Language of document : ECLI:EU:T:2011:288

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

16 juin 2011(*)

« Concurrence – Ententes – Marché des services de déménagements internationaux en Belgique – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE – Fixation des prix – Répartition du marché – Manipulation des appels d’offres – Infraction unique et continue – Charge de la preuve »

Dans l’affaire T‑210/08,

Verhuizingen Coppens NV, établie à Bierbeek (Belgique), représentée par Mes J. Stuyck et I. Buelens, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. A. Bouquet et S. Noë, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2008) 926 final de la Commission, du 11 mars 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/38.543 – Services de déménagements internationaux), ainsi que, à titre subsidiaire, une demande d’annulation ou de réduction de l’amende infligée à la requérante,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas, faisant fonction de président, N. Wahl et A. Dittrich (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 mai 2010,

rend le présent

Arrêt

 Faits

 Objet du litige

1        Aux termes de la décision C (2008) 926 final de la Commission, du 11 mars 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/38.543 – Services de déménagements internationaux) (ci-après la « Décision »), dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 11 août 2009 (JO C 188, p. 16), la requérante, Verhuizingen Coppens NV, a participé à une entente sur le marché des services de déménagements internationaux en Belgique, portant sur la fixation, directe et indirecte, des prix, sur la répartition du marché et sur la manipulation de la procédure faisant appel à la soumission d’offres. La Commission des Communautés européennes expose que l’entente a fonctionné pendant près de 19 ans (d’octobre 1984 à septembre 2003). Ses membres auraient fixé les prix, présenté de faux devis (dits « devis de complaisance », ci-après les « DDC ») aux clients et se seraient dédommagés entre eux pour les offres rejetées par le biais d’un système de compensations financières (ci-après les « commissions »).

 Requérante

2        Le prédécesseur de la requérante a été créé il y a environ 30 ans par M. Coppens. Cette société a été l’objet d’un apport en nature au capital de Verhuizingen Coppens (ci-après « Coppens ») lors de la constitution de celle-ci en mai 1998. Selon la Décision, M. Coppens prend toutes les décisions concernant la société. Avant mai 1998, il le faisait en tant que propriétaire unique et depuis mai 1998 il le fait en tant qu’administrateur délégué. Au cours de l’exercice clos au 31 décembre 2006, Coppens a réalisé un chiffre d’affaires mondial consolidé de 1 046 318 euros.

 Procédure administrative

3        Selon la Décision, la Commission a ouvert la procédure de sa propre initiative, car elle disposait d’informations indiquant que certaines sociétés belges actives dans le secteur des déménagements internationaux participaient à des accords susceptibles de tomber sous le coup de l’interdiction prévue à l’article 81 CE.

4        Ainsi, sur la base de l’article 14, paragraphe 3, du règlement nº 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 13, p. 204), des vérifications ont été effectuées chez Allied Arthur Pierre NV, Interdean NV, Transworld International NV et Ziegler SA en septembre 2003. À la suite de ces vérifications, Allied Arthur Pierre a introduit une demande d’immunité ou de réduction de l’amende conformément à la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3). Allied Arthur Pierre a admis sa participation aux accords sur les commissions et sur les DDC, énuméré les concurrents impliqués, notamment un concurrent inconnu précédemment des services de la Commission, et remis des documents corroborant ses déclarations orales.

5        En application de l’article 18 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1), plusieurs demandes écrites de renseignements ont été adressées aux entreprises impliquées dans les accords anticoncurrentiels, à des concurrents ainsi qu’à une organisation professionnelle. Le 18 octobre 2006, la communication des griefs a été adoptée et notifiée à plusieurs sociétés. Tous les destinataires y ont répondu. Leurs représentants, à l’exception de ceux d’Amertranseuro International Holdings Ltd, de Stichting Administratiekantoor Portielje, de Team Relocations Ltd et de Trans Euro Ltd, ont fait valoir leur droit d’accès aux documents contenus dans le dossier de la Commission, qui étaient uniquement accessibles dans les locaux de celle-ci. L’accès leur a été donné entre le 6 et le 29 novembre 2006. L’audition s’est tenue le 22 mars 2007.

6        Le 11 mars 2008, la Commission a adopté la Décision.

 Décision

7        La Commission affirme que les destinataires de la Décision, dont la requérante, ont participé à une entente dans le secteur des services de déménagements internationaux en Belgique, ou en sont tenues pour responsables. Les participants à l’entente auraient fixé des prix, se seraient répartis des clients et auraient manipulé la soumission d’offres au moins de 1984 à 2003. De ce fait, ils auraient commis une infraction unique et continue à l’article 81 CE.

8        Selon la Commission, les services concernés comprennent tant le déménagement de biens de personnes physiques, qui sont des particuliers ou des employés d’une entreprise ou d’une institution publique, que le déménagement de biens d’entreprises ou d’institutions publiques. Ces déménagements se caractériseraient par le fait que la Belgique en constitue le point d’origine ou le point de destination. En tenant compte également du fait que les sociétés de déménagements internationaux en cause sont toutes situées en Belgique et que l’activité de l’entente se déroule en Belgique, la Commission a donc considéré que le centre géographique de l’entente était la Belgique.

9        Le chiffre d’affaires cumulé des participants à l’entente pour les services de déménagements internationaux en Belgique a été estimé par la Commission à 41 millions d’euros pour l’année 2002. Comme elle a estimé la taille du secteur à environ 83 millions d’euros, la part de marché cumulée des entreprises impliquées a été fixée à environ 50 %.

10      La Commission expose que l’entente visait notamment à établir et à maintenir des prix élevés et à se répartir le marché de manière concomitante ou successive sous plusieurs formes : des accords sur les prix, des accords sur la répartition du marché moyennant un système de faux devis (les DDC) et des accords sur un système de compensations financières pour des offres rejetées ou des cas d’abstention d’offrir (les commissions).

11      La Commission estime que, entre 1984 et le début des années 90, l’entente a notamment fonctionné sur la base d’accords écrits de fixation des prix. Parallèlement, les commissions et les DDC auraient été introduits. Une commission serait un élément caché du prix final que le consommateur devait payer sans recevoir une prestation équivalente. En effet, elle représenterait une somme d’argent que la société de déménagements ayant obtenu le contrat pour un déménagement international devait aux concurrents qui n’avaient pas obtenu le contrat, que ces derniers aient également présenté une offre ou qu’ils se soient abstenus de le faire. Il s’agirait donc d’une sorte de compensation financière pour les sociétés de déménagements qui n’avaient pas obtenu le contrat. Les membres de l’entente se seraient facturés mutuellement les commissions sur les offres rejetées ou pour lesquelles elles s’étaient abstenues, en faisant état de services fictifs, et le montant de ces commissions aurait été facturé aux clients. La Commission affirme que cette pratique doit être considérée comme une fixation indirecte de prix pour les services de déménagements internationaux en Belgique.

12      Les membres de cette entente auraient également coopéré pour présenter des DDC, qui auraient erronément laissé croire aux clients, c’est-à-dire aux employeurs payant le déménagement, qu’ils pouvaient choisir selon des critères basés sur la concurrence. Un DDC serait un devis factice soumis au client ou à la personne qui déménageait par une société de déménagements qui n’avait pas l’intention d’exécuter le déménagement. Par la soumission de DDC, la société de déménagements qui voulait remporter le contrat (ci-après la « société demandeur ») aurait fait en sorte que l’institution ou l’entreprise reçoive plusieurs devis soit directement, soit indirectement par le biais de la personne qui envisageait de déménager. À cette fin, la société demandeur aurait indiqué à ses concurrents le prix, le taux d’assurance et les frais d’entreposage auxquels ils devaient facturer le service. Ce prix, plus élevé que le prix proposé par la société demandeur, aurait ensuite été indiqué dans les DDC. Selon la Commission, étant donné qu’un employeur choisit normalement la société de déménagements qui offre le prix le plus bas, les sociétés impliquées dans un même déménagement international savaient en principe d’avance laquelle d’entre elles pourrait remporter le contrat pour ce déménagement.

13      En outre, la Commission relève que le prix demandé par la société demandeur pouvait être plus élevé qu’il ne l’aurait été autrement parce que les autres sociétés impliquées dans le même déménagement auraient soumis des DDC dans lesquels figurait un prix indiqué par la société demandeur. À titre d’exemple, la Commission cite, au considérant 233 de la Décision, un courrier électronique interne d’Allied Arthur Pierre en date du 11 juillet 1997, qui indique : « [L]e client a demandé deux [DDC], nous pouvons donc demander un prix élevé. » Dès lors, la Commission fait valoir que la soumission de DDC aux clients était une manipulation de la procédure faisant appel à la soumission d’offres de sorte que les prix indiqués dans toutes les offres auraient été délibérément plus élevés que le prix de la société demandeur, et de toute façon plus élevés qu’ils ne l’auraient été dans un environnement concurrentiel.

14      La Commission soutient que ces arrangements ont été établis jusqu’en 2003. Selon elle, ces activités complexes avaient un même objet de fixer les prix, de répartir le marché et de fausser ainsi la concurrence.

15      En conclusion, la Commission a arrêté le dispositif de la Décision, dont l’article 1er est libellé comme suit :

« Les entreprises suivantes ont enfreint l’article 81, paragraphe 1, [CE] en fixant de façon directe et indirecte des prix pour les services de déménagements internationaux en Belgique, en se répartissant une partie de ce marché et en manipulant la procédure faisant appel à la soumission d’offres durant les périodes indiquées :

[…]

i)      [Coppens], du 13 octobre 1992 au 29 juillet 2003 ;

[…] »

16      Par conséquent, à l’article 2, sous k), de la Décision, la Commission a infligé une amende de 104 000 euros à la requérante.

17      Aux fins de calculer le montant des amendes, la Commission a fait application, dans la Décision, de la méthodologie exposée dans ses lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices de 2006 »).

 Procédure et conclusions des parties

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 juin 2008, la requérante a introduit le présent recours.

19      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience qui s’est tenue le 5 mai 2010.

20      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’article 1er de la Décision dans le volet qui lui est propre ;

–        annuler l’article 2 de la Décision dans le volet qui lui est propre ;

–        à titre subsidiaire, réduire substantiellement l’amende à fixer à un montant maximal de 10 % de son chiffre d’affaires sur le marché des services de déménagements internationaux ;

–        en tout état de cause, condamner la Commission aux dépens.

21      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

22      La requérante soulève deux moyens principaux et un moyen subsidiaire tendant à la suppression ou à la réduction de l’amende.

23      Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 81, paragraphe 1, CE.

24      Ce moyen s’articule en trois branches. En premier lieu, la requérante conteste, en invoquant son rôle réduit, la constatation selon laquelle elle a participé à une entente complexe. En deuxième lieu, elle remet en cause la détermination de la durée de sa participation à l’entente. En troisième lieu, elle fait grief à la Commission d’avoir omis d’apprécier le poids relatif de sa participation.

 Arguments des parties

25      S’agissant de la première branche du moyen, la requérante souligne qu’elle se voit uniquement reprocher l’établissement de DDC. La Commission constaterait expressément, au considérant 296 de la Décision, que Coppens est la seule entreprise à ne pas avoir participé à l’accord sur les commissions. La Commission n’aurait pas non plus démontré que la requérante avait connaissance de ce dernier accord. Par conséquent, la conclusion tirée par la Commission au considérant 345 de la Décision, selon laquelle la requérante aurait participé à l’ensemble des comportements en cause, serait inexacte. En outre, la requérante fait valoir que les accords relatifs aux DDC n’ont pas en soi un objet ou effet restrictif de concurrence. En effet, il serait impossible à la requérante de connaître tous ses concurrents auxquels le client pouvait demander un devis, de sorte que la requérante ne serait pas en mesure de savoir si elle pouvait facturer des prix plus élevés. Ainsi, le déménagement aurait effectivement été réalisé par la requérante dans seulement environ 23 % des cas où elle a demandé des DDC à d’autres membres de l’entente.

26      Dans la réplique, la requérante invoque également les arrêts de la Cour du 30 juin 1966, LTM (56/65, Rec. p. 337), du 9 juillet 1969, Völk (5/69, Rec. p. 295), et du 28 février 1991, Delimitis (C‑234/89, Rec. p. I‑935), afin de remettre en cause l’applicabilité de l’article 81 CE.

27      La Commission soutient qu’il importe peu que la concurrence soit faussée par des DDC ou par des commissions, car il s’agit dans les deux cas d’une distorsion de la concurrence qui entraîne généralement une augmentation des prix pour le client. Cela signifierait que les diverses formes de l’entente pourraient être considérées comme une violation unique et continue de l’article 81 CE. La Commission signale que la requérante ne nie pas qu’elle connaissait l’existence de l’accord sur les commissions. L’infraction constatée en l’espèce ne tomberait pas sous le coup de la règle de minimis, car les participants occuperaient une position cumulée très importante sur le marché des déménagements internationaux.

 Appréciation du Tribunal

28      En ce qui concerne la première branche du moyen, il est constant que la participation active de la requérante à l’entente se limitait à l’établissement de DDC (voir considérants 173 et 296 de la Décision). En effet, selon les constatations de la Commission, Coppens est la seule entreprise à ne pas avoir participé à l’accord sur les commissions.

29      La requérante conteste cependant avoir participé à une infraction unique et continue. À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, une entreprise ayant participé à une infraction multiforme aux règles de la concurrence par des comportements qui lui sont propres, qui relèvent des notions d’accord ou de pratique concertée ayant un objet anticoncurrentiel au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE et qui visent à contribuer à la réalisation de l’infraction dans son ensemble, peut être également responsable des comportements mis en œuvre par d’autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction, lorsqu’il est établi que l’entreprise en question connaît les comportements infractionnels des autres participants, ou qu’elle peut raisonnablement les prévoir et qu’elle est prête à en accepter le risque (arrêt de la Cour du 8 juillet 1999, Commission/Anic Partecipazioni, C‑49/92 P, Rec. p. I‑4125, points 87 et 203). Ainsi, afin de tenir une entreprise pour responsable d’une infraction unique et continue, la connaissance (prouvée ou présumée) des comportements infractionnels des autres participants à l’infraction est requise.

30      En outre, il y a lieu de relever que la seule identité d’objet entre un accord auquel a participé une entreprise et une entente globale ne suffit pas pour imputer à cette entreprise la participation à l’entente globale. En effet, ce n’est que si l’entreprise, lorsqu’elle participe à cet accord, a su ou aurait dû savoir que, ce faisant, elle s’intégrait dans l’entente globale que sa participation à l’accord concerné peut constituer l’expression de son adhésion à cette entente globale (arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, Sigma Tecnologie/Commission, T‑28/99, Rec. p. II‑1845, point 45).

31      Or, force est de constater que la Commission n’a pas démontré que la requérante, lors de sa participation à l’accord sur les DDC, avait connaissance des activités anticoncurrentielles des autres entreprises concernant les commissions, ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir. En effet, la Commission concède explicitement que, en ce qui concerne la connaissance par la requérante des comportements infractionnels des autres participants, la Décision ne repose pas sur des éléments de preuve spécifiques. Elle fait valoir que la requérante ne nie pas avoir eu connaissance de l’accord sur les commissions et avoir omis d’indiquer dans quelle mesure elle était informée du comportement des autres participants à l’infraction. Cependant, la requérante n’est nullement tenue d’indiquer, de sa propre initiative, dans quelle mesure elle était informée du comportement des autres participants à l’infraction, puisque la charge de la preuve incombe à la Commission. Celle-ci doit tout d’abord produire la preuve d’un fait avant que la requérante ne puisse le contester. Au demeurant, lors de l’audience, la requérante a, sur demande du Tribunal, explicitement souligné qu’elle n’avait pas connaissance des accords sur les commissions. Dès lors, la Commission n’a pas satisfait à la charge de la preuve.

32      Dans ces conditions, la Commission ne pouvait considérer que la requérante avait participé à une infraction unique et continue.

33      S’agissant des conséquences devant être tirées de cette conclusion, il y a lieu de relever que le fait que le dispositif de la Décision ne mentionne pas le caractère unique et continu de l’infraction est sans pertinence. En effet, il convient de relever, premièrement, que la pratique décisionnelle de la Commission n’est pas uniforme à cet égard. Tandis que la Commission a explicitement constaté le caractère unique et continu de l’infraction dans le dispositif de certaines de ses décisions [voir, par exemple, l’article 1er de la décision C (2006) 4180 de la Commission, du 20 septembre 2006, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/F-1/38.121 ? Raccords), dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 27 octobre 2007 (JO L 283, p. 63), elle ne l’a pas fait dans d’autres décisions, telles que la Décision. Or, la portée de l’annulation ne saurait dépendre du choix de la Commission d’inclure ou non cette constatation dans le dispositif de la Décision.

34      Deuxièmement, il y a lieu de rappeler que le dispositif d’un acte est indissociable de sa motivation, de sorte qu’il doit être interprété, si besoin est, en tenant compte des motifs qui ont conduit à son adoption (voir ordonnance du Tribunal du 30 avril 2007, EnBW Energie Baden-Württemberg/Commission, T‑387/04, Rec. p. II‑1195, point 127, et la jurisprudence citée). S’il est vrai que seul le dispositif d’une décision est susceptible de produire des effets juridiques, il n’en reste pas moins que les appréciations formulées dans les motifs d’une décision peuvent être soumises au contrôle de légalité du juge de l’Union dans la mesure où, en tant que motifs d’un acte faisant grief, elles constituent le support nécessaire du dispositif de cet acte ou si ces motifs sont susceptibles de modifier la substance de ce qui a été décidé dans le dispositif de l’acte en cause (voir arrêt du Tribunal du 1er juillet 2009, KG Holding e.a./Commission, T‑81/07 à T‑83/07, Rec. p. II‑2411, point 46, et la jurisprudence citée).

35      Or, il ressort clairement des motifs de la Décision, et notamment de ses considérants 307 et 345, que la Commission tient la requérante pour responsable pour sa prétendue participation à une infraction unique et continue. En outre, le fait que, nonobstant la participation limitée de la requérante, la Commission a retenu, pour prendre en compte la gravité de l’infraction à laquelle la requérante a participé, un taux de 17 % de la valeur des ventes, à savoir le taux unique appliqué à toutes les entreprises en cause, ne saurait être expliqué que par le fait qu’elle la considère comme ayant participé à une infraction unique et continue. Enfin, ce caractère de l’infraction semble avoir également influé sur l’appréciation de la durée de la participation à l’infraction (voir considérant 380 de la Décision et arrêt du Tribunal de ce jour, Gosselin/Commission, T‑208/08, non encore publié au Recueil, point 167).

36      Dès lors, bien que la participation au système des DDC puisse en soi constituer une infraction à l’article 81 CE susceptible d’être sanctionnée par une amende, il y a lieu, comme le demande la requérante, d’annuler l’article 1er, sous i), et l’article 2, sous k), de la Décision.

37      Compte tenu de ce qui précède, il n’y a plus lieu d’examiner ni les autres branches du présent moyen ni les autres moyens invoqués par la requérante.

 Sur les dépens

38      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      L’article 1er, sous i), et l’article 2, sous k), de la décision C (2008) 926 final de la Commission, du 11 mars 2008, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (Affaire COMP/38.543 – Services de déménagements internationaux), sont annulés.

2)      La Commission européenne est condamnée aux dépens.

Papasavvas

Wahl

Dittrich

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 juin 2011.

Signatures


* Langue de procédure : le néerlandais.