ, sans détenir 100 % de cette société. Toutefois, lors de l’audience, elle a admis que cette affirmation n’était pas exacte et que, en réalité, cette présomption n’avait pas été appliquée dans son cas. Il a été pris acte de cette déclaration dans le procès-verbal de l’audience.

23      Il convient, en effet, de relever que, certes, la décision attaquée contient, dans un paragraphe VI.1.1 intitulé « Principes » (considérants 205 à 207), un rappel de la jurisprudence pertinente en la matière (également rappelée aux points 16 à 21 ci‑dessus) et que, dans ce contexte, la Commission rappelle, au considérant 206 de la décision attaquée, la jurisprudence relative à la présomption applicable aux filiales détenues à 100 %. Toutefois, ce rappel est, à l’évidence, effectué au regard des cas de certains autres participants à l’entente, détenus à 100 % par d’autres destinataires de la même décision (voir, à titre d’exemple, les considérants 209, 216 et 227). En revanche, s’agissant de la requérante, la Commission a exposé, aux considérants 221 à 225 de la décision attaquée, les éléments de fait et de preuve qui permettaient, selon elle, de la tenir pour responsable de l’infraction commise par sa filiale NCHZ, sans recourir, dans son cas, à une quelconque présomption.

24      Il convient, par conséquent, d’examiner l’argumentation de la requérante selon laquelle les éléments visés ci-dessus ne suffisent pas pour justifier l’engagement de sa responsabilité pour le comportement anticoncurrentiel de NCHZ. À cet égard, il y a lieu de relever que, lors de l’audience, la requérante a précisé, au regard de la terminologie quelque peu ambiguë de cette partie de la requête, que le présent moyen visait à contester le bien-fondé de la motivation figurant aux considérants 221 à 225 de la décision attaquée et non l’existence même de cette motivation. Il a été pris acte de cette déclaration dans le procès-verbal de l’audience.

25      Il y a lieu de rappeler que, au considérant 221 de la décision attaquée, la Commission a relevé ce qui suit :

« Durant [la période infractionnelle, la requérante] a exercé une influence déterminante sur la politique commerciale de NCHZ, et [ces deux sociétés] constituaient donc une seule et même entreprise. Cela est démontré par les liens structurels et organisationnels suivants :

–        [l]’assemblée générale de NCHZ, qui prend ses décisions à une majorité de 70 % des votes […], élit le conseil d’administration. Ce conseil compte cinq membres et prend ses décisions à la majorité simple […] Son président était en même temps vice‑président du conseil d’administration de [la requérante] et son vice‑président était aussi président du conseil d’administration de [la requérante]. Durant la période entre 2004 et 2007, il y a eu onze membres différents au sein du conseil, dont neuf ont occupé des fonctions au sein du groupe [de la requérante ;]

–        [l]a grande majorité du conseil de surveillance de NCHZ était composée de représentants de [la requérante ;]

–        [l]e chiffre d’affaires de NCHZ était consolidé dans les comptes de [la requérante], ce qui démontre que les revenus générés par la filiale ont contribué à la performance économique de la société mère. »

26      Il convient de relever, d’emblée, que la requérante ne conteste pas l’exactitude matérielle des faits relatés au considérant 221 de la décision attaquée. Elle soutient, toutefois, que ceux‑ci confirment seulement qu’elle avait le potentiel pour contrôler NCHZ et non, comme l’exige la jurisprudence, qu’elle a réellement et effectivement exercé ce contrôle. La requérante invoque, à cet égard, les déclarations des trois anciens membres de son conseil d’administration qui ont également été des membres du conseil d’administration de NCHZ, qu’elle a produites en annexe à sa requête et fait valoir qu’elles démontrent qu’elle n’a pas exercé un contrôle réel et effectif sur cette dernière société.

27      La requérante fait, en outre, valoir qu’elle est une société d’investissement qui agit comme un simple investisseur financier, sans participer à la gestion courante des entreprises dans lesquelles elle investit et elle reproche à la Commission de ne pas avoir tenu compte de cette circonstance dans la décision attaquée.

28      Enfin, la requérante souligne que NCHZ et elle‑même se sont toujours présentées comme deux sociétés distinctes, avec des noms et des logos différents et une représentation distincte durant la procédure administrative. S’agissant de la consolidation du chiffre d’affaires de NCHZ avec le sien, la requérante explique qu’il s’agit d’une obligation prévue par son droit national, qui ne démontre pas qu’elle exerçait une influence déterminante sur cette société. En outre, le fait, évoqué par la Commission dans ses écrits devant le Tribunal, que le chiffre d’affaires réalisé par NCHZ représenterait une partie significative du chiffre d’affaires consolidé du groupe de la requérante, serait dépourvu de pertinence, dès lors qu’il n’aurait pas été mentionné dans la décision attaquée et qu’il ne donnerait aucune indication sur la valeur, d’ailleurs très réduite, de la participation de la requérante au capital de NCHZ.

29      En vue de l’examen de cette argumentation, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence mentionnée au point 19 ci‑dessus, afin d’imputer à la société mère le comportement anticoncurrentiel d’une filiale, la Commission ne saurait se contenter de constater que ladite société « pouvait » exercer une influence déterminante sur le comportement de sa filiale sur le marché, sans qu’il soit besoin de vérifier si cette influence a effectivement été exercée Au contraire, il lui incombe en principe de démontrer une telle influence déterminante sur la base d’un ensemble d’éléments factuels (voir arrêt du Tribunal du 27 septembre 2006, Avebe/Commission, T‑314/01, Rec. p. II‑3085, point 136, et la jurisprudence citée). Figurent parmi ces éléments le fait que les deux sociétés étaient contrôlées par les mêmes personnes, lesquelles occupaient des fonctions clés au sein de leurs organes de gestion (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, points 119 et 120), ou le fait que lesdites sociétés étaient tenues de suivre les directives émises par leur direction unique sans pouvoir adopter sur le marché un comportement indépendant (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, HFB e.a./Commission, T‑9/99, Rec. p. II‑1487, point 527).

30      Ainsi que l’a jugé la Cour dans son arrêt Knauf Gips/Commission, point 15 supra (point 100), afin d’apprécier si une société détermine de façon autonome son comportement sur le marché, il convient de prendre en considération l’ensemble des éléments pertinents relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques existant entre celle-ci et la société du même groupe qui a été considérée comme responsable pour les agissements dudit groupe, lesquels peuvent varier selon les cas et ne sauraient donc faire l’objet d’une énumération exhaustive.

31      Ce n’est qu’à titre indicatif qu’il peut être mentionné que, dans la jurisprudence, l’analyse de l’existence d’une entité économique unique entre plusieurs sociétés faisant partie d’un groupe a impliqué l’examen de la question de savoir si la société mère avait influencé la politique des prix de sa filiale, les activités de production et de distribution, les objectifs de vente, les marges brutes, les frais de vente, le « cash‑flow », les stocks et le marketing (voir arrêt du Tribunal du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission, T‑112/05, Rec. p. II‑5049, point 64, et la jurisprudence citée).

32      En outre, ainsi que la Commission l’a rappelé dans ses écrits, dans son arrêt du 30 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission (T‑175/05, non publié au Recueil, point 106), le Tribunal a considéré que le fait que le conseil d’administration de la société mère jouait un rôle de coordination de l’ensemble des unités et sous‑unités commerciales de son groupe de filiales constituait un élément qui confirmait l’appréciation selon laquelle la société mère exerçait une influence déterminante sur la politique commerciale de ses filiales.

33      Enfin, il résulte également de la jurisprudence mentionnée au point 19 ci‑dessus que le comportement de la filiale sur le marché ne saurait constituer le seul élément permettant d’engager la responsabilité de la société mère, mais qu’il est seulement l’un des signes de l’existence d’une unité économique (arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, point 18 supra, point 73).

34      En l’espèce, il ressort du premier tiret du considérant 221 de la décision attaquée (voir point 25 ci‑dessus) que, afin d’imputer à la requérante le comportement anticoncurrentiel de sa filiale NCHZ, la Commission s’est, notamment, fondée sur le fait que, en substance, pendant l’ensemble de la période infractionnelle, la plus grande partie des membres du conseil d’administration de NCHZ avait été nommée par la requérante et étaient des personnes occupant parallèlement des « fonctions au sein du groupe [de la requérante] ».

35      Afin de procéder à la vérification de cette constatation, le Tribunal a demandé à la requérante, dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, de lui communiquer la composition du conseil d’administration de NCHZ pendant l’ensemble de la période infractionnelle. Il ressort de la réponse de la requérante à cette question, lue en combinaison avec la réponse, en date du 13 mars 2008, de NCHZ à une demande de renseignements de la Commission, produite par cette dernière en annexe à son mémoire en défense que, du début de la période infractionnelle jusqu’au 25 avril 2005, le conseil d’administration de NCHZ était composé de sept membres, dont six faisaient parallèlement partie du conseil d’administration de la requérante.

36      Le 25 avril 2005, la composition du conseil d’administration de NCHZ a été modifiée. Le mandat de quatre de ses membres, qui étaient tous parallèlement membres du conseil d’administration de la requérante, a pris fin. Seulement deux d’entre eux ont été remplacés dans leur fonction au conseil d’administration de NCHZ, puisque celui-ci ne comptait à partir de cette date que cinq membres. Un des deux nouveaux membres a été nommé peu après, le 27 mai 2005, également au conseil d’administration de la requérante si bien que, à partir de cette dernière date et jusqu’à la modification suivante de la composition du conseil d’administration de NCHZ, qui a eu lieu le 21 juillet 2006, trois de ses cinq membres étaient parallèlement membres du conseil d’administration de la requérante.

37      Le 21 juillet 2006, les mandats de deux membres du conseil d’administration de NCHZ qui n’étaient pas parallèlement membres du conseil d’administration de la requérante ont pris fin. Ils ont été remplacés par deux autres personnes dont l’une était membre du conseil d’administration de la requérante. Ainsi, à partir de cette dernière date et jusqu’à la fin de la période infractionnelle, quatre des cinq membres du conseil d’administration de NCHZ étaient parallèlement membres du conseil d’administration de la requérante.

38      Il convient, par ailleurs, de relever qu’il ressort de l’article X, paragraphe 1, des statuts de NCHZ, produits par la Commission, que le conseil d’administration est l’organe principal de gestion de cette société, habilité à gérer ses activités et, sauf disposition particulière contraire, à prendre des décisions sur toute question la concernant. Le même paragraphe prévoit notamment, sous a), que le conseil d’administration « exerce la gestion commerciale de la société et prend des dispositions sur toutes les questions opérationnelles et d’organisation ».

39      En outre, il ressort de l’article X, paragraphes 2 et 8, des statuts de NCHZ que, comme le relève le considérant 221 de la décision attaquée, le conseil d’administration de cette société est composé de cinq membres et décide à la majorité simple de ses membres.

40      Il ressort de ces éléments que, pendant la quasi-totalité de la période infractionnelle, le conseil d’administration de NCHZ, principal organe décisionnel de cette société, était contrôlé par la requérante, dans la mesure où la majorité des membres de ce conseil étaient des représentants de la requérante. Il s’ensuit que, pendant cette période, le conseil d’administration de NCHZ ne pouvait prendre aucune décision sans l’accord de ses membres qui étaient également membres du conseil d’administration de la requérante. Inversement, les membres dudit conseil qui étaient membres du conseil d’administration de la requérante et avaient été choisis par cette dernière étaient toujours en mesure de former une majorité et de prendre des décisions, sans obtenir l’accord des autres membres.

41      Contrairement à ce que fait valoir la requérante, afin de prouver l’influence déterminante que celle-ci exerçait sur sa filiale NCHZ, la Commission n’était nullement obligée de mentionner, dans la décision attaquée, des décisions concrètes, arrêtées par le conseil d’administration de NCHZ. Dès lors que ce conseil était, selon les statuts de cette société, son principal organe décisionnel et qu’il était effectivement contrôlé par la requérante, il était raisonnable de conclure qu’il prenait toutes les décisions importantes relatives au fonctionnement et à la gestion de NCHZ et que ces décisions étaient, en substance, arrêtées par la requérante en ce sens qu’elles étaient, majoritairement, arrêtées par des personnes siégeant également au sein de son conseil d’administration.

42      Il ne saurait en aller autrement que s’il existait des éléments permettant de conclure que la réalité de la direction et de la gestion de NCHZ était différente de ce qui était prévu dans ses statuts, en ce sens que cette société aurait été, dans les faits, dirigée par d’autres organes ou personnes, non liés à la requérante.

43      Or, une telle conclusion ne peut être tirée des documents invoqués par la requérante à cet égard, à savoir les trois déclarations sous serment établies par MM. R., L. et K. et produites en annexe à la requête. Les auteurs de ces déclarations participaient, pendant la période pertinente, à la fois au conseil d’administration de NCHZ et au conseil d’administration ou au conseil de surveillance de la requérante.

44      Certes, dans leurs déclarations, ils affirment tous ne pas avoir été impliqués dans la gestion « commerciale » de NCHZ. Toutefois, il ressort de leurs affirmations que le conseil d’administration se réunissait régulièrement pendant toute la période infractionnelle. Ainsi, M. K. confirme qu’il participait à des réunions de ce conseil à peu près une fois par mois. En outre, les trois déclarations confirment toutes que les décisions concernant des questions importantes pour NCHZ étaient prises par son conseil d’administration.

45      En particulier, M. R. relève, dans sa déclaration, que le conseil d’administration approuvait « seulement des documents importants, tels que les rapports annuels ou les comptes sociaux » et qu’il « traitait de questions stratégiques telles que le financement, la fermeture d’unités non rentables ou la cession d’actions ». Pour sa part, M. L. a affirmé que le conseil d’administration de NCHZ « s’occupait exclusivement de décisions stratégiques fondamentales, telles que la décision de vendre ou de fermer certaines divisions, la performance financière de NCHZ ainsi que l’approbation des comptes sociaux ou de rapports annuels soumis par le management  de NCHZ ». Enfin, selon M. K. « le rôle principal du conseil d’administration était d’approuver les différents projets d’investissement de la société et d’assurer leur financement, de superviser les résultats financiers et commerciaux de la société et de résoudre d’autres problèmes cruciaux tels que le coût excessif de l’énergie ou les niveaux de cash‑flow notoirement insuffisants ».

46      Il ressort de ces déclarations que la requérante, à travers les personnes qu’elle avait désignées dans le conseil d’administration de NCHZ, influençait les décisions de cette dernière société relatives à des questions importantes et « stratégiques », voire les lui imposait. Or, ce fait démontre incontestablement l’exercice d’une influence déterminante par la requérante sur sa filiale, et ce d’autant plus que certaines des questions qui, selon lesdites déclarations, occupaient le conseil d’administration de cette filiale portaient sur des sujets évoqués par la jurisprudence citée au point 31 ci‑dessus. En effet, les décisions « de vendre ou de fermer certaines divisions » et celles relatives aux « différents projets d’investissement » concernent les activités de production évoquées par cette jurisprudence, le « cash‑flow » étant expressément visé par la même jurisprudence.

47      Il peut, en outre, être déduit de deux des trois déclarations sous serment que l’objectif poursuivi par la nomination, par la requérante, de personnes de son choix au sein du conseil d’administration de NCHZ, était de lui assurer, dans le contexte d’une composition majoritaire, le contrôle sur sa filiale. Ainsi, M. R. relève, dans sa déclaration que « dès lors que NCHZ était un investissement significatif de [la requérante, celle-ci] souhaitait avoir des personnes de son choix dans NCHZ». M. L., pour sa part, déclare que « [sa] tâche au conseil d’administration de NCHZ était surtout de protéger les intérêts de [la requérante] ».

48      À cet égard, il peut être déduit de la jurisprudence mentionnée aux points 30 et 31 ci‑dessus qu’un degré d’autonomie, plus ou moins grand, d’une filiale dans sa gestion commerciale n’est pas nécessairement incompatible avec une influence déterminante, au sens de la jurisprudence citée au point 29, de la société mère sur cette filiale. Ainsi que le confirme la jurisprudence citée au point 32 ci‑dessus, une telle influence déterminante peut également être déduite des liens organisationnels entre la société mère et sa filiale. De ce point de vue, le fait que la société mère contrôle, par des personnes qu’elle a elle-même choisies et qui exercent également des fonctions dans ses propres organes directionnels, l’organe directionnel principal de la filiale, constitue, incontestablement, un lien organisationnel attestant d’une telle influence.

49      L’exercice d’une influence déterminante, par la requérante sur sa filiale NCHZ, n’est pas non plus incompatible avec la délégation des tâches plus ou moins importantes au personnel d’encadrement de cette dernière société, et ce d’autant plus que, selon les statuts de NCHZ, le conseil d’administration de celle-ci, dominé par les représentants de la requérante, avait le droit d’intervenir à tout moment. Il convient, à cet égard, de relever que, dans sa déclaration sous serment, M. R. a déclaré que « [le conseil d’administration] en tant que tel approuvait juste les propositions qui lui étaient soumises par le management ». Il pouvait, donc, très bien décider de s’écarter des propositions de la direction et de prendre une décision différente. Le fait que, le cas échéant, il ait choisi de ne pas le faire ne signifie pas qu’il n’exerçait pas une influence déterminante sur la gestion de NCHZ.

50      En outre, à l’appui de son argument selon lequel elle se comportait, à l’égard de NCHZ, comme un « simple investisseur financier », la requérante a invoqué les conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, point 18 supra (Rec. p. I‑8241, point 75 et note en bas de page n° 67). Celles‑ci évoquent, comme exemple d’une société mère qui « a fait preuve de retenue » et « n’a pas exercé d’influence sur le comportement commercial de sa filiale », le cas où « la société mère est une société d’investissement gérée comme un simple investisseur financier ». Ces conclusions ne fournissent toutefois aucune indication supplémentaire sur les caractéristiques d’un « simple investisseur financier » et se limitent à un renvoi aux conclusions de l’avocat général M. Warner sous l’arrêt de la Cour du 6 mars 1974, Istituto Chemioterapico Italiano et Commercial Solvents/Commission (6/73 et 7/73, Rec. p. 223, 266).

51      Ces dernières conclusions évoquent « l’hypothèse d’une compagnie d’assurances ou d’une société chargée de gérer les intérêts d’un fonds de pension, acquérant par voie d’investissement un intérêt dans une entreprise commerciale qui lui donne un pouvoir de contrôle sur cette entreprise » dans laquelle il serait possible de renverser la présomption mentionnée au point 21 ci‑dessus. Or, en règle générale, les compagnies d’assurances ou les fonds de pension acquièrent des participations dans des sociétés afin d’assurer un placement sécurisé et rentable de leurs actifs, sans toutefois être intéressés par l’exercice d’un contrôle sur les différentes sociétés sur lesquelles ils ont acquis une participation.

52      Il convient donc de comprendre la référence, dans les conclusions de l’avocat général Mme Kokott sous l’arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, point 50 supra, à un « simple investisseur financier » comme visant le cas d’un investisseur qui détient des participations dans une société aux fins de la réalisation d’un profit financier, mais qui s’abstient de toute implication dans sa gestion et dans son contrôle. Tel n’est à l’évidence pas le cas de la requérante, compte tenu des considérations figurant aux points 43 à 49 ci‑dessus, si bien qu’il convient de conclure que, contrairement à ce qu’elle prétend, elle n’a pas agi, en l’espèce, en tant que simple investisseur financier.

53      Ne saurait non plus prospérer l’argumentation avancée par la requérante dans sa réplique selon laquelle, en substance, elle est une société d’investissement dont l’objectif consiste en la réalisation d’un maximum de profit sur ses investissements. La requérante fait valoir, à cet égard, qu’elle acquiert des actifs quand elle voit le potentiel de générer un bénéfice soit par leur détention, soit par leur cession subséquente à un prix supérieur à celui d’acquisition. Elle n’aurait pas acquis NCHZ en vue de son implication dans l’industrie chimique, mais simplement en vue d’une revente subséquente profitable.

54      À cet égard, il convient de relever que, dans son arrêt General Química e.a./Commission, point 16 supra (points 86 et 87), la Cour a jugé qu’une société holding pouvait être considérée comme faisant partie, avec une autre société ayant participé à une infraction aux règles de la concurrence, d’une même unité économique si bien que la société holding pouvait être tenue pour solidairement responsable de ladite infraction. Il en résulte qu’une unité économique, au sens de la jurisprudence citée aux points 16 et 17 ci‑dessus, peut comporter en son sein une société holding et, plus généralement, une société, comme la requérante, dont l’activité consiste en l’acquisition et la détention de participations dans d’autres sociétés.

55      S’agissant de la référence, par la requérante, au fait qu’elle n’avait pas la même représentation que NCHZ durant la procédure administrative et qu’elle s’est toujours présentée comme une société distincte, avec un nom et un logo différents de ceux de NCHZ, il y a lieu de relever que la jurisprudence a certes pu retenir le fait qu’une des sociétés d’un même groupe s’était présentée comme le seul interlocuteur de la Commission au sujet d’une infraction ou le fait qu’une entreprise avait répondu à une demande de renseignements de la Commission en utilisant le papier à lettres d’une autre société du même groupe, pour appuyer la conclusion selon laquelle l’une des deux sociétés concernées exerçait une influence déterminante sur l’autre et qu’elles faisaient toutes les deux partie de la même entité économique (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 novembre 2000, Stora Kopparbergs Bergslags/Commission, C‑286/98 P, Rec. p. I‑9925, point 29, et arrêt du Tribunal du 11 décembre 2003, Minoan Lines/Commission, T‑66/99, Rec. p. II‑5515, points 137 et 138).

56      Toutefois, contrairement à ce que fait valoir la requérante, il ne saurait être déduit a contrario de cette jurisprudence qu’il suffit qu’une filiale ne soit pas représentée par la même personne lors de la procédure administrative et qu’elle ait ses propres nom et logo, distincts de ceux utilisés par sa société mère, pour conclure que cette dernière n’exerce pas une influence déterminante sur la première.

57      Enfin, s’agissant de la référence dans la décision attaquée au fait que le chiffre d’affaires de NCHZ avait été consolidé avec celui réalisé par la requérante, sans qu’il soit nécessaire, au regard des considérations qui précèdent, de déterminer si un tel élément serait, à lui seul, suffisant pour conclure que la requérante exerçait une influence déterminante sur NCHZ, il convient de relever qu’il constitue certainement un élément qui corrobore cette conclusion, et ce quand bien même cette consolidation serait, comme le fait valoir la requérante, obligatoire en vertu des dispositions nationales applicables.

58      Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que le premier moyen n’est pas fondé et doit être rejeté.

 Sur les deuxième, troisième et quatrième moyens relatifs à l’utilisation du chiffre d’affaires de la requérante de 2007 au lieu de celui de 2008 aux fins de la détermination du plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003

 Considérants pertinents de la décision attaquée

59      Aux considérants 333 et 334 de la décision attaquée, la Commission a relevé ce qui suit au sujet du plafond de 10 % du chiffre d’affaires du destinataire d’une décision infligeant une amende, tel qu’il est prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 :

« (333) L’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 dispose que l’amende infligée à une entreprise n’excède pas 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédant la date de la décision de la Commission. Si l’entreprise est scindée avant la date de la décision de la Commission, cette dernière calcule la limite de 10 % séparément pour chaque entité légale […] Pour la détermination de la notion d’‘exercice social précédent’, la Commission doit apprécier, dans chaque cas d’espèce et en tenant compte du contexte ainsi que des objectifs poursuivis par le régime de sanctions établi par le règlement nº [1/2003], l’impact recherché sur l’entreprise concernée, notamment en tenant compte d’un chiffre d’affaires qui reflète la situation économique réelle de celle-ci durant la période au cours de laquelle l’infraction a été commise […]

(334) Sur la base de la jurisprudence visée au considérant (333), [la requérante] fait l’objet d’une appréciation distincte […] En outre, les actionnaires de [la requérante] ont chargé le conseil d’administration en 2007 de vendre tous les actifs (comprenant NCHZ) en vue de terminer ses activités et de distribuer le revenu à ses actionnaires. Si l’on compare à l’année précédente, cela a conduit à une diminution du chiffre d’affaires de plus de 90 % en 2008. Par conséquent, la Commission utilise donc 2007 comme année de référence, et ainsi un chiffre d’affaires de 229 millions EUR ».

60      Dans la note en bas de page n° 664 sous le considérant 333 de la décision attaquée, la Commission renvoie à l’arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Tokai Carbon e.a./Commission (T‑71/03, T‑74/03, T‑87/03 et T‑91/03, non publié au Recueil, point 390), alors que, dans la note en bas de page n° 665 sous le même considérant, elle renvoie, notamment, à l’arrêt du Tribunal du 29 novembre 2005, Britannia Alloys & Chemicals/Commission (T‑33/02, Rec. p. II‑4973, ci-après l’« arrêt Britannia du Tribunal », points 72 à 74), ainsi qu’à l’arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission (C‑76/06 P, Rec. p. I‑4405, ci‑après l’« arrêt Britannia de la Cour », point 25), ayant rejeté le pourvoi contre l’arrêt du Tribunal. Dans la note en bas de page n° 666 sous le considérant 334 de la décision attaquée, il est renvoyé au considérant 23 de la même décision, où il est indiqué que, en 2007, la requérante a cédé sa participation dans NCHZ . Dans la note en bas de page n° 667 sous le considérant 334 de la décision attaquée, il est renvoyé au considérant 24 de la même décision, où est mentionné le chiffre d’affaires annuel de 229 millions d’euros, mentionné à nouveau à la fin du considérant 334.

61      Les deuxième, troisième et quatrième moyens de la requérante concernent cette partie de la décision attaquée. Il convient d’examiner, d’abord, le quatrième moyen, qui a trait à la motivation, ensuite le troisième moyen, qui a trait au droit d’être entendu et, enfin, le deuxième moyen par lequel la requérante reproche à la Commission une erreur de droit en ce qu’elle a décidé d’utiliser, aux fins de la détermination du plafond prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, son chiffre d’affaires réalisé en 2007 au lieu de celui réalisé en 2008.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, s’agissant de la question relative au chiffre d’affaires à prendre en compte pour le calcul du plafond de l’amende

62      La requérante reproche à la Commission de ne pas avoir motivé sa décision de s’écarter de la règle générale relative à la prise en compte de l’exercice social précédent aux fins du calcul du plafond de 10 % prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003. La requérante relève, à cet égard, que la Commission s’est limitée à citer les arrêts Britannia du Tribunal et de la Cour, point 60 supra (ci-après, pris ensemble, « la jurisprudence Britannia »), et à relever que la requérante avait décidé de céder tous ses actifs en vue de la cessation de ses activités. La Commission tirerait, ensuite, la conclusion arbitraire selon laquelle il convenait d’utiliser l’année 2007 comme année de référence. La requérante, rappelle à ce titre que, ainsi qu’elle le soutient dans le cadre de son deuxième moyen, la seule diminution de son chiffre d’affaires ne constitue pas un motif suffisant pour s’écarter de la règle générale relative au calcul du plafond de 10 % du chiffre d’affaires. À supposer que la Commission ait pris en compte d’autres éléments à cet égard, elle ne les aurait pas indiqués dans la décision attaquée.

63      Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien‑fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (voir arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Italie/Commission, T‑239/04 et T‑323/04, Rec. p. II‑3265, point 117, et la jurisprudence citée). En effet, le caractère éventuellement erroné d’une motivation n’en fait pas une motivation inexistante (voir arrêt du Tribunal du 8 juillet 2010, Sevenier/Commission, T‑368/09 P, non encore publié au Recueil, point 25, et la jurisprudence citée).

64      En l’espèce, les motifs pour lesquels la Commission a décidé d’utiliser, aux fins du calcul du plafond de 10 % du chiffre d’affaires, le chiffre d’affaires de la requérante de 2007, plutôt que celui de 2008, sont exposés aux considérants 333 et 334 de la décision attaquée, comme la Commission le fait valoir à juste titre dans son mémoire en défense.

65      En effet, dans sa réplique, la requérante reconnaît elle-même qu’il « ne semble pas être contesté » que les motifs justifiant l’utilisation du chiffre d’affaires de 2007 aux fins du calcul du plafond de 10 % figurent aux considérants 333 et 334 de la décision attaquée. Elle affirme toutefois que, dans son mémoire en défense, la Commission a exposé des considérations additionnelles, qui ne figurent pas dans la décision attaquée.

66      Or, la portée exacte de la motivation figurant dans la décision attaquée ainsi que son bien‑fondé constituent des questions qui se rapportent au fond de l’acte litigieux et seront examinées dans le cadre de l’analyse du deuxième moyen, qui porte précisément sur ces questions. En revanche, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 63 ci‑dessus, les allégations de la requérante relatives à ces questions, à les supposer fondées, ne remettent pas en cause l’existence même de la motivation de la décision attaquée. Il s’ensuit que le quatrième moyen n’est pas fondé et doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du droit de la requérante d’être entendue au sujet de la question relative au chiffre d’affaires à prendre en compte pour le calcul du plafond de l’amende

67      La requérante fait valoir que la décision attaquée a été adoptée en violation de son droit d’être entendue, tel qu’il est prévu par l’article 27 du règlement n° 1/2003 ainsi que par la jurisprudence constante, dans la mesure où la Commission ne lui a pas donné l’occasion de présenter ses observations sur l’utilisation de son chiffre d’affaires de 2007, au lieu de celui de 2008, aux fins du calcul du plafond de l’amende. Elle demande, par conséquent, au Tribunal d’annuler l’article 2 de la décision attaquée en tant qu’il lui est adressé ou, à titre subsidiaire, d’exercer sa compétence de pleine juridiction et de réduire l’amende qui lui a été infligée à un montant n’excédant pas 10 % de son chiffre d’affaires réalisé en 2008.

68      Il y a lieu de souligner que, conformément à une jurisprudence constante, dès lors que la Commission indique expressément, dans sa communication des griefs, qu’elle va examiner s’il convient d’infliger des amendes aux entreprises concernées et qu’elle énonce les principaux éléments de fait et de droit susceptibles d’entraîner une amende, tels que la gravité et la durée de l’infraction alléguée ainsi que la circonstance dans laquelle celle-ci a été commise « de propos délibéré ou par négligence », elle remplit son obligation de respecter le droit des entreprises incriminées d’être entendues. Ce faisant, elle leur donne les éléments nécessaires pour se défendre non seulement contre une constatation de l’infraction, mais aussi contre le fait de se voir infliger une amende (voir arrêt de la Cour du 9 juillet 2009, Archer Daniels Midland/Commission, C‑511/06 P, Rec. p. I‑5843, point 68, et la jurisprudence citée).

69      Il s’ensuit que, en ce qui concerne la détermination du montant des amendes, les droits de la défense des entreprises concernées sont garantis devant la Commission par la possibilité de faire des observations sur la durée, la gravité et le caractère anticoncurrentiel des faits reprochés. Par ailleurs, les entreprises bénéficient d’une garantie supplémentaire, en ce qui concerne la détermination du montant des amendes, dans la mesure où le Tribunal statue avec une compétence de pleine juridiction et peut notamment supprimer ou réduire l’amende, en vertu de l’article 31 du règlement nº 1/2003 (arrêts du Tribunal du 6 octobre 1994, Tetra Pak/Commission, T‑83/91, Rec. p. II‑755, point 235, et du 20 mars 2002, LR AF 1998/Commission, T‑23/99, Rec. p. II‑1705, point 200).

70      En l’espèce, ainsi que cela résulte de la copie de la communication des griefs, telle qu’elle figure dans le dossier de la présente affaire, celle-ci mentionnait bien les éléments exigés par la jurisprudence citée aux deux points précédents.

71      La requérante a connaissance de la jurisprudence citée au point 68 ci-dessus, qu’elle cite elle-même dans ses écrits. Elle considère, toutefois, en se fondant sur l’arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, ABB Asea Brown Boveri/Commission (T‑31/99, Rec. p. II‑1881, points 77 et 78), qu’elle est applicable dans des cas où la Commission a déterminé le montant de l’amende infligée selon la méthode générale énoncée dans les lignes directrices. Or, en l’espèce, la Commission se serait écartée desdites lignes directrices lesquelles prévoient, au paragraphe 32, la prise en considération du chiffre d’affaires de l’exercice social précédent aux fins du calcul du plafond de l’amende. Il s’ensuivrait que la Commission aurait dû indiquer à l’avance ses intentions à cet égard aux entreprises concernées, exposer les arguments de droit et de fait à l’origine de cette intention et mettre celles-ci en mesure de présenter leur point de vue.

72      Force est de constater que la requérante fait une lecture erronée de l’arrêt ABB Asea Brown Boveri/Commission, point 71 supra (points 77 et 78). Bien que consécutifs, ces deux points ne présentent aucun lien logique entre eux. Au point 77 dudit arrêt, le Tribunal s’est limité à constater, à titre liminaire, qu’il n’était pas contesté que le montant de l’amende imposée dans cette affaire avait été déterminé selon la méthode énoncée dans les lignes directrices de la Commission. Au point suivant, en l’occurrence le point 78, le Tribunal a rappelé la jurisprudence constante, également rappelée au point 68 ci-dessus. Rien dans l’arrêt ABB Asea Brown Boveri/Commission, point 71 supra, n’indique que cette jurisprudence constante est uniquement applicable dans des cas où la Commission s’est tenue à ses propres lignes directrices. Au contraire, le Tribunal a notamment jugé, dans ce même arrêt, que la Commission n’était pas obligée, pour respecter le droit d’être entendue de la requérante dans cette affaire, de lui annoncer son intention d’appliquer, à son cas, de nouvelles lignes directrices, adoptées après la notification de la communication des griefs (arrêt ABB Asea Brown Boveri/Commission, point 71 supra, point 88).

73      Il ressort, en effet, d’une jurisprudence constante que la Commission n’est pas obligée, dès lors qu’elle a indiqué les éléments de fait et de droit sur lesquels elle baserait son calcul du montant des amendes, de préciser la manière dont elle se servirait de chacun de ces éléments pour la détermination du niveau de l’amende (arrêts du Tribunal LR AF 1998/Commission, point 69 supra, point 206, et du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich e.a./Commission, T‑259/02 à T‑264/02 et T‑271/02, Rec. p. II‑5169, point 369).

74      De manière plus générale, il y a lieu de considérer que l’appréciation des faits relève de l’acte décisionnel même et que le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non à la position finale que l’administration entend adopter (arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, BASF/Commission, T‑15/02, Rec. p. II‑497, point 94).

75      La requérante fait également valoir que la communication des griefs évoquait expressément la règle générale relative au calcul de l’amende sur la base du chiffre d’affaires de l’année précédente et ne mentionnait pas la possibilité que la Commission s’en écarte. De même, dans sa demande de renseignements du 9 mars 2009, la Commission aurait de nouveau fait allusion à ladite règle et aurait expressément demandé à la requérante de lui communiquer son chiffre d’affaires relatif au « dernier exercice complet ». La requérante aurait répondu en communiquant, par courriel du 30 mars 2009, son chiffre d’affaires de l’exercice 2007, mais au seul motif qu’elle n’avait pas encore déclaré son chiffre d’affaires pour l’exercice 2008. Toutefois, en réponse à une demande de renseignements ultérieure, transmise à la requérante par la Commission par courrier électronique du 7 mai 2009, la requérante aurait, par lettre du 11 mai 2009, communiqué à la Commission son chiffre d’affaires pour l’exercice 2008.

76      La requérante considère, par conséquent, que la Commission devait lui donner l’occasion d’être entendue sur les éléments principaux de fait sur lesquels elle s’est basée pour justifier sa décision d’utiliser l’année 2007 comme année de référence pour le calcul du plafond de l’amende qu’elle allait lui imposer. La requérante invoque, à l’appui de son argumentation, l’arrêt Archer Daniels Midland/Commission, point 68 supra.

77      Il y a lieu de relever que, si les affirmations de la requérante résumées au point 75 ci‑dessus sont exactes, elle omet de faire référence au fait que les informations figurant au considérant 334 de la décision attaquée, relatives au mandat donné au conseil d’administration de la requérante par ses actionnaires pour céder tous ses actifs en vue de cesser ses activités, trouvent leur origine dans une lettre du 3 avril 2009 qu’elle a elle-même adressée à la Commission. Cette lettre faisait suite à la demande de renseignements de la Commission du 9 mars 2009 et complétait la réponse initiale de la requérante, envoyée par le courriel du 30 mars 2009.

78      Il s’ensuit que les éléments pris en considération par la Commission pour le calcul du plafond de l’amende à imposer à la requérante, à savoir tant les chiffres d’affaires réalisés par cette dernière en 2007 et en 2008 que les informations relatives à la cession de ses actifs en vue de la cessation de ses activités, ont tous été fournis par la requérante elle-même. Ainsi, ce que celle-ci semble soutenir par le présent moyen est que la Commission aurait dû la prévenir de son intention de se fonder sur les informations qu’elle avait elle-même fournies par sa lettre du 3 avril 2009, pour faire application, dans la présente espèce, de la jurisprudence Britannia et lui donner l’occasion de présenter ses observations sur cette éventualité. Or, les conséquences juridiques que la Commission va tirer de l’examen des faits pertinents d’une affaire relèvent de la position finale qu’elle entend adopter, laquelle n’est pas concernée par le droit d’être entendu, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 74 ci‑dessus.

79      En effet, une partie qui a elle-même produit les éléments de fait en cause a, par hypothèse même, été pleinement en mesure d’exposer, à l’occasion de ladite production, la pertinence éventuelle que revêtent ceux-ci pour la solution de l’affaire (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 19 janvier 2012, OHMI/Nike International, C‑53/11 P, non encore publiée au Recueil, point 53 ; voir, en ce sens et par analogie, ordonnance de la Cour du 4 mars 2010, Kaul/OHMI, C‑193/09 P, non publiée au Recueil, point 66).

80      Quant à l’arrêt Archer Daniels Midland/Commission, point 68 supra, invoqué par la requérante, il n’est nullement pertinent. Dans cette affaire, la Cour a considéré que la Commission n’avait pas respecté les droits de la défense de l’entreprise concernée, dès lors qu’elle n’avait pas mentionné, dans la communication des griefs, les faits sur lesquels elle s’était ensuite fondée dans la décision litigieuse, mais avait simplement annexé à ladite communication les documents dont résultaient ces faits, ce qui, selon la Cour, n’était pas suffisant dans les circonstances de cette espèce (arrêt Archer Daniels Midland/Commission, point 68 supra, points 81, 82 et 89). Or, les circonstances de la présente affaire ne sont en rien comparables, dans la mesure où, en l’espèce, la Commission s’est fondée, au considérant 334 de la décision attaquée, sur une affirmation de nature factuelle de la requérante elle‑même.

81      Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le troisième moyen comme étant non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit en ce que la Commission a utilisé, pour déterminer le plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, le chiffre d’affaires de la requérante de 2007 au lieu de celui de 2008

82      La requérante fait valoir que les circonstances de la présente affaire ne relèvent pas des « circonstances exceptionnelles » envisagées dans la jurisprudence Britannia. Selon la requérante, dans le respect du principe de sécurité juridique et en tenant également compte de l’objectif du plafond de l’amende prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, cette notion de « circonstances exceptionnelles » doit faire l’objet d’une application stricte. Ainsi, il ressortirait clairement de l’arrêt Britannia du Tribunal, point 60 supra (point 49), que, dès qu’une entreprise aurait en fait réalisé un chiffre d’affaires pendant le dernier exercice social complet précédant l’adoption de la décision infligeant une amende, pendant lequel des activités économiques, bien que réduites, auraient été exercées, la Commission devrait calculer le plafond de l’amende en tenant compte de ce chiffre d’affaires. Tant l’arrêt Britannia de la Cour, point 60 supra (point 30), que les conclusions de l’avocat général M. Bot sous cet arrêt (Rec. p. I‑4408, points 62 à 65) confirmeraient cette thèse.

83      En l’espèce, à la différence de ce qui aurait été le cas dans l’affaire ayant donné lieu à la jurisprudence Britannia, la requérante n’aurait ni décidé de cesser ses activités ni, encore moins, commencé à mettre en œuvre une telle décision. La requérante précise, à cet égard, que, si son assemblée générale a effectivement décidé en 2007 de vendre un certain nombre d’actifs, aucune décision relative à la dissolution de la société n’a été prise. En parvenant, au considérant 334 de la décision attaquée, à la conclusion contraire, la Commission aurait commis une erreur. Elle se serait fondée, à cet égard, sur une déclaration unique et ambiguë faite par la requérante, de manière incidente, dans ses observations relatives à son absence de capacité contributive. La requérante n’aurait pas pu fournir les clarifications nécessaires sur cette déclaration, n’ayant pas été consciente des intentions de la Commission de prendre en considération l’exercice 2007 aux fins du calcul du plafond de l’amende.

84      La requérante ajoute que, en 2008, elle a réalisé un chiffre d’affaires de 21 millions d’euros, correspondant à une année entière d’activité économique normale. Elle aurait communiqué ce chiffre à la Commission le 11 mai 2009, en réponse à une demande de renseignements. Selon la requérante, insister sur la diminution significative de son chiffre d’affaires entre 2007 et 2008 donne une impression particulièrement trompeuse. Cette diminution ne résulterait pas d’un détournement, par la requérante, de son chiffre d’affaires, mais de la décision de vendre sa participation dans NCHZ, en vue de réaliser la valeur de cet investissement qui ne générerait pas le profit escompté. Selon la requérante, il n’est pas surprenant qu’une société d’investissement achète et vende les sociétés comprises dans son portefeuille en fonction de la situation du marché et c’est ainsi qu’elle a décidé de modifier son portefeuille d’investissements et d’investir le capital réalisé dans des prêts à long terme. Ces prêts, conclus en 2009, seraient dénués de pertinence pour le calcul de son chiffre d’affaires en 2007 et en 2008.

85      Par conséquent, la requérante considère que la Commission a commis une erreur de droit en retenant son chiffre d’affaires de 2007 aux fins du calcul du plafond de l’amende qui lui a été infligée et demande au Tribunal d’annuler l’article 2 de la décision attaquée ou, à titre subsidiaire, de réduire, dans l’exercice de ses pouvoirs de pleine juridiction, ladite amende à un montant ne dépassant pas 10 % de son chiffre d’affaires réalisé en 2008, à savoir 2,1 millions d’euros.

86      Il y a lieu de relever qu’il ressort de la jurisprudence Britannia que, aux fins du calcul du plafond de l’amende prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission doit, en principe, prendre en considération le chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise concernée lors du dernier exercice complet à la date de l’adoption de la décision infligeant l’amende. Il résulte toutefois du contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont ladite disposition fait partie que, lorsque le chiffre d’affaires de l’exercice social qui précède l’adoption de la décision de la Commission ne représente pas un exercice complet d’activité économique normale pendant une période de douze mois et, ainsi, ne donne aucune indication utile sur la situation économique réelle de l’entreprise concernée et le niveau approprié de l’amende à lui infliger, ledit chiffre d’affaires ne peut pas être pris en considération aux fins de la détermination du plafond de l’amende. Dans cette dernière hypothèse, qui ne se produira que dans des circonstances exceptionnelles, la Commission est obligée de se référer, aux fins du calcul du plafond de l’amende, au dernier exercice social complet reflétant une année complète d’activités économiques normal (arrêt du Tribunal Britannia, point 60 supra, points 37 à 42, 48 à 51 et 74, et arrêt de la Cour Britannia, point 60 supra, points 25 à 30).

87      L’argument de la requérante, tel qu’il est résumé au point 82 ci‑dessus, selon lequel, dès qu’une entreprise aurait réalisé un chiffre d’affaires pendant le dernier exercice social complet précédant l’adoption de la décision infligeant une amende, ce serait ce chiffre d’affaires qu’il conviendrait de prendre en considération aux fins de la détermination du plafond de l’amende, est fondé sur une lecture partielle de l’arrêt Britannia du Tribunal, point 60 supra, et ne saurait prospérer. Le point 49 de cet arrêt, invoqué par la requérante, envisage l’hypothèse où, lors d’un exercice social normal en termes d’activités économiques, le chiffre d’affaires d’une entreprise a baissé d’une façon importante, voire substantielle, par rapport aux années précédentes, pour des raisons telles qu’un contexte économique difficile, une crise dans le secteur en cause, un sinistre ou une grève. Le Tribunal a relevé que ces éventualités ne faisaient pas obstacle à la prise en considération du chiffre d’affaires réalisé lors d’un tel exercice social aux fins du calcul du plafond de l’amende. Il résulte, toutefois, du point 50 du même arrêt qu’il en va autrement dans l’hypothèse où l’entreprise concernée n’aurait pas exercé ses activités normales au cours de l’ensemble d’un exercice social, mais était en train de cesser ses activités commerciales. Comme le fait valoir à juste titre la Commission, cette conclusion est confirmée par le fait que, dans son arrêt Britannia, le Tribunal a approuvé la référence, aux fins du calcul du plafond de l’amende, au chiffre d’affaires de l’entreprise concernée pour l’exercice social 1996, alors que, ainsi qu’il ressort du point 47 dudit arrêt, l’entreprise en cause avait réalisé un chiffre d’affaires, quoique réduit, également lors des deux exercices suivants, à savoir 1997 et 1998.

88      Il convient, par ailleurs de relever, compte tenu des références de la requérante, d’une part, à l’objectif poursuivi par l’article 23, paragraphe 2, du règlement no 1/2003 et, d’autre part, au principe de sécurité juridique, que l’interprétation de ladite disposition telle qu’elle résulte de la jurisprudence Britannia, résumée au point précédent, découle précisément de son objectif et n’est aucunement contraire au principe de sécurité juridique (voir, en ce sens, arrêt Britannia de la Cour, point 60 supra, points 21 à 25 et 79 à 84, et arrêt Britannia du Tribunal, point 60 supra, points 43, 45 et 69 à 74).

89      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel insister sur son seul chiffre d’affaires donnerait une impression particulièrement trompeuse, dans la mesure où la chute significative de ce chiffre entre 2007 et 2008 serait principalement due à la vente de sa participation dans NCHZ, il suffit de relever que le chiffre d’affaires est le seul critère pertinent, prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, pour le calcul du plafond de l’amende.

90      Il ressort des considérations qui précèdent que la question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si le chiffre d’affaires réalisé par la requérante lors de l’exercice social 2008 représente un exercice complet d’activités économiques normal pendant une période de douze mois. La décision attaquée a répondu par la négative à cette question, pour les motifs indiqués au considérant 334, lequel reprend, pour l’essentiel, les indications données par la requérante elle-même dans sa lettre du 3 avril 2009, adressée à la Commission (voir point 77 ci‑dessus).

91      Il convient à cet égard de relever, d’emblée, que c’est à tort que la requérante qualifie ces indications d’ambiguës. La teneur du paragraphe pertinent de sa lettre du 3 avril 2009 n’est aucunement ambivalente. Il y est indiqué clairement que, lors de l’assemblée générale ordinaire du 20 juin 2007, les actionnaires de la requérante ont adopté une résolution qui a donné mandat au conseil d’administration de vendre ses actifs. Ce même paragraphe poursuit avec l’indication que cette mesure constituait la première étape d’une procédure devant conduire à la cessation des activités de la requérante et son objectif était de simplifier la « structure » du patrimoine de la requérante lequel, après l’exécution de cette mesure, serait constitué de sommes liquides placées sur un compte, qui seraient ensuite distribuées proportionnellement entre les actionnaires.

92      L’information relative au mandat donné par l’assemblée générale au conseil d’administration de la requérante en vue de la vente des actifs est tout à fait exacte, ainsi que le démontre le procès-verbal de ladite assemblée, produit par la requérante elle-même. Il convient par ailleurs de préciser que, ainsi qu’il ressort dudit procès-verbal, le mandat concernait la vente de « l’ensemble ou d’une partie » des actifs de la requérante. Contrairement donc à ce que cette dernière fait valoir, il ne s’agissait pas uniquement de la vente « d’un certain nombre d’actifs », mais, au moins potentiellement, de la vente de l’ensemble de ses actifs.

93      Il ressort en effet des éléments du dossier que, en vertu de ce mandat, la requérante a vendu une grande partie de ses actifs, voire l’ensemble de ceux-ci. Dans son mémoire en défense, la Commission a fourni une liste des principaux éléments composant l’actif de la requérante et que celle-ci aurait vendus et elle a également produit une copie d’un article en langue slovaque, paru le 25 avril 2009 dans le journal slovaque Pravda, selon lequel la requérante aurait « déjà vendu tous ses actifs » et disposerait de la somme de 63,23 millions d’euros dans ses comptes. Le même article fournit une liste des différents éléments d’actifs vendus par la requérante.

94      Cette dernière n’a pas contesté l’exactitude matérielle de ces informations dans sa réplique et a même produit une traduction de l’article du journal Pravda dans la langue de procédure. Elle s’est limitée à relever que cet article, dans la mesure où il faisait référence à une assemblée générale qui allait prochainement être tenue afin de décider du sort de la requérante, prouvait qu’aucune décision relative à sa dissolution n’avait été prise en 2008.

95      Dans ses écrits, la requérante s’efforce, en outre, de présenter la vente de ses actifs comme faisant partie de l’activité normale d’une société d’investissements. Toutefois, cet argument ne saurait prospérer.

96      Premièrement, il a déjà été relevé dans le cadre de l’examen du premier moyen (voir, notamment, point 52 ci‑dessus) que, en ce qui concernait sa participation dans NCHZ, la requérante n’agissait pas comme un « simple investisseur financier » mais, au contraire, faisait partie d’une même unité économique que cette société.

97      Deuxièmement, si la vente par la requérante, en 2008, d’éléments de son actif faisait partie de son activité commerciale habituelle, il est difficile de comprendre pourquoi un mandat spécial à cet effet a été donné par l’assemblée générale au conseil d’administration.

98      Troisièmement, alors qu’une société d’investissements, dans le cadre de son activité commerciale normale, procède aussi bien à des ventes qu’à des achats de participations dans d’autres sociétés, en l’espèce, il ne ressort nullement des affirmations de la requérante ou des éléments du dossier que celle-ci a acquis une quelconque participation dans une autre société en 2008, et ce en dépit du fait qu’elle disposait apparemment des liquidités suffisantes pour de tels achats, réalisées par la vente des éléments de son actif.

99      Quatrièmement, tant la lettre du 3 avril 2009 que les autres éléments du dossier confirment que la vente de l’actif de la requérante, à la suite de la décision de son assemblée générale du 20 juin 2007, ne s’inscrivait pas dans le cadre de son activité économique normale. Ces ventes visaient plutôt à réaliser la valeur des éléments d’actif concernés, c’est-à-dire leur transformation en argent liquide. Il en ressort également que la distribution des fonds ainsi obtenus aux actionnaires de la requérante et la dissolution de cette dernière, bien que non formellement décidée, étaient, à tout le moins, une option sérieusement envisagée.

100    Ainsi, la lettre du 3 avril 2009 relève clairement que la vente des actifs de la requérante n’était que la première étape d’une procédure devant conduire à la distribution du produit de ladite vente au bénéfice des actionnaires de la requérante et à la dissolution de cette dernière. L’article du journal Pravda évoqué ci‑dessus (point 93) relève qu’une assemblée générale, qui allait être tenue à la fin du mois d’avril 2009, déciderait du sort de la requérante et attribue les propos suivants au président du conseil d’administration de la requérante : « Les actionnaires décideront si [la requérante] sera mise en liquidation ou si elle continuera à gérer son actif en vue de son appréciation. »

101    Enfin, la requérante a produit en annexe à son mémoire en réplique un article paru, selon elle, sur son site Internet le 1er juillet 2009. Selon cet article, lors de l’assemblée générale annuelle de la requérante tenue la veille, soit le 30 juin 2009, ses actionnaires avaient mandaté son conseil d’administration de convoquer une nouvelle assemblée générale extraordinaire, en vue de décider du « développement futur de la société, tel que sa dissolution, le rachat de ses actions » ou d’autres approches alternatives, qui pourraient impliquer aussi bien la continuation de l’activité commerciale de la requérante que la fin de cette activité avec le versement, aux actionnaires, de la valeur de leurs actions.

102    La requérante insiste sur l’absence de décision de l’assemblée générale relative à sa dissolution. Elle considère que, à défaut d’une telle décision, la jurisprudence Britannia ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce. Elle reproche à la Commission de s’être fondée sur les seules indications figurant dans la lettre du 3 avril 2009, sans examiner si l’assemblée générale de la requérante avait effectivement décidé la dissolution de celle-ci. Pour sa part, la Commission soutient qu’elle était en droit de se fonder sur la lettre du 3 avril 2009, envoyée en réponse à une demande d’information. Il ne saurait raisonnablement être exigé de sa part qu’elle vérifie l’exactitude d’une information fournie par l’intéressée elle-même.

103    Il y a lieu de relever que, certes, l’inexistence d’une décision relative à la dissolution de la requérante découle, implicitement mais nécessairement, de la lettre du 3 avril 2009. En effet, dans la mesure où la dissolution d’une société implique la réalisation de son actif en vue du paiement de ses dettes éventuelles et, par la suite, la distribution du solde à ses actionnaires, si l’assemblée générale de la requérante avait décidé la dissolution de la requérante, la décision du 20 juin 2007, qui a donné mandat au conseil d’administration de la requérante de procéder à la vente des éléments d’actif de celle-ci, aurait été superflue et dépourvue de sens.

104    Toutefois, même en l’absence d’une décision de l’assemblée générale relative à la dissolution de la requérante, c’est à bon droit que la Commission a fait application de la jurisprudence Britannia en l’espèce, dans la mesure où le chiffre d’affaires réalisé par la requérante lors de l’exercice 2008 ne représentait pas un exercice complet d’activités économiques normal, au sens de cette jurisprudence.

105    Il ressort, en effet, des considérations exposées ci‑dessus (voir points 95 à 101) que, en exécution de la décision prise lors de son assemblée générale du 20 juin 2007, la requérante a vendu, lors de l’exercice 2008, les éléments de son actif et a transformé leur valeur en argent liquide, ce qui lui permettait d’envisager sérieusement, au moins comme une des options possibles, sa dissolution avec la distribution de son actif restant à ses actionnaires. Force est de constater qu’un tel comportement, lequel au demeurant et ainsi que le fait valoir à juste titre la Commission a provoqué une chute très significative du chiffre d’affaires de la requérante entre 2007 et 2008, ne s’inscrit pas dans le cadre des activités économiques normales d’une société commerciale.

106    Il importe peu, à cet égard, que les actionnaires de la requérante n’aient finalement pas opté pour la dissolution immédiate de celle-ci. L’important est que, en 2008, le comportement de cette société ait été celui d’une société en train de cesser ses activités, avec les conséquences liées à ce comportement telles qu’elles sont exposées au point 105 ci-dessus, tout comme la requérante dans l’affaire ayant donné lieu à la jurisprudence Britannia. Ce comportement est suffisant pour justifier l’application, en l’espèce, de cette jurisprudence.

107    Ne saurait non plus conduire à une conclusion différente l’affirmation de la requérante selon laquelle elle aurait décidé de « modifier son portefeuille d’investissements » et d’investir, ainsi, son capital dans des prêts à long terme. À supposer même que ces prêts relèvent de l’exercice d’une activité économique normale de la requérante, celle-ci admet elle-même que lesdits prêts ont été conclus en 2009. Rien dans le dossier n’indique que les gestionnaires ou les actionnaires de la requérante avaient, en 2007 ou en 2008, pris la décision de réorienter l’activité économique de celle-ci vers de tels prêts. Au contraire et ainsi qu’il a déjà été relevé (voir point 105), plusieurs éléments confirment que, en 2008, la requérante était en train de cesser les activités qu’elle exerçait et de réaliser la valeur de ses actifs, en envisageant sérieusement une dissolution et une distribution de la valeur ainsi réalisée à ses actionnaires. Le fait que, un an plus tard, elle ait finalement préféré investir la valeur ainsi réalisée sous forme de prêts à long terme est, à cet égard, dépourvu de pertinence.

108    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que, ayant retenu à bon droit que le chiffre d’affaires de l’exercice social 2007, et non celui de l’exercice social 2008, constituait le dernier exercice d’activité reflétant la situation économique réelle de la requérante, la Commission pouvait, sans commettre d’erreur de droit, retenir le chiffre d’affaires de la requérante de 2007 aux fins de la détermination du plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003. Partant, le deuxième moyen n’est pas fondé et doit, par conséquent, être rejeté.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité compte tenu du caractère disproportionné du montant de l’amende infligée à la requérante

109    Par son cinquième moyen, la requérante fait valoir que si les sanctions prévues au règlement n° 1/2003 constituent, selon la jurisprudence, un instrument clé dont dispose la Commission pour veiller à la mise en place d’un régime assurant que la concurrence n’est pas faussée dans le marché intérieur, ainsi que l’exige l’article 3, paragraphe 1, sous g), CE, cela ne signifie pas que l’imposition de lourdes amendes en cas de violation des règles de la concurrence permette, en toute hypothèse, d’atteindre un tel objectif. Au contraire, selon la requérante, dans le respect du principe de proportionnalité, la Commission doit également tenir compte de l’objectif de stimulation de la concurrence et s’abstenir d’adopter des décisions qui iraient à l’encontre de la réalisation de cet objectif, par exemple en créant un monopole sur un marché donné. À l’appui de son argumentation, la requérante se réfère à l’exemple mentionné dans les conclusions de l’avocat général M. Geelhoed sous l’arrêt de la Cour du 29 juin 2006, Showa Denko/Commission (C‑289/04 P, Rec. p. I‑5859, I‑5863, point 61 et note en bas de page n° 15), qui concerne une entente impliquant plusieurs petits acteurs sur le marché ainsi qu’un acteur majeur bénéficiant d’une immunité en raison de sa coopération avec la Commission, où l’imposition, par cette dernière, des amendes très élevées aux petits acteurs pourrait provoquer leur disparition du marché et la création d’un monopole.

110    La requérante considère que, en l’espèce, l’effet d’ensemble produit par la décision attaquée va précisément à l’encontre de l’objectif poursuivi par l’article 3, paragraphe 1, sous g), CE, dans la mesure où des amendes significatives ont été infligées à un certain nombre de petites entreprises mettant en péril leur existence, alors que Akzo Nobel, la plus grande société sur le marché, a bénéficié d’une immunité. Ainsi, selon la requérante, la décision attaquée aura pour effet de réduire le nombre de concurrents sur le marché et de renforcer la position d’Akzo Nobel, ce qui pourrait conduire à une position dominante, voire à un monopole de cette dernière société.

111    La requérante évoque, dans le même contexte, le fait que six des destinataires de la décision attaquée ont demandé à la Commission de prendre en considération leur absence de capacité contributive, au sens du paragraphe 35 des lignes directrices, le fait que, peu avant l’introduction de la requête, NCHZ a demandé, en vertu du droit national applicable, une protection à l’égard de ses créanciers, ainsi que le fait que, d’après des informations publiées sur Internet, deux autres destinataires de la décision attaquée ont présenté des demandes en référé devant le Tribunal, faisant valoir qu’ils seraient confrontés à une faillite s’ils étaient contraints de payer l’amende. La requérante en conclut que l’amende imposée par la décision attaquée à NCHZ et à elle-même est disproportionnée et elle invite le Tribunal, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, à l’annuler ou à la réduire.

112    Il convient de rappeler que la Commission dispose d’une marge d’appréciation dans la fixation du montant des amendes afin d’orienter le comportement des entreprises dans le sens du respect des règles de concurrence (voir arrêt du Tribunal du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑236/01, T‑239/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, Rec. p. II‑1181, point 216, et la jurisprudence citée).

113    Toutefois, à chaque fois que la Commission décide d’imposer des amendes en vertu du droit de la concurrence, elle est tenue de respecter les principes généraux de droit, parmi lesquels figurent les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, tels qu’interprétés par les juridictions de l’Union [arrêt du Tribunal du 13 juillet 2011, Schindler Holding e.a./Commission (T‑138/07, non encore publié au Recueil, point 105].

114    Aux termes de l’article 23, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003, pour déterminer le montant de l’amende, la Commission prend en considération, outre la gravité de l’infraction, la durée de celle-ci. Il résulte de la jurisprudence que, dans ce contexte, la Commission doit notamment veiller au caractère dissuasif de son action (arrêt de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 106, et arrêt du Tribunal du 5 avril 2006, Degussa/Commission, T‑279/02, Rec. p. II‑897, point 272).

115    La nécessité d’assurer un effet dissuasif suffisant à l’amende, lorsqu’elle ne motive pas l’élévation du niveau général des amendes dans le cadre de la mise en œuvre d’une politique de concurrence, exige que le montant de l’amende soit modulé afin de tenir compte de l’impact recherché sur l’entreprise à laquelle elle est infligée, et ce afin que l’amende ne soit pas rendue négligeable, ou au contraire excessive, notamment au regard de la capacité financière de l’entreprise en question, conformément aux exigences tirées, d’une part, de la nécessité d’assurer l’effectivité de l’amende et, d’autre part, du respect du principe de proportionnalité (arrêts du Tribunal Degussa/Commission, point 114 supra, point 283, et du 18 juin 2008, Hoechst/Commission, T‑410/03, Rec. p. II‑881, point 379).

116    Ainsi, il ne saurait être exclu que, dans le respect de cette jurisprudence, la Commission décide, dans un cas particulier, de réduire l’amende à infliger pour une infraction aux dispositions de l’article 81 CE, afin d’éviter la situation envisagée dans les conclusions de l’avocat général M. Geelhoed sous l’arrêt Showa Denko/Commission, point 109 supra, invoquées par la requérante.

117    Par ailleurs, il convient de rappeler que le paragraphe 35 des lignes directrices permet à la Commission, dans des circonstances exceptionnelles et si les conditions prévues à cet effet par ce point sont remplies, de tenir compte de l’absence de capacité contributive d’une entreprise.

118    Cela étant rappelé, il y a lieu de relever également qu’il a itérativement été jugé que la Commission n’était pas, en principe, obligée de tenir compte, lors de la détermination du montant de l’amende, de la situation financière déficitaire d’une entreprise, étant donné que la reconnaissance d’une telle obligation reviendrait à procurer un avantage concurrentiel injustifié aux entreprises les moins adaptées aux conditions du marché (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 29 supra, point 327 ; arrêts du Tribunal du 19 mars 2003, CMA CGM e.a./Commission, T‑213/00, Rec. p. II‑913, point 351, et du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, point 112 supra, point 370).

119    Par ailleurs, le fait qu’une mesure prise par une autorité de l’Union provoque la faillite ou la liquidation d’une entreprise donnée n’est pas interdit, en tant que tel, par le droit de l’Union. En effet, la liquidation d’une entreprise sous sa forme juridique en cause, si elle peut porter atteinte aux intérêts financiers des propriétaires, actionnaires ou détenteurs de parts, ne signifie pas pour autant que les éléments personnels, matériels et immatériels représentés par l’entreprise perdraient eux aussi leur valeur (arrêts du Tribunal du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, point 112 supra, point 372 ; du 29 novembre 2005, Heubach/Commission, T‑64/02, Rec. p. II‑5137 point 163, et du 28 avril 2010, BST/Commission, T‑452/05, Rec. p. II‑1373, point 96).

120    C’est à la lumière de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner l’argumentation avancée par la requérante dans le cadre du présent moyen.

121    À cet égard, il y a lieu de relever, à titre liminaire, que, dans ses écrits, la Commission conteste, en substance, le caractère opérant du présent moyen. Elle rappelle que la requérante a quitté le marché du carbure de calcium, si bien que l’amende qui lui a été infligée ne saurait, en tout état de cause, remettre en question sa capacité à opérer sur ce marché. S’agissant du caractère prétendument disproportionné des amendes infligées aux autres participants à l’entente dont, notamment, NCHZ, il ne saurait être invoqué par la requérante, dont le recours contre la décision attaquée ne pourrait concerner et ne concernerait que la seule amende lui ayant été infligée.

122    C’est à juste titre que la Commission fait valoir que la requérante peut seulement contester l’amende lui ayant été infligée. Toutefois, dans la mesure où, lors de l’imposition d’une amende pour une infraction aux dispositions de l’article 81 CE, la Commission est tenue de respecter, notamment, le principe d’égalité de traitement, il pourrait être soutenu que, si elle décide d’appliquer aux autres participants à l’entente qui sont encore actifs sur le marché concerné une réduction du montant de l’amende afin d’éviter une diminution significative de la concurrence sur ce marché, voire son élimination, elle doit appliquer la même réduction à un autre participant ayant déjà quitté ce marché et dont la situation est objectivement comparable, au moins dans l’hypothèse, qui est celle de la requérante, où cet autre participant se voit infliger une amende au motif que, à l’époque des faits sanctionnés, il faisait partie de la même unité économique qu’un participant de l’entente toujours actif sur le marché et ayant bénéficié de la réduction du montant de l’amende en question.

123    Dans ces conditions, le Tribunal estime opportun d’analyser le présent moyen au fond, sans se prononcer sur son caractère opérant.

124    Force est, en effet, de constater qu’aucun des arguments avancés par la requérante et aucun élément du dossier ne permet de conclure que le présent cas de figure est comparable à celui évoqué au point 61 et dans la note en bas de page n° 15 des conclusions de l’avocat général M. Geelhoed sous l’arrêt Showa Denko/Commission, point 109 supra. Plus généralement, rien dans ces arguments et éléments n’indique que l’amende infligée à la requérante est disproportionnée.

125    S’il est certes vrai que, ainsi qu’il ressort des considérants 12, 15, 21, 24, 33 et 36 de la décision attaquée, le chiffre d’affaires global réalisé par Akzo Nobel au cours de l’exercice social précédant la décision attaquée était le plus élevé de tous les participants à l’entente, il n’en va pas de même de la part de marché détenue par cette société sur les marchés visés par l’entente. Il ressort du tableau figurant au considérant 46 de la décision attaquée qu’Akzo Nobel détenait entre 20 et 25 % du marché du carbure de calcium en poudre, entre 5 et 10 % du marché du carbure de calcium en granulats, alors qu’elle n’était pas du tout active sur le marché du magnésium. Sur les deux marchés sur lesquels elle était active, sa part de marché était comparable, voire inférieure, à celle détenue par d’autres participants à l’entente. Il ressort par ailleurs du même tableau que, sur ces deux marchés, d’autres entreprises n’ayant pas participé à l’entente détenaient, respectivement, entre 15 et 20 % et entre 30 et 35 % du marché.

126    Il convient d’ajouter que, ainsi qu’il ressort du considérant 44 de la décision attaquée, le carbure de calcium est explosif et, pour cette raison, relativement difficile à transporter. Par conséquent, l’établissement d’une position dominante ou d’un monopole sur ce marché est plus difficile, dans la mesure où un producteur devrait disposer de plusieurs sites de production dispersés sur le territoire pertinent, afin de pouvoir dominer ledit marché. À cet égard, le considérant 44 de la décision attaquée renvoie à la note en bas de page n° 80, dont il ressort qu’Akzo Nobel était le seul producteur établi « dans la région nordique » et fournissait des clients en Suède, en Norvège et en Finlande. En revanche, cette entreprise n’était pas le fournisseur principal « sur le marché continental ».

127    Ces éléments, aucunement contestés par la requérante, démontrent que, même dans l’hypothèse d’une faillite et d’un retrait du marché de l’un ou de l’autre participant à l’entente, une perturbation de la concurrence sur lesdits marchés, avec l’établissement d’une position dominante, voire d’un monopole, d’Akzo Nobel, n’était pas probable.

128    Par ailleurs, aucun des arguments invoqués par la requérante ne permet de conclure que le niveau des amendes infligées par la Commission aux participants à l’entente était susceptible de contraindre l’un ou l’autre d’entre eux de cesser ses activités ou de quitter le marché.

129    Aucun argument pertinent à cet égard ne saurait être tiré du seul fait que plusieurs participants à l’entente ont présenté, ainsi qu’ils étaient en droit de le faire, une demande afin qu’il soit tenu compte de leur capacité contributive  en vertu du paragraphe 35 des lignes directrices, et ce d’autant moins que, en réponse à toutes ces demandes, la Commission a relevé, aux considérants 372, 373, 375, 376, 377 et 378 de la décision attaquée, que, à la suite de l’analyse des informations fournies par les demandeurs, elle avait conclu que le montant de l’amende infligée ne mettrait pas irrémédiablement en danger leur viabilité économique. À l’exception de la conclusion de la Commission en réponse à sa propre demande (voir considérant 376 de la décision attaquée), contestée dans le cadre du sixième moyen qui sera examiné ci‑après, la requérante n’a invoqué aucun argument ou élément concret susceptible de remettre en question ces conclusions de la décision attaquée.

130    S’agissant des demandes en référé introduites par deux autres participants à l’entente et invoquées par la requérante, il suffit de relever qu’aucune d’entre elles n’a abouti.

131    S’agissant de la déclaration de faillite de NCHZ, invoquée par la requérante, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il résulte de la jurisprudence citée au point 119 ci‑dessus, si une faillite porte atteinte aux intérêts financiers des propriétaires ou des actionnaires concernés, elle n’implique pas nécessairement la disparition de l’entreprise en cause du marché concerné. En effet, l’entreprise peut continuer à subsister en tant que telle soit en cas de recapitalisation de la société en faillite, soit en cas de reprise globale des éléments d’actif de celle-ci et, donc, de l’entreprise en tant que telle, par une autre entité.

132    Ainsi, s’il n’est aucunement exclu que la faillite d’une société et sa disparition, en tant que personne morale, conduisent également à la fin d’une entreprise, en tant qu’unité économique, la survenance de cette dernière éventualité ne peut être considérée comme acquise du seul fait de la faillite.

133    Or, en l’espèce, la requérante n’a invoqué aucun argument ni aucun élément permettant de conclure que la faillite de NCHZ et sa disparition, en tant que personne morale, mettront également fin à l’activité économique que celle-ci exerçait, en tant qu’entreprise. Elle a encore moins démontré que la Commission devait être consciente de la probabilité d’une telle éventualité lors de l’adoption de la décision attaquée.

134    Au contraire, la requérante a invoqué une déclaration du conseil d’administration de NCHZ, datée du 17 septembre 2009, dans laquelle celui-ci relevait que la procédure de faillite de cette entreprise visait à « protéger ses actifs en vue du maintien d’une procédure de production continue » et assurait qu’elle était « à même de maintenir sa position sur le marché [et d’] assurer la continuation de la production et des ventes ». Cet élément corrobore la conclusion selon laquelle la disparition de NCHZ du marché n’était pas imminente, malgré l’amende qui lui a été infligée.

135    Enfin, il y a lieu de relever que, dans son mémoire en réplique, la requérante a soutenu que le montant de l’amende qui lui a été infligée était disproportionné, car largement supérieur à ce qui aurait été nécessaire pour sanctionner son comportement. À cet égard, elle fait valoir que, en raison du choix de l’exercice 2007 pour le calcul du plafond de l’amende, dont il y a lieu de rappeler qu’il est critiqué par la requérante au titre du deuxième moyen, l’amende qui lui a été infligée correspondait à la quasi‑totalité de son chiffre d’affaires réalisé en 2008. Il serait, dès lors, inconcevable qu’elle puisse payer une telle amende sans vendre ses actifs, et ce d’autant plus qu’elle aurait déjà subi une perte financière importante lors de la vente de sa participation dans NCHZ.

136    Sans qu’il soit nécessaire de déterminer si cette argumentation constitue une simple ampliation de celle exposée dans la requête ou si elle soulève, en substance, un nouveau moyen, irrecevable, car avancé pour la première fois dans la réplique sans que les conditions de l’article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure soient remplies, il convient de relever que, en tout état de cause, cette argumentation, qui se recoupe largement avec celle avancée par la requérante dans le cadre du deuxième moyen, n’est pas fondée et doit être rejetée.

137    Ainsi qu’il a été relevé dans le cadre du deuxième moyen (voir, notamment, les points 104 à 107 ci-dessus), c’est à juste titre que la Commission a calculé le plafond de l’amende à imposer à la requérante en tenant compte du chiffre d’affaires réalisé par celle-ci en 2007. En effet, l’exercice 2008 ne représentait pas un exercice complet et normal d’activités économiques pour la requérante, dans la mesure où, lors de ce dernier exercice, elle était en train de réaliser les éléments de son actif et de cesser ses activités. Cette conclusion suffit également pour rejeter l’argument de la requérante selon lequel elle ne serait pas en mesure de payer l’amende sans vendre ses actifs, dès lors que, en toute hypothèse, la requérante avait déjà vendu ses actifs au moment de l’imposition de l’amende. Enfin, il résulte de la jurisprudence citée au point 118 ci-dessus que la Commission n’était pas, en principe, obligée de tenir compte de la perte prétendument subie par la requérante lors de la vente de sa participation dans NCHZ et la requérante n’a invoqué aucun élément concret, susceptible de justifier, dans son cas, une conclusion différente par rapport à cette règle de principe.

138    Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent et en tenant également compte de la jurisprudence citée aux points 118 et 119 ci‑dessus, il convient de constater que, contrairement à ce que soutient la requérante, la Commission n’a pas violé le principe de proportionnalité dans la détermination du montant de l’amende infligée à la requérante, de sorte que le présent moyen tendant à l’annulation de la décision attaquée en raison du caractère disproportionné de ladite amende doit être rejeté. Au surplus, le Tribunal, dans l’exercice de son pouvoir de pleine juridiction, considérant que le montant en cause n’est pas disproportionné, en ce sens qu’il est approprié, d’une part, aux circonstances de l’espèce tenant à la gravité et à la durée de l’infraction constatée par la Commission et, d’autre part, à la situation de la requérante, rejette la demande tendant à l’annulation ou à la réduction de cette amende. 

 Sur le sixième moyen, tiré d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation ainsi que d’une violation, par la Commission, de ses propres lignes directrices, en ce qu’elle a refusé de tenir compte de l’absence de capacité contributive de la requérante

139    Par le présent moyen, la requérante fait valoir que, en ce qu’elle comporte un rejet de sa demande, au sens du paragraphe 35 des lignes directrices, de prise en considération de son absence de capacité contributive lors de la fixation du montant de l’amende, la décision attaquée est entachée d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation ainsi que d’une violation des lignes directrices. La requérante demande par conséquent au Tribunal d’annuler l’article 2 du dispositif de la décision attaquée pour autant qu’il la concerne ou, à titre subsidiaire, de réduire, en vertu de son pouvoir de pleine juridiction, l’amende à un montant approprié, reflétant son absence de capacité contributive.

140    Le paragraphe 35 des lignes directrices est ainsi libellé :

« Dans des circonstances exceptionnelles, la Commission peut, sur demande, tenir compte de l’absence de capacité contributive d’une entreprise dans un contexte social et économique particulier. Aucune réduction d’amende ne sera accordée à ce titre par la Commission sur la seule constatation d’une situation financière défavorable ou déficitaire. Une réduction ne pourrait être accordée que sur le fondement de preuves objectives que l’imposition d’une amende, dans les conditions fixées par les présentes lignes directrices, mettrait irrémédiablement en danger la viabilité économique de l’entreprise concernée et conduirait à priver ses actifs de toute valeur. »

141    La requérante a présenté à la Commission une demande tendant à la prise en considération, lors de la fixation du montant de l’amende, de son absence de capacité contributive, ladite demande ayant été rejetée au considérant 376 de la décision attaquée dans les termes suivants :

« Les actionnaires de [la requérante] ont chargé le conseil d’administration en 2007 de vendre tous les actifs en vue de terminer ses activités et de finalement distribuer le revenu aux actionnaires. Dans ces circonstances, une analyse de la viabilité de l’entreprise et de son risque prospectif de faillite n’est pas pertinente. Par conséquent, basées sur les informations présentées par [la requérante], les réserves financières restantes étaient considérées par rapport au montant de l’amende et il est conclu que [la requérante] est capable d’absorber l’amende. Par conséquent, la demande de [la requérante] concernant l’incapacité contributive n’est pas acceptée. »

142    Il y a lieu de relever, à titre liminaire, que, selon une jurisprudence constante, en adoptant des règles de conduite telles que, en l’occurrence, les lignes directrices et en annonçant par leur publication qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 29 supra, point 211 ; arrêts du Tribunal du 8 octobre 2008, Schunk et Schunk Kohlenstoff-Technik/Commission, T‑69/04, Rec. p. II‑2567, point 44, et du 28 avril 2010, Amann & Söhne et Cousin Filterie/Commission, T‑446/05, Rec. p. II‑1255, point 146).

143    Par le paragraphe 35 des lignes directrices, la Commission s’est réservée la possibilité de tenir compte, sur demande, de l’absence de capacité contributive d’une entreprise à laquelle une amende devait être infligée en application de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, si certaines conditions énoncées audit paragraphe étaient remplies. Au nombre de ces conditions figure celle selon laquelle l’imposition d’une amende, dans les conditions fixées par lesdites lignes directrices, mettrait irrémédiablement en danger la viabilité économique de l’entreprise concernée.

144    Or, il est évident qu’il ne saurait être question de la « viabilité économique » d’une entreprise qui a elle-même décidé de cesser ses activités et de réaliser tout son actif. Dès lors qu’elle a considéré que tel était précisément le cas de la requérante, la Commission a relevé, au considérant 376 de la décision attaquée, que l’analyse de sa viabilité « n’[était] pas pertinente » et a rejeté, pour ce motif, la demande de la requérante tendant à l’application, dans son cas, du paragraphe 35 des lignes directrices.

145    La requérante conteste la conclusion de la Commission, selon laquelle elle était en train de vendre tous ses actifs en vue de la cessation de ses activités. Toutefois, elle se borne à répéter, à cet égard, les arguments déjà examinés et rejetés dans le cadre du deuxième moyen, si bien que cette contestation doit être rejetée.

146    Il s’ensuit que, dans la mesure où l’une des conditions essentielles à l’application du paragraphe 35 des lignes directrices n’était pas remplie dans le cas de la requérante, c’est à juste titre que la Commission a rejeté sa demande de prise en compte de son absence de capacité contributive. Il convient en outre de relever que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, sa décision de vendre ses actifs était tout à fait pertinente pour l’appréciation de cette demande, ainsi qu’il ressort du point 144 ci‑dessus.

147    Par ailleurs, dans la mesure où elle se réfère à la décision de la requérante, d’une part, de vendre ses actifs et, d’autre part, de cesser ses activités, ces circonstances étant suffisantes, ainsi qu’il a déjà été relevé, pour justifier le rejet de la demande de la requérante, la décision attaquée est motivée à suffisance de droit, contrairement à ce que fait valoir la requérante.

148    Au regard des considérations qui précèdent, il convient de rejeter le présent moyen, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le reste de l’argumentation de la requérante. Celui-ci concerne la constatation de la Commission, figurant également au considérant 376 de la décision attaquée, selon laquelle l’examen des réserves financières de la requérante avait révélé que cette dernière pouvait absorber le montant de l’amende. Il s’agit, tout au plus, d’un motif surabondant de la décision attaquée, de sorte que les arguments avancés par la requérante pour le contester sont inopérants (voir, en sens, arrêts du Tribunal du 8 juillet 2004, Dalmine/Commission, T‑50/00, Rec. p. II‑2395, point 146, et du 16 janvier 2008, Scippacerola et Terezakis/Commission, T‑306/05, non publié au Recueil, point 145).

149    Au surplus, le Tribunal, dans l’exercice de son pouvoir de pleine juridiction en ce qui concerne la fixation du montant de l’amende infligée à la requérante, considère que ledit montant est approprié, d’une part, aux circonstances de l’espèce tenant à la gravité et à la durée de l’infraction constatée par la Commission et, d’autre part, aux capacités contributives de la requérante, de sorte qu’il y a lieu de rejeter la demande tendant à l’annulation ou à la réduction du montant de l’amende. Partant, il convient de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

150    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      1. garantovaná a.s. est condamnée aux dépens.

Czúcz

Labucka

Gratsias

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 décembre 2012.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré d’une erreur de droit et de fait dans l’imputation à la requérante de la participation de NCHZ à l’infraction litigieuse

Sur les deuxième, troisième et quatrième moyens relatifs à l’utilisation du chiffre d’affaires de la requérante de 2007 au lieu de celui de 2008 aux fins de la détermination du plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003

Considérants pertinents de la décision attaquée

Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation, s’agissant de la question relative au chiffre d’affaires à prendre en compte pour le calcul du plafond de l’amende

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du droit de la requérante d’être entendue au sujet de la question relative au chiffre d’affaires à prendre en compte pour le calcul du plafond de l’amende

Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit en ce que la Commission a utilisé, pour déterminer le plafond de 10 % du chiffre d’affaires prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, le chiffre d’affaires de la requérante de 2007 au lieu de celui de 2008

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité compte tenu du caractère disproportionné du montant de l’amende infligée à la requérante

Sur le sixième moyen, tiré d’un défaut ou d’une insuffisance de motivation ainsi que d’une violation, par la Commission, de ses propres lignes directrices, en ce qu’elle a refusé de tenir compte de l’absence de capacité contributive de la requérante

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’anglais.