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Communication au journal officiel

 

Recours introduit le 7 juin 2004 par Microsoft Corporation contre la Commission des Communautés européennes

(Affaire T-201/04)

Langue de procédure: anglais

Le Tribunal de première instance des Communautés européennes a été saisi le 7 juin 2004 d'un recours dirigé contre la Commission des Communautés européennes par Microsoft Corporation, Washington (USA), représentée par I.S. Forrester, QC, et J-F Bellis, avocat.

La partie requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

annuler la décision de la Commission du 24 mars 2004, ou, à titre subsidiaire, annuler ou réduire substantiellement l'amende qui lui a été infligée;

condamner la Commission aux dépens.

Moyens et principaux arguments:

La requérante attaque la décision par laquelle la Commission a constaté deux abus d'une position dominante par la requérante et a imposé une amende de 497 196 304 EUR à la requérante. Dans la décision, la Commission a constaté que la requérante avait refusé de fournir " des informations sur l'interopérabilité " et d'autoriser leur usage aux fins de développer et de distribuer des applications liées aux systèmes d'exploitation serveur réseau. Deuxièmement, la Commission a constaté que la requérante avait subordonné la disponibilité du " système d'exploitation Windows client " à l'acquisition simultanée de Windows Media Player.

Premièrement, à l'appui de sa requête, la requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur en constatant que la requérante avait violé l'article 82 CE en refusant de fournir des protocoles de communication aux concurrents et d'autoriser l'utilisation de cette technologie propriétaire dans des systèmes d'exploitation serveur réseau.

Selon la requérante, les conditions posées par les juridictions européennes pour qu'une entreprise dominante soit tenue d'octroyer une licence sur ses droits de propriété intellectuelle ne sont pas réunies en l'espèce. D'après la requérante, la technologie pour laquelle on lui enjoint d'octroyer une licence n'est pas indispensable pour atteindre une interopérabilité avec les systèmes d'exploitation de Microsoft, le prétendu refus de fournir la technologie n'a pas empêché l'émergence de nouveaux produits sur un marché dérivé et, en définitive, n'a pas eu pour effet d'exclure toute concurrence sur un marché dérivé.

De plus, la requérante soutient que la décision attaquée a refusé à tort à la requérante la possibilité d'invoquer ses droits de propriété intellectuelle en tant que justification objective de son prétendu refus de fournir la technologie et a avancé, en lieu et place, un nouveau critère de mise en balance, erroné d'un point de vue juridique, invoquant l'intérêt du public à une divulgation.

La requérante fait également valoir qu'aucune licence aux fins du développement d'un logiciel dans l'EEE n'a jamais été demandée et que la requérante n'était pas tenue de considérer la demande de Sun comme faisant naître une responsabilité particulière au regard de l'article 82 CE.

De plus, la requérante soutient que la Commission n'a pas pris en considération les obligations qui incombent aux Communautés européennes en vertu de l'accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) de l'OMC lorsqu'elle a appliqué l'article 82 CE aux faits de l'espèce.

Deuxièmement, la requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur en constatant que la requérante avait violé l'article 82 CE en subordonnant la disponibilité de ses systèmes d'exploitation à l'acquisition simultanée du lecteur multimédia Windows Media Player.

Selon la requérante, la décision attaquée est basée sur une théorie spéculative de l'éviction, d'après laquelle la distribution répandue du lecteur multimédia contenu dans Windows pourrait, à un certain moment non déterminé à l'avenir, aboutir à une situation dans laquelle les fournisseurs de contenus et les développeurs de logiciels encoderont presque exclusivement dans des formats Windows Media. La requérante soutient que cette théorie est incompatible avec la décision de la Commission relative à la concentration AOL/Time Warner1, ainsi qu'avec les preuves démontrant que les fournisseurs de contenus continueront à encoder dans des formats multiples.

La requérante affirme également que la décision attaquée ignore les avantages découlant du modèle commercial de la requérante, qui implique l'intégration de nouvelles fonctionnalités dans Windows en réponse aux avancées technologiques et aux changements dans la demande des consommateurs.

De même, d'après la requérante, la décision attaquée ne remplit pas les conditions nécessaires pour établir une violation de l'article 82 CE, et en particulier son point d). La requérante soutient que Windows et son lecteur multimédia ne sont pas deux produits distincts. La requérante soutient en outre que la décision attaquée ne démontre pas que la prétendue licence liée et les produits liés n'ont pas de rapports naturels ou découlant d'un usage commercial. En outre, la requérante affirme que la décision attaquée ne tient pas compte de l'obligation qui incombe aux Communautés européennes en vertu de l'ADPIC lorsqu'elle applique l'article 82 CE aux faits de l'espèce et que le remède imposé est disproportionné.

Troisièmement, la requérante affirme que la condition lui imposant de nommer et de rémunérer un mandataire pour contrôler le respect de la décision, pour recevoir et instruire les plaintes est illégale parce que ultra vires. La requérante soutient que les pouvoirs délégués au mandataire sont des pouvoirs d'enquête et d'exécution dont est normalement investie la Commission et qui ne sauraient être délégués.

Enfin, la requérante soutient qu'il n'y a pas de base pour imposer une amende à la requérante compte tenu du caractère juridiquement inédit de la constatation d'abus. La requérante soutient également que le montant de l'amende est manifestement excessif.

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1 - 2001/718/CE: Décision de la Commission du 11 octobre 2000 déclarant une opération de concentration compatible avec le marché commun et avec l'accord EEE (Affaire n° COMP/M.1845 - AOL/Time Warner)