Language of document : ECLI:EU:T:2017:173

Édition provisoire

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

16 mars 2017 (*)

Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative MOUNTAIN CITRUS SPAIN – Marque de l’Union européenne figurative antérieure monteCitrus – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Identité des produits – Absence de similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑495/15,

Sociedad agraria de transformación n° 9982 Montecitrus, établie à Pulpí (Espagne), représentée par Me N. Fernández Fernández-Pacheco, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Schifko et Mme K. Sidat Humphreys, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Spanish Oranges, SL, établie à Castellón (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 26 juin 2015 (affaire R 871/2014‑4), relative à une procédure d’opposition entre Sociedad agraria de transformación n° 9982 Montecitrus et Spanish Oranges,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović, président, MM. E. Bieliūnas et A. Kornezov (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 27 août 2015,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 3 décembre 2015,

vu la question écrite du Tribunal à Spanish Oranges et l’absence de réponse à cette question dans le délai imparti,

vu l’ordonnance du 18 mars 2016 refusant à Spanish Oranges la qualité d’intervenant,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

vu la réattribution de l’affaire à la septième chambre et à un nouveau juge rapporteur,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 24 octobre 2012, Spanish Oranges, SL, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 29, 31 et 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        « fruits et légumes en conserve, congelés, séchés et cuits », relevant de la classe 29 ;

–        « oranges », relevant de la classe 31 ;

–        « transport », relevant de la classe 39.

4        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 229/2012, du 30 novembre 2012.

5        Le 28 février 2013, la requérante, Sociedad agraria de transformación n° 9982 Montecitrus, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure reproduite ci-après :

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7        La marque antérieure, enregistrée le 5 juin 2010 sous le numéro 5460175, désigne des produits relevant des classes 29, 31 et 32 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        « confitures, compotes, gélatines, gelées ; fruits et légumes en conserve, séchés et cuits ; œufs ; huiles et graisses comestibles ; viande, poisson, volaille et gibier ; extraits de viande », relevant de la classe 29 ;

–        « fruits et légumes frais ; produits agricoles, horticoles, forestiers et graines, non compris dans d’autres classes ; animaux vivants, plantes et fleurs naturelles ; aliments pour animaux ; malt », relevant de la classe 31 ;

–        « boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons ; bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques », relevant de la classe 32.

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

9        Le 30 janvier 2014, la division d’opposition a rejeté l’opposition et a admis l’enregistrement intégral de la marque demandée.

10      Le 28 mars 2014, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 26 juin 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours. En ce qui concerne, tout d’abord, la comparaison des produits et des services, elle a fait sienne l’analyse de la division d’opposition selon laquelle, d’une part, les produits visés par la marque demandée et ceux couverts par la marque antérieure étaient identiques et, d’autre part, les services désignés par ladite demande, à savoir les services de transport, et les produits couverts par la marque antérieure n’étaient pas similaires, en précisant que les parties n’avaient pas présenté d’argument ou de raison venant infirmer l’analyse en question. Ensuite, quant à la comparaison des signes en conflit, elle a relevé leur faible similitude visuelle et leur similitude phonétique inférieure à la moyenne. Elle a également noté, premièrement, qu’il ne pouvait être exclu que, dans la perception qu’en aurait le consommateur moyen espagnol, ces signes évoquent une idée similaire, deuxièmement, qu’il y avait coïncidence desdits signes quant à l’élément « citrus » pour la partie du public pertinent comprenant exclusivement l’idée sous-tendant ce terme et, troisièmement, qu’il n’existait aucune similitude conceptuelle pour la partie dudit public ne percevant aucun concept au sein des signes en question. La chambre de recours a précisé, concernant le premier cas de figure, que l’idée d’un « fruit produit par un agrume sur une surface de la terre qui n’est pas plane mais en pente » était descriptive du type de produits en cause ainsi que d’une caractéristique de ces derniers, à savoir l’emplacement géographique où ils sont obtenus, et, concernant le deuxième cas de figure, que l’élément « citrus » identifiait simplement le type de produits en cause. Enfin, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, elle a indiqué que, compte tenu du principe d’interdépendance des facteurs pris en compte, il y avait lieu de considérer que l’identité des produits visés par la marque demandée et de ceux couverts par la marque antérieure était, en l’espèce, neutralisée par le faible degré de similitude visuelle des signes. En effet, pour les produits en question, le résultat de l’analyse de la similitude visuelle entre ces signes deviendrait plus important que le résultat de l’analyse de la similitude phonétique et conceptuelle. Elle a donc conclu que, même pour les produits couverts par la marque demandée, qui avaient été jugés identiques à ceux de la marque antérieure, et en l’absence d’un caractère distinctif accru de cette dernière du fait de l’usage qui en avait été fait, il n’y avait pas de risque de confusion. Pour les services visés par la marque demandée, elle a indiqué que, ne serait-ce qu’en raison de l’absence de similitude entre lesdits services et les produits couverts par la marque antérieure, un tel risque était, par définition, exclu.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        refuser, par conséquent, l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits visés par elle, relevant des classes 29 et 31 ;

–        condamner Spanish Oranges aux dépens.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante

14      Par le deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal, ainsi que cela est indiqué au point 12 ci-dessus, de refuser l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits visés par celle-ci, relevant des classes 29 et 31. De telles conclusions tendent donc à ce que le Tribunal adresse une injonction en ce sens à l’EUIPO.

15      Or, il résulte d’une jurisprudence constante que, dans le cadre d’un recours introduit devant le juge de l’Union européenne contre la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO, ce dernier est tenu, conformément à l’article 65, paragraphe 6, du règlement n° 207/2009, de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge de l’Union. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’EUIPO, auquel il incombe de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge de l’Union [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 20 et jurisprudence citée]. Partant, les conclusions de la requérante tendant à ce que le Tribunal refuse l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits visés par elle, relevant des classes 29 et 31, sont irrecevables.

 Sur l’objet des conclusions en annulation

16      L’EUIPO soutient que les conclusions en annulation de la requérante ne tendent à l’annulation de la décision attaquée qu’en tant que la chambre de recours a exclu tout risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure s’agissant des produits concernés et non des services de transport relevant de la classe 39, également visés par la marque demandée.

17      Il y a lieu de relever, en effet, que la requérante ne présente, à l’appui des conclusions en annulation et du moyen unique, que des arguments factuels et juridiques se rapportant aux produits visés par la marque demandée et couverts par la marque antérieure. Il s’ensuit, dès lors, à la lumière de l’ensemble de la requête, que, en réalité, la requérante n’entend pas demander l’annulation de la décision attaquée en tant que la chambre de recours a exclu tout risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure s’agissant des services de transport relevant de la classe 39. Par conséquent, il convient de considérer que le Tribunal n’est saisi, en réalité, que d’une demande d’annulation partielle de la décision attaquée, en ce que la chambre de recours a exclu tout risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure s’agissant des produits concernés.

 Sur le fond

18      La requérante invoque, au soutien de la demande d’annulation partielle de la décision attaquée, un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Elle estime, en substance, que les signes en conflit présentent une certaine similitude visuelle et, contrairement à ce qu’a estimé la chambre de recours, un degré élevé de similitude phonétique ainsi qu’une identité conceptuelle. Elle réfute en outre l’appréciation globale de la chambre de recours quant au risque de confusion et, indirectement, la définition du public pertinent.

19      L’EUIPO ne conteste pas le bien-fondé des observations de la requérante quant à la définition du public pertinent, mais nie qu’elles puissent avoir une incidence sur le degré d’attention dudit public lors de l’achat des produits visés par la marque demandée et couverts par la marque antérieure. Quant à la comparaison des signes en conflit, l’EUIPO reprend, en les développant et en les faisant siens, les motifs mis en avant par la chambre de recours.

20      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

21      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

22      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

23      La chambre de recours a indiqué, au point 13 de la décision attaquée, que, en l’espèce, le public pertinent était le consommateur moyen faisant partie du grand public, dont le degré d’attention, compte tenu du fait que les produits en cause étaient d’un usage quotidien ou relevaient d’une consommation courante, n’était ni particulièrement élevé ni particulièrement faible.

24      La requérante fait valoir que la chambre de recours a omis de prendre en considération le fait que Spanish Oranges et elle-même, en qualité de producteurs, ne vendaient pas directement leurs produits à des clients finaux, mais à des intermédiaires, tels que les détaillants, les supermarchés, etc. Ce serait donc à tort que la chambre de recours aurait uniquement concentré son analyse sur la perception du consommateur final.

25      L’EUIPO indique, pour sa part, que l’argument de la requérante relatif à l’absence de prise en compte de la nature et, par suite, du comportement de ses clients et de ceux de Spanish Oranges n’a été soulevé ni devant la division d’opposition ni devant la chambre de recours. Par conséquent, cette dernière n’aurait pu négliger un point qui n’était pas soumis à son attention. Sur le fond, l’EUIPO ne conteste pas que la prise en considération des clients intermédiaires est pertinente, même lorsque les produits sont destinés au grand public. Il rappelle toutefois que, selon la jurisprudence, la perception des consommateurs finaux est déterminante et que, lorsque le public pertinent est composé à la fois de professionnels et de non-professionnels, c’est par rapport à la partie du public ayant le degré d’attention le moins élevé que le risque de confusion doit être apprécié. Par conséquent, la présence de professionnels au sein du public pertinent ne ferait qu’amoindrir l’argumentaire de la requérante visant à établir l’existence d’un tel risque.

26      Il échet d’indiquer que la division d’opposition avait, elle aussi, considéré, dans sa décision du 30 janvier 2014, que les produits en cause étaient destinés au grand public et que, comme le relève l’EUIPO, cette analyse n’avait pas été contestée au cours de la procédure devant lui. L’EUIPO ne conteste toutefois pas que la prise en considération des clients intermédiaires est pertinente, même lorsque les produits sont destinés au grand public. À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, la perception du milieu des consommateurs ou des utilisateurs finaux a un rôle déterminant, car tout le processus de commercialisation a pour objectif l’acquisition du produit au sein de ce milieu et le rôle des intermédiaires consiste autant à déceler et à anticiper la demande de ce produit qu’à l’amplifier ou à l’orienter. Ainsi, les milieux intéressés comprennent avant tout les consommateurs et les utilisateurs finaux. Cependant, en fonction des caractéristiques du marché du produit concerné, l’influence des intermédiaires sur les décisions d’acquisition et donc leur perception de la marque doivent également être prises en considération (arrêt du 29 avril 2004, Björnekulla Fruktindustrier, C‑371/02, EU:C:2004:275, points 24 et 25). Toutefois, comme le souligne l’EUIPO, même à supposer que la définition du public pertinent puisse être considérée comme étant incomplète, cela n’aura pas d’incidence en l’espèce. En effet, selon la jurisprudence, lorsque le public pertinent est composé de consommateurs faisant partie du grand public et de professionnels, le public présentant le degré d’attention le moins élevé doit être pris en considération [arrêts du 15 juillet 2011, Ergo Versicherungsgruppe/OHMI – Société de développement et de recherche industrielle (ERGO Group), T‑221/09, non publié, EU:T:2011:393, point 21 ; du 29 avril 2015, Chair Entertainment Group/OHMI – Libelle (SHADOW COMPLEX), T‑717/13, non publié, EU:T:2015:242, point 27, et du 30 septembre 2016, Flowil International Lighting/EUIPO – Lorimod Prod Com (Silvania Food), T‑430/15, non publié, EU:T:2016:590, point 19].

27      Il s’ensuit que, en l’espèce, c’est à bon droit que la chambre de recours a retenu que le degré d’attention du public pertinent à prendre en compte était celui du consommateur moyen faisant partie du grand public pour des achats du quotidien, c’est-à-dire ni particulièrement élevé ni particulièrement faible.

 Sur la comparaison des produits

28      Les produits visés par la marque demandée sont, d’une part, les fruits et légumes en conserve, congelés, séchés et cuits, relevant de la classe 29, et, d’autre part, les oranges, relevant de la classe 31. La chambre de recours a considéré, comme l’avait fait avant elle la division d’opposition, que ces produits et ceux couverts par la marque antérieure, énumérés au point 7 ci-dessus, étaient identiques, ce que les parties ne contestent d’ailleurs pas. Étant précisé que la marque antérieure couvre un spectre plus large que celui des produits visés par la marque demandée, par exemple en ce qu’elle porte également sur la viande, le poisson, la volaille et le gibier, il convient d’entériner la décision de la chambre de recours et de juger que les produits visés par la marque demandée et les produits correspondants couverts par la marque antérieure sont identiques.

 Sur la comparaison des signes

29      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

30      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

31      La chambre de recours, comme cela a été rappelé au point 11 ci-dessus, a relevé la faible similitude visuelle et la similitude phonétique inférieure à la moyenne des signes en conflit, ainsi que, en fonction des connaissances linguistiques du consommateur moyen, le fait que ces signes, soit évoquaient une idée similaire, soit coïncidaient quant à l’élément « citrus » pour la partie du public pertinent comprenant exclusivement l’idée sous-tendant ce terme, soit ne présentaient aucune similitude conceptuelle. Elle a considéré que, dans les deux premières hypothèses, les idées susmentionnées, respectivement décrivaient le type de produits en cause ainsi que l’emplacement de leur obtention et identifiaient ce même type de produits. La requérante conteste chacune de ces appréciations, dont l’EUIPO confirme pour sa part le bien-fondé. Il importe d’examiner successivement chacun de ces critères.

–       En ce qui concerne la comparaison visuelle

32      La chambre de recours s’est fondée sur plusieurs différences concernant le graphisme de l’élément figuratif des signes en conflit pour conclure à l’existence d’une faible similitude visuelle. Selon elle, le signe composant la marque demandée comprend, d’une part, une figure circulaire crantée noire sur laquelle sont inscrits, en haut, l’expression « mountain citrus » en lettres majuscules blanches et, en bas, dans la même police et la même couleur de caractères, le mot « spain » et, d’autre part, au sein de ce premier cercle, un plus petit cercle représentant en noir et blanc des montagnes ainsi que des fruits ou des légumes. Le signe composant la marque antérieure présente quant à lui au regard le terme « monte », inscrit en lettres minuscules vertes, suivi d’une figure semi-ovale orange surplombée de deux feuilles vertes et du groupe de lettres noires « itrus » représentées dans le même type de police de caractères que le terme « monte ». Elle a estimé probable que l’élément orange figurant dans la marque antérieure fût perçu comme représentant la lettre « c », compte tenu de sa forme et de sa position, et a également relevé que les premiers mots figurant dans chacun des signes en conflit comportaient quatre lettres en commun, à savoir les lettres « m », « o », « n » et « t » (points 21 et 22 de la décision attaquée). S’appuyant sur la jurisprudence selon laquelle, dans une marque complexe, l’élément verbal n’est pas toujours celui qui s’avère dominant, l’élément figuratif pouvant avoir une importance égale à celui-ci, voire plus importante (point 19 de ladite décision), elle a estimé que, en l’espèce, malgré la présence de lettres communes aux deux signes, l’élément figuratif présent dans chacun des signes en conflit était si différent qu’il ne pouvait être conclu qu’à une faible similitude visuelle.

33      La requérante, citant à plusieurs reprises les lignes directrices de l’EUIPO, fait observer qu’une similitude visuelle des signes en conflit doit être constatée « s’ils coïncident par un seul élément reconnaissable séparément ou s’ils possèdent le même contour ou un contour similaire ». Elle soutient que tel est le cas en l’espèce, ledit élément étant constitué par la représentation figurative d’une orange. Elle estime hautement improbable que le public pertinent soit confronté auxdits signes de façon simultanée, en raison du fait que les fruits ne sont ni emballés ni étiquetés, et conclut, par suite, à une certaine similitude visuelle des signes en conflit. Elle ajoute que, conformément auxdites lignes directrices, sont considérés comme similaires des signes comportant en commun un nombre significatif de lettres dans la même position lorsqu’ils ne sont pas hautement stylisés ou bien stylisés à l’identique ou de manière similaire. L’emploi de polices de caractères différentes ou de couleurs distinctes n’exclurait pas la similitude. Cette dernière devrait être constatée en l’espèce, car, d’une part, les lettres figurant dans le signe constituant la marque demandée ne seraient pas stylisées et celles comprises dans le signe correspondant à la marque antérieure ne le seraient pas non plus, à l’exception, quant à ce dernier, de la lettre « c », représentant une orange, et, d’autre part, les signes en conflit auraient en commun dix lettres, à savoir les groupes de lettres « mo » et « nt » ainsi que le mot « citrus ». La présence du mot « spain » n’attirerait pas l’attention du public pertinent compte tenu de l’origine géographique des produits visés par la marque demandée.

34      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

35      La comparaison des signes reproduits aux points 2 et 6 ci-dessus met en évidence d’importantes différences sur le plan visuel. Tout d’abord, alors que le signe composant la marque demandée est représenté en noir et blanc et sous une forme circulaire, celui formant la marque antérieure se présente de façon linéaire et fait appel à une palette chromatique mobilisant les couleurs verte, orange et noire, la couleur verte étant, de surcroît, employée dans deux nuances distinctes. Ensuite, les lettres utilisées sont inscrites en lettres capitales dans le signe composant la marque demandée et en lettres minuscules dans celui formant la marque antérieure. Enfin, le premier signe comporte trois mots distincts, « mountain », « citrus » et « spain », ceignant un paysage de montagne à l’avant-plan duquel sont posés deux fruits ronds, pouvant vraisemblablement être perçus comme étant des agrumes, tandis que le second signe comprend uniquement un élément verbal, dont la sixième lettre, fortement stylisée et ressemblant à un morceau d’orange, peut être comprise comme scindant, en réalité, cet élément en deux mots, « monte » et « citrus ».

36      La chambre de recours a relevé, en substance, l’ensemble de ces différences, ainsi que cela ressort du point 32 ci-dessus et du point 21 de la décision attaquée, aussi bien s’agissant des couleurs employées que de la police de caractères utilisée et des éléments décoratifs figurant dans le signe composant la marque demandée, alors que ceux-ci sont presque absents du signe formant la marque antérieure, exception faite de la lettre « c » stylisée décrite au point 35 ci-dessus, qui n’a pas d’équivalent dans le signe formant la marque demandée.

37      La chambre de recours a également bien noté la présence de lettres communes aux signes en conflit, au point 22 de la décision attaquée, à savoir les lettres initiales « m » et « o » ainsi que les lettres « n » et « t » de leurs mots initiaux « mountain » et « monte », ainsi que le groupe de lettres « itrus », mais a considéré que les différences résumées au point 35 ci-dessus n’étaient pas négligeables dans l’impression d’ensemble produite par ces signes et déterminaient au contraire fondamentalement l’image visuelle perçue par les consommateurs. Il y a lieu de corroborer cette appréciation.

38      En effet, ainsi que l’a rappelé la chambre de recours, l’élément verbal d’une marque complexe n’est pas toujours celui qui doit être considéré comme dominant [arrêts du 16 janvier 2008, Inter–IKEA/OHMI – Waibel (idea), T‑112/06, non publié, EU:T:2008:10, point 45, et du 12 septembre 2012, Duscholux Ibérica/OHMI – Duschprodukter i Skandinavien (duschy), T‑295/11, non publié, EU:T:2012:420, point 61].

39      À cet égard, force est de constater que les signes en conflit présentent des différences visuelles perceptibles d’emblée, du fait, comme cela a déjà été relevé au point 36 ci-dessus, de la quasi-absence d’élément décoratif dans la marque antérieure, seule la lettre « c » étant présentée de façon fantaisiste, alors que le signe composant la marque demandée se caractérise fortement par ses éléments décoratifs, même si ceux-ci ne sont pas puissamment originaux. Le recours aux couleurs vives, dans le cas du signe formant la marque antérieure, tranche également nettement avec l’emploi du noir et blanc, dans le cas du signe composant la marque demandée. La comparaison visuelle des polices de caractères et des lettres, d’usage pour établir les différences et les ressemblances des signes en conflit, conduit en outre à constater l’emploi de polices nettement différentes, comme l’a d’ailleurs relevé à juste titre la chambre de recours au point 21 de la décision attaquée. Enfin, ces signes diffèrent par la présence, dans le signe formant la marque antérieure, de la lettre « c », représentée en couleur orange, dans un format dépassant celui des autres lettres et agrémentée de deux ovales verts, symbolisant deux feuilles, et, dans le signe composant la marque demandée, du mot « spain », totalement absent du signe formant la marque antérieure.

40      Par conséquent, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a relevé, dans le cadre de la comparaison visuelle, que, malgré la présence de certaines lettres communes aux deux signes, l’importance de l’élément figuratif présent dans le signe formant la marque demandée ainsi que la combinaison de couleurs utilisées en ce qui concerne le signe composant la marque antérieure créaient des impressions visuelles différentes des signes en cause. Elle a donc pu conclure, à bon droit, à l’existence d’un faible degré de similitude visuelle entre lesdits signes.

–       En ce qui concerne la comparaison phonétique

41      La chambre de recours a relevé que les signes en conflit présentaient une longueur différente, du fait notamment de l’existence du mot « spain » dans la marque demandée, et qu’ils se caractérisaient également par une « différence auditive importante », en raison, d’une part, de la présence, au début du mot « mountain », de la lettre « u » et, d’autre part, de leur terminaison distincte (« te » et « tain »). Elle a donc conclu à un degré de similitude inférieur à la moyenne (point 24 de la décision attaquée).

42      La requérante soutient que l’assertion de la chambre de recours relative à la prononciation différente du début des mots « mountain » et « monte » est erronée, à tout le moins pour les consommateurs moyens de langues espagnole et portugaise. S’agissant de la prononciation de la terminaison de ces deux mots, elle fait observer que, en partant du principe que le mot « mountain » fait partie, comme l’aurait reconnu ladite chambre, du vocabulaire de base de l’anglais, la syllabe finale de chaque mot, « te » et « tain », serait prononcée de façon très voisine. Toujours sur le plan phonétique, les deux signes n’auraient pas une longueur différente, contrairement à ce qui ressortirait visuellement, d’une part, en raison de la différence quasiment inexistante entre la prononciation de la syllabe finale des mots « mountain » et « monte » et, d’autre part, en raison du fait que le mot « spain » ne serait vraisemblablement pas prononcé par le consommateur moyen.

43      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

44      Premièrement, il y a lieu de constater que la marque demandée comporte trois mots, à savoir « mountain », « citrus » et « spain », tandis que la marque antérieure présente un élément verbal, pouvant être décomposé en deux mots, à savoir « monte » et « citrus » (voir point 35 ci-dessus). Ainsi, comme l’a relevé la chambre de recours, les signes en conflit sont de « longueur différente » (point 24 de la décision attaquée).

45      Deuxièmement, s’agissant de la prononciation du premier mot des signes en conflit, « mountain » pour la marque demandée et « monte » pour la marque antérieure, la chambre de recours a constaté à juste titre que lesdits mots seraient prononcés différemment. Pourtant, force est de relever que ces mots présentent néanmoins une sonorité voisine tant en leur début (« moun » et « mon ») qu’en leur fin (« tain » et « te »), en raison de l’importance donnée par la lettre « t », en particulier dans le cas d’une prononciation rapide et moyennement articulée par un consommateur moyen non anglophone, dont la prononciation en anglais n’est pas nécessairement parfaite.

46      Partant, il convient de relativiser la constatation faite par la chambre de recours selon laquelle, d’une part, la lettre « u » est « clairement » audible et crée une différence phonétique « importante » et, d’autre part, la fin de ces mots présente également une « claire » différence phonétique entre les syllabes « tain » et « te » (point 24 de la décision attaquée).

47      Troisièmement, il convient de constater que les signes en conflit doivent être regardés comme présentant, en réalité, un mot en commun, à savoir « citrus », car, comme cela a été relevé aux points 35 et 44 ci-dessus, la lettre fantaisiste présente dans le signe verbal composant la marque antérieure sera vraisemblablement identifiée comme étant un « c », ce dont convient au demeurant l’EUIPO dans ses écritures. Ce mot sera donc naturellement prononcé à l’identique s’agissant des deux signes. C’est à tort, par conséquent, que la chambre de recours a estimé, au point 24 de la décision attaquée, que ledit mot « pourrait également ne pas être reproduit auditivement de la même façon que dans la marque [de l’Union européenne] antérieure dans la mesure où il ne saurait être exclu que l’élément figuratif de ce signe ne soit pas perçu comme constituant un “c” », alors qu’elle avait auparavant relevé à bon escient, au point 21 de ladite décision, qu’il était probable que ledit élément serait compris comme étant la lettre « c ».

48      Quatrièmement, il y a lieu de relever que la marque demandée comporte un mot supplémentaire, à savoir « spain », absent dans la marque antérieure (point 24 de la décision attaquée). Toutefois, il est permis de douter que le consommateur moyen prononcera ledit mot, qui constitue, en anglais, un nom de pays très connu [voir, en ce sens, arrêt du 7 décembre 2011, El Corte Inglés/OHMI – Azzedine Alaïa (ALIA), T‑152/10, non publié, EU:T:2011:715, point 53], d’autant plus qu’il s’agit, en l’espèce, d’un mot occupant la dernière place de l’élément verbal relativement long du signe composant la marque demandée.

49      Il y a lieu, par conséquent, d’infirmer l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle la similitude phonétique des signes en conflit est inférieure à la moyenne et de juger, pour les motifs exposés aux points 44 à 48 ci-dessus, qu’il existe, entre ces signes, une similitude phonétique moyenne.

–       En ce qui concerne la comparaison conceptuelle

50      La chambre de recours a considéré qu’une partie du public pertinent, en fonction des langues qu’il maîtrisait, était à même de comprendre le sens des mots « mountain » et « monte » et pouvait, dès lors, procéder à une comparaison conceptuelle et en déduire que ces derniers « évoqu[ai]ent un concept similaire, à savoir des élévations naturelles de la surface de la terre de différentes hauteurs » (point 25 de la décision attaquée), cette comparaison lui semblant pouvoir, par exemple, être conduite par le consommateur espagnol, puisque le mot « monte » existe en espagnol et que le mot « mountain » fait partie des mots anglais de base. Elle a également estimé que la plupart des consommateurs européens associeraient le mot « citrus » à « un genre d’arbres qui inclut les cédratiers, citronniers, orangers, limettiers et pamplemoussiers » (point 27 de la décision attaquée). Toutefois, elle a souligné que, pour le consommateur moyen à même d’identifier, en raison de ses compétences linguistiques, le sens du seul terme « citrus » et, a fortiori, pour le consommateur moyen à même de comprendre la signification des mots « mountain », « monte » et « citrus », ces concepts étaient descriptifs du type de produits concernés (les agrumes) et de l’endroit géographique de leur production (des lieux en pente) (points 26 et 27 de la décision attaquée). Partant, l’aspect conceptuel n’aurait pas de fort impact sur l’appréciation globale du risque de confusion. Enfin, la chambre de recours a précisé que, pour le consommateur moyen n’identifiant le sens d’aucun de ces mots, aucune comparaison conceptuelle n’était possible (point 28 de la décision attaquée).

51      Selon la requérante, la chambre de recours a admis que les mots « mountain » et « monte », d’un côté, et « citrus », de l’autre, illustraient des concepts similaires, mais a refusé d’en tirer les conséquences, en estimant que ces mots étaient descriptifs. Elle fait valoir, en outre, que, selon les lignes directrices de l’EUIPO, lorsque le même mot est présent dans les signes en conflit, les marques seront perçues comme conceptuellement similaires. Elle précise que les mots « mountain » et « monte » ne sont pas descriptifs, puisque la culture des produits en cause se déroule essentiellement en plaine. Elle conclut donc à l’identité des signes en conflit sur le plan conceptuel.

52      L’EUIPO relève, pour sa part, qu’il est probable que la partie du public pertinent comprenant l’espagnol ou le portugais, d’une part, et l’anglais, d’autre part, comprendra les mots « monte » et « mountain » et que la représentation figurant dans la marque demandée aidera à la compréhension du mot « mountain » par les consommateurs qui ne perçoivent pas immédiatement le sens dudit mot. Il fait cependant valoir que ce mot est descriptif, de même que le mot « citrus ». Partant, la comparaison des signes sur le plan conceptuel aurait peu de poids dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion.

53      Il convient d’indiquer, tout d’abord, à l’instar de la chambre de recours, que, le mot « mountain » faisant partie du vocabulaire de base de l’anglais, celui-ci sera compris par une large partie du grand public, même non anglophone, qui aurait une connaissance suffisante de l’anglais [voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2016, JT International/EUIPO – Habanos (PUSH), T‑633/15, non publié, EU:T:2016:492, point 40]. Ensuite, c’est également à raison que ladite chambre a estimé que le sens du mot « monte » serait connu d’une partie du public pertinent. Par ailleurs, cette constatation vaut non seulement pour le consommateur moyen espagnol, mais également pour les consommateurs qui connaissent une autre langue romane, comme, par exemple, le français, l’italien, le portugais ou le roumain, et qui identifieront ce mot comme faisant référence à un lieu élevé présentant une pente plus ou moins importante. Enfin, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a regardé le mot « citrus » comme pouvant être compris par la plupart du public pertinent comme étant un terme générique pour désigner les agrumes.

54      Les éléments mentionnés au point 53 ci-dessus sont donc de nature à révéler une forte similitude conceptuelle des signes en conflit pour une large partie du public pertinent, seul le mot « spain », présent dans la marque demandée et appartenant également à l’anglais courant, introduisant une différence entre eux.

55      La chambre de recours a toutefois considéré, malgré cette forte similitude conceptuelle, que le sens des mots en question (« montagne » et « agrume ») était descriptif des produits en cause et de l’emplacement de leur culture, alors que de telles considérations n’ont pas d’influence sur la comparaison conceptuelle des signes en cause, mais participent de l’appréciation globale du risque de confusion [voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2013, Event/OHMI – CBT Comunicación Multimedia (eventer EVENT MANAGEMENT SYSTEMS), T‑353/11, non publié, EU:T:2013:147, point 79].

56      En revanche, la chambre de recours a relevé à juste titre, au point 28 de la décision attaquée, que, pour la partie du public pertinent qui ne percevait aucun concept au sein des signes en conflit, hormis celui qu’évoquaient les éléments figuratifs de la marque demandée, il n’existait aucune similitude conceptuelle.

57      Il convient donc de conclure que les signes en conflit présentent, quant à leur comparaison visuelle, un faible degré de similitude, quant à leur comparaison phonétique, une similitude moyenne et, quant à leur comparaison conceptuelle, un fort degré de similitude ou une absence de similitude en fonction des connaissances linguistiques du public pertinent.

 Sur le risque de confusion

58      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

59      Dans l’appréciation d’ensemble des signes en conflit, la chambre de recours a reconnu que les produits relevant des classes 29 et 31 étaient identiques à ceux couverts par la marque antérieure. Elle a cependant considéré que le public pertinent attacherait plus d’importance à l’aspect visuel qu’aux aspects phonétiques et conceptuels des signes en conflit et que, par voie de conséquence, bien que les produits contestés fussent identiques, le faible degré de similitude visuelle desdits signes suffisait à exclure tout risque de confusion, y compris le risque d’association.

60      La requérante affirme que le principe d’interdépendance, rappelé aux points 21 et 58 ci-dessus, signifie, à l’inverse de ce qu’a décidé la chambre de recours, que même un faible degré de similitude des signes en conflit peut être compensé par un degré élevé de similitude des produits, ceux-ci étant de surcroît reconnus en l’espèce comme identiques. En l’espèce, indépendamment de la question de la perception des signes en conflit par les intermédiaires, la chambre de recours aurait conclu à tort que l’aspect visuel était prépondérant, puisque les produits visés par la marque demandée ne seraient généralement ni étiquetés ni emballés dans les supermarchés et chez les détaillants.

61      Concernant l’appréciation globale du risque de confusion, l’EUIPO conteste les arguments de la requérante et reprend à son compte les points mis en évidence par la chambre de recours.

62      Il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, dans l’appréciation globale du risque de confusion, les aspects visuel, auditif ou conceptuel des signes en conflit n’ont pas toujours le même poids et il importe alors d’analyser les conditions objectives dans lesquelles les marques peuvent se présenter sur le marché [arrêts du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T 171/03, EU:T:2004:293, point 49, et du 16 décembre 2015, Perfetti Van Melle Benelux/OHMI – Intercontinental Great Brands (TRIDENT PURE), T‑491/13, non publié, EU:T:2015:979, point 103]. En outre, le degré de similitude phonétique entre deux marques est d’une importance réduite dans le cas de produits qui sont commercialisés d’une manière telle que, habituellement, le public pertinent, lors de l’achat, perçoit la marque qui les désigne sous une forme visuelle [arrêts du 21 février 2013, Esge/OHMI – De’Longhi Benelux (KMIX), T‑444/10, non publié, EU:T:2013:89, point 37, et du 16 décembre 2015, TRIDENT PURE, T‑491/13, non publié, EU:T:2015:979, point 103].

63      Ainsi, il a été jugé, s’agissant de produits alimentaires relevant des classes 29 et 30, que ceux-ci sont normalement achetés dans des supermarchés ou des établissements similaires et sont donc choisis directement par le consommateur dans un rayon, plutôt que demandés oralement. De même, dans de tels établissements, le consommateur perd peu de temps entre ses achats successifs et, souvent, ne procède pas à une lecture de toutes les indications portées sur les différents produits, mais se laisse davantage guider par l’impact visuel global produit par leurs étiquettes ou emballages. Dans ces circonstances, pour l’appréciation de l’existence d’un éventuel risque de confusion ou lien entre les signes en cause, le résultat de l’analyse de la similitude visuelle devient plus important que le résultat de l’analyse de la similitude phonétique et conceptuelle. En outre, dans le cadre de cette appréciation, les éléments figuratifs d’une marque jouent un rôle plus important que ses éléments verbaux dans la perception du consommateur concerné [arrêt du 11 décembre 2014, Coca-Cola/OHMI – Mitico (Master), T‑480/12, EU:T:2014:1062, point 50 ; voir également, en ce sens, arrêts du 12 septembre 2007, Koipe/OHMI – Aceites del Sur (La Española), T‑363/04, EU:T:2007:264, point 109, et du 2 décembre 2008, Ebro Puleva/OHMI – Berenguel (BRILLO’S), T‑275/07, non publié, EU:T:2008:545, point 24]. Il convient d’ajouter que, comme l’a estimé pertinemment la chambre de recours au point 34 de la décision attaquée, il n’a pas été prouvé, pour les fruits frais tels que les oranges, visées par la marque demandée, qu’il soit courant que les consommateurs demandent une marque d’oranges donnée.

64      Certes, s’agissant de certains des produits concernés, comme les fruits frais tels que les oranges, il advient parfois que ceux-ci soient présentés à l’étal sans emballage ni étiquette, de sorte que le consommateur moyen ne se trouve pas toujours confronté aux aspects visuels des signes en conflit. Toutefois, d’une part, ces produits sont souvent présentés dans des filets, qui présentent une étiquette sur laquelle figure la marque sous laquelle ils sont commercialisés. Il n’est pas non plus inhabituel que certains fruits frais comportent une étiquette directement apposée sur eux. D’autre part, la marque demandée et la marque antérieure couvrent de nombreux autres produits que les fruits frais, tels que les produits en conserve et séchés, qui sont toujours présentés dans un emballage, sur lequel les signes en conflit ont vocation à apparaître.

65      En outre, ainsi que l’a relevé à bon droit la chambre de recours, la similitude conceptuelle entre les signes en conflit n’aurait pas de fort impact sur l’appréciation globale du risque de confusion, dans la mesure où l’idée sous-tendant lesdits signes est descriptive de certains des produits qu’ils désignent ou d’une caractéristique de ceux-ci. En effet, il ressort de la jurisprudence que, lorsque certains éléments d’une marque revêtent un caractère descriptif des produits et services pour lesquels la marque est enregistrée ou des produits et services désignés par la demande d’enregistrement, ces éléments ne se voient reconnaître qu’un caractère distinctif faible, voire très faible [arrêt du 6 octobre 2015, Monster Energy/OHMI – Balaguer (icexpresso + energy coffee), T‑61/14, non publié, EU:T:2015:750, point 76 ; voir également, en ce sens, arrêts du 12 septembre 2007, La Española, T‑363/04, EU:T:2007:264, point 92, et du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 52].

66      Or, en l’espèce, le sens des mots « montagne » et « agrume » est descriptif d’une partie des produits en cause et de l’emplacement de leur culture. En effet, à supposer que, comme la requérante le fait valoir, la culture et la production des produits concernés n’interviennent pas nécessairement en montagne, il n’en demeure pas moins que la combinaison des mots « monte » et « citrus » ou celle des mots « mountain » et « citrus » peut donner à penser, dans l’esprit du consommateur moyen raisonnablement informé, attentif et avisé, et susceptible de présenter un degré moyen d’attention, qu’ils évoquent effectivement une partie des produits désignés et le lieu de leur culture ou celui de leur fabrication. De même, le mot « spain » est lui-même descriptif de l’origine géographique des produits et, par suite dépourvu d’impact important sur la perception que le public pertinent a des signes en conflit.

67      Il résulte des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que les aspects phonétique et conceptuel des signes en conflit ne retiendraient pas l’attention du public pertinent et que, partant, le résultat de l’analyse de la similitude visuelle entre ces signes deviendrait plus important que celui de l’analyse de la similitude phonétique et conceptuelle [voir, en ce sens, arrêts du 20 juin 2012, Kraft Foods Schweiz Holding/OHMI – Compañia Nacional de Chocolates (CORONA), T‑357/10, non publié, EU:T:2012:312, point 41, et du 11 décembre 2014, Master, T‑480/12, EU:T:2014:1062, point 50].

68      S’agissant, enfin, de l’argument relatif à la perception des intermédiaires, il convient de souligner que la requérante n’a apporté aucun élément à l’appui de son assertion selon laquelle, en l’espèce, les aspects phonétiques et conceptuels revêtent une importance particulière pour lesdits intermédiaires. En tout état de cause, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus, dans la mesure où les produits en cause sont finalement destinés au grand public, c’est bien le degré d’attention de ce dernier qu’il convient de retenir.

69      Par conséquent, compte tenu du faible degré de similitude visuelle entre les signes en conflit (voir point 40 ci-dessus) et de l’absence d’un caractère distinctif accru de la marque antérieure du fait de l’usage qui en a été fait (voir point 11 ci-dessus et point 38 de la décision attaquée), ce dernier point n’étant par ailleurs pas contesté, la chambre de recours a pu conclure à bon droit que, malgré l’identité des produits en cause, il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en conflit pour le consommateur moyen de l’Union.

70      Partant, il y a lieu de juger que la chambre de recours n’a pas méconnu l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

71      Compte tenu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le moyen unique du recours en ce qu’il tend à l’annulation partielle de la décision attaquée. Il convient en outre de rejeter le deuxième chef de conclusions de la requérante comme irrecevable, ainsi que cela a été jugé au point 15 ci-dessus.

 Sur les dépens

72      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

73      En l’espèce, la requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens conformément aux conclusions de l’EUIPO

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Sociedad agraria de transformación n° 9982 Montecitrus est condamnée aux dépens.

Tomljenović

Bieliūnas

Kornezov

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 mars 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.