Language of document : ECLI:EU:C:2008:717

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

11 décembre 2008 (*)

«Manquement d’État – Articles 28 CE et 30 CE – Immatriculation de véhicules anciens d’occasion précédemment immatriculés dans d’autres États membres – Exigences techniques relatives aux émissions polluantes et au niveau sonore – Santé publique – Protection de l’environnement»

Dans l’affaire C‑524/07,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 26 novembre 2007,

Commission des Communautés européennes, représentée par M. B. Schima, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République d’Autriche, représentée par MM. E. Riedl et G. Eberhard, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. A. Rosas, président de chambre, MM. A. Ó Caoimh et U. Lõhmus, Mme P. Lindh et M. A. Arabadjiev (rapporteur), juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: M. B. Fülöp, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 septembre 2008,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en refusant l’immatriculation de véhicules d’occasion d’un certain âge, précédemment immatriculés dans des États membres autres que la République d’Autriche, qui ne satisfont pas à certaines exigences techniques relatives aux émissions sonores et de gaz d’échappement, alors que les véhicules présentant les mêmes caractéristiques, déjà immatriculés en Autriche, ne sont pas soumis, en cas de réimmatriculation, à de telles exigences, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 28 CE et 30 CE.

 Le cadre juridique

 La réglementation communautaire

 La directive 70/156/CEE

2        Les raisons qui ont conduit le législateur communautaire à adopter la directive 70/156/CEE du Conseil, du 6 février 1970, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la réception des véhicules à moteur et leurs remorques (JO L 42, p. 1), telle que modifiée par la directive 2001/116/CE de la Commission, du 20 décembre 2001 (JO 2002, L 18, p. 1, ci-après la «directive 70/156»), sont exposées dans les considérants de cette dernière comme suit:

«[...] dans chaque État membre, les véhicules à moteur destinés au transport de marchandises ou de personnes doivent présenter certaines caractéristiques techniques fixées par des prescriptions impératives; [...] ces prescriptions diffèrent d’un État membre à un autre; [...] par leurs disparités, elles entravent les échanges à l’intérieur de la Communauté économique européenne;

[...] ces obstacles à l’établissement et au fonctionnement du marché commun peuvent être réduits, voire éliminés, si les mêmes prescriptions sont adoptées par tous les États membres soit en complément, soit en lieu et place de leurs législations actuelles;

[...] un contrôle du respect des prescriptions techniques est traditionnellement effectué par les États membres avant la commercialisation des véhicules auxquels elles s’appliquent; [...] ce contrôle porte sur des types de véhicules;

[...]

[...] sur le plan communautaire, le contrôle du respect de ces prescriptions ainsi que la reconnaissance par chaque État membre du contrôle effectué par les autres États membres nécessitent la mise en œuvre d’une procédure de réception communautaire pour chaque type de véhicule;

[...] cette procédure doit permettre à chaque État membre de constater que chaque type de véhicule a été soumis aux contrôles prévus par les directives particulières et relevés sur une fiche de réception; [...] elle doit également permettre aux constructeurs d’établir un certificat de conformité pour tous les véhicules conformes à un type réceptionné; [...] lorsqu’un véhicule est accompagné de ce certificat, il doit être considéré par tous les États membres comme conforme à leurs propres législations; [...] il convient que chaque État membre informe les autres États membres de la constatation faite, par l’envoi d’une copie de la fiche de réception établie pour chaque type de véhicule réceptionné;

[...] à titre transitoire, la réception doit pouvoir être opérée sur la base des prescriptions communautaires au fur et à mesure de l’entrée en vigueur des directives particulières relatives aux différents éléments ou aux différentes caractéristiques du véhicule et, pour le reste, sur la base des prescriptions nationales;

[...]

[...] le progrès de la technique nécessite une adaptation rapide des prescriptions techniques définies par les directives particulières [...]»

3        L’article 1er de la directive 70/156 dispose:

«La présente directive s’applique à la réception des véhicules à moteur et de leurs remorques, qu’ils soient construits en une seule ou en plusieurs étapes, ainsi qu’à la réception des systèmes, composants et entités techniques prévus pour ces véhicules et leurs remorques.

[Elle] ne s’[applique] pas:

–        à la réception de véhicules isolés. Toutefois, les États membres qui pratiquent ce type de réception acceptent toute réception valable de systèmes, de composants, d’entités techniques ou de véhicules incomplets accordée en vertu de la présente directive, et non en vertu des dispositions nationales en cette matière,

–        aux quadricycles au sens de l’article 1er, paragraphe 3, de la directive 92/61/CEE du Conseil, [du 30 juin 1992,] relative à la réception des véhicules à moteur à deux ou trois roues [(JO L 225, p. 72)]»

4        L’annexe II de la directive 70/156 comporte une section A, intitulée «Définition des catégories de véhicules», ainsi rédigée:

«Les catégories de véhicules sont définies d’après la classification suivante:

[…]

1.       Catégorie M: Véhicules à moteur conçus et construits pour le transport de passagers et ayant […] au moins quatre roues.

Catégorie M1: Véhicules conçus et construits pour le transport de passagers comportant, outre le siège du conducteur, huit places assises au maximum.

[…]

2.       Catégorie N: Véhicules à moteur conçus et construits pour le transport de marchandises et ayant au moins quatre roues.

Catégorie N1: Véhicules conçus et construits pour le transport de marchandises ayant un poids maximal ne dépassant pas 3,5 tonnes.

[…]»

5        Les directives 70/157/CEE du Conseil, du 6 février 1970, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au niveau sonore admissible et au dispositif d’échappement des véhicules à moteur (JO L 42, p. 16), et 70/220/CEE du Conseil, du 20 mars 1970, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux mesures à prendre contre la pollution de l’air par les gaz provenant des moteurs à allumage commandé équipant les véhicules à moteur (JO L 76, p. 1), constituent chacune l’une des directives particulières relatives à la procédure de réception instituée par la directive 70/156.

 La directive 92/97/CEE

6        La directive 92/97/CEE du Conseil, du 10 novembre 1992, modifiant la directive 70/157 (JO L 371, p. 1), prévoit à son article 2:

«1.      À partir du 1er juillet 1993, les États membres ne peuvent, pour des motifs concernant le niveau sonore admissible et le dispositif d’échappement:

–        ni refuser pour un type de véhicule à moteur la réception CEE, la délivrance du document prévu à l’article 10, paragraphe 1, dernier tiret, de la directive 70/156/CEE ou la réception de portée nationale,

–        ni interdire la première mise en circulation de véhicules, si le niveau sonore et le dispositif d’échappement de ce type de véhicule à moteur ou de ces véhicules répondent aux dispositions de la directive 70/157[…], telle que modifiée par la présente directive.

2.      À partir du 1er octobre 1995, les États membres:

–        ne peuvent plus octroyer la réception CEE ou délivrer le document prévu à l’article 10, paragraphe 1, dernier tiret, de la directive 70/156/CEE pour un type de véhicule à moteur,

–        doivent refuser la réception de portée nationale d’un type de véhicule à moteur,

dont le niveau sonore et le dispositif d’échappement ne répondent pas aux dispositions des annexes de la directive 70/157[…], telle que modifiée par la présente directive.

3.      À partir du 1er octobre 1996, les États membres interdisent la première mise en circulation des véhicules à moteur dont le niveau sonore et le dispositif d’échappement ne répondent pas aux dispositions des annexes de la directive 70/157[…], telle que modifiée par la présente directive.»

 La directive 93/59/CEE

7        La directive 93/59/CEE du Conseil, du 28 juin 1993, modifiant la directive 70/220 (JO L 186, p. 21), dispose à son article 2:

«1.      À partir du 1er octobre 1993, les États membres ne peuvent, pour des motifs concernant la pollution atmosphérique par les émissions:

–        ni refuser, pour un type de véhicule à moteur, la réception CEE, la délivrance du document visé à l’article 10, paragraphe 1, dernier tiret, de la directive 70/156/CEE, ou la réception de portée nationale,

–        ni interdire la première mise en circulation de véhicules,

si les émissions de ce type de véhicule à moteur ou de ces véhicules sont conformes aux dispositions de la directive 70/220[…], telle que modifiée par la présente directive.

2.      À partir du 1er octobre 1993, les États membres:

–        ne peuvent plus octroyer la réception CEE ou délivrer le document prévu à l’article 10, paragraphe 1, dernier tiret, de la directive 70/156/CEE pour un type de véhicule à moteur,

–        doivent refuser la réception de portée nationale pour un type de véhicule à moteur,

dont les émissions ne satisfont pas aux exigences des annexes de la directive 70/220[…], telle que modifiée par la présente directive.

3.      À partir du 1er octobre 1994, les États membres interdisent la première mise en circulation des véhicules dont les émissions ne satisfont pas aux exigences des annexes de la directive 70/220[…], telle que modifiée par la présente directive.»

 La réglementation nationale

8        Les modalités de réception des véhicules à moteur en vue de leur immatriculation en Autriche sont régies par la loi relative aux véhicules à moteur de 1967, (Kraftfahrgesetz 1967, BGBl. 267/1967), telle que modifiée (BGBl. I, 117/2005, ci-après le «KFG»).

9        L’immatriculation de ces véhicules est ainsi effectuée sur la base d’une procédure de réception communautaire, en vertu des articles 28a et 28b du KFG, sur la base d’une réception nationale par type de véhicule, d’une réception individuelle ou d’une réception par dérogation, en vertu, respectivement, des articles 29, 31 et 34 du KFG.

10      Les véhicules qui ont été mis en circulation avant la mise en œuvre de la procédure de réception communautaire introduite au cours des années 90 et qui, de ce fait, n’ont pas fait l’objet d’une telle réception, sont soumis à la procédure de réception individuelle ou à la procédure de réception par dérogation, en vue de leur première immatriculation en Autriche.

11      L’article 1d du règlement d’exécution de la loi relative aux véhicules à moteur de 1967 (KFG-Durchführungsverordnung 1967, BGBl. 399/1967), tel que modifié (BGBl. II 334/2006, ci-après la «KDV»), intitulé «Gaz d’échappement», est libellé comme suit:

«(1)      Les véhicules doivent respecter les seuils d’émissions de gaz d’échappement destinés à lutter contre la pollution de l’air […] qui leur sont respectivement applicables. Le champ d’application exact pour chaque classe de véhicules et les seuils d’émissions applicables figurent dans les directives particulières qui leur sont respectivement applicables. En ce qui concerne les véhicules qui font l’objet d’une procédure de réception individuelle, les délais prévus par la directive pour l’immatriculation, la vente, la mise en circulation ou l’utilisation des nouveaux véhicules s’appliquent.

[…]»

12      L’article 8 de la KDV, intitulé «Prévention du bruit et dispositif de gaz d’échappement», dispose:

«(1)      En ce qui concerne les véhicules qui relèvent de la classification automobile européenne, le niveau sonore pondéré par la courbe A du bruit de fonctionnement d’un véhicule ou de sa remorque ne doit pas dépasser les seuils indiqués ci-après: […]

3.      pour les véhicules des catégories M et N s’appliquent les seuils d’émissions suivants et les procédures d’essai de la directive 70/157[...] dans sa version modifiée par la directive 1999/101/CE […]; à compter du 1er octobre 1995 pour les réceptions par type de véhicule, et à compter du 1er octobre 1996 pour les réceptions individuelles, s’appliquent les seuils prévus par la directive dans sa version modifiée par la directive 92/97[…].

[…]»

13      L’article 22b de la KDV prévoit une dérogation à l’obligation, pour les véhicules, de satisfaire aux exigences des dispositions de la KDV susmentionnées, lorsque ceux-ci constituent des biens personnels, ou en cas de donation ou d’héritage.

14      L’article III du règlement du ministre fédéral de l’Économie publique et des Transports, portant modification du règlement d’exécution de la loi relative aux véhicules à moteur de 1967 (40e modification) [Verordnung des Bundesministers für öffentliche Wirtschaft und Verkehr, mit der die Kraftfahrgesetz-Durchführungsverordnung 1967 geändert wird (40. Novelle zur KDV 1967), BGBl. 214/1995], tel que modifié (BGBl. II, 80/1997, ci-après le «règlement modificatif»), intitulé «Dispositions transitoires», prévoit:

«(1)      Les dispositions du présent règlement ne s’appliquent pas aux véhicules qui ont déjà été réceptionnés avant l’entrée en vigueur de la disposition concernée, sauf dispositions contraires dans les paragraphes suivants. Ces véhicules doivent toutefois satisfaire aux dispositions en vigueur jusqu’alors. […]

(2)      L’article 1er, point 3 (article 1d, paragraphe 1) n’est pas applicable aux véhicules des catégories M1 et N1 dont le type a été homologué avant le 1er janvier 1995 ou qui ont été réceptionnés individuellement et mis pour la première fois en circulation avant le 1er janvier 1996. Les véhicules de type homologué ne peuvent toutefois être mis pour la première fois en circulation après le 1er janvier 1996 que s’il est constaté que le véhicule satisfait aux conditions de la directive 93/59[...].

[…]

(5)      L’article 8, paragraphe 1, point 2 (article I, point 17), ne s’applique pas aux véhicules qui ont été homologués avant le 1er octobre 1995. Ces véhicules doivent toutefois être conformes aux dispositions antérieures. L’article 8, paragraphe 1, point 3 (article I, point 17), ne s’applique pas aux véhicules qui ont été homologués avant le 1er octobre 1995. Ces véhicules ne pourront cependant plus être mis en circulation pour la première fois à compter du 1er octobre 1996.

(6)      Les certificats d’[immatriculation] (article 21a) qui ont été établis avant l’entrée en vigueur du présent règlement demeurent valables. Les certificats d’[immatriculation] et leurs fiches signalétiques établis sur la base des autorisations octroyées avant l’entrée en vigueur du présent règlement peuvent toujours être délivrés selon les modèles existants.

[…]»

 La procédure précontentieuse

15      À la suite d’une plainte, la Commission a adressé, le 4 juillet 2006, une lettre de mise en demeure à la République d’Autriche, dans laquelle elle a considéré que les dispositions de la KDV susmentionnées étaient incompatibles avec les dispositions du traité CE relatives à la libre circulation des marchandises.

16      Dans sa réponse du 10 octobre 2006 à cette lettre de mise en demeure, la République d’Autriche a réfuté la thèse de la Commission.

17      Dans un avis motivé émis le 12 décembre 2006, la Commission a estimé que lesdites dispositions constituaient une mesure d’effet équivalent à une restriction quantitative à l’importation, au sens de l’article 28 CE, qui n’était pas justifiée par les objectifs de protection de la santé et de l’environnement et a invité la République d’Autriche à se conformer à ses obligations résultant de cet article dans un délai de deux mois à compter de la réception dudit avis.

18      Dans sa réponse du 21 février 2007 audit avis motivé, la République d’Autriche a réitéré la position qu’elle avait exposée précédemment.

19      La République d’Autriche ne s’étant pas conformée à l’avis motivé, et la Commission n’ayant pas été convaincue par la réponse de cet État membre audit avis, cette institution a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

 Argumentation des parties

20      Selon la Commission, les valeurs limites relatives aux émissions polluantes et au bruit que la République d’Autriche impose aux fins de la réception individuelle des véhicules sont, s’agissant des gaz polluants, celles prévues par la directive 93/59 et, s’agissant du bruit, celles énoncées dans la directive 92/97.

21      En revanche, aucune disposition nationale ne prévoirait que les véhicules déjà autorisés à circuler en Autriche et qui ne satisfont pas à ces valeurs limites doivent être retirés de la circulation. En outre, il résulterait des dispositions de l’article III du règlement modificatif, intitulé «Dispositions transitoires», que ces véhicules peuvent être de nouveau immatriculés en Autriche, à la suite d’un changement de propriétaire, sans qu’il leur soit imposé de respecter lesdites valeurs limites.

22      La Commission précise, par ailleurs, que c’est principalement la réception des véhicules dits «Youngtimer», c’est-à-dire des automobiles de collection construites au cours des années 70 et 80, qui soulève des difficultés en ce qui concerne le respect des valeurs limites en matière d’émissions polluantes et de bruit, étant donné que la réglementation autrichienne impose le respect de valeurs limites introduites à l’échelon communautaire au début ou au milieu des années 90, auxquelles les véhicules construits antérieurement à cette période ne satisfont généralement pas.

23      Selon la Commission, il convient d’apprécier les dispositions de la KDV en cause au regard de l’article 28 CE. L’existence de dispositions spécifiques du droit communautaire dérivé en matière de rapprochement des législations des États membres relatives aux émissions et au niveau sonore admissibles des véhicules à moteur n’exclurait pas l’applicabilité, en l’espèce, des dispositions du traité relatives à la libre circulation des marchandises. Les directives 93/59 et 92/97 ne seraient pas rétroactives et ne trouveraient pas à s’appliquer aux véhicules qui étaient déjà autorisés à circuler dans un État membre. En imposant les valeurs limites en cause, la République d’Autriche n’aurait donc pas agi dans de cadre de la mise en œuvre d’une obligation découlant du droit communautaire.

24      En réponse à l’un des arguments avancés par la République d’Autriche au cours de la procédure précontentieuse, la Commission fait valoir que cet État membre ne saurait invoquer le point 1 de l’annexe II de l’accord sur l’Espace économique européen, signé le 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3, ci-après l’«accord EEE»), relatif aux véhicules à moteur, pour se décharger de ses obligations découlant du droit communautaire. L’importation, en Autriche, d’un véhicule à moteur à partir d’autres États membres à une date où tant la République d’Autriche que ces autres États membres faisaient partie de la Communauté relèverait exclusivement du droit communautaire. L’acte relatif aux conditions d’adhésion de la République d’Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO 1994, C 241, p. 21, et JO 1995, L 1, p. 1) ne contiendrait aucune disposition prévoyant que, en de telles circonstances, l’application des dispositions du droit communautaire relatives à la libre circulation des marchandises serait exclue.

25      La Commission soutient qu’une réglementation d’un premier État membre, qui subordonne la première immatriculation de véhicules d’occasion précédemment immatriculés dans un second État membre au respect de valeurs limites plus strictes en matière d’émissions polluantes et de bruit, est susceptible d’entraver le commerce intracommunautaire en raison du fait que des véhicules autorisés à circuler dans d’autres États membres ne peuvent être immatriculés dans le premier État membre ou, à tout le moins, ne peuvent l’être qu’après avoir subi certaines modifications, telles que le montage d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit. En outre, le montage d’un tel dispositif impliquerait une perte de temps et une dépense qui représenteraient une charge spécifique frappant les opérations d’importation.

26      La dérogation prévue à l’article 22b de la KDV ne remettrait pas en cause cette analyse, dès lors qu’elle serait limitée et trouverait son fondement dans la situation spécifique du propriétaire du véhicule. Elle ne couvrirait donc pas précisément le cas du commerce transfrontalier, dont l’article 28 CE vise à assurer l’effectivité.

27      Par ailleurs, il existerait une discrimination à l’encontre des véhicules d’occasion importés, étant donné que les véhicules déjà autorisés à circuler sur le territoire autrichien ne sont pas soumis aux valeurs limites plus strictes fixées en matière d’émissions polluantes et de bruit, lorsque, après un changement de propriétaire, ils sont réimmatriculés en Autriche.

28      Il existerait donc, d’une manière générale, une restriction discriminatoire aux échanges intracommunautaires au sens de l’article 28 CE.

29      Cette restriction ne serait pas justifiée. Selon la Commission, des mesures visant à limiter les émissions sonores provenant des véhicules peuvent être justifiées par des considérations liées à la santé publique et à la protection de l’environnement. En revanche, les mesures visant à réduire les émissions de gaz polluants, dans le but de garantir la qualité de l’air, se rattacheraient en premier lieu à la protection de l’environnement. Néanmoins, les dispositions de la KDV en cause ne seraient ni nécessaires ni proportionnées à cet objectif et constitueraient une discrimination arbitraire ou une restriction déguisée dans le commerce entre les États membres, au sens de l’article 30 CE.

30      Avec la réception communautaire des véhicules, la Communauté aurait introduit un système de contrôle de la conformité aux exigences techniques de chaque type de véhicule ayant fait l’objet de cette réception. Cependant, s’agissant des véhicules qui ne disposent pas d’un tel certificat de conformité délivré à la suite de ladite réception, les États membres continueraient à être habilités à contrôler la conformité de ceux-ci au moyen de leur système national de réception.

31      Toutefois, l’article 4 de la directive 1999/37/CE du Conseil, du 29 avril 1999, relative aux documents d’immatriculation des véhicules (JO L 138, p. 57), obligerait les États membres à reconnaître, lors de l’immatriculation d’un véhicule, le certificat d’immatriculation délivré précédemment par un autre État membre. Dans cette mesure, les États membres seraient également tenus, lors du contrôle de conformité visant à déterminer si le type de véhicule satisfait aux exigences techniques de l’État membre d’importation, de tenir compte tant de la date de l’immatriculation précédente que des exigences techniques applicables à cette date. Or, selon la Commission, si des véhicules de types similaires ou analogues aux véhicules importés, devant être contrôlés, ont déjà fait l’objet d’une réception dans l’État membre d’importation et disposent d’un certificat de conformité national valide, les certificats correspondants doivent être pris en compte lors des opérations de contrôle des véhicules importés. La validité de ces certificats au niveau national signifierait, en effet, que les autorités nationales compétentes ont jugé que le type de véhicule homologué ne présente aucun risque, tant du point de vue de la sécurité routière que pour d’autres raisons d’intérêt général, telles que celles relatives à la santé humaine et à l’environnement. Dès lors, dans la mesure où un État membre ne refuse pas, pour des raisons liées à la protection de la santé et de l’environnement, la réimmatriculation des véhicules d’occasion déjà immatriculés dans cet État membre, il ne peut invoquer de telles raisons pour refuser l’immatriculation de véhicules importés de même type.

32      En outre, il existerait des mesures moins restrictives, permettant d’atteindre les objectifs susmentionnés, telles que la mise en place d’un régime fiscal non discriminatoire fondé sur l’âge des véhicules ou sur les émissions polluantes produites par ceux-ci, d’un système de péage pour certains véhicules polluants ou bien d’une interdiction de circuler dans certaines régions. Des mesures de remplacement similaires auraient déjà été adoptées dans d’autres États membres.

33      Enfin, la Commission ajoute que, dans l’arrêt du 14 juillet 1998, Aher-Waggon (C‑389/96, Rec. p. I‑4473), la Cour a, certes, admis le bien-fondé d’une mesure qui subordonnait la première immatriculation d’avions sur le territoire d’un État membre au respect de normes plus sévères que celles prévues par la législation communautaire relative à la limitation des émissions sonores, tout en exemptant de celles-ci les avions qui avaient été immatriculés sur ledit territoire avant la mise en œuvre de cette législation. Toutefois, selon cette institution, la mesure en cause dans l’arrêt Aher-Waggon, précité, poursuivait de manière plus cohérente son objectif de protection de l’environnement, en ce sens que les avions déjà immatriculés sur le territoire de l’État membre concerné devaient eux aussi satisfaire aux normes plus strictes lorsqu’ils subissaient des modifications techniques ou lorsqu’ils étaient mis temporairement hors service. Dans cette mesure, poursuit la Commission, le traitement réservé aux avions importés, légèrement différent de celui dont bénéficiaient les avions immatriculés sur ledit territoire, n’était pas arbitraire.

34      Tel ne serait pas le cas dans la présente affaire. Selon la législation nationale, l’homologation initiale d’un type de véhicule continuerait à être valide tant que les caractéristiques de fonctionnement initiales du véhicule concerné sont préservées, même lorsque certaines pièces ou certains éléments d’équipement soumis à homologation ont été remplacés. Une mise hors service provisoire du véhicule n’entraînerait pas non plus la perte de l’homologation. Dès lors, tout véhicule qui était déjà immatriculé en Autriche pourrait à tout moment être réimmatriculé dans cet État membre, sans être tenu de satisfaire aux exigences plus strictes en vigueur.

35      La République d’Autriche indique que, pour pouvoir bénéficier d’une première immatriculation en Autriche, les véhicules automobiles importés doivent respecter les valeurs limites relatives aux émissions polluantes prévues par la directive 91/441/CEE du Conseil, du 26 juin 1991, modifiant la directive 70/220 (JO L 242, p. 1), et par la directive 93/59.

36      Cet État membre ajoute que, dès son adhésion à l’Espace économique européen, il a joué un rôle précurseur en matière de lutte contre la pollution par le bruit et les émissions provoquées par le trafic routier entre les États membres de l’Union européenne. Selon la République d’Autriche, c’est la raison pour laquelle une disposition correspondante a été insérée au point 1 de l’annexe II de l’accord l’EEE, selon laquelle la libre circulation ne serait autorisée à compter du 1er janvier 1995 qu’en ce qui concerne les véhicules respectant les directives qui étaient alors applicables.

37      Dans le prolongement de ces efforts visant à accorder une attention particulière à la protection de l’environnement, la République d’Autriche s’abstiendrait d’adopter des mesures susceptibles de provoquer une dégradation de la qualité de celui-ci.

38      À cet égard, le refus d’autoriser l’immatriculation de véhicules automobiles précédemment immatriculés dans d’autres États membres, qui n’ont pas fait l’objet, en raison de leur ancienneté, d’une réception communautaire, serait nécessaire afin d’éviter une dégradation de la qualité de l’environnement. L’ouverture du marché aboutirait à l’importation incontrôlée de véhicules dépourvus de tout dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit, en provenance d’autres États membres dans lesquels l’immatriculation de tels véhicules est encore partiellement autorisée, eu égard aux prix intéressants auxquels ces véhicules sont proposés. Cette ouverture ne donnerait pas lieu, contrairement à ce que la Commission soutient, à l’importation exclusive d’une quantité réduite de modèles de collection. Des données statistiques produites par la République d’Autriche, en annexe à la réponse de cette dernière à l’avis motivé, montreraient que le nombre des véhicules d’occasion mis en circulation en Autriche était en augmentation, mais que, néanmoins, cet État membre aurait réussi à diminuer considérablement le nombre des véhicules dépourvus d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit circulant sur son territoire.

39      La République d’Autriche soutient également que l’exigence de normes minimales en matière de bruit et d’émissions polluantes n’entraîne aucune restriction à la libre circulation des marchandises. En tout état de cause, sa position en matière d’importation de véhicules dépourvus d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit serait justifiée, d’une part, en vertu de l’article 30 CE, duquel il découle que des restrictions en vue de protéger la santé et la vie des personnes, des animaux et des végétaux sont admissibles et, d’autre part, par des considérations liées à la protection de l’environnement.

40      L’obligation de respecter des normes plus sévères serait particulièrement appropriée pour contribuer à la réduction des émissions polluantes. Contrairement à ce que soutient la Commission, ces normes plus sévères seraient nécessaires et adaptées, ainsi qu’il ressortirait également des statistiques susmentionnées. La mise en œuvre d’éventuelles mesures de remplacement, telles que celles préconisées par la Commission, demanderait beaucoup de temps et serait trop coûteuse et, partant, serait injustifiée eu égard au petit nombre de véhicules concernés.

41      Enfin, la République d’Autriche fait valoir que la suppression des dispositions visées par le présent recours constituerait un retour en arrière en matière de protection de la santé et de l’environnement, alors qu’il importe plus que jamais de continuer à respecter les normes environnementales et de ne procéder en aucun cas à une modification législative qui irait à l’encontre des efforts de l’Union, notamment, dans le cadre de la réduction des émissions de dioxyde de carbone (CO2).

 Appréciation de la Cour

42      Il ressort de la requête de la Commission que celle-ci reproche à la République d’Autriche d’avoir manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE en exigeant, aux articles 1d, paragraphe 1, et 8, paragraphe 1, de la KDV, lus en combinaison avec l’article III du règlement modificatif, intitulé «Dispositions transitoires», que, en vue de leur première immatriculation en Autriche, des véhicules automobiles précédemment immatriculés dans d’autres États membres, qui n’ont pas fait l’objet, en raison de leur ancienneté, d’une réception communautaire et qui, de ce fait, doivent être soumis à une réception individuelle en Autriche, respectent des valeurs limites en matière d’émissions polluantes et de bruit plus strictes que celles auxquelles ils devaient satisfaire initialement, notamment, celles prescrites par les directives 93/59 et 92/97, alors que les véhicules qui présentent les mêmes caractéristiques et qui sont déjà autorisés à circuler en Autriche ne sont pas soumis à cette exigence lors de leur réimmatriculation dans cet État membre (ci-après la «mesure en cause»).

43      Il importe de noter, d’emblée, que la République d’Autriche ne conteste pas que les véhicules automobiles précédemment immatriculés dans d’autres États membres, qui n’ont pas fait l’objet, en raison de leur ancienneté, d’une réception communautaire, doivent respecter les valeurs limites prescrites par lesdites directives, en vue d’obtenir une première immatriculation en Autriche.

44      Il convient, cependant, de vérifier si, en faisant assurer le respect de ces valeurs limites, la République d’Autriche s’est bornée à se conformer aux obligations qui découlent des directives 92/97 et 93/59.

45      À cet égard, il convient de relever que les dispositions de l’article 2 de chacune de ces directives fixent, en premier lieu, les dates respectives à partir desquelles les États membres ne peuvent plus refuser la réception ou interdire la première mise en circulation des véhicules conformes aux prescriptions respectives de chaque directive et, en second lieu, les dates respectives à partir desquelles, d’une part, ils ne peuvent plus octroyer une réception aux véhicules non conformes aux prescriptions respectives de chacune desdites directives et, d’autre part, ils doivent interdire la première mise en circulation de ces derniers.

46      Il s’ensuit donc que les directives 92/97 et 93/59 ne régissent que les cas de première mise en circulation des véhicules qui entrent dans leur champ d’application ratione temporis et n’ont pas vocation à s’appliquer aux véhicules déjà autorisés à circuler sur le territoire des États membres. Ainsi, il n’apparaît pas, à l’examen de ces directives, que le législateur communautaire ait voulu priver les États membres de la possibilité de maintenir en vigueur les autorisations d’immatriculation accordées antérieurement pour des véhicules qui ne respectent pas les prescriptions desdites directives.

47      Il en résulte que, en exigeant que les véhicules automobiles précédemment immatriculés dans d’autres États membres, qui n’ont pas fait l’objet, en raison de leur ancienneté, d’une réception communautaire, respectent, à l’occasion d’une première immatriculation en Autriche, les prescriptions des directives 92/97 et 93/59, la République d’Autriche n’a pas cherché à mettre en œuvre les obligations découlant desdites directives. Il convient de vérifier, dès lors, si la mesure en cause est compatible avec la libre circulation des marchandises consacrée aux articles 28 CE et suivants.

48      Selon une jurisprudence constante, l’interdiction des mesures d’effet équivalent à des restrictions quantitatives à l’importation édictée à l’article 28 CE vise toute mesure des États membres susceptible d’entraver, directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire (voir, en ce sens, arrêts du 15 novembre 2005, Commission/Autriche, C‑320/03, Rec. p. I‑9871, point 67; du 26 octobre 2006, Commission/Grèce, C‑65/05, Rec. p. I‑10341, point 27, et du 5 juin 2008, Commission/Pologne, C‑170/07, point 43).

49      En l’espèce, il convient de relever que, ainsi que la Commission l’a précisé sans être contredite par la République d’Autriche, les véhicules automobiles précédemment immatriculés dans d’autres États membres, qui n’ont pas fait l’objet, en raison de leur ancienneté, d’une réception communautaire, ne satisfont généralement pas, en raison de cette ancienneté, aux prescriptions des directives 92/97 et 93/59. Or, sous peine de se voir refuser l’immatriculation dans cet État membre, ces véhicules doivent subir des améliorations techniques, telles que l’installation d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit.

50      Or, une telle installation suppose des démarches coûteuses auxquelles les détenteurs de véhicules précédemment immatriculés dans d’autres États membres et non conformes aux prescriptions de la mesure en cause, à savoir aux valeurs limites prescrites par les deux directives susmentionnées, doivent se livrer avant que lesdits véhicules puissent être légalement utilisés sur le territoire autrichien.

51      Cependant, la République d’Autriche n’ayant pas contesté que les véhicules déjà autorisés à circuler sur son territoire ne sont pas soumis au respect desdites valeurs limites lors de leur réimmatriculation en Autriche, il convient de constater que la mesure en cause affecte de façon différente ces véhicules et ceux mentionnés au point précédent du présent arrêt.

52      Il en résulte que ladite mesure constitue une mesure d’effet équivalent à des restrictions quantitatives, en principe incompatible avec les obligations résultant de l’article 28 CE, à moins que cette mesure ne puisse être objectivement justifiée.

53      Cette analyse ne saurait, par ailleurs, être infirmée par l’interprétation du point 1 de l’annexe II de l’accord EEE à laquelle se livre la République d’Autriche. Il suffit de relever, à cet égard, que, le présent recours étant présenté contre un État membre de l’Union et ayant pour objet de constater une violation des dispositions du traité, la République d’Autriche ne saurait invoquer les stipulations de l’accord EEE pour se soustraire à ses obligations découlant dudit traité. Dans ce contexte, il convient de souligner que l’acte relatif aux conditions d’adhésion de la République d’Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne ne contient, en ce qui concerne la République d’Autriche, aucune disposition transitoire ou dérogatoire en rapport avec les matières visées au point 1 de ladite annexe II.

54      En ce qui concerne les justifications invoquées par la République d’Autriche, il ressort d’une jurisprudence constante qu’une réglementation ou une pratique nationale qui constitue une mesure d’effet équivalent à des restrictions quantitatives ne peut être justifiée que par l’une des raisons d’intérêt général énumérées à l’article 30 CE ou par des exigences impératives (voir, en ce sens, arrêts du 5 février 2004, Commission/Italie, C‑270/02, Rec. p. I‑1559, point 21, et du 20 septembre 2007, Commission/Pays-Bas, C‑297/05, Rec. p. I‑7467, point 75). Dans l’un et l’autre cas, la mesure nationale doit être propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu’il soit atteint (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2003, ATRAL, C‑14/02, Rec. p. I‑4431, point 64; du 15 mars 2007, Commission/Finlande, C‑54/05, Rec. p. I‑2473, point 38, et du 24 avril 2008, Commission/Luxembourg, C‑286/07, point 36).

55      À cette fin, la République d’Autriche soutient que la mesure en cause est justifiée par des raisons liées à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ainsi qu’à la préservation des végétaux, prescrites à l’article 30 CE, ainsi que par l’objectif de protection de l’environnement. Elle précise, en substance, que le but de cette mesure est de réduire au minimum le nombre des véhicules non équipés d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit circulant sur le territoire autrichien. Par ailleurs, une telle réduction aurait déjà été constatée.

56      Il convient de relever, à cet égard, que, si les mesures visant à lutter contre la pollution de l’air et contre la pollution sonore provenant des véhicules ont pour objectif la protection de la santé, cet objectif se trouve déjà englobé dans l’objectif de protection de l’environnement, poursuivi également par ces mesures, lequel vise, dans un sens plus large, à protéger la santé, étant donné que lesdites mesures ont pour finalité de limiter les dangers pour la santé liés à une dégradation de l’environnement. Il n’y a donc pas lieu, en l’espèce, d’examiner les arguments de la République d’Autriche relatifs à la protection de la santé publique séparément de ceux relatifs à la protection de l’environnement.

57      Or, selon une jurisprudence constante, des exigences impératives relevant de la protection de l’environnement peuvent justifier des mesures nationales susceptibles d’entraver le commerce intracommunautaire, pourvu que ces mesures soient proportionnées à l’objet visé (voir, en ce sens, arrêts Aher-Waggon, précité, points 19 et 20; du 14 décembre 2004, Commission/Allemagne, C‑463/01, Rec. p. I‑11705, point 75, ainsi que Radlberger Getränkegesellschaft et S. Spitz, C‑309/02, Rec. p. I‑11763, point 75).

58       Il convient de rappeler, à cet égard, que la protection de l’environnement constitue l’un des objectifs essentiels de la Communauté (voir arrêts du 7 février 1985, ADBHU, 240/83, Rec. p. 531, point 13; du 20 septembre 1988, Commission/Danemark, 302/86, Rec. p. 4607, point 8; du 2 avril 1998, Outokumpu, C‑213/96, Rec. p. I‑1777, point 32, et du 13 septembre 2005, Commission/Conseil, C‑176/03, Rec. p. I‑7879, point 41). En ce sens, l’article 2 CE énonce que la Communauté a notamment pour mission de promouvoir un «niveau élevé de protection et d’amélioration de la qualité de l’environnement» et, à cette fin, l’article 3, paragraphe 1, sous l), CE prévoit la mise en place d’une «politique dans le domaine de l’environnement».

59      Il ne saurait être nié que la limitation des émissions polluantes et du bruit provenant des véhicules est un moyen apte à lutter contre la pollution de l’air et la pollution sonore. L’exigence résultant de la mesure en cause a pour effet de contribuer à ce que le nombre des véhicules non équipés d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit, qui circulent sur le territoire autrichien, n’augmente pas en raison de l’importation de tels véhicules.

60      Néanmoins, la République d’Autriche ne conteste pas que cette exigence ne s’applique pas aux véhicules qui sont déjà autorisés à circuler en Autriche, à l’exception des cas, en nombre limité, dans lesquels, du fait de certaines modifications techniques effectuées sur ces véhicules, leur caractéristiques techniques ne correspondent plus à celles mentionnées sur le certificat de conformité. À l’audience, elle a précisé que la diminution du parc national de véhicules non équipés d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit résulte de la vétusté de ces véhicules, laquelle rend progressivement ces derniers inaptes à circuler, et non d’une quelconque mesure étatique.

61      La République d’Autriche ne démontre pas, pour autant, que l’objectif visant à réduire le nombre des véhicules non équipés d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit ne pourrait être atteint par des mesures non discriminatoires moins restrictives, qui soient, par ailleurs, de nature à contribuer de façon active à la réduction du parc national de ces véhicules, telles que l’établissement d’un régime fiscal fondé sur l’âge des véhicules ou sur la pollution produite par ceux-ci et l’établissement d’incitations à la destruction des véhicules anciens. Cet État membre se borne à expliquer que la mise en place de telles mesures étant trop coûteuse et n’étant pas, par conséquent, justifiée au regard du petit nombre de véhicules non équipés d’un dispositif de réduction des émissions polluantes et du bruit, elle a préféré simplement limiter l’importation desdits véhicules.

62      Il s’ensuit que la République d’Autriche n’a pas démontré que la mesure en cause est proportionnée à l’objectif de protection de l’environnement poursuivi.

63      Au vu de ce qui précède, le recours de la Commission doit être considéré comme fondé.

64      Par conséquent, il y a lieu de constater que, en exigeant que, en vue de leur première immatriculation en Autriche, des véhicules automobiles précédemment immatriculés dans d’autres États membres, qui n’ont pas fait l’objet, en raison de leur ancienneté, d’une réception communautaire, respectent des valeurs limites en matière d’émissions polluantes et de bruit plus strictes que celles auxquelles ils devaient satisfaire initialement, notamment, les valeurs prescrites par les directives 93/59 et 92/97, alors que les véhicules qui présentent les mêmes caractéristiques et qui sont déjà autorisées à circuler en Autriche ne sont pas soumis à cette exigence lors de leur réimmatriculation dans cet État membre, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE.

 Sur les dépens

65      En vertu de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République d’Autriche et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) déclare et arrête:

1)      En exigeant que, en vue de leur première immatriculation en Autriche, des véhicules automobiles précédemment immatriculés dans d’autres États membres, qui n’ont pas fait l’objet, en raison de leur ancienneté, d’une réception communautaire, respectent des valeurs limites en matière d’émissions polluantes et de bruit plus strictes que celles auxquelles ils devaient satisfaire initialement, notamment, les valeurs prescrites par les directives 93/59/CEE du Conseil, du 28 juin 1993, modifiant la directive 70/220/CEE concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux mesures à prendre contre la pollution de l’air par les émissions des véhicules à moteur, et 92/97/CEE du Conseil, du 10 novembre 1992, modifiant la directive 70/157/CEE concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au niveau sonore admissible et au dispositif d’échappement des véhicules à moteur, alors que les véhicules qui présentent les mêmes caractéristiques et qui sont déjà autorisés à circuler en Autriche ne sont pas soumis à cette exigence lors de leur réimmatriculation dans cet État membre, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE.

2)      La République d’Autriche est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: l’allemand.