Language of document : ECLI:EU:C:2012:519

Affaire C-83/11

Secretary of State for the Home Department

contre

Muhammad Sazzadur Rahman e.a.

[demande de décision préjudicielle,
introduite par l’Upper Tribunal (Immigration and Asylum Chamber)]

«Directive 2004/38/CE — Droit des citoyens de l’Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres — Article 3, paragraphe 2 — Obligation de favoriser, conformément à la législation nationale, l’entrée et le séjour de ‘tout autre membre de la famille’ à la charge d’un citoyen de l’Union»

Sommaire — Arrêt de la Cour (grande chambre) du 5 septembre 2012

1.        Citoyenneté de l’Union — Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres — Directive 2004/38 — Bénéficiaires — Autres membres de la famille d’un citoyen de l’Union, ressortissants de pays tiers, non couverts par la définition de l’article 2, point 2, de la directive — Obligation des États membres de favoriser l’entrée et le séjour de ces ressortissants — Portée — Marge d’appréciation des États membres — Limites

(Directive du Parlement européen et du Conseil 2004/38, art. 3, § 2, et 10, § 2)

2.        Citoyenneté de l’Union — Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres — Directive 2004/38 — Bénéficiaires — Autres membres de la famille d’un citoyen de l’Union, ressortissants de pays tiers, non couverts par la définition de l’article 2, point 2, de la directive — Obligation des États membres de favoriser l’entrée et le séjour de ces ressortissants — Droit des bénéficiaires d’invoquer directement cette disposition devant le juge national — Limites

(Directive du Parlement européen et du Conseil 2004/38, art. 3, § 2)

3.        Citoyenneté de l’Union — Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres — Directive 2004/38 — Bénéficiaires — Autres membres de la famille d’un citoyen de l’Union, ressortissants de pays tiers, non couverts par la définition de l’article 2, point 2, de la directive — Membre à charge du citoyen de l’Union dans le pays de provenance — Notion de «pays de provenance» — Évaluation de la dépendance au moment de la demande

(Directive du Parlement européen et du Conseil 2004/38, art. 3, § 2)

4.        Citoyenneté de l’Union — Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres — Directive 2004/38 — Bénéficiaires — Autres membres de la famille d’un citoyen de l’Union, ressortissants de pays tiers, non couverts par la définition de l’article 2, point 2, de la directive — Membre à charge du citoyen de l’Union — Critères d’appréciation — Possibilité d’imposer des exigences particulières tenant à la nature et à la durée de la dépendance — Limites

[Directive du Parlement européen et du Conseil 2004/38, art. 3, § 2, al. 1, a)]

5.        Citoyenneté de l’Union — Droit de libre circulation et de libre séjour sur le territoire des États membres — Directive 2004/38 — Bénéficiaires — Autres membres de la famille d’un citoyen de l’Union, ressortissants de pays tiers, non couverts par la définition de l’article 2, point 2, de la directive — Délivrance d’une carte de séjour — Conditions pouvant être imposées par les États membres — Dépendance ayant perduré dans l’État membre d’accueil — Question ne relevant pas du champ d’application de la directive

[Directive du Parlement européen et du Conseil 2004/38, art. 3, § 2, al. 1, a), et 10]

1.        L’article 3, paragraphe 2, de la directive 2004/38, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, doit être interprété en ce sens que les États membres ne sont pas tenus d’accueillir toute demande d’entrée ou de séjour introduite par des membres de la famille d’un citoyen de l’Union qui ne sont pas couverts par la définition figurant à l’article 2, point 2, de ladite directive, même s’ils démontrent, conformément à l’article 10, paragraphe 2, de celle-ci, qu’ils sont à la charge dudit citoyen.

Il incombe toutefois aux États membres de veiller à ce que leur législation comporte des critères qui permettent auxdites personnes d’obtenir une décision sur leur demande d’entrée et de séjour qui soit fondée sur un examen approfondi de leur situation personnelle et qui, en cas de refus, soit motivée. Les États membres ont une large marge d’appréciation dans le choix desdits critères, ces derniers devant cependant être conformes au sens habituel du terme «favorise» ainsi que des termes relatifs à la dépendance employés audit article 3, paragraphe 2, et ne pas priver cette disposition de son effet utile.

(cf. point 26, disp. 1)

2.        Même si les termes employés à l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2004/38, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, ne sont pas suffisamment précis pour permettre à un demandeur d’entrée ou de séjour de se prévaloir directement de cette disposition pour invoquer des critères d’appréciation qui devraient selon lui être appliqués à sa demande, il n’en demeure pas moins qu’un tel demandeur a le droit de faire vérifier par une juridiction si la législation nationale et l’application de celle-ci sont restées dans les limites de la marge d’appréciation tracée par ladite directive.

(cf. points 25, 26, disp. 1)

3.        Pour relever de la catégorie des membres de la famille «à charge» d’un citoyen de l’Union visée à l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2004/38, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, la situation de dépendance du demandeur doit exister dans le pays de provenance du membre de la famille concerné, c’est-à-dire l’État dans lequel il séjournait à la date où il a demandé à accompagner ou à rejoindre le citoyen de l’Union, et cela à tout le moins au moment où il demande à rejoindre le citoyen de l’Union dont il est à la charge.

(cf. points 31, 35, disp. 2)

4.        L’article 3, paragraphe 2, de la directive 2004/38, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, doit être interprété en ce sens que les États membres peuvent, dans l’exercice de la marge d’appréciation quant au choix des facteurs à prendre en compte lors de l’examen des demandes d’entrée et de séjour introduites par des membres de la famille d’un citoyen de l’Union visés à l’article 3, paragraphe 2, de la directive, prévoir dans leurs législations des exigences particulières concernant la nature et la durée de la dépendance, et cela afin notamment de s’assurer que cette situation de dépendance est réelle et stable et n’a pas été provoquée dans le seul but d’obtenir l’entrée et le séjour dans l’État membre d’accueil.

Ces exigences doivent toutefois être conformes au sens habituel des termes relatifs à la dépendance visée à l’article 3, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la directive 2004/38, et ne pas priver cette disposition de son effet utile.

(cf. points 38, 40, disp. 3)

5.        La question de savoir si la délivrance de la carte de séjour visée à l’article 10 de la directive 2004/38, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, peut être subordonnée à l’exigence que la situation de dépendance au sens de l’article 3, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de cette directive ait perduré dans l’État membre d’accueil ne relève pas du champ d’application de ladite directive.

(cf. point 45, disp. 4)