Language of document : ECLI:EU:C:2017:227

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DE LA COUR

16 mars 2017 (*)

« Procédure accélérée »

Dans l’affaire C‑70/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne), par décision du 8 février 2017, parvenue à la Cour le 9 février 2017, dans la procédure

Abanca Corporación Bancaria SA, anciennement NCG Banco SA,

contre

Alberto García Salamanca Santos,

LE PRÉSIDENT DE LA COUR,

le juge rapporteur, M. S. Rodin, et l’avocat général, M. M. Szpunar, entendus,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29), et notamment de son article 6, paragraphe 1.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Abanca Corporación Bancaria SA à M. Alberto García Salamanca Santos au sujet de l’existence alléguée de clauses abusives dans un contrat de prêt.

3        Il ressort de la décision de renvoi que, le 30 mai 2008, NCG Banco SA, devenue Abanca Corporación Bancaria, a accordé à M. García Salamanca Santos et à Mme Varela Pena un prêt assorti d’une garantie hypothécaire portant sur leur logement. Ce prêt, d’un montant de 100 000 euros et consenti pour une durée de 30 années, était remboursable en 360 mensualités.

4        La clause 6 bis du contrat de prêt portait sur la déchéance du terme et prévoyait, parmi d’autres hypothèses, que, en cas de défaut de paiement d’une mensualité, Abanca Corporación Bancaria pourrait, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une mise en demeure préalable, considérer le contrat comme étant échu et demander le paiement de la totalité du capital restant dû, des intérêts ordinaires et moratoires ainsi que de frais divers.

5        M. García Salamanca Santos a engagé une procédure visant à ce que soit constaté le caractère abusif de plusieurs clauses du contrat de prêt, parmi lesquelles la clause 6 bis. La juridiction de première instance a fait droit à cette demande par une décision qui a été confirmée en appel. Saisie en cassation par Abanca Corporación Bancaria, la juridiction de renvoi s’interroge sur la portée et les effets de la constatation du caractère abusif d’une clause incluse dans un contrat de prêt hypothécaire.

6        C’est dans ce contexte que le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) a décidé de surseoir à statuer et de saisir la Cour à titre préjudiciel. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, dans le cas où une clause permet d’exiger l’échéance anticipée d’un contrat de prêt hypothécaire, notamment en cas de défaut de paiement d’une mensualité, une juridiction nationale est en mesure de constater le caractère abusif exclusivement de ce motif d’échéance et, dès lors, de maintenir la validité de cette clause contractuelle en ce qui concerne les autres motifs d’échéance anticipée qu’elle prévoit.

7        Par sa seconde question, la juridiction de renvoi cherche à savoir si la directive 93/13 autorise une juridiction nationale ayant constaté le caractère abusif d’une clause à appliquer subsidiairement une règle de droit national, même s’il doit en résulter la poursuite de la procédure spéciale d’exécution hypothécaire, dans la mesure où il s’agit d’une solution plus favorable aux intérêts du consommateur que celle consistant à prononcer le non-lieu à l’exécution fondée sur la procédure spéciale, notamment en ce que la procédure spéciale d’exécution hypothécaire, contrairement à la procédure d’exécution ordinaire, prévoit des règles de protection du consommateur.

8        Ladite juridiction a également demandé à la Cour de soumettre la présente affaire à une procédure accélérée en application de l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure de celle-ci.

9        Il résulte de cette disposition que, à la demande de la juridiction de renvoi ou, à titre exceptionnel, d’office, le président de la Cour peut, lorsque la nature de l’affaire exige son traitement dans de brefs délais, le juge rapporteur et l’avocat général entendus, décider de soumettre un renvoi préjudiciel à une procédure accélérée dérogeant aux dispositions dudit règlement de procédure.

10      À l’appui de sa demande visant à soumettre la présente affaire à la procédure accélérée, la juridiction de renvoi invoque le grand nombre de consommateurs affectés par des litiges similaires mettant en cause le droit au logement et les garanties relatives aux procédures d’exécution portant sur des logements, ainsi que l’incertitude juridique découlant du fait que des doutes subsistent quant à la compatibilité, avec le droit de l’Union, de la jurisprudence de la juridiction de renvoi qui, en tant que cour suprême, établit des critères que les juridictions inférieures sont tenues de suivre.

11      Il y a lieu de constater, à cet égard, que les circonstances invoquées par la juridiction de renvoi dans le cadre de la présente affaire ne sont pas de nature à satisfaire aux conditions définies à l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure.

12      En effet, s’agissant du nombre d’affaires susceptibles de dépendre du dénouement des affaires au principal, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, le nombre important de personnes ou de situations juridiques potentiellement concernées par la décision qu’une juridiction de renvoi doit rendre après avoir saisi la Cour à titre préjudiciel n’est pas susceptible, en tant que tel, de constituer une circonstance exceptionnelle de nature à justifier le recours à une procédure accélérée (ordonnances du président de la Cour du 21 septembre 2006, KÖGÁZ e.a., C‑283/06 et C‑312/06, non publiée, EU:C:2006:602, point 9 ; du 11 novembre 2014, Banco Primus, C‑421/14, non publiée, EU:C:2014:2367, point 10 ; du 12 février 2015, Fernández Oliva e.a., C‑568/14 à C‑570/14, non publiée, EU:C:2015:100, point 18, ainsi que du 14 août 2015, Palacios Martínez et Banco Popular Español, C‑307/15 et C‑308/15, non publiée, EU:C:2015:598, point 13).

13      En outre, il est également de jurisprudence constante de la Cour que de simples intérêts économiques, pour importants et légitimes qu’ils soient, ne sont pas non plus de nature à justifier à eux seuls le recours à une procédure accélérée (voir, en ce sens, ordonnances du président de la Cour du 10 avril 2013, Kásler et Káslerné Rábai, C‑26/13, non publiée, EU:C:2013:218, point 14 ; du 7 octobre 2013, Rabal Cañas, C‑392/13, non publiée, EU:C:2013:877, point 16 ; du 31 mars 2014, Indėlių ir investicijų draudimas et Nemaniūnas, C‑671/13, non publiée, EU:C:2014:225, point 11, ainsi que du 14 août 2015, Palacios Martínez et Banco Popular Español, C‑307/15 et C‑308/15, non publiée, EU:C:2015:598, point 14).

14      Enfin, l’incertitude juridique affectant les parties dans l’affaire au principal, ainsi que celles qui sont parties à des litiges similaires, n’est pas susceptible de constituer une circonstance exceptionnelle de nature à justifier le recours à une procédure accélérée (voir, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 5 octobre 2012, Abdullahi, C‑394/12, non publiée, EU:C:2012:623, point 14 et jurisprudence citée). Il en va de même de leur intérêt légitime à connaître le plus rapidement possible la portée des droits qu’elles tirent du droit de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 8 septembre 2011, O. e.a., C‑356/11 et C‑357/11, non publiée, EU:C:2011:566, point 14 ainsi que jurisprudence citée).

15      Il résulte de ce qui précède que la demande de la juridiction de renvoi tendant à ce que la présente affaire soit soumise à une procédure accélérée ne saurait être accueillie.

Par ces motifs, le président de la Cour ordonne :

La demande du Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) tendant à ce que l’affaire C70/17 soit soumise à la procédure accélérée prévue à l’article 105, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour est rejetée.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.