Language of document : ECLI:EU:T:2017:499

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

14 juillet 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque figurative CERTIFIED AUSTRALIAN ANGUS BEEF – Marques figurative et verbale antérieures notoirement connues SINCE 1978 CERTIFIED ANGUS BEEF BRAND et CERTIFIED ANGUS BEEF BRAND – Motif relatif de refus – Absence de similitude entre les signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑55/15,

Certified Angus Beef LLC, établie à Wooster, Ohio (États-Unis), représentée par M. C. Aikens, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. M. Fischer et Mme A. Söder, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Certified Australian Angus Beef Pty Ltd, établie à Surrey Hills (Australie),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’EUIPO du 30 octobre 2014 (affaire R 662/2014-4), relative à une procédure d’opposition entre Certified Angus Beef et Certified Australian Angus Beef,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. M. Prek, président, E. Buttigieg et B. Berke (rapporteur), juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 3 février 2015,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 22 juin 2015,

à la suite de l’audience du 7 décembre 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 28 juin 2011, Certified Australian Angus Beef Pty Ltd, a obtenu un enregistrement international désignant l’Union européenne en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 29, 30 et 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 29 : « Viande, extraits de viande, viande conservée, produits à base de viande transformés, saucisses, produits à base de viande précuits compris dans cette classe, produits congelés à base de viande et tout autre produit à base de viande et produit contenant de la viande compris dans cette classe ; tous les produits précités étant dérivés de viande de bœuf Angus » ;

–        classe 30 : « Tourtes, produits à base de pâte, feuilletés, boulettes de pâte, hot-dogs, pâtisseries, friands, biscuits salés, sandwiches, hamburgers, petits pains, tous les produits précités, y compris ceux contenant de la viande ; préparations à base de pain ou pâte à gâteau ; sauces (condiments) ; épices ; jus de viande » ;

–        classe 43 : « Restauration (alimentation) ; restauration ; cafés-restaurants ; services de traiteurs ; restauration (alimentation) en tant que partie de services d’accueil ». 

4        Le 10 août 2012, la requérante, Certified Angus Beef LLC, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée, notamment, sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque figurative, en tant qu’elle est notoirement connue dans tous les États membres de l’Union européenne au sens de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009, notamment pour les produits et les services relevant des classes 29, 30 et 43 couverts par la marque demandée et pour des « services de certification, [des] services de concession de licences et [des] services de contrôle de qualité dans le domaine des produits à base de viande et de viande de bœuf », reproduite ci-après :

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–        la marque verbale CERTIFIED ANGUS BEEF BRAND, en tant qu’elle est notoirement connue dans tous les États membres de l’Union au sens de l’article 8, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 207/2009, notamment pour les produits et les services relevant des classes 29, 30 et 43 couverts par la marque demandée et pour des « services de certification, [des] services de concession de licences et [des] services de contrôle de qualité dans le domaine des produits à base de viande et de viande de bœuf ».

6        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à :

–        l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 2, sous a) du même règlement ;

–        l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 2, sous c) du même règlement ;

–        l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009 ;

–        l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

7        Le 10 février 2014, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

8        Le 5 mars 2014, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

9        Par décision du 30 octobre 2014 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’EUIPO a confirmé la décision de la division d’opposition.

10      Elle a considéré, en substance, que les signes en conflit ne pouvaient pas être considérés comme similaires, excluant ainsi l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        faire droit à l’opposition ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

12      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

14      La requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû examiner, au stade de la comparaison des signes, le caractère distinctif que ses marques visées au point 5 ci-dessus avaient acquis grâce au crédit dont elles jouiraient en raison de leur notoriété. En outre, elle soutient que la chambre de recours n’était pas en droit de conclure que les marques en conflit ne coïncidaient visuellement et verbalement que par des éléments non distinctifs, dès lors qu’elle aurait dû envisager la possibilité que l’élément verbal « certified angus beef » ait acquis un caractère distinctif grâce au crédit dont les marques antérieures jouissent auprès du public du fait de leur notoriété au Royaume-Uni à l’égard des produits relevant de la classe 29, à savoir de la « viande dérivée du bœuf Angus ». Selon la requérante, comme la division d’opposition a reconnu cette notoriété pour la marque figurative antérieure, la chambre de recours aurait dû reconnaître également que la marque figurative et la marque verbale antérieures bénéficiaient d’une notoriété dans cet État, mais aussi que les deux marques bénéficiaient d’une notoriété dans d’autres États membres.

15      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

16      En vertu de l’article 156, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, tout enregistrement international désignant l’Union européenne est soumis à la même procédure d’opposition que les demandes de marque de l’Union européenne publiées.

17      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous c) du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques qui, à la date de dépôt de la demande, sont notoirement connues dans un État membre au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle, du 20 mars 1883, telle que révisée et modifiée.

18      En vertu d’une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

19      Dès lors que l’argumentation de la requérante s’appuie exclusivement sur les marques figurative et verbale non enregistrées antérieures, visées au point 5 ci-dessus, qu’elle présente comme notoirement connues au Royaume‑Uni et dans d’autres États membres, il y a lieu de considérer que seules les parties de la décision attaquée concernant le caractère distinctif de ces marques et des éléments les composant sont contestées.

20      En premier lieu, la requérante avance que la chambre de recours aurait dû tenir compte, au stade de la comparaison des signes, de la circonstance que l’élément verbal « certified angus beef » présent dans lesdites marques antérieures avait acquis un caractère distinctif en raison de la notoriété de ces dernières. Selon la requérante, en omettant d’envisager cette possibilité, la chambre de recours a conclu erronément à la dissimilitude des marques en conflit, au motif qu’elles ne coïncidaient que par certains éléments qui étaient entièrement dépourvus de caractère distinctif.

21      À cet égard, la chambre de recours a considéré que, si la marque figurative antérieure présentait un quelconque caractère distinctif, celui-ci résidait non dans un élément individuel en tant que tel, mais dans l’impression d’ensemble produite par cette marque. En outre, elle a considéré que la marque verbale antérieure ne coïncidait avec la marque demandée que par des éléments descriptifs ou non distinctifs.

22      Or, il y a lieu de différencier le caractère distinctif d’une marque antérieure et le caractère distinctif de ses éléments. Lorsqu’une marque dispose d’un caractère distinctif, celui-ci doit être attribué à la marque dans son ensemble et non automatiquement à tous les éléments la composant [voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2014, Max Mara Fashion Group/OHMI – Mackays Stores (M & Co.), T‑272/13, non publié, EU:T:2014:1020, point 61]. Par conséquent, l’argument de la requérante, tiré du fait que l’élément verbal « certified angus beef » aurait acquis un caractère distinctif en raison de la prétendue notoriété des marques antérieures, ne saurait prospérer.

23      En second lieu, la requérante fait valoir que les marques antérieures ont acquis un caractère distinctif en raison de leur notoriété et que, par conséquent, l’impression d’ensemble produite par les marques en cause est hautement similaire.

24      Toutefois, dès lors que la chambre de recours a constaté que les marques en cause sont globalement différentes, tout risque de confusion est exclu et l’existence éventuelle d’un caractère distinctif tiré de l’usage des marques antérieures ne peut compenser l’absence de similitude des marques en conflit.

25      En effet, si la notoriété ou la renommée d’une marque doivent être prises en compte pour apprécier si la similitude entre les signes ou entre les produits et les services est suffisante pour susciter un risque de confusion, elles sont privées de toute incidence sur l’appréciation du risque de confusion lorsque les signes en cause sont globalement différents [voir arrêt du 16 janvier 2008, Inter-Ikea/OHMI – Waibel (idea), T‑112/06, non publié, EU:T:2008:10, point 84 et jurisprudence citée].

26      Par conséquent, il ne saurait être utilement reproché à la chambre de recours de ne pas avoir examiné le caractère distinctif prétendument acquis par l’usage des marques antérieures avant ou en même temps qu’elle a apprécié la similitude entre les signes en cause.

27      Dès lors que la chambre de recours n’a pas constaté que les éléments communs aux marques en cause, dont l’élément verbal « certified angus beef », avaient un caractère distinctif, même faible, et que la requérante ne remet pas valablement en cause cette conclusion, les arguments de cette dernière tirés de ce que la chambre de recours aurait dû examiner si les autres éléments composant les marques en cause avaient un caractère distinctif inférieur et si l’impression d’ensemble produite par ces marques était hautement similaire, sont dénués de pertinence.

28      Dans ces conditions, les arguments de la requérante selon lesquels la chambre de recours aurait dû déduire de la décision de la division d’opposition constatant la notoriété de la marque figurative antérieure au Royaume‑Uni que cette marque aurait acquis, du fait de cette notoriété, un caractère distinctif dans cet État, mais aussi dans d’autres États membres, de même que l’argument selon lequel la chambre de recours aurait dû apprécier les éléments de preuve produits par la requérante pour démontrer que la marque verbale antérieure était également notoirement connue, sont inopérants.

29      Il ne saurait donc être reproché à la chambre de recours de ne pas avoir pris en compte les conclusions de la division d’opposition relatives à la notoriété de la marque figurative antérieure.

30      Dès lors que la requérante ne conteste pas les conclusions de la chambre de recours relatives à la dissemblance des marques en cause autrement qu’en alléguant que les marques antérieures, ainsi que l’élément « certified angus beef », auraient acquis un caractère distinctif du fait de la notoriété de ces marques, ses arguments relatifs à la comparaison des signes, à l’éventuel caractère identique des produits et à l’existence d’un risque de confusion sont également inopérants.

31      Par conséquent, il n’est pas nécessaire d’analyser l’éventuelle similitude entre les produits et le risque éventuel de confusion, dès lors que la similitude des marques en conflit fait défaut.

32      Le moyen soulevé par la requérante au soutien de ses conclusions en annulation et en réformation n’est donc pas fondé et il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

33      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

34      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Certified Angus Beef LLC est condamnée aux dépens.

Prek

Buttigieg

Berke

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juillet 2017.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.