Language of document : ECLI:EU:T:2018:126

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

9 mars 2018 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale NORMOSANG – Marque nationale verbale antérieure NORMON – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8 paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Règle 19, paragraphe 2, sous a), ii), et règle 20, paragraphe 1, du règlement (CE) no 2868/95 [devenues article 7, paragraphe 2, sous a), ii), et article 8, paragraphes 1 et 7, du règlement délégué (UE) 2017/1430] »

Dans l’affaire T‑103/17,

Recordati Orphan Drugs, établie à Puteaux (France), représentée par Me J. Quirin, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Lukošiūtė, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Laboratorios Normon, SA, établie à Tres Cantos (Espagne), représentée par Me I. Gonzalez-Mogena Gonzalez, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 22 novembre 2016 (affaire R 831/2016-5), relative à une procédure d’opposition entre Laboratorios Normon et Recordati Orphan Drugs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, J. Schwarcz (rapporteur) et C. Iliopoulos, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 17 février 2017,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 2 mai 2017,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 mai 2017,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 26 septembre 2013, la requérante, Recordati Orphan Drugs, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal NORMOSANG.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques contenant de l’hémine humaine ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 215/2013, du 12 novembre 2013.

5        Le 12 février 2014, l’intervenante, Laboratorios Normon, SA, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les quatre droits antérieurs suivants :

–        la marque espagnole verbale NORMON, enregistrée sous le numéro 2402142, désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, vétérinaires et hygiéniques ; substances diététiques à usage médical ; aliments pour bébés ; emplâtres ; matières pour pansements ; matières pour plomber les dents ; cire dentaire ; désinfectants ; produits pour détruire la vermine ; fongicides, herbicides » ;

–        la marque espagnole verbale NORMOVITE, enregistrée sous le numéro 306861, désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Spécialités pharmaceutiques » ;

–        la marque espagnole verbale NORMOXACINA, enregistrée sous le numéro 1244986, désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques, vétérinaires et hygiéniques ; substances diététiques à usage médical ; aliments pour bébés ; emplâtres ; matières pour pansements (bandes) ; matières pour plomber les dents ; cire dentaire ; désinfectants ; produits pour détruire la vermine ; fongicides, herbicides » ;

–        l’enregistrement international verbal NORMON, désignant le Portugal et enregistré sous le numéro 861938, désignant les produits relevant de la classe 5 et correspondant à la description suivante : « Produits pharmaceutiques et vétérinaires ; produits hygiéniques pour la médecine ; substances diététiques à usage médical ; aliments pour bébés ; emplâtres ; matériel pour pansements ; matières pour plomber les dents et pour empreintes dentaires ; désinfectants ; produits pour la destruction des animaux nuisibles ; fongicides ; herbicides ». 

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 [devenus, respectivement, article 8, paragraphe 1, sous b), et article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001] pour ce qui concerne le premier droit antérieur, et ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce même règlement pour ce qui concerne les autres droits antérieurs.

8        Par demande du 24 avril 2014, la requérante a demandé que la portée de la marque de l’Union européenne soit limitée aux produits suivants relevant de la classe 5 : « Produits pharmaceutiques contenant de l’hémine humaine à administrer par injection ou par voie perorale pour le traitement de la porphyrie hépatique ».

9        Le 31 juillet 2014, l’EUIPO a informé les parties du début de la phase contradictoire de la procédure d’opposition et a invité l’intervenante à présenter, jusqu’au 19 octobre 2014, des arguments et des éléments de preuve au soutien de son opposition, en vertu, notamment, de la règle 19, paragraphes 1 et 2, du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 1041/2005 de la Commission, du 29 juin 2005 (JO 2005, L 172, p. 4) [devenue article 7, paragraphes 1 et 2, du règlement délégué (UE) 2017/1430 de la Commission, du 18 mai 2017, complétant le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil sur la marque de l’Union européenne et abrogeant les règlements (CE) no 2868/95 et (CE) no 216/96 (JO 2017, L 205, p. 1)]. Le 17 octobre 2014, l’intervenante a présenté le mémoire exposant les motifs de son opposition. Le 15 décembre 2014, la requérante a présenté des observations sur ce mémoire. Dans ces observations, elle a non seulement contesté les arguments de l’intervenante tirés de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, mais a aussi soutenu que cette dernière n’avait prouvé l’existence que de l’un de ses droits antérieurs, à savoir l’enregistrement international, et a demandé à l’intervenante d’apporter la preuve de l’usage sérieux de ses droits antérieurs, conformément à l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001).

10      L’intervenante a produit des éléments de preuve tendant à démontrer l’usage de ses droits antérieurs le 23 avril 2015. Le 25 juin 2015, la requérante a présenté ses observations à cet égard. Dans ces observations, elle a prétendu que l’usage sérieux desdits droits n’avait pas été prouvé.

11      Par décision de la division d’opposition du 18 mars 2016, l’opposition a été accueillie pour tous les produits concernés au motif qu’il existait un risque de confusion, au titre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, avec la marque espagnole enregistrée sous le numéro 2402142, dans la mesure où cette dernière couvre les produits pharmaceutiques relevant de la classe 5.

12      Le 3 mai 2016, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 60 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 68 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.

13      Par décision du 22 novembre 2016 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours formé par la requérante.

14      Elle a considéré que l’existence et la validité de la marque espagnole antérieure NORMON, enregistrée sous le numéro 2402142, était dûment étayées, l’intervenante ayant produit en temps utile un extrait de la base de données des marques espagnoles Sitadex concernant ladite marque et la confirmation du renouvellement de celle-ci (points 17 à 20 de la décision attaquée). La chambre de recours a également accepté le caractère suffisant des preuves de l’usage sérieux de cette marque produites par l’intervenante pour différents types de produits pharmaceutiques (points 21 à 34 de la décision attaquée).

15      La marque antérieure étant une marque espagnole, la chambre de recours a conclu que le territoire pertinent était l’Espagne. Dans la mesure où les marques en conflit concernaient les produits pharmaceutiques, la chambre de recours a estimé que les professionnels de santé et les consommateurs finaux eux–mêmes, à savoir les patients, faisaient preuve d’un niveau d’attention élevé (points 39 à 42 et 48 de la décision attaquée).

16      Les « produits pharmaceutiques » de la marque antérieure constituant une vaste catégorie pouvant englober toutes sortes de préparations pharmaceutiques, générales ou spécifiques, destinées à tous types de traitement, délivrées sur ordonnance ou non, la chambre de recours a estimé que les produits couverts par la marque contestée y étaient inclus, si bien qu’ils devaient être considérés comme identiques à ceux-ci (points 43 à 48 de la décision attaquée).

17      En ce qui concerne la comparaison des marques en conflit, la chambre de recours a considéré qu’aucune ne contenait un élément plus distinctif que d’autres. Selon la chambre de recours, ces deux signes présentent un degré moyen de similitude visuelle et phonétique en raison notamment de l’identité de leur première partie et de leur première syllabe. Aussi, pris dans leur ensemble, ils sont dépourvus de signification, même si l’élément « sang » du signe contesté pourrait être associé à « sangre », qui signifie « sang » en espagnol, et si l’élément « normo » pourrait être assimilé à un préfixe se référant au mot « normal ». Ainsi, les marques en conflit ont été considérées, dans la décision attaquée, comme globalement similaires (points 49 à 55 de la décision attaquée).

18      Selon la chambre de recours, bien que les signes en conflit diffèrent en certains de leurs éléments, les caractéristiques communes, à savoir l’identité des produits et l’identité partielle des signes, porteront à croire, même dans l’esprit d’un public très attentif, que les produits proviennent de la même entreprise et, en particulier, que le signe contesté appartient à la famille de marques de l’intervenante comportant l’élément commun « normo » (points 56 à 64 de la décision attaquée).

19      Quant à l’argument tiré d’une prétendue coexistence paisible des marques en conflit, la chambre de recours l’a rejeté au motif, d’une part, que la requérante n’a, en substance, produit aucun élément de preuve démontrant que la marque dont elle demande l’enregistrement a été utilisée sur l’ensemble du marché de l’Union européenne et, d’autre part, qu’il n’a pas été démontré que les marques en cause coexistaient sur le même marché sans qu’il existe un risque de confusion entre elles (points 65 et 66 de la décision attaquée), si bien qu’elle a constaté un risque de confusion entre les signes en conflit sur la base de l’article 8, paragraphe 1, point b), du règlement no 207/2009 et n’a pas procédé à l’examen des arguments tirés de l’article 8, paragraphe 5, de ce même règlement.

 Conclusions des parties

20      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler toutes les condamnations aux dépens prononcées par l’EUIPO à son endroit ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

21      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés par l’EUIPO.

22      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours et confirmer la décision attaquée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

 Sur la recevabilité du renvoi général opéré par la requérante à ses arguments présentés devant l’EUIPO

23      Aux points 16 et 77 de son mémoire introductif d’instance, la requérante renvoie à l’ensemble des arguments qu’elle a présentés devant la division d’opposition et la chambre de recours et invite le Tribunal à se reporter au dossier administratif. Plus particulièrement, au point 16 de sa requête, la requérante avance qu’« [elle] réitère l’ensemble des arguments qu’elle a présentés devant la division d’opposition et la chambre de recours et invite le Tribunal à se reporter au dossier administratif de l’affaire en cours ». Au point 77 de sa requête, elle soutient que, « [p]our l’ensemble des motifs [indiqués dans ladite requête], et pour ceux exposés devant l’EUIPO, le public […] ne saurait croire […] que les produits proviennent des mêmes entreprises ou d’entreprises économiquement liées, compte tenu des différences globales entre les signes ».

24      À cet égard, il y a lieu de rappeler, à l’instar de l’EUIPO, que, en vertu de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, applicable en matière de propriété intellectuelle en vertu de l’article 171 et de l’article 177, paragraphe 1, de ce même règlement, la requête introduite dans le cadre d’un recours dirigé contre l’EUIPO doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Il ressort de la jurisprudence de la Cour que l’« exposé sommaire des moyens », qui doit être indiqué dans toute requête, au sens de ces articles, signifie que la requête doit expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé. Ainsi, il est notamment nécessaire, pour qu’un recours devant le Tribunal soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même. S’il est vrai que le corps de celle-ci peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, doivent figurer dans la requête (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, C‑382/12 P, EU:C:2014:2201, points 39 et 40). En effet, afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, l’exposé sommaire des moyens de la partie requérante doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et à la juridiction compétente de statuer sur le recours. Ainsi, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, voire dans le dossier administratif de l’EUIPO, les moyens qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un argument est invoqué au soutien d’un moyen [voir, en ce sens, arrêts du 13 juin 2013, Versalis/Commission, C‑511/11 P, EU:C:2013:386, point 115 ; du 11 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, C‑382/12 P, EU:C:2014:2201, points 38 à 41, et du 17 avril 2008, Dainichiseika Colour & Chemicals Mfg./OHMI – Pelikan (Représentation d’un pélican), T‑389/03, non publié, EU:T:2008:114, point 19].

25      Or, la requérante n’identifie à aucun moment les points spécifiques de sa requête qu’elle souhaite compléter par ces renvois. Elle ne précise pas davantage les passages des mémoires qu’elle a déposés devant l’EUIPO qui seraient, de son avis, de nature à étayer ses allégations. La requérante s’est donc contentée d’effectuer un renvoi global au dossier administratif, au sens de la jurisprudence citée au point précédent du présent arrêt. Il s’ensuit que le renvoi général opéré par la requérante à ses arguments présentés devant l’EUIPO doit être déclaré irrecevable.

  Sur la recevabilité de certains éléments de preuve déposés par la requérante pour la première fois devant le Tribunal

26      Il convient de rappeler qu’un recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO, au sens de l’article 65 du règlement no 207/2009 (devenu article 72 du règlement 2017/1001). Il s’ensuit que le Tribunal ne saurait réexaminer les circonstances de fait à la lumière de preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, la légalité d’une décision d’une chambre de recours de l’EUIPO doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont cette chambre pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (arrêt du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, EU:C:2008:739, points 137 et 138 ; voir, également, arrêt du 26 juillet 2017, Staatliche Porzellan-Manufaktur Meissen/EUIPO, C‑471/16 P, non publié, EU:C:2017:602, points 24 et 25 et jurisprudence citée).

27      Les conditions de recevabilité d’un recours, ainsi que des moyens et des éléments de preuve présentés à son appui, étant des fins de non-recevoir d’ordre public, le juge de l’Union doit les soulever d’office le cas échéant [arrêt du 16 janvier 2014, Steiff/OHMI (Étiquette avec bouton en métal au milieu de l’oreille d’une peluche), T‑434/12, non publié, EU:T:2014:6, point 12].

28      Or, ainsi que le relève, en substance, l’EUIPO, l’annexe A 8 de la requête, qui contient, outre une copie du règlement (CE) no 141/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1999, concernant les médicaments orphelins (JO 2000, L 18, p. 1), un article sur la présentation des médicaments orphelins et deux articles sur leur distribution, a été présentée pour la première fois devant le Tribunal. Il y a lieu de relever d’office qu’il en va de même de l’annexe A 9 de la requête, qui présente des extraits de deux sites Internet, dont celui de l’Oficina Española de Patentes y Marcas (OEPM, Office espagnol des brevets et des marques), relatifs à l’enregistrement du signe NORMOSANG en tant que marque nationale.

29      Partant, à l’exception de la copie du règlement no 141/2000, que le juge de l’Union est censé connaître, conformément à l’adage iura novit curia, les documents présentés aux annexes A 8 et A 9 de la requête doivent être déclarés irrecevables.

30      L’argument de la requérante selon lequel les éléments de preuve produits pour la première fois devant le Tribunal ne font que « confirmer et amplifier ou compléter » les éléments présentés devant la chambre de recours ne saurait remettre en cause cette conclusion. En effet, il est sans incidence sur la circonstance que la chambre de recours ne disposait pas des éléments d’information figurant dans lesdits documents (voir, en ce sens, arrêt du 26 juillet 2017, Staatliche Porzellan-Manufaktur Meissen/EUIPO, C‑471/16 P, non publié, EU:C:2017:602, point 27).

 Sur le fond

31      À titre liminaire, il y a lieu de remarquer que, au titre de son premier chef de conclusions, l’intervenante demande au Tribunal de rejeter le recours et de confirmer la décision attaquée. Étant donné que « confirmer » la décision attaquée équivaut à rejeter le recours, il y a lieu de considérer cette demande comme tendant, uniquement, au rejet du recours [voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2016, Apax Partners/EUIPO – Apax Partners Midmarket (APAX), T‑58/16, non publié, EU:T:2016:724, point 15 et jurisprudence citée].

32      À l’appui du recours, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de la règle 19, paragraphe 2, sous a), ii), et de la règle 20, paragraphe 1, du règlement no 2868/95 [devenues article 7, paragraphe 2, sous a), ii), et article 8, paragraphes 1 et 7, du règlement délégué 2017/1430], et, le second, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de la règle 19, paragraphe 2, sous a), ii), et de la règle 20, paragraphe 1, du règlement no 2868/95

33      La requérante allègue, en substance, que les preuves présentées par l’intervenante dans le délai fixé en vertu de la règle 19, paragraphe 1, du règlement no 2868/95 ne suffisent pas à établir, notamment, l’existence de la marque espagnole antérieure NORMON. Elle ne soulève cependant pas de moyen tiré d’une éventuelle appréciation erronée des preuves d’usage sérieux de cette marque. En effet, selon la requérante, la source du document présenté comme certificat d’enregistrement de ladite marque et qui serait issu du site Internet de l’OEPM n’est pas claire. Or, l’exigence d’une identification claire de la source d’un tel document aurait une importance cruciale, dans la mesure où il ne saurait être exigé de la requérante qu’elle reconnaisse la présentation des sites Internet des offices de propriété intellectuelle de tous les États membres de l’Union. La chambre de recours ne saurait non plus pallier une telle absence en s’appuyant soit sur sa propre connaissance de la présentation du registre concerné soit sur des documents présentés par l’intervenante à la suite de l’écoulement du délai fixé en vertu de la règle 19, paragraphe 1, du règlement no 2868/95. La production d’un certificat de renouvellement ne serait pas non plus suffisante, puisque l’exigence de produire une copie du certificat d’enregistrement et du dernier certificat de renouvellement serait cumulative.

34      Tant l’EUIPO que l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

35      À cet égard, il convient de rappeler que la règle 19 du règlement no 2868/95 prévoit ce qui suit :

« 1. L’[EUIPO] donne à l’opposant l’opportunité de présenter les faits, preuves et observations à l’appui de son opposition ou de compléter les faits, preuves et observations d’ores et déjà présentés conformément à la règle 15, paragraphe 3, dans un délai fixé par lui et qui doit être de deux mois au moins à partir de la date d’ouverture présumée de la procédure d’opposition conformément à la règle 18, paragraphe 1.

2. Au cours du délai visé au paragraphe 1, l’opposant produit également la preuve de l’existence, de la validité et de l’étendue de la protection de sa marque antérieure ou de son droit antérieur, ainsi que des éléments de preuve de son habilitation à former opposition. L’opposant produit notamment les preuves suivantes :

a)       si l’opposition est fondée sur l’existence d’une marque autre qu’une marque communautaire, la preuve de son dépôt ou enregistrement, en produisant :

[…]

ii)      si la marque est enregistrée, une copie du certificat d’enregistrement correspondant et, le cas échéant, du dernier certificat de renouvellement, attestant que le délai de protection de la marque dépasse le délai visé au paragraphe 1 et de toute extension de celui-ci, ou tout autre document équivalent émanant de l’administration auprès de laquelle la demande de marque a été déposée ;

[…] »

36      La règle 20, paragraphe 1, du règlement no 2868/95 dispose ce qui suit :

« Si, avant l’expiration du délai visé à la règle 19, paragraphe 1, l’opposant ne prouve pas l’existence, la validité et l’étendue de la protection de sa marque antérieure ou de son droit antérieur, ainsi que l’habilitation à former opposition, l’opposition est rejetée comme non fondée. »

37      En l’espèce, conformément à la règle 19, paragraphe 2, sous a), du règlement no 2868/95, l’intervenante était tenue de démontrer jusqu’à la date indiquée dans la lettre de l’EUIPO du 31 juillet 2014, à savoir le 19 octobre 2014, l’existence, la validité et l’étendue de la protection des marques sur lesquelles l’opposition était fondée.

38      Il convient de présenter les documents fournis par l’intervenante en ce qui concerne la marque espagnole verbale NORMON qui ont été examinés par la chambre de recours et de vérifier s’ils étaient suffisants afin de démontrer l’existence, la validité et l’étendue de la protection de la marque antérieure.

39      Il ressort du point 19 de la décision attaquée que la chambre de recours a tenu compte de deux types de documents que l’intervenante a envoyés dans sa réponse du 17 octobre 2014.

40      Premièrement, il s’agit de deux pages en espagnol, partiellement traduites en anglais, reprenant des informations sur l’enregistrement, le renouvellement et la validité de la marque NORMON, sur son titulaire ainsi que sur les produits concernés. En revanche, ces pages ne contiennent pas d’indication quant à leur source. Ainsi, il peut y avoir un doute sur leur authenticité, si bien que la requérante est fondée à soutenir que la chambre de recours ne pouvait se fonder sur lesdites pages.

41      Deuxièmement, la chambre de recours a examiné un certificat de renouvellement de cette marque avec sa traduction anglaise. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, ainsi que le fait valoir à bon droit l’EUIPO, la présentation d’un certificat de renouvellement est suffisante afin de démontrer l’existence, la validité et l’étendue de la protection de la marque sur laquelle l’opposition est fondée, s’il contient toutes les informations nécessaires à cette fin [arrêt du 5 février 2016, Kicktipp/OHMI – Italiana Calzature (kicktipp), T‑135/14, EU:T:2016:69, points 57 à 65].

42      Or, il ressort du certificat de renouvellement de la marque antérieure qu’il a été délivré par le directeur du département des signes distinctifs de l’OEPM le 20 juin 2011, c’est-à-dire avant le dépôt de l’acte d’opposition par l’intervenante, et que ladite marque a été renouvelée pour une période de dix ans, jusqu’au 22 mai 2021. Ce certificat, qui renseigne ainsi sur la période minimale de validité de cette marque, informe également sur le numéro d’enregistrement de la marque, à savoir le numéro 2402142, sur les produits qu’elle couvre, dont les produits pharmaceutiques, relevant de la classe 5, ainsi que sur son titulaire, qui est l’intervenante.

43      Il en résulte que l’ensemble des informations nécessaires aux fins de démontrer l’existence, la validité et l’étendue de la protection de la marque antérieure figure dans le certificat de renouvellement en cause. La chambre de recours pouvait donc se fonder sur ce certificat afin de considérer que l’intervenante avait satisfait aux exigences prévues par la règle 19, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement no 2868/95. Partant, la règle 20, paragraphe 1, de ce règlement n’était pas applicable en l’espèce.

44      Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

45      Le présent moyen est articulé en six griefs, tirés, le premier, de la définition erronée du public pertinent, le deuxième, de l’appréciation erronée de la comparaison visuelle et phonétique des signes, le troisième, de l’absence de comparaison globale des marques en cause, le quatrième, de l’appréciation erronée de la comparaison conceptuelle de ces dernières, le cinquième, de l’appréciation erronée du risque de confusion et de la référence non fondée à une famille de marques et, le sixième, de l’appréciation erronée des conditions relatives à la coexistence de deux marques.

–       Sur le premier grief, tiré de la définition erronée du public pertinent

46      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours n’a pas tenu compte de la nature spécifique des produits couverts par la marque contestée en concluant que le public pertinent comprend également le grand public, alors que ces produits ne sont pas des produits pharmaceutiques courants et sont exclusivement destinés aux professionnels de santé, qui les administrent aux patients atteints de porphyrie hépatique. En se référant à l’arrêt du 23 septembre 2009, GlaxoSmithkline e.a./OHMI – Serono Genetics Institute (FAMOXIN) (T‑493/07, T‑26/08 et T‑27/08, non publié, EU:T:2009:355), la requérante fait valoir que, si les produits ou les services désignés par l’enregistrement antérieur sont destinés tant au grand public qu’aux professionnels, alors que les produits faisant l’objet de l’opposition visent exclusivement un public de professionnels, le public pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est le public professionnel uniquement. Or, ces professionnels ont un niveau d’attention élevé et possèdent une connaissance approfondie des propriétés et des indications des produits pharmaceutiques.

47      Tant l’EUIPO que l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

48      À cet égard, la requérante n’a pas prouvé que les patients atteints de porphyrie hépatique ne sont associés d’aucune manière au choix du traitement, y compris médicamenteux, à suivre, ni qu’ils en sont totalement écartés. Ainsi, elle n’a pas démontré que la chambre de recours a commis une erreur en indiquant que le public concerné est composé tant de professionnels de santé que de patients.

49      Au demeurant, et ainsi que le remarque à juste titre l’EUIPO, une éventuelle erreur de la chambre de recours consistant en l’inclusion du grand public dans le public concerné n’aurait eu aucune incidence sur le bien-fondé de la décision attaquée. En effet, la chambre de recours a fondé son appréciation du risque de confusion entre les marques en conflit, aux points 42, 53, 54, 60, 63, 64 de la de la décision attaquée, sur la perception d’un public ayant un niveau d’attention élevé, voire sur la perception des professionnels de santé [voir, en ce sens, arrêt du 17 février 2017, Construlink/EUIPO – Wit-Software (GATEWIT), T‑351/14, non publié, EU:T:2017:101, points 54 à 58].

50      Le premier grief doit donc être rejeté.

–       Sur le deuxième grief, tiré de l’appréciation erronée de la comparaison visuelle et phonétique des marques en question

51      Si la requérante indique que, sur le plan visuel, le groupe de lettres « normo » domine l’impression globale des marques en question, elle allègue que la chambre de recours a découpé les signes de manière artificielle et a accordé un poids inapproprié au groupe de lettres « normo », tout en minimisant l’effet produit par la lettre « n » et le groupe de lettres « sang ». Elle aurait également attribué trop d’importance à la seconde lettre « n » de la marque contestée, qui selon l’avis de la requérante ne serait pas perceptible par les professionnels de santé, si bien que sa présence ne saurait jouer en faveur de la similitude des marques en conflit. La chambre de recours n’aurait pas non plus examiné la différence de longueur entre lesdites marques.

52      Sur le plan phonétique, la requérante soutient que la chambre de recours n’aurait pas suffisamment analysé les différences entre les signes, la reproduction identique de la première syllabe « nor » n’étant pas suffisante pour conclure à leur similitude.

53      La chambre de recours aurait ainsi procédé à une comparaison non pas globale mais analytique des marques en conflit, en les disséquant selon leurs parties constitutives.

54      Tant l’EUIPO que l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

55      Il est de jurisprudence constante que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques que le consommateur moyen a des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails [arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35, et du 16 décembre 2015, Rotkäppchen-Mumm Sektkellereien/OHMI – Ruiz Moncayo (RED RIDING HOOD), T‑128/15, non publié, EU:T:2015:977, point 23].

56      L’obligation de procéder à l’examen de l’impression d’ensemble produite par les marques en question ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y aurait pas lieu d’effectuer, dans un premier temps, un examen successif des différents éléments de présentation utilisés par ces marques. En effet, il peut être utile, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs des marques concernées [voir, dans le cadre de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 (devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001), arrêt du 7 octobre 2015, The Smiley Company/OHMI (Forme d’un smiley avec des yeux en cœur), T‑656/13, non publié, EU:T:2015:758, point 27 et jurisprudence citée].

57      En l’espèce, ainsi que l’a constaté à juste titre la chambre de recours aux points 51 et 61 de la décision attaquée, sur le plan visuel, les marques en conflit partagent les cinq premières lettres « n », « o », « r », « m » et « o », de même que la lettre « n » qui se trouve à la fin de la marque antérieure et à l’avant-dernière position dans la marque demandée. En revanche, elles diffèrent par le groupe de lettres « sang », qui figurent à la fin de cette dernière marque, mais ne se retrouvent pas dans la marque antérieure. Or, dans la mesure où il ressort d’une jurisprudence constante que le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots [voir, en ce sens, arrêts du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, EU:T:2004:79, point 81 ; du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY-PROP), T‑133/05, EU:T:2006:247, point 51, et du 25 novembre 2015, Soprema/OHMI – Sopro Bauchemie (SOPRAPUR), T‑763/14, non publié, EU:T:2015:883, point 54], la présence dans les signes en conflit de la même racine, « normo », crée une similitude visuelle.

58      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a correctement indiqué aux points 52 et 61 de la décision attaquée que le signe antérieur est composé des deux syllabes « nor » et « mon », alors que le signe demandé est composé des trois syllabes « nor », « mo » et « sang », et que la prononciation des signes coïncide tant en ce qui concerne le groupe de lettres « normo » et la lettre « n » qu’en ce qui concerne les premières syllabes « nor », tandis qu’elle diffère par leurs dernières syllabes. Dans la mesure où l’attention du public concerné se dirige, normalement, surtout sur le début du mot [arrêt du 28 novembre 2013, Lorenz Shoe Group/OHMI – Fuzhou Fuan Leather Plastics Clothing Making (Ganeder), T‑374/09, non publié, EU:T:2013:616, point 45], la conclusion de la chambre de recours selon laquelle lesdits signes sont moyennement similaires sur le plan phonétique ne peut qu’être approuvée. Cette conclusion est corroborée par le fait que, si la seconde syllabe de la marque antérieure « mon » et la deuxième syllabe de la marque demandée « mo » ne sont certes pas identiques, il est incontestable qu’eu égard à leurs positions respectives au sein des marques en conflit elles engendrent également une certaine similitude phonétique, qui s’ajoute à celle produite par les éléments déjà évoqués par la chambre de recours.

59      Contrairement à ce qu’a soutenu la requérante, la chambre de recours n’a pas omis, au cours de son examen, de tenir compte des différences entre les marques en conflit. D’une part, elle a conclu aux points 51 et 52 de la décision attaquée que les signes sont similaires à un degré moyen et non à un degré élevé. D’autre part, il découle de la seconde phrase du point 61 de la décision attaquée que la chambre de recours a considéré que la similitude créée par le groupe de lettres « normo » au début des marques en conflit neutralise les différences produites par la seconde lettre « n » de la marque antérieure et le groupe de lettres « sang » de la marque demandée. Ainsi, la chambre de recours a examiné, en détail, les marques en conflit, y compris nécessairement leur longueur, et elle a fondé sa conclusion concernant la similitude visuelle et phonétique sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci.

60       Il s’ensuit que le deuxième grief doit être rejeté.

–       Sur le troisième grief, tiré de l’absence de comparaison globale des marques en question

61      La requérante remarque que la décision attaquée évoque à plusieurs reprises la conclusion que les marques sont « similaires à un degré moyen ». Elle renvoie notamment aux points 51 et 52 de la décision attaquée. Néanmoins, elle considère qu’une telle « description » ne saurait équivaloir à une appréciation de la similitude des marques en conflit et revient à contourner une analyse de la similitude dans des cas où il n’existe, en réalité, aucune similitude. La requérante soutient que conclure que deux mots sont « similaires à un degré moyen » au motif qu’ils ont en commun un même segment de mot revient à se soustraire à l’exigence de procéder à une comparaison globale et aurait une incidence négative sur l’évaluation du risque de confusion. Lorsqu’il compare des signes verbaux, l’EUIPO ne saurait éviter d’adopter une position claire quant à la question de savoir si, dans l’esprit du public, les mots sont similaires ou non, lorsqu’ils sont vus et perçus de manière globale.

62      Ni l’EUIPO ni l’intervenante ne répondent spécifiquement aux arguments présentés dans le cadre de ce grief.

63      À cet égard, dans l’hypothèse où la requérante ferait valoir que l’expression « similaires à un degré moyen » témoigne de l’absence de comparaison globale des marques en cause, il y aurait lieu de rappeler que le Tribunal a déjà interprété cette expression, utilisée par la chambre de recours, comme exprimant une similitude moyenne des marques en conflit [arrêt du 28 septembre 2016, Kozmetika Afrodita/EUIPO – Núñez Martín et Machado Montesinos (AFRODITA COSMETICS), T‑575/15, non publié, EU:T:2016:573, points 50 et 51]. De plus, elle est employée dans la jurisprudence du Tribunal, afin d’exprimer la conclusion que les marques en conflit présentent une similitude moyenne [arrêts du 3 février 2017, Kessel medintim/EUIPO – Janssen-Cilag (Premeno), T‑509/15, non publié, EU:T:2017:60, point 69 ; du 7 juillet 2017, Axel Springer/EUIPO – Stiftung Warentest (TestBild), T‑359/16, non publié, EU:T:2017:477, points 63, 74 et 78, et du 14 juillet 2017, Massive Bionics/EUIPO – Apple (DriCloud), T‑223/16, non publié, EU:T:2017:500, point 67].

64      Dans l’hypothèse, toutefois, où la requérante alléguerait que la chambre de recours ne pourrait conclure qu’à la simple présence ou à l’absence de similitude entre deux marques en conflit, il y aurait lieu de rappeler que, aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des signes en conflit, et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’ils désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives. Quant à la similitude des signes, il est de jurisprudence constante qu’elle présuppose que, du point de vue du public pertinent, il existe entre eux une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir arrêt du 26 mai 2016, Aldi Einkauf/EUIPO – Dyado Liben (Casale Fresco), T‑254/15, non publié, EU:T:2016:319, points 19 et 32 et jurisprudence citée].

65      Cette appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (voir arrêt du 26 mai 2016, Casale Fresco, T‑254/15, non publié, EU:T:2016:319, point 20 et jurisprudence citée).

66      Il s’ensuit que l’EUIPO ne doit pas seulement constater l’existence ou l’absence de similitude entre les marques en cause, ni même entre les produits ou les services qui sont couverts, mais également le degré de cette similitude, à savoir faible, moyen ou élevé. Ce n’est qu’ainsi qu’il est possible de procéder à une appréciation globale du risque de confusion, qui implique, ainsi qu’il vient d’être rappelé, une prise en compte de l’ensemble des facteurs pertinents se trouvant dans une relation d’interdépendance.

67      Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le troisième grief.

–       Sur le quatrième grief, tiré de l’appréciation erronée de la comparaison conceptuelle des marques en question

68      La requérante considère, en substance, que les marques diffèrent sur le plan conceptuel, la marque demandée NORMOSANG évoquant des idées de « normalité » et de « sang » qui seraient absentes de la marque antérieure. Ces différences conceptuelles seraient d’autant plus perceptibles pour un public constitué exclusivement de professionnels de santé et faisant preuve d’un niveau d’attention élevé. Dans ce cadre, la requérante fait valoir qu’est entaché de contradiction le raisonnement de la chambre de recours, qui reconnaît, d’une part, que la marque demandée est susceptible d’évoquer auprès du public concerné ces deux notions, tout en concluant, d’autre part, que ce signe, puisqu’il doit être perçu comme un tout, est dénué de sens, si bien que la comparaison conceptuelle n’est pas possible.

69      Tant l’EUIPO que l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

70      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence citée au point 56 ci-dessus, l’obligation de procéder à l’examen de l’impression d’ensemble produite par les marques en question ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y aurait pas lieu d’effectuer, dans un premier temps, un examen successif des différents éléments de présentation utilisés par ces marques.

71      Il en découle que la chambre de recours n’a fait aucune erreur en examinant, d’abord, les significations possibles des éléments constitutifs de la marque contestée et en concluant, ensuite, que, dans son ensemble et dans la perception du public concerné par les produits en question, le mot « normosang » n’a aucune signification. Si les éléments verbaux « normo » et « sang » ne peuvent que vaguement se rapprocher des mots espagnols « normal » et « sangre », signifiant « normal » et « sang », le mot « normosang » est fantaisiste dans son ensemble et ne véhicule pas une idée précise. Si la requérante réitère devant le Tribunal les significations des composants de la marque demandée, telles qu’exposées d’ailleurs par la chambre de recours, elle ne précise pas, et encore moins démontre, quelle signification cette marque devrait avoir dans son ensemble.

72      Ainsi, la chambre de recours a pu conclure qu’une comparaison sur le plan conceptuel entre les marques en conflit n’est pas possible.

73      Au demeurant, une éventuelle erreur de la chambre de recours dans l’appréciation de la similitude conceptuelle n’aurait pas de conséquences sur l’appréciation globale de la similitude entre les marques en conflit. En effet, même si le public concerné percevait la marque demandée dans son ensemble comme renvoyant à la fois à la normalité et au sang, alors que la marque antérieure ferait, quant à elle, uniquement référence à la normalité, une telle circonstance n’aurait pas, en l’espèce, à elle seule, pu neutraliser la similitude constatée sur les plans visuel et phonétique. Bien au contraire, elle pourrait renforcer la similitude des marques en conflit en raison de leur référence commune à la normalité. Il s’ensuit que le quatrième grief doit être rejeté.

–       Sur le cinquième grief, tiré de l’appréciation erronée du risque de confusion et de la référence non fondée à une famille de marques

74      Outre les arguments relatifs à la définition du public concerné, à l’absence de comparaison globale des marques en conflit et à la prétendue erreur quant à la comparaison des marques sur le plan conceptuel, qui ont déjà été rejetés dans le cadre des premier, troisième et quatrième griefs de ce moyen, si bien qu’il n’y a plus lieu d’y revenir, la requérante soulève trois arguments au soutien de sa thèse selon laquelle la décision attaquée est entachée d’erreur en ce qu’elle constate un risque de confusion entre les marques en conflit. Premièrement, la requérante soutient que la référence à l’identité partielle des signes, qui figure au point 64 de la décision attaquée, est erronée, les signes étant soit identiques, soit similaires. Deuxièmement, la requérante semble estimer, en substance, que, dans la mesure où la chambre de recours a conclu aux points 51 et 52 à une similitude moyenne entre les marques en conflit, il est contradictoire d’indiquer, au terme de la comparaison globale desdites marques, qu’elles sont uniquement similaires. Troisièmement, ce serait à tort que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une famille de marques de l’intervenante comportant le préfixe « normo ».

75      Tant l’EUIPO que l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

76      S’agissant, premièrement, de l’argument de la requérante relatif à l’identité partielle des signes, force est de constater que, par l’expression de ladite identité, la chambre de recours a uniquement renvoyé à l’identité de certaines lettres et syllabes dans les deux marques en conflit, au sens de l’appréciation de leur similitude sur les plans visuel et phonétique, effectuée antérieurement. Il ne découle d’aucun passage de la décision attaquée que la chambre de recours y ait attaché une autre signification. Cet argument doit donc être rejeté.

77      S’agissant, deuxièmement, de l’argument de la requérante relatif à la contradiction qui entacherait la décision attaquée, il suffit de relever que, en l’espèce, dans la mesure où la chambre de recours a estimé à juste titre que la similitude sur les plans visuel et phonétique est moyenne et que la comparaison sur le plan conceptuel n’est pas possible, il ne fait aucun doute que, en concluant, au point 55 de la décision attaquée, que les marques sont globalement similaires, elle a estimé que cette similitude existe à un degré moyen.

78      S’agissant, troisièmement, de l’argument de la requérante relatif à l’existence d’une famille de marques de l’intervenante comportant le préfixe « normo », ainsi que le fait valoir à juste titre l’EUIPO, la constatation figurant au point 64 de la décision attaquée de l’existence d’une famille de marques de l’intervenante comportant l’élément commun « normo » ne fait pas partie du raisonnement au terme duquel la chambre de recours est parvenue à la conclusion de l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, comme en témoigne également la référence à l’arrêt du 16 décembre 2010, Longevity Health Products/OHMI – Gruppo Lepetit (RESVEROL) (T‑363/09, non publié, EU:T:2010:538), qui ne concernait pas la problématique des familles de marques. Il apparaît plutôt qu’il s’agit d’une conclusion indépendante de cette dernière, d’un obiter dictum, qui ne vient que corroborer la conclusion sur l’existence d’un risque de confusion. Il s’ensuit que l’éventuel bien-fondé de cet argument ne saurait remettre en question cette dernière conclusion. Il est donc inopérant.

79      Par conséquent, tous les arguments présentés au soutien du grief tiré de l’absence de risque de confusion entre les marques en conflit ayant été rejetés, il ne saurait, contrairement à ce qu’allègue la requérante, être considéré que la décision attaquée est entachée d’erreur en ce qu’elle constate un risque de confusion entre les marques en conflit.

80      Au demeurant, la chambre de recours a rappelé à juste titre au point 63 de la décision attaquée que le fait que le public pertinent sera plus attentif à l’identité du producteur ou fournisseur du produit ou du service qu’il souhaite se procurer ne signifie pas, en revanche, qu’il examinera dans le moindre détail la marque à laquelle il sera confronté, ou qu’il la comparera minutieusement à une autre marque. En effet, même pour un public faisant preuve d’un niveau d’attention élevé, il n’en demeure pas moins que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite qu’il en a gardée en mémoire [arrêts du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26, et du 31 janvier 2012, Spar/OHMI – Spa Group Europe (SPA GROUP), T‑378/09, non publié, EU:T:2012:34, point 20].

81      Ainsi, il y a lieu d’approuver l’analyse de la chambre de recours, qui, après avoir constaté le caractère distinctif intrinsèque moyen de la marque antérieure, l’identité des produits concernés et la similitude des marques en conflit, a conclu à l’existence d’un risque de confusion, en dépit de l’attention élevée dont fait preuve le public en question.

82      Partant, le cinquième grief doit être rejeté.

–       Sur le sixième grief, tiré de l’appréciation erronée des conditions relatives à la coexistence des marques en conflit

83      La requérante soutient que l’absence de risque de confusion serait renforcée par le fait que les marques ont coexisté sur le marché espagnol. Dans ce cadre, elle soutient que la chambre de recours a commis une erreur en rejetant son argument selon lequel il existait une coexistence paisible des marques en conflit avant la demande d’enregistrement de la marque contestée. D’une part, elle fait valoir que, dans la mesure où le territoire sur lequel la marque antérieure est protégée est celui de l’Espagne et où le risque de confusion s’apprécie également au regard de cet État membre, la chambre de recours a commis une erreur en examinant si la coexistence paisible des marques en conflit a été prouvée dans l’ensemble de l’Union. D’autre part, elle soutient, en substance, que la chambre de recours n’a pas tenu compte des éléments de preuve présentés, qui montreraient que les produits portant la marque nationale NORMOSANG ont été vendus en Espagne pendant une décennie depuis son lancement en 2000, ce que l’autre partie, fabricant de produits pharmaceutiques, n’aurait pu ignorer. Le caractère paisible de la coexistence serait prouvé par le fait que l’autre partie n’a jamais engagé une quelconque action en contrefaçon à l’encontre de l’usage, fait par la requérante, de la marque nationale NORMOSANG. En outre, la requérante explique que, étant donné que les produits pharmaceutiques ne peuvent pas être mis sur le marché sans autorisation préalable des autorités sanitaires, qui vérifieraient également l’absence de confusion entre les marques, l’autorisation et l’usage de la marque NORMOSANG en Espagne pendant plus de dix ans établiraient incontestablement que sa coexistence avec la marque NORMON est le résultat d’une absence de confusion entre elles.

84      Tant l’EUIPO que l’intervenante contestent le bien-fondé de ce grief.

85      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il ne saurait être exclu que la coexistence, sur un marché déterminé, entre deux marques puisse éventuellement contribuer, conjointement à d’autres éléments, à amoindrir le risque de confusion entre ces marques dans l’esprit du public pertinent [arrêts du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, EU:C:2009:503, point 82 ; du 30 juin 2015, La Rioja Alta/OHMI – Aldi Einkauf (VIÑA ALBERDI), T‑489/13, EU:T:2015:446, point 70, et du 6 avril 2017, Policolor/EUIPO – CWS-Lackfabrik Conrad W. Schmidt (Policolor), T‑178/16, non publié, EU:T:2017:264, point 66]. Cependant, afin que la coexistence de deux marques puisse avoir de telles conséquences, certaines conditions doivent être remplies.

86      La coexistence entre deux marques au sens de la jurisprudence précitée doit être fondée sur l’absence d’un risque de confusion dans l’esprit du public concerné, ce qui implique que ce dernier a conscience du fait que les marques appartiennent à des entreprises différentes [conclusions de l’avocat général Mazák dans l’affaire Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, EU:C:2009:49, point 29 ; voir également, dans le cadre de l’appréciation de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), arrêt du 22 septembre 2011, Budějovický Budvar, C‑482/09, EU:C:2011:605, point 81 ; ordonnance du 13 janvier 2015, Asos/OHMI, C‑320/14 P, non publiée, EU:C:2015:6, point 20 ; arrêts du 11 mai 2005, Grupo Sada/OHMI – Sadia (GRUPO SADA), T‑31/03, EU:T:2005:169, point 86, et du 14 novembre 2007, Castell del Remei/OHMI – Bodegas Roda (CASTELL DEL REMEI ODA), T‑101/06, non publié, EU:T:2007:340, point 76].

87      Tout argument tiré d’une coexistence implique au préalable la démonstration, notamment, de l’usage effectif de la marque dont la requérante se prévaut sur le territoire pertinent, à savoir celui où la marque antérieure est protégée (voir arrêts du 30 juin 2015, VIÑA ALBERDI, T‑489/13, EU:T:2015:446, point 81 et jurisprudence citée, et du 6 avril 2017, Policolor, T‑178/16, non publié, EU:T:2017:264, point 67 et jurisprudence citée).

88      Ladite coexistence doit également être paisible. Ainsi, l’existence d’un contentieux entre les titulaires des marques antérieures empêche que la coexistence soit retenue (voir arrêt du 30 juin 2015, VIÑA ALBERDI, T‑489/13, EU:T:2015:446, point 82 et jurisprudence citée). Toutefois, la seule absence de réaction du titulaire d’une marque antérieure à l’utilisation par un tiers d’une marque identique ou similaire, laquelle fait ensuite l’objet d’une demande d’enregistrement en tant que marque de l’Union par ce tiers, ne permet pas, en tant que telle, dans le cadre d’une procédure d’opposition, de conclure à l’absence de risque de confusion entre ces marques (arrêt du 14 novembre 2007, CASTELL DEL REMEI ODA, T‑101/06, non publié, EU:T:2007:340, point 78).

89      La coexistence entre deux marques doit être démontrée par le titulaire ou le demandeur de la marque contestée, au cours de la procédure concernant les motifs relatifs de refus devant l’EUIPO, qui peut, dans le cadre de la démonstration du fait que cette coexistence repose sur l’absence d’un risque de confusion, avancer un faisceau d’indices en ce sens. À cet égard, sont particulièrement pertinents les éléments attestant de la connaissance de chacune des marques en cause par le public pertinent avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée (voir arrêt du 30 juin 2015, VIÑA ALBERDI, T‑489/13, EU:T:2015:446, point 80 et jurisprudence citée).

90      C’est en application de ces principes qu’il y a lieu de répondre au présent grief.

91      Ainsi que l’admet l’EUIPO, la chambre de recours a commis une erreur en exigeant de la requérante qu’elle fournisse les preuves de la coexistence paisible dont elle se prévalait sur l’ensemble du territoire de l’Union. Dans la mesure où elle a précisé au point 39 de la décision attaquée que le territoire pertinent est l’Espagne, puisque la marque antérieure était espagnole, c’était sur ce même territoire que les conditions relatives à cette coexistence devaient être examinées.

92      Néanmoins, cette erreur n’est pas de nature à entraîner l’annulation de la décision attaquée.

93      En effet, la chambre de recours a rejeté l’argument tiré de la coexistence des marques également au motif que la requérante n’a pas démontré que les marques en cause coexistaient sur le marché sans qu’il existe de risque de confusion entre elles.

94      Or, les éléments de preuve fournis par la requérante ne permettaient aucunement de confirmer son allégation sur l’absence de risque de confusion entre les deux marques sur le territoire espagnol.

95      À cet égard, premièrement, il y a lieu de relever que seules les pièces nos 16 à 18 en annexe A 7 à la requête présentaient un lien avec le territoire espagnol.

96      Deuxièmement, l’ensemble des éléments de preuve présentés dans cette annexe ne portait que sur les caractéristiques du produit en question et sur son usage, sur les pays où il est vendu ainsi que sur les volumes de ses ventes en Espagne entre 2003 et 2014, mais ne concernait pas la façon dont le public pertinent avait été mis en présence des marques en conflit sur le marché et, en particulier, ne démontrait pas que ce public connaissait les deux marques en question et qu’il avait conscience qu’elles appartenaient à des entreprises différentes.

97      Troisièmement, les volumes de ventes, dont la requérante n’a pas prouvé qu’ils excèdent au total 10 000 euros par an, doivent être considérés comme très faibles à l’échelle d’un État membre comme l’Espagne. Il en est d’autant plus ainsi que ce produit a été vendu, conformément aux factures présentées, à un prix variant de 1 631 à 2 121 euros par unité et que les ventes annuelles dudit produit en Espagne n’excédaient donc pas cinq unités. Ces circonstances accréditent l’affirmation de l’intervenante selon laquelle elle n’était même pas consciente de l’existence de produits portant cette marque, si bien qu’il ne saurait, en tout état de cause, être conclu à une coexistence paisible.

98      Par ailleurs, l’argument de la requérante selon lequel la délivrance des autorisations de mise sur le marché du produit vendu par elle témoignerait de l’absence de confusion entre les marques en conflit et donc d’une coexistence paisible au sens de la jurisprudence ne saurait prospérer. En effet, d’une part, les autorités compétentes en la matière ne relèvent pas du public concerné, qui est composé de professionnels de santé, c’est-à-dire de ceux qui prescrivent ou administrent le médicament en question, de même que de patients. D’autre part, l’EUIPO soutient à bon droit que ces autorisations sont étrangères à l’évaluation du risque de confusion dans le cadre de l’application du règlement no 207/2009 [voir, en ce sens, arrêt du 22 septembre 2005, Alcon/OHMI – Biofarma (TRAVATAN), T‑130/03, EU:T:2005:337, point 79].

99      Il résulte de tout ce qui précède que le sixième grief doit être rejeté, si bien qu’il y a lieu de rejeter le second moyen et le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

100    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

101    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’EUIPO et par l’intervenante, conformément à leurs conclusions.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Recordati Orphan Drugs est condamnée aux dépens.

Kanninen

Schwarcz

Iliopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 mars 2018.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.