Language of document : ECLI:EU:C:2012:535

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme Juliane Kokott

présentées le 6 septembre 2012 (1)

Affaire C‑73/11 P

Frucona Košice a.s.

contre

Commission européenne

«Pourvoi – Concurrence – Aides d’État – Article 87, paragraphe 1, CE – Notion d’aides d’État – Critère du créancier privé agissant dans une économie de marché – Remise partielle d’une dette fiscale dans le cadre d’une procédure de concordat – Appréciation des avantages et des inconvénients d’une procédure de concordat et d’une procédure de liquidation judiciaire – Aléas et durée d’une procédure de liquidation judiciaire – Comportement des autorités fiscales slovaques à l’égard de l’entreprise Frucona Košice»





I –    Introduction

1.        Le présent pourvoi donne à la Cour l’occasion de développer sa jurisprudence relative au droit des aides d’État sur un point important. Il s’agit de remplir de vie le critère du créancier privé agissant dans une économie de marché, critère permettant de juger si certaines facilités de paiement, voire même la renonciation à une créance de l’autorité publique à l’égard d’une entreprise, sont neutres du point de vue du droit de la concurrence ou constituent une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE (devenu l’article 107, paragraphe 1, TFUE (2)). Contrairement au critère apparenté de l’investisseur privé (3), le critère du créancier privé n’a, à ce jour, pratiquement joué aucun rôle dans la jurisprudence. Il est demeuré relativement flou, voire même «mystérieux» (4).

2.        Dans la présente affaire, la question du créancier privé se situe dans le contexte d’une procédure de concordat dans le cadre de laquelle une autorité fiscale slovaque a renoncé en 2004 à l’égard d’une entreprise dénommée Frucona Košice a.s. (ci-après «Frucona» ou la «requérante») à 65 % de ses créances en droits d’accises. Avec l’approbation du Tribunal de l’Union européenne, la Commission européenne a qualifié cette renonciation d’aide d’État, car, selon elle, en cas de faillite de Frucona, les créances du fisc slovaque auraient pu être honorées à un taux plus élevé que dans le cadre de ce concordat. En revanche, Frucona soutient avec force que le taux de recouvrement attendu par le fisc slovaque dans le cadre d’une procédure de liquidation ou le recouvrement de l’impôt n’aurait pu être supérieur – en tout état de cause pas de manière manifeste – au taux de 35 % convenu dans le cadre du concordat.

3.        Dans ce contexte, les parties s’opposent notamment sur une formulation relativement elliptique avec laquelle la Cour a décrit en 1999 dans l’arrêt DM Transport (5) le critère du créancier privé. Il s’ensuit que toute facilité de paiement accordée par une autorité publique doit être qualifiée d’aide d’État lorsque l’entreprise bénéficiaire n’aurait manifestement pas obtenu l’avantage économique qui en résulte de la part d’un créancier privé dans une situation comparable. Comme le montre le présent litige, une clarification de cette jurisprudence s’impose d’urgence.

II – Contexte du litige

4.        Frucona est une société de droit slovaque ayant son siège à Košice (Slovaquie). À l’origine, elle était active, d’une part, dans le secteur de la production d’alcools et de spiritueux et, d’autre part, dans le secteur de la fabrication de produits alimentaires tels que des fruits, des légumes et des jus en conserve, ainsi que de la production de boissons gazeuses et non gazeuses. Après que sa licence de production et de traitement des alcools et des spiritueux lui a été retirée le 6 mars 2004, au motif qu’elle n’avait pas payé les droits d’accises dont elle était redevable, elle a distribué les spiritueux fabriqués par une autre entreprise.

A –    Procédures administratives et judiciaires nationales

5.        Lorsque Frucona n’était plus en mesure de payer les droits d’accises dus pour 2004, elle s’est retrouvée en situation d’endettement au sens de la loi slovaque relative à la liquidation judiciaire et au concordat. Ensuite, le 8 mars 2004, Frucona a introduit une demande d’ouverture d’une procédure de concordat devant le tribunal régional de Košice. La proposition de concordat de la société se fondait sur une dette totale de 644,6 millions de SKK et visait à payer, à l’ensemble des créanciers chirographaires et à certains créanciers privilégiés, une part équivalente à 35 % du montant total des sommes qu’elle leur devait. Les droits d’accises à verser à l’administration fiscale slovaque constituaient la part du lion de ces dettes de Frucona.

6.        Avant l’homologation du concordat par le tribunal régional de Košice, Frucona a soumis plusieurs rapports d’audit à l’autorité fiscale locale afin de lui permettre d’évaluer les avantages respectifs du concordat, de la liquidation judiciaire et de l’exécution fiscale en droit slovaque. Le 21 juin 2004, l’administration fiscale slovaque a procédé à une inspection sur place dans les locaux de la requérante afin de constater le montant de ses liquidités.

7.        Bien que la direction générale des impôts slovaque ait invité l’autorité fiscale locale à ne pas accepter la proposition de concordat de la requérante lors de l’audience de concordat, au motif qu’elle n’était pas favorable à la République slovaque, l’autorité fiscale locale a accepté cette proposition le 9 juillet 2004. Par décision du 14 juillet 2004, le tribunal régional de Košice a homologué le concordat qui prévoyait que les créances de l’administration fiscale slovaque seraient remboursées à concurrence de 35 %, soit un montant d’environ 224,3 millions de SKK.

8.        Le 14 juillet 2004, le directeur de l’autorité fiscale locale a été suspendu et remplacé. Ultérieurement, il a été inculpé de fraude et de malversation. Il a néanmoins été acquitté de toutes les charges portées contre lui.

9.        Le 20 octobre 2004, l’autorité fiscale locale a indiqué à la requérante que les modalités du concordat constituaient une aide d’État indirecte soumise à l’autorisation de la Commission.

10.      Par arrêt du 25 octobre 2004, le Najvyšší súd Slovenskej republiky (Cour suprême de la République slovaque) a rejeté l’appel introduit par l’autorité fiscale locale en août 2004, contre la décision du tribunal régional du 14 juillet 2004 homologuant le concordat et a déclaré que ladite décision était valable et exécutoire à compter du 23 juillet 2004.

11.      Conformément au concordat, Frucona a payé à l’autorité fiscale locale un montant de 224,3 millions de SKK, correspondant à 35 % de sa dette totale.

12.      À la suite d’un appel extraordinaire, la Cour suprême a, par décision du 27 avril 2006, annulé partiellement la décision du tribunal de Košice du 14 juillet 2004. Ensuite, par décision du 18 août 2006, ce même tribunal a fixé les montants corrigés dus à l’autorité fiscale locale à 640,4 millions de SKK, en sorte que 35 % de cette somme s’élèvent à 224,1 millions de SKK.

B –    Procédure administrative devant la Commission

13.      La Commission a été saisie de cette affaire à la suite d’une plainte qui lui a été notifiée le 15 octobre 2004. Le 5 juillet 2005, elle a décidé d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE (6). Cette procédure a été clôturée par la décision 2007/254/CE, du 7 juin 2006 (7) (ci-après la «décision litigieuse»), par laquelle elle a décidé, à l’article 1er, que Frucona a bénéficié par le concordat d’une aide d’État d’un montant de 416 515 990 SKK incompatible avec le marché commun. Il est prévu, à l’article 2, que la République slovaque adopte toutes les mesures nécessaires pour récupérer sans délai et avec intérêts auprès du bénéficiaire l’aide visée à l’article 1er.

C –    Procédure devant le Tribunal

14.      Le 12 janvier 2007, par requête au titre de l’article 230, quatrième alinéa, CE, Frucona a demandé l’annulation de la décision litigieuse. Par ordonnance du 11 octobre 2007, l’entreprise St. Nicolaus-trade a.s. (ci-après «St. Nicolaus-trade») a été admise à intervenir dans la procédure au soutien de la Commission.

15.      Le recours en annulation de Frucona n’a pas été couronné de succès en première instance. Par un arrêt du 7 décembre 2010 (8) (ci-après l’«arrêt attaqué»), le Tribunal a rejeté le recours de Frucona et l’a condamnée aux dépens.

III – Pourvoi devant la Cour

16.      Frucona conteste l’arrêt du Tribunal avec le présent pourvoi qu’elle a introduit au greffe de la Cour le 17 février 2011.

17.      Frucona conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

–        annuler l’arrêt attaqué, en tant qu’il concerne les quatrième et sixième moyens de la requête déposée par la requérante devant le Tribunal;

–        accueillir ces moyens comme fondés;

–        renvoyer l’affaire devant le Tribunal de manière à ce qu’il puisse statuer sur les cinquième, sixième, septième, huitième et neuvième moyens invoqués par la requérante, en tant qu’ils concernent la procédure d’exécution fiscale, et

–        condamner la Commission aux dépens de la requérante.

18.      La Commission conclut de son côté à ce que la Cour:

–        rejette le pourvoi et

–        condamne Frucona aux dépens.

19.      Par ailleurs, en tant qu’autre partie à la procédure, St. Nicolaus-trade demande le rejet du pourvoi, la confirmation de l’arrêt attaqué et la condamnation de la requérante aux dépens.

20.      Devant la Cour, le pourvoi a fait l’objet de débats écrits et d’une audience le 5 juillet 2012.

IV – Analyse

21.      Par son pourvoi, Frucona ne conteste pas tous les points faisant l’objet de la procédure devant le Tribunal. En effet, la requérante s’oppose spécifiquement aux points 88 à 168 ainsi qu’au point 212 de l’arrêt attaqué et elle se fonde à cet égard sur deux moyens. D’une part, lors de l’examen par la Commission de l’application du critère du créancier privé, le Tribunal n’aurait pas appliqué la norme juridique pertinente (voir ci-dessous, section A). D’autre part, le Tribunal aurait tenté de manière illégale de substituer son propre raisonnement à l’argumentation de la Commission relative à l’application du critère du créancier privé et/ou aurait manifestement mal apprécié les éléments de preuve de l’espèce pertinents pour ce critère, ce qui aurait dénaturé la signification univoque des éléments de preuve (voir ci‑dessous, section B).

 A – Premier moyen: normes juridiques relatives à l’application du critère du créancier privé

22.      Le premier moyen a pour objet les normes juridiques relatives à l’application du critère du créancier privé. Frucona reproche au Tribunal de ne pas s’être fondé sur la norme juridique pertinente lors de l’examen de l’application de ce critère par la Commission. À cet égard, la requérante s’en prend, d’une part, aux points 88 à 92 et, d’autre part, aux points 106 à 121 de l’arrêt attaqué; par ailleurs, elle conteste les points 139 à 142 dudit arrêt.

1.      Recevabilité

23.      La Commission expose à deux égards des doutes quant à la recevabilité de la thèse de Frucona dans le cadre de ce premier moyen.

24.      Tout d’abord, la Commission critique le fait que le pourvoi contienne des références croisées à certains passages de la requête en première instance de Frucona. Une telle technique ne respecterait pas les exigences de l’article 112 du règlement de procédure de la Cour.

25.      À ce sujet, il convient de préciser que, en vertu des dispositions combinées de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, de l’article 58, paragraphe 1, du statut de la Cour de justice et de l’article 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, un pourvoi doit préciser exactement les arguments juridiques qui fondent particulièrement la demande d’annulation de l’arrêt rendu en première instance (9). En pratique, une référence générale à d’autres pièces de la procédure, même lorsqu’elles sont jointes – comme en l’espèce – en annexe, ne satisfait pas à cette obligation (10).

26.      Toutefois, dans le présent cas d’espèce, Frucona n’a pas fait référence de manière globale à des griefs et arguments présentés en première instance. Au contraire, la requérante a rappelé certains aspects spécifiques de son argumentation présentée en première instance dans le corps du texte de son pourvoi et a décrit ceux-ci avec suffisamment de clarté. Elle a simplement fait référence aux passages pertinents de sa requête en première instance pour prouver l’exactitude de ses affirmations.

27.      Par conséquent, le grief de la Commission à cet égard est dépourvu de tout fondement.

28.      Par ailleurs, la Commission expose des doutes quant à la recevabilité de la partie du pourvoi dans laquelle Frucona s’exprime au sujet de l’importance de rapports d’expertise locaux concernant les coefficients de liquidation prévus dans le cadre d’une procédure de liquidation (11). La Commission souligne que ce passage est placé après les explications de Frucona au sujet de son premier moyen, et notamment de sa conclusion formulée de manière résumée (12), en sorte que sa finalité ne paraîtrait pas très claire au regard de l’examen de l’arrêt attaqué.

29.      Cet argument de la Commission est lui aussi totalement infondé. En effet, chaque partie est libre de structurer ses observations écrites devant la Cour comme elle l’entend. Certes, il n’apparaît pas particulièrement sensé de continuer à exposer à la suite de la «conclusion» d’un premier moyen d’autres arguments de fond. Toutefois, il ne s’agit nullement d’une question de recevabilité, mais uniquement d’une question d’opportunité dont l’appréciation appartient à chaque partie elle-même. Il se pose tout au plus un problème de recevabilité lorsqu’il n’existe aucun lien visible entre l’argumentation d’une partie et les conclusions de son pourvoi, en sorte que ni la Cour ni les autres parties à la procédure ne sont en mesure de prendre position de manière pertinente. Toutefois, dans le présent cas d’espèce, Frucona a suffisamment clarifié à plusieurs reprises dans son pourvoi qu’elle reprochait au Tribunal de ne pas avoir accordé l’attention nécessaire à la signification des rapports d’expertise en lien avec l’application du critère du créancier privé. Il n’apparaît pas que les parties à la procédure auraient rencontré de quelconques difficultés pour prendre position sur ce point.

30.      Par conséquent, il n’existe aucun doute quant à la recevabilité du premier moyen.

2.      Bien-fondé

31.      La requérante fait valoir que le Tribunal a confirmé à tort l’existence d’une aide d’État (13). D’un côté, le Tribunal n’aurait pas reproduit correctement la jurisprudence pertinente relative au critère du créancier privé au début de son examen et, d’autre part, il aurait appliqué de manière inexacte ce critère.

a)      Grief selon lequel le Tribunal n’aurait pas exposé dûment la jurisprudence pertinente

32.      Dans la mesure où Frucona fait grief au Tribunal de ne pas avoir commencé son examen en citant correctement la jurisprudence pertinente relative au critère du créancier privé, elle lui reproche en fin de compte un défaut de motivation de l’arrêt attaqué.

33.      Ce grief ne résiste pas à un examen plus approfondi.

34.      L’obligation de motiver dûment les arrêts de première instance résulte des dispositions combinées des articles 36 et 53, paragraphe 1, du statut de la Cour de justice. Selon une jurisprudence constante, la motivation d’un arrêt doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement du Tribunal, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la décision prise et à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel (14).

35.      Il peut certainement être utile que le Tribunal expose la jurisprudence pertinente au début de son raisonnement relatif à un moyen donné et se consacre éventuellement à celui-ci. Mais il s’agit là, en fin de compte, d’une question d’opportunité et le Tribunal doit bénéficier d’un large pouvoir d’appréciation pour pouvoir en juger.

36.      S’agissant de l’obligation de motivation, ce qui compte finalement c’est de savoir si l’arrêt attaqué a été rédigé de manière intelligible, s’il examine toutes les violations de droit alléguées par la requérante (15) et si les motifs ayant conduit à la décision du Tribunal sont suffisamment reconnaissables, peu importe si et dans quelle mesure le Tribunal s’est fondé à cet effet explicitement sur la jurisprudence antérieure.

37.      L’arrêt attaqué satisfait entièrement et totalement à ces exigences, ce que montre notamment le fait que Frucona ait pu identifier de manière ciblée et détaillée les erreurs juridiques qui, selon elle, entachaient ledit arrêt.

38.      En vérité, Frucona est moins gênée par la motivation de l’arrêt attaqué que par son contenu. Nous examinerons ci-dessous de manière plus détaillée la justesse de celui-ci.

b)      Griefs tenant à l’interprétation erronée du contenu du critère du créancier privé et à l’application incorrecte de ce critère

39.      La requérante critique le fait que le Tribunal aurait mal interprété le contenu du critère du créancier privé dans le présent cas d’espèce et l’aurait en outre appliqué de manière incorrecte. Selon elle, le Tribunal a considéré à tort que la renonciation à la créance de l’autorité fiscale slovaque constituait une aide d’État à Frucona (16).

i)      Contenu du critère du créancier privé

40.      Tout d’abord, Frucona affirme qu’une mesure des autorités publiques telle que la renonciation à des créances litigieuses de la part des autorités fiscales slovaques locales ne devrait être qualifiée d’aide d’État que si l’avantage qui en résulte pour l’entreprise en cause est «manifestement plus libéral» (17) que celui dont aurait bénéficié un créancier privé dans des conditions similaires. La requérante critique le fait que le Tribunal s’est limité de manière illégitime à examiner si le bénéfice tiré de la procédure de concordat par l’administration fiscale de la République slovaque «était supérieur» à celui que la même administration aurait pu tirer d’une procédure de liquidation judiciaire ou d’une procédure d’exécution fiscale (18) et si une procédure de liquidation judiciaire aurait été «plus avantageuse» (19) qu’une procédure de concordat, au lieu de rechercher l’existence d’un «avantage manifeste».

41.      Selon la jurisprudence constante, la qualification d’une mesure en tant qu’aide au sens du traité suppose que chacun des quatre critères cumulatifs visés à l’article 87, paragraphe 1, CE (devenu l’article 107, paragraphe 1, TFUE) soit rempli. Premièrement, il doit s’agir d’une intervention de l’État ou au moyen de ressources d’État, deuxièmement, cette intervention doit être susceptible d’affecter les échanges entre les États membres, troisièmement, elle doit accorder un avantage à son bénéficiaire et, quatrièmement, elle doit fausser ou menacer de fausser la concurrence (20).

42.      Le fait que des mesures fiscales puissent faire naître des problèmes sensibles au regard du droit des aides d’État s’est déjà montré à plusieurs reprises (21) dans le passé dans les contextes les plus divers et se vérifie également dans la présente espèce.

43.      La question litigieuse de la présente affaire est de savoir si, en raison de la renonciation des autorités fiscales locales à 65 % de leurs créances en droits d’accises dans le cadre de la procédure en concordat, un avantage a été conféré à Frucona au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. Cela dépend du point de savoir si l’entreprise avantagée a obtenu de cette manière un avantage économique qu’elle n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (22).

44.      L’élément déterminant à l’appréciation de cette question est la comparaison avec un créancier privé cherchant à obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues par son débiteur (23). Lorsqu’il agit dans le cadre de l’économie de marché, un tel créancier privé songera à maximaliser ses recettes et à minimaliser d’éventuelles pertes. Dès lors, il n’accordera des allégements à l’entreprise bénéficiaire dans le cadre de la résolution de ses dettes que si et dans la mesure où cela est rentable sur le plan économique ou, à tout le moins, si cela semble raisonnable.

45.      S’agissant du critère du créancier privé, la Cour s’est exprimée de manière plus précise à ce sujet notamment dans l’arrêt DM Transport. Dans le dispositif de cet arrêt, elle a dit pour droit que des facilités de paiement de cotisations de sécurité sociale accordées de façon discrétionnaire par l’organisme chargé de leur collecte à une entreprise constituent une aide d’État si, compte tenu de l’importance de l’avantage économique ainsi octroyé, l’entreprise n’aurait manifestement pas obtenu des facilités comparables d’un créancier privé se trouvant, à son égard, dans la même situation que l’organisme collecteur (24).

46.      Depuis lors, l’utilisation de l’adverbe «manifestement» sème la confusion. Cette confusion est encore renforcée par le fait que la Cour a utilisé cette formulation d’une manière légèrement différente dans un point de l’arrêt DM Transport: selon celui-ci, la reconnaissance d’une aide d’État implique que les facilités de paiement octroyées à l’entreprise bénéficiaire soient «manifestement plus importantes» que celles qu’un créancier privé aurait accordées à cette entreprise (25).

47.      Nous exposerons ci-dessous que la notion «manifestement» au sens de l’arrêt DM Transport, d’une part, n’introduit pas un élément quantitatif dans le critère du créancier privé et, d’autre part, ne doit pas être comprise au sens d’une marge d’appréciation de quelque nature que ce soit dans le chef des autorités publiques accordant des aides. Au contraire, la notion «manifestement» fait référence – d’une manière qui prête à confusion il est vrai – à un critère d’appréciation qui doit être utilisé par les juridictions nationales tout comme par la Commission en sa qualité d’autorité de la concurrence lors de la mise en œuvre du critère du créancier privé.

–       Absence d’élément quantitatif

48.      À première vue, l’utilisation du terme «manifestement» dans l’arrêt DM Transport (26) pourrait faire conclure qu’il s’agit d’un élément quantitatif et qu’une aide d’État n’existe que si l’avantage obtenu par l’entreprise bénéficiaire est «manifestement plus libéral» au regard de sa valeur et de son importance que celui qu’un créancier privé accorderait dans une situation comparable (27).

49.      Toutefois, lors de l’audience devant la Cour, toutes les parties à la procédure partageaient l’idée selon laquelle l’utilisation de l’adverbe «manifestement» dans l’arrêt DM Transport n’introduisait pas un élément quantitatif dans le critère du créancier privé et ne devait en particulier pas être mal compris dans le sens d’une référence à une différence minimale entre l’avantage attendu de la part de l’autorité publique et celui d’un créancier privé.

50.      Effectivement, il n’appartient pas aux juridictions de l’Union de compléter par la voie prétorienne la notion d’aides d’État à l’article 87, paragraphe 1, CE (devenu l’article 107, paragraphe 1, TFUE) d’un seuil de sensibilité non prévu par le législateur de l’Union. Si elle agissait ainsi, la Cour se verrait reprocher de s’ingérer dans les attributions du législateur de l’Union qui est seul compétent en vertu de l’article 89 CE (devenu l’article 109 TFUE) pour accorder au moyen de règlements d’exécution des exemptions par catégorie comme celles relatives aux aides de minimis (28). De même, le rapport existant entre cette réglementation écrite de minimis et un éventuel seuil de sensibilité non écrit fondé sur la jurisprudence ne serait pas clair non plus. Par ailleurs, un seuil de sensibilité non écrit causerait une insécurité juridique considérable. C’est la raison pour laquelle, lors de l’application du critère du créancier privé, la nature et l’importance de l’avantage peuvent au mieux servir d’indice lors de l’appréciation globale de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce (29).

51.      En conséquence, c’est tout à fait à juste titre que le Tribunal a considéré en l’espèce qu’un avantage au sens du droit des aides d’État peut exister, même si les chiffres calculés dans le cadre du critère du créancier privé sont proches l’un de l’autre (30). La seule circonstance qu’en l’espèce le produit minimal attendu à la suite de la procédure de liquidation pour l’autorité fiscale locale de 225,5 millions de SKK n’était évalué qu’à un montant légèrement supérieur (31) au montant effectivement payé dans le cadre du concordat de 224,3 millions de SKK (32) n’exclut pas d’emblée que Frucona ait tout de même bénéficié d’un avantage économique de l’autorité publique qu’elle n’aurait manifestement pas obtenu d’un créancier privé se trouvant dans une situation comparable.

–       Absence de marge d’appréciation pour les autorités nationales

52.      De son côté, Frucona semble comprendre l’utilisation de la notion «manifestement» dans l’arrêt DM Transport (33) comme l’expression d’une forme de marge d’appréciation devant apparemment relever des autorités nationales. Ainsi, elle insiste sur la «gamme» des possibilités dont disposent normalement les créanciers agissant dans une économie de marché par rapport à leurs débiteurs. Tant qu’un créancier public ne se décide pas pour une option se situant en dehors de cette gamme, Frucona considère qu’il ne peut être question d’un avantage au sens du droit des aides d’État. Ce n’est que lorsqu’un créancier public adopte une mesure que n’aurait manifestement pas choisie un créancier privé raisonnable que peut exister un avantage au sens du droit des aides, selon Frucona.

53.      Cette thèse est elle aussi erronée. Pour autant que l’on puisse en juger, en matière d’aides d’État, la Cour n’a encore jamais reconnu une quelconque marge d’appréciation particulière dans laquelle les mesures des autorités des États membres ne seraient soumises qu’à un contrôle limité de la Commission ou des juridictions nationales au regard des règles des traités en matière de concurrence.

54.      Bien au contraire, les articles 87 CE et 88 CE (devenus les articles 107 TFUE et 108 TFUE) prévoient un contrôle complet des aides d’État par la Commission en tant qu’autorité de la concurrence de l’Union européenne. Lorsque des autorités nationales ont des doutes quant au fait que les mesures qu’elles ordonnent à l’égard des entreprises puissent relever de l’interdiction des aides d’État, il leur est loisible de faire en sorte que ces mesures soient notifiées préventivement à la Commission.

55.      La reconnaissance d’une marge d’appréciation dans le chef de nombreuses autorités publiques qui accordent dans l’Union européenne des aides d’État aux niveaux national, régional et local conduirait à un assouplissement clair de l’interdiction des aides d’État ancrée à l’article 87, paragraphe 1, CE (devenu l’article 107, paragraphe 1, TFUE) qui constitue un principe fondamental du droit de l’Union ayant une importance considérable pour le fonctionnement du marché intérieur. Il y aurait un risque sérieux que l’efficacité du contrôle des aides mis en œuvre par la Commission soit minée et que l’interprétation et l’application uniformes des règles européennes de la concurrence soient en péril. De cette manière, l’objectif fondamental de créer des conditions de la concurrence uniformes pour l’ensemble des entreprises opérant dans le marché intérieur («level playing field») (34) serait fortement remis en question.

56.      Indépendamment de cela, il convient de noter que le critère du créancier privé et le critère de l’investisseur privé sont étroitement liés. Ces deux critères fournissent des informations sur le point de savoir si une entreprise aurait pu également obtenir l’avantage économique qu’elle a obtenu de la part des autorités publiques dans des conditions normales de marché. En fin de compte, ces deux critères constituent les deux faces d’une même médaille. Dès lors, dans le cadre de l’interprétation et de l’application du droit, la Cour devrait maintenir la cohérence et tenir compte du fait qu’à ce jour – pour autant que l’on puisse en juger – elle n’a jamais affaibli le critère de l’investisseur privé en reconnaissant une marge d’appréciation des États membres.

–       Une marge d’appréciation reconnue à la Commission et aux juridictions nationales

57.      En réalité, dans l’arrêt DM Transport, en faisant usage de l’adverbe «manifestement», la Cour a simplement rappelé – il est vrai de manière quelque peu elliptique – la marge de manœuvre dont jouissent la Commission et les juridictions nationales (35) lorsque, dans le cadre de l’application du critère du créancier privé, elles examinent les mesures des autorités publiques quant à l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE (devenu l’article 107, paragraphe 1, TFUE).

58.      Le critère du créancier privé – tout comme le critère de l’investisseur privé qui lui est étroitement apparenté – permet de constater si l’entreprise bénéficiaire aurait bénéficié du même avantage de la part des autorités publiques que celui qu’aurait reçu un opérateur privé dans des conditions normales de marché (36). Il convient, dès lors, d’apprécier la manière dont se serait comporté un créancier privé raisonnable agissant dans les conditions du marché dans une situation comparable à celle du créancier public.

59.      Dans la procédure administrative au titre de l’article 88, paragraphes 2 ou 3, CE (devenu l’article 108, paragraphes 2 ou 3, TFUE), il appartient à la Commission de procéder à cette appréciation et celle-ci est tenue à cet égard de tenir compte de toutes les circonstances pertinentes du cas d’espèce et, le cas échéant, de demander à l’État membre concerné toutes les informations nécessaires (37).

60.      L’évaluation du comportement d’un créancier privé raisonnable opérant dans l’économie de marché requiert de procéder à une appréciation économique complexe (38) qui sera naturellement marquée par des incertitudes importantes dans la mesure où il ne peut s’agir que de l’appréciation du comportement probable d’un créancier privé hypothétique. C’est pourquoi l’adverbe «manifestement» employé par la Cour dans l’arrêt DM Transport n’a de sens dans une affaire telle que la présente espèce que s’il est utilisé pour exprimer la marge d’appréciation dont jouit la Commission lors de l’analyse du comportement probable d’un hypothétique créancier privé.

61.      Si, compte tenu des circonstances concrètes du cas d’espèce, différentes attitudes d’un créancier privé opérant dans l’économie de marché sont envisageables – ainsi, dans le présent cas d’espèce, il peut, par exemple, avoir le choix de se soumettre à un concordat ou bien d’impliquer son débiteur dans une procédure de liquidation judiciaire (39) –, alors il convient d’apprécier avec soin quel comportement du créancier privé aurait été le plus probable sans que les autorités publiques accordant cet avantage disposent à cet égard d’une quelconque marge d’appréciation (40).

62.      Contrairement à une procédure pénale ou quasi pénale, il n’y a pas lieu d’utiliser dans ce contexte une norme de probabilité plus sévère. Dès lors, il n’est en particulier pas nécessaire que le comportement présumé du créancier privé soit «manifeste» en ce sens qu’il soit considéré comme «très probable» ou «particulièrement probable», voire même qu’il puisse être anticipé «sans aucun doute raisonnable». En effet, le critère du créancier privé est mis en œuvre dans les procédures administratives ou les procédures civiles – soit dans le cadre de la procédure de contrôle des aides d’État de la Commission, soit devant les juridictions nationales (41) –, qui ont pour objectif de contribuer à mettre en œuvre de manière efficace l’interdiction en droit de l’Union des aides d’État au titre de l’article 87, paragraphe 1, CE (devenu l’article 107, paragraphe 1, TFUE) ainsi que d’écarter de manière sûre d’éventuelles menaces à la concurrence au sein du marché intérieur. Dès lors, dans de telles procédures, le seuil pour agir à l’encontre des avantages accordés par les autorités à certaines entreprises doit être fixé à un niveau relativement bas. Par conséquent, dans un cas tel que la présente espèce, il suffirait de constater qu’un certain comportement du créancier privé (par exemple, le fait d’imposer une procédure de liquidation judiciaire) aurait été plus probable, compte tenu des circonstances concrètes du cas d’espèce, qu’un autre comportement (par exemple, la renonciation à une partie des créances impayées dans le cadre d’un concordat) (42).

63.      C’est la raison pour laquelle c’est à juste titre que le Tribunal a simplement demandé dans l’arrêt attaqué si, dans la présente espèce, c’est la procédure de liquidation judiciaire ou la procédure de recouvrement de l’impôt qui aurait été «plus avantageuse» que le concordat conclu avec Frucona (43), et si la Commission a commis à cet égard une erreur manifeste d’appréciation dans sa décision.

64.      Dans ces conditions, il ne peut aucunement être reproché au Tribunal d’avoir méconnu le contenu du critère du créancier privé ou d’avoir appliqué des critères erronés dans le cadre de l’examen de la décision litigieuse.

ii)    Le contrôle juridictionnel de l’application du critère du créancier privé

65.      S’agissant de l’application concrète du critère du créancier privé, Frucona reproche au Tribunal de s’être contenté de procéder à une comparaison a posteriori des avantages et des inconvénients des procédures de liquidation judiciaire et de concordat selon la perspective de la Commission, au lieu de recourir à une appréciation sur la base de la perspective ex-ante d’un créancier privé. Le Tribunal n’aurait notamment pas suffisamment tenu compte des rapports d’expertise présentés à la Commission au sujet de la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire qui, selon Frucona, auraient eu une importance significative pour la décision de chaque créancier privé raisonnable.

–       L’obligation d’une appréciation fondée sur une perspective ex-ante

66.      Il est incontestable que la question de savoir si l’entreprise bénéficiaire aurait pu obtenir, dans des conditions normales de marché, le même avantage que celui qu’elle a reçu des autorités publiques doit être appréciée du point de vue du créancier privé raisonnable (44). À cet égard, il convient de se fonder sur les informations dont aurait disposé un tel créancier privé au moment de l’octroi de l’avantage en cause. Par conséquent, l’élément déterminant est, comme l’a souligné à juste titre Frucona, l’appréciation fondée sur une perspective ex-ante.

67.      C’est précisément à partir de ce point de vue que le Tribunal a examiné la légalité de la décision litigieuse. Dans l’arrêt attaqué, il est fait référence aux circonstances qu’un créancier privé aurait prises en considération afin d’apprécier les avantages d’une procédure de liquidation judiciaire par rapport au produit du concordat conclu entre Frucona et les autorités fiscales locales. Le Tribunal examine notamment en détail la question de savoir «si le créancier privé le plus optimiste aurait choisi de recevoir 225 millions de SKK en décembre 2004 [dans le cadre d’un concordat judiciaire] plutôt que de recevoir éventuellement jusqu’à 239 millions de SKK dans un délai compris entre ‘moins longtemps que la moyenne’ et sept ans» (45).

68.      On ne saurait, dès lors, douter sérieusement que le Tribunal se soit fondé sur une perspective ex-ante lors de l’examen de la légalité de la décision litigieuse.

–       La durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire

69.      Ensuite, la requérante reproche au Tribunal de n’avoir pas suffisamment examiné si la Commission a pris en considération les rapports d’expertise présentés devant elle au cours de la procédure administrative en ce qui concerne la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire et de n’avoir pas accordé l’importance requise aux informations qui en résultent, en tenant compte également des expériences en matière de procédures de liquidation judiciaire concernant d’autres distilleries en Slovaquie. Frucona souligne à plusieurs reprises qu’il s’agit là d’une question juridique.

70.      Il est exact que la notion d’aide d’État, telle qu’elle est définie dans le traité, présente un caractère juridique et doit être interprétée sur la base d’éléments objectifs. Pour cette raison, le juge de l’Union doit, en principe et compte tenu tant des éléments concrets du litige qui lui est soumis que du caractère technique ou complexe des appréciations portées par la Commission, exercer un entier contrôle en ce qui concerne la question de savoir si une mesure entre dans le champ d’application de l’article 87, paragraphe 1, CE (devenu l’article 107, paragraphe 1, TFUE) (46).

71.      L’application du critère du créancier privé, et donc du critère juridique sur la base duquel la Commission décide si et dans quelle mesure les facilités de paiement accordées par l’autorité publique à une entreprise doivent, le cas échéant, être qualifiées d’avantage au sens du droit des aides d’État, est également soumise à ce contrôle juridictionnel (47).

72.      Comme cela a déjà été expliqué, l’application du critère du créancier privé exige – tout comme pour le critère apparenté de l’investisseur privé – que l’on procède à une appréciation globale de toutes les circonstances du cas d’espèce en tenant compte des informations présentées par l’État membre concerné ainsi que des autres éléments pertinents pour l’affaire en question (48).

73.      S’il s’agit, comme en l’espèce, de rechercher si un créancier privé aurait été enclin à conclure un concordat judiciaire ou aurait plutôt impliqué son débiteur dans une procédure de liquidation judiciaire, alors la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire relèvera sans doute des éléments pertinents du cas d’espèce.

74.      Le Tribunal n’a absolument pas ignoré cet élément, mais a, par contre, analysé in extenso la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire lors du contrôle de la légalité de la décision litigieuse, et ce en se penchant sur les différents points des motifs de la décision (49).

75.      L’arrêt revient explicitement sur le grief soulevé par Frucona en première instance selon lequel la Commission n’aurait pas «pris en compte la durée de la procédure de liquidation judiciaire en Slovaquie ni les rapports de tiers à ce sujet»; le Tribunal conclut «qu’il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir ignoré cette question et la position de la requérante à cet égard» (50).

76.      Par conséquent, il est difficile de reprocher au Tribunal d’avoir négligé l’aspect de la durée de la procédure de liquidation judiciaire lors de l’exercice de son contrôle juridictionnel de l’application par la Commission du critère du créancier privé.

77.      Frucona considère néanmoins que le Tribunal n’a pas examiné à suffisance si la Commission a reconnu, dans sa décision, toute son importance à la question de la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire lors de l’application du critère du créancier privé.

78.      À cet égard, il convient de faire observer que la pondération appropriée des différents aspects du cas d’espèce sur la base desquels le créancier privé aurait dû forger son opinion ne constitue pas une question juridique, mais bien une question de fait dont la réponse peut varier considérablement d’un cas à l’autre et qui implique toujours une appréciation économique complexe et il est notoire que la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation à cet effet (51).

79.      C’est la raison pour laquelle il est de jurisprudence constante que le contrôle juridictionnel d’un acte de la Commission impliquant une telle appréciation économique complexe doit se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou de l’absence de détournement de pouvoir (52).

80.      Contrairement aux affaires d’entente, les juridictions de l’Union ne disposent pas d’une compétence de pleine juridiction (article 261 TUE) en ce qui concerne les décisions de la Commission en matière d’aides d’État qui sont uniquement de nature administrative et ne contiennent aucune sanction. C’est la raison pour laquelle il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation économique à celle de la Commission (53).

81.      Le Tribunal a précisément respecté à juste titre ces limites de son pouvoir juridictionnel lorsqu’il a examiné en première instance la décision litigieuse sur la question de la prise en compte de la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire et qu’il a conclu, après avoir examiné en détail les arguments de Frucona, que la Commission n’avait pas commis d’erreur manifeste d’appréciation (54).

82.      Les opinions peuvent certainement diverger dans le détail sur la question de savoir si, en l’espèce, l’appréciation des différents éléments de fait par la Commission et par le Tribunal était convaincante. C’est ce qu’ont montré, entre autres, les débats animés entre les parties à l’audience ainsi que les réponses aux questions orales de la Cour. Jusqu’à la fin, il a été contesté de savoir quelle aurait été la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire dans la présente espèce (55), quelle importance un créancier privé aurait accordé à de telles incertitudes avant de prendre sa décision (56), quelle était la fiabilité des rapports d’expertise présentés à la Commission à cet effet (57) et quel profit additionnel un créancier privé aurait pu obtenir dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire par rapport au concordat conclu avec l’autorité fiscale locale, même en tenant compte des intérêts sur le montant du concordat (58).

83.      Toutefois, le fait d’avoir un autre avis que la Commission ne suffit cependant justement pas pour déclarer qu’elle aurait commis une erreur d’appréciation manifeste. En effet, si les éléments de faits et de preuve rendent différentes appréciations plausibles, rien ne s’oppose en droit à ce que la Commission opte pour l’une d’entre elles, même si une autre partie à la procédure, le Tribunal ou la Cour ne lui auraient pas donné leur préférence. La Commission ne commet une erreur d’appréciation manifeste que lorsque les faits et les éléments de preuve suggèrent que ses conclusions ne sont plus défendables, c’est‑à-dire lorsque aucune base raisonnable susceptible de les étayer ne peut être identifiée (59).

84.      C’est la raison pour laquelle on ne pouvait exiger du Tribunal dans la présente affaire qu’il substitue son appréciation des faits à celle de la Commission en ce qui concerne la pondération des aléas et de la durée d’une éventuelle procédure d’insolvabilité. Il serait d’autant plus incorrect que la Cour, en sa qualité de juge du pourvoi, substitue désormais sa propre appréciation à celle du Tribunal ou à celle de la Commission en ce qui concerne les aléas et la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire.

85.      Or, c’est précisément ce que tente d’obtenir la requérante par ses arguments relatifs à la durée d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire et à la perspective ex-ante: sous le couvert de prétendues questions juridiques, elle invite en fin de compte la Cour à substituer sa propre appréciation des faits à celles du Tribunal et de la Commission. La Cour doit s’y opposer si elle ne veut pas outrepasser considérablement sa compétence dans la procédure de pourvoi.

86.      Dans ces conditions, les griefs soulevés par Frucona en ce qui concerne le contrôle juridictionnel de l’application du critère du créancier privé ne sauraient être accueillis.

3.      Conclusion intermédiaire

87.      En résumé, le premier moyen soulevé par Frucona dans son pourvoi est certes recevable, mais non fondé.

B –    Second moyen: grief selon lequel le Tribunal aurait amélioré la motivation de la Commission et dénaturé les moyens de preuve

88.      Le second moyen consiste en quatre branches. Celles-ci ont pour objet les affirmations du Tribunal relatives au coût d’une procédure de liquidation judiciaire (60), à la durée d’une telle procédure (61), à la prétendue prudence de la Commission lors de l’appréciation des faits (62) et à la prétendue importance d’une dette restante après la clôture d’une procédure de liquidation judiciaire (63).

89.      Dans les quatre branches de ce moyen, Frucona affirme que le Tribunal a de manière illicite substitué son propre raisonnement et son évaluation économique des faits à ceux de la Commission. «De plus ou à titre subsidiaire» (64), Frucona fait valoir que le Tribunal a agi sur la base d’une appréciation manifestement incorrecte des preuves existantes. Étant donné que les questions juridiques soulevées dans les quatre branches de ce second moyen se ressemblent considérablement, il convient de les examiner ensemble.

90.      Dans la mesure où la Commission critique une nouvelle fois à titre liminaire les références croisées à la requête de première instance par lesquelles Frucona a enrichi son pourvoi, ses objections doivent être rejetées pour les mêmes raisons que celles que nous avons déjà exposées en lien avec le premier moyen (65).

1.      Grief selon lequel le Tribunal aurait substitué sa propre argumentation à celle de la Commission

91.      Frucona fait valoir tout d’abord que le Tribunal aurait à plusieurs reprises substitué sa propre argumentation et son analyse économique des faits à celles de la Commission et aurait commis ainsi une erreur de droit.

92.      Il est exact, dans le cadre d’un recours en annulation, que la Cour et le Tribunal ne peuvent, en toute hypothèse, substituer leur propre motivation à celle de l’auteur de l’acte attaqué (66). Il s’agit là d’une expression du caractère cassatoire du recours en annulation. Il repose en fin de compte sur le principe de l’équilibre institutionnel qui caractérise la structure et le fonctionnement de l’Union européenne. Le maintien de l’équilibre institutionnel implique que chacune des institutions exerce ses compétences dans le respect de celles des autres (67).

93.      Cela signifie que le juge de l’Union ne peut assortir un acte juridique de l’Union fondé sur des motifs inexacts, voire même illégaux, de motifs tout à fait différents pour ensuite le maintenir en l’état. En effet, en dehors du champ d’application de la compétence de pleine juridiction (article 261 TUE), le juge de l’Union ne peut réformer l’acte contesté, mais il doit le déclarer nul si et dans la mesure où le recours en annulation est fondé (article 264, premier alinéa, TFUE) (68). L’institution, l’organe ou l’organisme concernés sont alors tenus de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt en annulation (article 266, premier alinéa, TFUE).

94.      Toutefois, rien n’empêche le juge de l’Union d’examiner de manière intensive les moyens et arguments soulevés par le requérant pour vérifier leur bien-fondé et de les considérer de manière détaillée (69). Au contraire, l’article 264, premier alinéa, TFUE exige même un tel examen, parce que seul un recours en annulation (recevable et) bien fondé peut conduire à l’annulation de l’acte de l’Union contesté.

95.      Le Tribunal a précisément procédé à un tel examen dans le présent cas d’espèce: dans les passages de l’arrêt contestés par Frucona, il a confronté de manière approfondie les griefs et arguments soulevés par cette dernière dans le cadre de son recours en annulation aux arguments en défense de la Commission. À cet égard, le Tribunal a conclu qu’aucun des griefs soulevés par Frucona et aucun des arguments exposés par elle ne justifiaient l’annulation de la décision litigieuse (70).

96.      Dans la présente affaire, le Tribunal n’a en aucun cas considéré comme inexacts et illégaux les motifs exposés par la Commission dans la décision litigieuse ni n’a substitué son propre raisonnement divergent à ceux-ci. Le Tribunal n’a pas conclu non plus que la décision litigieuse devait être maintenue pour des motifs différents de ceux mentionnés par la Commission. Au contraire, il fonde l’arrêt attaqué sur le fait que la décision litigieuse ainsi que sa motivation résistent (encore) à un contrôle juridictionnel en dépit de faiblesses incontestables.

97.      Les motifs invoqués par la Commission dans la décision litigieuse pour établir qu’il s’agit d’une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE n’ont été corrigés par le Tribunal qu’au regard d’un seul point: il a constaté une erreur de calcul de la Commission en ce qui concerne les coûts d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire. Ensuite, il a corrigé de 239 millions de SKK à 225,5 millions de SKK l’évaluation exprimée par la décision litigieuse au sujet du produit minimal à attendre d’une éventuelle procédure de liquidation judiciaire pour le créancier public et a utilisé ce montant corrigé comme fondement de l’examen des arguments de Frucona (71).

98.      Il convient de faire observer à cet égard que, dans le cadre d’un recours en annulation, le Tribunal peut être amené à interpréter la motivation de l’acte attaqué d’une manière différente de son auteur, voire, dans certaines circonstances, à rejeter la motivation formelle retenue par celui-ci, lorsque cela est justifié par des éléments matériels (72).

99.      Dans le présent cas d’espèce, il existait pour le Tribunal un élément matériel ayant la forme d’une erreur de calcul de la Commission pour s’écarter ponctuellement des considérations par lesquelles la Commission avait justifié, dans la décision litigieuse, l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

100. Une telle déviation de la motivation de la décision litigieuse était – même en tenant compte du rôle du juge de l’Union dans une procédure en annulation (73) – justifiée, parce qu’elle n’avait aucun effet significatif sur la justesse en droit des conclusions de la Commission (à savoir l’existence d’une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE). En revanche, une annulation de la décision litigieuse aurait été totalement disproportionnée par rapport à l’importance et aux effets de l’erreur de calcul constatée.

101. Certes, les montants calculés étaient, à partir de ce moment-là, très proches l’un de l’autre compte tenu du fait que le produit minimal résultant de la vente des actifs auquel pouvait s’attendre le fisc slovaque à la suite d’une procédure éventuelle en liquidation judiciaire ne s’élevait plus qu’à 225,5 millions de SKK après correction de l’erreur de calcul. Comme l’expose le Tribunal, ce montant corrigé est «quasi égal» à la somme de 224,3 millions de SKK versée effectivement par Frucona à l’administration fiscale locale dans le cadre du concordat. Il n’en demeure pas moins que le montant de 225,5 millions de SKK, qui ne constitue par ailleurs qu’une estimation très prudente, était encore de 1,2 million de SKK supérieur au montant de 224,3 millions de SKK perçu effectivement par l’autorité fiscale locale (74).

102. C’est à juste titre que, compte tenu de cette situation de fait, le Tribunal a conclu que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste en considérant que le produit de la vente des actifs de la requérante dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire, déduction faite des coûts s’y rapportant, aurait été plus favorable que le montant obtenu par les autorités slovaques en exécution du concordat (75).

103. Compte tenu du large pouvoir d’appréciation dont dispose la Commission lors de l’appréciation de situations économiques complexes (76), le Tribunal ne pouvait imputer à la Commission aucune erreur manifeste d’appréciation sur ce point. La thèse selon laquelle un créancier privé raisonnable agissant dans des conditions d’économie de marché aurait opté pour une procédure en liquidation judiciaire avec un produit minimal prévisible de 225,5 millions de SKK plutôt que de se satisfaire du paiement immédiat d’une somme de 224,3 millions de SKK était au minimum bien défendable. Contrairement à ce que pense Frucona, il n’était en aucun cas certain dans les circonstances particulières du cas d’espèce, circonstances que le Tribunal a par ailleurs examinées de manière détaillée (77), qu’un créancier privé, compte tenu de l’éventuelle perte de temps liée à une procédure de liquidation judiciaire, se serait décidé pour le paiement immédiat de 224,3 millions de SKK et pour une renonciation au restant de la dette plutôt que pour un désintéressement à partir de la masse de la faillite.

104. Dans ce contexte, il convient également de rappeler que le critère jurisprudentiel des facilités de paiement que l’entreprise bénéficiaire n’aurait «manifestement» pas obtenues de la part d’un créancier privé dans des conditions comparables ne doit pas être compris comme un critère quantitatif (78). Bien au contraire, il suffit que le comportement d’un créancier privé assumé dans la décision litigieuse (à savoir le fait d’insister sur une procédure de liquidation judiciaire) puisse être considéré, dans une situation comparable et en tenant compte du pouvoir d’appréciation de la Commission, comme plus vraisemblable que le comportement dont a finalement fait preuve un créancier public (à savoir la renonciation à 65 % de ses créances dans le cadre d’un concordat). Il n’existe pas ici d’exigences accrues en matière de probabilité (79).

105. En résumé, le premier grief de Frucona exposé dans ce second moyen est dès lors mal fondé.

2.      Grief tenant à la dénaturation des moyens de preuve

106. Enfin, il reste à examiner le deuxième grief soulevé par Frucona dans le cadre de ce second moyen et qui concerne la question de la dénaturation des moyens de preuve.

a)      Recevabilité

107. La dénaturation des moyens de preuve est en principe une question juridique dont peut être saisie la Cour de manière recevable dans le cadre d’un pourvoi. Toutefois, en application de l’article 256, premier alinéa, TFUE, de l’article 51, paragraphe 1, du statut de la Cour de justice et de l’article 112, paragraphe 1, premier alinéa, sous c), du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il allègue une dénaturation d’éléments de preuve par le Tribunal, un requérant doit indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par cette juridiction et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation (80).

108. Frucona n’a pas pu satisfaire à ces exigences élevées dans son pourvoi. Certes, elle a expliqué longuement les raisons pour lesquelles elle ne considérait pas que les explications du Tribunal relatives au coût d’une procédure de liquidation judiciaire, à la durée d’une telle procédure, à la prétendue prudence de la Commission lors de son évaluation des faits et à l’importance supposée du restant de la dette après la clôture d’une procédure de liquidation judiciaire étaient justes. Toutefois, elle ne donne pas d’éléments précis sur les éléments de preuve concrets que le Tribunal aurait dénaturés et dans lesquels résiderait précisément l’erreur d’appréciation en question. Frucona se limite principalement à prétendre de manière globale en une seule phrase, voire même en une demi-phrase, à la fin de chaque branche de ses affirmations relatives au second moyen que le Tribunal se serait fondé sur une «dénaturation manifeste» ou sur une «appréciation manifestement inexacte» des «éléments de preuve existants».

109. Dans ces circonstances, nous considérons que le grief tenant à la dénaturation des moyens de preuve n’a tout simplement pas été soulevé de manière recevable.

b)      Bien-fondé

110. Même si l’on voulait considérer ce grief recevable, il serait en tout état de cause non fondé.

111. Il est exact que la requérante a expliqué en plusieurs pages les raisons pour lesquelles elle considérait que les explications du Tribunal relatives au coût d’une procédure de liquidation judiciaire, à la durée d’une telle procédure, à la prétendue prudence de la Commission lors de son évaluation des faits et à l’importance supposée du restant de la dette après la clôture d’une procédure de liquidation judiciaire n’était pas convaincantes.

112. Or, ce n’est pas de cela qu’il s’agit lorsqu’il est question d’une dénaturation des moyens de preuve. En effet, une telle dénaturation existe lorsque, sans avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments de preuve existants apparaît manifestement erronée (81). En d’autres mots, l’appréciation des moyens de preuve effectuée dans l’arrêt attaqué doit être simplement non défendable et l’erreur d’appréciation commise par le Tribunal doit tout simplement s’imposer avec clarté. Si les moyens de preuve fournis peuvent être interprétés de plusieurs manières, comme cela est souvent le cas dans des situations économiques complexes, alors il ne peut être reproché au Tribunal d’avoir opté pour une d’entre elles, même si la requérante, voire le Tribunal lui‑même considèrent qu’une autre interprétation a leur préférence.

113. Il est possible d’avoir des avis différents sur la question de savoir si, dans la présente espèce, les affirmations du Tribunal relatives au coût d’une procédure de liquidation judiciaire, à la prudence de la Commission dans l’évaluation des faits et à l’importance de la dette restante après la clôture d’une procédure de liquidation judiciaire sont convaincantes. Toutefois, les conclusions tirées par le Tribunal sur la base des moyens de preuve disponibles n’apparaissent pas manifestement erronées.

114. Il en va de même de la question discutée intensivement dans le cadre des procédures écrite et orale devant la Cour, à savoir si la Commission a examiné dans sa décision la durée d’une procédure de liquidation judiciaire. Selon le Tribunal, «il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir ignoré cette question et la position de la requérante à cet égard» (82). Frucona insiste, par contre, sur le fait que la décision litigieuse est muette au sujet de la question de la durée d’une procédure de liquidation judiciaire et reproche au Tribunal à cet égard d’avoir dénaturé ladite décision.

115. Ce reproche est infondé. Certes, il est exact que la décision litigieuse n’indique pas explicitement si la Commission a examiné la question de la durée d’une procédure de liquidation judiciaire ni de quelle manière elle a tenu compte de cette question lors de l’application du critère du créancier privé. Toutefois, contrairement à l’opinion de Frucona, on ne saurait conclure automatiquement de ce silence de la décision litigieuse que la Commission est passée à côté de la problématique de la durée d’une procédure de liquidation judiciaire. La décision litigieuse est sur ce point ouverte à l’interprétation. C’est la raison pour laquelle on ne saurait considérer comme manifestement erroné le fait que le Tribunal – contrairement à la requérante – juge que la Commission a traité de cette problématique et du point de vue exprimé à cet égard par Frucona. Cela est d’autant plus vrai que, dans les points 40 et 54 de la décision litigieuse auxquels le Tribunal fait expressément référence (83), il existe des éléments clairs montrant que la Commission était à tout le moins consciente de cette problématique. Compte tenu des circonstances concrètes de l’espèce (84), il est possible que la Commission ne considérait pas cette question comme déterminante et a renoncé pour cette raison à exposer dans ses motifs des explications plus détaillées relatives à la durée d’une éventuelle procédure en liquidation judiciaire (85).

116. En résumé, j’ai l’impression que Frucona souhaite en vérité amener la Cour à une nouvelle évaluation des faits et des moyens de preuve appréciés par le Tribunal en première instance, sous le couvert d’un grief tenant à la dénaturation. Or, une telle façon d’agir est incompatible avec la nature du pourvoi dans lequel la Cour doit se limiter, selon l’article 256, premier alinéa, TFUE à l’examen de questions de droit (86).

117. Dans ces conditions, le grief tenant à la dénaturation des moyens de preuve est non seulement irrecevable, mais également non fondé.

3.      Résultat intermédiaire

118. En résumé, il convient dès lors de rejeter intégralement le second moyen soulevé par Frucona.

V –    Les dépens

119. Si le pourvoi est rejeté, comme nous le suggérons dans la présente affaire, la Cour statue sur les dépens (article 122, paragraphe 1, du règlement de procédure), les détails découlant de l’article 69 en combinaison avec l’article 18 du règlement de procédure.

120. Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Puisque Frucona succombe et que la Commission et St. Nicolaus-trade en tant qu’autres parties à la procédure avaient conclu en ce sens, Frucona doit être condamnée aux dépens de ces parties.

VI – Conclusion

121. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit:

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Frucona Košice a.s. est condamnée aux dépens.


1 –      Langue originale: l’allemand.


2 –      La solution du présent litige doit encore se fonder sur l’interdiction des aides d’État établie par le droit de l’Union telle que prévue à l’article 87, paragraphe 1, CE, parce que la décision litigieuse de la Commission a été adoptée le 7 juin 2006, et donc avant le traité de Lisbonne.


3 –      Fondamental à cet égard est l’arrêt du 21 mars 1991, Italie/Commission (C‑303/88, Rec. p. I‑1433, points 20 à 22); voir, en outre, arrêt récent du 5 juin 2012, Commission/EDF (C‑124/10 P).


4 –      Selon les termes de l’avocat général Poiares Maduro au point 36 de ses conclusions du 1er avril 2004 dans l’affaire Espagne/Commission (arrêt du 14 septembre 2004, C‑276/02, Rec. p. I‑8091).


5 –      Arrêt du 29 juin 1999 (C‑256/97, Rec. p. I‑3913, point 30).


6 – Décision de la Commission du 5 juillet 2005 [aide d’État no C 25/2005 (anciennement NN 21/2005), publiée dans la langue de la procédure dans le JO 2005, C 233, p. 47, avec traduction résumée].


7 –      Décision de la Commission concernant l’aide d’État C 25/2005 (ex NN 21/2005) mise à exécution par la République slovaque en faveur de Frucona Košice a.s. (JO 2007, L 112, p. 14).


8 –      Arrêt Frucona Košice/Commission (T‑11/07, Rec. p. II‑5453).


9 –      Ordonnances du 14 décembre 1995, Hogan/Cour de justice (C‑173/95 P, Rec. p. I‑4905, point 20); du 17 septembre 1996, San Marco/Commission (C‑19/95 P, Rec. p. I‑4435, point 37); arrêts du 11 septembre 2007, Lindorfer/Conseil (C‑227/04 P, Rec. p. I‑6767, point 45); du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission (C‑67/09 P, Rec. p. I‑9811, point 48), et du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission (C‑521/09 P, Rec. p. I‑8947, point 144).


10 –      Voir, en ce sens, arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, points 94, 97 et 100), et ordonnance du Tribunal du 28 juin 2011, van Arum/Parlement (T‑454/09 P, non encore publiée au RecFP, point 133).


11 –      «Local expertise as to the levels of recovery to be expected under the bankruptcy procedure» (points 35 à 41 du pourvoi).


12 –      «Conclusion in respect of the first plea» (point 34 du pourvoi).


13 –      Voir, à cet égard, notamment point 212 de l’arrêt attaqué.


14 –      Arrêts du 14 mai 1998, Conseil/de Nil et Impens (C‑259/96 P, Rec. p. I‑2915, points 32 et 33); du 17 mai 2001, IECC/Commission (C‑449/98 P, Rec. p. I‑3875, point 70); du 2 avril 2009, France Télécom/Commission (C‑202/07 P, Rec. p. I‑2369, point 29), et du 14 octobre 2010, Deutsche Telekom/Commission (C‑280/08 P, Rec. p. I‑9555, point 136).


15 –      Voir, sur ce point, arrêt du 25 octobre 2007, Komninou e.a./Commission (C‑167/06 P, point 22).


16 –      Voir, au sujet de cet argument du Tribunal, notamment point 212 de l’arrêt attaqué.


17 –      Dans la langue de la procédure: «manifestly more generous».


18 –      Point 89, deuxième phrase, de l’arrêt attaqué.


19 –      Points 89, troisième phrase, et 92 de l’arrêt attaqué.


20 –      Jurisprudence constante; voir arrêts du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, Rec. p. I‑7747, points 74 et 75); du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a. (C‑341/06 P et C‑342/06 P, Rec. p. I‑4777, points 121, 122 et 129), et du 17 novembre 2009, Presidente del Consiglio dei Ministri (C‑169/08, Rec. p. I‑10821, point 52).


21 –      Voir, notamment, arrêts Presidente del Consiglio dei Ministri (précité à la note 20) et Commission/EDF (précité à la note 3); du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission (C‑487/06 P, Rec. p. I‑10515), et du 21 juin 2012, BNP Paribas et BNL/Commission (C‑452/10 P).


22 –      Arrêt DM Transport (précité à la note 5, point 22); voir, en outre, arrêts du 11 juillet 1996, SFEI e.a. (C‑39/94, Rec. p. I‑3547, point 60); du 29 avril 1999, Espagne/Commission (C‑342/96, Rec. p. I‑2459, point 41), et Commission/EDF (précité à la note 3, point 78).


23 –      Arrêts du 29 avril 1999, Espagne/Commission (précité à la note 22, point 46), et DM Transport (précité à la note 5, points 24 et 25); voir, également, arrêt du Tribunal du 11 juillet 2002, HAMSA/Commission (T‑152/99, Rec. p. II‑3049, point 167).


24 –      Arrêt précité à la note 5, point 30 et dispositif.


25–      Ibidem, point 25. Plus encore que le dispositif de l’arrêt DM Transport, il semblerait que cette formulation des motifs s’oriente d’après les conclusions de l’avocat général Jacobs du 24 septembre 1998 dans cette affaire: selon celui-ci, il est question d’une aide d’État lorsque les facilités de paiement litigieuses sont «manifestement plus libérales» que celles qu’aurait accordées un créancier privé dans des circonstances comparables (points 34, 37 et 45 des conclusions). Les arrêts du Tribunal HAMSA/Commission (précité à la note 23, point 170) et du 12 septembre 2007, Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission (T‑68/03, Rec. p. II‑2911, point 283), vont dans le même sens, même s’ils sont formulés de manière aussi elliptique que l’arrêt DM Transport.


26 –      Arrêt précité à la note 5, points 25 et 30 et dispositif.


27–      Voir encore, sur ce point, points 34, 37 et 45 des conclusions de l’avocat général Jacobs dans l’affaire DM Transport (précitée à la note 5).


28 –      Ce qui est considéré actuellement comme la réglementation générale du droit de l’Union en matière d’aides de minimis est le règlement (CE) no 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l’application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis (JO L 379, p. 5). Lors de l’adoption de la décision litigieuse, le règlement (CE) no 69/2001 de la Commission, du 12 janvier 2001, concernant l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis (JO L 10, p. 30), était applicable.


29 –      C’est ce que reconnaît également la Cour dans l’arrêt DM Transport (précité à la note 5, point 30 et dispositif) par la formulation «compte tenu de l’importance de l’avantage économique ainsi octroyé».


30 –      Voir, sur ce point, notamment point 137 de l’arrêt attaqué dans lequel le Tribunal constate que le montant prévisible dans une procédure de liquidation judiciaire est «quasi égal» au montant dont Frucona s’est acquittée en exécution du concordat.


31 –      Comme il ressort du point 137 de l’arrêt attaqué, le produit minimal de la procédure de liquidation judiciaire estimé dans la décision litigieuse (239 millions de SKK) était en fait mal calculé. Si l’on rectifie l’erreur de calcul de la Commission, il en résulte, selon le Tribunal, une somme de 225,5 millions de SKK. Voir, à ce sujet, points 97 à 104 des présentes conclusions.


32 –      Voir, à ce sujet, points 11 et 22 de l’arrêt attaqué.


33 –      Arrêt précité à la note 5, point 30 et dispositif.


34 –      Voir, à ce sujet, point 67 de nos conclusions du 26 mai 2011 dans l’affaire Residex Capital IV (arrêt du 8 décembre 2011, C‑275/10, Rec. p. I‑13043).


35 –      Comme il ressort de l’arrêt DMT (précité à la note 5), il est également possible que les juges nationaux, dans le cadre de leur compétence – à savoir l’exécution de l’obligation de «stand‑still» de l’article 108, paragraphe 3, troisième phrase, TFUE (anciennement l’article 88, paragraphe 3, troisième phrase, CE) – soient tenus d’appliquer le critère du créancier privé. Ils doivent alors mettre en œuvre le critère du créancier privé de la même manière que la Commission.


36 –      Sur ce sujet, voir encore une fois l’arrêt Commission/EDF (précité à la note 3, point 78).


37 –      En ce sens, s’agissant du critère de l’investisseur privé, voir arrêt Commission/EDF (précité à la note 3, points 86 et 104).


38 –      Arrêt du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing (C‑525/04 P, Rec. p. I‑9947, point 59).


39 –      Sur ce point, voir également conclusions de l’avocat général Mischo du 8 juin 2000 dans l’affaire Espagne/Commission (arrêt du 12 octobre 2000, C‑480/98, Rec. p. I‑8717), points 35 et 36, et de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire Espagne/Commission (arrêt du 14 septembre 2004, précité à la note 4), points 37 à 39.


40       Voir, à ce sujet, points 52 à 56 des présentes conclusions.


41 –      Les procédures devant la Commission ont un caractère de droit administratif, alors que les procédures devant les juridictions nationales fondées sur l’article 88, paragraphe 3, troisième phrase, CE (article 108, paragraphe 3, troisième phrase, TFUE) peuvent avoir également un caractère de droit civil. Cela ne fait toutefois aucune différence au regard de la question du pouvoir d’appréciation qui se pose en l’espèce.


42 –      Sur ce point, voir également – en lien avec une procédure administrative de contrôle des concentrations – points 206 à 211 de nos conclusions du 13 décembre 2007 dans l’affaire Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (arrêt du 10 juillet 2008, C‑413/06 P, Rec. p. I‑4951).


43 –      Point 89, dernière phrase, de l’arrêt attaqué; dans le même sens, voir point 92 dudit arrêt. Le Tribunal allait déjà dans le même sens dans l’arrêt HAMSA/Commission (précité à la note 23, point 172), dans lequel il se fondait simplement sur le fait qu’un créancier privé aurait «récupéré une partie plus importante des créances» en cas de liquidation de l’entreprise en cause.


44 –      Point 36 des conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire Espagne/Commission (arrêt du 14 septembre 2004, précité à la note 4).


45 –      Point 128 de l’arrêt attaqué.


46 –      Arrêts du 16 mai 2000, France/Ladbroke Racing et Commission (C‑83/98 P, Rec. p. I‑3271, point 25); British Aggregates/Commission (précité à la note 21, point 111), et BNP Paribas et BNL/Commission (précité à la note 21, points 100 et 104); voir, en outre, arrêts HAMSA/Commission (précité à la note 23, point 159) et Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission (précité à la note 25, point 284).


47 –      Dans ce sens, arrêt HAMSA/Commission (précité à la note 23, points 165 et 171), dans lequel il est examiné si la méthode appliquée par la Commission résiste à un examen juridique.


48 –      Dans ce sens – s’agissant du critère de l’investisseur privé – arrêt Commission/EDF (précité à la note 3, points 86 et 104); voir en outre – s’agissant du critère du créancier privé – point 37 des conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire Espagne/Commission (arrêt du 14 septembre 2004, précité à la note 4): «prise en compte de tous les facteurs».


49 –      Points 123 à 129 de l’arrêt attaqué; au point 123 de cet arrêt, il est fait référence expressément aux points 40 et 54 des motifs de la décision litigieuse.


50 –      Point 123 de l’arrêt attaqué. Nous avons examiné, aux points 114 et 115 ci-dessous, la question de savoir si, par cette conclusion, le Tribunal a dénaturé le contenu de la décision litigieuse.


51 –      Arrêts du 29 février 1996, Belgique/Commission (C‑56/93, Rec. p. I‑723, point 11); du 2 septembre 2010, Commission/Scott (C‑290/07 P, Rec. p. I‑7763, point 64), et Espagne/Lenzing (précité à la note 38, point 56); voir, également, arrêts HAMSA/Commission (précité à la note 23, point 127) et Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission (précité à la note 25, point 285).


52 –      Arrêts Chronopost et La Poste/UFEX e.a. (précité à la note 20, point 143) et Commission/Scott (précité à la note 51, point 66, dernière phrase).


53 –      Ordonnance du 25 avril 2002, DSG/Commission (C‑323/00 P, Rec. p. I‑3919, point 43), et arrêts Espagne/Lenzing (précité à la note 38, point 57, dernière phrase) et Commission/Scott (précité à la note 51, point 66, première phrase).


54 –      Voir points 123 à 129 de l’arrêt attaqué, et notamment point 129.


55 –      Voir, à ce sujet, points 123 à 127 de l’arrêt attaqué.


56 –      La Commission a souligné à plusieurs reprises, notamment lors de l’audience, qu’en l’espèce la durée de la procédure de liquidation judiciaire n’aurait pas joué un rôle particulièrement plus important pour la prise de décision d’un créancier privé. Cela a été fortement contesté par Frucona.


57 –      Voir, à cet égard, points 124 à 126 de l’arrêt attaqué.


58 –      Voir, à cet égard, notamment points 128 et 137 de l’arrêt attaqué.


59 –      Voir, à cet égard, point 84 de nos conclusions du 17 septembre 2009 dans l’affaire Commission/Alrosa (arrêt du 29 juin 2010, C‑441/07 P, Rec. p. I‑5949).


60 –      Points 134 à 137 de l’arrêt attaqué.


61 –      Points 123 à 129 de l’arrêt attaqué.


62 –      Points 116 à 120, 128, 137 et 185 à 190 de l’arrêt attaqué.


63 –      Points 113 et 121 de l’arrêt attaqué.


64 –      Dans la langue de la procédure: «Further or alternatively».


65 –      Voir, ci-dessus, points 26 et 27 des présentes conclusions.


66 –      Arrêts du 27 janvier 2000, DIR International Film e.a./Commission (C‑164/98 P, Rec. p. I‑447, points 38 et 49); du 1er juin 2006, P&O European Ferries (Vizcaya) et Diputación Foral de Vizcaya/Commission (C‑442/03 P et C‑471/03 P, Rec. p. I‑4845, points 60 et 67), et British Aggregates/Commission (précité à la note 21, point 141).


67 –      Arrêts du 22 mai 1990, Parlement/Conseil (C‑70/88, Rec. p. I‑2041, point 22), et du 6 mai 2008, Parlement/Conseil (C‑133/06, Rec. p. I‑3189, point 57); dans le même sens, arrêt du 15 novembre 2011, Commission/Allemagne (C‑539/09, Rec. p. I‑11235, point 56).


68 –      Sur ce point, voir encore une fois la jurisprudence citée à la note 66.


69 –      Dans le même sens, voir arrêts du 2 avril 2009, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission (C‑431/07 P, Rec. p. I‑2665, point 68), et du 19 juillet 2012, Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, points 121 et 122).


70 –      Voir, notamment, points 149 à 151 et 168 de l’arrêt attaqué.


71 –      Point 137 de l’arrêt attaqué.


72 –      Arrêts DIR International Film e.a./Commission (précité à la note 66, point 42) et British Aggregates/Commission (précité à la note 21, point 142).


73 –      Voir, à ce sujet, ci-dessus points 92 à 94 des présentes conclusions.


74 –      Le 9 juillet 2004, le jour où les autorités fiscales locales ont approuvé la proposition de concordat de Frucona, 1,2 million de SKK correspondaient à 30 079 euros (taux de change selon JO 2004, C 178, p. 1). Le 17 décembre 2004, jour où Frucona a versé le montant des droits d’accises convenus dans le concordat aux autorités fiscales locales, 1,2 million de SKK correspondait à 31 061 euros (taux de change selon JO 2004, C 313, p. 1).


75 –      Point 137 de l’arrêt attaqué.


76 –      Voir, à ce sujet, notamment point 60 des présentes conclusions.


77 –      Points 124 à 128 de l’arrêt attaqué.


78 –      Voir, ci-dessus, points 48 à 51 des présentes conclusions.


79 –      Voir, ci-dessus, points 61 et 62 des présentes conclusions.


80 –      Arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission (C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec. p. I‑123, points 50 et 159); du 17 juin 2010, Lafarge/Commission (C‑413/08 P, Rec. p. I‑5361, point 16), et du 9 juin 2011, Comitato «Venezia vuole vivere» e.a./Commission (C‑71/09 P, C‑73/09 P et C‑76/09 P, Rec. p. I‑4727, point 152).


81 –      Arrêts du 18 janvier 2007, PKK et KNK/Conseil (C‑229/05 P, Rec. p. I‑439, point 37); du 22 novembre 2007, Sniace/Commission (C‑260/05 P, Rec. p. I‑10005, point 37), et Comitato «Venezia vuole vivere» e.a./Commission (précité à la note 80, point 153).


82 –      Point 123 de l’arrêt attaqué.


83 –      Voir, encore une fois, point 123 de l’arrêt attaqué.


84 –      Ces circonstances ont été décrites de manière plus détaillée aux points 124 à 128 de l’arrêt attaqué. Au cours de la procédure devant la Cour, elles faisaient également l’objet d’une discussion intensive et hautement controversée.


85 –      La Commission s’est peut-être fondée dans ce contexte – à tort ou à raison – sur la jurisprudence selon laquelle, dans les motivations de ces décisions, elle n’est pas tenue de prendre position sur des éléments qui sont manifestement hors de propos, dépourvus de signification ou clairement secondaires (arrêts Chronopost et La Poste/UFEX e.a., précité à la note 20, point 89; Elf Aquitaine/Commission, précité à la note 9, point 154, et Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, précité à la note 42, point 167).


86 –      Arrêts du 15 mars 2007, British Airways/Commission (C‑95/04 P, Rec. p. I‑2331, point 137); du 29 mars 2011, ThyssenKrupp Nirosta/Commission (C‑352/09 P, Rec. p. I‑2359, point 180); Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (précité à la note 42, point 29), et Elf Aquitaine/Commission (précité à la note 9, point 68).