Language of document : ECLI:EU:C:2016:258

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 14 avril 2016 (1)

Affaire C‑101/15 P

Pilkington Group Ltd e.a.

contre

Commission européenne

« Pourvoi – Concurrence – Ententes (articles 81 CE et 53 de l’accord EEE) – Amendes – Lignes directrices de 2006 pour le calcul du montant des amendes – Ventes à prendre en compte – Taux de change pour le calcul du plafond de 10 % applicable au montant des amendes en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 – Marché européen du verre automobile »





I –    Introduction

1.        La présente procédure de pourvoi donne à la Cour l’occasion de prendre position sur deux questions dont on ne saurait sous-estimer l’importance pour la pratique administrative future de la Commission européenne en tant qu’autorité de la concurrence.

2.        D’une part, il s’agit de préciser quelles sont les ventes des participants à l’entente qui peuvent être prises en compte pour le calcul du montant des amendes qui leur sont infligées. D’autre part, il convient de déterminer le taux de change qu’il y a lieu d’utiliser pour la conversion monétaire lorsqu’une entreprise ne publie pas son chiffre d’affaires en euros. De cette information peuvent dépendre le point de savoir si le montant d’une amende fixée par la Commission dépasse ou non le plafond de 10 % du chiffre d’affaires total de l’entreprise concernée ainsi que l’ampleur de la charge qui pèsera le cas échéant sur celle-ci au titre de l’amende à acquitter.

3.        L’affaire soulève en outre quelques points de détail en rapport avec les principes de l’égalité de traitement et de proportionnalité quant à l’imposition d’amendes au titre du droit des ententes, ainsi que quant à la compétence de pleine juridiction du Tribunal en ce qui concerne de telles sanctions.

4.        Toutes ces questions se posent à propos d’un cartel du verre automobile agissant dans l’Espace économique européen (EEE), que la Commission a mis en lumière voici quelques années et qu’elle a sanctionné d’une amende le 12 novembre 2008 (2). Plusieurs sociétés de Pilkington Group Ltd, Pilkington Automotive Ltd, Pilkington Automotive Deutschland GmbH, Pilkington Holding GmbH et Pilkington Italia SpA (ci‑après, prises ensemble, « Pilkington » ou les « requérantes ») sollicitent dans la présente procédure la protection des juridictions de l’Union contre cette décision.

5.        En première instance, les attaques portées par Pilkington contre la décision litigieuse n’ont pas été couronnées de succès ; par arrêt du 17 décembre 2014 (3), le Tribunal a rejeté le recours en annulation. Pilkington poursuit désormais son action dans le cadre de la procédure de pourvoi devant la Cour.

6.        Une autre procédure de pourvoi concernant le cartel du verre automobile est pendante devant la Cour (4). Elle ne porte toutefois pas sur le même arrêt du Tribunal et soulève des questions juridiques totalement différentes.

II – Cadre juridique

7.        C’est l’article 81 CE (devenu article 101 TFUE) qui détermine le cadre de droit primaire de cette affaire (5). En tant que le territoire de l’EEE est concerné, l’article 53 de l’accord EEE comporte une disposition équivalente à l’article 81 CE. Quant au droit dérivé de l’Union, l’article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 (6) est également pertinent.

8.        L’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 dispose notamment :

« La Commission peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises lorsque, de propos délibéré ou par négligence :

a)      elles commettent une infraction aux dispositions de l’article 81 ou 82 [CE] […]

[…]

Pour chaque entreprise et association d’entreprises participant à l’infraction, l’amende n’excède pas 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent.

[…] »

9.        Mentionnons, à titre complémentaire, les lignes directrices (7), dans lesquelles la Commission a exposé sa pratique administrative en ce qui concerne la fixation des amendes. Aux points 4 à 6, ainsi qu’au point 13 desdites lignes directrices figurent notamment les déclarations suivantes :

« 4.      Le pouvoir de la Commission d’imposer des amendes aux entreprises ou associations d’entreprises qui, de propos délibéré ou par négligence, enfreignent les dispositions des articles 81 ou 82 [CE] constitue un des moyens attribués à la Commission en vue de lui permettre d’accomplir la mission de surveillance que lui confère le traité. […] À cette fin, la Commission doit veiller au caractère dissuasif de son action […] Par conséquent, lorsque la Commission constate une infraction aux dispositions des articles 81 ou 82 [CE], l’imposition d’une amende à ceux qui ont méconnu les règles de droit peut être nécessaire. Il y a lieu de fixer les amendes à un niveau suffisamment dissuasif, non seulement en vue de sanctionner les entreprises en cause (effet dissuasif spécifique), mais aussi en vue de dissuader d’autres entreprises de s’engager dans des comportements contraires aux articles 81 et 82 [CE] ou de continuer de tels comportements (effet dissuasif général).

5.      Afin d’atteindre ces objectifs, il est approprié pour la Commission de se référer, comme base pour la détermination des amendes, à la valeur des ventes des biens ou services en relation avec l’infraction. La durée de l’infraction devrait également jouer un rôle significatif dans la détermination du montant approprié de l’amende. La durée de l’infraction a nécessairement un impact sur les conséquences potentielles de l’infraction sur le marché. Il est dès lors considéré comme important que l’amende reflète également le nombre d’années pendant lequel l’entreprise a participé à l’infraction.

6.      En effet, la combinaison de la valeur des ventes en relation avec l’infraction et de la durée est considérée comme une valeur de remplacement adéquate pour refléter l’importance économique de l’infraction ainsi que le poids relatif de chaque entreprise participant à l’infraction. La référence à ces indicateurs donne une bonne indication de l’ordre de grandeur de l’amende et ne devrait pas être comprise comme la base d’une méthode de calcul automatique et arithmétique.

[…]

13.      En vue de déterminer le montant de base de l’amende à infliger, la Commission utilisera la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l’entreprise, en relation directe ou indirecte […] avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné à l’intérieur du territoire de l’EEE. La Commission utilisera normalement les ventes de l’entreprise durant la dernière année complète de sa participation à l’infraction […]. »

III – Contexte du litige

A –    Faits et procédure administrative

10.      Pilkington est l’un des principaux fabricants mondiaux de verre, notamment de verre automobile.

11.      Selon les constatations du Tribunal, Pilkington s’est rendue coupable, avec d’autres entreprises du secteur, d’une infraction au droit des ententes, qui a consisté dans la conclusion d’accords portant sur la fourniture de vitrages automobiles aux principaux constructeurs de voitures dans l’EEE. Les participants à l’entente ont coordonné des politiques de prix et des stratégies d’approvisionnement en vue de maintenir une position globalement constante de leurs entreprises respectives sur le marché concerné. Ils surveillaient à cet égard les décisions prises lors de leurs réunions et contacts, et convenaient ensemble de mesures de correction à caractère compensatoire.

12.      Le cartel du verre automobile a été actif du 10 mars 1998 au 11 mars 2003, mais les différentes entreprises y ont participé pour des durées variables – du 10 mars 1998 au 3 septembre 2002 en ce qui concerne Pilkington. Il s’est agi d’une infraction unique et continue.

13.      Au cours de la procédure administrative, le 18 avril 2007, la Commission a adressé une communication des griefs à plusieurs entreprises impliquées dans l’entente, dont Pilkington. L’audition à laquelle a procédé la Commission s’est déroulée le 24 septembre 2007. Après saisine du comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes, la Commission a adopté, le 12 novembre 2008, la décision litigieuse.

14.      À l’article 1er de ladite décision, la Commission constate que différentes entreprises, dont Pilkington [article 1er, sous c)], ont enfreint l’article 81 CE et l’article 53 de l’accord EEE en participant à une série d’accords et/ou de pratiques concertées dans le secteur du verre automobile dans l’EEE.

15.      Les amendes infligées aux différentes entreprises pour leur participation à l’entente résultent de l’article 2 de la décision litigieuse. Dans le cas de Pilkington, il s’agit de 370 millions d’euros, que les requérantes doivent supporter solidairement [article 2, paragraphe 1, sous c)]. Par une décision modificative du 28 février 2013, visant à rectifier des erreurs de calcul, ce montant a été ramené à 357 millions d’euros (8). Conformément à l’article 2, paragraphe 2, de la décision litigieuse, l’amende devait être versée en euros dans un délai de trois mois après notification de la décision.

B –    Procédure de première instance

16.      Plusieurs destinataires de la décision litigieuse ont sollicité contre celle-ci en première instance la protection du Tribunal par la voie de recours en annulation.

17.      S’agissant du groupe Pilkington, il a formé un recours contre la Commission devant le Tribunal par requête du 18 février 2009.

18.      Dans son arrêt du 17 décembre 2014, le Tribunal a rejeté ce recours, tout en condamnant cependant la Commission à supporter 10 % des dépens de Pilkington (9). Au surplus, le Tribunal a condamné les requérantes à l’ensemble des dépens de première instance.

IV – Procédure devant la Cour

19.      Par mémoire du 27 février 2015, les requérantes ont conjointement formé le présent pourvoi contre l’arrêt du Tribunal.

20.      Les requérantes concluent qu’il plaise à la Cour :

–        annuler l’arrêt attaqué, en ce qu’il rejette le recours formé contre l’article 2, sous c), de la décision litigieuse ;

–        réduire le montant de l’amende infligée aux requérantes en vertu de l’article 2, sous c), de la décision litigieuse ;

–        condamner la Commission aux dépens exposés par les requérantes.

21.      Pour sa part, la Commission conclut qu’il plaise à la Cour :

–        rejeter le pourvoi et

–        condamner les requérantes aux dépens.

22.      Devant la Cour, le pourvoi a donné lieu à une procédure écrite, puis à une audience le 2 mars 2016.

V –    Appréciation des moyens

23.      Par son pourvoi, Pilkington n’évoque pas l’intégralité des thèmes qui formaient l’objet de la procédure de première instance. Dans le cadre de la procédure de pourvoi, le débat juridique ne porte plus que sur des questions concernant le calcul du montant de l’amende. À cet égard, les requérantes s’appuient sur trois moyens, dont le premier porte sur les ventes à prendre en compte (voir ci-dessous, sous A), le deuxième sur le taux de change de l’euro applicable à la détermination du plafond des 10 % (voir ci-dessous, sous B), et le troisième sur divers principes généraux et des considérations relatives à l’État de droit (voir ci-dessous, sous C).

A –    Les ventes à prendre en compte dans le calcul du montant de l’amende (premier moyen)

24.      Le premier moyen vise les points 201 à 227 (et plus particulièrement les points 217 à 227) de l’arrêt attaqué. Il porte sur la nature des ventes pouvant servir de base pour le calcul du montant de l’amende au sens de l’article 23, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), du règlement n° 1/2003. Les requérantes font valoir que le Tribunal aurait à tort confirmé le choix de la Commission de tenir également compte de livraisons effectuées par Pilkington en exécution de contrats datant d’avant le début de l’infraction, alors même que lesdits contrats n’avaient pas été renégociés pendant la durée de l’infraction. Le Tribunal se serait ainsi appuyé sur une interprétation erronée en droit du point 13 des lignes directrices de 2006.

25.      Aux termes du point 13 des lignes directrices de 2006, la Commission utilise, pour déterminer le montant de base de l’amende à infliger, la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l’entreprise, en relation directe ou indirecte avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné à l’intérieur du territoire de l’EEE.

26.      Il s’ensuit que le point 13 des lignes directrices de 2006 a pour objectif de retenir comme point de départ pour le calcul du montant de l’amende infligée à une entreprise un montant qui reflète l’importance économique de l’infraction et le poids relatif de cette entreprise dans celle-ci (selon la jurisprudence constante de la Cour, qui s’appuie elle-même fortement sur le libellé du point 6 des lignes directrices) (10). Inversement, il convient d’exclure les ventes sans relation réelle avec le champ d’application de l’entente dans l’EEE (11).

27.      Dans la présente affaire, le litige porte en substance sur la question de savoir si un rapport de causalité, de quelque nature que ce soit, doit exister entre les agissements du cartel et les différentes composantes du chiffre d’affaires entrant dans le calcul du montant de l’amende. Les requérantes estiment que, à tout le moins, les ventes de verre automobile sur lesquelles le cartel n’a nécessairement exercé aucune influence ne doivent pas être prises en compte, puisque ces ventes s’appuient sur des contrats qui ont été conclus avant que ne débute l’infraction – supposément à des conditions normales de concurrence – et qui n’ont pas été renégociés pendant la durée de l’infraction. Elles estiment que l’inclusion de telles ventes aurait pour effet de donner une ampleur excessive à l’entente.

28.      Il ne s’agit là aucunement d’un simple litige théorique ou d’un détail technique. Si lesdites ventes de Pilkington n’avaient pas été prises en compte dans la base de calcul, l’amende infligée par la Commission aurait été inférieure d’environ 49 millions d’euros selon les informations fournies par les requérantes.

29.      Même si l’argumentation des requérantes au sujet de l’interprétation du point 13 des lignes directrices de 2006 peut à première vue paraître séduisante, elle ne résiste toutefois pas à un examen plus approfondi.

30.      En effet, relevons déjà que le point 13 des lignes directrices de 2006 est rédigé d’une façon particulièrement large. Il s’agit de toutes les ventes de produits ou services réalisées par le participant à l’entente, en relation directe ou indirecte avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné à l’intérieur du territoire de l’EEE. C’est en des termes tout aussi généraux que le point 5 de ces mêmes lignes directrices précise que le montant des amendes est déterminé sur la base de la valeur des ventes des biens et services en relation avec l’infraction.

31.      Comme l’a déjà précisé la Cour, ce serait donner une signification trop étroite à la notion de « ventes » utilisée au point 13 des lignes directrices de 2006 que de vouloir n’y faire figurer que les ventes dont il est établi qu’elles étaient effectivement concernées par le cartel sanctionné (12). Aussi n’y a-t-il pas lieu, selon la jurisprudence, de prouver affirmativement que les différentes composantes du chiffre d’affaires retenues pour la base de calcul ont été toutes affectées par l’infraction (13).

32.      La notion de « valeur des ventes » visée au point 13 des lignes directrices de 2006 ne saurait certes s’étendre jusqu’à englober les ventes qui ne relèvent pas du champ d’application de l’entente considérée (14). Néanmoins, dès lors que, comme en l’espèce, il s’agit de ventes qui ont en tout état de cause été réalisées sur le marché pertinent, elles font automatiquement partie de la base de calcul du montant de base de l’amende (15). À la différence de ce que soutient Pilkington, de telles ventes ne se situent nullement en dehors du champ d’application de l’entente.

33.      Lesdites ventes sont un point de départ utile pour les dommages que le cartel, et spécialement Pilkington, ont causés à la concurrence dans l’EEE, puisqu’elles sont révélatrices de l’importance économique de l’entente sur le marché pertinent et du poids relatif de Pilkington au sein du cartel, tout à fait dans la ligne de ce qu’exigent les points 6 et 13 des lignes directrices de 2006 ainsi que la jurisprudence de la Cour à ce sujet (16).

34.      Vouloir, comme l’envisagent les requérantes, exclure du calcul du montant de l’amende une partie des ventes effectuées sur le marché pertinent aurait bien souvent pour conséquence de réduire artificiellement l’importance économique de l’entente et, partant, de contrevenir diamétralement à la finalité des points 6 et 13 des lignes directrices de 2006 (voir, à titre complémentaire, points 4 et 5 desdites lignes directrices) (17). En effet, il est impossible de donner une image adéquate d’une infraction au droit des ententes si l’on ne retient sélectivement que certaines des ventes qu’ont réalisées sur le marché pertinent les entreprises qui y ont participé.

35.      Le mode de calcul que privilégient les requérantes méconnaît en particulier que l’un des principaux objectifs de nombreuses ententes, y compris du cartel litigieux en l’espèce, est de répartir le marché entre les participants à l’entente ou de maintenir les parts de marché de ceux‑ci à un niveau convenu. Cet effet de stabilisation, que le Tribunal a souligné à très juste titre (18), favorise naturellement l’ensemble de l’activité des participants à l’entente sur le marché considéré. Ainsi que le relève de façon tout à fait convaincante la Commission, la manipulation de peu d’opérations suffit à réaliser sur l’ensemble du marché l’effet recherché par les participants. Or, si l’objectif illicite du cartel et, partant, l’« énergie criminelle » que déploient les participants à l’entente s’étend à l’ensemble du marché, force est également, lors du calcul du montant de l’amende, de tenir compte de toutes les ventes qui ont été réalisées sur celui-ci.

36.      Il n’est donc pas déterminant qu’il soit avéré – ou même simplement possible – que les entreprises concernées ont adopté un comportement collusoire pour chaque opération qu’elles ont effectuée. Il n’est pas davantage décisif de savoir si et dans quelle mesure le résultat anticoncurrentiel que visent ces entreprises au moyen de l’entente ait ou non été effectivement obtenu (19). Il suffit au contraire que le comportement ait eu pour effet ou pour objet de fausser la concurrence au sens de l’article 81 CE (ou de l’article 101 TFUE) (20). Dans un tel cas, l’ensemble des ventes qu’ont réalisées sur le marché les participants à l’entente doivent en principe entrer dans le calcul du montant de base de l’amende.

37.      Au surplus, la charge administrative qui irait nécessairement de pair avec l’appréciation de chaque vente réalisée par les participants à l’entente sur le marché pertinent serait totalement disproportionnée. En effet, dans la plupart des cas, les ventes entrant dans la base de calcul du montant de l’amende reposent sur un ensemble d’opérations dont il n’apparaît guère praticable de vérifier l’incidence, réelle ou potentielle, qu’exercent sur chacune d’entre elles les pratiques collusoires des participants à l’entente, et ce d’autant que les ententes se caractérisent par une culture du secret de la part des entreprises concernées, que l’on ne saurait voir « récompensée » par surcroît sur le plan du calcul du montant de l’amende (21).

38.      Le seul aspect décisif est donc que les ventes entrant dans le calcul du montant de base de l’amende aient été réalisées sur le marché pertinent (22). Il s’agit en effet précisément du chiffre d’affaires qui, provenant de la vente des produits faisant l’objet de l’infraction, est le mieux à même de refléter l’importance économique de cette infraction (23). On garantit de la sorte l’imposition d’une sanction appropriée, qui contribue à une mise en œuvre efficace des règles de concurrence sur le marché intérieur de l’Union (voir points 4 et 5 des lignes directrices de 2006).

39.      Il y a donc lieu de rejeter le premier moyen.

B –    Le taux de change à retenir pour le calcul du plafond applicable au montant de l’amende (deuxième moyen)

40.      Le deuxième moyen vise les points 410 à 423 de l’arrêt attaqué et concerne le plafond applicable au niveau de l’Union en matière d’amendes (également dénommé « seuil d’écrêtement »), ainsi qu’il résulte de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003. Conformément à cette disposition, le montant de l’amende infligée à une entreprise n’excède pas 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent.

41.      Selon les requérantes, le Tribunal, dans l’arrêt attaqué, viole cette disposition, car il aurait commis une erreur de droit en déterminant le taux de change applicable à la conversion de la livre sterling (GBP) (24) en euro. Si le Tribunal ne s’était pas fondé sur le taux de change moyen de la Banque centrale européenne (BCE) lors du dernier exercice qu’a clôturé Pilkington avant la décision litigieuse, comme l’avait déjà fait avant lui la Commission, mais sur celui applicable au jour de l’adoption de la décision, solution que privilégie Pilkington, le plafond des 10 % aurait été calculé à un montant inférieur, si bien que le montant de l’amende aurait lui‑même été plus faible.

1.      Remarque liminaire

42.      Les griefs soulevés à ce sujet s’expliquent par le fait que la société mère de Pilkington a son siège au Royaume-Uni et que les ventes de l’ensemble du groupe Pilkington entrant en l’espèce dans la base de calcul ont donc été établies en livres sterling. En revanche, les amendes infligées par la Commission au niveau de l’Union pour sanctionner des infractions au droit des ententes sont exprimées en euros. Il est donc nécessaire de procéder à une conversion monétaire pour constater si le montant de l’amende infligée excède le plafond légal de 10 % du chiffre d’affaires total réalisé par Pilkington au cours du dernier exercice qu’elle a clôturé avant l’adoption de la décision litigieuse.

43.      Les requérantes exposent, sans être contredites, que le chiffre d’affaires total de Pilkington au cours de l’exercice ayant couru du 1er avril 2007 au 31 mars 2008 s’est élevé à 2,614 milliards de GBP. Le plafond de 10 %, au sens de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, s’élevait donc à 261,4 millions de GBP (10 % de 2,614 milliards de GBP).

44.      Si, comme la Commission et le Tribunal, l’on retient, pour effectuer la conversion, le taux de change moyen de la BCE applicable au cours de cette période (1 GBP = 1,415 euro), on obtient un plafond de 370,1 millions d’euros. En revanche, si l’on retient le cours de change spécifique de la BCE pour le 12 novembre 2008, c’est-à-dire le jour auquel la Commission a adopté la décision litigieuse (1 GBP = 1,2149 euro ou 1 euro = 0,821310 GBP) (25), on obtiendrait un plafond sensiblement inférieur, correspondant à 317,5 millions d’euros.

45.      Dans le premier cas, le montant de l’amende infligée par la Commission, corrigé à 357 millions d’euros, est donc clairement inférieur au plafond de 10 % (26), alors que, dans le second cas, il l’excède de près de 40 millions d’euros. C’est précisément cette différence d’environ 40 millions d’euros qui est ainsi en jeu lorsque les parties débattent, dans le cadre de ce deuxième moyen, du choix du taux de change applicable à la conversion. Il y a donc lieu d’apprécier si la perte de valeur qu’avait subie la livre sterling par rapport à l’euro à la date de l’adoption de la décision litigieuse bénéficie à Pilkington ou si, à l’inverse, elle constitue un risque de change que doit supporter celle-ci.

2.      Les griefs soulevés par Pilkington

46.      Si les requérantes reconnaissent expressément le droit de la Commission de fixer en euros le montant des amendes qu’elle inflige conformément à l’article 23 du règlement n° 1/2003 en matière de droit des ententes, elles considèrent comme erronées en droit les déclarations du Tribunal au sujet du taux de change applicable au calcul du plafond de 10 %.

47.      Les griefs qu’elles invoquent à cet égard à l’encontre de l’arrêt attaqué peuvent en substance être divisés en deux catégories. Elles font valoir, d’une part, que le Tribunal aurait méconnu l’objectif du plafond de 10 % [voir ci-dessous, sous a)] et, d’autre part, qu’il n’aurait pas respecté les exigences de l’égalité de traitement et de la sécurité juridique [voir ci-dessous, sous d)].

a)      L’objectif du plafond de 10 %

48.      Le plafond de 10 %, tel qu’il résulte de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, a pour effet d’intégrer dans le calcul du montant des amendes au titre du droit des ententes un élément qui poursuit un objectif distinct et autonome par rapport à celui des critères fondamentaux de gravité et de durée de l’infraction (27). Il s’agit de tenir compte de la capacité économique des entreprises concernées et d’éviter des amendes d’un montant excessif et disproportionné (28).

49.      L’élément décisif, dans le cadre de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, est la capacité financière que présente l’entreprise à la date où elle est reconnue responsable de l’infraction et où une sanction pécuniaire lui est infligée par la Commission (29).

50.      C’est indubitablement en l’appréciant le jour même auquel la Commission adopte sa décision fixant le montant de l’amende que l’on peut au mieux tenir compte de la capacité financière d’une entreprise. Une telle solution placerait toutefois la Commission devant des difficultés pratiques tout à fait insurmontables. D’une part, les chiffres actualisés des ventes réalisées par l’entreprise concernée ne sont normalement pas connus lors de l’adoption de la décision, ou, du moins, ne sont pas disponibles sous une forme certifiée et donc fiable. D’autre part, les processus décisionnels internes de la Commission, et notamment la consultation légalement prescrite du comité consultatif (30), mais également la nécessité d’une réflexion interne sur l’opportunité, la méthode de calcul et le montant de la sanction dans le cas concret (31) s’opposent à ce que de nouveaux chiffres soient présentés et traités continûment jusqu’au dernier jour.

51.      Le législateur de l’Union a tenu compte de cette circonstance et retenu, à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, un dixième du chiffre d’affaires total réalisé par l’entreprise concernée au cours de l’exercice social précédent comme valeur de référence de la capacité financière de celle-ci (32). Il est en quelque sorte présumé légalement que la capacité économique d’une entreprise aux fins du calcul du montant de l’amende correspond à celle qui ressort du chiffre d’affaires certifié qu’elle a réalisé lors du dernier exercice clôturé avant l’adoption de la décision fixant le montant de l’amende. On peut en effet en toute logique s’attendre à ce que la capacité économique ainsi déterminée de l’entreprise ne se modifie pas notablement dans les semaines ou les mois précédant l’adoption d’une telle décision, et que les chiffres de ventes correspondant au dernier exercice clôturé conservent donc toute leur valeur.

52.      Or, si une certaine proportion (10 %) du chiffre d’affaires total réalisé par l’entreprise concernée lors du dernier exercice qu’elle a clôturé constitue la valeur de référence légale de sa capacité financière, le taux de change moyen applicable au cours de la période de référence doit également être celui retenu pour la conversion monétaire. En effet, ce cours de change est le seul qui permette d’apprécier les chiffres de ventes dans le contexte de leur réalisation, et c’est également celui qui reflète au mieux la réalité économique qui prévalait alors (33). Le Tribunal l’a à juste titre relevé (34).

53.      La véracité de tels chiffres de ventes pourrait subir de graves distorsions si l’on entendait les convertir en utilisant un cours de change différent, datant d’une période postérieure. L’application d’un nouveau cours de change à d’anciens chiffres reviendrait en définitive à comparer des pommes et des poires.

54.      Les arrêts de la Cour que mentionnent les requérantes ne font non plus rien ressortir qui laisserait penser qu’il conviendrait de retenir un taux de change ultérieur, à savoir celui applicable le jour de l’adoption de la décision fixant le montant de l’amende.

55.      Certes, dans certains cas, la Cour a effectivement admis que le plafond de 10 % pouvait également, dans une certaine mesure, protéger les entreprises concernées contre les fluctuations de change (35). Il s’agit toutefois là non pas d’un objectif autonome du plafond, mais bien plutôt d’un aspect de la protection qu’offre aux entreprises concernées l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 contre les amendes d’un montant excessif et disproportionné (36).

56.      Au surplus, les cas évoqués jusqu’à présent dans la jurisprudence ont chaque fois concerné des modifications ayant affecté les monnaies avant la fin de la période de référence à laquelle est lié le plafond de 10 % prévu à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 (37). La Cour avait donc en quelque sorte porté son regard en arrière, vers des périodes antérieures, et non pas, comme l’exige en l’espèce Pilkington, en avant, c’est-à-dire vers des semaines et des mois postérieurs à la clôture du dernier exercice ayant précédé l’adoption de la décision litigieuse.

57.      Il existe de bonnes raisons de « regarder en arrière » plutôt qu’« en avant ». En premier lieu, la phase entre la cessation de l’infraction et le dernier exercice précédant la décision infligeant l’amende dure en général plusieurs années et sera donc naturellement plus sujette aux modifications de la capacité financière des entreprises sous l’action des taux de change que les semaines et les mois litigieux en l’espèce, qui précèdent directement la décision. En second lieu, seul un « regard en arrière » permettra de disposer de chiffres solides, accompagnés des taux de change correspondants pour la conversion monétaire, en temps suffisamment utile pour que la Commission en tienne compte dans sa décision.

58.      Le seul élément dans la jurisprudence qui pourrait plaider en faveur d’un « regard en avant », et donc d’une quelconque pertinence de taux de change actualisés, figure dans l’arrêt relativement ancien que le Tribunal a prononcé dans l’affaire Sarrió/Commission (T‑334/94, EU:T:1998:97). Dans cette affaire, le Tribunal s’était en effet assuré « que le montant de l’amende converti en monnaie nationale au taux de change pratiqué au moment de la publication de la décision ne dépasse pas 10 % du chiffre d’affaires global réalisé par la requérante [au cours du dernier exercice précédant celui de l’adoption de la décision] » (38).

59.      Pour autant que l’on peut en juger, cette pratique n’a toutefois pas fait école. Il ne me semble pas non plus que la Cour devrait la faire sienne aujourd’hui.

60.      Indépendamment de l’objection fondamentale déjà évoquée selon laquelle l’utilisation d’un taux de change actualisé aboutit à ce que d’anciens chiffres de ventes soient illégalement convertis sur la base d’un nouveau taux de change qui ne date pas de la même période, il me semble également totalement inapproprié et impraticable de retenir, à l’instar du Tribunal dans l’affaire Sarrió/Commission (T‑334/94, EU:T:1998:97), la date de publication de la décision. La publication de la décision dans des affaires de concurrence n’intervient en règle générale que bien après son adoption, parfois même des années plus tard. La Commission devrait donc disposer de dons de divination si elle entendait tenir compte d’un tel taux de change futur dès sa prise de décision. On ne voit guère plus en quoi le taux de change applicable le jour de la publication de la décision devrait justement donner une meilleure image de la capacité financière de l’entreprise concernée que celui qui prévalait à la date bien antérieure à laquelle la Commission inflige l’amende et procède à son recouvrement.

61.      La solution du problème dont se plaignent les requérantes doit selon moi se trouver à un tout autre niveau, à savoir dans le droit budgétaire de l’Union. S’il s’avérait que la capacité financière d’une entreprise – du fait de variations de change ou pour d’autres motifs – a fortement diminué entre la fin de son dernier exercice et la date d’adoption de la décision par laquelle la Commission lui a infligé l’amende, le droit budgétaire prévoit les mécanismes appropriés pour tenir compte du risque de voir cette entreprise soumise à une charge excessive dans le cadre de la mise en recouvrement de l’amende infligée par la Commission (39). Ces mécanismes permettent de développer des solutions adaptées au cas particulier considéré, allant de l’octroi de plus amples délais de paiement à une renonciation totale ou partielle de créance, étant entendu qu’il convient de tenir dûment compte d’éventuelles distorsions de concurrence (voir à ce sujet en particulier les articles 89 et 91 du règlement (UE) n° 1268/2012 (40)).

62.      Contrairement à la thèse défendue par Pilkington lors de l’audience, le fait que les mécanismes prévus dans le droit budgétaire de l’Union ne s’appliquent que dans ces cas absolument exceptionnels ne vient nullement plaider contre cette solution. En effet, les entreprises concernées sont tenues de supporter elles-mêmes tous les risques « normaux » liés à leur capacité économique, et notamment le risque normal de change (41). Nous y reviendrons plus loin (42).

63.      À la lumière de ces considérations, les arguments que les requérantes tirent de la finalité du plafond de 10 % ne sont pas pertinents.

b)      Les exigences de l’égalité de traitement et de la sécurité juridique

64.      Les requérantes invoquent en outre, dans la présente affaire, les principes de l’égalité de traitement et de la sécurité juridique. Selon elles, il résulte également de ces principes que la conversion doit s’effectuer non pas sur la base du taux moyen du dernier exercice clôturé par Pilkington avant la décision litigieuse, mais sur celle du cours applicable au jour de l’adoption de cette décision.

i)      Le principe de l’égalité de traitement

65.      En premier lieu, les requérantes reprochent au Tribunal d’avoir violé le principe de l’égalité de traitement. Selon elles, toutes les entreprises doivent être traitées également, quelle que soit la monnaie dans laquelle elles tiennent leur comptabilité. Le Tribunal aurait méconnu ce principe.

66.      Le principe de l’égalité de traitement est un principe général du droit de l’Union, consacré aux articles 20 et 21 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») (43). Il ne saurait donner lieu à des interprétations ni à des applications différentes selon le domaine juridique en cause.

67.      Il ressort d’une jurisprudence constante que ledit principe exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (44).

68.      En reconnaissant, spécialement pour le calcul du montant des amendes en droit des ententes, que le plafond de 10 % fixé à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 constitue une limite uniformément applicable à toutes les entreprises (45), la Cour n’exprime rien d’autre qu’un effet du principe d’égalité de traitement.

69.      Au regard de la problématique qui nous intéresse ici, il convient d’abord de relever que la capacité financière d’une entreprise peut naturellement être soumise à certaines variations entre la date de clôture de son dernier exercice et celle de l’adoption de la décision fixant le montant de l’amende. De telles variations peuvent, par exemple, résulter de reculs inattendus du chiffre d’affaires, mais également de modifications du taux de change, notamment lorsqu’une entreprise réalise une grande partie de son chiffre d’affaires dans une monnaie étrangère, quel que soit le lieu où elle a son siège.

70.      Toutes les entreprises se trouvent à cet égard dans la même situation et sont également traitées de la même façon par le législateur de l’Union. En effet, aux termes de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, de telles variations de la capacité financière ne sont pas prises en compte du point de vue du plafond des 10 %, que les entreprises concernées constatent leur chiffre d’affaires en euros ou dans une autre monnaie. De ce point de vue, il ne saurait donc y avoir violation du principe d’égalité de traitement.

71.      En outre, les entreprises qui tiennent leurs comptes de ventes non pas en euros mais dans une monnaie étrangère peuvent certes, entre leur dernier exercice et la date de la décision fixant le montant de l’amende, voir la charge afférente au paiement d’une amende subir de plus fortes variations que les entreprises qui tiennent leur comptabilité en euros, du fait de variations du cours de change. À cet égard, les entreprises qui ont leur siège en dehors de la zone euro peuvent être placées dans une situation différente de celles qui sont établies dans la zone euro.

72.      Le seul fait que des entreprises ayant leur siège en dehors de la zone euro puissent être davantage affectées par les variations de leurs actifs liquides liées aux taux de change que celles qui sont établies dans la zone euro ne saurait toutefois justifier la conclusion qu’elles seraient en droit de voir la Commission procéder à un réexamen actualisé de leur capacité financière au jour de l’adoption de la décision fixant le montant de l’amende, en tenant compte du taux de change applicable à cette date.

73.      De telles variations d’ordre monétaire sont en effet une manifestation du risque de change, que toute entreprise doit elle-même supporter (46). Une entreprise qui s’établit en dehors de la zone euro accepte tout aussi sciemment le risque d’une évolution défavorable du taux de change que l’éventualité d’une évolution avantageuse des cours. Il n’est pas acceptable qu’une telle entreprise répercute sur la collectivité, de façon sélective, les éventuels désavantages liés à la localisation de son siège en dehors de la zone euro en invoquant le principe de l’égalité de traitement.

74.      Notons à titre purement accessoire qu’avant même l’introduction de l’euro, toutes les entreprises actives dans le marché intérieur n’étaient pas soumises aux mêmes risques de change. Certes, la Commission devait alors, avant d’infliger des amendes aux entreprises, procéder à une conversion pour l’ensemble de celles‑ci, tandis qu’elle n’y est aujourd’hui contrainte que pour les seules entreprises établies en dehors de la zone euro. Il n’en demeure pas moins que, dès avant l’introduction de l’euro, les entreprises devaient faire face à des variations de cours d’intensité différente selon l’État membre dans lequel elles étaient établies, et donc à des risques de change plus ou moins élevés.

ii)    Le principe de la sécurité juridique

75.      En second lieu, les requérantes soutiennent que le Tribunal aurait méconnu le principe de la sécurité juridique. Selon elles, toute entreprise doit être en mesure de prévoir dans sa propre monnaie les charges financières qu’elle risque de devoir supporter en raison d’une amende infligée par la Commission.

76.      La sécurité juridique constitue un principe général du droit de l’Union qui exige notamment qu’une réglementation entraînant des conséquences défavorables à l’égard de particuliers soit claire et précise et son application prévisible pour les justiciables (47). Les intéressés doivent pouvoir connaître sans ambiguïté leurs droits et leurs obligations et prendre leurs dispositions en conséquence (48).

77.      Dans le même sens, la Cour a déclaré, en ayant spécialement en vue l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, que les amendes infligées en droit de la concurrence par la Commission en vertu de cette disposition connaissent un plafond chiffrable et absolu, de sorte que le montant maximal de l’amende pouvant être mis à la charge d’une entreprise donnée est déterminable à l’avance (49).

78.      Un élément de pronostic est nécessairement inhérent à la notion de « prévisibilité ». Les pronostics réalisés à partir de données déjà existantes tirées d’un passé proche sont plus fiables que ceux fondés sur des données futures encore inconnues.

79.      Il ne fait donc aucun doute qu’une entreprise est mieux en mesure de prévoir le plafond de 10 % qui lui est applicable pour les amendes infligées en droit des ententes conformément à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 lorsque ce plafond est calculé en fonction du taux de change moyen du dernier exercice clôturé que lorsqu’il s’appuie sur un cours de change futur, applicable à la date d’adoption de la décision et non disponible à l’avance.

80.      Aussi est-ce tout à fait à juste titre que le Tribunal a souligné (50) que la moyenne des taux de change de la BCE applicables au cours de l’exercice social d’une entreprise qui précède l’adoption d’une décision infligeant une amende offre un degré de sécurité juridique bien plus élevé que l’utilisation du cours de change applicable à une date située dans le futur, celle de l’adoption de cette décision.

81.      En effet, ledit taux de change moyen est établi depuis la fin de l’exercice concerné et ne se modifiera plus, tandis que le cours actualisé dépend de contingences situées dans le futur, c’est-à-dire de la date que choisira la Commission pour adopter sa décision ainsi que de la situation économique à cette date. En retenant le cours moyen, toute entreprise à l’encontre de laquelle la Commission engage des poursuites pour infraction à la concurrence peut ainsi calculer de façon exacte, en amont de la décision clôturant la procédure, le montant en euros auquel s’élèvera au maximum l’amende qu’il lui faudra éventuellement acquitter.

82.      Les requérantes objectent que les entreprises qui ne tiennent pas la comptabilité de leurs ventes en euros seraient moins à même de prévoir la charge financière afférente aux amendes à acquitter au titre du droit de la concurrence que les entreprises dont la comptabilité est en euros.

83.      Cette incertitude résulte cependant du risque de change que les entreprises établies en dehors de la zone euro doivent toujours supporter, ainsi qu’on l’a déjà indiqué (51). Qui plus est, il appartient toujours à une entreprise avisée risquant de faire face à d’éventuelles dettes futures de se prémunir par des mesures préventives dans la monnaie dans laquelle ces dettes seront ultérieurement acquittées. À cet égard, il n’y a aucune différence substantielle entre une amende susceptible d’être infligée par la Commission au titre du droit des ententes et les risques de responsabilité civile auxquels peut être exposée l’entreprise concernée lors de procès devant des juridictions nationales.

84.      Si une entreprise soupçonnée d’avoir participé à une entente est poursuivie par la Commission dans une procédure au titre du règlement n° 1/2003, il est dans son propre intérêt, au cours même de cette procédure, de constituer, sur la base de ses propres chiffres de ventes pour le dernier exercice clôturé entrant en ligne de compte, des provisions en euros pour l’amende qu’il lui faudra éventuellement acquitter, ou, à tout le moins, de s’assurer par la voie d’accords passés avec des établissements de crédit, qu’elle disposera, à la date d’adoption de la décision, des liquidités nécessaires en euros, à concurrence du plafond de 10 % prévu à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003.

85.      Si l’entreprise concernée ne prend pas de telles précautions, elle s’engage en définitive dans une opération spéculative sur l’évolution du cours de change et prend sciemment le risque de ne pouvoir se procurer les devises nécessaires au règlement d’une éventuelle amende qu’à des conditions moins avantageuses que ce n’aurait été le cas lors de la clôture de son dernier exercice qui a précédé la décision infligeant l’amende.

86.      Ainsi que la Cour l’a déjà constaté dans un autre contexte, les fluctuations monétaires constituent un aléa susceptible de générer des avantages comme des désavantages (52). L’existence, en tant que telle, de ces fluctuations monétaires n’est pas de nature à rendre inapproprié le montant d’une amende légalement fixé (53).

3.      Conclusion intermédiaire

87.      Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que le fait, lors de la conversion monétaire effectuée dans le cadre de la détermination du plafond de 10 % prévu pour les amendes infligées en droit des ententes, de retenir le taux de change moyen applicable au cours du dernier exercice clôturé par l’entreprise concernée avant l’adoption de la décision n’est contraire ni à la finalité de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 ni aux principes généraux d’égalité de traitement et de sécurité juridique. La conclusion en ce sens du Tribunal (54) est exempte d’erreurs de droit. Aussi le deuxième moyen est-il dépourvu de fondement.

C –    Divers principes généraux de droit et considérations relatives à l’État de droit (troisième moyen)

88.      Les requérantes consacrent leur troisième moyen à plusieurs principes généraux et considérations relatives à l’État de droit, qu’elles reprochent au Tribunal d’avoir violés. Par ce moyen, elles visent, d’une part, les points 396 à 402 et, d’autre part, les points 434, 438 et 440 à 444 de l’arrêt attaqué. La première branche du troisième moyen vise uniquement les exigences juridiques qui résultent des principes d’égalité de traitement et de proportionnalité (voir ci‑dessous, sous 1), tandis que la seconde branche est consacrée à la compétence de pleine juridiction du Tribunal (voir ci-dessous, sous 2).

89.      Le rapport d’une société de conseil que Pilkington avait produit dans la procédure de première instance joue un rôle important dans l’argumentation que présentent les requérantes sur les deux branches de ce moyen. Selon elles, on peut en conclure que la situation financière de Pilkington s’est considérablement détériorée à la suite de l’amende infligée par la Commission.

90.      Précisons d’emblée que l’attitude du Tribunal à l’égard de ce rapport a été parfaitement appropriée et n’est pas juridiquement critiquable. Il n’en a à juste titre tenu compte qu’aux fins de sa compétence de pleine juridiction, dans le cadre de laquelle il lui est loisible de prendre également en considération des circonstances et des preuves qui ne sont apparues que postérieurement à la décision litigieuse (55). En revanche, et tout autant à bon droit, le Tribunal n’en a pas tenu compte en examinant la légalité de la décision litigieuse, car seuls les éléments dont la Commission disposait elle-même en adoptant sa décision peuvent alors être retenus (56).

1.      Les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité (première branche du troisième moyen)

91.      Tout d’abord, les requérantes font valoir que le Tribunal a méconnu les exigences juridiques des principes généraux d’égalité de traitement et de proportionnalité. Elles critiquent la « disparité flagrante » entre les charges que constituent les sanctions infligées par la Commission pour les différents participants à l’entente. Pilkington s’estime bien plus sévèrement sanctionnée que ses coauteurs, au motif que le montant de l’amende qui lui a été infligée représente une proportion très supérieure de son chiffre d’affaires total par rapport aux autres participants à l’entente, qui disposaient d’une gamme de production plus diversifiée.

92.      C’est à juste titre que le Tribunal a rappelé (57) à cet égard que les montants finals des amendes auxquels son calcul aboutit pour les entreprises concernées ne doivent pas nécessairement traduire toute différenciation parmi celles-ci quant à leur chiffre d’affaires global ou leur chiffre d’affaires pertinent (58). En effet, en dehors du plafond de 10 % prévu à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, le calcul du montant des amendes infligées au titre du droit des ententes n’est pas un processus mécanique, requérant que la sanction respecte une certaine proportion par rapport au chiffre d’affaires total respectif de chacune des entreprises concernées.

93.      Il est exact qu’en infligeant des amendes au titre du droit des ententes en vertu de l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003, la Commission est non pas entièrement libre, mais soumise à un contrôle juridictionnel portant sur le respect des principes généraux du droit de l’Union et des droits fondamentaux garantis au niveau de l’Union (59), en particulier les principes d’égalité de traitement et de proportionnalité (60).

94.      Le Tribunal n’a en l’espèce méconnu ni les exigences juridiques du premier de ces principes ni celles du second.

a)      Les exigences juridiques du principe de l’égalité de traitement

95.      S’agissant tout d’abord du principe de l’égalité de traitement, celui-ci veut, ainsi qu’on l’a déjà relevé (61), que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié.

96.      Dans le cas normal, le principe de l’égalité de traitement est respecté en matière de répression des infractions au droit des ententes lorsque l’ensemble des participants à l’entente se voient appliquer les mêmes critères lors du calcul du montant des amendes qui leur sont infligées (62), de sorte que, qualitativement, une seule et même infraction au droit des ententes ne se voie pas appliquer deux poids et deux mesures (63). À cet égard, le seul fait que le montant de l’amende finalement infligée à une entreprise s’approche de, voire s’élève à, 10 % de son chiffre d’affaires total, c’est-à-dire le plafond légalement fixé (article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003), alors que ce pourcentage est plus faible pour d’autres participants à l’entente, ne peut en soi constituer une violation du principe d’égalité de traitement ou de proportionnalité (64).

97.      Les requérantes souhaitent néanmoins obtenir en l’espèce que Pilkington fasse l’objet d’un traitement particulier, consistant à réduire le montant de l’amende qui lui est infligée en le ramenant à un pourcentage plus faible de son chiffre d’affaires. Elles font donc grief au Tribunal de les avoir privées de ce traitement particulier.

98.      Il peut dans certains cas être justifié de s’écarter de la méthode classique de calcul du montant des amendes lorsque celle appliquée par la Commission sur la base des lignes directrices de 2006 ne permet pas d’opérer une différenciation suffisante entre le montant des amendes infligées aux différents participants à l’entente, en fonction de la durée et de la gravité de leur participation individuelle respective, ainsi qu’en fonction d’éventuelles circonstances atténuantes ou aggravantes (65). Il n’existe toutefois en l’espèce aucune indication qui le justifierait, et les requérantes n’ont elles-mêmes avancé aucun élément en ce sens.

99.      Au surplus, c’est en définitive une question relevant de l’appréciation des faits et des preuves que celle de savoir si la situation de Pilkington se différencie notablement de celle des autres participants à l’entente en raison de circonstances spécifiques et nécessite en conséquence de soumettre le calcul du montant de l’amende à un traitement particulier. Selon une jurisprudence constante (66), c’est au seul Tribunal qu’appartient cette appréciation, qui ne doit pas faire l’objet d’un réexamen par la Cour au stade de la procédure de pourvoi, à l’exception d’une éventuelle dénaturation des faits ou des moyens de preuve, dont il n’est cependant pas fait grief en l’espèce.

100. Ce n’est que dans un souci d’exhaustivité que l’on relèvera à titre complémentaire que la forte spécialisation de Pilkington dans le verre automobile et la moindre diversification de sa gamme de produits par rapport à d’autres participants à l’entente ne nous apparaissent pas en soi constituer des éléments suffisants pour appliquer des critères particuliers au calcul du montant de l’amende lui incombant. C’est au contraire à juste titre que la Commission souligne qu’une entreprise telle que Pilkington, qui réalise une part particulièrement importante de son chiffre d’affaires total avec les produits relevant de l’entente, profite également de manière proportionnellement plus forte des éventuels bénéfices que les participants à l’entente peuvent tirer de leur comportement collusoire. Dans ces conditions, il n’apparaît nullement injuste que le montant de l’amende infligée par la Commission représente un pourcentage plus élevé du chiffre d’affaires total de cette entreprise que ce n’est le cas pour d’autres participants à l’entente.

101. Cette conclusion n’est pas non plus remise en cause par le fait que, dans le passé, la Commission ait parfois réduit le montant des amendes pour tenir compte des particularités du modèle économique de certains participants à l’entente. En effet, la pratique décisionnelle antérieure de la Commission ne sert pas de cadre juridique applicable à l’imposition des amendes en matière de droit de la concurrence (67).

102. S’agissant spécialement d’Almamet que citent les requérantes, la situation de cette entreprise se caractérisait par des spécificités qui ne s’appliquent pas dans la même mesure à Pilkington – au moins selon les informations dont disposent les juridictions de l’Union (68).

103. Aussi convient-il de rejeter comme dénué de fondement le grief tiré d’une violation des exigences juridiques s’attachant au principe de l’égalité de traitement.

b)      Les exigences juridiques du principe de proportionnalité

104. S’agissant ensuite du principe de proportionnalité, qui, en vertu de l’article 49, paragraphe 3, de la Charte, jouit du statut de droit fondamental (69), il est également admis qu’il doit être respecté lorsque des amendes sont infligées au titre d’infractions au droit des ententes (70).

105. Les requérantes font ici enfin grief au Tribunal d’avoir méconnu les exigences juridiques du principe de proportionnalité du point de vue du rapport entre le montant de l’amende infligée par la Commission et le chiffre d’affaires total de Pilkington.

106. Le plafond légal de 10 % que nous avons déjà mentionné (71) et prévu à l’article 23, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 1/2003 permet en principe de maintenir le montant des amendes qu’inflige la Commission aux participants à l’entente dans un rapport raisonnable avec leur capacité économique respective et d’éviter d’imposer des amendes d’un montant excessif et disproportionné (72). Dès lors que ce plafond est respecté, il y a présomption que le montant de l’amende ne sollicite pas de façon excessive la capacité financière de l’entreprise concernée.

107. La seule circonstance que le montant d’une amende fasse peser une charge financière, qui peut même être considérable, sur l’entreprise concernée et ait pour conséquence d’affaiblir momentanément sa capacité financière ne permet nullement de conclure qu’il est disproportionné. Au contraire, la sanction infligée sous forme d’amende à l’encontre d’une entreprise doit être sensible pour qu’elle puisse exercer son effet dissuasif spécial et général (voir également à ce sujet point 4 des lignes directrices de 2006). Cet objectif serait méconnu dès lors qu’une entreprise pourrait en quelque sorte s’acquitter de l’amende « à peu de frais ».

108. Si l’affaiblissement éventuellement prévisible de la capacité financière de l’entreprise concernée à la suite de l’imposition d’une amende au titre du droit des ententes devait servir de prétexte à l’atténuation de cette sanction, il en résulterait au surplus cette conséquence absurde que l’entreprise concernée se verrait récompensée d’une infraction grave qu’elle a commise aux règles de concurrence par l’obtention d’un avantage financier injustifié (73). Si une entreprise vient à se heurter de façon inattendue à des difficultés de paiement, le droit budgétaire de l’Union prévoit des solutions appropriées, ainsi que nous l’avons déjà mentionné (74).

109. Dans ces conditions, le grief tiré d’une violation des exigences juridiques du principe de proportionnalité est tout aussi peu justifié que celui tiré du non‑respect du principe d’égalité de traitement.

2.      L’exercice par le Tribunal de la compétence de pleine juridiction (seconde branche du troisième moyen)

110. Les requérantes font enfin grief au Tribunal, dans le cadre de ce troisième moyen, de n’avoir pas exercé avec l’intensité requise la compétence de pleine juridiction que lui confère l’article 261 TFUE, lu en conjonction avec l’article 31 du règlement n° 1/2003.

111. La pierre d’achoppement est ici surtout constituée par les déclarations figurant aux points 442 et 443 de l’arrêt attaqué, où le Tribunal n’entend réduire le montant de l’amende infligée par la Commission au titre des conséquences financières négatives que celle-ci fait peser sur l’entreprise concernée que « dans des circonstances exceptionnelles », « lorsqu’un intérêt supérieur le justifie » (75). Selon les requérantes, le Tribunal s’est à cet égard borné à une « application superficielle » de sa compétence de pleine juridiction (76).

112. Le contrôle par la Cour de la compétence de pleine juridiction qu’exerce le Tribunal se borne aux erreurs manifestes (77). Ces erreurs peuvent être retenues, en premier lieu, lorsque le Tribunal a méconnu la portée de ses pouvoirs au titre de l’article 261 TFUE (78), en deuxième lieu, lorsqu’il n’a pas pris suffisamment en considération l’ensemble des éléments pertinents (79) et, en troisième lieu, lorsqu’il a appliqué des critères juridiques erronés (80), en particulier au regard des principes d’égalité de traitement (81) et de proportionnalité (82).

113. Le grief que tirent ici les requérantes d’une approche trop superficielle de la « pleine juridiction » relève de la première des catégories citées : il est en définitive reproché au Tribunal d’avoir méconnu l’ampleur des pouvoirs que lui confère l’article 261 TFUE (83).

114. De fait, ces pouvoirs sont très larges. En vertu de l’article 261 TFUE, le Tribunal est habilité, au-delà du simple contrôle de légalité d’une amende infligée par la Commission au titre du droit des ententes, à substituer sa propre appréciation pour la détermination du montant de cette amende à celle de la Commission (84). Il peut ainsi, pour des raisons de pure opportunité, supprimer, réduire ou majorer le montant de l’amende infligée, sans avoir à annuler préalablement la décision litigieuse (85). L’exercice de la compétence de pleine juridiction n’est donc pas nécessairement soumis à la constatation d’une erreur de droit.

115. Le Tribunal était en l’espèce parfaitement conscient de cette possibilité que lui offre l’article 261 TFUE (86). Il n’a nullement considéré qu’il n’était autorisé à diminuer le montant de l’amende infligée par la Commission que dans des circonstances exceptionnelles. Il a au contraire estimé qu’une telle réduction, spécifiquement motivée par l’affaiblissement allégué de la capacité financière de l’entreprise concernée, n’est appropriée que dans des circonstances exceptionnelles.

116. En d’autres termes, le Tribunal a parfaitement examiné en l’espèce l’allégation tirée par Pilkington de l’affaiblissement de sa capacité financière, y compris le rapport de la société de conseil qu’a produit celle-ci. Il s’est à cet égard prononcé en fonction non pas de considérations juridiques, qu’il aurait mal interprétées, mais uniquement de considérations d’opportunité, qui plaident à l’encontre d’une réduction du montant de l’amende. C’est ce qui apparaît de façon particulièrement claire lorsque l’on examine le contexte qui sert de cadre aux considérations du Tribunal relatives aux « circonstances exceptionnelles ». La crainte qui l’inspire est de voir l’efficacité de la politique de concurrence de l’Union risquer d’être compromise si les amendes infligées au titre du droit des ententes ne revêtent pas une certaine gravité pour les entreprises concernées (87).

117. Ainsi que nous l’avons déjà indiqué (88), une telle réflexion n’est pas critiquable d’un point de vue juridique. Elle s’inscrit d’ailleurs dans l’esprit de la politique de concurrence de l’Union définie par la Commission dans ses lignes directrices de 2006 (89). Si de telles lignes directrices ne sont certes pas contraignantes pour les juridictions de l’Union, il n’en reste pas moins loisible à celles-ci de s’en inspirer lorsqu’elles exercent leur compétence de pleine juridiction (90).

118. Aussi le Tribunal a-t-il, dans l’ensemble, correctement exercé sa compétence de pleine juridiction. Statuant au stade du pourvoi, la Cour n’est en principe pas habilitée à aller plus avant dans l’appréciation du montant de l’amende du point de vue de la proportionnalité de celle-ci. Ce n’est qu’à titre tout à fait exceptionnel qu’il est permis à la Cour de corriger elle-même le montant de l’amende, lorsque « le niveau de la sanction est non seulement inapproprié, mais également excessif, au point d’être disproportionné » (91). Rien n’indique toutefois en l’espèce qu’il existerait entre l’infraction et la sanction une disproportion si flagrante et évidente qu’elle justifierait une correction de la part de la Cour statuant au stade du pourvoi.

119. Aussi cette dernière branche du troisième moyen ne saurait-elle davantage prospérer. C’est donc l’ensemble du troisième moyen qui est dépourvu de fondement.

D –    Résumé

120. Aucun des motifs en droit avancés par les requérantes n’étant couronné de succès, il convient de rejeter le pourvoi dans son intégralité.

VI – Sur les dépens

121. Conformément à l’article 184, paragraphe 2, de son règlement de procédure, la Cour statue sur les dépens lorsqu’elle rejette le pourvoi.

122. Il résulte des dispositions combinées de l’article 138, paragraphes 1 et 2, et de l’article 184, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, que toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens ; si plusieurs parties succombent, la Cour décide du partage des dépens. La Commission ayant conclu en ce sens et les requérantes ayant succombé en leurs moyens, elles doivent être condamnées aux dépens. Ayant introduit le pourvoi ensemble, elles devront supporter ces dépens solidairement.

VII – Conclusion

123. Au vu des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer de la manière suivante :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Les requérantes sont condamnées solidairement aux dépens.


1 – Langue originale : l’allemand.


2 – Décision C(2008) 6815 final de la Commission, du 12 novembre 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39.125 – Verre automobile) (JO 2009, C 173, p. 13), telle que modifiée par la décision C(2009) 863 final de la Commission, du 11 février 2009, et par la décision C(2013) 1119 final de la Commission, du 28 février 2013 (ci-après la « décision litigieuse »).


3 – Arrêt Pilkington Group e.a./Commission (T-72/09, EU:T:2014:1094, ci-après l’« arrêt attaqué »).


4 – Affaire AGC Glass Europe e.a./Commission (C‑517/15 P).


5 – La présente affaire est régie par le droit antérieur à l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, puisque la décision litigieuse a été adoptée avant le 1er décembre 2009.


6 – Règlement du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1).


7 – Lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci‑après les « lignes directrices de 2006 »).


8 – Note sans objet dans la version en langue française.


9 – Le Tribunal justifie cette décision par le fait qu’au cours de la procédure de première instance, la Commission a adopté la décision modificative du 28 février 2013 (voir ci-dessus point 15 et note 2), par laquelle elle a rectifié deux erreurs dans le calcul du montant de l’amende (points 448 et 449 de l’arrêt attaqué).


10 – Arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, EU:C:2013:464, point 76) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, points 57 et 59) ; du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission (C‑286/13 P, EU:C:2015:184, points 148 et 149) ; du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, points 53 et 55) ; du 9 juillet 2015, InnoLux/Commission (C‑231/14 P, EU:C:2015:451, point 50) ; du 22 octobre 2015, AC-Treuhand/Commission (C‑194/14 P, EU:C:2015:717, point 64), ainsi que du 20 janvier 2016, Toshiba Corporation/Commission (C‑373/14 P, EU:C:2016:26, point 85).


11 – Arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, EU:C:2013:464, point 77) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 58) ; du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 54), ainsi que du 9 juillet 2015, InnoLux/Commission (C‑231/14 P, EU:C:2015:451, point 62).


12 – Arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, EU:C:2013:464, point 76) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 57) ; du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission (C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 148), ainsi que du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 53).


13 – Voir en ce sens arrêt du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 57).


14 – Arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, EU:C:2013:464, point 76) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 57) ; du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission (C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 148) ; du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 53), ainsi que du 9 juillet 2015, InnoLux/Commission (C‑231/14 P, EU:C:2015:451, point 55).


15 – En ce sens, arrêts du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 57), dans lequel la Cour a précisé que le point 13 des lignes directrices de 2006 « vise les ventes réalisées sur le marché pertinent concerné par l’infraction ».


16 – Voir de nouveau à ce sujet point 26 et note 10 des présentes conclusions.


17 – Arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, EU:C:2013:464, point 77) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 58) ; du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 54), ainsi que du 9 juillet 2015, InnoLux/Commission (C‑231/14 P, EU:C:2015:451, point 62).


18 – Points 224 et 226 de l’arrêt attaqué.


19 – Les ententes que les entreprises concernées ne mettent finalement pas en œuvre ou qui n’ont pas l’effet recherché sur le marché sont et demeurent des infractions aux règles de concurrence, qui peuvent et doivent être sanctionnées par les autorités de la concurrence.


20 – Voir également, sur le caractère déterminant du critère d’une concurrence faussée, arrêts du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 63), ainsi que du 9 juillet 2015, InnoLux/Commission (C‑231/14 P, EU:C:2015:451, point 61).


21 – Arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, EU:C:2013:464, point 77) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 58) ; du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 54).


22 – Voir à ce sujet arrêt du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 57), où la Cour fait référence aux « ventes réalisées sur le marché pertinent concerné par l’infraction ».


23 – Arrêts du 11 juillet 2013, Team Relocations e.a./Commission (C‑444/11 P, EU:C:2013:464, points 75 à 78) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, points 57 à 59) ; du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission (C‑286/13 P, EU:C:2015:184, points 148 et 149) ; du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, points 53 à 58 et 64), ainsi que du 9 juillet 2015, InnoLux/Commission (C‑231/14 P, EU:C:2015:451, point 51).


24 – Note sans objet dans la version en langue française.


25 – Taux de change de l’euro (JO 2008, C 290, p. 6).


26 – Le montant initialement fixé de 370 millions d’euros est lui-même inférieur, quoique de peu, au plafond de 10 % si l’on retient le taux de change moyen.


27 – Arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 282).


28 – Arrêts du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission (100/80 à 103/80, EU:C:1983:158, points 119 et 121) ; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 280 et 281) ; du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission (C‑76/06 P, EU:C:2007:326, point 24), ainsi que du 4 septembre 2014, YKK e.a./Commission (C‑408/12 P, EU:C:2014:2153, point 63).


29 – Arrêt du 4 septembre 2014, YKK e.a./Commission (C‑408/12 P, EU:C:2014:2153, point 63).


30 – Article 14 du règlement n° 1/2003.


31 – Les décisions prises par la Commission en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 pour fixer le montant des amendes sont adoptées selon le principe de collégialité (voir article 1er du règlement intérieur de la Commission, ainsi qu’article 17, paragraphe 6, TUE et article 250 TFUE).


32 – Voir en ce sens également arrêt du 4 septembre 2014, YKK e.a./Commission (C‑408/12 P, EU:C:2014:2153, point 64, première phrase).


33 – La question du taux de change qu’il convient de retenir pour faire entrer les chiffres d’affaires des différentes filiales d’un groupe dans le calcul du chiffre d’affaires total de ce groupe – le taux moyen de l’exercice considéré ou celui applicable à une certaine date – ne fait pas l’objet de la présente procédure et n’a été aucunement abordée par les parties. C’est pourquoi nous n’examinerons pas non plus cette question dans les présentes conclusions.


34 – Point 415 de l’arrêt attaqué.


35 – Arrêts du 16 novembre 2000, Enso Española/Commission (C‑282/98 P, EU:C:2000:628, point 89), ainsi que du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 606).


36 – Voir à ce sujet point 48 et note 28 des présentes conclusions.


37 – C’est particulièrement clair dans l’arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 605).


38 – Arrêt du 14 mai 1998, Sarrió/Commission (T‑334/94, EU:T:1998:97, point 403).


39 – Voir en ce sens également arrêt du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission (100/80 à 103/80, EU:C:1983:158, point 135).


40 – Règlement délégué de la Commission du 29 octobre 2012 relatif aux règles d’application du règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union (JO 2012, L 362, p. 1).


41 – Voir en ce sens arrêts du 16 novembre 2000, Enso Española/Commission (C‑282/98 P, EU:C:2000:628, point 59) ; du 16 novembre 2000, Sarrió/Commission (C‑291/98 P, EU:C:2000:631, point 89), ainsi que du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 604).


42 – Voir point 73 des présentes conclusions.


43 – Arrêts du 14 septembre 2010, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C‑550/07 P, EU:C:2010:512, point 54), ainsi que du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 51) ; voir dans le même sens arrêt du 19 octobre 1977, Ruckdeschel e.a. (117/76 et 16/77, EU:C:1977:160, point 7).


44 – Arrêts du 16 décembre 2008, Arcelor Atlantique et Lorraine e.a. (C‑127/07, EU:C:2008:728, point 23) ; du 14 septembre 2010, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C‑550/07 P, EU:C:2010:512, point 55) ; du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 51), ainsi que du 4 juin 2015, P et S (C‑579/13, EU:C:2015:369, point 41).


45 – Arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 281).


46 – Voir en ce sens arrêts du 16 novembre 2000, Enso Española/Commission (C‑282/98 P, EU:C:2000:628, point 59) ; du 16 novembre 2000, Sarrió/Commission (C‑291/98 P, EU:C:2000:631, point 89), ainsi que du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 604).


47 – Arrêts du 14 septembre 2010, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C‑550/07 P, EU:C:2010:512, point 100), ainsi que du 1er juillet 2014, Ålands Vindkraft (C‑573/12, EU:C:2014:2037, point 127) ; voir également arrêts du 13 février 1996, Van Es Douane Agenten (C‑143/93, EU:C:1996:45, point 27), et du 14 juin 2012, Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (C‑606/10, EU:C:2012:348, point 76).


48 – Arrêt du 29 mars 2011, ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a. (C‑201/09 P et C‑216/09 P, EU:C:2011:190, point 68) ; du 29 mars 2011, ThyssenKrupp Nirosta/Commission (C‑352/09 P, EU:C:2011:191, point 81), ainsi que du 1er juillet 2014, Ålands Vindkraft (C‑573/12, EU:C:2014:2037, point 128).


49 – Arrêts du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 55) ; du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 51), ainsi que du 9 juillet 2015, InnoLux/Commission (C‑231/14 P, EU:C:2015:451, point 48).


50 – Point 420 de l’arrêt attaqué.


51 – Voir point 73 des présentes conclusions.


52 – Arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 604).


53 – Arrêts du 16 novembre 2000, Enso Española/Commission (C‑282/98 P, EU:C:2000:628, point 89) ; du 16 novembre 2000, Sarrió/Commission (C‑291/98 P, EU:C:2000:631, point 89), ainsi que du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 604).


54 – Point 421, lu conjointement avec les points 415 et 416 de l’arrêt attaqué.


55 – Arrêt du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission (C‑603/13 P, EU:C:2016:38, point 72).


56 – Arrêts du 7 février 1979, France/Commission (15/76 et 16/76, EU:C:1979:29, point 7) ; du 5 octobre 1994, Crispoltoni e.a. (C‑133/93, C‑300/93 et C‑362/93, EU:C:1994:364, point 43) ; du 17 mai 2001, IECC/Commission (C‑449/98 P, EU:C:2001:275, point 87), ainsi que du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 31).


57 – Point 397 de l’arrêt attaqué.


58 – Arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 312).


59 – Article 51, paragraphe 1, première phrase, de la Charte ; voir, à titre complémentaire, la proclamation figurant au considérant 37 du règlement n° 1/2003, selon laquelle ce règlement doit être interprété et appliqué dans le respect des droits et des principes reconnus par la Charte.


60 – Voir en ce sens arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 304 et 319) ; du 19 juillet 2012, Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:479, point 58), ainsi que du 12 novembre 2014, Guardian Industries et Guardian Europe/Commission (C‑580/12 P, EU:C:2014:2363, point 62).


61 – Voir, à ce sujet, points 66 et 67 des présentes conclusions.


62 – Voir en ce sens arrêt du 19 juillet 2012, Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:479, point 58), aux termes duquel, s’agissant de la détermination du montant de l’amende, il ne saurait être opéré, par l’application de méthodes de calcul différentes, une discrimination entre les entreprises qui ont participé à un accord ou à une pratique concertée contraire à l’article 81, paragraphe 1, CE.


63 – Voir point 57 des conclusions que nous avons présentées le 12 janvier 2012 dans l’affaire Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission et Commission/Alliance One International e.a. (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:11).


64 – Arrêt du 16 juin 2011, Putters International/Commission (T‑211/08, EU:T:2011:289, point 74).


65 – Voir en ce sens arrêt du 16 juin 2011, Putters International/Commission (T‑211/08, EU:T:2011:289, point 75) ; voir, en outre, résolution du Parlement européen du 10 mars 2015 sur le rapport annuel sur la politique de concurrence de l’Union européenne [résolution du Parlement P8_TA(2015)0051, point 29].


66 – Voir, notamment, arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 177) ; du 19 mars 2015, Dole Food et Dole Fresh Fruit Europe/Commission (C‑286/13 P, EU:C:2015:184, point 58), ainsi que du 20 janvier 2016, Toshiba Corporation/Commission (C‑373/14 P, EU:C:2016:26, points 40 et 41).


67 – Arrêts du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission (C‑167/04 P, EU:C:2006:594) ; du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/Commission (C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 189), ainsi que du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission (C‑227/14 P, EU:C:2015:258, point 67).


68 – Ainsi que le souligne le Tribunal dans son arrêt du 12 décembre 2012, Novácke chemické závody/Commission (T‑352/09, EU:T:2012:673), la situation d’Almamet se caractérisait notamment par le fait qu’il s’agissait d’un « négociant actif dans le commerce de matériaux d’une valeur élevée avec une marge de profit réduite ».


69 – Voir à ce sujet point 222 des conclusions que nous avons présentées le 18 avril 2013 dans l’affaire Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:248).


70 – Arrêts du 28 juin 2005, du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 280 et 281), ainsi que du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission (C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 365).


71 – Voir sur ce point les considérations ci-dessus au sujet du deuxième moyen, en particulier point 48.


72 – Arrêts du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission (100/80 à 103/80, EU:C:1983:158, points 119 et 121) ; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 280 et 281) ; du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission (C‑76/06 P, EU:C:2007:326, point 24), ainsi que du 4 septembre 2014, YKK e.a./Commission (C‑408/12 P, EU:C:2014:2153, point 63).


73 – Voir en ce sens arrêts du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, point 327) ; du 29 juin 2006, SGL Carbon/Commission (C‑308/04 P, EU:C:2006:433, point 105), ainsi que du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑389/10 P, EU:C:2011:816, point 103) ; voir dans le même sens déjà arrêt du 8 novembre 1983, IAZ International Belgium e.a./Commission (96/82 à 102/82, 104/82, 105/82, 108/82 et 110/82, EU:C:1983:310, points 54 et 55).


74 – Voir point 61 des présentes conclusions.


75 – Point 442 de l’arrêt attaqué.


76 – Dans la langue de procédure : « a ‘light touch’ review ».


77 – Arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission (C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 365).


78 – Voir, à cet égard, les conclusions que nous avons présentées le 8 décembre 2005 dans l’affaire Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied/Commission (C-105/04 P, EU:C:2005:751, point 137), ainsi que le 18 avril 2013 dans l’affaire Schindler Holding e.a./Commission (C-501/11 P, EU:C:2013:248, point 190) ; voir dans le même sens arrêts du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522, points 155 et 156), ainsi que du 24 octobre 2013, Kone e.a./Commission (C‑510/11 P, EU:C:2013:696, points 40 et 42).


79 – Arrêts du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission (C‑185/95 P, EU:C:1998:608, point 128) ; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 244 et 303), ainsi que du 3 septembre 2009, Papierfabrik August Koehler e.a./Commission (C‑322/07 P, C‑327/07 P et C‑338/07 P, EU:C:2009:500, point 125).


80 – Arrêts du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission (C‑185/95 P, EU:C:1998:608, point 128) ; du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, EU:C:2005:408, points 244 et 303), ainsi que du 3 septembre 2009, Papierfabrik August Koehler e.a./Commission (C‑322/07 P, C‑327/07 P et C‑338/07 P, EU:C:2009:500, point 125).


81 – Arrêts du 16 novembre 2000, Weig/Commission (C‑280/98 P, EU:C:2000:627, points 63 et 68) ; du 16 novembre 2000, Sarrió/Commission (C‑291/98 P, EU:C:2000:631, points 97 et 99), ainsi que du 19 juillet 2012, Alliance One International et Standard Commercial Tobacco/Commission (C‑628/10 P et C‑14/11 P, EU:C:2012:479, point 58).


82 – Arrêts du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission (C‑89/11 P, EU:C:2012:738, point 126), ainsi que du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522, point 165).


83 – Nous nous sommes déjà penchée sur les exigences juridiques qui résultent des principes d’égalité de traitement et de proportionnalité en examinant la première branche du troisième moyen (voir points 91 à 109 des présentes conclusions).


84 – Arrêts du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 692) ; du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑389/10 P, EU:C:2011:816, point 130) ; du 22 octobre 2015, AC-Treuhand/Commission (C‑194/14 P, EU:C:2015:717, point 74), ainsi que du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission (C‑603/13 P, EU:C:2016:38, point 75).


85 – Arrêts du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 692), ainsi que du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission (C‑534/07 P, EU:C:2009:505, point 86).


86 – Voir notamment points 431, 432 et 434 de l’arrêt attaqué.


87 – Point 441 de l’arrêt attaqué.


88 – Voir points 106 à 108 des présentes conclusions.


89 – Voir, en particulier, point 35 des lignes directrices de 2006 : « Dans des circonstances exceptionnelles, la Commission peut, sur demande, tenir compte de l’absence de capacité contributive d’une entreprise dans un contexte social et économique particulier. Aucune réduction d’amende ne sera accordée à ce titre par la Commission sur la seule constatation d’une situation financière défavorable ou déficitaire. Une réduction ne pourrait être accordée que sur le fondement de preuves objectives que l’imposition d’une amende, dans les conditions fixées par les présentes Lignes directrices, mettrait irrémédiablement en danger la viabilité économique de l’entreprise concernée et conduirait à priver ses actifs de toute valeur. »


90 – Arrêts du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens (C‑441/11 P, EU:C:2012:778, point 80), ainsi que du 21 janvier 2016, Galp Energía España e.a./Commission (C‑603/13 P, EU:C:2016:38, point 90).


91 – Arrêts du 22 novembre 2012, E.ON Energie/Commission (C‑89/11 P, EU:C:2012:738, points 125 et 126) ; du 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission (C‑501/11 P, EU:C:2013:522, points 164 et 165), ainsi que du 10 juillet 2014, Telefónica et Telefónica de España/Commission (C‑295/12 P, EU:C:2014:2062, point 205).