Language of document : ECLI:EU:C:2012:499

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO Mengozzi

présentées le 19 juillet 2012 (1)

Affaire C‑286/11 P

Commission européenne

contre

Tomkins plc

«Ententes – Marché européen des raccords en cuivre et en alliage de cuivre – Amendes – Responsabilité conjointe et solidaire de la société mère pour les agissements de sa filiale – Règle ne ultra petita – Qualification du recours en première instance – Compétence de pleine juridiction du Tribunal – Prise en compte de toutes les circonstances de fait – Respect du principe du contradictoire»





I –    Introduction

1.        Par le présent pourvoi, la Commission européenne demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal du 24 mars 2011, Tomkins/Commission (2) (ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel ce dernier a annulé partiellement la décision 2007/691/CE de la Commission, du 20 septembre 2006, relative à une procédure d’application de l’article 81 du traité instituant la Communauté européenne et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/F/38.121 Raccords) (3) (ci-après la «décision litigieuse»), concernant une entente, s’étant déroulée entre le 31 décembre 1988 et le 1er avril 2004, portant sur la fixation des prix et des montants des remises et des rabais, sur la mise en place de mécanismes de coordination des hausses de prix, sur l’attribution des clients et sur l’échange d’informations commerciales, dans le marché européen des raccords en cuivre, notamment en alliage de cuivre, et a réduit le montant de l’amende infligée à Tomkins plc (ci‑après «Tomkins»), pour le paiement duquel cette société avait été tenue responsable solidairement et conjointement avec sa filiale Pegler Ltd (ci-après «Pegler»).

2.        Faisant explicitement référence à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal du même jour, Pegler/Commission (4), concernant le recours introduit par la filiale de Tomkins, dans lequel le Tribunal a annulé l’article 1er de la décision litigieuse en ce qu’il constatait la participation de Pegler à l’infraction au cours de la période allant du 31 décembre 1988 au 29 octobre 1993 et a réduit le montant de l’amende infligée à cette société de 5,25 millions d’euros à 3,4 millions d’euros, le Tribunal a examiné les conséquences qu’il y avait lieu de tirer dudit arrêt dans le chef de la société mère Tomkins.

3.        En dépit du fait que Tomkins ne contestait la participation de Pegler à l’infraction que pour la période antérieure au 7 février 1989 (et non, comme Pegler, jusqu’au 29 octobre 1993), le Tribunal a jugé que la responsabilité de Tomkins ne pouvait, en tant que société mère de Pegler n’ayant pas directement participé à l’entente, excéder celle de sa filiale. Estimant qu’il était saisi d’un recours en annulation dont les conclusions avaient le même objet que celles du recours introduit parallèlement par Pegler, le Tribunal, écartant toute atteinte à la règle ne ultra petita, a également annulé, au point 1 du dispositif de l’arrêt attaqué, l’article 1er de la décision litigieuse en ce qu’il vise la période allant du 31 décembre 1988 au 29 octobre 1993 en ce qui concerne Tomkins et a, au point 2 dudit dispositif, réduit le montant de l’amende infligée à cette dernière à hauteur de 4,25 millions d’euros, dont 3,4 millions d’euros à titre solidaire avec Pegler.

4.        Au soutien de son pourvoi, la Commission articule cinq moyens, tirés respectivement d’une violation par le Tribunal de la règle ne ultra petita, de la constatation erronée selon laquelle les recours de la société mère Tomkins et de sa filiale Pegler avaient le même objet, de l’absence de prise en compte par le Tribunal du fait que Tomkins faisait partie d’une entreprise qui a admis avoir commis une infraction, d’un défaut de motivation et d’une contradiction de l’arrêt attaqué et, enfin, de la violation du contradictoire et du droit à un procès équitable.

5.        Tomkins propose de rejeter le pourvoi.

6.        À la suite d’une question écrite posée par la Cour auxquelles les parties ont répondu dans les délais impartis, ces dernières ont également été entendues en leurs plaidoiries lors de l’audience qui s’est tenue le 2 mai 2012.

II – Analyse

7.        Je tiens d’ores et déjà à préciser que le deuxième moyen du pourvoi exposé par la Commission doit selon moi être accueilli, emportant l’annulation partielle de l’arrêt attaqué. J’estime en effet que c’est à tort que le Tribunal a qualifié la demande en première instance de Tomkins comme étant un recours en annulation dont les conclusions avaient le même objet que celles du recours parallèle introduit par sa filiale Pegler. J’examinerai donc en premier lieu ce moyen du pourvoi. Mon analyse passe avant tout par une clarification des moyens exposés par Tomkins devant le juge de première instance ainsi que du déroulement de la procédure devant ce dernier.

A –    Sur le deuxième moyen du pourvoi, tiré de la constatation erronée selon laquelle le recours de la société mère Tomkins et celui de sa filiale Pegler avaient le même objet

8.        Il importe tout d’abord de rappeler que, à l’article 1er de la décision litigieuse, la Commission a constaté que Pegler et Tomkins avaient participé à une infraction à l’article 81 CE pour la période allant du 31 décembre 1988 au 22 mars 2001. À l’article 2, sous h), de ladite décision, elle leur a en conséquence infligé une amende de 5,25 millions d’euros au paiement de laquelle la société mère Tomkins et la filiale Pegler ont été tenues conjointement et solidairement responsables.

9.        Pegler et Tomkins ont introduit devant le Tribunal des recours séparés dirigés à l’encontre de la décision litigieuse.

10.      Il est constant que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Pegler/Commission, précité, le Tribunal était saisi de conclusions visant à l’annulation de la décision litigieuse et, à titre subsidiaire, à une réduction du montant de l’amende infligée à Pegler.

11.      Je rappelle que, dans son recours introduit le 15 décembre 2006 à l’encontre de la décision litigieuse, Tomkins, quant à elle, concluait à l’annulation de cette dernière ainsi qu’à la réduction du montant de l’amende qui lui avait été infligée par la Commission à l’article 2, sous h), de la décision litigieuse. Au soutien de son recours, Tomkins avait exposé quatre moyens, dont les trois premiers concernaient la problématique de l’imputabilité du comportement infractionnel de Pegler dans le chef de Tomkins et le quatrième était tiré «d’erreurs de droit et de fait dans le calcul de l’amende» (5). Ce moyen était scindé en deux branches, la première étant prise d’une erreur d’appréciation en ce qui concerne la majoration du montant de l’amende à des fins de dissuasion, basée sur le chiffre d’affaires de Tomkins, la seconde étant tirée d’une erreur de la Commission dans la détermination de la durée de l’infraction de Pegler.

12.      Ainsi que cela est reporté au point 23 de l’arrêt attaqué, le 22 décembre 2009, Tomkins a renoncé à ses premier, deuxième et troisième moyens ainsi qu’à la première branche de son quatrième moyen.

13.      Partant, le Tribunal ne restait plus saisi que de la seconde branche du quatrième moyen, certes tirée d’une erreur dans la détermination de la durée de l’infraction, mais qui s’inscrivait dans le cadre d’un moyen visant la réduction du montant de l’amende infligée à Tomkins.

14.      Le Tribunal ne pouvait donc pas considérer, à mon sens, après la renonciation partielle de Tomkins à ses moyens, qu’il était toujours saisi d’un recours en annulation visant la constatation de l’infraction qui figurait à l’article 1er de la décision litigieuse. Il aurait, au contraire, dû prendre acte du fait que le chef des conclusions de Tomkins visant l’annulation de cet article de la décision litigieuse n’était désormais plus supporté par des moyens et que, en tout état de cause, la demande de Tomkins se bornait, conformément à l’article 229 CE et à l’article 31 du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (6), à l’inviter à exercer sa compétence de pleine juridiction sur le montant de l’amende infligée par la Commission à l’article 2, sous h), de la décision litigieuse.

15.      Cette qualification de la demande de Tomkins en première instance, et à laquelle aurait dû procéder le Tribunal, était non seulement possible, mais nécessaire.

16.      Premièrement, il n’existait aucun obstacle de nature procédurale à ce que le Tribunal se borne à constater que cette demande se limitait, après que Tomkins eut renoncé à l’essentiel de ses moyens, à l’inviter à faire usage de son pouvoir de réformation du montant de l’amende.

17.      Certes, le traité CE ne consacre pas comme voie de recours autonome le «recours de pleine juridiction» et paraît donc subordonner l’exercice de la compétence de pleine juridiction au respect du délai pour introduire un recours en annulation (7). Par conséquent, une demande de réformation introduite après l’expiration d’un tel délai est irrecevable.

18.      Toutefois, en l’espèce, il est constant que le délai fixé à l’article 230 CE a bien été respecté lors de l’introduction du recours de Tomkins devant le Tribunal le 15 décembre 2006, avant que cette société ne renonce à ses moyens tirés du caractère illégal de l’article 1er de la décision litigieuse.

19.      Par ailleurs, après la renonciation de Tomkins à l’essentiel de ses moyens, le Tribunal ne pouvait aucunement déclarer irrecevable la demande de Tomkins ainsi circonscrite tant parce que la recevabilité d’un recours doit être évaluée au moment de son introduction (8) que parce qu’il serait incompatible avec une bonne administration de la justice de déclarer une demande irrecevable après qu’une partie a renoncé, notamment pour des motifs de célérité de la justice, à une partie des moyens supportant ses conclusions.

20.      Au demeurant, la jurisprudence fait état de situations dans lesquelles le Tribunal a été saisi de demandes de réformation indépendamment de tout recours en annulation, sans que le juge de l’Union y ait vu un obstacle pour se prononcer sur le bien-fondé de la demande (9).

21.      Deuxièmement, le fait que la seconde branche du quatrième moyen exposée par Tomkins devant le Tribunal se rapportait à une erreur quant à la détermination de la durée de l’infraction ne signifie pas qu’elle comportait, au‑delà des critiques portant sur le calcul du montant de l’amende, une demande en annulation de l’article 1er de la décision litigieuse constatant une infraction à l’article 81 CE.

22.      Certes, il est vrai que la durée de l’infraction constitue un élément commun à la constatation d’une infraction au titre de l’article 81 CE et à la fixation du montant des amendes, tel que cela est prévu à l’article 23, paragraphe 3, du règlement no 1/2003.

23.      Pour autant, s’il est possible d’admettre qu’inviter le Tribunal à annuler la constatation par la Commission d’une infraction à l’article 81 CE puisse entraîner, même implicitement, à lui demander de supprimer ou de réduire le montant de l’amende fixé par la Commission (10), l’inverse n’est, selon moi, pas concevable. En effet, si une telle solution devait être retenue, elle étendrait outre mesure le litige tel qu’il est défini par les parties.

24.      La jurisprudence fait état, également sur ce point, de diverses affaires dans lesquelles, à juste titre, le juge de l’Union a examiné des moyens tirés d’erreurs de droit dans l’appréciation de la durée de l’infraction uniquement aux fins de la réduction du montant de l’amende, sans que cela le conduise à apprécier de telles erreurs dans le contexte de la constatation de l’infraction par la Commission (11).

25.      Certes, sans en avoir la certitude, il me paraît que le souci du Tribunal était d’aboutir à une solution cohérente dans ses deux arrêts, à savoir l’arrêt attaqué et l’arrêt Pegler/Commission, précité. En effet, une fois qu’il avait annulé l’article 1er de la décision litigieuse en ce qui concerne la participation de Pegler à l’infraction pour la période allant du 31 décembre 1988 au 29 octobre 1993 (12), il concevait mal, me semble-t-il, de ne pas procéder de la même manière en ce qui concerne Tomkins, dont la responsabilité en tant que société mère, selon lui, ne pouvait excéder celle de sa filiale Pegler (13).

26.      Cette préoccupation, pour légitime qu’elle puisse paraître, ne doit cependant pas conduire à une dénaturation des recours dont est saisi le juge de première instance. En particulier, quels que soient les motifs qui l’inspirent, il ne lui appartient pas de se substituer aux parties en tentant, par exemple, de pallier les carences de leurs recours ou d’éradiquer les incohérences de ces derniers au mépris de la sécurité juridique des autres parties et au risque d’entacher ses arrêts d’arbitraire.

27.      Troisièmement, ainsi que cela ressort de la requête devant le Tribunal et comme cela a été confirmé par Tomkins lors de l’audience devant la Cour, le fait que cette société ait demandé la réduction du montant de l’amende dans le cadre de la seconde branche du quatrième moyen suffit à confirmer la conclusion selon laquelle c’est uniquement la compétence de pleine juridiction qu’elle requerrait d’activer.

28.      Le Tribunal, en respectant le petitum, aurait donc dû se limiter à constater que ladite branche pouvait uniquement supporter le chef des conclusions de Tomkins qui visaient la réduction du montant de l’amende infligée par la Commission à l’article 2, sous h), de la décision litigieuse.

29.      Au demeurant, si, à la suite de la renonciation à l’essentiel de ses moyens, Tomkins s’était bornée à maintenir la première branche du quatrième moyen, tirée, je le rappelle, d’une erreur d’appréciation en ce qui concerne la majoration du montant de l’amende à des fins de dissuasion, il est évident que le Tribunal n’aurait pu interpréter une telle demande que comme un appel à ce qu’il exerce sa compétence de pleine juridiction, sans examiner, au préalable, la légalité de la décision litigieuse en ce qui concerne la constatation de l’infraction à l’article 81 CE.

30.      Il ressort de ce qui précède que, comme l’a fait valoir la Commission dans son deuxième moyen du pourvoi, l’objet des conclusions de Tomkins dans l’affaire T‑382/06 et celui des conclusions de Pegler dans l’affaire T‑386/06 n’étaient pas identiques, le recours de Tomkins, après la renonciation à l’essentiel de ses moyens, ne visant plus l’annulation de l’article 1er de la décision litigieuse.

31.      Je propose donc à la Cour d’annuler le point 1 du dispositif de l’arrêt attaqué par lequel le Tribunal a lui-même annulé l’article 1er de la décision litigieuse en ce qu’il vise la période allant du 31 décembre 1988 au 29 octobre 1993 pour ce qui concerne Tomkins.

32.      Partant, il n’y a pas lieu d’apprécier les autres moyens du pourvoi de la Commission dans la mesure où ils visent l’annulation de ce même point du dispositif de l’arrêt attaqué.

33.      En revanche, il convient de les examiner dans la mesure où la Commission invite également la Cour à annuler le point 2 du dispositif de l’arrêt attaqué, par lequel le Tribunal a réduit le montant de l’amende infligée à Tomkins.

B –    Sur le premier moyen du pourvoi, tiré d’une violation de la règle ne ultra petita

34.      Par son premier moyen du pourvoi, la Commission fait valoir que les amendes infligées à des entités juridiques d’une entreprise unique peuvent varier, même si, pour une partie déterminée de ces amendes, une responsabilité solidaire est imposée. Par conséquent, la responsabilité solidaire de deux entités d’une même entreprise serait sans conséquence pour l’application de la règle selon laquelle le juge ne saurait statuer ultra petita. Lors de l’audience devant la Cour, la Commission a réitéré sa position selon laquelle l’interdiction de statuer ultra petita s’étendait également à l’exercice par le Tribunal de sa compétence de pleine juridiction.

35.      De plus, selon la Commission, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en statuant sur le moyen relatif à la durée de l’infraction sans examiner les arguments juridiques avancés par Tomkins elle-même à propos de la date du début de l’infraction et en se limitant, au lieu de cela, à se référer à l’issue de l’arrêt Pegler/Commission, précité.

36.      Tomkins soutient que le Tribunal n’a fait qu’exercer sa compétence de pleine juridiction eu égard aux sanctions, conformément à sa jurisprudence, en prenant en compte des éléments de fait évoqués par les parties à la procédure. Ainsi, le Tribunal n’aurait pas enfreint l’interdiction de statuer ultra petita, et ce dernier disposerait de la possibilité de supprimer et/ou de réduire une amende.

37.      Pour ma part, je considère que le moyen de la Commission ne saurait prospérer pour la raison essentielle que la règle ne ultra petita, qui limite les pouvoirs du juge aux questions qui lui sont soumises par les parties, ne joue quasiment aucun rôle dans le contexte de l’exercice de la pleine juridiction par le juge de l’Union, au titre de l’article 229 CE (14).

38.      En effet, selon une jurisprudence désormais bien établie, la compétence de pleine juridiction habilite le Tribunal, au-delà du simple contrôle de légalité, qui ne permet que de rejeter le recours en annulation ou d’annuler l’acte attaqué, à réformer ce dernier, c’est-à-dire à substituer son appréciation à celle de la Commission, même en l’absence d’annulation, en tenant compte de toutes les circonstances de fait, afin de supprimer, de réduire ou de majorer le montant de l’amende infligée (15).

39.      Ainsi, dans l’arrêt Groupe Danone/Commission, précité, la Cour a rejeté un moyen de pourvoi tiré d’une prétendue violation par le Tribunal de la règle ne ultra petita, dans le cadre d’une modification par ce dernier des modalités d’application du coefficient pour circonstances atténuantes en l’absence de toute conclusion à ce sujet, au simple motif que, dès lors que la question du montant de l’amende était soumise à son appréciation, le Tribunal était habilité, dans le cadre de l’application de l’article 229 CE et du règlement no 17 du Conseil du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81] et [82] du traité (16), auquel a succédé le règlement no 1/2003, à supprimer, à réduire ou à augmenter le montant de l’amende infligée par la Commission (17).

40.      Cette appréciation se comprend aisément si l’on conçoit la fonction de la compétence de pleine juridiction comme une garantie supplémentaire au bénéfice des entreprises d’un contrôle d’intensité maximale par un tribunal indépendant et impartial sur le montant de l’amende qui leur est infligée (18).

41.      Cette qualification de la pleine juridiction du Tribunal comme «garantie supplémentaire» a déjà été confirmée par la Cour dans le cadre de la définition de l’étendue des droits de la défense des entreprises devant la Commission à l’égard de l’imposition des amendes (19).

42.      Dans le présent contexte, elle ne peut que signifier que, moyennant contestation du montant de l’amende devant le Tribunal, les entreprises, en pleine connaissance du montant précis fixé par la Commission, ont la possibilité de soulever toute critique, aussi bien sur le plan de la légalité que de l’opportunité, sur le calcul de ce montant effectué par la Commission, de sorte à pouvoir influencer par tout moyen de défense, au-delà des contraintes inhérentes au contrôle de légalité, la conviction du juge quant au montant approprié de l’amende (20).

43.      Or, pour que cette fonction de garantie supplémentaire soit effective, le Tribunal doit notamment être autorisé, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 38 des présentes conclusions, à tenir compte «de toutes les circonstances de fait» (21), y compris, par exemple, des circonstances postérieures à la décision contestée devant lui (22), ce que les contraintes inhérentes au contrôle de légalité ne lui permettraient, en principe, pas (23).

44.      En l’espèce, le Tribunal ne pouvait ignorer ses propres constatations effectuées dans le cadre de l’arrêt Pegler/Commission, précité, concernant la filiale de Tomkins, et selon lesquelles, la Commission n’avait pas démontré que Pegler avait participé directement à l’infraction pour la période allant du 31 décembre 1988 au 29 octobre 1993. Ces constatations, fondées sur des pièces du dossier administratif de la Commission, revêtaient assurément le caractère de circonstances de fait dans le cadre des appréciations effectuées dans l’arrêt attaqué que le Tribunal était habilité à prendre en considération, eu égard à la jurisprudence précitée.

45.      Contrairement à ce que la Commission a soutenu lors de l’audience devant la Cour, le Tribunal n’a pas, à cet égard, relevé d’office un moyen de droit, ce qui, selon les arrêts de la Cour du 8 décembre 2011 (24), serait interdit même dans le contexte de l’exercice de la compétence de pleine juridiction (25), mais a simplement pris en considération toutes les circonstances de fait du dossier, y compris donc ses propres constatations effectuées dans l’affaire parallèle concernant la filiale de Tomkins, pour évaluer le caractère approprié du montant de l’amende infligée à Tomkins, tel que cette société l’avait invoqué dans la seconde branche de son quatrième moyen.

46.      Pour le surplus, est inopérante la critique de la Commission selon laquelle la constatation d’une responsabilité solidaire entre Tomkins et Pegler ne permettait pas au Tribunal de s’affranchir, y compris dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, de la règle ne ultra petita. En effet, ainsi que je viens de le démontrer, le Tribunal n’était pas tenu au respect de cette règle dans ce contexte.

47.      Je propose donc de rejeter le premier moyen du pourvoi de la Commission.

C –    Sur le troisième moyen du pourvoi, tiré de l’absence de prise en compte par le Tribunal du fait que Tomkins faisait partie d’une entreprise qui a admis avoir commis une infraction

48.      Selon la Commission, qui se réfère à l’arrêt Pegler/Commission, précité, la réduction de la responsabilité de cette société quant à l’infraction serait fondée sur son statut de «société en sommeil» et non sur le fait que le groupe Tomkins n’avait pas participé à l’infraction. Le fait que Pegler a pu ne pas être le bon destinataire de la décision litigieuse au sein du groupe, pour une période déterminée, ne concerne que cette filiale et n’exonère pas l’ensemble de l’entreprise de sa responsabilité à l’égard de l’infraction aux règles de concurrence. Ainsi, le Tribunal n’aurait pas légalement pu réduire le montant de l’amende de Tomkins pour la période comprise entre le 20 janvier 1989 et le 29 octobre 1993 en faisant valoir que «la responsabilité de Tomkins était strictement liée à celle de Pegler», en se fondant sur un tel lien qui n’existerait pas. En tout état de cause, le lien strict de responsabilité entre la société mère et la filiale ne constitue pas une règle absolue.

49.      Je suis parfaitement d’accord avec la Commission lorsqu’elle fait valoir que le lien strict de responsabilité constaté par le Tribunal entre Tomkins et Pegler ne saurait être considéré comme une règle valant dans toutes les situations où la responsabilité d’une société mère est engagée du fait du comportement de sa filiale.

50.      Cependant, la question n’est pas là et le Tribunal n’a jamais prétendu dans l’arrêt attaqué que ses constatations devaient avoir une portée universelle.

51.      En réalité, le présent moyen du pourvoi confine, ainsi que l’a fait valoir Tomkins, à inviter la Cour à réapprécier les constatations factuelles du Tribunal effectuées non seulement dans l’arrêt attaqué, mais également dans son arrêt Pegler/Commission, précité, lequel est désormais revêtu de l’autorité de la chose jugée, puisque la Commission n’a introduit aucun pourvoi à son encontre. Une telle demande est bien entendu irrecevable dans le cadre du pourvoi (26).

52.      À supposer même qu’il soit recevable, le présent moyen du pourvoi devrait, en tout état de cause, être déclaré comme étant non fondé.

53.      En effet, il résulte en substance des constatations effectuées par le Tribunal que, dans la décision litigieuse, Tomkins avait été tenue solidairement responsable du paiement de l’amende uniquement en raison de la participation directe de Pegler à l’infraction. Or, dès lors que le Tribunal a relevé tant dans l’arrêt Pegler/Commission, précité, qu’aux points 37 à 39 de l’arrêt attaqué, qu’il n’était pas démontré dans la décision litigieuse que Pegler, seule entité désignée dans ladite décision, avait directement participé à l’infraction entre le 31 décembre 1988 et le 29 octobre 1993, cela privait logiquement de tout fondement la responsabilité solidaire de Tomkins retenue dans la décision litigieuse. Partant, c’est à juste titre que le Tribunal pouvait constater dans l’arrêt attaqué que la responsabilité de Tomkins ne pouvait excéder celle de Pegler (point 38 in fine) ou qu’elle était strictement liée à celle de cette dernière (point 46).

54.      De surcroît, pas plus qu’elle ne l’avait fait dans la décision litigieuse, la Commission n’a indiqué ni a fortiori démontré qu’une entité autre que Pegler avait pu participer à l’infraction pour la période allant du 31 décembre 1988 au 29 octobre 1993 de sorte à entraîner, pour ladite période, la responsabilité de la société mère Tomkins pour le paiement de l’amende qui lui a été infligée dans la décision litigieuse.

55.      Je suggère donc de rejeter ce moyen du pourvoi.

D –    Sur le quatrième moyen, tiré d’un défaut de motivation et d’une contradiction de l’arrêt attaqué

56.      La Commission fait valoir que l’arrêt attaqué serait entaché d’un défaut de motivation, en ce qu’il n’expliciterait pas avec suffisamment de précisions la dérogation à la règle ne ultra petita qu’aurait introduit pour la première fois le Tribunal. En outre, au point 57 de l’arrêt attaqué, qui concerne le coefficient multiplicateur au titre de la dissuasion, le Tribunal aurait été incohérent et imprécis, en invitant la Commission à tirer les conséquences de la responsabilité solidaire au paiement de l’amende à l’égard de Tomkins, avant de lui-même déterminer le montant de l’amende.

57.      Ce moyen du pourvoi me paraît inopérant.

58.      S’agissant du premier grief, celui-ci ne peut prospérer, puisque, comme je l’ai démontré dans les développements précédents, le Tribunal n’est pas tenu au respect de la règle ne ultra petita dans le cadre de l’exercice de la pleine juridiction (27).

59.      Quant au second grief, je rappelle que le Tribunal n’a pas statué sur la première branche du quatrième moyen invoqué par Tomkins, tirée d’une erreur d’appréciation en ce qui concerne la majoration du montant de l’amende à des fins de dissuasion, au motif que Tomkins avait renoncé à cette branche.

60.      Partant, même à supposer que les critiques de la Commission visant les appréciations du Tribunal concernant cette branche soient accueillies, elles n’entraîneraient aucune conséquence sur l’annulation du point 2 du dispositif de l’arrêt attaqué, dans la mesure où ce point fixe le montant de l’amende sans altérer le calcul résultant de la décision litigieuse afférent à ladite majoration à des fins de dissuasion.

61.      Par conséquent, je propose de rejeter le quatrième moyen du pourvoi.

E –    Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du contradictoire et du droit à un procès équitable

62.      Selon la Commission, le Tribunal aurait violé le principe du contradictoire et le droit à un procès équitable en ne lui donnant pas l’occasion de prendre position sur l’intention de celui-ci de réduire l’amende infligée à Tomkins en s’appuyant sur les moyens uniquement soulevés par sa filiale dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Pegler/Commission, précité.

63.      Si le Tribunal a, en effet, à mon sens, entaché son appréciation d’une irrégularité procédurale, celle-ci me paraît toutefois insuffisante pour entraîner l’annulation du point 2 du dispositif de l’arrêt attaqué.

64.      À cet égard, il importe de rappeler que, selon la jurisprudence, le principe du contradictoire, qui fait partie des droits de la défense et dont les juridictions de l’Union doivent veiller au respect, implique, en règle générale, le droit pour les parties à un procès de prendre connaissance des preuves et des observations présentées devant le juge et de les discuter (28). Dans ce même contexte, la Cour a également jugé que ce serait violer un principe élémentaire du droit que de fonder une décision judiciaire sur des faits et des documents dont les parties, ou l’une d’entre elles, n’ont pu prendre connaissance et sur lesquels elles n’ont donc pas été en mesure de prendre position (29). En définitive, pour satisfaire aux exigences liées au droit à un procès équitable, il importe que les parties puissent débattre contradictoirement tant des éléments de fait que des éléments de droit qui sont décisifs pour l’issue de la procédure (30).

65.      Le principe du contradictoire doit bénéficier à toute partie à un procès dont est saisi le juge de l’Union, quelle que soit sa qualité juridique. Les institutions de l’Union peuvent aussi, par conséquent, s’en prévaloir lorsqu’elles sont parties à un tel procès (31).

66.      À mon sens, le juge de l’Union ne peut pas se soustraire au respect de ce principe dans le cadre de l’exercice de la compétence de pleine juridiction.

67.      À cet égard, la Cour a non seulement relevé le caractère contradictoire de la procédure devant les juridictions de l’Union, y compris dans le contexte de la pleine juridiction, en application de l’article 229 CE (32) mais a également vérifié le respect des droits de la défense, qui incluent le principe du contradictoire, dans l’exercice, par le Tribunal, de sa compétence de réformation du montant d’une amende infligée par la Commission (33).

68.      Cette approche découle du souci légitime selon lequel l’exercice de la compétence de pleine juridiction ne doit pas conduire à l’examen des faits ou des critères que les parties n’ont pas réellement eu la possibilité de débattre (34).

69.      Comme je l’ai déjà indiqué lors des développements précédents relatifs à l’inapplication de la règle ne ultra petita dans l’exercice par le Tribunal de la pleine juridiction, ce dernier est habilité à prendre en considération toutes les circonstances de fait pour examiner le caractère approprié du montant des amendes infligées par la Commission aux entreprises. Ces circonstances incluent aussi, à mon sens, les propres constatations factuelles effectuées par le Tribunal dans des affaires concomitantes relatives à différentes entités d’une même entreprise, comme en l’espèce.

70.      Toutefois, cette compétence doit être exercée dans le respect du contradictoire, règle que le Tribunal a méconnue dans l’arrêt attaqué.

71.      Tout d’abord, il est clair que, par le présent moyen du pourvoi, la Commission ne se cantonne pas à critiquer le Tribunal pour ne pas lui avoir donné l’occasion de se prononcer sur le principe même de la réduction du montant de l’amende infligée à Tomkins. En effet, au cours de la procédure devant le Tribunal, elle a bénéficié de la possibilité de débattre de cette question explicitement soulevée par la seconde branche du quatrième moyen du recours de Tomkins.

72.      En revanche, il est constant que le Tribunal n’a, à aucun moment avant le prononcé de l’arrêt attaqué, invité la Commission à faire valoir ses observations sur les constatations effectuées dans son arrêt Pegler/Commission, précité, se rapportant à l’absence de participation directe de la filiale à l’infraction pour la période allant du 31 décembre 1988 au 29 octobre 1993 sur la base desquelles le Tribunal dans l’arrêt attaqué a réduit le montant de l’amende infligée à la société mère (35).

73.      Or, il est indéniable que les constatations effectuées dans l’arrêt Pegler/Commission, précité, portant sur la durée de participation à l’infraction de la filiale, revêtaient le caractère d’«éléments de fait décisifs pour l’issue de la procédure» dans l’arrêt attaqué, au sens de la jurisprudence mentionnée au point 64 des présentes conclusions.

74.      Cette appréciation ne signifie toutefois pas que la violation du contradictoire entraîne une annulation de l’arrêt attaqué plus étendue que celle déjà proposée dans les présentes conclusions, à savoir non seulement l’annulation du point 1 du dispositif dudit arrêt mais aussi celle de son point 2.

75.      À cet égard, conformément à l’article 58 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, cette dernière vérifie, ainsi que cela ressort de la jurisprudence (36), si les irrégularités de procédure devant le Tribunal portent atteinte aux intérêts de la partie requérante au pourvoi.

76.      Cet examen touche, en l’espèce, à la question de savoir si, dans l’hypothèse où la Commission avait été en mesure de formuler des observations, relatives à l’impossibilité pour le Tribunal de prendre en considération les critiques de Pegler portant sur la durée de participation de cette dernière à l’infraction, exposées dans l’affaire parallèle ayant donné lieu à l’arrêt Pegler/Commission, précité, ces observations auraient été susceptibles d’influencer la réduction par le Tribunal du montant de l’amende infligée à Tomkins dans l’arrêt attaqué.

77.      Cette question doit, à mon avis, recevoir une réponse négative.

78.      Comme je l’ai déjà mentionné lors de l’analyse du premier moyen du pourvoi de la Commission, c’est à bon droit que le Tribunal pouvait, dans le cadre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction, prendre en considération ses propres constatations, effectuées dans l’arrêt Pegler/Commission, précité, portant sur la durée de la participation directe de la filiale à l’infraction, aux fins de trancher la demande en réformation de Tomkins.

79.      De plus, comme indiqué ci-dessus dans le cadre de l’examen du troisième moyen du pourvoi, c’est aussi, sans commettre d’erreur de droit, que le Tribunal a pu constater, eu égard aux circonstances spécifiques de l’affaire, que la responsabilité de Tomkins pour le paiement de l’amende infligée par la Commission ne pouvait excéder celle de Pegler.

80.      Par conséquent, à supposer même que la Commission ait pu faire valoir lesdits moyens devant le Tribunal, ces observations n’auraient pas été susceptibles d’influencer la réduction du montant de l’amende fixée dans l’arrêt attaqué.

81.      Dans ces conditions, je propose d’écarter le cinquième moyen du pourvoi de la Commission et de rejeter l’intégralité de ce dernier pour autant qu’il vise à faire annuler le point 2 du dispositif de l’arrêt attaqué par lequel le Tribunal a réduit l’amende infligée à Tomkins de 5,25 millions d’euros à 4,25 millions d’euros, dont 3,4 millions d’euros solidairement avec Pegler.

III – Conclusion sur le pourvoi

82.      Pour conclure l’ensemble de ces développements, ainsi que je l’ai précisé aux points 30 et 31 des présentes conclusions, il y a lieu, selon moi, d’accueillir le deuxième moyen du pourvoi de la Commission et d’annuler le point 1 du dispositif de l’arrêt attaqué en ce qu’il a lui-même annulé l’article 1er de la décision litigieuse pour autant que ce dernier vise la période allant du 31 décembre 1988 au 29 octobre 1993 en ce qui concerne Tomkins.

IV – Examen de la demande de Tomkins

83.      En vertu de l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour annule l’arrêt du Tribunal, celle-ci peut soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue.

84.      En l’espèce, le litige est assurément en état d’être jugé et la Cour peut le trancher définitivement. En effet, seule la seconde branche du quatrième moyen du recours de Tomkins doit être examinée.

85.      Comme je l’ai déjà indiqué, cette branche se bornait à inviter le Tribunal à réduire le montant de l’amende infligée à Tomkins par la Commission à l’article 2, sous h), de la décision litigieuse et n’était donc pas susceptible d’entraîner l’annulation de l’article 1er de cette décision qui concerne la constatation de l’infraction dans le chef de Tomkins.

V –    Sur les dépens

86.      En vertu de l’article 69 du règlement de procédure, applicable par analogie à la procédure du pourvoi, conformément à l’article 118 dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En application de l’article 69, paragraphe 3, du règlement de procédure, la Cour peut aussi répartir les dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs ou pour des motifs exceptionnels.

87.      Le pourvoi de la Commission devant prospérer uniquement pour partie, j’estime qu’il y aurait lieu de faire application de l’article 69, paragraphe 3, dudit règlement et de faire supporter aux parties leurs propres dépens des deux instances.

VI – Conclusion

88.      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit:

1)         Le point 1 du dispositif de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 24 mars 2011, Tomkins/Commission (T‑382/06), est annulé.

2)         Le pourvoi est rejeté pour le surplus.

3)         La Commission européenne et Tomkins plc supporteront chacune leurs propres dépens des deux instances.


1 –      Langue originale: le français.


2 –      T‑382/06, Rec. p. II‑1157.


3 –      JO 2007, L 283, p. 63.


4 –      T‑386/06, Rec. p. II‑1267.


5 –      Voir, point 3.4 et le point b) du dispositif de la requête de Tomkins devant le Tribunal ainsi que rapport d’audience préparé par ce dernier, annexé au mémoire en réponse au pourvoi (Annexe PB.5).


6 –      JO 2003, L 1, p. 1.


7 –      Voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 9 novembre 2004, FNICGV/Commission (T‑252/03, Rec. p. II‑3795, points 22 et 25).


8 –      Voir arrêts de la Cour du 27 novembre 1984, Bensider e.a./Commission (50/84, Rec. p. 3991, point 8) et du 18 avril 2002, Espagne/Conseil (C‑61/96, C‑132/97, C‑45/98, C‑27/99, C‑81/00 et C‑22/01, Rec. p. I‑3439, point 23).


9 –      Voir, à cet égard, demande de réduction du montant de l’amende à l’origine de l’arrêt du Tribunal du 6 mai 2009, KME Germany e.a./Commission (T‑127/04, Rec. p. II‑1167), puis de l’arrêt de la Cour du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑272/09 P, Rec. p. I‑12789).


10 –      Ce que la Cour a effectivement admis dans l’arrêt du 10 décembre 1957, ALMA/Haute Autorité (8/56, Rec. p. 179, 191).


11 –      Voir, notamment, arrêt de la Cour KME Germany e.a./Commission, précité (points 62 à 71), ainsi que arrêts du Tribunal KME Germany e.a./Commission, précité (points 100 à 105), et du 16 novembre 2011, Sachsa Verpackung/Commission (T‑79/06, non publié au Recueil, points 179 à 181 et 191 à 198), arrêt frappé d’un pourvoi, affaire Gascogne Sack Deutschland/Commission (C‑40/12 P), pendante devant la Cour.


12 –      Même si ces arrêts ont été prononcés le même jour, les références continues du Tribunal dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt attaqué à son arrêt Pegler/Commission, précité, démontrent bien qu’il conçoit le second comme précédent dans le temps la première.


13 –      Sur la question de la responsabilité de Tomkins intrinsèquement liée à celle de Pegler, voir mon analyse du troisième moyen du pourvoi de la Commission aux points 49 à 54 des présentes conclusions.


14 –      Voir, en ce sens, point 49 des conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 8 février 2007, Groupe Danone/Commission (C‑3/06 P, Rec. p. I‑1331).


15 –      Voir, en ce sens, arrêts du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission (C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, Rec. p. I‑8375, point 692); Groupe Danone/Commission, précité (point 61), ainsi que du 3 septembre 2009, Prym et Prym Consumer/Commission (C‑534/07 P, Rec. p. I‑7415, point 86). Voir également, arrêt du Tribunal du 5 octobre 2011, Romana Tabacchi/Commission (T‑11/06, Rec. p. II‑6681, point 265). Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, «parmi les caractéristiques d’un organe judiciaire de pleine juridiction figure le pouvoir de réformer en tous points, en fait comme en droit, la décision entreprise rendue par l’organe inférieur. Il doit notamment avoir compétence pour se pencher sur toutes les questions de fait et de droit pertinentes pour le litige dont il se trouve saisi» (voir, en dernier lieu, Cour eur. D. H., arrêt Menarini c. Italie du 27 septembre 2011, non encore publié au Recueil, requête no 43509/08, point 59).


16 –      JO 1962, 13, p. 204.


17 –      Voir arrêt Groupe Danone/Commission, précité (points 56 et 61 à 63).


18 –      Voir Mengozzi, P., «La compétence de pleine juridiction du juge communautaire», Liber Amicorum en l’honneur de Bo Vesterdorf, Bruylant, Bruxelles, 2007, p. 227.


19 –      Voir arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 445). Voir également, notamment, arrêts du Tribunal du 6 octobre 1994, Tetra Pak/Commission (T‑83/91, Rec. p. II‑755, point 235), et du 20 mars 2002, LR AF 1998/Commission (T‑23/99, Rec. p. II‑1705, point 200).


20 –      À toutes fins utiles, je rappelle que la Cour a confirmé à plusieurs reprises que le contrôle du Tribunal sur les amendes infligées par la Commission vise à vérifier le caractère approprié du montant retenu eu égard aux circonstances du litige dont il est saisi. Voir à cet égard, notamment, arrêts du 16 novembre 2000, Cascades/Commission (C‑279/98 P, Rec. p. I‑9693, points 42 et 48), ainsi que Mo och Domsjö/Commission (C‑283/98 P, Rec. p. I‑9855, points 42 et 48).


21 –      Souligné par mes soins.


22 –      Voir, à cet égard, arrêts du 6 mars 1974, Istituto Chemioterapico Italiano et Commercial Solvents/Commission (6/73 et 7/73, Rec. p. 223, points 51 et 52), et du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission (C‑185/95 P, Rec. p. I‑8417, point 141), ainsi que arrêts du Tribunal du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission (T‑236/01, T‑239/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, Rec. p. II‑1181, point 274), et du 18 juillet 2005, Scandinavian Airlines System/Commission (T‑241/01, Rec. p. II‑2917, point 227).


23 –      Ce qui permet aussi de comprendre pourquoi, par exemple, dans son arrêt du 28 mars 1984, Officine Bertoli/Commission (8/83, Rec. p. 1649, point 29), la Cour a jugé que, bien que le moyen invoqué par la requérante à l’appui de sa demande de réduction du montant de l’amende ne pouvait être accueilli, certaines circonstances particulières à cette affaire justifiaient une réduction pour des motifs d’équité.


24 –      Arrêts KME Germany e.a./Commission, précité (point 104); Chalkor/Commission (C‑386/10 P, Rec. p. I‑13085, point 64), ainsi que KME Germany e.a./Commission (C‑389/10 P, Rec. p. I‑13125, point 131).


25 –      Je ne suis pas entièrement convaincu par cet argument. À supposer même qu’il convienne d’interpréter les motifs des arrêts invoqués par la Commission dans le sens d’une telle interdiction d’évocation d’office de moyens de droit par le Tribunal, cette approche paraît mal se concilier avec l’habilitation accordée au juge de l’Union de s’affranchir des contraintes inhérentes au contrôle de légalité. À cet égard, par exemple, la Cour a déjà jugé qu’elle était autorisée à évaluer le caractère approprié d’une amende même en l’absence de conclusions de la partie requérante en ce sens [voir arrêt ALMA/Haute Autorité, précité (p. 191), ainsi qu’arrêts du Tribunal du 12 juillet 2001, Tate & Lyle e.a./Commission (T‑202/98, T‑204/98 et T‑207/98, Rec. p. II‑2035, points 22 et 164), et du 1er juillet 2010, AstraZeneca/Commission (T‑321/05, Rec. p. II‑2805, point 884), arrêt frappé d’un pourvoi, affaire AstraZeneca/Commission (C‑457/10 P), pendante devant la Cour]. En présence d’indices sérieux permettant de douter du caractère adéquat du montant d’une amende, j’estime que le Tribunal serait habilité à réformer ledit montant, sous réserve du respect du contradictoire (voir, sur cette question, mon analyse du cinquième moyen du pourvoi aux points 63 à 81 des présentes conclusions). L’activation de la réformation du montant d’une amende dans ce cas permettrait aussi, à mon sens, d’assurer le respect de facto d’un «contrôle plein et entier, en droit et en fait», au sens, notamment, de l’arrêt du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission, précité (point 136), par un tribunal impartial et indépendant du montant des amendes infligées aux entreprises.


26 –      Voir, notamment, arrêt du 3 mai 2012, Comap/Commission (C‑290/11 P, point 70 et jurisprudence citée).


27 –      En outre, la prémisse sur la base de laquelle l’exception à la règle ne ultra petita aurait été introduite par le Tribunal, à savoir l’objet identique des conclusions de Tomkins et de celles de Pegler dans leurs recours respectifs, est privée, comme je l’ai montré précédemment, de tout fondement. Il n’y a donc pas lieu, à mon sens, de statuer sur le prétendu défaut de motivation qu’aurait accompagné l’introduction par le Tribunal d’une telle exception.


28 –      Voir, en ce sens, arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a. (C‑89/08 P, Rec. p. I‑11245, points 50 à 52 et jurisprudence citée).


29 –      Ibidem (point 52 et jurisprudence citée).


30 –      Arrêt Commission/Irlande e.a., précité (point 56), ainsi que décision du 17 décembre 2009, Réexamen M/EMEA (C‑197/09 RX‑II, Rec. p. I‑12033, point 41).


31 –      Arrêt Commission/Irlande e.a., précité (point 53), ainsi que décision Réexamen M/EMEA, précitée (point 42).


32 –      Voir arrêts précités Chalkor/Commission (point 64) ainsi que du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑389/10 P, point 131).


33 –      Voir arrêt Groupe Danone/Commission, précité (points 70 à 83).


34 –      Voir, en ce sens, point 56 des conclusions de l’avocat général Poiares Maduro dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Groupe Danone/Commission, précité.


35 –      Il y a lieu de rappeler qu’aucune audience ne s’est déroulée devant le Tribunal et ce dernier n’a procédé à aucune mesure d’organisation de la procédure concernant cette question avant le prononcé de l’arrêt attaqué, lequel a eu lieu le même jour que l’arrêt Pegler/Commission, précité.


36 –      Voir, notamment, arrêt Commission/Irlande e.a., précité (point 61).