Language of document : ECLI:EU:C:2006:606

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme JULIANE Kokott

présentées le 27 septembre 2006 (1)

Affaire C-229/05 P

Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK)

et

Congrès national du Kurdistan (KNK)

contre

Conseil de l’Union européenne

«Pourvoi – Mesures dans le cadre de la lutte contre le terrorisme – Recevabilité du recours – Existence de l’organisation requérante – Représentation de l’organisation requérante – Dénaturation de preuves – Affectation individuelle de l’organisation requérante»






I –    Introduction

1.        Le présent pourvoi a été formé par M. Osman Ocalan au nom du Parti des travailleurs du Kurdistan (Partiya Karkerên Kurdistan – PKK) et par M. Serif Vanly au nom du Congrès national du Kurdistan (Kongra Netewiya Kurdistan – KNK). M. O. Ocalan est le frère de M. Abdullah Ocalan, le chef du PKK, qui est détenu en Turquie.

2.        Les deux requérants contestent l’inscription du PKK sur une liste d’organisations terroristes par le Conseil. Le Tribunal de première instance des Communautés européennes a rejeté le recours du PKK, car, selon ses propres affirmations, cette organisation n’existe plus et M. O. Ocalan ne peut donc pas prouver qu’il la représente. Le recours du KNK a également été rejeté comme irrecevable, car le KNK n’est pas individuellement concerné par la décision du Conseil.

II – Antécédents et cadre juridique du litige

3.        Dans les points 1 à 9 de l’ordonnance attaquée, rendue le 15 février 2005 dans l’affaire PKK et KNK/Conseil (2), le Tribunal présente les antécédents et le cadre juridique du litige comme suit:

«1      Il ressort du dossier que le Kurdistan Workers’ Party (Parti des travailleurs du Kurdistan) (PKK) est apparu en 1978 et a engagé une lutte armée contre le gouvernement turc afin de faire reconnaître le droit des Kurdes à l’autodétermination. Selon le témoignage écrit de M. O. Ocalan, le PKK aurait déclaré un cessez-le-feu unilatéral, sous réserve du droit à l’autodéfense, en juillet 1999. Selon le même témoignage, en avril 2002, afin de refléter cette réorientation, le congrès du PKK aurait décidé que “toutes les activités exercées sous le nom de ‘PKK’ cesseraient au 4 avril 2002 et toutes les activités menées au nom du PKK seraient considérées comme illégitimes” (annexe 2 de la requête, point 16). Un nouveau groupement, le Kongreya AzadÓ š Demokrasiya Kurdistan (Congrès pour la démocratie et la liberté du Kurdistan – KADEK), a été constitué afin d’atteindre démocratiquement des objectifs politiques au nom de la minorité kurde. M. A. Ocalan a été nommé président du KADEK.

2      Le Kurdistan National Congress (Congrès national du Kurdistan) (KNK) est une fédération regroupant une trentaine d’organisations. Le KNK a pour objectif “de renforcer l’unité et la coopération des Kurdes dans toutes les parties du Kurdistan et de soutenir leur combat à la lumière des intérêts supérieurs de la nation kurde” (article 7, paragraphe A, de la charte constitutive du KNK). Selon le témoignage écrit de M. S. Vanly, président du KNK, le dirigeant honoraire du PKK a été de ceux qui ont favorisé la création du KNK. Le PKK était membre du KNK et les membres individuels du PKK finançaient partiellement le KNK.

3      Le 27 décembre 2001, considérant qu’une action de la Communauté était nécessaire afin de mettre en œuvre la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité des Nations unies, le Conseil a adopté la position commune 2001/930/PESC relative à la lutte contre le terrorisme (JO L 344, p. 90) et la position commune 2001/931/PESC relative à l’application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme (JO L 344, p. 93).

4      Aux termes de l’article 2 de la position commune 2001/931:

“La Communauté européenne, agissant dans les limites des pouvoirs que lui confère le traité instituant la Communauté européenne, ordonne le gel des fonds et des autres avoirs financiers ou ressources économiques des personnes, groupes et entités dont la liste figure à l’annexe.”

5      Le 27 décembre 2001, le Conseil a adopté le règlement (CE) n° 2580/2001 concernant l’adoption de mesures restrictives spécifiques à l’encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme (JO L 344, p. 70).

6      Selon l’article 2 du règlement n° 2580/2001:

“1.      À l’exception des dérogations autorisées dans le cadre des articles 5 et 6:

a)      tous les fonds détenus par, en possession de ou appartenant à une personne physique ou morale, un groupe ou une entité inclus dans la liste visée au paragraphe 3 [doivent être gelés];

b)      les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques ne doivent pas être mis, directement ou indirectement, à la disposition ni utilisés au bénéfice des personnes physiques ou morales, des groupes ou des entités inclus dans la liste visée au paragraphe 3.

2.      À l’exception des dérogations autorisées dans le cadre des articles 5 et 6, il est interdit de fournir des services financiers aux personnes physiques ou morales, groupes ou entités inclus dans la liste visée au paragraphe 3 ou au bénéfice de ces personnes, groupes ou entités.

3.      Le Conseil, statuant à l’unanimité, établit, révise et modifie la liste de personnes, de groupes et d’entités auxquels le présent règlement s’applique, conformément aux dispositions de l’article 1er, paragraphes 4, 5 et 6, de la position commune 2001/931/PESC. Cette liste mentionne:

i)      les personnes physiques commettant ou tentant de commettre un acte de terrorisme, participant à un tel acte ou facilitant sa réalisation;

ii)      les personnes morales, groupes ou entités commettant ou tentant de commettre un acte de terrorisme, participant à un tel acte ou facilitant sa réalisation;

iii)      les personnes morales, groupes ou entités détenus ou contrôlés par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, groupes ou entités visés aux points i) et ii) ou

iv)      les personnes physiques ou morales, groupes ou entités agissant pour le compte ou sous les ordres d’une ou de plusieurs personnes physiques ou morales, groupes ou entités visés aux points i) et ii).”

7      Le 2 mai 2002, le Conseil a adopté la décision 2002/334/CE mettant en œuvre l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 2580/2001 et abrogeant la décision 2001/927/CE (JO L 116, p. 33). Cette décision a inclus le PKK dans la liste prévue à l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 2580/2001 (ci-après la “liste litigieuse”).

8      Par requête enregistrée sous le numéro T-206/02, le KNK a introduit un recours en annulation à l’encontre de la décision 2002/334.

9      Le 17 juin 2002, le Conseil a adopté la décision 2002/460/CE mettant en œuvre l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 2580/2001 et abrogeant la décision 2002/334 (JO L 160, p. 26). Le nom du PKK a été maintenu sur la liste litigieuse. Cette liste a ensuite été régulièrement mise à jour par décisions du Conseil.»

4.        Complémentairement à l’exposé du Tribunal, il convient, dans le cadre de l’examen du cas d’espèce, de rappeler le libellé de l’article 1er, paragraphe 6, de la position commune 2001/931:

«Les noms des personnes et entités reprises sur la liste figurant à l’annexe feront l’objet d’un réexamen à intervalles réguliers, au moins une fois par semestre, afin de s’assurer que leur maintien sur la liste reste justifié.»

5.        Le KNK a d’abord formé un recours contre la décision 2002/334 dans le cadre de l’affaire KNK/Conseil (3) puis, conjointement avec M. O. Ocalan agissant au nom du PKK, il a introduit un recours contre les décisions 2002/334 et 2002/460 dans le cadre de l’affaire PKK et KNK/Conseil, précitée. Seul ce recours collectif fait l’objet du présent pourvoi.

III – L’ordonnance du Tribunal

6.        À la suite d’une exception d’irrecevabilité soulevée par le Conseil, le Tribunal a, par l’ordonnance attaquée, rejeté le recours comme irrecevable en ce qui concerne les deux requérants.

7.        Au point 27 de ladite ordonnance, le Tribunal a reconnu que le PKK est directement et individuellement concerné par les décisions 2002/334 et 2002/460. Au point 28, le Tribunal a souligné que, dans de tels cas, la recevabilité du recours ne doit pas faire l’objet d’un «formalisme excessif», car une protection juridique effective n’est sinon pas possible.

8.        Toutefois, dans les points 34 à 41 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal expose que M. O. Ocalan n’a pas prouvé qu’il représente valablement le PKK et que, au contraire, il affirme que le PKK a été dissous et que les activités menées au nom du PKK sont considérées comme illégitimes. Le Tribunal constate donc que M. O. Ocalan a, de son propre chef, introduit un recours pour le compte du PKK, qui est donc irrecevable.

9.        Dans les points 45 à 56, le Tribunal examine la qualité pour agir du KNK en fonction du critère en vertu duquel une association constituée pour promouvoir les intérêts collectifs d’une catégorie de justiciables ne saurait être considérée comme étant individuellement concernée, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, par un acte affectant les intérêts généraux de cette catégorie que lorsque ses membres le sont à titre individuel. Le PKK n’existant plus, il n’est plus non plus membre du KNK et ne permet donc pas de fonder l’affectation individuelle du KNK. L’organisation qui a succédé au PKK, le KADEK, n’est pas membre du KNK. Les autres restrictions des activités du KNK ou de ses membres relatives à la collaboration avec le PKK qui résultent des décisions 2002/334 et 2002/460 ne les affectent pas individuellement, mais à l’égal de toutes les autres personnes.

10.      Enfin, la capacité à agir du KNK n’est pas non plus nécessaire pour ouvrir une voie de recours contre les décisions. Les organisations qui ont succédé au PKK peuvent en effet introduire des recours, ce qui s’est déjà produit dans le cas du KONGRA-GEL (Kongra Gelê Kurdistan – Congrès du peuple du Kurdistan) (4).

IV – Conclusions des parties

11.      Les requérants concluent à ce qu’il plaise à la Cour:

1)      déclarer que la requête de M. O. Ocalan déposée pour le compte de l’organisation anciennement connue sous le nom de PKK est recevable;

2)      déclarer que la requête de M. S. Vanly déposée pour le compte de l’organisation connue sous le nom de KNK est recevable;

3)      se prononcer sur les dépens relatifs à la procédure quant à la recevabilité.

12.      Le Conseil conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

1)      rejeter le pourvoi des deux requérants comme étant irrecevable;

2)      à titre subsidiaire, rejeter le pourvoi des deux requérants comme étant non fondé;

3)      le cas échéant, renvoyer l’affaire au Tribunal;

4)      condamner les requérants aux dépens.

V –    Appréciation

13.      Le pourvoi est relatif au rejet du recours des deux requérants. Il convient tout d’abord d’examiner le pourvoi formé au nom du PKK, puis le pourvoi du KNK.

A –    Le pourvoi formé par M. O. Ocalan au nom du PKK

14.      Le premier requérant avance, au nom du PKK, sept moyens au total, qui peuvent en partie être examinés conjointement.

1.      Sur le premier moyen – La reconnaissance du pouvoir de représentation

15.      Le premier requérant estime que le Tribunal a agi de manière contradictoire en constatant qu’il n’a pas introduit le recours pour le PKK, mais de son propre chef. En effet, le Tribunal aurait déjà reconnu que le requérant représente valablement le PKK en notifiant la requête au lieu d’adopter les mesures de l’article 44, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal (5). Le libellé de cette disposition est le suivant:

«Si la requête n’est pas conforme aux conditions énumérées aux paragraphes 3 à 5 du présent article, le greffier fixe au requérant un délai raisonnable aux fins de régularisation de la requête ou de production des pièces mentionnées ci-dessus. À défaut de cette régularisation ou de cette production dans le délai imparti, le Tribunal décide si l’inobservation de ces conditions entraîne l’irrecevabilité formelle de la requête.»

16.      L’article 44, paragraphe 5, présente un intérêt particulier en ce qui concerne le pouvoir de représentation de l’avocat et de son mandant:

«Si le requérant est une personne morale de droit privé, il joint à sa requête:

a)      […]

b)      la preuve que le mandat donné à l’avocat a été régulièrement établi par un représentant qualifié à cet effet.»

17.      Le premier requérant invoque une affaire dans laquelle, à la suite d’un grief de la Commission en vertu duquel la personne ayant mandaté l’avocat n’était pas habilitée à représenter la société requérante, le Tribunal s’est informé auprès de la requérante à ce sujet (6). En l’espèce, ni le Conseil ni le Tribunal lui-même n’ont mis en doute le pouvoir de représentation de M. O. Ocalan de cette manière avant que l’ordonnance ne soit rendue.

18.      Toutefois, le Conseil rétorque à bon droit que la notification de la requête n’empêche pas le Tribunal de constater ultérieurement l’absence de pouvoir de représentation de M. O. Ocalan. Ainsi, dans l’affaire à laquelle renvoie le premier requérant, ce n’est qu’à la suite d’un grief de la Commission que le Tribunal a examiné le pouvoir de représentation du mandant (7).

19.      En outre, d’après le premier requérant, le fait de l’entendre au stade de la recevabilité, mais de dénier son pouvoir de représentation de l’entité qu’il représente pour le restant de la procédure est contradictoire.

20.      Cette argumentation n’est pas non plus convaincante, car – comme le souligne le Conseil – il apparaît juridiquement indispensable qu’une partie soit entendue sur les questions de recevabilité, même lorsqu’il n’est pas encore certain que les personnes qui agissent au nom de cette partie sont effectivement habilitées à la représenter. Le droit d’être entendu ne pourrait sinon pas être assuré au sujet du pouvoir de représentation. Du point de vue pratique, il s’agit également de la seule solution utile, car, parmi les intéressés, les prétendus représentants sont vraisemblablement ceux qui sont le plus à même de fournir les preuves nécessaires.

21.      Dans la mesure où ce moyen contient le grief partiel en vertu duquel le Tribunal aurait omis d’inviter le premier requérant à prouver son pouvoir de représentation, il convient d’examiner ce grief en liaison avec le septième moyen qui est relatif à l’absence de possibilité de clarification.

22.      Le premier moyen doit dès lors être écarté.

2.      Sur les deuxième et troisième moyens – L’anticipation de questions relatives au fond

23.      Dans ces deux moyens, le premier requérant expose que l’existence du PKK n’aurait pas dû être abordée et examinée séparément dans le cadre d’une exception d’irrecevabilité et que cette question concerne le fond du litige. À cet égard, le premier requérant invoque l’article 114, paragraphe 1, première phrase, du règlement de procédure du Tribunal.

24.      Le Conseil considère que ce moyen est irrecevable, car il s’agit d’arguments qui ont déjà été invoqués en première instance. Cependant, dès lors que le requérant conteste l’interprétation ou l’application du droit communautaire faite par le Tribunal, les points de droit examinés en première instance peuvent être à nouveau discutés dans le cadre d’un pourvoi. En effet, si un requérant ne pouvait fonder de la sorte son pourvoi sur des moyens et arguments déjà utilisés devant le Tribunal, la procédure de pourvoi serait privée d’une partie de son sens (8). Dans le cadre du présent pourvoi, le premier requérant reprend certes son argumentation de première instance, mais cette répétition se produit dans le cadre de la contestation de l’arrêt du Tribunal et elle est donc recevable.

25.      Toutefois, ce moyen est dépourvu de fondement. En l’espèce, la question de savoir dans quelle mesure l’existence du PKK présente effectivement une importance pour le fond du litige importe peu, car la première phrase de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal n’interdit pas de fonder l’exception d’irrecevabilité sur des arguments qui présentent également une importance pour le fond du litige.

26.      La version allemande de cette disposition est la suivante:

«Will eine Partei vorab eine Entscheidung des Gerichts über die Unzulässigkeit, die Unzuständigkeit oder einen Zwischenstreit herbeiführen, so hat sie dies mit besonderem Schriftsatz zu beantragen.» [Si une partie demande que le Tribunal statue préalablement sur l’irrecevabilité, l’incompétence ou sur un incident, elle présente sa demande par acte séparé.]

27.      Par contre, les versions anglaise (9) et française (10) de cette disposition prévoient en substance qu’une exception relative à l’irrecevabilité, à l’incompétence ou à une autre question préalable qui ne concerne pas le fond du litige peut être soulevée.

28.      Le premier requérant en déduit que l’exception d’irrecevabilité ne peut pas être soulevée et que le Tribunal ne peut pas statuer sur celle‑ci lorsque cela implique de statuer sur une question qui touche à la substance du litige.

29.      On peut en effet comprendre les versions anglaise et française de l’article 114, paragraphe 1, première phrase, du règlement de procédure du Tribunal dans le sens que les exceptions qui y sont mentionnées ne doivent pas concerner des questions qui requièrent un examen du fond de l’affaire. On ne peut pas exclure que, dans ces deux versions linguistiques, cette restriction s’applique aux trois exceptions; toutefois, compte tenu du contexte de cette disposition, il est davantage concevable que cette restriction se limite à la troisième exception, qui est celle de l’incident, du «Zwischenstreit» ou du «other preliminary plea».

30.      Cette dernière interprétation de l’article 114, paragraphe 1, première phrase, du règlement de procédure du Tribunal est également conforme à l’économie de cette disposition. Lorsque le Tribunal examine la recevabilité sans qu’une exception ait été soulevée, il ne lui est en effet pas interdit de traiter des questions qui peuvent également présenter une importance pour le fond du litige. Conformément à l’article 113 du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal peut à tout moment, d’office, les parties entendues, statuer sur les fins de non‑recevoir d’ordre public. Conformément à l’article 111 du règlement de procédure du Tribunal, lorsqu’un recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, le rejeter par voie d’ordonnance. Aucune limitation aux questions qui ne touchent pas au fond de l’affaire n’est mentionnée dans ces deux cas.

31.      L’examen non restrictif des questions de recevabilité correspond également à la logique des conditions de recevabilité dans leur ensemble, car l’examen du fond implique la compétence du Tribunal et la recevabilité du recours (11).

32.      En outre, l’objectif de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal va à l’encontre de la limitation de l’examen d’une exception d’irrecevabilité à des questions dépourvues d’importance pour le fond de l’affaire. En effet, comme le Conseil le souligne à juste titre, l’exception d’irrecevabilité permet d’éviter un examen approfondi du fond. Un tel examen ne présente aucune importance pour la procédure si le recours est irrecevable. Même si, dans le cadre de l’examen de la recevabilité, des questions qui présentent également une importance pour le fond doivent être abordées, il n’en découle cependant pas qu’un examen complet du fond doive être réalisé.

33.      Des questions susceptibles de présenter une importance pour le fond du litige peuvent donc également être examinées dans le cadre de l’exception d’irrecevabilité de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal. Par conséquent, l’éventuelle importance de la question de l’existence du PKK pour le fond de l’affaire ne faisait obstacle ni à l’exception d’irrecevabilité ni à ce que le Tribunal statue sur celle-ci.

34.       Eu égard à ce qui précède, il y a donc lieu de rejeter les deuxième et troisième moyens.

3.      Sur les quatrième et cinquième moyens – La dénaturation de la déclaration de M. O. Ocalan et la capacité juridique résiduelle du PKK

35.      Dans son quatrième moyen, le premier requérant fait valoir que le Tribunal a erronément interprété ses arguments. Il découlerait clairement de la requête et d’une déclaration de M. O. Ocalan que le PKK a cessé ses activités sous cette dénomination et a créé une nouvelle organisation apparentée dénommée KADEK. M. O. Ocalan n’aurait jamais reconnu que le PKK s’est dissous ou a cessé d’exister aux fins du recours.

36.      Dans le cadre de son cinquième moyen, le premier requérant expose que, même si, en principe, le PKK n’existait plus, une capacité résiduelle aux fins de la procédure devrait au moins lui être reconnue. Si le PKK peut être interdit, une capacité juridique suffisante doit lui être concédée afin de pouvoir contester cette interdiction en justice.

37.      Le Conseil considère ces moyens comme irrecevables, car ils ne constituent qu’une répétition de l’argumentation soutenue devant le Tribunal et contestent l’appréciation des faits par celui-ci.

38.      Comme il a déjà été exposé, il est possible d’exposer de nouveau des arguments présentés en première instance lorsque – comme en l’espèce – ils visent à contester l’appréciation juridique effectuée par le Tribunal. Par contre, il est vrai que l’appréciation des faits ne constitue pas une question juridique qui relève, en tant que telle, du contrôle de la Cour. Toutefois, il n’en va ainsi que dans la mesure où le Tribunal n’a pas dénaturé les éléments de preuve produits devant lui (12). Par conséquent, les deux moyens sont recevables dans la mesure où le premier requérant invoque la dénaturation de preuves par le Tribunal.

39.      On pourrait cependant douter de la pertinence de ces moyens, c’est-à-dire de leur aptitude à remettre en cause l’ordonnance attaquée. En l’absence d’une telle aptitude, il s’agirait, conformément à la terminologie française, d’un «moyen inopérant», c’est-à-dire d’un moyen qui ne permet pas d’atteindre l’objectif du pourvoi et qui est donc dépourvu de fondement.

40.      Afin de pouvoir juger de l’éventuelle pertinence de l’argumentation relative à l’existence du PKK, il convient de rappeler que le Tribunal n’a pas rejeté le recours en raison du défaut de capacité juridique et de capacité à agir du PKK – conformément à l’exception soulevée du Conseil – mais parce que M. O. Ocalan n’est pas un représentant du PKK.

41.      Toutefois, le Tribunal fonde exclusivement le rejet du pouvoir de représentation de M. O. Ocalan sur le fait que celui-ci a exposé que le PKK n’existe plus. Si ces moyens du premier requérant sont accueillis, la totalité de la motivation relative à ce point décisif disparaît. Ces moyens sont donc potentiellement pertinents.

42.      Il convient donc d’examiner si le Tribunal a dénaturé des éléments de preuve. Une telle dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (13). Toutefois, cette formulation n’est pas claire, car la constatation d’une dénaturation d’éléments de preuve implique également une certaine appréciation de ceux-ci. Une dénaturation des éléments de preuve existe plutôt lorsque, sans avoir recours à de nouveaux éléments de preuve, l’appréciation des éléments de preuve existants apparaît manifestement erronée.

43.      Jusqu’à maintenant, la Cour a le plus souvent fondé la constatation de la dénaturation d’éléments de preuve sur le fait que le Tribunal a attribué un contenu objectivement erroné à certains éléments de preuve (14). Néanmoins, la Cour a déjà invoqué le contexte de certaines déclarations afin de constater une dénaturation du contenu d’un document (15), mais également pour rejeter une dénaturation d’éléments de preuve (16).

44.      Il convient d’examiner à la lumière de ces critères si la constatation en vertu de laquelle M. O. Ocalan a exposé que le PKK n’existe plus et si la conclusion en vertu de laquelle le PKK n’a donc pas pu le mandater en vue du recours constituent une dénaturation d’éléments de preuve.

45.      La constatation du Tribunal peut se fonder sur les points 16 de la requête et 27 de la déclaration de M. O. Ocalan (17), dans lesquels il est question de la dissolution du PKK. Toutefois, ces faits sont précisés à un autre endroit de la déclaration. Conformément à la citation du point 16 de la déclaration effectuée par le Tribunal au point 1 de l’ordonnance attaquée, en avril 2002, afin de refléter la réorientation du PKK, le congrès du PKK aurait décidé que «toutes les activités exercées sous le nom de PKK cesseraient au 4 avril 2002 et toutes les activités menées au nom du PKK seraient considérées comme illégitimes [«illegitimate» dans la version originale].»

46.      En outre, conformément au point 18 de la déclaration, de nouveaux statuts modifiant la structure et l’organisation du PKK ont été adoptés. Une organisation coordinatrice devait rassembler les différentes organisations créées dans certaines parties du Kurdistan. C’est pourquoi le KADEK a été fondé.

47.      Il découle en outre des points 29 et suivants de la déclaration que l’inscription du PKK sur la liste d’entités terroristes est avant tout contestée, car elle porte préjudice à l’activité du KADEK.

48.      Enfin, M. O. Ocalan a établi le mandat de représentation des avocats concernés au nom de l’organisation anciennement connue sous la dénomination PKK.

49.      Il convient également de tenir compte du fait que, eu égard à sa nature, l’organisation en cause en l’espèce ne pouvait pas avoir de statuts définitifs et formalisés permettant de déterminer sans équivoque le début et la fin de son existence juridique.

50.      Par conséquent, on ne peut pas simplement déduire des éléments de preuve que le PKK n’existe plus et qu’il ne pouvait donc pas mandater M. O. Ocalan. Il est plus logique de considérer que le KADEK constitue seulement le nouveau nom du PKK.

51.      Même si – comme l’a fait le Conseil au cours de l’audience – on considère le groupement dénommé KADEK comme étant le successeur d’un PKK qui n’existe plus, il convient en tout cas – contrairement à ce qu’expose le Conseil – de partir du principe que le recours qui fait l’objet de la présente affaire a effectivement été formé par le KADEK sous le nom de PKK, sur le fondement des droits qu’il a acquis du PKK.

52.      Le fait que le Conseil, par sa décision 2004/306/CE, du 2 avril 2004, mettant en œuvre l’article 2, paragraphe 3, du règlement nº 2580/2001 et abrogeant la décision 2003/902/CE (18), ait inscrit le KADEK et le KONGRA-GEL en tant qu’alias du PKK sur la liste litigieuse, comme le Tribunal l’indique au point 55 de l’ordonnance attaquée, va également dans le sens du changement de nom ou de la succession. Par conséquent, l’organisation portant ce nom existe encore.

53.      De plus, dans le cadre de son cinquième moyen, le premier requérant souligne à bon droit que le maintien de la qualification du PKK en tant que groupe terroriste par la liste litigieuse rend au moins nécessaire la reconnaissance de sa capacité juridique et de sa capacité à agir pour contester cette inscription en justice. Par conséquent, le PKK doit également être en mesure de désigner des personnes pouvant introduire un recours en son nom.

54.      Il ne s’agit pas d’un argument purement formel. Il semble en effet que, jusqu’à aujourd’hui, le Conseil part du principe que le PKK existe encore, puisqu’il maintient des mesures de lutte contre le terrorisme à l’encontre de celui‑ci. Comme le Tribunal le constate au point 44, ce maintien résulte, conformément à l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 2580/2001, d’un réexamen régulier visant à déterminer si l’inscription dans la liste reste justifiée. Conformément à l’article 1er, paragraphe 6, de la position commune 2001/931 (19), auquel renvoie la disposition susmentionnée, ce réexamen se produit au moins une fois par semestre.

55.      En ce qui concerne l’affirmation en vertu de laquelle toutes les activités menées au nom du PKK sont considérées comme illégitimes («illegitimate» dans la version originale), celle-ci doit être appréciée – comme le PKK l’a exposé au cours de l’audience – en relation avec la volonté de prise de distance par rapport aux actions violentes, qui existait du moins à cette époque. De telles activités ne devaient plus être légitimées par le PKK sur le plan politique. On ne peut cependant pas rapporter cette affirmation au présent recours.

56.      Certes, il n’est ainsi pas encore établi si c’est à bon droit que M. O. Ocalan agit au nom du PKK. Mais on peut au moins dire que les constatations du Tribunal relatives à l’absence de pouvoir de représentation de M. O. Ocalan dénaturent sa déclaration. L’ordonnance attaquée est déjà entachée d’une erreur de droit à ce titre et elle doit donc être annulée.

4.      Sur le sixième moyen – La protection juridique effective

57.      Le sixième moyen critique les conditions que doivent remplir les recours individuels devant les juridictions européennes et, en particulier, l’exigence d’affectation individuelle. Cette exigence violerait la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, car, malgré l’existence d’une atteinte directe à des droits de l’homme, le recours est exclu s’il n’existe pas conjointement une affectation individuelle.

58.      Le Conseil juge ce moyen irrecevable, car le Tribunal n’a pas examiné les arguments correspondants en première instance. Cependant, cette objection n’est pas convaincante, car le défaut d’examen d’arguments par le Tribunal ou l’insuffisance de cet examen peuvent également constituer une erreur de droit.

59.      Toutefois, ce moyen n’indique pas contre quelle partie de l’ordonnance attaquée il se dirige ou à quel endroit le Tribunal aurait dû examiner ces arguments. Dans cette mesure, le moyen est donc irrecevable. Par ailleurs, les exigences relatives à l’affectation individuelle ne permettent pas de fonder un pourvoi en ce qui concerne le PKK, puisque, au point 27, le Tribunal reconnaît l’affectation individuelle de cette entité de manière expresse et M. O. Ocalan n’agit pas de son propre chef.

60.      En ce qui concerne la protection juridique effective, le premier requérant affirme en outre que la décision du Tribunal relative à l’existence du PKK l’aurait privé d’une protection juridique efficace. Cette argumentation n’est pas non plus convaincante. La protection juridique effective n’exige pas que des personnes puissent agir au nom de tiers lorsqu’elles ne sont pas habilitées à représenter ceux‑ci.

61.      Ce moyen doit donc être rejeté dans son intégralité.

5.      Sur le septième moyen – La possibilité de clarification

62.      Le premier requérant estime enfin que le Tribunal aurait dû lui offrir l’opportunité d’apporter des clarifications sur son pouvoir de représentation. L’approche adoptée par le Tribunal serait abusive, disproportionnée et violerait le droit naturel.

63.      Toutefois, le premier requérant a en principe eu suffisamment d’occasions de justifier clairement de son pouvoir de représentation, à savoir, tout d’abord, dans sa requête, puis dans le cadre de la réponse à l’exception soulevée par le Conseil. Étant donné que le Conseil a notamment fondé son exception d’irrecevabilité sur le fait que, conformément à l’exposé du premier requérant, le PKK n’existe plus et est donc dépourvu de capacité juridique et de capacité à agir, il existait donc une opportunité de clarifier les choses à ce sujet. Le premier requérant a d’ailleurs saisi cette occasion.

64.      Cependant, comme le premier requérant l’a  souligné au cours de l’audience après avoir été interrogé sur ce point, il ne s’est pas exprimé auprès du Tribunal au sujet de l’appréciation juridique des éléments factuels que celui-ci a finalement faite. Contrairement au Conseil dans son exception d’irrecevabilité, le Tribunal ne s’est en effet pas prononcé sur la capacité juridique et sur la capacité d’agir du PKK, mais a plutôt rejeté le pouvoir de représentation de M. O. Ocalan.

65.      Par conséquent, le premier requérant estime que le Tribunal aurait dû l’informer de l’appréciation envisagée, c’est-à-dire de ses doutes relatifs au pouvoir de représentation, afin de lui permettre de dissiper ces doutes.

66.      Toutefois, les tribunaux ne doivent en principe pas accorder aux parties le droit d’être entendues au sujet de chaque point de leur appréciation juridique avant de rendre leur jugement. Les juridictions communautaires sont justement réservées à cet égard. Cette réserve garantit leur neutralité. La représentation des parties par un avocat étant obligatoire, de telles indications ne s’imposent normalement pas. Ainsi, la Cour européenne des droits de l’homme considère que même les indications potentiellement trompeuses d’une juridiction dans le cadre d’une procédure pénale ne constituent pas une violation du droit à un procès équitable lorsque l’intéressé est représenté par un avocat (20).

67.      Mais la nécessité de fournir des indications peut résulter du principe du contradictoire. Ce principe a notamment pour objectif d’éviter que la décision juridictionnelle puisse être influencée par des arguments qui n’auraient pas pu être discutés par les parties (21). Ce faisant, on cherche à éviter une «décision surprise».

68.      Toutefois, les arguments décisifs pour le Tribunal, qui sont les déclarations relatives à l’existence du PKK, ont été discutés entre les parties et, en principe, aucun autre débat contradictoire ne s’imposait.

69.      Cependant, en ce qui concerne la question du pouvoir de représentation suffisant, le règlement de procédure du Tribunal contient une réglementation spécifique qui exige, à titre exceptionnel, un renvoi aux éventuelles imprécisions et à la possibilité de clarification. Conformément à l’article 44, paragraphes 5 et 6, du règlement de procédure du Tribunal, lorsque des personnes morales de droit privé ne joignent pas à la requête la preuve que le mandat donné à l’avocat a été régulièrement établi par un représentant qualifié à cet effet, le greffier fixe au requérant un délai raisonnable aux fins de régularisation de la requête ou de production des pièces requises (22). Il ne semble pas inhabituel que le Tribunal demande de telles informations à un stade ultérieur (23).

70.      En l’espèce, il n’est pas affirmé que le PKK est une personne morale de droit privé. Néanmoins, dans le point 28 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a reconnu à juste titre que, pour les groupes et entités figurant sur la liste litigieuse, la preuve de la recevabilité peut être particulièrement difficile à fournir. Par conséquent, ces groupes et ces entités doivent au moins bénéficier des mêmes garanties que les personnes morales de droit privé, qui peuvent généralement fournir relativement facilement la preuve du pouvoir de représentation suffisant de la personne qui a mandaté l’avocat.

71.      Par conséquent, en cas de preuve insuffisante du pouvoir de représentation de la personne agissant en leur nom, les groupes qui figurent sur la liste litigieuse doivent également se voir offrir une nouvelle occasion de fournir cette preuve.

72.      Tel n’a pas été le cas en l’espèce, puisque, avant de statuer, le Tribunal n’a jamais fait part au premier requérant des doutes relatifs à son pouvoir de représentation.

73.      À cet égard, le rejet du recours du premier requérant par le Tribunal est donc entaché d’un vice de procédure, car le Tribunal ne lui a pas donné l’occasion de clarifier le pouvoir de représentation de M. O. Ocalan. L’ordonnance attaquée doit également être annulée à ce titre.

B –    La décision relative à la recevabilité du recours de M. O. Ocalan au nom du PKK

74.      Il convient désormais d’examiner si la Cour peut, conformément à la demande du premier requérant, statuer définitivement sur la recevabilité du recours de M. O. Ocalan au nom du PKK ou si – comme le Conseil le demande à titre subsidiaire – l’affaire doit être renvoyée dans son ensemble au Tribunal. Conformément à l’article 61, paragraphe 1, in fine, du statut de la Cour de justice, la décision définitive sur le litige implique que celui-ci soit en état d’être jugé.

75.      La recevabilité du recours formé au nom du PKK reste douteuse en ce qui concerne quatre points.

76.      Premièrement, il n’a pas encore été statué sur l’exception soulevée par le Conseil en vertu de laquelle le PKK ne peut pas être considéré comme possédant la capacité juridique et la capacité d’agir dans le cadre de la présente procédure. Deuxièmement, le Conseil estime qu’il n’est pas encore établi que le recours ait été introduit dans les délais en ce qui concerne la décision 2002/334. Ces deux questions ont fait l’objet d’un incident de procédure devant le Tribunal. Elles sont donc en état d’être jugées.

77.      Le troisième problème relatif à la recevabilité est étroitement lié à la deuxième exception soulevée et concerne la question de savoir si le deuxième objet du recours, la décision 2002/460, constitue un acte susceptible de recours en ce qui concerne le PKK ou s’il s’agit d’une simple décision confirmative. La Commission a soulevé cette question en première instance. Le Tribunal s’est prononcé à ce sujet en ce qui concerne le KNK. Par conséquent, cette question est également en état d’être jugée.

78.      Enfin, la quatrième question qui se pose est celle de savoir si M. O. Ocalan peut être reconnu comme représentant le PKK. Cette question a été soulevée pour la première fois dans l’ordonnance attaquée et – en violation des droits procéduraux du premier requérant – il a été statué sur celle-ci sans qu’une occasion de clarification ait été offerte. Par conséquent, elle n’était pas en état d’être jugée au moment où l’ordonnance a été rendue. Toutefois, le pourvoi a suffisamment donné l’occasion au premier requérant et aux autres parties de discuter plus en détail du pouvoir de représentation de M. O. Ocalan et, à cet égard, l’affaire se trouve donc également en état d’être jugée.

1.      La capacité juridique et la capacité d’agir du PKK

79.      Il a déjà été exposé que le PKK doit au moins être considéré comme ayant encore la capacité juridique et la capacité d’agir dans la mesure où son inscription sur la liste litigieuse est en cause (24). Par conséquent, l’exception soulevée par le Conseil à ce sujet doit être rejetée.

2.      Le respect du délai de recours

80.      En première instance, le Conseil a invoqué le fait que le recours contre la décision 2002/334 n’a pas été formé dans le délai requis. Le délai de recours aurait expiré le 29 juillet 2002, alors que le recours n’a été introduit que le 31 juillet 2002.

81.      Cependant, comme les deux requérants l’ont indiqué au Tribunal, un document qualifié de requête est déjà parvenu au Tribunal le 24 juillet 2002 et donc avant l’expiration du délai de recours. Les requérants exposent qu’ils sont fermement convaincus d’avoir envoyé une requête portant des signatures originales, mais ils n’en apportent pas la preuve.

82.      Les requérants exposent en outre que, le 29 juillet en fin d’après‑midi, le Tribunal les aurait informés du fait qu’aucun exemplaire de la requête ne comportait de signatures originales. L’exemplaire de ce document encore consultable auprès du greffe du Tribunal est une copie d’une requête signée par un des trois avocats et comportant les initiales d’un autre avocat. En outre, la copie d’instructions manuscrites relatives à des corrections figure sur la page 4 de ce document.

83.      La requête envoyée à la suite des remarques du Tribunal est parvenue à ce dernier le 31 juillet 2002. Elle est signée par deux avocats et comporte les initiales du troisième avocat.

84.      Eu égard à ces circonstances, il convient de partir du principe que le premier document qualifié de requête ne comportait effectivement pas de signatures originales et qu’il s’agissait probablement d’une copie d’un projet de requête.

85.      Ce n’est qu’après l’expiration du délai de recours qu’une requête en bonne et due forme – le deuxième document – est parvenue au Tribunal.

86.      Conformément à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal, les documents reçus le 24 juillet 2002 ne peuvent pas non plus être considérés comme une télécopie ou comme une copie portant effet pour le respect des délais. En effet, les délais de procédure ne sont respectés qu’à la condition que l’original de l’acte copié parvienne au Tribunal dans un délai de dix jours. En l’espèce, ce n’est pas l’original de l’acte copié qui a été envoyé, mais une autre requête portant une signature complémentaire.

87.      Le recours contre la décision 2002/334 est donc prescrit et, par conséquent, irrecevable. Il convenait ainsi d’accueillir l’exception soulevée par le Conseil à ce sujet. Par conséquent, l’ordonnance attaquée peut être maintenue pour ce motif, dans la mesure où la décision 2002/334 est concernée.

3.      Le caractère attaquable de la décision 2002/460

88.      En ce qui concerne la décision 2002/460, le délai de recours a incontestablement été respecté. Toutefois, la Commission a soutenu devant le Tribunal que, en ce qui concerne le PKK, cette décision ne constitue qu’un acte purement confirmatif. Le PKK figurerait en effet de manière identique dans la décision 2002/334.

89.      Une décision purement confirmative ne constituerait pas un acte juridique pouvant faire l’objet d’un recours en annulation (25). Il en va toutefois autrement lorsque la décision attaquée constitue l’issue définitive d’un réexamen de la situation (26).

90.      Dans le point 44 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a constaté, en ce qui concerne le KNK, qu’il s’agit d’une nouvelle décision pouvant donc être contestée séparément:

«S’agissant de la décision 2002/460 (ci-après la “décision litigieuse”), il apparaît clairement que cette décision est une décision nouvelle par rapport à la décision 2002/334 qu’elle abroge. D’une part, l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 2580/2001 dispose que le Conseil établit, révise et modifie la liste de personnes, de groupes et d’entités auxquels ledit règlement s’applique. Il en découle que le Conseil révise, à chaque acte nouveau, la liste litigieuse. D’autre part, une telle révision ne peut être limitée à l’inscription de nouvelles personnes ou entités ou au retrait de certaines personnes ou entités dès lors que, dans une Communauté de droit, il ne peut être admis qu’un acte instaurant des mesures restrictives continues à l’égard de personnes ou entités puisse être applicable de façon illimitée sans que l’Institution qui les a édictées ne les adopte régulièrement de nouveau à la suite d’un réexamen. Dès lors, le fait d’avoir attaqué la décision 2002/334, inscrivant pour la première fois le PKK sur la liste litigieuse, ne peut pas empêcher le KNK d’attaquer la décision 2002/460, maintenant le PKK sur ladite liste, en raison de l’exception de litispendance.»

91.      Tout comme les deux parties, nous nous rallions à cette appréciation de la décision 2002/460, en particulier en raison du fait que la révision mentionnée par l’article 2, paragraphe 3, du règlement n° 2580/2001 doit se faire conformément aux dispositions de l’article 1er, paragraphe 6, de la position commune 2001/931. Selon ces dispositions, les noms des personnes et entités reprises sur la liste figurant à l’annexe font l’objet d’un réexamen à intervalles réguliers, au moins une fois par semestre, afin de s’assurer que leur maintien sur la liste reste justifié (27).

92.      Par conséquent, la décision 2002/460 constitue également un acte attaquable en ce qui concerne le PKK.

4.      Le pouvoir de représentation

93.      Il convient enfin d’examiner si M. O. Ocalan était effectivement habilité à mandater les avocats pour introduire un recours au nom du PKK.

94.      Dans le cadre de l’étude de cette question, il convient de rappeler les constatations du Tribunal au point 28 de l’ordonnance attaquée:

«Il convient, ensuite, de préciser que les règles gouvernant la recevabilité d’un recours en annulation s’agissant d’une personne figurant sur la liste litigieuse – à savoir la liste des personnes, groupes et entités auxquels s’appliquent des mesures restrictives dans le cadre de la lutte contre le terrorisme – doivent être appréhendées selon les circonstances de l’espèce. En effet, s’agissant en particulier de ces groupes ou entités, il peut arriver que ceux-ci ne disposent pas d’existence légale, ou qu’ils n’étaient pas en mesure de respecter les règles juridiques habituellement applicables aux personnes morales. Dès lors, un formalisme excessif reviendrait à nier dans certains cas toute possibilité d’agir en annulation alors même que ces groupes et entités ont fait l’objet de mesures restrictives communautaires.»

95.      Ces considérations nous semblent convaincantes, en particulier en relation avec l’examen du pouvoir de représentation en tant que condition de recevabilité du recours. Cet examen ne doit pas empêcher la formation d’un recours en cas d’affectation individuelle et directe. Il convient plutôt de s’assurer que c’est effectivement l’entité affectée qui introduit le recours et non pas des tiers qui forment en réalité une actio popularis ou, même, qui agissent à l’encontre des intérêts de l’entité qui introduit prétendument le recours.

96.      Il serait donc disproportionné d’exiger une preuve complète du pouvoir de représentation de celui qui forme un recours au nom d’une telle entité. Au contraire, le fait qu’il justifie de son pouvoir de représentation de manière crédible doit en principe suffire. Si l’institution défenderesse continue tout de même à douter du fait que cette personne représente l’entité requérante, il lui appartient alors d’ébranler l’argumentation du requérant en faisant part de doutes suffisamment précis.

97.      Si l’on applique ces critères à l’argumentation soutenue en première instance, des doutes subsistent tout de même quant au fait que M. O. Ocalan représente le PKK. Certes, il s’agit du frère de M. A. Ocalan, le chef du PKK qui est détenu en Turquie, et il semble qu’il ait fait partie de la direction du PKK (28). Toutefois, dans le mandat donné aux avocats, il se qualifie d’ancien membre du PKK. Entre-temps, M. O. Ocalan ainsi que d’autres personnes auraient même quitté l’organisation qui porte désormais la dénomination de KONGRA-GEL (29). Par conséquent, on peut parfaitement douter du fait qu’il représentait le PKK ou, selon ses propres termes, «l’organisation anciennement connue sous la dénomination de PKK» lorsqu’il a mandaté les avocats pour introduire un recours au nom du PKK.

98.      Comme il a déjà été exposé, ces doutes ne permettaient toutefois pas au Tribunal de rejeter le recours sans entendre de nouveau les parties. Au contraire, ces doutes auraient dû conduire le Tribunal à donner au premier requérant l’occasion de clarifier les choses (30).

99.      Dans le cadre du présent pourvoi, le premier requérant a présenté une déclaration de M. Mark Muller, un des avocats, qui est censée prouver que le recours est effectivement formé pour le compte du PKK. M. Muller représente M. A. Ocalan dans le cadre d’une procédure devant la Cour européenne des droits de l’homme (31). M. A. Ocalan est la figure dirigeante centrale du PKK et, selon les déclarations de M. O. Ocalan, il a également été élu président du KADEK (32). M. Muller expose que M. A. Ocalan lui a donné pour instruction de contester l’inscription du PKK dans la liste litigieuse. D’autres dirigeants du PKK et de l’organisation qui lui a prétendument succédé, le KADEK, lui auraient donné des instructions identiques.

100. Afin de se conformer aux règles procédurales du Tribunal, il aurait demandé à être mandaté par M. O. Ocalan, qui, à cette époque, était un représentant de haut niveau aussi bien du KADEK que de l’organisation anciennement connue sous le nom de PKK.

101. Selon cette déclaration, c’est la direction de l’organisation anciennement connue sous la dénomination PKK qui a ordonné la formation du recours. Si l’on tient en outre compte des intérêts du PKK et des informations fournies par les médias à l’occasion de son inscription dans la liste (33), il convient donc de partir du principe que la contestation de la liste litigieuse correspond effectivement à la volonté du PKK.

102. Le fait que M. O. Ocalan ait prétendument quitté le PKK, désormais devenu le KONGRA-GEL, ne conduit pas non plus à la conclusion que le recours n’a pas été formé pour le PKK. Les avocats n’agissent en effet pas pour M. O. Ocalan, mais pour l’organisation anciennement connue sous la dénomination PKK. Leur pouvoir de représentation n’est pas remis en question par le fait que le représentant du PKK qui les a mandatés par le passé ne représente peut-être plus cette organisation aujourd’hui.

103. Ces indices doivent suffire pour admettre – sauf preuve contraire – que le recours a été introduit à juste titre au nom du PKK. Le Conseil n’a présenté aucun argument permettant de réfuter cette supposition.

104. Par conséquent, le recours formé au nom du PKK est recevable, dans la mesure où il est dirigé contre la décision 2002/460.

C –    Le pourvoi de M. Vanly au nom du KNK

105. En ce qui concerne le recours du KNK, le pourvoi est dirigé contre les critères de la Cour relatifs à l’affectation individuelle qui, conformément à l’article 230, quatrième alinéa, CE, constitue une condition pour que des particuliers puissent contester une directive.

106. Conformément à une jurisprudence constante, une personne physique ou morale est affectée individuellement lorsque l’acte en question l’atteint en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire d’une décision le serait (34).

107. À cet égard, le Tribunal a constaté au point 52 de l’ordonnance attaquée que le KNK et ses membres sont contraints au respect de l’interdiction édictée par la décision litigieuse en ce qui concerne le PKK à l’égal de toutes les autres personnes dans la Communauté. Selon le Tribunal, le fait que, de par leurs opinions politiques, le KNK et ses membres soient amenés à ressentir plus que d’autres les effets de cette interdiction n’est pas de nature à les individualiser par rapport à toute autre personne dans la Communauté. En effet, le fait qu’un acte de portée générale puisse avoir des effets concrets différents pour les divers sujets de droit auxquels il s’applique n’est pas de nature à les caractériser par rapport à toutes les autres personnes concernées, dès lors que l’application de cet acte s’effectue en vertu d’une situation objectivement déterminée.

108. Le deuxième requérant ne met pas en question cette application du critère de l’affectation individuelle. Il estime plutôt qu’il convient d’abandonner le critère de l’affectation individuelle lorsque la violation de droits fondamentaux est invoquée, car, dernièrement, la Communauté adopte de plus en plus de dispositions touchant aux droits fondamentaux. Dans les affaires relatives aux droits fondamentaux, la Cour devrait plutôt s’orienter par rapport aux critères de recevabilité des recours devant la Cour européenne des droits de l’homme. Une affectation directe serait ainsi suffisante, même en l’absence de préjudice. Le KNK serait directement concerné, car ses activités en faveur des droits des Kurdes sont entravées par ses liens étroits avec le PKK.

109. Ces arguments ne peuvent être retenus. Dans son arrêt Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, précité, la Cour a indiqué – de manière convaincante selon nous – que, dans l’état actuel du droit communautaire, les juridictions nationales et les juges communautaires garantissent ensemble une protection juridique effective contre les actes communautaires et que, en ce qui concerne la qualité à agir de particuliers, l’évolution du droit par voie prétorienne n’apparaît pas opportune:

«40      Or, le traité, par ses articles 173 [devenu, après modification, article 230 CE] et 184 (devenu article 241 CE), d’une part, et par son article 177 [devenu article 234 CE], d’autre part, a établi un système complet de voies de recours et de procédures destiné à assurer le contrôle de la légalité des actes des Institutions, en le confiant au juge communautaire (voir, en ce sens, arrêt du 23 avril 1986, Les Verts/Parlement, 294/83, Rec. p. 1339, point 23) Dans ce système, des personnes physiques ou morales ne pouvant pas, en raison des conditions de recevabilité visées à l’article 173, quatrième alinéa, du traité, attaquer directement des actes communautaires de portée générale, ont la possibilité, selon les cas, de faire valoir l’invalidité de tels actes soit, de manière incidente en vertu de l’article 184 du traité, devant le juge communautaire, soit devant les juridictions nationales et d’amener celles-ci, qui ne sont pas compétentes pour constater elles-mêmes l’invalidité desdits actes (voir arrêt du 22 octobre 1987, Foto‑Frost, 314/85, Rec. p. 4199, point 20), à interroger à cet égard la Cour par la voie de questions préjudicielles.

41      Ainsi, il incombe aux États membres de prévoir un système de voies de recours et de procédures permettant d’assurer le respect du droit à une protection juridictionnelle effective.

42      Dans ce cadre, conformément au principe de coopération loyale énoncé à l’article 5 du traité [devenu article 10 CE], les juridictions nationales sont tenues, dans toute la mesure du possible, d’interpréter et d’appliquer les règles internes de procédure gouvernant l’exercice des recours d’une manière qui permet aux personnes physiques et morales de contester en justice la légalité de toute décision ou de toute autre mesure nationale relative à l’application à leur égard d’un acte communautaire de portée générale, en excipant de l’invalidité de ce dernier.

43      […]

44      Enfin, il convient d’ajouter que, selon le système de contrôle de la légalité mis en place par le traité, une personne physique ou morale ne peut former un recours contre un règlement que si elle est concernée non seulement directement, mais également individuellement. S’il est vrai que cette dernière condition doit être interprétée à la lumière du principe d’une protection juridictionnelle effective en tenant compte des diverses circonstances qui sont de nature à individualiser un requérant (voir, par exemple, arrêts du 2 février 1988, Van der Kooy/Commission, 67/85, 68/85 et 70/85, Rec. p. 219, point 14; Extramet Industrie/Conseil, précité, point 13, et Codorniu/Conseil, précité, point 19), une telle interprétation ne saurait aboutir à écarter la condition en cause, qui est expressément prévue par le traité, sans excéder les compétences attribuées par celui-ci aux juridictions communautaires.

45      Si un système de contrôle de la légalité des actes communautaires de portée générale autre que celui mis en place par le traité originaire et jamais modifié dans ses principes est certes envisageable, il appartient, le cas échéant, aux États membres, conformément à l’article 48 UE, de réformer le système actuellement en vigueur» (35).

110. Étant donné que le KNK n’est pas suffisamment individualisé par la décision attaquée, il ne lui est pas possible de former un recours en annulation. Le KNK aurait plutôt dû rechercher une protection juridique auprès du juge national. Cela ne devrait présenter aucun problème pour le KNK du point de vue pratique, puisqu’il est représenté par des avocats anglais et que les juridictions du Royaume-Uni saisissent la Cour en cas de doutes sur la validité d’actes communautaires qui affectent directement les droits de particuliers (36).

111. À cet égard, l’argumentation soutenue par le KNK au cours de l’audience, en vertu de laquelle il ne peut pas engager de procédure préjudicielle en dehors des frontières de la Communauté européenne, n’est pas convaincante. En effet, la décision du Conseil ne produit d’effets juridiques qu’au sein de la Communauté. Dans la mesure où ces effets juridiques atteignent le KNK – par exemple en ce qui concerne le gel des fonds –, celui-ci peut également rechercher une protection juridique auprès de juridictions de la Communauté qui, le cas échéant, doivent adresser une demande de décision préjudicielle à la Cour. Par contre, le KNK ne doit pas se voir octroyer de possibilités de protection juridique plus approfondies, par exemple en ce qui concerne la qualification du PKK d’organisation terroriste.

112. Par conséquent, le pourvoi doit être rejeté en ce qui concerne le recours du KNK.

VI – Sur les dépens

113. Selon l’article 122, premier alinéa, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé ou lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.

114. Étant donné que le pourvoi du KNK doit être rejeté, il convient de statuer sur les dépens.

115. Aux termes de la première phrase de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La deuxième phrase de cette disposition prévoit que la Cour décide du partage des dépens si plusieurs parties succombent.

116. En ce qui concerne le KNK, celui-ci succombe dans le cadre du présent pourvoi et le Conseil a conclu sur les dépens. Il convient donc de condamner le KNK aux dépens résultant de sa branche du pourvoi.

117. Bien que, extérieurement, le pourvoi soit formé par le PKK et le KNK conjointement, le PKK ne doit pas être condamné aux dépens du pourvoi du KNK. En effet, du point de vue de la substance, il s’agit de deux procédures séparées l’une de l’autre, qui sont soumises à des exigences juridiques différentes.

VII – Conclusion

118. Nous proposons donc à la Cour de décider comme suit:

1)      Les points 1 et 2 du dispositif de l’ordonnance rendue le 15 février 2005 par le Tribunal de première instance des Communautés européennes dans l’affaire KNK et PKK/Conseil (T-229/02) sont annulés dans la mesure où ils concernent le recours de M. Osman Ocalan au nom du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) contre la décision 2002/460/CE du Conseil, du 17 juin 2002, mettant en œuvre l’article 2, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 2580/2001 concernant l’adoption de mesures restrictives spécifiques à l’encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et abrogeant la décision 2002/334/CE.

2)      Le recours de M. O. Ocalan au nom du PKK est recevable dans la mesure où il est dirigé contre la décision 2002/460 et est renvoyé au Tribunal afin qu’il statue sur le fond. Les dépens sont réservés à cet égard.

3)      Le pourvoi est rejeté pour le reste.

4)      Le Congrès national du Kurdistan (KNK) est condamné aux dépens de son pourvoi.»


1 – Langue originale: l’allemand.


2 – T-229/02, (Rec. p. II-539).


3 – Voir ordonnance du 15 février 2005 (T-206/02, Rec. p. II-523).


4 – Le Tribunal renvoie à l’affaire pendante T-253/04, Aydar e.a./Conseil, dont la communication a été publiée dans le JO C 262, p. 28.


5 – Le premier requérant renvoie erronément aux articles du règlement de procédure de la Cour.


6 – Arrêt du 17 octobre 2002, Astipesca/Commission (T-180/00, Rec. p. II-3985, points 44 et suiv.).


7 – Arrêt Astipesca/Commission, précité note 6.


8 – Ordonnance du 11 novembre 2003, Martinez/Parlement (C-488/01 P, Rec. p. I‑13355, point 39), et arrêt du 23 mars 2004, Médiateur/Lamberts (C‑234/02 P, Rec. p. I‑2803, point 75).


9 – A party applying to the Court of First Instance for a decision on admissibility, on lack of competence or other preliminary plea not going to the substance of the case shall make the application by a separate document.


10 – Si une partie demande que le Tribunal statue sur l'irrecevabilité, l'incompétence ou sur un incident, sans engager le débat au fond, elle présente sa demande par acte séparé.


11 – Dans les points 28 et suivants de ses conclusions du 4 octobre 2001 dans l’affaire Conseil/Boehringer (arrêt du 26 février 2002, C-23/00 P, Rec. p. I-1873), l’avocat général Ruiz‑Jarabo Colomer a même considéré que le fait de statuer sur le fond lorsque le recours est irrecevable constitue une erreur de droit. Toutefois, dans son arrêt (point 52), la Cour a jugé que cette manière de procéder ne faisait pas grief au Conseil et elle a donc rejeté son pourvoi.


12 – Arrêts du 15 juin 2000, Dorsch Consult/Conseil et Commission (C-237/98 P, Rec. p. I‑4549, points 35 et suiv.), et du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission (C-204/00 P, C‑205/00 P, C-211/00 P, C-213/00 P, C-217/00 P et C-219/00 P, Rec. p. I-123, point 49).


13 – Arrêts du 28 mai 1998, New Holland Ford/Commission (C-8/95 P, Rec. p. I-3175, point 72), et du 6 avril 2006, General Motors/Commission (Rec. p. I-3173, point 54).


14 – Arrêts du 27 janvier 2000, DIR International Film e.a./Commission (C-164/98 P, Rec. p. I-447, points 43 et suiv.), au sujet d’une référence mal comprise dans la motivation d’une décision de la Commission; du 3 avril 2003, Parlement/Samper (C-277/01 P, Rec. p. I-3019, points 45 et suiv.), au sujet de la dénaturation du contenu d’un compte rendu de réunion; du 2 octobre 2003, International Power e.a./NALOO (C-172/01 P, C-175/01 P, C-176/01 P et C-180/01 P, Rec. p. I‑11421, point 156), en ce qui concerne l’interprétation erronée de la motivation d’une décision, et du 1er juin 2006, P&O Ferries et Diputación Foral de Vizcaya/Commission (C‑442/03 P et C‑471/03 P, Rec. p. I-4845, points 63 et suiv.), au sujet de la dénaturation de la motivation d’une décision.


15 – Arrêts Parlement/Samper (précité note 14, point 40) et du 11 septembre 2003, Belgique/Commission (C-197/99 P, Rec. p. I-8461, points 64 et suiv.).


16 – Arrêts du 6 janvier 2004, BAI et Commission/Bayer (C-2/01 P et C-3/01 P, Rec. p. I‑23, points 53 et suiv.); du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI (C‑136/02 P, Rec. p. I‑9165, point 63), et du 14 juillet 2005, ThyssenKrupp/Commission (C‑65/02 P et C‑73/02 P, Rec. p. I‑6773, points 83 et suiv.).


17 – Annexe II de la requête en première instance.


18 – JO L 99, p. 28.


19 – Cette disposition est reproduite au point 4.


20 – Voir Cour eur. D. H., décision du 29 novembre 2004, Coghlan c. Royaume-Uni, p. 18, en ce qui concerne la recevabilité du recours 8535/02. Mais il en va autrement pour la modification inattendue des griefs dans le cadre d’une procédure pénale, Cour eur. D. H., arrêt I. H. et autres c. Autriche du 20 avril 2006, recours 42780/98, § 32 et suiv.


21 – Ordonnance du 4 février 2000, Emesa Sugar (C-17/98, Rec. p. I-665, point 18).


22 – Le libellé de ces dispositions est reproduit plus haut, dans les points 15 et suiv.


23 – Voir arrêt Astipesca contre Commission, précité note 6.


24 – Voir ci-dessus, points 45 et suiv.


25 – Arrêts du 5 mai 1998, Royaume-Uni/Commission (C-180/96, Rec. p. I-2265, points 27 et suiv.), et du 9 décembre 2004, Commission/Greencore (C-123/03 P, Rec. p. I‑11645, point 39). Voir, également, arrêts du 22 mars 1961, SNUPAT/Haute Autorité (42/59 et 49/59, Rec. p. 101); du 15 décembre 1988, Irish Cement/Commission (166/86 et 220/86, Rec. p. 6473, point 16); du 11 janvier 1996, Zunis Holding e.a./Commission (C-480/93 P, Rec. p. I-1, point 14), et ordonnance du 21 novembre 1990, Infortec/Commission (C-12/90, Rec. p. I-4265, point 10).


26 – Arrêt du 24 novembre 2005, Italie/Commission (C-138/03, C-324/03 et C-431/03, Rec. p. I‑10043, point 37).


27 – Cette disposition est reproduite ci-dessus, au point 4.


28 – Voir son inscription dans la Terrorism Knowledge Base du National Memorial Institute for the Prevention of Terrorism, http://www.tkb.org/KeyLeader.jsp?memID=121, et l’article de la BBC relatif à l’inscription du PKK dans la liste litigieuse, http://news.bbc.co.uk/2/hi/europe/1964954.stm.


29 – Ministère fédéral de l’Intérieur (Allemagne), Verfassungsschutzbericht 2004 (2005), p. 228, http://www.verfassungsschutz.de/de/publikationen/verfassungsschutzbericht/vsbericht_2004/vsbericht_2004.pdf. Voir également la référence figurant en note 28.


30 – Voir ci-dessus, points 67 et suiv.


31 – Cela découle également des arrêts de la Cour eur. D. H., Ocalan c. Turquie, du 12 mai 2005 et du 12 mai 2003, relatifs au recours 46221/99.


32 – Voir point 19 de la déclaration figurant à l’annexe II de la requête en première instance.


33 – Voir article de la BBC mentionné à la note 28.


34 – Arrêts du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, Rec. p. 197, 223); du 22 novembre 2001, Nederlandse Antillen/Conseil (C-452/98, Rec. p. I-8973, point 60), et du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil (C-50/00 P, Rec. p. I‑6677, point 36).


35 –      Arrêt Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, précité note 34.


36 – Arrêts du 10 décembre 2002, British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C‑491/01, Rec. p. I-11453); du 14 décembre 2004, Swedish Match (C‑210/03, Rec. p. I‑11893); du 12 juillet 2005, Alliance for Natural Health e.a. (C‑154/04 et C-155/04, Rec. p. I-6451); du 6 décembre 2005, ABNA e.a. (C-453/03, C-11/04, C-12/04 et C-194/04, Rec. p. I-10423); du 10 janvier 2006, IATA et ELFAA (C-344/04, Rec. p. I-403), et du 23 mars 2006, Unitymark et North Sea Fishermen’s Organisation (C-535/03, Rec. p. I-2689).