Language of document : ECLI:EU:C:2002:557

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. F. G. JACOBS

présentées le 3 octobre 2002 (1)

Affaire C-15/00

Commission des Communautés européennes

contre

Banque européenne d'investissement (BEI)

Table des matières

     Introduction

I - 1

     Le contexte

I - 2

     Les dispositions communautaires pertinentes

I - 4

         Les dispositions du traité CE

I - 4

         Les dispositions du traité Euratom

I - 6

         Les dispositions des statuts de la BEI

I - 7

         La décision créant l'OLAF

I - 10

         Les règlements relatifs aux enquêtes effectuées par l'OLAF

I - 12

         L'accord interinstitutionnel relatif aux enquêtes internes effectuées par l'OLAF

I - 16

     La décision attaquée

I - 16

     La procédure et les prétentions des parties

I - 19

     Les questions à résoudre

I - 20

     Sur la recevabilité

I - 20

         Résumé des arguments

I - 20

         Analyse

I - 23

             - La recevabilité au regard de l'article 237, sous b), CE.

I - 23

             - Sur la recevabilité des griefs ayant trait au règlement n° 1074/1999

I - 28

             - Le recours de la Commission vise-t-il à établir l'existence d'une carence?

I - 29

     Les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 s'appliquent-ils à la BEI?

I - 29

     La décision attaquée est-elle contraire aux règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999?

I - 30

     Les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 doivent-ils être déclarés inapplicables?

I - 31

         Sur l'indépendance

I - 32

         Sur la base légale du règlement n° 1073/1999

I - 40

         Sur la base légale du règlement n° 1074/1999

I - 42

         Sur la proportionnalité

I - 45

         Sur l'obligation de motivation résultant des articles 253 CE et 162 EA

I - 50

     Conclusion

I - 52

Introduction

    Dans cette affaire, la Commission souhaite obtenir l'annulation de la décision du 10 novembre 1999 du comité de direction de la Banque européenne d'investissement (ci-après la «BEI») concernant la coopération avec l'Office européen de lutte antifraude (OLAF) (2) (ci-après la «décision attaquée»). La Commission - soutenue par le Conseil, le Parlement et le gouvernement néerlandais - affirme que cette décision est contraire aux règlements (CE) n° 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999 (3), et (Euratom) n° 1074/1999 du Conseil, du 25 mai 1999 (4), relatifs aux enquêtes effectuées par l'Office européen de lutte antifraude (OLAF). La BEI fait valoir, à titre principal, que le recours est irrecevable car la Cour ne serait pas compétente sur le fondement des articles 230 CE et 237 CE pour exercer son contrôle, à la suite d'une demande de la Commission, sur la légalité de mesures adoptées par le comité de direction de la BEI. À titre subsidiaire, elle demande à la Cour de déclarer les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 inapplicables en vertu des articles 241 CE et 156 EA pour i) défaut de base légale, ii) violation de l'indépendance accordée à la BEI par le traité CE, iii) violation du principe de proportionnalité et iv) non-respect de l'obligation de motivation prévue par les articles 253 CE et 162 EA.

    Cette affaire soulève plusieurs questions importantes concernant, en particulier, l'étendue du pouvoir de contrôle de la Cour à l'égard des mesures adoptées par les organes de la BEI, les limites de la compétence conférée à la Communauté pour adopter des mesures sur la base des articles 280 CE et 203 EA en vue de combattre la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté, et enfin les relations entre la BEI et les Communautés européennes.

    Il convient de noter que la présente affaire présente des points communs avec l'affaire Commission/BCE (5). Ainsi, afin d'éviter les répétitions inutiles, nous renverrons chaque fois que nécessaire aux conclusions que nous avons présentées dans cette affaire (6).

Le contexte

    Pour une description détaillée des faits et du cadre juridique dans lequel s'inscrit l'adoption des règlements en question, nous nous référons à nos conclusions dans l'affaire Commission/BCE (7). Il suffira ici de rappeler qu'une part importante des fonds communautaires est perdue chaque année du fait de fraudes et autres irrégularités commises par des personnes physiques et morales, et que les institutions communautaires et les États membres ont i) doté la Communauté d'une base légale spécifique pour agir dans le domaine de la prévention de la fraude (8), ii) créé des structures administratives (9) et iii) adopté des mesures législatives destinées à prévenir les fraudes commises par les destinataires individuels de fonds communautaires dans les États membres (10) ou par les membres et personnels des institutions et organismes de la Communauté.

     Pour la compréhension de cette affaire, il est utile de rappeler les initiatives prises par la Commission et la BEI. La Commission a créé une unité spéciale antifraude [Unité de coordination de la lutte antifraude (UCLAF)] en 1987. En 1995, cette unité s'est vu confier la responsabilité de toute l'activité antifraude de la Commission, y compris les enquêtes sur les fraudes ou autres irrégularités commises par le personnel de la Commission. Dans le but de renforcer la protection des intérêts financiers de la Communauté et, peut-être, en réponse aux critiques formulées contre l'UCLAF (11), la Commission a proposé en 1998 de créer un nouveau service antifraude indépendant, qui serait dénommé Office de lutte antifraude (OLAF) (12). Alors que la Commission avait initialement proposé de créer l'OLAF - et de prévoir les dispositions détaillées régissant son fonctionnement - par voie de règlement adopté sur la base de l'article 308 CE, l'OLAF a finalement été institué par une décision de la Commission (13). Les dispositions générales régissant ses activités, qui incluent les «enquêtes internes» sur la fraude au sein des institutions et organismes communautaires, ont été définies dans le règlement n° 1073/1999, qui est la première mesure à avoir été adoptée sur la base de l'article 280, paragraphe 4, CE (14). Le règlement prévoit que chaque institution, organe et organisme de la Communauté européenne adoptera une décision définissant plus précisément les règles de procédure à suivre lors des enquêtes internes effectuées par l'OLAF, et un accord interinstitutionnel conclu en 1999 entre le Parlement, le Conseil et la Commission fournit un modèle pour ces décisions (15).

    À la BEI, la responsabilité en matière de prévention des fraudes incombe principalement au service d'audit interne. Selon les explications fournies, la principale tâche de ce service consiste à examiner et à évaluer l'adéquation et l'efficacité des services et procédures internes à la BEI (16). Il peut en outre se charger de missions spéciales incluant des enquêtes en cas de suspicion de fraude conformément aux procédures définies dans le General Office Procedures Manual de la BEI (17).

Les dispositions communautaires pertinentes

Les dispositions du traité CE

    L'article 9 CE dispose que:

«Il est institué une Banque européenne d'investissement qui agit dans les limites des attributions qui lui sont conférées par le présent traité et les statuts qui lui sont annexés.»

    L'article 230 CE prévoit, pour ce qui nous intéresse ici, que:

«La Cour de justice contrôle la légalité des actes adoptés conjointement par le Parlement européen et le Conseil, des actes du Conseil, de la Commission et de la BCE, autres que les recommandations et les avis, et des actes du Parlement européen destinés à produire des effets juridiques vis-à-vis des tiers.

À cet effet, la Cour est compétente pour se prononcer sur les recours pour incompétence, violation des formes substantielles, violation du présent traité ou de toute règle de droit relative à son application, ou détournement de pouvoir, formés par un État membre, le Conseil ou la Commission.

[...]»

    L'article 237 CE dispose que:

«La Cour de justice est compétente, dans les limites ci-après, pour connaître des litiges concernant:

a)    l'exécution des obligations des États membres résultant des statuts de la Banque européenne d'investissement. Le conseil d'administration de la Banque dispose à cet égard des pouvoirs reconnus à la Commission par l'article 226;

b)    les délibérations du conseil des gouverneurs de la Banque européenne d'investissement. Chaque État membre, la Commission et le conseil d'administration de la Banque peuvent former un recours en cette matière dans les conditions prévues à l'article 230;

c)    les délibérations du conseil d'administration de la Banque européenne d'investissement. Les recours contre ces délibérations ne peuvent être formés, dans les conditions fixées à l'article 230, que par les États membres ou la Commission, et seulement pour violation des formes prévues à l'article 21, paragraphes 2 et 5 à 7 inclus, des statuts de la Banque[...]».

    L'article 280 CE, dans sa partie qui nous concerne ici, est ainsi rédigé:

«1. La Communauté et les États membres combattent la fraude et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté par des mesures prises conformément au présent article qui sont dissuasives et offrent une protection effective dans les États membres.

2. Les États membres prennent les mêmes mesures pour combattre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté que celles qu'ils prennent pour combattre la fraude portant atteinte à leurs propres intérêts financiers.

3. Sans préjudice d'autres dispositions du présent traité, les États membres coordonnent leur action visant à protéger les intérêts financiers de la Communauté contre la fraude. À cette fin, ils organisent, avec la Commission, une collaboration étroite et régulière entre les autorités compétentes.

4. Le Conseil, statuant conformément à la procédure visée à l'article 251, arrête, après consultation de la Cour des comptes, les mesures nécessaires dans les domaines de la prévention de la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté et de la lutte contre cette fraude en vue d'offrir une protection effective et équivalente dans les États membres. Ces mesures ne concernent ni l'application du droit pénal national ni l'administration de la justice dans les États membres.

[...]»

    Selon l'article 253 CE:

«Les règlements, les directives et les décisions adoptés conjointement par le Parlement européen et le Conseil ainsi que lesdits actes adoptés par le Conseil ou la Commission sont motivés et visent les propositions ou avis obligatoirement recueillis en exécution du présent traité.»

Les dispositions du traité Euratom

    L'article 183 A EA prévoit que:

«Les États membres prennent les mêmes mesures pour combattre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté que celles qu'ils prennent pour combattre la fraude portant atteinte à leurs propres intérêts financiers.

Sans préjudice d'autres dispositions du présent traité, les États membres coordonnent leur action visant à protéger les intérêts financiers de la Communauté contre la fraude. À cette fin, ils organisent, avec l'aide de la Commission, une collaboration étroite et régulière entre les services compétents de leurs administrations.»

    L'article 203 EA dispose:

«Si une action de la Communauté apparaît nécessaire pour réaliser l'un des objets de la Communauté, sans que le présent traité ait prévu les pouvoirs d'action requis à cet effet, le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen, prend les dispositions appropriées.»

    Selon l'article 162 EA:

«Les règlements, les directives et les décisions du Conseil et de la Commission sont motivés et visent les propositions ou avis obligatoirement recueillis en exécution du présent traité.»

Les dispositions des statuts de la BEI (18)

    L'article 4 des statuts prévoit, pour ce qui nous intéresse:

«1. La Banque est dotée d'un capital de 62 013 millions d'Écus souscrit par les États membres à concurrence des montants suivants:

[...]

Les États membres ne sont responsables que jusqu'à concurrence de leur quote-part du capital souscrit et non versé.»

    L'article 5 des statuts dispose:

«1. Le capital souscrit est versé par les États membres à concurrence de 7,50162895 % en moyenne des montants définis à l'article 4, paragraphe 1.

2. En cas d'augmentation du capital souscrit, le conseil des gouverneurs, statuant à l'unanimité, fixe le pourcentage qui doit être versé ainsi que les modalités de versement.

3. Le conseil d'administration peut exiger le versement du solde du capital souscrit pour autant que ce versement est rendu nécessaire pour faire face aux obligations de la Banque à l'égard de ses bailleurs de fonds.»

    En vertu de l'article 8 des statuts:

«La Banque est administrée et gérée par un conseil des gouverneurs, un conseil d'administration et un comité de direction.»

    L'article 9 des mêmes statuts prévoit aussi que:

«1. Le conseil des gouverneurs se compose des ministres désignés par les États membres.

2. Le conseil des gouverneurs établit les directives générales relatives à la politique de crédit de la Banque, notamment en ce qui concerne les objectifs dont il y aura lieu de s'inspirer au fur et à mesure que progresse la réalisation du marché commun.

Il veille à l'exécution de ces directives.

3. En outre, le conseil des gouverneurs:

[...]

h) approuve le règlement intérieur de la Banque.»

    L'article 11 prévoit ce qui suit:

«1. Le conseil d'administration a compétence exclusive pour décider de l'octroi de crédits et de garanties et de la conclusion d'emprunts, fixe les taux d'intérêt pour les prêts, ainsi que les commissions de garanties, contrôle la saine administration de la Banque et assure la conformité de la gestion de la Banque avec les dispositions du traité et des statuts et les directives générales fixées par le conseil des gouverneurs.

À l'expiration de l'exercice, il est tenu de soumettre un rapport au conseil des gouverneurs et de le publier après approbation.

2. Le conseil d'administration est composé de vingt-cinq administrateurs et treize suppléants.

Les administrateurs sont nommés pour une période de cinq ans par le conseil des gouverneurs à raison de:

[...]

- un administrateur désigné par la Commission.

Les suppléants sont nommés pour une période de cinq ans par le conseil des gouverneurs à raison de:

[...]

- un suppléant désigné par la Commission.»

    L'article 13 prévoit notamment que:

«1. Le comité de direction se compose d'un président et de six vice-présidents nommés pour une période de six ans par le conseil des gouverneurs sur proposition du conseil d'administration.

[...]

3. Le comité de direction assure la gestion des affaires courantes de la Banque, sous l'autorité du président et sous le contrôle du conseil d'administration.

Il prépare les décisions du conseil d'administration, notamment en ce qui concerne la conclusion d'emprunts et l'octroi de crédits et de garanties; il assure l'exécution de ces décisions.

[...]

8. Le comité de direction et le personnel de la Banque ne sont responsables que devant cette dernière et exercent leurs fonctions en pleine indépendance.»

    L'article 14 est ainsi rédigé:

«1. Un comité, composé de trois membres nommés par le conseil des gouverneurs en raison de leur compétence, vérifie chaque année la régularité des opérations et des livres de la Banque.

2. Il confirme que le bilan et le compte de profits et pertes sont conformes aux écritures comptables et qu'ils reflètent exactement, à l'actif comme au passif, la situation de la Banque.»

    L'article 17 prévoit ceci:

«À la requête d'un État membre ou de la Commission, ou d'office, le conseil des gouverneurs interprète ou complète, dans les conditions dans lesquelles elles ont été arrêtées, les directives fixées par lui aux termes de l'article 9 des présents statuts.»

    L'article 20 nous intéresse également dans la mesure où il prévoit que:

«Dans ses opérations de prêts et de garanties, la Banque doit observer les principes suivants.

1. Elle veille à ce que ses fonds soient utilisés de la façon la plus rationnelle dans l'intérêt de la Communauté.

Elle ne peut accorder des prêts ou garantir des emprunts que:

[...]

b)    lorsque l'exécution du projet contribue à l'accroissement de la productivité économique en général et favorise la réalisation du marché commun.»

    L'article 21 prévoit, quant à lui, que:

«1. Les demandes de prêt ou de garantie peuvent être adressées à la Banque soit par l'intermédiaire de la Commission, soit par l'intermédiaire de l'État membre sur le territoire duquel le projet sera réalisé. La Banque peut aussi être saisie directement d'une demande de prêt ou de garantie par une entreprise.

2. Lorsque les demandes sont adressées par l'intermédiaire de la Commission, elles sont soumises pour avis à l'État membre sur le territoire duquel le projet sera réalisé. Lorsqu'elles sont adressées par l'intermédiaire de l'État, elles sont soumises pour avis à la Commission. Lorsqu'elles émanent directement d'une entreprise, elles sont soumises à l'État membre intéressé et à la Commission.

[...]

3. Le conseil d'administration statue sur les demandes de prêt ou de garantie qui lui sont soumises par le comité de direction.

4. Le comité de direction examine si les demandes de prêt ou de garantie qui lui sont soumises sont conformes aux dispositions des présents statuts, notamment à celles de l'article 20. Si le comité de direction se prononce en faveur de l'octroi du prêt ou de la garantie, il doit soumettre le projet de contrat au conseil d'administration; il peut subordonner son avis favorable aux conditions qu'il considère comme essentielles. Si le comité de direction se prononce contre l'octroi du prêt ou de la garantie, il doit soumettre au conseil d'administration les documents appropriés accompagnés de son avis.

5. En cas d'avis négatif du comité de direction, le conseil d'administration ne peut accorder le prêt ou la garantie en cause qu'à l'unanimité.

6. En cas d'avis négatif de la Commission, le conseil d'administration ne peut accorder le prêt ou la garantie en cause qu'à l'unanimité, l'administrateur nommé sur désignation de la Commission s'abstenant de prendre part au vote.

7. En cas d'avis négatif du comité de direction et de la Commission, le conseil d'administration ne peut pas accorder le prêt ou la garantie en cause.»

    Enfin, l'article 22, paragraphe 1, des statuts dispose que:

«1. La Banque emprunte sur les marchés internationaux des capitaux les ressources nécessaires à l'accomplissement de ses tâches.»

La décision créant l'OLAF

    L'OLAF a été institué par la décision 1999/352 (19), adoptée sur la base des articles 162 du traité CE (devenu article 218 CE), 16 du traité CECA et 131 du traité Euratom.

    S'agissant des «tâches de l'Office», l'article 2 de la décision 1999/352 dispose notamment:

«1. L'Office exerce les compétences de la Commission en matière d'enquêtes administratives externes en vue de renforcer la lutte contre la fraude, contre la corruption et contre toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés, ainsi qu'aux fins de la lutte antifraude concernant tout autre fait ou activité d'opérateurs en violation de dispositions communautaires.

L'Office est chargé d'effectuer des enquêtes administratives internes destinées:

a)    à lutter contre la fraude, contre la corruption et contre toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés;

b)    à rechercher les faits graves, liés à l'exercice d'activités professionnelles, pouvant constituer un manquement aux obligations des fonctionnaires et agents des Communautés susceptible de poursuites disciplinaires et, le cas échéant, pénales ou un manquement aux obligations analogues des membres des institutions et organes, des dirigeants des organismes ou des membres du personnel des institutions, organes et organismes non soumis au statut des fonctionnaires des Communautés européennes ou au régime applicable aux autres agents de ces Communautés.

L'Office exerce les compétences de la Commission y relatives, telles qu'elles sont définies par les dispositions établies dans le cadre, les limites et les conditions fixés par les traités.

L'Office peut se voir confier des missions d'enquête d'autres domaines, par la Commission ou par les autres institutions, organes ou organismes.

[...]

7. L'Office assure la représentation de la Commission, au niveau des services, dans les enceintes concernées, pour les domaines visés au présent article.»

    En vertu de l'article 4 de la décision 1999/352:

«Il est institué un comité de surveillance dont la composition et les compétences sont déterminées par le législateur communautaire. Ce comité exerce un contrôle régulier sur l'exécution de la fonction d'enquête de l'Office.»

    L'article 6, paragraphe 4, de la décision 1999/352 dispose:

«Les décisions de la Commission relatives à son organisation interne sont applicables à l'Office dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions arrêtées par le législateur communautaire relatives à l'Office, avec la présente décision et avec les modalités d'application de celle-ci.»

    Conformément aux dispositions de son article 7, la décision 1999/352 devait prendre «effet à la date d'entrée en vigueur du règlement (CE) du Parlement européen et du Conseil relatif aux enquêtes effectuées par l'Office européen de lutte antifraude».

Les règlements relatifs aux enquêtes effectuées par l'OLAF

    Les règlements n° 1073/1999 (20) et n° 1074/1999 (21) ont été adoptés, respectivement, sur la base de l'article 280 CE et de l'article 203 EA. Ils comportent des dispositions identiques en substance.

    L'article 1er des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, intitulé «Objectifs et fonctions», est ainsi rédigé:

«1. En vue de renforcer la lutte contre la fraude, la corruption et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté européenne, l'Office européen de lutte antifraude, créé par la décision de la Commission 1999/352/CE, CECA, Euratom (ci-après dénommé: ‘Office’) exerce les compétences d'enquête conférées à la Commission par la réglementation communautaire et les accords en vigueur dans ces domaines.

2. L'Office apporte le concours de la Commission aux États membres pour organiser une collaboration étroite et régulière entre leurs autorités compétentes, afin de coordonner leur action visant à protéger contre la fraude les intérêts financiers de la Communauté européenne. L'Office contribue à la conception et au développement des méthodes de lutte contre la fraude, ainsi que contre toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté européenne.

3. À l'intérieur des institutions, organes et organismes institués par les traités ou sur la base de ceux-ci (ci-après dénommés ‘institutions, organes et organismes’), l'Office effectue les enquêtes administratives destinées à:

-    lutter contre la fraude, la corruption et contre toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté européenne,

-     y rechercher à cet effet les faits graves, liés à l'exercice d'activités professionnelles, pouvant constituer un manquement aux obligations des fonctionnaires et agents des Communautés, susceptible de poursuites disciplinaires et le cas échéant, pénales, ou un manquement aux obligations analogues des membres des institutions et organes, des dirigeants des organismes ou des membres du personnel des institutions, organes et organismes non soumis au statut.»

    L'article 4 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, intitulé «Enquêtes internes», prévoit notamment :

«1. Dans les domaines visés à l'article 1er, l'Office effectue les enquêtes administratives à l'intérieur des institutions, organes et organismes, ci-après dénommées ‘enquêtes internes’.

Ces enquêtes internes sont exécutées dans le respect des règles des traités, notamment du protocole sur les privilèges et immunités, ainsi que du statut, dans les conditions et selon les modalités prévues par le présent règlement et par des décisions que chaque institution, organe et organisme adopte. Les institutions se concertent sur le régime à établir par une telle décision.

2. Pour autant que les dispositions mentionnées au paragraphe 1 soient respectées:

-    l'Office a accès sans préavis et sans délai à toute information détenue par les institutions, organes et organismes ainsi qu'aux locaux de ceux-ci. L'Office a la faculté de contrôler la comptabilité des institutions, organes et organismes. L'Office peut prendre copie et obtenir des extraits de tout document et du contenu de tout support d'information que les institutions, organes et organismes détiennent et, en cas de besoin, s'assurer de ces documents ou informations pour éviter tout risque de disparition,

-    l'Office peut demander des informations orales aux membres des institutions et organes, aux dirigeants des organismes ainsi qu'aux membres du personnel des institutions, organes et organismes.

[...]

4. Les institutions, organes et organismes sont informés lorsque des agents de l'Office effectuent une enquête dans leurs locaux et lorsqu'ils consultent un document ou demandent une information que détiennent ces institutions, organes et organismes.

5. Lorsque les investigations révèlent la possibilité d'une implication personnelle d'un membre, dirigeant, fonctionnaire ou agent, l'institution, l'organe ou l'organisme auquel il appartient en est informé. Dans des cas nécessitant le maintien d'un secret absolu aux fins de l'enquête ou exigeant le recours à des moyens d'investigation relevant de la compétence d'une autorité judiciaire nationale, cette information peut être différée.

6. Sans préjudice des règles des traités, notamment du protocole sur les privilèges et immunités, ainsi que des dispositions du statut, la décision qu'adopte chaque institution, organe et organisme, prévue au paragraphe 1, comprend notamment des règles relatives:

a)    à l'obligation pour les membres, fonctionnaires et agents des institutions et organes ainsi que pour les dirigeants, fonctionnaires et agents des organismes de coopérer avec les agents de l'Office et de les informer;

b)    aux procédures à observer par les agents de l'Office lors de l'exécution des enquêtes internes, ainsi qu'aux garanties des droits des personnes concernées par une enquête interne.»

    En vertu de l'article 5 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, «[l]es enquêtes internes sont ouvertes par une décision du directeur de l'Office qui agit de sa propre initiative ou suite à une demande de l'institution, organe ou organisme au sein duquel l'enquête devra être effectuée».

    L'article 6 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, intitulé «Exécution des enquêtes», prévoit ceci:

«1. Le directeur de l'Office dirige l'exécution des enquêtes.

2. Les agents de l'Office effectuent leurs tâches sur production d'une habilitation écrite dans laquelle sont indiquées leur identité et leur qualité.

3. Les agents de l'Office désignés pour effectuer une enquête doivent être munis, pour chaque intervention, d'un mandat écrit délivré par le directeur, indiquant l'objet de l'enquête.

4. Les agents de l'Office adoptent, au cours des contrôles et des vérifications sur place, une attitude en accord avec les règles et usages qui s'imposent aux fonctionnaires de l'État membre concerné, avec le statut ainsi qu'avec les décisions visées à l'article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa.

5. Les enquêtes sont conduites sans désemparer pendant une période de temps qui doit être proportionnée aux circonstances et à la complexité de l'affaire.

6. Les États membres veillent à ce que leurs autorités compétentes, en conformité avec les dispositions nationales, prêtent le concours nécessaire aux agents de l'Office pour l'accomplissement de leur mission. Les institutions et organes veillent à ce que leurs membres et leur personnel, et les organismes veillent à ce que leurs dirigeants et leur personnel, prêtent le concours nécessaire aux agents de l'Office pour l'accomplissement de leur mission.»

    En vertu de l'article 7 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, intitulé «Obligation d'informer l'Office»:

«1. Les institutions, organes et organismes communiquent sans délai à l'Office toute information relative à d'éventuels cas de fraude ou de corruption, ou à toute autre activité illégale.

2. Les institutions, organes et organismes, et les États membres, dans la mesure où le droit national le permet, transmettent sur demande de l'Office ou de leur propre initiative tout document et information qu'ils détiennent, relatifs à une enquête interne en cours.

Les États membres transmettent les documents et informations relatifs aux enquêtes externes conformément aux dispositions relatives à ces enquêtes.

3. Les institutions, organes et organismes, et les États membres, dans la mesure où le droit national le permet, transmettent en outre à l'Office tout autre document et information jugés pertinents qu'ils détiennent, relatifs à la lutte contre la fraude, contre la corruption et contre toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés.»

    L'article 8 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 contient les règles destinées à assurer la confidentialité et la protection des informations obtenues dans le cadre des enquêtes.

    L'article 9 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 prévoit, pour ce qui nous intéresse, que:

«1. À l'issue d'une enquête effectuée par l'Office, celui-ci établit sous l'autorité du directeur un rapport qui comporte notamment les faits constatés, le cas échéant le préjudice financier et les conclusions de l'enquête, y compris les recommandations du directeur de l'Office sur les suites qu'il convient de donner.

2. Ces rapports sont établis en tenant compte des exigences de procédure prévues par la loi nationale de l'État membre concerné. Les rapports ainsi dressés constituent, au même titre et dans les mêmes conditions que les rapports administratifs établis par les contrôleurs administratifs nationaux, des éléments de preuve admissibles dans les procédures administratives ou judiciaires de l'État membre où leur utilisation s'avère nécessaire. Ils sont soumis aux mêmes règles d'appréciation que celles applicables aux rapports administratifs établis par les contrôleurs administratifs nationaux et ont une valeur identique à ceux-ci.

[...]

4. Le rapport établi à la suite d'une enquête interne et tout document utile y afférent sont transmis à l'institution, à l'organe ou à l'organisme concerné. Les institutions, organes et organismes donnent aux enquêtes internes les suites, notamment disciplinaires et judiciaires, que leurs résultats appellent et informent le directeur de l'Office, dans un délai que celui-ci aura fixé dans les conclusions de son rapport, des suites données aux enquêtes.»

    Les articles 11, 12 et 14 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 fixent les règles concernant les tâches du comité de surveillance, les tâches du directeur et le droit pour les fonctionnaires et autres agents des Communautés d'introduire une réclamation contre les actes leur faisant grief adoptés par l'OLAF dans le cadre d'une procédure d'enquête.

L'accord interinstitutionnel relatif aux enquêtes internes effectuées par l'OLAF

    Le 25 mai 1999, le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne et la Commission des Communautés européennes ont conclu l'accord interinstitutionnel (22).

    Les parties ont convenu, en particulier, d'«adopter un régime commun comportant les mesures d'exécution nécessaires pour faciliter le bon déroulement des enquêtes menées par l'Office, en leur sein» et d'«établir un tel régime et de le rendre immédiatement applicable en adoptant une décision interne conformément au modèle annexé au présent accord, et de ne s'en écarter que lorsque des exigences particulières, qui leur sont propres, en imposent la nécessité technique».

    L'accord indique en outre que «[l]es autres institutions, ainsi que les organes et organismes institués par les traités CE et Euratom ou sur la base de ceux-ci, sont invités à adhérer au présent accord, moyennant, pour chacun, une déclaration adressée conjointement aux présidents des institutions signataires».

La décision attaquée

    Le 10 novembre 1999, le comité de direction de la BEI a adopté la décision attaquée (23).

    Après s'être référé à la décision 1999/352, le préambule de la décision attaquée énonce que la BEI «accueille favorablement les objectifs de l'OLAF et la perspective d'une coopération avec celui-ci», tout en «réaffirmant sa volonté de conserver un dispositif de contrôle interne efficace et systématique, comprenant notamment des mesures de prévention des fraudes». Aux termes dudit préambule, la décision attaquée est également adoptée en tenant «compte du cadre juridique fixé à la BEI par le traité CE et le protocole sur les Statuts de la Banque européenne d'Investissement».

    La décision attaquée comporte deux parties. La première partie, intitulée «Enquêtes relatives à des activités frauduleuses touchant aux opérations effectuées par la BEI sur mandat de la Communauté et impliquant des dépenses du budget communautaire», s'applique aux «opérations effectuées par la [BEI] sur mandat de la Communauté et qui ont donné lieu, ou donneront lieu dans le cours normal des événements à des dépenses de fonds provenant du budget de la Communauté» (24) et aux «opérations effectuées par la [BEI] au moyen de ressources du Fonds européen de développement, sous réserve qu'il soit confirmé à la [BEI] de manière satisfaisante que le[dit] Fonds relève du champ de compétence de l'OLAF» (25) (ci-après les «opérations de la première catégorie»). La seconde partie concerne les enquêtes relatives à des activités frauduleuses «touchant aux opérations de la BEI autres que celles couvertes par la première partie» (26) (ci-après les «opérations de la seconde catégorie»).

    Concernant les opérations de la première catégorie, la décision attaquée comporte les dispositions suivantes.

    Le point 4 de la première partie dispose:

«Procédures applicables. Tout soupçon d'activité frauduleuse de la part de membres du personnel de la BEI ou de ses organes dirigeants, dans le cadre des opérations [de la première catégorie], est traité conformément aux procédures et aux règles générales appliquées par la banque en ce qui concerne la communication des soupçons, les investigations, la transmission au comité de vérification et, le cas échéant, aux autres organes de la Banque, des conclusions de l'enquête ainsi que des mesures à prendre sur la base de l'enquête.»

    Le point 5 de la première partie dispose:

«Déclenchement d'une enquête à l'initiative de l'OLAF. En outre, lorsque le Directeur de l'OLAF informe le Président de soupçons portant sur un membre du personnel de la BEI ou de ses organes dirigeants et concernant une activité paraissant frauduleuse en rapport avec une des opérations concernées, le Président de la Banque en informe sans délai le Chef de l'Audit interne, pour qu'il effectue une enquête.»

    Le point 6 de la première partie dispose:

«Information de l'OLAF. Le rapport du Chef de l'Audit interne relatif aux conclusions de l'enquête et aux mesures prises, transmis au Comité de vérification conformément à la procédure ordinaire, est également communiqué sans délai au Directeur de l'OLAF. Il lui est demandé de faire part de ses observations éventuelles

i)    dans les cas relevant du point 5, et

ii)    dans les autres cas relevant du point 4 dès lors que la preuve d'activités frauduleuses a été établie.»

    Le point 7 de la première partie dispose:

«Observations de l'OLAF. Les observations du Directeur de l'OLAF sur les rapports mentionnés au point 6, qui sont transmises au Président de la Banque, sont communiquées au Chef de l'Audit interne et au Comité de vérification. Le Président de la Banque informe sans retard le Directeur de l'OLAF de toute action ultérieure.»

    Le point 8 de la première partie dispose:

«Information de la Commission. En cas d'enquête ouverte en vertu du point 4, quand la preuve d'activités frauduleuses a été établie, le rapport relatif aux conclusions de l'enquête et aux mesures prises doit être transmis à la Commission, en sa qualité de mandant.»

    Le point 9 de la première partie dispose:

«Traitement des demandes de coopération. Lorsque, à l'occasion de ses propres enquêtes relatives à des opérations concernées, l'OLAF demande l'accès à des informations détenues par la Banque, et lorsque le Directeur de l'OLAF adresse au Président de la Banque une demande précisant les circonstances de l'enquête et le besoin d'information ou d'autres formes de coopération, le Président de la Banque doit s'assurer qu'il y est répondu dans les meilleurs délais. Le Comité de vérification est informé de la demande et de la réponse fournie ou qui sera donnée, selon le cas.»

    Le point 10 de la première partie dispose:

«Mesures. En fonction de la nature de la demande et des circonstances de chaque affaire, le Président de la Banque:

-    autorise la communication de documents déterminés ou de toute autre information par les services de la Banque; et/ou

-    donne instruction au Chef de l'Audit interne de mener une enquête et d'en transmettre un rapport à l'OLAF; ou

-    autorise les services de la Banque à donner à l'OLAF accès à des documents déterminés ou à d'autres informations, sous réserve des conditions nécessaires et/ou d'autres garanties à définir.

Ce faisant, le Président s'attache à maintenir avec l'OLAF une coopération maximale, conformément aux dispositions de la décision.»

    Le point 11 de la première partie dispose:

«Si, en rapport avec des opérations concernées, la Banque est amenée à avoir connaissance de faits susceptibles de constituer, à son avis, des preuves ou indices d'une activité frauduleuse extérieure à la Banque affectant les intérêts financiers de la Communauté et si de tels faits relèvent des pouvoirs d'enquête de l'OLAF, le Directeur de l'OLAF doit en être informé par le Président de la Banque, qui offrira la coopération maximale de la Banque dans toute investigation éventuelle.»

     Concernant les opérations de la seconde catégorie, la deuxième partie de la décision attaquée prévoit que:

«1.    Le cadre juridique défini par les règles de procédure normalement suivies par la Banque dans les enquêtes en cas de soupçon de fraude impliquant des membres du personnel de la Banque ou de ses organes dirigeants, reste applicable.

2.    Dans le cadre de ces procédures, qui autorisent le recours à une assistance ou à une expertise externes, la Banque envisage de demander son concours à l'OLAF et s'emploiera à définir avec lui les modalités appropriées[.]»

La procédure et les prétentions des parties

    La Commission demande à la Cour, en se fondant à titre principal sur l'article 237, sous b), CE, et à titre subsidiaire sur l'article 230 CE, d'annuler la décision attaquée et de condamner la BEI aux dépens. Son principal moyen est que la décision attaquée est contraire notamment à l'article 4 du règlement n° 1073/1999 et du règlement n° 1074/1999.

    La BEI demande à la Cour de rejeter le recours comme irrecevable. À titre subsidiaire, elle demande à la Cour de déclarer les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 inapplicables en vertu des articles 241 CE et 156 EA, et de rejeter le recours comme mal fondé. Elle demande en toute hypothèse à la Cour de condamner la Commission aux dépens.

    Le Parlement, le Conseil et le royaume des Pays-Bas sont intervenus au soutien des conclusions de la Commission. Leur argumentation est en substance comparable à celle de la Commission. Nous ne mentionnerons ces interventions que lorsque cela s'impose, notamment dans la mesure où elles diffèrent des arguments de la Commission.

Les questions à résoudre

    Au vu des argument des parties et des intervenants, les questions à résoudre sont les suivantes:

-    Le recours est-il recevable au regard de l'article 237 CE ou, subsidiairement, de l'article 230 CE?

-    La décision attaquée est-elle contraire au règlement n° 1073/1999 et au règlement n° 1074/1999?

-     Si oui, le règlement n° 1073/1999 doit-il être déclaré inapplicable en vertu de l'article 241 CE et le règlement n° 1074/1999 inapplicable en vertu de l'article 156 EA?

    Avant d'examiner la deuxième question, nous proposons de rechercher brièvement si les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 doivent être interprétés comme s'appliquant à la BEI, puisque le recours de la Commission ne peut prospérer, en tout état de cause, que si la réponse à cette question est affirmative.

Sur la recevabilité

Résumé des arguments

    Les parties ont présenté des observations détaillées sur la question de la recevabilité, qui peuvent être résumées de la manière suivante.

    Le recours de la Commission est fondé, à titre principal, sur l'article 237, sous b), CE, et, à titre subsidiaire, sur l'article 230 CE. Bien que l'article 237, sous b), CE ne s'applique qu'aux délibérations du conseil des gouverneurs de la BEI, la Commission estime que cette disposition l'autorise à introduire le présent recours. Elle rappelle que l'article 9, paragraphe 3, sous h), des statuts prévoit que le règlement intérieur de la BEI est approuvé par le conseil des gouverneurs. Considérant que l'objet de la décision attaquée relève de la sphère dudit règlement intérieur, la Commission part du principe que la décision attaquée a été adoptée en vertu d'une délégation de compétence du conseil des gouverneurs au comité de direction. La décision attaquée serait donc imputable au conseil des gouverneurs. Elle ajoute qu'exclure l'exercice du contrôle juridictionnel sur la décision attaquée permettrait à la BEI, par une manipulation de son processus décisionnel interne, de se soustraire à la compétence qui est conférée à la Cour par l'article 237 CE.

    Quant à l'applicabilité de l'article 230 CE, la Commission souligne que l'article 220 CE confie à la Cour la mission générale d'assurer le respect du droit dans l'interprétation et l'application du traité, et que la BEI fait partie intégrante de l'ordre juridique communautaire (27). Ensuite, l'article 237 CE n'énumérerait pas de façon exhaustive tous les cas dans lesquels la Cour est compétente à l'égard d'actes adoptés par la BEI (28). L'affaire soulevant des questions de nature «quasi constitutionnelle», la nécessité d'un contrôle juridictionnel serait particulièrement évidente, et il serait incompatible avec le statut de communauté de droit qui caractérise la Communauté, tel que reconnu dans l'arrêt Les Verts/Parlement (29), que l'affaire ne puisse pas être portée devant la Cour de justice. La Commission estime qu'il serait inacceptable que la BEI puisse ne pas respecter la volonté du législateur communautaire dans une matière aussi importante que la protection des intérêts financiers de la Communauté et la lutte antifraude, sans qu'existe une possibilité de contrôle juridictionnel par la Cour de justice.

    En réponse à ces arguments, la BEI observe, à titre liminaire, que, bien que la Commission invoque une violation du règlement n° 1074/1999, elle n'indique pas quelles dispositions du traité Euratom l'autorisent à poursuivre l'annulation de la décision attaquée devant la Cour. L'article 237 CE n'ayant pas d'équivalent dans le traité Euratom, la BEI estime que le seul fondement possible serait ici l'article 146 EA, qui est comparable à l'article 230 CE. Or, ni cette disposition ni aucune autre disposition du traité Euratom ne fait mention de la BEI.

    La BEI fait valoir, ensuite, que la décision attaquée ne peut pas être contestée par la Commission sur la base de l'article 237 CE. Rappelant que l'article 7, paragraphe 1, CE oblige la Cour à agir dans les limites des attributions qui lui sont conférées par le traité, la BEI affirme que l'article 237 CE doit être compris comme contenant une liste exhaustive des cas dans lesquels la Cour est compétente pour exercer son contrôle sur des actes de la BEI. En s'abstenant de citer les décisions du comité de direction - organe pourtant institué et doté de pouvoirs spécifiques par les statuts (30) - le traité aurait délibérément soustrait ces actes au contrôle de la Cour.

    De plus, - contrairement à ce que prétend la Commission - la décision attaquée aurait bien été adoptée par le comité de direction dans l'exercice de ses compétences, conformément aux paragraphes 3 et 8 de l'article 13 des statuts, qui prévoient respectivement que le comité de direction «assure la gestion des affaires courantes de la Banque, sous l'autorité du président et sous le contrôle du conseil d'administration» et que «(l)e comité de direction et le personnel de la Banque ne sont responsables que devant cette dernière et exercent leurs fonctions en pleine indépendance». Dans ce contexte, la BEI explique que le conseil des gouverneurs a été tenu régulièrement informé par le président de la BEI des travaux entrepris par le comité de direction en vue de l'adoption de mesures relatives à la prévention de la fraude. Les membres du conseil des gouverneurs n'ont cependant jamais demandé que le conseil soit convoqué sur ce sujet, ni que la décision attaquée soit inscrire à l'ordre du jour des délibérations en séance ordinaire (31). La Commission ne serait donc pas fondée à prétendre - puisqu'elle n'a pas établi l'existence d'un détournement de pouvoir ou de procédure -, que la BEI a entendu se soustraire à la protection juridique voulue par le traité.

    Selon la BEI, la décision attaquée ne peut être examinée par la Cour sur la base de l'article 230 CE. Puisque son texte ne vise que les institutions de la Communauté et la BCE, cet article ne serait tout simplement pas applicable à la BEI. Admettre que des actes qui ne sont pas visés à l'article 237 CE puissent être néanmoins soumis au contrôle de la Cour sur le fondement de l'article 230 CE reviendrait à ôter à l'article 237 CE, qui constitue une lex specialis, sa raison d'être. En outre, la jurisprudence invoquée par la Commission, qui concerne la compétence de la Cour pour connaître des litiges en matière de responsabilité extra-contractuelle de la BEI (32) et des litiges entre la BEI et les membres de son personnel (33), ne permettrait pas d'affirmer que les dispositions de l'article 237 CE ne sont pas exhaustives sur la question du contrôle de légalité des actes de la BEI. Au surplus, le raisonnement tenu dans l'arrêt Les Verts/Parlement (34), invoqué par la Commission, ne serait pas non plus transposable à la BEI. Dans cette affaire, si la Cour a jugé recevable un recours en annulation dirigé contre des actes du Parlement européen, c'était essentiellement pour assurer que l'accroissement des pouvoirs d'une des institutions de la Communauté, dont il n'était pas question dans l'article 230 CE, n'aille pas à l'encontre de la nécessité de protection juridique. Or, la BEI, qui n'est pas une institution, a conservé sa mission d'origine, qui consiste à accorder des prêts et des garanties, et la possibilité d'un contrôle juridictionnel des décisions de (certains de) ses organes a toujours été prévue par l'article 237 CE (35).

    Enfin, la BEI considère que le présent recours est irrecevable dans la mesure où la Commission cherche en réalité à faire sanctionner une prétendue carence de la BEI, puisqu'elle reproche à cette dernière de ne pas avoir adopté une décision assurant la mise en oeuvre de l'article 4, paragraphes 1 et 6, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999. Or, les articles 232 CE et 148 EA, qui visent les abstentions d'agir, ne s'appliquent pas à la BEI et l'introduction du recours en carence requiert, en outre, le respect d'une procédure à laquelle il n'a pas été satisfait dans la présente affaire.

Analyse

    Afin de déterminer si le recours de la Commission est recevable, il est nécessaire, au regard des arguments des parties, d'examiner les questions suivantes:

-    La décision attaquée peut-elle être considérée comme un acte du conseil des gouverneurs, soumis au contrôle de légalité en vertu de l'article 230 CE et/ou de l'article 237, sous b), CE?

-    Si oui, le recours de la Commission est-il irrecevable en tant que visant une violation du règlement n° 1074/1999, qui constitue un acte adopté en vertu du traité Euratom?

-    Le recours de la Commission est-il irrecevable en tant que visant une abstention d'agir de la part de la BEI?

- La recevabilité au regard de l'article 237, sous b), CE.

    L'article 237, sous b) et c), CE prévoit que la Cour exerce son contrôle sur les actes du conseil des gouverneurs et du conseil d'administration de la BEI, mais ne mentionne pas le comité de direction. On pourrait déduire de cette formulation, ainsi que le suggère la BEI, que les décisions du comité de direction ne peuvent pas, en principe, faire l'objet d'un recours sur la base de l'article 237 CE.

    Il serait cependant inacceptable, ainsi que le fait observer la Commission, que la BEI puisse - en organisant astucieusement son processus décisionnel interne - se soustraire au contrôle juridictionnel voulu par l'article 237, sous b) et c), CE. Les décisions formellement adoptées par le comité de direction doivent donc être passibles d'un contrôle juridictionnel si l'examen des circonstances de leur adoption et de leur contenu révèle qu'elles sont imputables au conseil des gouverneurs ou au conseil d'administration.

    Dans ce contexte, on peut noter que, lorsque la Cour a été saisie de la question de savoir si les actes adoptés par les représentants des États membres agissant non pas en qualité de membres du Conseil des ministres, mais en tant que représentants de leurs gouvernements sont soumis à son contrôle juridictionnel, elle a jugé que, bien que de telles mesures se situent en dehors du champ de l'article 230 CE, «il ne suffit pas qu'un acte soit qualifié de ‘décision des États membres’ pour qu'il échappe au contrôle [...] Encore faut-il pour cela vérifier que l'acte en question, eu égard à son contenu et à l'ensemble des circonstances dans lesquelles il a été adopté, ne constitue pas en réalité une décision du Conseil» (36).

    La BEI estime que la décision attaquée n'est pas imputable au conseil des gouverneurs au motif, principalement, que le conseil n'a pas pris de décision de délégation de pouvoir au profit du comité de direction à l'effet de l'autoriser à adopter des décisions en matière de prévention des fraudes et s'est abstenu de convoquer une réunion ou d'inscrire à son ordre du jour la question de la coopération avec l'OLAF, alors qu'il était tenu informé des travaux entrepris par le comité de direction.

    Nous ne sommes pas d'accord. Une décision du comité de direction qui produit un effet juridique peut, à notre avis, être attribuée au conseil des gouverneurs si le conseil a été informé des travaux entrepris en vue de préparer la décision, puis de son contenu final, sans soulever d'objections. L'absence de délégation formelle de compétence ou de mention expresse lors d'une séance du conseil des gouverneurs ne peut pas être décisive.

    À cet égard, il faut rappeler que le comité de direction assure, selon l'article 13, paragraphe 3, des statuts, «la gestion des affaires courantes de la Banque, sous l'autorité du Président et sous le contrôle du Conseil d'administration». La notion d'«affaires courantes» doit se comprendre à la lumière de l'article 267 CE qui prévoit que la BEI doit «facilite[r], par l'octroi de prêts et de garanties, sans poursuivre de but lucratif, le financement de projets [...], dans tous les secteurs de l'économie». Conformément à l'article 9 des statuts, le conseil des gouverneurs établit les directives générales relatives à la politique de crédit de la BEI, et, en particulier, décide de l'augmentation du capital souscrit, approuve le rapport annuel établi par le conseil d'administration, ainsi que le bilan annuel et le compte des profits et pertes, et approuve le règlement intérieur de la BEI. En vertu de l'article 11 des statuts, le conseil d'administration a compétence pour décider de l'octroi de crédits et de garanties et de la conclusion d'emprunts, fixe les taux d'intérêt pour les prêts, ainsi que les commissions de garanties, contrôle la saine administration de la BEI et assure la conformité de la gestion de la banque avec les dispositions du traité et des statuts et les directives générales fixées par le conseil des gouverneurs.

    Il résulte de ces dispositions que la principale tâche du comité de direction aux termes du traité et des statuts est de préparer et de mettre en oeuvre les décisions en matière de prêts et de garanties qui sont adoptées par le conseil d'administration conformément aux lignes générales arrêtées par le conseil des gouverneurs (37). Si les statuts n'excluent pas entièrement la possibilité pour le comité de direction de prendre, dans le cadre des affaires courantes de la BEI, des décisions produisant des effets juridiques vis-à-vis des tiers (38), ils prévoient clairement que de telles décisions sont normalement adoptées soit par le conseil des gouverneurs, soit par le conseil d'administration.

    L'absence de référence au comité de direction dans le texte de l'article 237 CE est le reflet de cette répartition des compétences au sein de la BEI. Dans la mesure où le comité de direction est en général censé préparer - et non pas adopter - les décisions destinées à produire des effets juridiques, les rédacteurs du traité semblent avoir considéré qu'un contrôle juridictionnel des actes du comité de direction n'était pas nécessaire. On peut établir un parallèle ici avec l'article 230 CE qui prévoit que les actes définitifs et produisant des effets juridiques adoptés par les institutions et la BCE sont attaquables, alors que ne le sont pas les mesures qui ne font que préparer l'adoption de ces actes (39).

    Si, cependant, le comité de direction adopte une décision qui produit des effets juridiques, ce principe implicite ne s'applique plus. Une telle décision doit être pouvoir être attaquée (40). Et cela vaut encore plus lorsque, comme dans la présente affaire, le comité de direction adopte une décision dont il est très difficile - voire impossible - de faire entrer le contenu dans la notion d'«affaires courantes», et qui est manifestement susceptible de compromettre l'effet utile d'un ou plusieurs règlements communautaires.

    Nous estimons, pour ces raisons, que la décision litigieuse doit être imputée au conseil des gouverneurs et qu'il s'agit, dès lors, d'un acte susceptible d'être attaqué sur la base de l'article 237, sous b), CE.

    On pourrait objecter que le comité de direction agit «... sous le contrôle du conseil d'administration» (41), et que les décisions produisant des effets juridiques qui sont adoptées par le comité de direction devraient par conséquent être attribuées au conseil d'administration plutôt qu'au conseil des gouverneurs. En vertu de l'article 237, sous c), CE, les délibérations du conseil des gouverneurs ne peuvent faire l'objet d'un recours que pour violation des formes prévues à l'article 21, paragraphes 2 et 5 à 7 inclus, des statuts de la BEI. Le moyen invoqué par la Commission, tiré de contrariété aux règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, pourrait alors sembler irrecevable.

    Cette objection ne nous paraît pas convaincante. Les règles procédurales définies à l'article 21, paragraphes 2 et 5 à 7 inclus, des statuts concernent exclusivement l'adoption des décisions en matière d'octroi de prêts et de garanties. Il est clair que le traité n'a pas voulu que de telles décisions, de nature essentiellement économique, soient soumises à un contrôle juridictionnel complet de la Cour. Cependant, on ne peut, à notre avis, déduire de l'article 237, sous c), CE que les décisions adoptées par les organes de la BEI qui ne sont pas directement liées à l'octroi de prêts ou de garanties et qui produisent des effets juridiques ne peuvent être soumises à un contrôle juridictionnel. De plus, selon l'article 8 des statuts, lu en combinaison avec l'article 9, c'est le conseil des gouverneurs qui est responsable, en dernière analyse, de la direction et de la gestion de la BEI. Peu importe par conséquent que le conseil d'administration soit responsable du contrôle quotidien du comité de direction en vertu de l'article 13.

    Nous sommes conforté dans cette opinion par la jurisprudence relative aux types d'actes susceptibles de recours sur la base de l'article 230 CE. À l'origine, l'article 173 du traité CEE prévoyait que la Cour était compétente pour exercer son contrôle sur les «actes du Conseil et de la Commission, autres que les recommandations et avis». L'article 189 du traité CEE (devenu article 249 CE) a défini les actes communautaires produisant des effets de droit comme étant les règlements, directives et décisions. On aurait pu penser, au vu de ces dispositions, que la Cour n'était compétente que pour contrôler la légalité des règlements, directives et décisions adoptés par le Conseil ou la Commission. Cependant, dans l'arrêt ERTA (42), la Cour a accepté d'exercer son contrôle sur la légalité de procédures du Conseil concernant la négociation et la conclusion par les États membres d'un accord sur les conditions de travail des équipages de véhicules effectuant des transports internationaux par route (43), au motif, principalement, que l'objectif du recours en annulation prévu par l'article 173 du traité CEE - qui est d'assurer le respect du droit dans l'interprétation et l'application du traité - ne serait pas atteint si le recours n'était pas ouvert à l'égard de toutes dispositions, quelles qu'en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets de droit (44). Dans l'arrêt Les Verts/Parlement (45), la Cour était saisie d'un recours contre deux dispositions adoptées par le Parlement européen, concernant le remboursement des dépenses exposées par les partis ayant pris part aux élections de 1984. En déclarant ce recours recevable, la Cour a souligné que la Communauté «est une communauté de droit en ce que ni ses États membres ni ses institutions n'échappent au contrôle de la conformité de leurs actes [...]» (46) et que «le traité a établi un système complet de voies de recours et de procédures destiné à confier à la Cour de justice le contrôle de la légalité des actes des institutions» (47) et a jugé que si «l'article 173 du traité ne cite que les actes du Conseil et de la Commission [...] [u]ne interprétation de [cette disposition] qui exclurait les actes du Parlement européen de ceux qui peuvent être attaqués aboutirait à un résultat contraire tant à l'esprit du traité tel qu'il a été exprimé dans l'article 164 [du traité CE (devenu article 220 CE)] qu'à son système» (48).

    Même si ces deux arrêts ne peuvent être transposés directement à la présente affaire, l'essence du raisonnement de la Cour est certainement applicable. Les dispositions du traité instituent un système complet de voies de recours, dans le cadre duquel les actes qui produisent des effets de droit sont, en l'absence de termes très clairs en sens contraire dans le traité, soumis au contrôle juridictionnel de la Cour de justice, pour assurer le respect du droit. Si l'article 237 CE ne mentionne pas le comité de direction, il n'exclut pas expressément - ni implicitement de façon suffisamment claire - la possibilité que les décisions de ce comité qui produisent des effets de droit puissent être attribuées au conseil des gouverneurs ou, le cas échéant, au conseil d'administration et puissent être attaquées sur cette base. Ce qui est primordial, c'est que, comme le fait observer le Conseil, chaque fois que la BEI agit en tant qu'organisme communautaire et non en tant que banque commerciale, ses décisions doivent être susceptibles de recours.

     Au vu de cette conclusion, il n'est pas nécessaire d'examiner l'argument subsidiaire de la Commission selon lequel les décisions du comité de direction sont attaquables sur la base de l'article 230 CE.

- Sur la recevabilité des griefs ayant trait au règlement n° 1074/1999

    La BEI affirme, en substance, que la Commission ne peut invoquer une prétendue violation d'un acte adopté en vertu du traité Euratom dans le cadre d'un recours fondé sur l'article 230 CE. Le recours de la Commission serait dès lors irrecevable en ce qu'il vise à faire constater que la décision attaquée est contraire au règlement n° 1074/1999.

    Nous ne pouvons retenir cet argument.

    Dans l'arrêt Grèce/Conseil (49), la Cour a jugé que «[l]a nécessité d'un contrôle complet et cohérent de la légalité exige d'interpréter cette disposition en ce sens qu'elle ne saurait exclure la compétence de la Cour pour examiner, dans le cadre d'un recours visant à l'annulation d'un acte fondé sur une disposition du traité CEE, un grief tiré de la violation d'une règle du traité [Euratom] ou CECA» (50). La présente affaire est de nature comparable: la décision attaquée a été adoptée en vertu du traité CE, et il fallait donc que la Commission l'attaque sur la base de l'article 237 CE. Puisque les dispositions du traité Euratom qui donnent compétence à la Cour ne mentionnent pas la BEI, il semble que la décision attaquée ne puisse pas être attaquée directement sur la base de ce traité. La nécessité d'un contrôle complet et cohérent exige donc que les articles 230 CE et 237 CE soient interprétés comme permettant à la Cour d'examiner les griefs tirés de la compatibilité de la décision attaquée avec les dispositions du traité Euratom. Il en va de même, à notre avis, des griefs tirés de la violation d'un règlement adopté sur la base du traité Euratom. La nécessité d'un contrôle complet et cohérent est identique, et une violation d'un règlement constitue par définition aussi une violation du traité puisque les traités CE et Euratom prévoient que les règlements sont obligatoires en tous leurs éléments et directement applicables dans tout État membre (51).

    De plus, même si la décision attaquée a été adoptée par la BEI en application du traité CE, le règlement n° 1074/1999 est à l'évidence pertinent pour la solution du présent litige. La BEI octroie des prêts et garanties de montants importants sur mandat d'Euratom, et il semble que la compétence de l'OLAF pour enquêter sur les activités de la BEI résultant d'un tel mandat ne puisse s'appuyer que sur le règlement n° 1074/1999.

- Le recours de la Commission vise-t-il à établir l'existence d'une carence?

    Le dernier argument de la BEI en ce qui concerne la recevabilité - argument selon lequel la Commission chercherait en substance à faire sanctionner une carence - ne nous semble pas non plus devoir être retenu. Il ressort des arguments de la Commission, tels qu'explicités par son mémoire en réplique, que le grief principal consiste à dire que la décision attaquée est contraire au règlement n° 1074/1999 dans la mesure où elle instaure un système parallèle de prévention de la fraude et exclut l'OLAF de l'exécution des enquêtes internes à mener en application, notamment, de l'article 4 des règlements. Ainsi, si nous comprenons bien le mémoire en réplique de la Commission, elle n'invoque pas, en tant qu'argument distinct, l'idée que, en s'abstenant d'adopter une décision conforme à l'article 4, paragraphes 1 et 6, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, la BEI a agi en violation du droit communautaire.

Les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 s'appliquent-ils à la BEI?

    La BEI admet, si nous comprenons bien son argumentation, que le législateur communautaire a voulu que les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 s'appliquent à ses activités. Cela est certainement exact. Il est parfaitement clair, comme nous l'avons expliqué dans nos conclusions dans l'affaire Commission/BCE (52), à la lecture des termes et des travaux préparatoires du règlement n° 1073/1999, que celui-ci était censé s'appliquer à la BCE. Il en va de même pour la BEI, qui doit être considérée comme un des «organismes ... créés par» le traité CE, auxquels le règlement est applicable en vertu du septième considérant de son préambule, des articles 1er, paragraphe 3, 4, paragraphes 1 et 6, 6, paragraphe 6, 7, paragraphes 1, 2 et 3, 9, paragraphe 4, et 10, paragraphe 3, ainsi que des articles 5, second alinéa, et 14, second alinéa.

    La teneur du règlement n° 1073/1999 est pour l'essentiel identique à celle du règlement n° 1074/1999, et l'histoire de ces règlements ne permet pas de donner une autre interprétation de leur champ d'application personnel.

    Par conséquent, nous considérons que les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 s'appliquent à la BEI.

La décision attaquée est-elle contraire aux règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999?

    Le point suivant qu'il nous faut résoudre est celui de l'éventuelle non-conformité de la décision attaquée aux règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.

    Selon la Commission, la décision attaquée est contraire aux règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 à plusieurs égards. Elle rappelle que la décision attaquée est divisée en deux parties: la première partie qui s'applique aux opérations effectuées par la BEI sur mandat de la Communauté et impliquant des dépenses du budget communautaire ou des ressources du Fonds européen de développement, et la seconde partie qui s'applique à toutes les autres opérations de la BEI. La Commission estime que la première partie est contraire aux règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 pour trois motifs.

    En premier lieu, la Commission rappelle que l'article 4, paragraphe 1, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 dispose que «[d]ans les domaines visés à l'article 1er, l'Office effectue les enquêtes administratives à l'intérieur des institutions, organes et organismes» (53). Or, selon le point 4 de la première partie de la décision attaquée, «[t]out soupçon d'activité frauduleuse de la part de membres du personnel de la BEI ou de ses organes dirigeants, dans le cadre des opérations [de la première catégorie], est traité conformément aux procédures et aux règles générales appliquées par la banque».

    En deuxième lieu, il résulte des points 5 à 8 de la première partie que la coopération entre la BEI et l'OLAF envisagée par la décision attaquée consiste essentiellement dans la conduite, à la demande du directeur de l'OLAF, d'enquêtes internes par l'audit interne de la BEI, dont les résultats sont communiqués à l'OLAF. Il est clair que cela ne correspond pas au système d'enquêtes internes prévu par les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999. À cet égard, la Commission souligne que ces enquêtes internes sont par nature fondamentalement différentes d'un audit. Alors que l'audit peut servir à déceler des irrégularités, les enquêtes internes visent spécifiquement à établir l'existence de fraudes ou d'autres irrégularités et à rassembler toutes les preuves susceptibles de conduire à la mise en jeu de la responsabilité disciplinaire ou pénale des intéressés.

    En troisième lieu, les points 9 et 10 de la première partie prévoient que l'accès aux informations détenues par la BEI est subordonné, en toute hypothèse, à l'autorisation du président de la BEI. Or cela est incompatible avec l'article 4, paragraphe 2, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, qui confère à l'OLAF un droit d'accès sans préavis et sans délai à toute information détenue par les institutions, organes et organismes ainsi qu'aux locaux de ceux-ci, à condition seulement de les en aviser.

    La seconde partie de la décision attaquée est, selon la Commission, encore plus clairement contraire aux dispositions des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999. Cette seconde partie prévoit seulement que la BEI peut faire appel à l'assistance de l'OLAF si elle le souhaite, et qu'elle s'efforcera de définir - en coopération avec l'OLAF - les procédures et modalités qu'il convient de donner à cette assistance.

    En outre, la Commission affirme, dans sa requête, que la BEI a violé les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 dans la mesure où, lors de l'adoption de la décision attaquée, elle ne s'est pas acquittée de son obligation, prévue à l'article 4, paragraphes 1 et 6, de définir dans une décision le régime des enquêtes internes. Toutefois, il ressort du mémoire en réplique que le principal grief que la Commission adresse à la décision attaquée est d'être contraire dans son ensemble aux dispositions des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.

    La BEI n'a pas expressément contesté l'idée que la décision attaquée serait contraire aux règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999. Son argument consiste plutôt à dire que les règlements ne lui sont pas applicables. Nous considérons donc qu'il est admis que la décision attaquée est contraire, notamment, à l'article 4 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.

Les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 doivent-ils être déclarés inapplicables?

    Au regard de cette conclusion, il est nécessaire d'examiner l'exception invoquée par la BEI, selon laquelle les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 devraient lui être déclarés inapplicables en vertu de l'article 241 CE et de l'article 156 EA.

    La Commission a eu raison, à notre avis, de ne pas contester la recevabilité de cet argument, et de ne pas prétendre que la BEI ne peut pas se prévaloir de ces articles. L'exception d'illégalité prévue par ces articles est destinée, au moins en partie, à permettre à une partie de contester indirectement un règlement qu'elle considère comme illégal dans le cas où elle n'aurait pas été recevable à en contester la validité directement. Dans la présente affaire, il n'est pas certain que la BEI disposait du droit d'introduire un recours direct contre les règlements en vertu des articles 230 CE ou 146 EA, et, il semble par conséquent que l'exception d'illégalité prévue par les articles 241 CE et 156 EA lui soit ouverte.

    On pourrait penser que la BEI ne peut pas invoquer l'article 156 EA dans la mesure où son existence n'est prévue que par le traité CE. Cependant, si, comme nous l'avons soutenu plus haut (54), les actes de la BEI adoptés sur la base du traité CE doivent être conformes aux instruments adoptés en vertu du traité Euratom, il est clair que la BEI doit pouvoir se défendre en invoquant l'illégalité de ces instruments en vertu de l'article 156 EA ou du «principe général du droit» dont les articles 241 CE et 156 EA sont «l'expression» (55).

    La BEI prétend que les règlements doivent être déclarés inapplicables pour les motifs suivants: i) ils prévoient un système d'enquêtes internes contraire à l'indépendance de la BEI telle que voulue par le traité et les statuts de la BEI; ii) ils ne trouvent de base légale ni dans le traité CE ni dans le traité Euratom; iii) ils sont contraires au principe de proportionnalité, et iv) ils ne respectent pas l'obligation de motivation des règlements résultant des articles 253 CE et 162 EA.

Sur l'indépendance

    La BEI affirme qu'il serait contraire à son indépendance, telle que voulue par le traité et par ses statuts, et telle que reconnue par la jurisprudence de la Cour, d'appliquer les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 à ses activités.

    À cet égard, elle rappelle brièvement l'historique du traité CEE et les événements qui ont conduit à créer la BEI. Selon ses explications, qui sont pour l'essentiel en accord avec la doctrine publiée sur cette question (56), les États membres ont rejeté l'idée - qui avait trouvé des échos favorables à la conférence de Messina, qui s'était tenue en juin 1955 (57) - de créer un fonds européen (fonds d'investissement) destiné à soutenir et à encourager l'investissement privé, et ont décidé, au lieu de cela, d'instituer une banque d'investissement, détenue par les États membres (58). C'est l'idée de créer une banque d'investissement, inspirée de l'exemple de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (la Banque mondiale), qui a été retenue, principalement pour deux raisons. D'une part, l'idée de planifier l'investissement privé à l'échelle européenne, sur laquelle s'appuyait la proposition d'un fonds, avait dû perdre des partisans à la date à laquelle le traité CEE a été finalement négocié, fin 1956. D'autre part, certains États membres n'étaient à l'évidence pas prêts à contribuer aux importantes ressources financières qui auraient été nécessaires pour constituer le fonds (59). C'est pourquoi les États membres ont opté pour la création d'une banque qui, tout en fonctionnant indépendamment des institutions européennes, poursuivrait les objectifs de la Communauté en soutenant l'investissement par l'octroi de prêts et de garanties à partir de fonds venus des marchés internationaux des capitaux.

    Dans ce contexte, la BEI affirme que les rédacteurs du traité ont voulu qu'elle soit indépendante des institutions communautaires, et rappelle que, selon la jurisprudence, «la [BEI] doit être en mesure d'agir en toute indépendance sur les marchés financiers, à l'instar de toute autre banque» (60). Elle souligne en particulier i) que la BEI n'est pas une institution communautaire au sens de l'article 7 CE; ii) que le traité CE a doté la BEI d'une personnalité juridique distincte de celle de la Communauté (61); iii) que la BEI a ses propres organes décisionnels internes créés par le droit communautaire primaire (62); iv) que la BEI est financièrement indépendante de la Communauté européenne dans la mesure où elle a son propre budget, ses propres bilans et comptes de pertes et profits annuels approuvés par le conseil des gouverneurs (63), et son propre capital versé par les États membres (64), v) et que la Cour des comptes n'est compétente pour examiner les comptes de la BEI que s'il s'agit de ses activités de gestion des recettes ou dépenses communautaires (65).

    Enfin, la BEI fait observer que, même si elle gère des fonds constituant des dépenses et recettes du budget communautaire, agissant en principe sur mandat de la Commission, ces fonds ne représentent que 10 % de l'ensemble du portefeuille de prêts et garanties de la BEI. Ils ne justifient donc pas que les activités de la BEI soient soumises aux pouvoirs de l'OLAF.

    En réponse à ces arguments, la Commission fait valoir, principalement, que la particularité du statut de la BEI au sein du traité est d'ordre fonctionnel et se limite à ce qui est nécessaire pour l'accomplissement de ses missions spécifiques. À cet égard, elle souligne i) que la disposition qui a institué la BEI (66) figure dans la première partie du traité consacrée aux «principes» de la Communauté; ii) que, dans le chapitre du traité consacré à la BEI (67), l'article 267 CE prévoit que la BEI a pour mission de «contribuer au développement équilibré et sans heurt du marché commun dans l'intérêt de la Communauté»; iii) que, selon ses statuts, la BEI doit «veiller à ce que ses fonds soient utilisés dans l'intérêt de la Communauté» (68) et ne peut accorder des prêts ou garanties que lorsque la réalisation d'un projet «[...] favorise la réalisation du marché commun» (69), et vi) que l'article 159 CE prévoit que « la Communauté» soutient la cohésion économique et sociale «par l'action qu'elle mène au travers de [...] la [BEI]». Ces dispositions prouvent que les activités de la BEI s'inscrivent dans la poursuite des mêmes objectifs que ceux de la Communauté. Le respect de ces objectifs s'imposerait en outre à l'égard de toutes les opérations de la BEI, et ce sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que les prêts et garanties sont octroyés à l'aide de fonds provenant du budget communautaire ou du Fonds européen de développement, d'une part, ou de fonds propres empruntés par la BEI sur les marchés des capitaux, d'autre part.

    La Commission observe, en outre, i) que, en vertu des statuts, il lui appartient de donner un avis sur les demandes de prêt ou de garantie (70), et qu'en cas d'avis négatf, le conseil d'administration de la BEI ne peut accorder le prêt ou la garantie qu'à l'unanimité (71); ii) que, bien que les activités du comité de direction de la BEI soient soumises aux contrôles internes du conseil d'administration (72) et à un comité chargé de vérifier les comptes de la BEI (73), la Cour des comptes a certains pouvoirs à l'égard de la BEI, dans les conditions prévues à l'article 248, paragraphe 3, CE; iii) que la BEI relève du contrôle de la Cour de justice en vertu, notamment, de l'article 237 CE, et v) qu'il existe une pratique législative consistant à rendre applicable à la BEI des dispositions d'application générale (74).

    Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la Commission estime que la BEI fait partie intégrante du cadre communautaire. Il ne s'agit pas d'une organisation indépendante de la Communauté européenne, mais d'un organisme de la Communauté dont l'action s'inscrit dans le cadre - et contribue à la réalisation - des objectifs de la Communauté, et qui est soumis aux dispositions des actes de nature générale adoptés par le législateur communautaire.

    Enfin, la Commission note que la BEI n'a, en tout état de cause, pas démontré en quoi le pouvoir de l'OLAF d'effectuer des enquêtes internes serait concrètement susceptible d'empêcher la BEI d'accomplir ses missions particulières. Le rôle de l'OLAF, tel que prévu par les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, est uniquement d'établir les faits susceptibles de constituer un cas de fraude, et il n'a rien à voir avec les opérations bancaires de la BEI. Ainsi, l'OLAF n'est pas plus capable de s'ingérer dans les activités de la BEI que ne le sont le propre service d'audit de la BEI (75), son comité de vérification des comptes ou la Cour des comptes.

    Les arguments de la BEI doivent, ainsi que le soulignent la Commission et les intervenants, être appréciés à la lumière de la jurisprudence de la Cour. L'arrêt Commission/BEI (76) revêt une importance particulière. Cette affaire a donné à la Cour l'occasion de se pencher sur le statut constitutionnel de la BEI au sein du système du traité. Il s'agissait de savoir si les impôts acquittés par les employés de la BEI devaient être perçus au profit de la BEI ou de la Communauté. Alors qu'il était à peu près clair que les dispositions fiscales en question devaient se comprendre comme signifiant que l'impôt devait être versé à la Communauté, la BEI avait soutenu qu'elle n'était «ni une institution ni un service des Communautés mais qu'elle jouit à l'égard de celles-ci d'une place autonome de par son statut juridique, sa composition et sa structure institutionnelle ainsi que par la nature et l'origine de ses ressources qui ne doivent rien au budget des Communautés» (77).

    Sur ce point, la Cour a jugé qu'«il est vrai que la Banque est dotée, en vertu de l'article [266 CE], d'une personnalité juridique distincte de celle de la Communauté et qu'elle est gérée et administrée par ses propres organes selon les règles de son statut. Pour s'acquitter des tâches qui lui sont confiées par l'article [267 CE], la Banque doit être en mesure d'agir en toute indépendance sur les marchés financiers, à l'instar de toute autre banque. En effet, le financement de la Banque n'est pas assuré par un budget, mais par ses ressources propres, notamment par le capital versé par les États membres, d'une part, et par des fonds empruntés sur le marché financier, d'autre part. Enfin, la Banque établit un bilan annuel ainsi qu'un compte de pertes et profits qui sont vérifiés chaque année par le conseil des gouverneurs. Toutefois, la reconnaissance à la Banque d'une telle autonomie fonctionnelle et institutionnelle n'a pas pour conséquence de la détacher totalement des Communautés et de l'exempter de toute règle du droit communautaire. En effet, il ressort notamment de l'article 130 du traité que la Banque est destinée à contribuer à la réalisation des objectifs de la Communauté et qu'elle s'inscrit donc, en vertu du traité, dans le cadre communautaire. La position de la Banque est dès lors ambivalente en ce sens qu'elle est caractérisée par une indépendance quant à la gestion de ses affaires, notamment dans le domaine des opérations financières, d'une part, et par un lien étroit avec la Communauté quant à ses objectifs, d'autre part. Il est tout à fait compatible avec ce caractère ambivalent que les dispositions généralement applicables à l'imposition du personnel au niveau communautaire soient également valables pour le personnel de la Banque. Cette constatation est notamment vraie à l'égard de la règle selon laquelle l'impôt litigieux est perçu au profit du budget des Communautés. En effet, cette affectation n'est pas susceptible, contrairement aux allégations du conseil des gouverneurs, de mettre en cause l'autonomie fonctionnelle et la réputation de la Banque en tant qu'organisme indépendant sur les marchés financiers dès lors que le capital et la gestion même de la Banque n'en sont pas affectés» (78).

    Il convient également de se référer à l'arrêt SGEEM et Etroy/BEI (79). Dans cette affaire, il s'agissait de savoir si la BEI doit être considérée, pour les besoins des articles 235 CE et 288 CE, comme une institution communautaire susceptible d'engager la responsabilité extra-contractuelle de la Communauté. La Cour a jugé que «la Banque constitue un organisme communautaire institué par le traité (arrêt du 15 juin 1976, Mills/BEI, point 14, 110/75, Rec. p. 955) [(80)]. Elle est destinée à contribuer à la réalisation des objectifs de la Communauté et s'inscrit donc, en vertu du traité, dans le cadre communautaire (arrêt du 3 mars 1988, Commission/BEI, point 29, 85/86, Rec. p. 1281). Il s'ensuit que les actes et omissions dont la Banque a pu se rendre coupable à l'égard des requérants dans la mise en oeuvre du contrat de financement en question sont imputables à la Communauté, conformément aux principes généraux communs aux États membres visés par l'article [288 CE]» (81).

    Le raisonnement de la Cour dans ces arrêts démontre, à notre avis, deux choses.

    Tout d'abord, la BEI doit être considérée comme un organisme communautaire faisant partie intégrante du cadre communautaire. Cette conclusion est étayée par les arguments avancés par la Commission dans la présente affaire et par les considérations suivantes. Le lien fonctionnel étroit entre les activités de la BEI et les objectifs de la Communauté est confirmé par les termes de l'article 9 CE, en vertu duquel la BEI «agit dans les limites des attributions qui lui sont conférées par le présent traité et les statuts qui lui sont annexés», et de l'article 104, paragraphe 11, CE, en vertu duquel le Conseil peut «inviter la [BEI] à revoir sa politique de prêts à l'égard» d'un État membre qui ne respecte pas les conditions, imposées dans le protocole sur la procédure concernant les déficits excessifs (82), concernant l'importance de son déficit public. Ce lien se traduit en outre dans les dispositions qui envisagent soit une coopération entre la BEI et la Commission, soit une participation active de la Commission aux travaux de la BEI (83). Ainsi, en vertu de l'article 11, paragraphe 2, des statuts, la Commission désigne un administrateur et un suppléant au conseil d'administration de la BEI (84), et l'article 17 des statuts prévoit que, à la requête de la Commission, ou d'office, le conseil des gouverneurs interprète ou complète les directives qu'il a arrêtées aux termes de l'article 9 des statuts.

    Ensuite, en raison de ce lien fonctionnel étroit entre la BEI et la Commission, le législateur communautaire est compétent pour adopter des mesures applicables à la BEI de la même manière qu'aux autres institutions, organismes ou organes. Cette compétence est toutefois limitée en ce sens que l'application de telles mesures à la BEI ne doit pas mettre en cause l'autonomie fonctionnelle et la réputation de la BEI en tant qu'organisme indépendant sur les marchés financiers.

    La question est alors de déterminer si l'application à la BEI des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 mettrait en cause son autonomie fonctionnelle ou sa réputation sur les marchés financiers.

    Nous sommes d'accord avec la Commission pour dire que la BEI n'a pas expliqué en quoi l'exercice des pouvoirs de l'OLAF en vertu des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 pourrait en pratique affecter ou constituer une ingérence dans son pouvoir de décision autonome en matière de demandes de prêts et de garanties. Et, à notre avis, elle aurait été bien en peine de le justifier. Comme nous l'avons dit dans nos conclusions dans l'affaire Commission/BCE (85), les dispositions de ces règlements garantissent à l'OLAF un degré élevé d'indépendance fonctionnelle bien qu'il soit intégré dans les structures administratives et budgétaires de la Commission. Il existe par conséquent, à notre avis, très peu de risques, voire aucun, que l'OLAF puisse être utilisé par la Commission, ou par quelque autre institution ou organisme, en tant qu'instrument pour exercer une pression politique sur les membres des organes dirigeants de la BEI.

    Ce point de vue est conforté, comme le note le Conseil, par le fait que l'OLAF n'exercerait pas un contrôle continu sur la gestion financière de la BEI; il agit seulement dans les cas où il existe, exceptionnellement, des motifs de suspecter que des fraudes ou autres irrégularités ont été commises au sens du règlement n° 1073/1999. Et même alors, l'OLAF n'a pas le pouvoir d'engager une procédure judiciaire lorsqu'une enquête interne révèle l'existence de fraudes ou d'autres irrégularités. Les fonctions essentielles de l'OLAF sont, comme le rappelle la Commission, i) d'enquêter sur les suspicions de fraude et d'irrégularités, notamment en analysant les informations qui lui sont transmises par les institutions, organismes et particuliers (86), en effectuant des vérifications sur place (87), en contrôlant la comptabilité ou les documents (88), en demandant des informations orales aux membres et dirigeants des institutions et organismes de la Communauté (89); ii) d'établir des rapports précisant les faits constatés, le cas échéant le préjudice financier, et les conclusions de l'enquête, y compris les recommandations du directeur de l'Office sur les suites qu'il convient de donner, et iii) de transmettre ces rapports et tout document utile y afférent à l'institution, à l'organe ou à l'organisme concerné (90) et - pour les faits susceptibles de poursuites pénales - aux autorités judiciaires des États membres (91). Ainsi, c'est à la BEI qu'il incombe de «donne[r] aux enquêtes internes les suites, notamment disciplinaires et judiciaires, que leurs résultats appellent et [d']informe[r] le directeur de l'Office, dans un délai que celui-ci aura fixé dans les conclusions de son rapport, des suites données aux enquêtes» (92).

    En outre, comme le font observer la Commission et le gouvernement néerlandais, la BEI pourrait, dans la décision d'exécution à adopter en vertu de l'article 4, paragraphe 1, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, exclure l'accès à des informations qui présentent une importance particulière pour sa capacité d'accomplir ses tâches de façon indépendante (93). Dans ce contexte, on peut noter que, si la Commission, le Conseil et le Parlement européen ont adopté des décisions en application de l'article 4 sans prévoir de telles exceptions (94), la Cour de justice a adopté une décision (95) qui - compte tenu de ses missions, de son indépendance et du secret de ses délibérations (96) tels que définis dans le traité et les statuts de la Cour (97) - exclut du champ des enquêtes internes les documents et informations détenus ou créés dans le cadre d'une procédure judiciaire (98).

    Reste à savoir si l'application à la BEI des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 mettrait en cause sa réputation et par conséquent sa cote de crédit et sa capacité à collecter des fonds à des taux avantageux sur les marchés internationaux des capitaux (99).

    La BEI suggère, si nous comprenons bien son argumentation, que tel pourrait être le cas parce que les banques commerciales sont généralement soumises au contrôle prudentiel mais non à des enquêtes antifraude de la part d'organismes tels que l'OLAF.

    En l'absence d'explications plus détaillées, cet argument ne peut être retenu. En tout état de cause, nous ne sommes pas convaincu que la soumission de la BEI au même système de contrôle externe, spécialisé et indépendant, pour ses agissements financiers, que les autres institutions et organismes communautaires entamerait sa position ou sa réputation sur les marchés financiers. En effet, il nous semble plutôt que la BEI pourrait subir un important préjudice si les accusations de fraude dirigées contre des membres de sa direction ou de son personnel ne pouvaient être lavées grâce à une enquête effectuée par un organe extérieur à la BEI elle-même.

    À la lumière de ces considérations, nous concluons que l'application aux activités de la BEI des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 n'est pas contraire à son indépendance telle que prévue par le traité et par ses statuts et telle que reconnue par la jurisprudence de la Cour de justice.

Sur la base légale du règlement n° 1073/1999

    La BEI fait valoir que le règlement n° 1073/1999 n'est pas valable dans la mesure où il a été adopté sur la base de l'article 280 CE. Son argumentation sur ce point se subdivise en deux parties.

    D'abord la BEI affirme que la notion d'«intérêts financiers de la Communauté» employée par l'article 280 CE doit se comprendre essentiellement comme équivalente à l'idée de «budget» de la Communauté mentionnée à l'article 268 CE. Il s'ensuit que l'article 280 CE n'autorise la Communauté à prendre des mesures que dans le but de protéger la Communauté contre la fraude ou les autres activités illégales impliquant une perte de recettes ou une augmentation des dépenses pour le budget de la Communauté. Le capital et le budget de la BEI sont, cependant, distincts du budget de la Communauté. L'article 280 CE ne peut donc pas constituer une base légale valable pour les mesures destinées à combattre la fraude au sein de la BEI. Selon la BEI, ce point de vue est conforté par les termes de l'article 248, paragraphe 3, CE qui prévoient que la Cour des comptes n'est compétente pour contrôler les activités de la BEI que s'il s'agit d'effectuer le contrôle des «recettes et des dépenses communautaires gérées par la Banque», et en vertu de la pratique législative (100).

    Ensuite, la BEI souligne que l'article 208, paragraphe 4, CE confère à la Communauté uniquement le pouvoir de prendre «les mesures nécessaires» pour combattre la fraude «dans les États membres», et que, selon l'article 280, paragraphe 4, CE, les mesures adoptées ne doivent pas concerner le «droit pénal national». Le règlement n° 1073/1999 est par conséquent nul dans la mesure où il étend les pouvoirs de l'OLAF aux institutions et organismes de la Communauté européenne.

    Ces arguments - qui sont très comparables à ceux qu'a invoqués le défendeur dans l'affaire Commission/BCE - ne peuvent être admis.

    Comme nous l'avons expliqué dans nos conclusions dans cette affaire (101), une analyse détaillée du libellé, de la structure et de la genèse de l'article 280 CE montre i) que le législateur a le pouvoir d'adopter des mesures destinées à prévenir la fraude et les autres activités illégales qui, même si elles ne présentent pas de lien direct avec le budget de la Communauté, sont susceptibles de porter atteinte aux intérêts financiers de la Communauté au sens large en affectant négativement ses actifs et ii) que de telles mesures peuvent viser à combattre la fraude ou les autres irrégularités qui se produisent au sein des institutions et organismes de la Communauté.

    La BEI est, comme nous l'avons rappelé ci-dessus (102), un organisme qui fait partie intégrante du cadre communautaire. La BEI étant un organisme communautaire, ses intérêts financiers font à notre avis partie des intérêts financiers de la Communauté. Le fait qu'il y ait, comme le fait observer la BEI, une certaine distinction entre les finances de la BEI et celles du reste de la Communauté et que son capital ne provienne pas du budget de la Communauté n'est donc pas décisif.

    Nous concluons par conséquent que la validité du règlement n° 1073/1999 n'est pas affectée par le fait qu'il a été adopté sur la base de l'article 280 CE.

Sur la base légale du règlement n° 1074/1999

    Selon la BEI, le règlement n° 1074/1999 n'est pas valable dans la mesure où il a été adopté sur la base de l'article 203 EA. Elle fait valoir deux arguments principaux à cet égard.

    En premier lieu, les mesures adoptées en vertu du traité Euratom ne peuvent s'appliquer à la BEI, car celle-ci n'est citée nulle part dans ce traité et n'a pas de lien organique avec l'Euratom. Dans ce contexte, la BEI fait observer qu'il n'existe pas de disposition équivalente à l'article 237 CE (qui, rappelons-le, donne à la Cour de justice le pouvoir de contrôler les actes de la BEI) dans le traité Euratom, et que l'article 146 CE (qui est en substance identique à l'article 230 CE) ne fait pas référence aux mesures adoptées par la BEI. Le fait que la BEI gère, sur mandat de la Commission, certains prêts contractés au nom d'Euratom ne peut pas être assimilé à un lien organique avec l'Euratom.

    Elle fait valoir, en second lieu, que l'article 203 EA ne constitue pas une base légale adéquate pour le règlement n° 1074/1999. Étant donné que le règlement n° 1073/1999 a été adopté sur la base de l'article 280 CE, et qu'il a été jugé nécessaire d'insérer l'article 280, paragraphe 4, CE dans le traité afin de donner au Conseil les pouvoirs nécessaires pour adopter ce règlement, il en découle que le législateur n'aurait pas pu l'adopter sur la base de l'article 308 CE. Le législateur ne pouvait pas, ensuite, adopter le règlement n° 1074/1999 sur la base de l'article 203 EA qui est l'équivalent de l'article 308 CE. De plus, des mesures ne peuvent être adoptées sur la base de l'article 203 EA que si elles apparaissent « nécessaire[s] pour réaliser l'un des objets de la Communauté». Le titre I du traité Euratom, intitulé «Missions de la Communauté», évoque la prévention de la fraude (103) et, si l'article 183 A EA, qui correspond à l'article 209 A CE, se réfère à la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de la Communauté, cette disposition n'impose des obligations qu'aux États membres et ne prévoit pas l'adoption d'actes communautaires. On ne peut pas non plus déduire de cette disposition que la prévention de la fraude constitue l'un des objectifs d'Euratom au sens de l'article 230 EA. Enfin, les pouvoirs d'enquête étendus conférés à l'OLAF par le règlement n° 1074/1999 et les obligations concomitantes qu'il cherche à imposer à la BEI ne peuvent être considérés comme des «mesures appropriées» au sens de l'article 203 EA.

    La Commission réfute ces arguments. Elle souligne que le règlement n° 1074/1999 est pertinent dans la présente affaire pour la seule raison que la BEI effectue des opérations, en agissant sur mandat de la Commission, qui relèvent du domaine du traité Euratom (104). Lorsqu'elle agit dans ce domaine, la BEI est tenue de se conformer aux conditions et modalités applicables à ces opérations en vertu du traité Euratom et aux mesures prises en application de ce traité. Cette obligation n'a rien à voir avec un lien organique entre la BEI et l'Euratom.

    L'article 203 EA constitue en outre la base légale appropriée pour le règlement n° 1074/1999 de la même façon que l'article 235 du traité CE (devenu article 308 CE) aurait fourni au règlement n° 1073/1999 une base légale appropriée antérieurement à l'insertion de l'article 280, paragraphe 4, CE dans le traité par le traité d'Amsterdam.

    Nous ne pouvons pas admettre le premier argument de la BEI. Le fait qu'un organisme ne soit pas expressément mentionné dans le traité Euratom ou n'ait pas de liens organiques avec celui-ci ne peut en soi s'opposer à ce que le législateur adopte des mesures en vertu de ce traité qui produisent des effets à l'égard de l'organisme en question. Dans ce contexte, il convient de noter que le législateur peut réglementer le comportement non seulement des États membres, mais aussi d'organismes au sein des États membres et de particuliers même si aucun d'eux n'est expressément mentionné dans le traité et n'a de lien organique avec lui. Il existe, bien entendu, des limites à l'exercice de ce pouvoir dans la mesure où les mesures adoptées en vertu du traité Euratom ne doivent pas être contraires aux dispositions de ce traité, ni d'aucun traité communautaire, telles que les dispositions qui confèrent à l'organisme certains privilèges (un droit de consultation) ou immunités (un certain degré d'indépendance opérationnelle). L'affirmation de la BEI sur le caractère contraire à son indépendance du règlement n° 1074/1999 a toutefois déjà été examinée ci-dessus.

    Le deuxième argument de la BEI, qui consiste à dire que l'article 203 EA ne constituait pas la base légale appropriée pour le règlement n° 1074/1999, ne saurait davantage, à notre avis, être retenu.

    Tout d'abord, le fait que le règlement n° 1073/1999 soit fondé sur l'article 280, paragraphe 4, CE n'est pas pertinent lorsqu'il s'agit d'apprécier le champ d'application de l'article 203 EA. Aucun élément dans les documents fournis à la Cour, dans les travaux préparatoires du traité d'Amsterdam ou dans la genèse législative du règlement n° 1073/1999 ne permet de penser que l'on a estimé nécessaire, ainsi que l'affirme la BEI, d'insérer l'article 280, paragraphe 4, CE dans le but de donner au Conseil les pouvoirs nécessaires pour adopter ce règlement. Dans ce contexte, il peut être utile de rappeler que la Commission avait proposé de créer l'OLAF et d'arrêter en détail ses règles de fonctionnement au moyen d'un règlement fondé sur l'article 308 CE (105). Si la Commission a déclaré dans l'exposé des motifs qu'elle avait l'intention de présenter une proposition modifiée fondée sur l'article 280, paragraphe 4, CE postérieurement à l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam (106), il semble qu'elle n'ait jugé cela nécessaire que parce que l'article 280, paragraphe 4, CE offre une base légale plus spécifique qui exclut le recours à la disposition plus générale que constitue l'article 308 CE (107).

    Ensuite, la Cour a admis (108), par référence à l'article 209 A du traité CE (devenu, après modification, article 280 CE), que «la protection des intérêts financiers de la Communauté [...] constitue un objectif autonome qui, dans le cadre du système du traité [CE], a trouvé sa place dans le titre II (dispositions financières) de la cinquième partie relative aux institutions de la Communauté» (109). C'est ainsi que la Cour a jugé que «[é]tant donné que l'article 209 A du traité, dans sa version applicable lors de l'adoption du règlement [(CE) n° 515/97 du Conseil, du 13 mars 1997, relatif à l'assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue d'assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole] [(110)] indiquait le but à atteindre, sans toutefois conférer à la Communauté la compétence pour créer un système tel que celui en cause, le recours à l'article 235 du traité était justifié» (111). L'article 183 A EA est, comme la BEI le relève elle-même, identique à l'article 209 A du traité CE. La protection des intérêts financiers de la Communauté doit par conséquent être considérée comme l'un des objectifs du traité Euratom au sens de l'article 203 EA.

    En troisième lieu, la question de savoir si le règlement n° 1074/1999 constituait une mesure appropriée pour atteindre cet objectif relève, à notre avis, de la proportionnalité de la mesure; et c'est sur cette question que nous allons maintenant nous pencher.

Sur la proportionnalité

    La BEI soutient que l'application des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 à ses affaires va à l'encontre du principe de proportionnalité.

    Elle constate que les règlements confèrent à l'OLAF de larges pouvoirs et obligent les institutions, organismes et personnels de la Communauté à informer l'OLAF et à coopérer activement avec lui. Ainsi, en vertu de l'article 5, paragraphe 2, le directeur de l'OLAF peut décider d'ouvrir une enquête interne de sa propre initiative sans, selon la BEI, avoir à expliquer les motifs et faits justifiant sa décision. L'article 4 confère à l'OLAF un accès sans préavis et sans délai à toute information détenue par les institutions, organes et organismes ainsi qu'aux locaux de ceux-ci, et lui permet de demander des informations orales. L'article 4, paragraphe 6, impose aux membres, dirigeants, fonctionnaires et autres agents des institutions, organes et organismes l'obligation de coopérer avec l'OLAF et de l'informer, obligation qui se trouve complétée par les articles 7 et 6, paragraphe 6, en vertu desquels les institutions, organes et organismes communiquent sans délai à l'OLAF toute information relative à d'éventuels cas de fraude ou de corruption, ou à toute autre activité illégale, lui transmettent les documents pertinents et veillent à ce que leurs membres, dirigeants et personnels assistent l'OLAF dans l'accomplissement de sa mission.

    Selon la BEI, ces dispositions accordent à l'OLAF un droit d'accès illimité, sans préavis ni autorisation de l'institution ou organisme concerné, et le droit de saisir des documents de toute nature. Ces larges pouvoirs sont incompatibles avec les activités de la banque et avec sa nature même d'établissement financier soumis au système de contrôle prudentiel applicable aux banques, et sont, par conséquent, disproportionnés.

    Les pouvoirs de l'OLAF excèdent, en outre, ce qui est nécessaire car des mesures appropriées et efficaces, visant à combattre la fraude, existent déjà au sein de la BEI. D'une part, l'article 14, paragraphe 1, des statuts prévoit qu'un comité composé de trois membres nommés par le conseil des gouverneurs en raison de leur compétence vérifie chaque année la régularité des opérations et des livres de la BEI. En vertu de l'article 14, paragraphe 2, des statuts, la mission de ce comité - connu sous le nom de comité de vérification - est de confirmer que le bilan et le compte de profits et pertes sont conformes aux écritures comptables et qu'ils reflètent exactement, à l'actif comme au passif, la situation de la banque. Les règles de procédure de la BEI prévoient que le comité de vérification, qui doit également recevoir le concours de tous les départements et services de la BEI, peut demander à avoir accès à tous les documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission (112). Ce comité de vérification a également recours à des auditeurs externes qu'il désigne après consultation du conseil d'administration, et est assisté d'un observateur nommé par le conseil des gouverneurs (113).

    D'autre part, la BEI dispose, depuis 1984, d'un service d'audit interne qui examine et évalue l'adéquation et l'efficacité des services et procédures internes à la BEI (114). Ce service peut, selon la BEI, accéder sans limite à tous les documents et personnes au sein de la banque et peut effectuer des missions spéciales, y compris des enquêtes en cas de suspicion de fraude (115). Le General Office Procedures Manual de la BEI (116) définit la procédure qui doit être suivie au cours de ces enquêtes. Selon les explications de la BEI, le manuel prévoit que le chef de l'audit interne doit effectuer une enquête préliminaire chaque fois qu'un cas de fraude est découvert ou soupçonné et faire un rapport avec ses conclusions et ses recommandations au directeur des ressources humaines ou, le cas échéant, au président du secrétariat général de la BEI. Sur la base de ce rapport, qui est communiqué au comité de vérification et aux auditeurs externes de la BEI, le président du secrétariat général peut décider d'engager une action disciplinaire ou d'effectuer une enquête plus approfondie. À cet effet, le président peut décider de renforcer les ressources de l'audit interne en demandant le concours d'auditeurs externes, d'experts ou des forces de police nationale. De plus, la BEI considère que tous les membres du personnel qui ont connaissance d'agissements susceptibles de constituer une fraude sont tenus d'en informer le directeur des ressources humaines ou le chef de l'audit interne.

    En troisième lieu, les activités de la BEI lorsqu'elle gère des dépenses ou recettes de la Communauté sont examinées par la Cour des comptes en vertu de l'article 248, paragraphe 3, CE conformément aux procédures définies dans l'accord entre la BEI, la Commission et la Cour des comptes prévu par cette disposition (117). La BEI affirme aussi, sans autre explication, qu'elle a mis en oeuvre les recommandations contenues dans le Framework for internal systems in banking organisations, adopté par le Basel Committee on Banking Supervision en septembre 1998.

    Outre ces éléments, la BEI souligne que l'obligation pour son personnel d'agir légalement et de s'abstenir de tout comportement susceptible de constituer une fraude est clairement énoncée dans les règlements de la BEI. Elle fait observer, en particulier, qu'en vertu du règlement du personnel de la BEI (118) aucun membre du personnel ne peut solliciter ou accepter des avantages de source extérieure en relation avec son appartenance à la BEI (119), et que des sanctions disciplinaires peuvent être infligées en cas de violation de cette règle (120). Par ailleurs, le code de conduite de la BEI (121) précise que, pour respecter une éthique professionnelle rigoureuse, les membres de la BEI doivent éviter toute situation pouvant présenter un conflit d'intérêts (122), sous peine de sanctions disciplinaires éventuelles ou de résiliation de leur contrat (123).

    En réponse à ces arguments, la Commission rappelle que le législateur communautaire a jugé nécessaire, afin de renforcer la lutte contre la fraude, de créer un service unique, indépendant et spécialisé pour toutes les institutions, tous les organismes ou organes de la Communauté. Le fait que, ce faisant, le législateur n'ait pas tenu compte de l'existence des divers contrôles internes et externes pour chaque institution, organisme, organe ou agence ne saurait être considéré comme contraire au principe de proportionnalité. L'existence de ces divers contrôles affectera certainement la manière dont les enquêtes internes sont effectuées en pratique, mais ne représente pas un argument de nature à exclure entièrement l'application du règlement n° 1073/1999.

    Selon la Commission, l'indépendance de la BEI et son statut de banque ne rendent pas non plus l'application du règlement n° 1073/1999 excessive. Il s'agit de questions qui peuvent et doivent être résolues dans le cadre de la décision que la BEI doit adopter en application de l'article 4, paragraphes 1 et 6, du règlement.

    En outre, la BEI surestime l'étendue des pouvoirs de l'OLAF au titre des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999. S'agissant de l'obligation de motiver les décisions d'ouvrir une enquête, la Commission attire l'attention sur l'article 6, paragraphe 3, des règlements qui prévoit que: «[l]es agents de l'Office désignés pour effectuer une enquête doivent être munis, pour chaque intervention, d'un mandat écrit délivré par le directeur, indiquant l'objet de l'enquête» (124). Et l'article 4 des règlements ne donne pas à l'OLAF, comme semble le suggérer la BEI, le pouvoir de retirer des documents originaux des institutions ou organismes soumis aux enquêtes; il peut seulement en prendre des copies et prendre les mesures nécessaires, par exemple dans le cadre de la coopération avec l'institution ou l'organisme concerné, pour s'assurer que les documents sont conservés en lieu sûr. Enfin, l'OLAF - contrairement à ce que suggère la BEI - est toujours tenu d'informer l'institution ou l'organisme concerné lorsqu'il effectue des enquêtes internes.

    Ces arguments appellent deux remarques préliminaires.

    D'abord, la question de savoir si les pouvoirs de l'OLAF résultant des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 sont compatibles avec l'indépendance, le statut de banque et les missions de la BEI a déjà été examinée ci-dessus. Il n'y a, à notre avis, aucune raison de revenir sur cette analyse par le biais de l'examen du principe de proportionnalité. Il suffit de dire que nous sommes d'accord avec la Commission pour affirmer que la compatibilité du statut et des missions spécifiques de la BEI avec les pouvoirs de l'OLAF constitue une question, ou un ensemble de questions, qui doit être résolue à l'issue d'un dialogue constructif entre les parties, conformément au principe de coopération loyale (125), dans la décision qui devra être adoptée par la BEI en vertu de l'article 4, paragraphes 1 et 6, du règlement n° 1073/1999.

    Ensuite, il n'appartient pas à la Cour de justice de substituer son appréciation à celle du législateur communautaire à l'occasion du contrôle de la légalité d'actes de nature générale. La Cour n'acceptera d'annuler de tels actes que s'il est clairement établi qu'ils sont, en totalité ou sous certains aspects, disproportionnés. Le problème qui se pose dans cette affaire n'est donc pas de savoir si les différents contrôles internes auxquels est soumise la BEI sont appropriés, mais plutôt si, en prévoyant un système général de contrôle externe et indépendant, et en accordant à l'OLAF certains pouvoirs d'enquête, le législateur est manifestement allé au-delà de ce qui est nécessaire pour combattre la fraude.

    L'application aux activités de la BEI du cadre général prévu par les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 n'est pas, à notre avis, disproportionnée au sens ainsi défini. Si les règles, codes et procédures internes qu'invoque la BEI peuvent fournir certains garde-fous contre la fraude et autres irrégularités, le législateur a pu, à notre sens, estimer qu'un contrôle par un organisme externe et indépendant serait plus efficace et, ce qui est peut-être plus important, serait perçu comme plus efficace. Dans ce contexte, il convient de noter que la mission des auditeurs diffère fondamentalement par sa nature de la mission et des contrôles qui sont confiés à l'OLAF. On ne peut donc pas soutenir que le système prévu par les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 est inutile au simple motif que les comptes de la BEI sont vérifiés par les auditeurs externes, puis par le comité de vérification et examinés par la Cour des comptes.

    La BEI n'a pas non plus démontré que certains aspects particuliers des pouvoirs conférés par les règlements à l'OLAF sont excessifs ou superflus pour l'accomplissement de ses missions. Le pouvoir du directeur de l'OLAF d'ouvrir des enquêtes de sa propre initiative, en vertu de l'article 6, représente à notre avis une condition fondamentale pour que l'OLAF puisse fonctionner efficacement en réponse aux informations qui lui sont adressées par des membres du personnel, et de façon pleinement indépendante de la Commission et des autres institutions et organismes.

    Il en va de même, à notre avis, des pouvoirs conférés par l'article 4 des règlements. Si l'OLAF ne pouvait avoir accès aux documents et informations, en prendre copie, s'assurer que ces données et pièces soient mises au besoin en lieu sûr, et demander des informations orales, sa capacité à déceler les fraudes et autres irrégularités serait extrêmement limitée. Les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 cherchent à éviter que ces pouvoirs ne soient exercés de façon déraisonnable; selon l'article 4, paragraphe 1, et le dixième considérant du préambule des règlements, les pouvoirs de l'OLAF doivent s'exercer dans le respect du traité, des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du protocole sur les privilèges et immunités de la Communauté européenne et des statuts du personnel (126). Qui plus est, l'OLAF sera, comme le souligne le Conseil, obligé de mener ses enquêtes dans le respect des principes généraux du droit communautaire, y compris le principe de proportionnalité.

    Enfin, il y a lieu de rappeler que la Commission avait proposé à l'origine de créer l'OLAF au moyen d'un règlement communautaire et de définir en détail les modalités de conduite des enquêtes internes dans tous les institutions, organismes ou organes de la Communauté (127). Contrairement à cette proposition, les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 ne fixent que les règles générales de procédure et les modalités générales des enquêtes internes et prévoient l'adoption de dispositifs plus détaillés dans des décisions prises en vertu de l'article 4, paragraphes 1 et 6. Nous partageons l'avis du Conseil: ce système - qui permet de tenir compte de la particularité des missions et situations de chaque institution, organisme ou organe - préserve un juste équilibre entre les exigences de l'autonomie fonctionnelle des institutions, et l'efficacité de la prévention de la fraude (128).

    Nous en concluons que les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 ne sont pas contraires au principe de proportionnalité pour ce qui est de leur application à la BEI.

Sur l'obligation de motivation résultant des articles 253 CE et 162 EA

    Cela nous amène au dernier grief de nullité invoqué par la BEI dans cette affaire. Elle affirme que les règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 ne satisfont pas à l'obligation de motivation imposée par les articles 253 CE et 162 EA, dans la mesure où i) ils ne citent pas les mesures adoptées par la BEI pour combattre la fraude; ii) ils n'expliquent pas en quoi ces mesures seraient insuffisantes, inefficaces ou inadaptées, et iii) ils ne démontrent pas pour quelle raison il serait nécessaire d'accorder à l'OLAF les vastes pouvoirs d'enquête prévus, notamment, par les articles 4, paragraphe 2, et 5, paragraphe 2, ni pourquoi il faudrait que les institutions, leurs organes et leur personnel coopèrent avec l'OLAF, ainsi que le prévoient les articles 4, paragraphe 6, 6, paragraphe 6, et 7, paragraphes 1 à 3, des règlements.

    La Commission conteste ce grief. Les différentes règles et les différents codes internes cités par la BEI dans la présente affaire n'ont pas été présentés au législateur pendant la procédure qui a conduit à l'adoption des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999. On ne voit pas comment, dans ce cas, le législateur aurait pu les prendre en compte ou même s'y référer dans le préambule. Quoi qu'il en soit, l'omission d'une telle référence ne peut équivaloir à une violation des articles 253 CE et 162 EA.

    Il est de jurisprudence constante que la motivation exigée par l'article 253 CE doit être «adaptée à la nature de l'acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l'institution, auteur de l'acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d'exercer son contrôle. L'exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l'espèce, notamment du contenu de l'acte, de la nature des motifs invoqués et de l'intérêt que les destinataires ou d'autres personnes concernées directement et individuellement par l'acte peuvent avoir à recevoir des explications» (129). Toutefois, «[i]l n'est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d'un acte satisfait aux exigences de l'article [253 CE] doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l'ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée» (130). Plus spécifiquement, la Cour a jugé que, si les règlements doivent faire ressortir l'essentiel de l'objectif poursuivi par l'institution, le législateur n'est pas tenu de spécifier les différents éléments de fait ou de droit, parfois très nombreux et complexes, qui font l'objet des règlements, ni de préciser les motifs spécifiques de chacun des choix techniques opérés (131).

    Il résulte clairement de cette jurisprudence que, lorsque le législateur adopte un règlement dans le but d'atteindre un certain objectif, il n'est pas exigé qu'il mentionne en détail les différentes mesures qui peuvent déjà avoir été adoptées par les institutions et organismes concernés, ni qu'il explique de façon approfondie en quoi ces mesures sont jugées moins efficaces ou appropriées. Le fait qu'une institution ou un organisme visé par un règlement ait formulé des objections au cours de la procédure législative n'implique pas, d'ailleurs, l'obligation de répondre, dans l'acte adopté, à tous les arguments invoqués. Et l'on ne peut s'attendre à ce que le législateur indique en détail les raisons de chaque pouvoir particulier accordé à un organisme ou à un organe en vue d'atteindre l'objectif du règlement. En général, il suffit que l'objectif poursuivi soit clairement indiqué, et que la situation générale qui a conduit à l'adoption du règlement soit exposée (132), accompagnée, peut-être, d'une explication sur le contenu essentiel de ses dispositions.

    Les préambules des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999 font clairement apparaître le but poursuivi (133), indiquent le champ d'application matériel (134) et personnel (135) des pouvoirs d'enquête confiés à l'OLAF, résument le contenu essentiel des dispositions adoptées (136), et précisent les limites légales de l'exercice de ces pouvoirs (137). Au surplus, dans le dernier considérant, le législateur a indiqué que «le fonctionnement d'un tel Office est apte à réaliser une lutte plus efficace contre la fraude, la corruption et toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés et qu'il respecte donc également le principe de la proportionnalité». Il ne fait donc pas de doute, à notre avis, que les règlements satisfont à l'obligation de motivation prévue par les articles 253 CE et 162 EA.

Conclusion

    À la lumière des observations qui précèdent, nous sommes d'avis que la Cour de justice devrait:

1)    annuler la décision du 10 novembre 1999 du comité de direction de la Banque européenne d'investissement relative à la coopération avec l'Office européen de lutte antifraude (OLAF);

2)    condamner la BEI à supporter les dépens de la Commission des Communautés européennes;

3)    dire que le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne et le royaume des Pays-Bas conserveront la charge de leurs propres dépens.


1: -     Langue originale: l'anglais.


2: -     La décision n'a pas été publiée au Journal officiel, mais a été communiquée à la Commission, au Conseil et au Parlement par lettre du président de la BEI en date du 16 novembre 1999. Un document exposant sommairement les règles et les procédures concernant les enquêtes en cas de fraude présumée à la BEI était également annexé à cet envoi.


3: -     JO L 136, p. 1.


4: -     JO L 136, p. 8.


5: -     C-11/00, pendante devant la Cour.


6: -     Conclusions du 3 octobre 2002.


7: -     Précitées note 6, points 3 à 7.


8: -     Article 280 CE.


9: -     Pour une vue d'ensemble des initiatives prises, voir la communication de la Commission «Protection des intérêts financiers des Communautés - Lutte antifraude: plan d'action pour 2001-2003» [COM (2001) 254 final].


10: -     Règlement (CE, Euratom) n° 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO L 312 p. 1), et les dispositions plus détaillées contenues dans le règlement (Euratom, CE) n° 2185/96 du Conseil, du 11 novembre 1996, relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers des Communautés européennes contre les fraudes et autres irrégularités (JO L 292, p. 2). Ces mesures ont été complétées, en particulier, par la convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO 1995, C 316, p. 49).


11: -     Voir, notamment, le rapport spécial de la Cour des comptes n° 8/98 relatif aux services de la Commission chargés de la lutte contre la fraude, notamment l'unité de coordination de la lutte antifraude (UCLAF), accompagné des réponses de la Commission (présenté en vertu de l'article 188 C, paragraphe 4, deuxième alinéa, du traité CE) (JO 1998, C 230, p. 1).


12: -     Proposition de règlement (CE, Euratom) du Conseil instituant un Office européen d'enquêtes antifraude [COM (1998) 717 final].


13: -     Décision 1999/352/CE, CECA, Euratom de la Commission, du 28 avril 1999, instituant l'Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO L 136, p. 20).


14: -     Des dispositions identiques ont été adoptées pour l'Euratom dans le cadre du règlement n° 1074/1999.


15: -     Accord interinstitutionnel, du 25 mai 1999, entre le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne et la Commission des Communautés européennes relatif aux enquêtes internes effectuées par l'Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO L 136, p. 15, ci-après l'«accord interinstitutionnel»).


16: -     La BEI se réfère à cet égard à la charte de l'audit interne (Internal Audit Charter). Ce document n'a pas fait l'objet de publication.


17: -     Ce document n'a pas été publié.


18: -     Protocole sur les statuts de la Banque européenne d'investissement annexé au traité instituant la Communauté européenne (ci-après les «statuts»).


19: -     Voir note 13.


20: -     Voir note 3.


21: -     Voir note 4.


22: -     Précité note 15.


23: -     Voir note 2.


24: -     Première partie, point 1, de la décision attaquée.


25: -     Première partie, point 2, de la décision attaquée.


26: -     Titre de la deuxième partie.


27: -     La Commission se réfère sur ce point aux arrêts du 15 juin 1976, Mills/BEI (110/75, Rec. p. 955, point 14); du 3 mars 1988, Commission/BEI (85/86, Rec. p. 1281, point 24), et du 2 décembre 1992, SGEEM et Etroy/BEI (C-370/89, Rec. p. I-6211, point 13).


28: -     La Commission cite ici les arrêts Mills/BEI, précité, points 15 à 18, et SGEEM et Etroy/BEI, précité, point 17.


29: -     Arrêt du 23 avril 1986 (294/83, Rec. p. 1339).


30: -     La BEI se réfère aux articles 8 à 13 de ses statuts.


31: -     La BEI précise que cela aurait été possible en vertu des articles 2 et 3 du règlement intérieur de la BEI.


32: -     En vertu des articles 235 CE et 288 CE.


33: -     En vertu de l'article 236 CE.


34: -     Arrêt précité note 29.


35: -     La BEI se réfère à cet égard à l'ordonnance du 26 novembre 1993, Tête e.a./BEI (T-460/93, Rec. p. II-1257, points 17, 18 et 20).


36: -     Arrêt du 30 juin 1993, Parlement/Conseil et Commission (C-181/91 et C-248/91, Rec. p. I-3685, point 14).


37: -     Voir, également en ce sens, Käser, J., «The European Investment Bank: its role and place within the European Community System», Yearbook of European Law, 1984, p. 303, plus et p. 315; Izzo, S., «The juridical nature of the European Investment Bank», Journal of regional policy, 1992, p. 123, p. 128; Dunnett, D., «The European Investment Bank: autonomous instrument of common policy?», Common Market Law Review, 1994, p. 721, p. 735, et Leneuf-Péraldi, F., «Banque européenne d'investissement», Juris-classeur Europe, fascicule 2160, n° 56.


38: -     Voir, sur ce point, Mosconi, F., Commentaire Mégret, vol. 8 (1979), p. 39 et 40, et Marchegiani, G., Commentaire Mégret, vol. 9 (2e éd., 2000), p. 489, qui sont d'avis que le comité de direction a une compétence résiduelle pour adopter les mesures que les statuts ne réservent pas expressément au conseil des gouverneurs ou au conseil d'administration.


39: -     Voir, notamment, arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, Rec. p. 2639), et du 19 mars 1996, Commission/Conseil (C-25/94, Rec. p. I-1469, point 27).


40: -     Voir, par analogie, nos conclusions dans l'affaire Commission/Conseil, précitée note 39, points 46 à 48, concernant les décisions du comité des représentants permanents (Coreper).


41: -     Article 13, paragraphe 3, des statuts.


42: -     Arrêt du 31 mars 1971, Commission/Conseil (22/70, Rec. p. 263, points 39 à 42).


43: -     L'accord européen sur les transports routiers.


44: -     Pour une application de ce principe à une communication de la Commission, voir arrêt du 20 mars 1997, France/Commission (C-57/95, Rec. p. I-1627). Voir aussi arrêt Commission/Conseil, précité note 39, point 29.


45: -     Précité note 29.


46: -     Point 23.


47: -     Ibidem.


48: -     Points 24 et 25. Voir également ordonnance du 6 décembre 1990, Zwartveld e.a. (2/88, Rec. p. I-4405, points 23 et 24).


49: -     Arrêt du 29 mars 1990 (C-62/88, Rec. p. I-1527).


50: -     Point 8 de l'arrêt.


51: -     Article 249 CE et article 161 EA.


52: -     Précitée note 5, points 49 à 50.


53: -     La Commission s'appuie sur la version française du règlement où il est écrit «les enquêtes», et non pas simplement «investigations» (des enquêtes) comme c'est le cas dans la version anglaise.


54: -     Point 87.


55: -     Voir arrêt du 6 mars 1979, Simmenthal/Commission (92/78, Rec. p. 777, point 39).


56: -     Voir, en particulier, Henrion, R., «La banque européenne d'investissement» dans Droit des Communautés européennes, Les Nouvelles (1969), chapitre 11, points 2427 à 2429; D. Dunnett, précité note 37, p. 723 à 725; G. Marchegiani, précité note 38, p. 430 à 433; voir également les conclusions de l'avocat général Mancini dans l'affaire Commission/BEI, précitée note 27, point 11.


57: -     Voir rapport des chefs de délégation aux ministres des Affaires étrangères, comité intergouvernemental créé par la conférence de Messine, du 21 avril 1956 (le rapport Spaak), p. 76 à 82.


58: -     La Banque devait créer «de[s] ressources nouvelles» conformément à l'article 3, sous j), du traité CEE. (Le traité sur l'Union européenne a supprimé et partiellement remplacé cette disposition par l'article 4 B du traité CE, devenu article 9 CE).


59: -     Selon la BEI, les États membres étaient aussi mus par le désir d'éviter qu'une responsabilité délictuelle ne puisse résulter des activités du fonds. On ne sait cependant pas clairement, au vu de l'historique, si cette préoccupation a joué un rôle important.


60: -     Affaire Commission/BEI, précitée note 27, point 28.


61: -     Article 226 CE et article 28, paragraphe 1, des statuts.


62: -     Le comité des gouverneurs, le conseil d'administration, et le comité de direction, voir article 8 des statuts.


63: -     Article 9, sous f), des statuts.


64: -     Articles 4 et 5 des statuts.


65: -     Article 248, paragraphe 3, CE. Les rapports entre la Cour des comptes et la BEI sont concrètement régis par un accord conclu entre ces parties et la Commission. Aux termes de cet accord, conclu le 19 mars 1999, la Cour des comptes peut également examiner les activités de la BEI concernant les opérations effectuées sur mandat du Fonds social européen.


66: -     L'article 9 CE, introduit dans le traité CE par le traité sur l'Union européenne.


67: -     Le chapitre 5 du titre I («Dispositions institutionnelles») de la cinquième partie («Les institutions de la Communauté»).


68: -     Article 20, paragraphe 1, des statuts.


69: -     Article 20, paragraphe 1, sous b), des statuts.


70: -     Article 21, paragraphe 2, des statuts.


71: -     Article 21, paragraphe 6, des statuts.


72: -     Selon l'article 11, paragraphe 1, des statuts, le conseil d'administration «assure la conformité de la gestion de la Banque avec les dispositions du traité et des statuts et les directives générales fixées par le conseil des gouverneurs».


73: -     Article 14 des statuts.


74: -     La Commission fait référence au règlement (CE) n° 1260/1999 du Conseil, du 21 juin 1999, portant dispositions générales sur les Fonds structurels (JO L 161, p. 1).


75: -     Sur le rôle de l'audit interne au sein de la BEI, voir ci-dessus point 6 et ci-après point 148.


76: -     Précité note 27.


77: -     Point 27 de l'arrêt.


78: -     Points 28 à 30.


79: -     Précité note 27.


80: -     Note sans intérêt pour la version française.


81: -     Points 13 et 14.


82: -     Protocole annexé au traité CE.


83: -     Voir à ce sujet D. Dunnett, précité note 37, p. 758, qui qualifie de «central» le rôle tenu par la Commission dans les affaires de la BEI.


84: -     En vertu de l'article 11, paragraphe 2, des statuts, le conseil d'administration est composé de vingt-cinq administrateurs et de treize suppléants.


85: -     Précitées note 6, points 161 à 165.


86: -     En vertu de l'article 7 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999, les institutions, organes et organismes communiquent sans délai à l'OLAF toute information relative à d'éventuels cas de fraude ou de corruption, ou à toute autre activité illégale.


87: -     Articles 4, paragraphe 2, et 6 des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.


88: -     Article 4, paragraphe 2, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.


89: -     Article 4, paragraphe 2, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.


90: -     Article 9, paragraphe 4, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.


91: -     Article 10, paragraphe 2, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.


92: -     Article 9, paragraphe 4, des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.


93: -     Voir ci-après, point 155.


94: -     Décision 1999/396/Ce, CECA, Euratom de la Commission, du 2 juin 1999, relative aux conditions et modalités des enquêtes internes en matière de lutte contre la fraude, la corruption et toute activité illégale préjudiciable aux intérêts des Communautés (JO L 149, p. 57); décision 1999/394/CE/Euratom du Conseil, du 25 mai 1999, relative aux conditions et modalités des enquêtes internes en matière de lutte contre la fraude, la corruption et toute activité illégale préjudiciable aux intérêts des Communautés (JO L 149, p. 36), et décision du Parlement européen, du 18 novembre 1999, modifiant les règles de procédure à la suite de l'accord interinstitutionnel, et, y annexée, décision du Parlement européen relative aux conditions et modalités des enquêtes internes en matière de lutte contre la fraude, la corruption et toute activité illégale préjudiciable aux intérêts des Communautés (JO 1999 L 202, p. 1).


95: -     Décision de la Cour de justice du 26 octobre 1999 relative aux conditions et modalités des enquêtes internes en matière de lutte contre la fraude, la corruption et toute activité illégale préjudiciable aux intérêts des Communautés.


96: -     Cinquième, sixième et septième considérants du préambule de la décision.


97: -     Protocole sur le statut de la Cour de justice, signé à Bruxelles le 17 avril 1957, modifié en dernier lieu par l'article 6, III, point 3, sous c), du traité d'Amsterdam.


98: -     Article 3 de la décision.


99: -     Il semble que la cote de crédit de la BEI ait, depuis son démarrage, été extrêmement favorable («AAA»). Voir F. Leneuf-Péraldi, précité note 37, n° 19.


100: -    La BEI se réfère ici au règlement n° 2988/95, qui définit en son article 1er, paragraphe 2, l' «irrégularité» comme «toute violation d'une disposition du droit communautaire résultant d'un acte ou d'une omission d'un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue» et à la convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, précitée note 10, dont l'article 1er dispose qu'est constitutif de «fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes [...] en matière de dépenses, tout acte ou omission intentionnel [...] ayant pour effet la perception ou la rétention indue de fonds provenant du budget général des Communautés européennes ou des budgets gérés par les Communautés européennes ou pour leur compte».


101: -     Précitées note 6, points 105 à 112 et 117 à 119.


102: -     Voir note 27 et, ci-dessus, points 113 à 118.


103: -     La BEI fait référence en particulier à l'article 1er, deuxième alinéa, EA qui dispose que: «La Communauté a pour mission de contribuer, par l'établissement des conditions nécessaires à la formation et à la croissance rapides des industries nucléaires, à l'élévation du niveau de vie dans les États membres et au développement des échanges avec les autres pays».


104: -     La Commission vise ici la décision 77/270/Euratom du Conseil, du 29 mars 1977, habilitant la Commission à contracter des emprunts Euratom en vue d'une contribution au financement des centrales nucléaires de puissance (JO L 88, p. 9), ainsi que la décision 94/179/Euratom du Conseil, du 21 mars 1994, modifiant la décision 77/270 en vue d'habiliter la Commission à contracter des emprunts Euratom pour contribuer au financement de l'amélioration du degré de sûreté et d'efficacité du parc nucléaire de certains pays tiers (JO L 84, p. 41).


105: -     Proposition de règlement (CE, Euratom) du Conseil instituant un Office européen d'enquêtes antifraude [COM (1998) 717 final]. Voir, également, ci-dessus point 5.


106: -     COM(1998) 717 final, point 16 de l'exposé des motifs.


107: -     Arrêt du 26 mars 1987, Commission/Conseil (45/86, Rec. p. 1493, point 13, qui a été confirmé par la suite à plusieurs reprises.)


108: -     Arrêt du 18 novembre 1999, Commission/Conseil (C-209/97, Rec. p. I-8067).


109: -     Point 29.


110: -     JO L 82, p. 1.


111: -     Point 33.


112: -     Article 24 des règles de procédure. Cette disposition figure au chapitre V (articles 22 à 27) intitulé «Comité d'Audit». Ces règles ont été approuvées le 4 décembre 1958 et ont depuis lors fait l'objet d'un certain nombre de modifications. Lorsque la décision litigieuse a été adoptée, le 10 novembre 1999, la version des règles de procédure en vigueur remontait au 9 juin 1997. Ces règles ont depuis été modifiées et remplacées par une nouvelle version datée du 5 juin 2000. Le libellé de l'article 24 est identique dans les deux versions. Ces règles n'ont pas été publiées au Journal officiel, mais les textes présentant un intérêt ont été fournis à la Cour par la BEI.


113: -     Article 25 des règles de procédure.


114: -     La BEI se réfère à cet égard à la charte de l'audit interne. Ce document n'a pas été publié.


115: -     La BEI se réfère ici au manuel des procédures d'audit interne. Ce document n'a pas été publié.


116: -     Ce document n'a pas fait l'objet de publication.


117: -     Voir note 65.


118: -     L'article 29 du règlement intérieur dispose que le règlement du personnel de la BEI est arrêté par le conseil d'administration. Le règlement du personnel de la banque a été approuvé le 20 avril 1960, puis modifié à plusieurs reprises. Il n'a pas été publié au Journal officiel.


119: -     Article 7 du règlement du personnel.


120: -     Article 38 du règlement du personnel.


121: -     Adopté par le conseil d'administration le 27 mars 1997.


122: -     Article 1er, paragraphe 4, du code de conduite.


123: -     Article 1er, paragraphe 5, du code de conduite.


124: -     C'est nous qui soulignons.


125: -     Article 10 CE.


126: -     Article 4, paragraphe 1, et dixième considérant des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.


127: -     Voir ci-dessus, point 5.


128: -     Voir également à cet égard le quatrième considérant des règlements n° 1073/1999 et n° 1074/1999.


129: -     Voir, en particulier, arrêt du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink's France (C-367/95 P, Rec. p. I-1719, point 63 et la jurisprudence qui y est citée).


130: -     Ibidem.


131: -     Arrêt du 22 janvier 1986, Eridania e.a. (250/84, Rec. p. 117, point 38).


132: -     Arrêt du 13 mars 1968, Beus (5/67, Rec. p. 125).


133: -     Voir, notamment, les premier, deuxième et septième considérants.


134: -     Voir, notamment, le cinquième considérant.


135: -     Voir, notamment, le septième considérant.


136: -     Voir, notamment, les onzième à dix-huitième considérants.


137: -     Voir, notamment, les dixième et dix-neuvième considérants.